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Version finale

12nd Legislature, 3rd Session
(January 10, 1911 au March 24, 1911)

Wednesday, March 8, 1911

Ces débats, reconstitués principalement à partir des comptes rendus des médias de l’époque, ne constituent pas un journal officiel des débats de l’Assemblée législative.

Présidence de l'honorable P. Pelletier

La séance est ouverte à 3 heures.

 

Exploitation minière

M. Mercier fils (Châteauguay) demande la permission de présenter le bill 174 amendant l'article 2160 des statuts refondus, 1909.

Le but de cet amendement est de faciliter aux propriétaires ou détenteurs de concessions minières la tâche souvent difficile de se procurer l'eau nécessaire à une exploitation minière, et plus spécialement au traitement des alluvions aurifères.

Accordé. Le bill est lu une première fois.

 

Messages du Conseil législatif:

M. l'Orateur informe la Chambre que le greffier du Conseil législatif a apporté le message suivant:

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il n'insiste pas sur ses amendements au bill 103 amendant la charte de la Saraguay Electric & Water Company et à d'autres fins, et qu'il les a retirés.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a agréé son amendement à l'amendement fait par le Conseil législatif au bill 128 confirmant la charte du Rivermead Golf Club et étendant ses pouvoirs, sans amendement.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il insiste sur son amendement au bill 111 autorisant le collège des médecins et chirurgiens de la province de Québec à admettre J.-Charles Routhier à la pratique de la médecine, de la chirurgie et de l'obstétrique.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a agréé son amendement au bill C du Conseil législatif autorisant la chambre des notaires de la province de Québec à admettre Francis Mackay à l'exercice de la profession de notaire, après examen, sans amendement.

Le Conseil législatif informe l'Assemblée législative qu'il a agréé son amendement au bill B du Conseil législatif régularisant la cléricature et le brevet de cléricature de Jules-Joseph-Arthur Pérodeau, sans amendement.

Vote plural

M. Plante (Beauharnois) propose, appuyé par le représentant de Compton (M. Giard), qu'il soit résolu que:

Attendu que le vote plural, tel qu'il est exercé dans la province de Québec, ne correspond plus aux aspirations de notre démocratie;

Attendu que le vote est le droit de tout citoyen britannique et ne doit pas reposer sur la fortune ou la condition sociale des individus;

Attendu que le vote plural est une source d'abus et de fraudes et qu'il entraîne des dépenses considérables pour les candidats et les électeurs;

Cette Chambre émette le voeu que la loi électorale de Québec soit amendée de manière que tout citoyen ne puisse exercer son droit de suffrage qu'une seule fois, et cela, au lieu de son domicile.

Notre loi de cens électoral est un mélange des lois anglaises et européennes. Elle repose sur le droit de propriété et sur le droit de citoyenneté.

Nous n'avons pas ici comme en Europe les castes et les dynasties. Nous n'avons pas l'aristocratie de sang, ni du sol, ni de la famille, mais nous avons l'aristocratie du talent et du travail. Et c'est là le véritable esprit d'un pays démocratique, car il permet au plus humble et au plus modeste des citoyens de gravir tous les degrés de l'échelle sociale et de parvenir au premier rang. La représentation proportionnelle, telle qu'on l'a en Belgique et dans d'autres pays d'Europe, donnant une représentation effective à toutes les classes de la société, et spécialement aux minorités, serait le système idéal, mais j'avoue que cette question est prématurée pour le moment au Canada.

Le vote plural tel que pratiqué dans la province ne correspond plus aux aspirations de notre démocratie. Le vote est le droit de tout citoyen britannique et ne doit pas être basé sur la fortune, sur le nombre des propriétés.

Notre loi électorale donne le droit de suffrage aux propriétaires, locataires, occupants, rentiers, instituteurs et à tous ceux qui ont un revenu d'au-delà de $300. Ce droit ne repose donc pas, comme dans les élections municipales, exclusivement sur la qualification foncière. En effet, au point de vue législatif, tant au provincial qu'au fédéral, nous avons l'impôt indirect. C'est la collectivité des individus qui contribue à défrayer la dépense publique. Tandis qu'au point de vue municipal l'impôt frappe directement la propriété foncière qu'elle grève d'un impôt de 20 %, d'après les articles 978 et suivants du code municipal. On saisira immédiatement la distinction qui existe entre le cens municipal et le suffrage électoral parlementaire en se rappelant que toute la dette de la province est d'environ $26,000,000 lorsque la dette qui obère la propriété foncière au point de vue municipal est d'au-delà de $200,000,000. Ainsi, si l'administration municipale de Montréal encourt ou crée une dette exagérée, ce sont les seuls citoyens de Montréal qui seront appelés à la payer, et il est juste, dans ce cas, qu'ils puissent voter dans autant de quartiers qu'ils ont de propriétés, puisqu'en définitive ce sont leurs propriétés qui seront appelées à acquitter cette dette. Mais, si l'administration provinciale crée une dette de $50,000,000, tous les citoyens de la province également, celui de Hull comme celui de Chicoutimi, seront appelés à l'acquitter par le moyen des impôts indirects.

