Débats de l'Assemblée législative (débats reconstitués)
Version finale
25th Legislature, 1st Session
(November 14, 1956 au February 21, 1957)
Tuesday, February 19, 1957
Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.
Première séance du mardi 19 février 1957
Présidence de l’honorable M. Tellier
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière.
M. l’Orateur: À l’ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Projets de loi:
Collège des chiropraticiens
M. Boudreau (Saint-Sauveur) propose, du consentement unanime, que le bill 142 constituant en corporation le Collège des chiropraticiens du Québec ayant été retiré, les droits ordinaires que les promoteurs de ce bill ont payés leur soient remboursés, après déduction de tous frais d’impression et de traduction.
Adopté.
Dépôt de documents:
Ministère des Terres et Forêts,
Rapport 1955-1956
L’honorable M. Bourque (Sherbrooke) dépose sur le bureau de la Chambre le rapport du ministre des Terres et Forêts de la province de Québec pour l'année finissant le 31 mars 1956. (Document de la session no 40)
Projets de loi:
Loi des véhicules automobiles
L’honorable M. Rivard (Montmagny) propose, du consentement unanime, que le bill 52 modifiant la loi des véhicules automobiles soit maintenant lu une deuxième fois.
On veut, par cette disposition de la loi, empêcher un véhicule d’aveugler le conducteur du véhicule qui suit1. Ces indicateurs de direction mécaniques ou lumineux devront être de types approuvéspar le sous-ministre des Transports et des Communications. Il s’agit d’une importante expérience. Si elle est concluante, on pourra l’étendre aux signaux lumineux d’arrêt. La signalisation manuelle reste toujours évidemment acceptée et valide.
M. Hamel (Saint-Maurice): Dans un sens, on limite la responsabilité du père, mais, par contre, on l’augmente d’une autre façon. Je suis d’accord pour que le père soit responsable des erreurs que peut commettre son enfant, mais non pas de celles que peut commettre la personne majeure compétente à laquelle on passe le véhicule et qui a un accident2.
L’honorable M. Rivard (Montmagny): Je ne crois pas que l’interprétation de la loi puisse aller jusque-là. Tout ce que le texte stipule, c’est qu’en cas d’accident, s’il y a une présomption contre le propriétaire de la voiture, cette présomption n’existera pas seulement contre le mineur, mais contre le père qui a consenti à ce qu’il ait un véhicule. Toutefois, le bill diminue, en fait, la responsabilité du père si on fait une comparaison avec l’ancienne rédaction de la loi.
Adopté. Le bill est lu une deuxième fois et renvoyé à un comité plénier de la Chambre.
L’honorable M. Rivard (Montmagny) propose que la Chambre se forme immédiatement en comité.
Adopté. M. l’Orateur quitte le fauteuil.
Le comité étudie le bill article par article et le président fait rapport que le comité a adopté le bill 52 après l’avoir amendé.
Le bill amendé est lu et agréé.
L’honorable M. Rivard (Montmagny) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
Adopté.
Il est ordonné que le greffier porte ce bill au Conseil législatif et prie les honorables conseillers de l’adopter.
Subsides:
Budget des dépenses 1957-1958
L’honorable M. Gagnon (Matane) propose, selon l’ordre du jour, que M. l’Orateur quitte maintenant le fauteuil.
Adopté. La Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
En comité:
L’honorable M. Gagnon (Matane) propose: 1. Qu'un crédit n'excédant pas deux millions trois cent mille dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Service civil (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
Adopté.
2. Qu'un crédit n'excédant pas quatre cent trente-cinq mille dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Frais de voyage (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
Adopté.
3. Qu'un crédit n'excédant pas quarante-cinq mille dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Frais de bureau (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
M. Hamel (Saint-Maurice): À l’item 3, il est question d’un poste de $15,000 pour les frais de téléphone et télégrammes du département. Tous les ministères dépensent à peu près le même montant pour leurs messages téléphoniques ou télégraphiques. N’y a-t-il pas un peu d’abus?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il en coûte toujours moins cher de téléphoner ou télégraphier que d’envoyer des fonctionnaires sur place. Sans compter que, dans certaines régions comme la Gaspésie, le Saguenay et Bonaventure, les communications ferroviaires, qui relèvent d’Ottawa, sont très inadéquates. La province de Québec est la plus mal desservie en fait de chemins de fer. Les communications par T.S.F. et téléphone ne sont pas non plus trop bonnes en Gaspésie. Avant, à cause d’un manque d’équipement, les messages téléphoniques ou télégraphiques pouvaient se rendre à Ottawa et les instructions pouvaient être renvoyées. Cela permettait aux sous-marins de faire surface sans aucun problème et leurs équipages en profitaient. Ainsi, durant la dernière guerre, les sous-marins nazis pouvaient narguer la population des côtes en restant des heures en surface. Aujourd’hui, le téléphone et le télégraphe donnent un service plus adéquat dans ce coin du Québec.
La résolution est adoptée.
L’honorable M. Gagnon (Matane) propose: 4. Qu'un crédit n'excédant pas vingt-deux millions de dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Subventions aux corporations scolaires (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): J’attire l’attention de la Chambre sur le peu de sérieux de l’opposition. Nous sommes appelés à voter un montant total de $50,000,000 pour l’éducation. L’autre jour, un jeune député de l’opposition a dit que nous devrions avoir des subsides statutaires. Or, dans le présent cas, nous avons un montant de $22,000,000 autorisé par un Statut et un autre de $22,000,000 inscrit dans le budget. Il ne s’en est pas aperçu. Quand il disait qu’il n’y a pas de subsides statutaires, ou bien il ne savait pas ce dont il parlait, ou bien il le savait et, alors, sa place n’est pas en Chambre.
M. Brown (Brome) pose des questions au ministre concernant les subventions aux corporations scolaires.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il s’agit de regarder les faits. Tout ce montant de $50,000,000 est statutaire. Le montant qui doit être voté, soit $22,000,000, le sera en vertu de la loi des Statuts. Cependant, il y a malgré tout plusieurs octrois qui sont accordés sur une base régulière et fixe, comme par exemple les octrois aux collèges classiques, que le gouvernement a récemment fait passer de $15,000 à $25,000. Et l’opposition n’est pas encore satisfaite! Tous les octrois sont statutaires. Mais il ne faut pas se mettre de menottes. Il serait injuste d’avoir un système d’octrois fixes. Il faut prévenir les éventualités.
M. Hamel (Saint-Maurice): En parlant de la sorte, le premier ministre s'exprime de façon à induire la population en erreur. Quand nous parlons d'octrois statutaires, nous parlons d'octrois accordés selon des normes précises. Les commissions scolaires ne réclameraient pas d'octrois statutaires si elles étaient satisfaites d'un gros montant autorisé par Statuts. Elles réclament, par exemple, des octrois basés sur le nombre d'enfants, etc.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): L’opposition nous dit: "Il devrait y avoir des subsides statutaires." Et aussitôt après, elle se plaint: "Il y a trop de subsides statutaires." Il est vrai que certaines institutions d’enseignement ont réclamé des subsides statutaires. Mais, souvent, c’est parce qu’il y a eu méprise sur le terme même ou son interprétation. Depuis le temps, quand même, quelques-unes de ces organisations ont compris ce que les octrois statutaires signifiaient. L’administration ne peut engager le gouvernement pour des millions de dollars pour des années à venir, alors que nous ne savons pas ce qu’il adviendra de la situation financière de la province.
Des octrois payés sur de telles bases seraient injustes. Précisant la position gouvernementale à propos des octrois réguliers sur une base fixe, il explique que l’une des raisons pour lesquelles on n’en accorde pas, c’est que la situation financière des bénéficiaires eux-mêmes varie considérablement. C'est ainsi que si l’on base les octrois d’après le nombre d’enfants, on s’apercevra que dans les endroits où les parents sont plus riches, le montant sera aussi considérable que dans ceux où les parents sont plus pauvres. Une municipalité peut être riche et ne pas avoir besoin de l’aide gouvernementale pour ses écoles. D’autre part, une autre municipalité ou une commission scolaire peut être pauvre et avoir un besoin urgent d’assistance financière. Si vous établissez les octrois, disons, sur la base de la population, la municipalité qui n’a pas besoin d’argent recevra le même montant, proportionnellement, que la municipalité ou la commission scolaire qui a un besoin criant de cet argent. Ce serait déloyal et injuste.
Veut-on des octrois basés sur l'évaluation? Là encore, il y aurait injustice, puisque l'évaluation varie dans les diverses municipalités. Elle peut être de 30 %, 40 %, 50 % et même 60 % et 70 %. Une municipalité scolaire qui a un rôle d’évaluation de 60 % recevrait deux fois plus que celle qui a une évaluation de 30 %, avec les mêmes besoins. Ici encore, une telle base serait injuste et déloyale. C’est pourquoi le gouvernement tente de répondre aux besoins de façon locale, et c’est pourquoi une certaine latitude doit être laissée au département lorsqu’il accorde ces octrois.