Ai-je besoin d'ajouter que, dans la province-soeur d'Ontario, cette loi du "One man, one vote" fonctionne admirablement bien et que l'axiome bien connu que "tout le monde est égal devant la loi" s'y trouve réalisé dans toute sa plénitude1.

La province d'Ontario a déjà donné l'exemple de cette réforme et il serait temps pour la province de Québec d'en faire autant.

Le vote plural est une source d'abus considérables et de fraudes. Les candidats et les électeurs en souffrent, puisque les uns et les autres sont obligés de faire des dépenses considérables.

Cette loi est non seulement égalitaire, mais moralisatrice. En effet, on sait qu'il est défendu, sous peine de pénalités très sévères, par notre loi électorale, de transporter des voteurs le jour de la votation. Or c'est un fait connu qu'avec nos moeurs électorales actuelles on fait venir de très loin, le jour de la votation, et à grand renfort d'argent, des voteurs qui résident ailleurs, et cela en violation de la loi.

Les frais de transport coûtent souvent une quarantaine de piastres. Et, cependant, la loi électorale dit qu'il est défendu de donner soit directement ou indirectement de l'argent pour le transport des voteurs.

Sûrement le temps est venu pour nous d'adopter le principe plus moderne qui est le corollaire naturel du droit de suffrage du citoyen, le vote au lieu du domicile. Dans une démocratie, les lois, devant s'appliquer dans la même mesure à tous les citoyens, doivent être aussi, dans la même mesure, l'oeuvre de tous les citoyens. Ce principe, dont on ne discutera pas la solidité, est violé par le vote plural qui donne à quelques citoyens favorisés sous le rapport de la fortune trois ou quatre votes, tandis que les autres n'en ont qu'un.

Autrefois, lorsque le cens électoral n'appartenait qu'à quelques-uns et était mesuré sur la richesse des citoyens, la légitimité d'un vote plural pouvait être discutée.

Aujourd'hui que le vote est le droit reconnu de tout citoyen, que ce droit est basé non sur la richesse, non sur la position sociale ou sur la fortune, mais sur le fait d'être citoyen, le vote plural n'a pas sa raison d'être. On ne peut être citoyen dans plusieurs circonscriptions électorales à la fois.

Je prétends qu'avec le système de vote plural nous donnons une prime à la richesse et à la corruption.

Avec ce système, on voit, d'un côté, l'ouvrier aller modestement déposer son bulletin dans l'urne le matin en se rendant à l'ouvrage ou pendant son heure du midi et, d'un autre côté, on voit le riche propriétaire partir le matin en automobile pour aller voter dans 8 ou 10 circonscriptions électorales et souvent noyer dans les divisions qu'il n'habite pas la véritable opinion locale.

D'ailleurs, cette mesure est essentiellement libérale et je ne suis pas seul à la préconiser. Le journal Le Canada a déjà fait une campagne en faveur de cette question. Il cite notamment un article éditorial de ce journal, du 1er octobre 1908, où l'idée qu'il émet est longuement développée.

Il cite des articles du Canada qui s'est prononcé, il y a une couple d'années, en faveur de l'abolition du vote plural.

Il rappelle que le Free Press d'Ottawa et quelques autres journaux se sont déjà prononcés en faveur du principe d'un seul vote pour le même homme.

Le Club de réforme de Montréal s'est prononcé dernièrement encore favorablement à l'abolition du vote plural.

L'honorable premier ministre lui-même, avant les élections de 1908, s'est fait le défenseur de cette idée. Il disait que c'était une question à l'ordre du jour et qui n'était encore qu'à l'état de projet, mais qu'il faudrait tôt ou tard réaliser.