Il y a aussi une autre raison pour laquelle le gouvernement ne s’engage pas dans des octrois réguliers, et elle est très importante. Il faut tenir compte de nos sources de revenus. À l’heure actuelle, les provinces n’ont droit qu’à 13 % du revenu total, alors qu’Ottawa retire environ 77 %. Nous avons toujours espoir qu’Ottawa se rende éventuellement compte de l’iniquité qui subsiste dans l’actuelle répartition des impôts.
Si nos revenus n'étaient pas accaparés par le fédéral, nous pourrions faire encore bien davantage pour l'éducation que nous ne le faisons actuellement. La province dépensera encore cette année un montant extrêmement généreux pour l’éducation, soit en tout $106,000,000, et cette somme ne comprend pas toutes les dépenses pour les salaires administratifs dans le domaine éducationnel En 1946, le gouvernement a assumé l’entièreté des dettes scolaires, pour un total de $86,000,000. Cette dette a été réglée à un taux qui se situe entre $4,000,000 et $8,000,000 annuellement. Voilà une contribution fixe que le gouvernement accorde à l’éducation. Le gouvernement paie également $18,000,000 par année en primes aux instituteurs. À l’heure actuelle, notre effort est aussi considérable que nos moyens nous le permettent.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Le gouvernement s’exposerait à créer de graves injustices envers plusieurs municipalités scolaires en adoptant le régime des subsides fixés.
M. Galipeault (Québec-Ouest) pose des questions.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): En vertu de la loi qui a permis au gouvernement d’assumer le paiement de la dette scolaire de $100,000,000, cette dette a été réduite à environ $40,000,000. Les primes de traitement, pour permettre aux commissions scolaires d'augmenter le salaire des instituteurs et institutrices, se chiffrent à environ $19,000,000 par an, alors qu’elles étaient de $2,225,000 sous le régime Godbout. En outre, 60 % du montant est payé à l'avance aux commissions scolaires maintenant, alors qu'autrefois on payait un an en retard une maigre prime de traitement.
M. Galipeault (Québec-Ouest) fait allusion à une somme de $28,000,000 déjà votée par une loi pour des subventions aux commissions scolaires. Comment, dit-il, est distribuée cette somme, soit aux commissions scolaires, soit à certaines sections de l'enseignement?
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Cette somme va uniquement aux commissions scolaires.
M. Galipeault (Québec-Ouest): Alors, qui décide du montant à verser à telle ou telle commission scolaire?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): C'est décidé après étude des recommandations du surintendant de l'Instruction publique, en tenant compte des besoins et de la capacité de payer des commissions scolaires. C'est décidé de façon intelligente et juste, après avoir pris connaissance de tous les aspects des problèmes qui nous sont soumis et qui sont analysés auparavant par le surintendant, le plus compétent que nous ayons jamais eu, un homme irremplaçable. Nous décidons de ces octrois sans nous préoccuper des considérations politiques.
M. Hamel (Saint-Maurice): Si c'est vrai ce que dit le premier ministre, pourquoi, sur les lettres annonçant ces octrois, voit-on toujours: "Ce subside a été payé grâce aux représentations de votre dévoué député de tel ou tel comté représenté par un partisan de l’Union nationale"? Pourquoi ces mots si on ne fait pas de politique avec l'instruction publique? Souvent, le député ne le sait même pas. Le ministre peut-il nous donner son programme de construction d'écoles?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le député de Saint-Maurice est illogique. Il prétend que nous faisons de la politique, puis il dit que souvent le député ne le sait même pas. Il n'y a donc pas de politique dans le paiement des octrois. La preuve, c'est que dans le comté de Saint-Maurice, le gouvernement a versé comme auparavant des octrois pour la construction des écoles.
M. Hamel (Saint-Maurice): Même plus.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Vous voyez l'illogisme, M. le président. Le chef intérimaire de l'opposition vient de prouver que nous ne faisons pas de politique dans un comté représenté par l'opposition. C'est tellement vrai que dans mon comté de Trois-Rivières, des localités proches de la ville que je représente ont obtenu plus d'octrois que Trois-Rivières. Toujours nous tenons compte des circonstances.
M. Hamel (Saint-Maurice) réclame une réponse à sa question, à savoir quel est le programme de construction d'écoles pour l'année prochaine?
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Dans le comté de Saint-Maurice, le gouvernement libéral a donné $49,000 pour les écoles en 1944-1945 et le même comté, représenté par le chef de l'opposition, a reçu, en 1955-1956, la somme de $443,000 pour ses écoles. De 1944 à 1956, ce comté a reçu des octrois au total de $2,604,384. Dans le comté de Richmond, une somme de $3,352,934 a été donnée de 1944 à 19563. Donc, le gouvernement ne fait pas de politique.
M. Hamel (Saint-Maurice): Je suis heureux d’entendre cela. Le gouvernement pourrait dire cela aux organisateurs de l’Union nationale, afin qu’ils puissent cesser de dire aux électeurs qu’ils ne peuvent rien avoir parce qu’ils sont représentés par un député libéral.
Dites donc cela à nos commissaires d'écoles aussi! Ils viennent me voir à la cachette, de peur de perdre les octrois publics. Ils ont peur.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Moi, les commissaires viennent me voir en plein jour. Ils n'ont pas peur.
M. Hamel (Saint-Maurice): J'invite le premier ministre à venir tenir une assemblée contradictoire là-dessus.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Je n'ai pas de temps à perdre. D'ailleurs, le député est là pour si peu de temps.
M. Hamel (Saint-Maurice): Le premier ministre disait cela avant les dernières élections.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le député de Saint-Maurice se vante dans son comté des octrois que le gouvernement accorde aux commissions scolaires, en dépit du fait que le comté est dans l'opposition.
M. Hamel (Saint-Maurice): Je ne me vante pas de ce qu'on fait avec l'argent du peuple. Celui qui a des mérites, c'est le contribuable. Combien d'instituteurs et d'institutrices rurales se partageront les $18,000,000 prévus au budget pour aider au paiement des salaires?
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Il y en a environ 20,000.
M. Hamel (Saint-Maurice): Alors, cela ferait une moyenne de $900 pour chaque instituteur ou institutrice, en plus de ce que paient les commissions scolaires. Il me semble que les salaires mentionnés au rapport du surintendant ne sont pas assez élevés, si l'on tient compte des primes de traitement payées par le gouvernement.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Il y a bien des facteurs à considérer et les moyennes sont toujours trompeuses. L'échelle des primes de traitement tient compte de l'évaluation et de la proportion du budget de la commission scolaire qui est consacrée aux salaires. La part du gouvernement peut représenter jusqu'à 60 % des salaires. Il arrive même, dans le cas de certaines municipalités pauvres, que les salaires soient entièrement payés par le gouvernement. Il y a d'autres cas où la proportion est moins considérable.
L’étude de la résolution est suspendue.
Rapport du comité des subsides:
M. l’Orateur au fauteuil
M. le président fait rapport que le comité a adopté plusieurs résolutions et qu’il demande la permission de siéger de nouveau.
Lesdites résolutions sont lues et agréées.
Il est résolu que la Chambre, à sa prochaine séance, se formera de nouveau en comité des subsides.
Ajournement
M. l’Orateur prononce l’ajournement.
La séance est levée vers 1 heure.
Deuxième séance du 19 février 1957
Présidence de l’honorable M. Tellier
La séance est ouverte à 3 heures.
Prière.
M. l’Orateur: À l’ordre, Messieurs! Que les portes soient ouvertes!
Projets de loi:
Rivière Hart Jaune
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose, selon l’ordre du jour, que le bill 42 concernant le développement minier et la location d’une partie des forces hydrauliques sur la rivière Hart Jaune soit maintenant lu une deuxième fois.
Il s'agit d'un autre développement gigantesque dont bénéficieront la région du Saguenay, la province et le Canada tout entier. Une compagnie incorporée en vertu des lois du Québec, la Quebec Cartier Mining, filiale de la United Steel, veut exploiter un gisement de minerai de fer dans le voisinage de la rivière Hart Jaune. Ce gisement, d'après ce que l'on en sait actuellement, renferme 750,000,000 de tonnes de minerai. La compagnie veut commencer ses travaux le plus tôt possible.
Ces travaux comportent la construction d'un quai près de Shelter Bay, à environ 80 milles au nord-est de Baie-Comeau. Il y aura aussi la construction d'une ville minière avec tous les services de rues, d'aqueduc, d'égout, etc., que cela comporte.
La compagnie construira ensuite une route de son quai à Mount Reid, soit une distance d'environ 100 milles. Il y aura une seconde ville minière à ériger à Mount Reid. De Mount Reid, la route devra être continuée sur une autre distance de 75 milles, soit jusqu'à Mount Washington.
La compagnie Cartier Mining construira aussi, à côté de sa route, un chemin de fer qui aura la même longueur, c'est-à-dire 175 milles. Les capitaux investis seront de l'ordre de plus de $100,000,000.
Mais, pour réaliser ces travaux et être en mesure d'exploiter son minerai, la Quebec Cartier Mining a besoin d'électricité. La présente loi a pour but de permettre la location de pouvoirs d'eau à une filiale de la Cartier Mining, la Hart Jaune River Power Company.
La rivière Hart Jaune coule entre le petit et le grand lac Manicouagan. Il y a d'ailleurs dans cette région trois rivières importantes au point de vue électricité, à savoir: la Bersimis, la Rivière-aux-Outardes et la Manicouagan.
Cette dernière comporte un potentiel de 2,400,000 chevaux-vapeur. Les conditions du bail à être consenti à la Hart Jaune River Power tiendront compte à la fois des capitaux considérables investis par la Cartier Mining et des intérêts de la province.
Ainsi, la province va bénéficier de deux façons de ce projet. Non seulement la compagnie va exploiter le gisement de minerai de fer employant des milliers d’hommes, mais elle paiera en outre des redevances à la province pour l’exploitation des ressources hydrauliques de la partie de la rivière Hart Jaune.
M. Hamel (Saint-Maurice) demande alors de passer immédiatement en comité pour l'étude du bill article par article.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) demande que l'on enregistre le vote sur la deuxième lecture.
La motion est mise aux voix et la Chambre se divise.
Les noms sont appelés et inscrits comme suit:
Pour: MM. Auger, Barré, Barrette, Beaulieu, Bellemare, Bernard, Bernatchez, Bertrand, Blanchard, Boudreau, Bourque, Brown, Chalifour, Charbonneau, Chartrand, Cloutier, Cottingham, Courcy, Couturier (Gaspé-Nord), Couturier (Rivière-du-Loup), Custeau, Desjardins, Dionne, Dozois, Duplessis, Earl, Élie, Gagné (Montréal-Laurier), Gagné (Richelieu), Gagnon (Matapédia), Galipeault, Gérin, Guillemette, Hamel, Hanley, Hébert, Hyde, Johnson, Johnston, Labbé, Ladouceur, Lalonde, Langlais, Larouche, Lavallée, Leclerc, Levesque, Maltais, Miquelon, Ouellet (Jonquière-Kénogami), Paquette, Parent, Plourde, Pouliot (Gaspé-Sud), Pouliot (Laval), Prévost, Raymond, Riendeau, Rivard, Rochette, Rochon, Ross, Roy, Russell, Saint-Pierre, Samson, Spence, Talbot, Théberge, Thibeault, Tremblay, Turpin, Vachon, 73.
Contre: 0.
Ainsi, la motion est adoptée. Le bill est, en conséquence, lu une deuxième fois et renvoyé à un comité plénier de la Chambre.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose que la Chambre se forme immédiatement en comité.
Adopté. M. l’Orateur quitte le fauteuil.
En comité:
Présidence de M. Johnson (Bagot)
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le barrage que construira la compagnie le sera à un point situé à l’altitude de 1,050 pieds au-dessus du niveau général de la mer. Les experts de l’Hydro ont émis l’opinion qu’un barrage construit à cette altitude ne saurait nuire au développement maximum prévu de la Manicouagan. C’est d’ailleurs une des conditions du bail de la rivière Hart Jaune que son exploitation ne devra diminuer en rien le potentiel de la Manicouagan. La compagnie ne pourra produire là plus de 175,000 chevaux-vapeur.
M. Hamel (Saint-Maurice) pose une question.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Non seulement les techniciens de l'Hydro-Québec mais aussi ceux de la United Steel ont donné l’assurance que ce développement sur la Hart Jaune ne nuira en rien au développement final de la Manicouagan. D’autre part, la compagnie n’aura pas assez des 175,000 chevaux-vapeur qu’elle s’attend de produire et devra en obtenir de l’Hydro-Québec. Cette corporation de la couronne sera d'ailleurs en mesure de lui en fournir.
Rapport du comité plénier:
M. l’Orateur au fauteuil
M. le président fait rapport que le comité n’a pas fini de délibérer et qu’il demande la permission de siéger de nouveau.
Il est ordonné que le comité siège de nouveau à la présente séance.
L’ordre du jour appelle la prise en considération, en comité plénier, d’un projet de résolutions relatives au bill 42 concernant le développement minier et la location d’une partie des forces hydrauliques sur la rivière Hart Jaune.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) informe l’Assemblée que l’honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance dudit projet de résolutions et qu’il en recommande l’objet à la Chambre.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose que M. l’Orateur quitte maintenant le fauteuil.
Adopté.
En comité:
Présidence de M. Johnson (Bagot)
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose: 1. Que, afin de faciliter le développement minier dans le comté de Saguenay, au nord de Shelter Bay, le lieutenant-gouverneur en conseil soit autorisé à louer, pour le temps et aux conditions ci-dessous:
a) les forces hydrauliques de cette section de la rivière Hart Jaune comprise entre le point où cette rivière atteint l'altitude de mille cinquante (1,050) pieds au-dessus du niveau de la mer et le Petit lac Manicouagan;
b) subordonnément au paragraphe a et aux autres dispositions de la loi qui accompagne les présentes résolutions, le droit de régulariser le débit de la rivière Hart Jaune par la construction, le maintien et l'exploitation de barrages-réservoirs en amont du site des forces hydrauliques visées par la présente résolution.
Adopté.
2. Que les plans, estimés et devis relatifs à ces ouvrages devront être préalablement soumis à l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil et le locataire paiera à ces fins au département des Ressources hydrauliques une somme de cinq mille dollars à la date décrétée par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Adopté.
3. Que le bail comprendra une période d'organisation et de construction ne devant pas dépasser le premier janvier 1960; cette période sera suivie d'une première période de vingt-cinq ans qui sera renouvelable, au gré du locataire, pour une deuxième période de vingt-cinq ans, sur avis écrit à cet effet donné par le locataire au ministre des Ressources hydrauliques au moins trente jours avant l'expiration de la période initiale de vingt-cinq ans; que, si le bail est renouvelé pour cette deuxième période additionnelle de vingt-cinq ans, les conditions du bail seront les mêmes que pour la première période de vingt-cinq ans, sauf les stipulations de l'article 6 de la loi qui accompagne les présentes résolutions, et que le bail pourra être renouvelé pour une troisième période de vingt-cinq ans, à la discrétion du lieutenant-gouverneur en conseil et aux conditions qu'il déterminera.
Adopté.
4. Que pour l'utilisation des forces hydrauliques, des droits et des terrains mentionnés à la résolution 1, le locataire paiera, pendant une période de dix ans à compter de la signature du bail, un loyer annuel de douze mille dollars et que, après ces dix ans, le lieutenant-gouverneur en conseil pourra augmenter le prix du loyer annuel jusqu'à concurrence de dix-huit mille dollars.
Adopté.
5. Que, en outre, le locataire paiera au département des Ressources hydrauliques une redevance annuelle de un dollar par cheval-vapeur-an produit et que, au cas de renouvellement du bail pour une deuxième période de vingt-cinq ans, tel que prévu par la résolution 3, la redevance annuelle de un dollar pourra être augmentée, mais ne devra pas excéder un dollar et vingt-cinq cents par cheval-vapeur-an produit.
Adopté.
6. Que le locataire devra de plus payer au département des Ressources hydrauliques, pour emmagasinage des eaux au Petit lac Manicouagan et au lac appelé "A", un loyer annuel de mille cinq cents dollars à compter de la signature du bail et que, à ce sujet, le locataire devra en outre payer à la province une redevance annuelle de cinquante cents par cheval-vapeur-an rendu disponible à compter de la mise en œuvre de chaque usine hydroélectrique aménagée pour l'exploitation de ces forces hydrauliques.
M. Hyde (Westmount-Saint-Georges): Pourquoi le bill ne fait pas mention du nom de la compagnie à qui l’on accordera le bail?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): C’est parce que l’on ne possède pas encore le nom exact. On ne peut retarder la loi pour le nom. Le principal, c’est que l’enfant soit mis au monde.