Je crois que le temps est venu pour cette législature, étant donné nos moeurs électorales et la mentalité de notre population, d'étudier sérieusement cette question et de soumettre un projet de loi qui, en abolissant le vote plural, mettra tous les citoyens de cette province sur un pied d'égalité et sera de nature à épurer nos moeurs électorales.

M. Mousseau (Soulanges) félicite le député de Beauharnois (M. Plante) de son initiative et concourt entièrement dans ses remarques.

Il se déclare personnellement en faveur de la motion du député de Beauharnois (M. Plante). Il est évident, à son avis, que nombreux sont les inconvénients causés par le vote plural.

Il est incontestable que l'immigration qui s'opère à chaque élection générale n'est pas sans apporter de grands ennuis et beaucoup d'inconvénients. Le système actuel donne lieu à des abus et à des injustices. Cependant, le nouveau mode de vote entraînera aussi des difficultés.

Il doute que le Québec soit mûr pour cela. Il reconnaît que c'est une bonne idée, mais elle demande réflexion. Il se demande si le remède qu'on veut y apporter est bien la réparation qu'il faut au mal qui existe.

Le projet du député de Beauharnois (M. Plante) donne l'impôt comme la source du droit de vote. On admettra qu'il est juste que celui qui paie taxe ait le droit de vote. Pour cela, on rencontrera des difficultés à priver tel ou tel propriétaire payant taxe dans tel ou tel district électoral de son droit de vote.

Quant à la question de domicile, il ne serait peut-être pas aisé de déterminer où il est dans certains cas. Le domicile légal n'est pas toujours le même que le domicile politique.

Il trouverait regrettable, par exemple, que des centaines d'électeurs de Soulanges qui ont le droit de voter à Montréal, où quelques-uns ont même des domiciles d'affaires, ne puissent jouir d'une considération spéciale à ce titre.

À tout événement, il est d'avis qu'il y a là matière à sérieuse réflexion et qu'il serait bon d'étudier le problème dans le but d'en arriver à rendre plus complète la liberté de suffrage.

Il considère que ce bill est trop important pour qu'il soit adopté à cette période-ci de la session et il est d'avis que Québec n'est pas prêt pour une telle mesure.

M. Galipeault (Bellechasse) propose que le débat soit ajourné.

M. Bourassa (Saint-Hyacinthe): Pourquoi ajourner cette discussion? La Chambre serait très heureuse de connaître l'opinion du gouvernement à ce sujet.

Il y a du bon pour la Chambre à discuter plus longuement une question aussi intéressante.

(Personne ne se lève du côté ministériel.)

M. Bourassa (Saint-Hyacinthe) reprend la discussion. La question est importante et, puisque l'on a donné tant d'extension au suffrage, ne vaudrait-il pas mieux en venir au système: Un homme, un vote?

Il se demande si le droit de suffrage doit être considéré comme un droit individuel ou bien comme une conséquence de certaines conditions dans le titre de propriétaire et de citoyen. Cette dernière théorie pourrait être admise dans les administrations municipales qui ont à gérer les questions d'impôt direct sur la propriété et le développement immédiat de la propriété. Mais dans les affaires nationales chaque citoyen devrait être partagé également.

Dans les questions municipales qui touchent directement à la propriété, il est explicable que la qualification électorale repose sur le droit de propriété, mais en matière politique il est possible que ce système ait fait son temps.

Le droit de suffrage doit être considéré comme droit individuel. Et l'on devrait cesser de fonder le droit de vote sur le montant et le lieu des propriétés du citoyen.

La question est encore débattue par les diverses écoles. Le suffrage universel comporte des abus qui ne peuvent être ignorés, mais dans les conditions actuelles de la société c'est le principe qu'il est bon d'adopter comme base. La multiplication des votes en proportion de la propriété n'a plus sa raison d'être. Autrement, il faudrait donner à un homme, dans la même circonscription, autant de votes qu'il a de propriétés. Et une fois partis dans ce sens, en se basant sur le principe du vote en proportion des biens, il faudrait donner aux actionnaires des compagnies un nombre de votes basé sur la quantité des actions qu'ils possèdent. Le vote basé sur le paiement des droits donnerait aux grands importateurs un nombre de votes qui deviendrait scandaleux.

Il ajoute qu'il n'est pas convaincu que le suffrage universel soit une panacée et il poursuit en disant qu'il est temps de reconnaître le principe énoncé dans cette motion.

En tout cas, il vaut la peine d'étudier la question et de comparer les différents systèmes existants.