M. Hamel (Saint-Maurice): Il n’est pas encore au monde. Le premier ministre veut le nourrir avant?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le chef de l’opposition, qui est père de famille, devrait savoir qu’un enfant est nourri avant de naître. En fait, le nom de la compagnie n’est pas nommé dans la loi, mais il s’agit bien de Hart Jaune River Power Company.
M. Hamel (Saint-Maurice): Est-ce que la compagnie Hart Jaune River Power Company a eu des concurrents pour l'obtention de ces pouvoirs?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Absolument pas. Personne n'y a songé. Ça été une bénédiction du ciel - on dit que la Providence est avec nous - que l'on ait trouvé tout près de là un gisement de 750,000,000 de tonnes de minerai.
M. Hamel (Saint-Maurice): Le bail comporte une période d'organisation de trois ans, puis une première période de 25 ans durant laquelle la compagnie paiera une redevance de $1 par cheval-vapeur. Ensuite, cette période sera renouvelable pour 25 autres années sur avis écrit à cet effet donné par le locataire, période pour laquelle "la redevance pourra être augmentée mais ne devra pas excéder $1.25 par cheval-vapeur par an produit". Le bail pourra ensuite être renouvelé pour une troisième période de 25 ans à la discrétion du lieutenant-gouverneur en conseil et aux conditions qu'il déterminera.
Cette période est trop longue. Le ministre de la Voirie a affirmé dans cette Chambre que la piastre de 1944 ne valait plus que 30 cents aujourd'hui. Qui peut prédire ce qu'elle vaudra dans 50 ans? Je propose donc que les conditions soient pour 25 ans, pas plus.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le ministre de la Voirie n'a jamais dit que le dollar de 1944 valait aujourd'hui 30 cents.
M. Hamel (Saint-Maurice) maintient que le ministre l'a dit.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): S'il l'a dit, il s'est trompé.
(Applaudissements à gauche)
On ne peut pas dire que l'argent perd de la valeur. On doit considérer la valeur de l'argent par son rendement. Le dollar vaut plus que jamais aujourd’hui. L'argent ne rapportait que 3 % et aujourd'hui il en rapporte 6 %! On ne peut pas vraiment dire qu’il a moins de valeur.
L’honorable M. Beaulieu (Saint-Jean): Les statistiques le disent, c’est vrai.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Une compagnie qui va investir $100,000,000 de capitaux a certainement le droit d'obtenir des éléments de stabilité. De plus, ce projet entraînera la naissance d'industries lucratives dont la province va bénéficier largement.
M. Hamel (Saint-Maurice): On en reparlera quand viendra le bill de la Cartier Mining.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il ne pourra pas y avoir de développement industriel dans cette région si l'on ne commence pas d'abord par les développements hydroélectriques. De toute façon, c'est un progrès dont je suis fier et orgueilleux.
Il (l’honorable M. Duplessis) rappelle les conditions financières auxquelles la compagnie sera soumise: $5,000 pour l'approbation des plans; $1, puis $1.25 du cheval-vapeur; un loyer de $12,000 à $18,000 par année; un loyer annuel de $1,500 pour emmagasinage des eaux, plus une redevance annuelle de 50 cents par cheval-vapeur-an rendu disponible à compter de la mise en œuvre de chaque usine hydroélectrique aménagée pour l'exploitation de ces forces hydrauliques.
Cela représentera, dit-il, plus de $200,000 par année. De plus, la compagnie sera assujettie à la taxe qui frappe le capital et les profits des corporations. La compagnie devra ainsi payer 1/5 de 1 % sur le capital et 9 % sur les profits.
M. Hamel (Saint-Maurice): Est-ce que les conditions faites à la Hart Jaune sont les mêmes que celles faites, au début de la session, à la Manicouagan Power Co. (bill 7)4?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) Les conditions sont les mêmes.
M. Hamel (Saint-Maurice): Dans le cas de la Manicouagan, la loi stipule: "... Dans le cas d’un tel renouvellement, les conditions du bail seront les mêmes sauf quant à la redevance ou royauté annuelle qui sera portée à $1.25 par cheval-vapeur-an produit".
Ce n'est donc pas la même chose. Dans le cas de la Manicouagan, la loi dit "sera portée" tandis que dans le cas de la Hart Jaune, elle dit "pourra être augmentée mais ne devra pas excéder $1.25".
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il n'y a pas de différence. Absolument pas.
M. Hamel (Saint-Maurice): Que le premier ministre lise donc!
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Non seulement je lis, mais je comprends. Ce sont les mêmes conditions. C'est moi qui ai rédigé les deux bills.
M. Hamel (Saint-Maurice): C'est dommage que nous n'ayons pas un Hansard!
La résolution est adoptée.
Rapport du comité plénier:
M. l’Orateur au fauteuil
M. le président fait rapport que le comité a adopté plusieurs résolutions, lesquelles sont lues.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose que ces résolutions soient maintenant agréées.
La motion est mise aux voix.
Les noms sont appelés et inscrits comme suit:
Pour: MM. Auger, Barré, Barrette, Beaulieu, Bellemare, Bernard, Bernatchez, Bertrand, Blanchard, Boudreau, Bourque, Brown, Caron, Chalifour, Charbonneau, Chartrand, Cloutier, Cottingham, Courcy, Couturier (Gaspé-Nord), Couturier (Rivière-du-Loup), Custeau, Desjardins, Dionne, Dozois, Duplessis, Earl, Élie, Gagné (Montréal-Laurier), Gagné (Richelieu), Gagnon (Matapédia), Galipeault, Gérin, Guillemette, Hamel, Hanley, Hébert, Hyde, Johnson, Johnston, Labbé, Ladouceur, Lalonde, Langlais, Larouche, Lavallée, Leclerc, Levesque, Maltais, Miquelon, Ouellet (Jonquière-Kénogami), Paquette, Parent, Plourde, Pouliot (Gaspé-Sud), Pouliot (Laval), Prévost, Raymond, Riendeau, Rivard, Rochette, Rochon, Ross, Roy, Russell, Saint-Pierre, Samson, Spence, Talbot, Théberge, Thibeault, Tremblay, Turpin, Vachon, 74.
Contre: 0.
Ainsi, la motion est adoptée. Les résolutions relatives au bill 42 sont, en conséquence, agréées.
Conformément à l’ordre du jour, la Chambre se forme de nouveau en comité plénier pour étudier le bill 42 concernant le développement minier et la location d’une partie des forces hydrauliques sur la rivière Hart Jaune.
Le comité étudie le bill article par article et le président fait rapport que le comité a adopté le bill 42 sans l’amender.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.
La motion est mise aux voix.
Les noms sont appelés et inscrits comme suit:
Pour: MM. Auger, Barré, Barrette, Beaulieu, Bellemare, Bernard, Bernatchez, Bertrand, Blanchard, Boudreau, Bourque, Brown, Caron, Chalifour, Charbonneau, Chartrand, Cloutier, Cottingham, Courcy, Couturier (Gaspé-Nord), Couturier (Rivière-du-Loup), Custeau, Desjardins, Dionne, Dozois, Duplessis, Earl, Élie, Gagné (Montréal-Laurier), Gagné (Richelieu), Gagnon (Matapédia), Galipeault, Gérin, Guillemette, Hamel, Hanley, Hébert, Hyde, Johnson, Johnston, Labbé, Ladouceur, Lalonde, Langlais, Larouche, Lavallée, Leclerc, Levesque, Maltais, Miquelon, Ouellet (Jonquière-Kénogami), Paquette, Parent, Plourde, Pouliot (Gaspé-Sud), Pouliot (Laval), Prévost, Raymond, Riendeau, Rivard, Rochette, Rochon, Ross, Roy, Russell, Saint-Pierre, Samson, Spence, Talbot, Théberge, Thibeault, Tremblay, Turpin, Vachon, 74.
Contre: 0.
Ainsi, la motion est adoptée. Le bill 42 est, en conséquence, lu une troisième fois.
Il est ordonné que le greffier porte ce bill au Conseil législatif et prie les honorables conseillers de l’adopter.
Subsides:
Budget des dépenses 1957-1958
L’honorable M. Gagnon (Matane) propose, selon l’ordre du jour, que M. l’Orateur quitte maintenant le fauteuil.
Adopté. La Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
En comité:
Présidence de M. Johnson (Bagot)
L’honorable M. Gagnon (Matane) propose: Qu'un crédit n'excédant pas vingt-deux millions de dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Subventions aux corporations scolaires (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
M. Saint-Pierre (Saint-Hyacinthe) pose une question.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le fonds d’éducation est entièrement et exclusivement utilisé pour des œuvres d’enseignement. Je dois mettre la province au courant d’une situation qui me paraît extraordinaire. Ce fonds d’éducation a été créé en 1946 pour sauver les commissions scolaires qui n’étaient pas loin de la banqueroute. Elles devaient verser $5,000,000 chaque année aux fonds d’amortissement et les charges fixes absorbaient une grande partie de leurs revenus, si bien qu’elles n’avaient plus d’argent pour construire des écoles nouvelles et payer convenablement les professeurs. Nous avons absorbé toutes les dettes, ce qui représentait $60,000,000 pour la seule ville de Montréal. Et, pour amortir ces dettes, au montant d’une centaine de millions, nous avons créé le fonds d’éducation, auquel contribuent les compagnies d’électricité, les propriétaires et concessionnaires de ressources forestières, les compagnies de téléphone et de gazoline. La moitié de la taxe provinciale de vente est aussi versée à ce fonds.
Or, ce fonds d’éducation, qui n’est ni plus ni moins qu’un moyen de faire vivre les commissions scolaires, a été taxé par Ottawa5. Quand j’ai su que le gouvernement fédéral taxait ainsi l’éducation, j’ai téléphoné à M. Saint-Laurent pour le mettre au courant de la situation. Je lui ai dit que je ne pouvais pas concevoir qu’une chose pareille se continue. Il m’a répondu qu’il m’écrirait. Il m’a effectivement écrit, disant qu’Ottawa continuerait de taxer.
Et, encore aujourd’hui, Ottawa continue de taxer le fonds d’éducation, en ce sens que les montants sont déduits des paiements de péréquation. Ces mêmes gens, qui prétendent vouloir aider l’éducation en pénétrant dans un domaine qui ne les regarde pas, viennent par un moyen détourné taxer les moyens de bâtir des écoles et de payer les salaires des professeurs. C’est la première fois que je révèle ces faits. Il me semble que le gouvernement fédéral devrait rester dans son domaine au lieu de taxer les sources dont on a besoin pour maintenir et développer les œuvres d’éducation dans la province. D’ailleurs, le mode d’éducation au Québec n’est pas le même que dans les autres provinces. Conséquemment, le gouvernement de Québec doit être maître dans le domaine fiscal relatif à l’éducation.
M. Saint-Pierre (Saint-Hyacinthe): Les instituteurs et institutrices ont réclamé des hausses de salaire.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): La question relève des commissions scolaires.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Les salaires ont augmenté de façon considérable depuis 1945, parfois de 1,000 %. Il y avait 19,000 instituteurs et institutrices en 1944-1945, et il y en a maintenant 31,000. L'immense majorité de ceux-ci, soit 95 %, sont diplômés.
M. Saint-Pierre (Saint-Hyacinthe) aborde la question d'une somme de $28,000 pour la construction et la réparation des écoles. Je demande au gouvernement, dit-il, de prendre des mesures pour que les nouvelles écoles ne jurent pas par leur modernisme avec les maisons environnantes.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Nous avons des plans très bien faits qui cadrent avec l'architecture canadienne, mais les commissions scolaires n'acceptent pas toujours notre point de vue. Une somme de $550,000 est réservée, dans le budget de l'instruction publique, à la gratuité des livres. Cela correspond à une augmentation de $73,000 cette année6.
La gratuité scolaire existe dans la province. À peu près la moitié des commissions scolaires de la province profitent du système actuel, en vertu duquel la province paie 50 % du prix des manuels. Mais c'est aux commissions scolaires elles-mêmes qu'il revient de décider s'il y aura, oui ou non, la gratuité des livres dans leurs écoles.
M. Parent (Hull): Le gouvernement a dit qu'il ne fait pas de politique à l'instruction publique. J'ai la preuve du contraire avec des photos parues dans les journaux et montrant M. Saint-Onge remettant des chèques à la commission scolaire. Deux octrois de $60,000 et de $28,000 ont été accordés à la Commission de Hull à la veille des élections.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Nous nous occupons de l'éducation 365 jours par année. On ne peut pas empêcher les nouvelles de circuler.
M. Parent (Hull): En novembre, il y a eu un octroi de $100,000 pour la Commission scolaire de Hull qui est près de la faillite. Il y a eu de gros titres dans les journaux et c'est M. Roland Saint-Onge qui a remis le chèque. Est-ce que ce n'est pas de la politique, cela7?
M. Hamel (Saint-Maurice): Saint-Onge? Qui est-ce?
M. Parent (Hull): Le patroneux. Il y a eu un autre octroi pour la même commission, le 16 octobre, et on a fait également de la publicité autour de cette subvention. Je trouve inconcevable de prétendre qu'il n'y a pas de politique à l'instruction publique. Les octrois sont discrétionnaires et l'on envoie les chèques aux députés de l'Union nationale et aux patroneux.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le député de Hull prétend qu'on fait de la politique à l'instruction publique. Et comment prouve-t-il cela? Un chèque a été envoyé pendant la période électorale, mais le député avoue que, depuis, d'autres chèques ont été envoyés. De plus, le candidat de l’Union nationale a été battu dans le comté de Hull, mais nous continuons à envoyer des octrois dans ce comté. Cela prouve, à mon avis, que ces octrois sont distribués en toute objectivité, et non selon que le comté est représenté par un député de l’Union nationale. C'est là la meilleure preuve qu'on ne fait pas de politique avec l'éducation. Nous adressons l'argent à ceux que nous connaissons, c’est bien simple. Nous n'allons pas le remettre à des gens qui ont signé des chèques pour les autres et qui sont allés à la banque toucher l'argent des autres. Tout ce qui compte, c'est que nous payons des octrois avant, pendant et après les élections! Nous faisons notre devoir et nous bâtissons des écoles là où c'est nécessaire. Est-ce que le gouvernement devrait envoyer les chèques d'octrois par des souterrains, en cachette?
M. Parent (Hull): La Commission scolaire de Hull est dans une situation financière très mauvaise. Elle doit déjà à la banque plus de $500,000 et elle aura encore besoin de $300,000 d'ici la fin de l'exercice financier8. À plusieurs reprises, le premier ministre a fait des allusions à mon passé9. Je n'ai pas peur des accusations du premier ministre. Je n'ai pas honte de mon passé. Si j'ai commis un péché de jeunesse, les gens de mon comté m'ont jugé aux dernières élections. Je ne crains pas de comparer ma jeunesse à celle du premier ministre. S'il veut faire du massage, il n'a qu'à se masser.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): J'ai parlé de gens qui allaient à la banque pour forger des signatures. Et le député se croit obligé de répondre: "Si j'ai commis des péchés dans ma jeunesse..." Je ne lui ai pas demandé de le faire. S'il fait sa confession, tant pis pour lui. Quant à nous, nous accordons des octrois quand ils sont indispensables. Qu'est-ce que font les autres gouvernements à ce sujet? Qu'est-ce que fait Ottawa? Il annonce l'augmentation des pensions de vieillesse, l'assurance-santé, quelques mois avant les élections.
M. Parent (Hull): Je n'ai pas de confession à faire dans cette Chambre. Le premier ministre a une façon de faire du chantage.
(Protestations à droite)
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) demande au président du comité de faire retirer ses paroles au député de Hull.
M. le président: Le député devrait retirer ses paroles.
M. Parent (Hull): Si ce n'est pas du chantage, qu'est-ce que c'est? Je ne puis retirer mes paroles. C’est la quatrième fois qu’il essaie de me faire du chantage en cette Chambre.
M. le président: L'expression de chantage est antiparlementaire. Je demande au député de retirer ses paroles.
M. Parent (Hull): Je n'ai rien à retirer. C'est bien du chantage.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) demande alors au président du comité de faire rapport à l'Orateur.
(Pendant que le président, M. Johnson, rédige son rapport, une demi-douzaine de députés entourent M. Parent et lui parlent.)
Rapport du comité des subsides:
M. l’Orateur au fauteuil
M. le président: M. l'Orateur, le député de Hull (M. Parent), au cours de l'étude des crédits du département de l'Instruction publique, a déclaré que le premier ministre "avait une façon de faire du chantage".
Sur le point d'ordre soulevé par le premier ministre, j'ai expliqué à l'honorable député que ce genre de langage est clairement antiparlementaire (cf. article 285 du Règlement) et je lui ai demandé de retirer ses paroles. L'honorable député a déclaré d'un ton très ferme qu'il ne retirait pas ses paroles. J'ai alors de nouveau demandé au député de Hull de retirer ses paroles qui ne pouvaient être tolérées dans cette Chambre. Le député de Hull refuse une deuxième fois de retirer ses paroles, dont rapport.
Suspension du député Oswald Parent, Hull
M. l’Orateur donne lecture de l’article 75 du Règlement. Avant de prendre attitude, dit-il, je demande au député de Hull s’il persiste à ne pas retirer ses paroles.
M. Parent (Hull): Je ne les retirerai pas, car ce qu'a dit le premier ministre n'est pas seulement du chantage, c'est pire que du chantage.
M. l’Orateur: Je rappelle à l’ordre M. Oswald Parent, député de Hull.
M. Parent (Hull) quitte la Chambre.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): En vertu de l'article 76 des règlements, je fais motion pour que le député de Hull soit censuré et suspendu pour une période de huit jours.
M. Hamel (Saint-Maurice): Je tiens à déclarer que le premier ministre fait erreur s'il croit qu'il va avoir raison de l'opposition par de pareils moyens. Ce n'est pas la première fois que le premier ministre fait des insinuations contre des membres de l'opposition10.
M. l’Orateur: À l'ordre! À ce stade de la discussion, il n'est permis de parler que sur la motion de censure.
M. Hamel (Saint-Maurice): Je dis qu'en cette Chambre, la liberté de parole est violée.
M. l’Orateur: Je ne veux pas être excessif, mais je pourrais exiger que le chef de l'opposition retire lui-même ce qu'il vient de dire. Il doit s’en tenir à l’objet du débat. Je le rappelle donc à l'ordre.
M. Hamel (Saint-Maurice): J'en appelle de votre décision.
M. l’Orateur: Qu'on appelle les députés.
La motion est mise aux voix et la Chambre se divise.
Les noms sont appelés et inscrits comme suit:
Pour: MM. Auger, Barré, Barrette, Beaulieu, Bellemare, Bernard, Bernatchez, Bertrand, Blanchard, Boudreau, Bourque, Caron, Chalifour, Charbonneau, Chartrand, Cloutier, Cottingham, Couturier (Gaspé-Nord), Custeau, Desjardins, Dozois, Ducharme, Duplessis, Élie, Gagné (Montréal-Laurier), Gagné (Richelieu), Gagnon (Matapédia), Gérin, Guillemette, Hanley, Hébert, Johnson, Johnston, Labbé, Ladouceur, Langlais, Larouche, Lavallée, Leclerc, Maltais, Miquelon, Ouellet (Jonquière-Kénogami), Paquette, Plourde, Pouliot (Gaspé-Sud), Pouliot (Laval), Prévost, Raymond, Riendeau, Rivard, Rochette, Roy, Russell, Samson, Spence, Talbot, Thibeault, Thuot, Tremblay, 59.
Contre: MM. Brown, Courcy, Couturier (Rivière-du-Loup), Dionne, Earl, Gagnon (Compton), Galipeault, Hamel, Hyde, Lalonde, Levesque, Rochon, Ross, Saint-Pierre, Théberge, Turpin, 16.
Ainsi, la motion est adoptée.
La Chambre se forme de nouveau en comité des subsides.
En comité:
Présidence de M. Johnson (Bagot)
Le débat se poursuit sur la résolution qui se lit comme suit:
Qu'un crédit n'excédant pas vingt-deux millions de dollars soit ouvert à Sa Majesté pour "Subventions aux corporations scolaires (Instruction publique)", pour l'exercice finissant le 31 mars 1958.
M. Hamel (Saint-Maurice): Le député de Hull a clairement démontré que, dans le domaine de l'instruction publique, on fait parvenir les chèques à Pierre, Jean, Jacques. J'appelle cela du tripotage des fonds publics. Si le gouvernement ne veut pas faire de la politique avec les deniers du peuple qu’il distribue à sa discrétion, pourquoi ne fait-il pas parvenir directement les chèques aux commissions scolaires élues par le peuple, et non au député ou au détenteur du patronage dans le comté?
Si on a réussi à établir des dictatures formidables dans certains pays, c'est parce qu'on procédait comme en certains milieux. Le Duce disait bien aux Italiens qu'ils étaient libres d'élire des députés, mais il leur donnait une liste des seuls noms pour lesquels ils pouvaient voter.
M. le président rappelle le chef de l'opposition à l'ordre. À mon sens, dit-il, le député de Saint-Maurice s'engage sur un terrain dangereux. Si le chef de l'opposition veut comparer le gouvernement actuel aux gouvernements de certains autres pays, des pays contre lesquels nous avons fait la guerre, je me doute bien que le gouvernement refusera cette comparaison, et il faudra faire retirer des paroles alors prononcées.
M. Hamel (Saint-Maurice): Ce que je veux surtout mettre en lumière, c'est que, dans les relations entre le peuple et ses administrateurs, celui qui doit servir d'intermédiaire, c'est celui que le peuple a élu et en qui il a manifesté sa confiance. Quand on procède par l'homme du parti, comme le fait le gouvernement, c'est qu'on pense en premier lieu à l'intérêt du parti avant celui de la province.
Le député de Hull a démontré qu'un individu de son comté se promène avec des chèques de la province dans ses poches. C'est ce qu'on appelle mettre l'intérêt du parti avant celui des enfants de chez nous. Le député de Hull avait raison de s'offusquer de constater que le gouvernement n'envoie pas ses chèques aux commissions scolaires. Le temps est arrivé pour le gouvernement de réaliser que les députés élus sont les représentants du peuple dans ses tractations avec les divers départements de l'administration. Dans les départements, au lieu de recevoir le député de l'opposition, on refuse de discuter avec lui.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Du moment que les chèques sont envoyés à des gens honnêtes, c'est tout à fait normal. Il y a longtemps que l'on procède de cette façon.
M. Hamel (Saint-Maurice): C'est anormal. Le bon sens veut que l'argent de la province aille directement aux institutions auxquelles il est destiné. Le procédé actuel est un défi à l'opinion publique. Cela fait assez longtemps que l'Union nationale essaie de faire des "shows" avec l'argent du peuple de Québec.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il appartient au gouvernement d'adresser les chèques à qui il veut. Il n'y a rien de mal là-dedans. Il est normal pour le gouvernement de s'adresser à son homme de confiance dans les comtés. Ce qui serait anormal serait de refuser des octrois quand c'est nécessaire, peu importe qui les demande. Nous allons continuer de procéder de la même façon, sans faire de politique avec les octrois.
M. Hamel (Saint-Maurice): Est-ce que le département de l'Instruction publique ne pourrait pas travailler à l'amélioration des alentours des écoles, pour que les institutrices puissent enseigner aux enfants le culte du beau? On pourrait faire du terrassement, faire de la pelouse et planter des fleurs.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Ce travail est déjà commencé sur une haute échelle.
M. Courcy (Abitibi-Ouest) suggère de planter des arbres sur le terrain des écoles.
L’honorable M. Bourque (Sherbrooke): C'est maintenant une politique établie de planter chaque année un arbre par classe par école. C'est une pratique qui existe depuis 10 ans.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Il est bien de vouloir améliorer les alentours des écoles. Ce qu'il importe en premier lieu, c'est de construire les écoles. Le gouvernement a dépensé à cette fin des centaines de millions. C'est plus important que n'importe quoi.
M. Saint-Pierre (Saint-Hyacinthe) fait allusion à un sous-item de $40,000 pour l'enseignement du français, les travaux manuels et l'établissement de la 12e année. Le gouvernement, demande-t-il, ne songe-t-il pas à pousser davantage les travaux manuels, à l'avantage surtout des jeunes qui ont peu d'aptitude pour les matières scolaires, mais qui peuvent réussir très bien dans le domaine des métiers ou de la technique?
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Sauf exception, cet enseignement des travaux manuels devrait se faire dans les écoles techniques, les écoles d'arts et métiers ou les centres d'apprentissage.
Nous n'avons pas l'argent nécessaire pour doubler et même tripler les mêmes services. Il ne faut pas oublier que c'est la propriété qui est taxée pour l'enseignement primaire. Chaque fois que l'enseignement primaire sort de son rôle, il impose des charges nouvelles à la propriété. Il ne faut pas aggraver davantage la situation.
Nous n'avons pas les moyens de dépenser de l'argent pour ces choses même utiles quand c'est au détriment des choses nécessaires. Quand nous aurons toutes nos sources de revenus, il sera plus facile de faire davantage.
M. Brown (Brome) pose des questions.
L’honorable M. Prévost (Montmorency): Mon département compte 450 employés masculins et 211 employés féminins. Le travail des employés féminins donne entière satisfaction. Le surintendant de l’Instruction publique s’occupe de la partie pédagogique de l’enseignement, la partie administrative relevant toujours du gouvernement. Le surintendant a droit d’émettre ses opinions personnelles, même s’il n’engage pas le gouvernement.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Personne ne doute de la grande compétence du surintendant.
La résolution est adoptée.
Rapport du comité des subsides:
M. le président fait rapport que le comité a adopté une résolution et qu’il demande la permission de siéger de nouveau.
Ladite résolution est lue et agréée.
Il est résolu que la Chambre, à la présente séance, se formera de nouveau en comité des subsides.
Messages du Conseil législatif:
M. l’Orateur communique à la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:
Le Conseil législatif informe l’Assemblée législative qu’il a voté, sans amendement, les bills suivants:
- bill 46 modifiant la loi concernant les valeurs mobilières;
- bill 54 modifiant la loi des mines de Québec.
M. l’Orateur communique à la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:
Le Conseil législatif informe l’Assemblée législative qu’il a voté le bill 56 concernant la preuve photographique de certains documents, avec l’amendement suivant qu’il la prie d’agréer:
L'article 3 est modifié:
a) en remplaçant, dans les deux dernières lignes du deuxième paragraphe, les mots "d'un notaire dans la province où a eu lieu l'opération" par les mots "d'un notaire exerçant dans cette province";
b) en biffant le dernier paragraphe qui se lit comme suit:
"Si celle-ci a eu lieu hors de la province de Québec, un troisième exemplaire doit être déposé en l'étude d'un notaire exerçant dans cette province."
Le Conseil législatif a aussi voté le bill 213 modifiant la charte de la cité de Sainte-Foy, avec l’amendement suivant qu’il prie l’Assemblée d’agréer:
L'article 15 est remplacé par ce qui suit:
"15. L'article 429 de la loi des cités et villes est modifié, pour la cité de Sainte-Foy, en ajoutant, après le paragraphe 8, les paragraphes suivants:
"8a. Pour prescrire, selon la topographie des lieux et l'usage auquel elles sont destinées, la manière dont les rues publiques ou privées doivent être tracées, la distance à conserver entre elles et la largeur qu'elles doivent avoir si cette largeur doit être supérieure à soixante-six (66) pieds anglais:
"8b. Pour obliger le propriétaire à soumettre les plans de subdivisions projetées, montrant ou non des rues, à un officier désigné et à obtenir un certificat d'approbation dit "permis de lotissement", moyennant le paiement d'une licence n'excédant pas cinq dollars. Les sommes ainsi perçues ne pourront être employées que pour défrayer les frais d'administration que pourrait occasionner un tel règlement."
Projets de loi:
Preuve photographique de documents
La Chambre prend en considération l’amendement que le Conseil législatif a apporté au bill 56 concernant la preuve photographique de certains documents.
L’amendement est lu et accepté.
Il est ordonné que le greffier porte ce message, avec le bill, au Conseil législatif.
Charte de Sainte-Foy
La Chambre prend en considération l’amendement que le Conseil législatif a apporté au bill 213 modifiant la charte de la cité de Sainte-Foy.
L’amendement est lu et accepté.
Il est ordonné que le greffier porte ce message, avec le bill, au Conseil législatif.
À 6 heures, la Chambre suspend ses travaux.
Reprise de la séance à 8 heures11
Voies et moyens:
Débat sur le budget 1957-1958 (suite)
Conformément à l’ordre du jour, la Chambre reprend le débat, ajourné mercredi le 13 février courant, sur la motion du représentant de Matane (l’honorable M. Gagnon) proposant que M. l’Orateur quitte maintenant le fauteuil.
M. Courcy (Abitibi-Ouest) passe en revue les principaux chiffres cités par le ministre des Finances dans son discours sur le budget. Pour l'année en cours, dit-il, durant laquelle ont eu lieu les élections générales, le gouvernement a dépensé $74,000,000 de plus qu'il n'avait été autorisé par les Chambres, ce qui dénote le plus profond mépris pour le système démocratique qui exige que les députés contrôlent les subsides12.
L'Union nationale a acculé les cultivateurs à la ruine. Ils quittent leurs terres pour s'en aller à la ville. Si l'agriculture dépérit aujourd'hui, c'est qu'elle ne paie plus son homme. En Abitibi, sur 63 paroisses organisées, 48 sont en recul et cinq sont à la veille de fermer. L'agriculteur du Québec ne profite pas de la prospérité du pays dans la proportion des ouvriers des villes. On ne doit donc pas parler de prospérité agricole quand nos campagnes se vident. Pendant ce temps-là, la province doit importer en vastes quantités une foule de produits agricoles, notamment 45,000,000 de douzaines d'œufs13.
L’un des éléments les plus importants de l’agriculture aujourd’hui, c’est que les fermes québécoises ne produisent pas assez par rapport aux besoins de la province, alors qu’il y a de cela quelques années, elles pouvaient le faire. Aujourd’hui, on doit importer des autres provinces d’énormes quantités de produits de la ferme, et particulièrement de l’Ontario. Même la production de beurre a diminué.
Je regrette que le ministre de l'Agriculture (l’honorable M. Barré) n'ait pas consacré plus d'argent aux recherches agricoles, car c'est à ce seul prix que l'agriculture progressera chez nous. Ce manque de recherches explique la diminution de $333,785,000, en 1951, à $270,758,000, en 1954, de la valeur du revenu net du cultivateur québécois.
Je vois, dans la recherche, l'enseignement et la vulgarisation, les remèdes qu'il faut apporter à l'agriculture québécoise pour la sauver de la ruine. La terre se meurt. Il faut la sauver pour garder sur les fermes les fils de cultivateurs et nos familles rurales qui ont droit à une condition de vie plus élevée. Il demande au gouvernement de consacrer ses énergies à trouver une solution au très important problème de la commercialisation des produits de la ferme, afin de protéger les grands investissements en agriculture et en colonisation. Le problème de la commercialisation est d’une extrême importance et il entrave le développement de l’agriculture dans notre province.
M. Bertrand (Missisquoi): La politique audacieuse et agressive dont a parlé le député d'Abitibi-Ouest, dans le domaine agricole, le gouvernement de l'Union nationale l'a donnée à la province de Québec.
L'agriculture était dans le marasme en 1936 et, aujourd'hui, 90 % des cultivateurs sont propriétaires de leur ferme. Il n’y a pas si longtemps, à peine huit ou neuf ans de cela, plusieurs fermes de mon propre comté n’avaient pas l’électricité. En 12 ans, le présent gouvernement a fait pénétrer l'électricité dans toutes les parties du Québec et les cultivateurs peuvent maintenant jouir des bienfaits qu'elle apporte. Aujourd’hui, à la grandeur de la province, 90 % d’entre eux bénéficient de l’électricité.
Les faits sont incontestables. Les cultivateurs du Québec n’ont jamais été aussi prospères. En 1945, le revenu des fermes était de $385,000,000. En 1955, il était de $712,000,000. En 1945, le revenu des produits laitiers était de $81,414,000. En 1955, il était de $166,426,000. Le revenu net des volailles était de $8,619,000, en 1945. Il était de $34,383,000, en 1955.
Un examen sommaire, même si l'on n'est pas expert en agriculture, révèle que la politique de l'Union nationale a rendu d'immenses services à la classe agricole. Elle est vraiment audacieuse et agressive. Et le premier ministre prend les moyens de préparer l'avenir des jeunes agriculteurs en multipliant les écoles d'agriculture. Comment l’opposition peut-elle faire de pareilles affirmations à propos de l’agriculture, alors qu’après 40 ans de pouvoir, leurs propres politiques avaient laissé l’industrie dans un état si lamentable que le gouvernement de l’Union nationale a dû adopter des mesures d’urgences pour les secourir et leur éviter la banqueroute?
Les journaux, qui écrivaient avant les élections de juin 1956 que l'électorat se vendait au plus offrant, devaient écrire au lendemain du scrutin et de l’éclatante victoire du gouvernement qu'il ne fallait pas se surprendre du résultat, car la province jouissait d'une prospérité sans précédent, que les taxes n'avaient pas augmenté depuis 12 ans et que toute la population avait sa part de l'essor actuel. Il explique cette volte-face par le fait que l’opposition est constituée de fanatiques en mal de pouvoir.
Il (M. Bertrand) relève ensuite une accusation à l'effet que la responsabilité ministérielle et le contrôle des subsides sont en voie de disparaître. La responsabilité ministérielle, dit-il, est entre les mains des ministres qui siègent en cette Chambre. Quant au contrôle des subsides, les députés de l'opposition sont là pour y voir. Si quelqu'un croit à des malhonnêtetés dans l'administration, c'est ici l'endroit pour les dénoncer et les prouver.
Comment peut-on rendre l’approbation des crédits plus démocratique quand les chefs de département soumettent leurs budgets et répondent à toutes les questions que la Chambre souhaite poser?
Sur les "hustings", on critique à fond de train, mais, en Chambre, on vote en trois ou quatre minutes un budget aussi considérable que celui du bien-être social et de la jeunesse14.
M. Hamel (Saint-Maurice) se lève sur un point d’ordre. J’ai déjà expliqué, dit-il, pourquoi nous n’avons pas posé de questions sur ces crédits. C’est parce que le député de Richmond, qui avait préparé la critique de ce budget, avait été expulsé de la Chambre.
M. Bertrand (Missisquoi): Ce qui me frappe, c'est que les dépenses en immobilisations, depuis 1945, se chiffrent à $624,313,665 et qu'elles ont été payées, dans la proportion de 80 %, à même les revenus ordinaires. Ces dépenses en immobilisations sont représentées par les routes, les ponts, les hôpitaux, les sanatoriums, les écoles, etc., construits à travers la province, non seulement dans l'intérêt de la génération présente, mais encore des générations à venir.
C'est dans la province de Québec que les dépenses par tête sont les moins élevées, et si notre province est corrompue, comme certains veulent le prétendre, ce doit être bien corrompu ailleurs. Quant à la dette par tête, elle est de $76.97 dans Québec et de $100 en Ontario. Voilà des faits incontestables.
Il (M. Bertrand) termine par un éloge du premier ministre de la province. Le premier ministre, dit-il, a été à plusieurs reprises la victime d’attaques tendant à le rabaisser. Mais, il est au-dessus de ces critiques malveillantes et il inspire fierté et loyauté à ceux qui l’entourent. Il a les vraies qualités d’un chef, dit-il, il est un chef. Je n’ai jamais lu nulle part que les grands chefs politiques, des hommes comme Churchill, ont laissé d’autres personnes conduire leurs affaires.
(Au moment où il se rassoit, le premier ministre quitte son siège et s’avance dans la rangée du fond, où le député est assis, pour lui serrer la main. Tous les ministres du cabinet imitent son geste.)
M. Brown (Brome) félicite son collègue du comté voisin au sien, le député de Missisquoi (M. Bertrand), pour son magnifique discours. Mais, ajoute-t-il, ce qu'il dit de l'agriculture n'est pas tout à fait au point. La vérité, c'est que moins de 1 % du budget total de la province est affecté à l'amélioration des revenus du fermier. Le cultivateur québécois est le grand oublié du XXe siècle.
Il (M. Brown) rappelle les sommes qui ont été votées depuis 1945 pour l'agriculture et qui se chiffrent à un total de $183,422,124. Puis il cite des statistiques puisées dans l'Annuaire statistique de la province de Québec. De 1945 à 1954, dit-il, le revenu des cultivateurs a diminué six fois comparativement à l'année précédente et il n'a enregistré une augmentation qu'à trois reprises. Il est à noter que durant ces années le budget a augmenté continuellement, alors que le revenu des fermiers a diminué.
Durant les années 1952, 1953 et 1954, la diminution des revenus atteint la somme globale de $63,027,000 ce qui représente une perte de $469 pour chacun des 134,336 cultivateurs qui tentent de survivre dans la province.
Six des neuf dernières années ont été des années de pertes pour les cultivateurs du Québec. Au 1er décembre 1954, 39,047 fermiers de notre province devaient $104,384,595 au gouvernement à 4 % d'intérêt et 4,633 fermiers devaient $10,062,975 à un intérêt de près de 6 %, ce qui veut dire que 43,680 fermiers, sur un total de 134,000, de notre province ont dû emprunter du gouvernement pour survivre, et ceci ne comprend pas ceux qui ont contracté des emprunts personnels soit auprès des notaires ou des prêteurs.
Ces faits nous mènent à la conclusion que plus de la moitié de nos fermes sont hypothéquées pour survivre en attendant que le gouvernement fasse quelque chose pour leur assurer un prix raisonnable pour leurs produits. Il faut augmenter les prix des produits de la ferme pour pouvoir rencontrer les coûts de l’agriculture. Dans mon propre comté, je peux vous donner une liste de 100 fermes qui ont été abandonnées.
Il (M. Brown) insiste pour que le gouvernement fasse quelque chose de positif. Il faut, dit-il, que le gouvernement se serve de la Commission des marchés agricoles, qui est déjà formée pour faire un travail sérieux et assurer aux cultivateurs une augmentation de revenus. Le député de Brome (M. Brown) veut ensuite parler des octrois statutaires.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Cette question a déjà été discutée.
M. Brown (Brome): Certaines particularités m'ont fortement surpris depuis que je siège à l'Assemblée législative. J'ai à maintes reprises siégé dans les galeries, au Parlement du Massachusetts, de la Caroline du Nord et même d'Ottawa. J'ai été surpris de voir comment les choses se passent ici. Cet après-midi, par exemple, j'ai voulu lire l'éditorial d'un journal et cela m'a été défendu. Quelques instants plus tard, un autre député a lu le même éditorial et il n'a pas été arrêté.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Le député siège à Québec où il y a des règlements. C'est clair, c'est élémentaire. Il y a eu des décisions de rendues et le député ne peut les critiquer.
M. Hamel (Saint-Maurice): Il ne critique pas, il dit qu'il a été surpris.
M. l’Orateur: C'est une critique. Le député dit que l'on a permis à un député de faire ce qui lui a été refusé.
M. Brown (Brome) se lève alors pour parler de son chef (M. Hamel). J’ai pleine confiance en lui, dit-il. Si nous avions à choisir un chef dans tout le Canada, nous ne changerions pas.
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières): Cela n'est pas très flatteur pour M. Saint-Laurent.
M. Desjardins (Gatineau) propose, appuyé par le représentant de Laval (M. Pouliot), que le débat soit de nouveau ajourné.
Adopté.
Ajournement
L’honorable M. Duplessis (Trois-Rivières) propose que la Chambre s’ajourne maintenant.
Adopté.
La séance est levée à 10 heures15.
NOTES
1. La loi stipule que tout véhicule automobile, à l’exception des tracteurs de ferme, s’il n’est pas équipé de garde-boue permanents, doit être muni, à l’arrière, de deux garde-boue mobiles d’un modèle approuvé par le sous-ministre. Voir à ce sujet Le Devoir du 20 février 1957, à la page 12.
2. M. Hamel aborde à ce moment un autre article de la loi, à savoir celui qui diminue la responsabilité du père, de la mère ou du tuteur qui donne son consentement à l’enregistrement d’un véhicule acquis et possédé par un mineur et à l’émission d’un permis de conduire. Ceci est rapporté dans Le Devoir du 20 février 1957, à la page 12.
3. $3,351,984, selon le Montréal-Matin du 20 février 1957, à la page 11.
4. M. Hamel revient à ce moment, selon Le Soleil du 20 février 1957, à la page 10, sur la question de la redevance de la deuxième période du bail de 25 ans.
5. M. Duplessis, en formulant cette affirmation, tourne plusieurs fois les yeux vers la Galerie de la Presse, selon L’Événement du 20 février 1957, à la page 1.
6. $75,000 selon L’Action catholique du 20 février 1957, à la page 11.
7. Le Soleil du 20 février 1957 précise, à la page 12, que M. Saint-Onge était l'adversaire de M. Parent dans le comté de Hull, lors des dernières élections.
8. La commission aura plutôt besoin de $500,000, selon L’Action catholique du 20 février 1957, à la page 10.
9. Il pointe alors son doigt vers le premier ministre, selon le Quebec Chronicle du 20 février 1957, à la page 3.
10. La Presse du 20 février 1957 rapporte, aux pages 1 et 59, que le premier ministre a déjà fait allusion à la signature du député de Hull à une autre occasion. Il avait dit alors: "Si la parole du député ne vaut pas mieux que sa signature...".
11. Plus précisément à 8 h 15, selon L’Action catholique du 20 février 1957, à la page 11.
12. M. Courcy commence son discours en lisant son texte. Après environ 10 minutes, le premier ministre soulève un point d’ordre et demande que les règlements de la Chambre, défendant à un député de lire son texte, soient observés. M. Courcy paraît alors déconcerté. M. Hamel veut se porter à sa défense, mais l’Orateur demande de respecter les règlements. M. Courcy met donc de côté son texte et parle pendant près d’une heure. De plus, La Patrie du 20 février 1957 précise, à la page 12, qu’à un certain moment, on ne comptait que 27 députés ministériels et une douzaine de l’opposition en Chambre.
13. Il fait allusion à un journal qui avait publié, durant la dernière campagne électorale, un article afin de dénoncer l’importation d’œufs communistes. Voir le Quebec Chronicle du 20 février 1957, à la page 2.
14. Voir à ce sujet la séance du 13 février 1957. Il faut se rappeler que le critique de l’opposition, M. Émilien Lafrance, avait été expulsé à cette occasion. C’est pour cette raison qu’il n’y a pas eu de débat sur les crédits du bien-être social et de la jeunesse.
15. À 10 h 10, selon La Patrie du 20 février 1957, à la page 12.