Il fait ensuite référence au système établi en Belgique; il dit que, quand viendra le jour de réformer notre système, on trouvera profit à étudier le cens électoral établi en Belgique. Je crois, dit-il, que le système belge serait intéressant comme base d'une étude de ce genre. Ainsi, le système belge a son côté instructif.

La Belgique, pays très avancé, peut-être le plus avancé de tous parce qu'il s'est inspiré de la mentalité anglaise, de la mentalité française et de la mentalité allemande, les trois écoles qui ont fait le monde moderne. Elle a pris ce qu'il y avait de meilleur dans la mentalité française et la mentalité allemande, c'est-à-dire qu'elle est un progrès sur les trois nations les plus avancées du monde. Or, dans ce pays libéral et traditionnel, le suffrage universel est établi comme base mais, pour donner au citoyen une meilleure conscience de ses devoirs et de ses responsabilités sociales, on a établi un système de droits de suffrage additionnels propre à encourager les initiatives, le travail et l'instruction.

Au père de famille la loi accorde deux votes, tandis qu'un homme qui n'est pas marié n'a droit qu'à un vote. Et il a tendance à approuver cette différence. À celui qui acquiert une certaine valeur économique elle donne un troisième vote, et à celui qui obtient un certain degré d'instruction elle en donne un quatrième. Par ce système, la Belgique offre une prime à la paternité, à l'initiative économique et à l'instruction.

Cela porte la démocratie à aspirer sans cesse vers une espèce d'aristocratie, et cet effort ascensionnel augmente la propriété matérielle et l'élévation morale du peuple.

Ce système est peut-être celui qui concrétise le mieux sous une forme politique l'organisation des sociétés. Le principe démocratique est reconnu et, mieux, ennobli, assurant ainsi le succès des démocraties qui ont besoin pour se conserver de tendre vers un but toujours plus élevé.

Sans dire que ce système doit être adopté ici, il croit qu'il serait bon de l'étudier. Il serait peut-être bon de s'inspirer en quelque sorte du système de la Belgique en étudiant le moyen d'améliorer notre régime électoral.

M. Galipeault (Bellechasse) propose une nouvelle fois que le débat soit ajourné.

M. Prévost (Terrebonne) et M. Plante (Beauharnois) s'opposent à cette proposition et discutent la question au mérite.

M. Prévost (Terrebonne) demande au premier ministre pourquoi l'on n'épuise pas le débat tout de suite. Il ne voit pas pourquoi le gouvernement veut empêcher la Chambre d'exprimer aujourd'hui son opinion sur cette importante question. Il croit le temps venu de faire cesser la coutume de trains spéciaux transportant des centaines d'électeurs ruraux à Montréal les jours de votation. Le Parlement actuel sera bientôt prorogé et, si le débat était remis, il ne reviendrait plus à cette session.

Il se montre favorable au projet du député de Beauharnois (M. Plante) et trouve que ce serait un moyen d'empêcher les candidats de s'entendre avec les compagnies de chemin de fer pour transporter des électeurs par trains spéciaux et de dépenser $300 ou $400 pour se faire des majorités.

Il est aussi de l'avis des députés qui ont émis leur opinion sur cette question avant lui. À chaque élection, on voit deux trains différents, l'un pour les libéraux et l'autre pour les conservateurs, amenant dans les comtés des citoyens qui viennent voter, et cela coûte $300 à $400 à chaque candidat.

Il demande au gouvernement d'émettre son opinion sur cette question. Le premier ministre, dit-il, a l'air à dire: Il a raison, le député de Beauharnois.

L'honorable M. Gouin (Portneuf) se défend d'avoir suggéré au député de Bellechasse (M. Galipeault) de proposer l'ajournement du débat.

Je n'ai aucune objection, ajoute-t-il, à dire que je suis favorable au principe que le député de Beauharnois (M. Plante) veut faire adopter.

Il rappelle aux honorables députés que la discussion doit se faire sur la motion d'ajournement du débat. On ne devrait pas être opposé à l'ajournement qui indique que plusieurs députés ont l'intention de prendre part au débat et de traiter sérieusement la question, comme c'est le désir du promoteur.

Le député de Beauharnois ne devrait pas s'y objecter puisqu'il veut que plusieurs députés se prononcent sur cette question.

M. Prévost (Terrebonne) s'étonne de cette attitude des ministres. Pour lui, la question se résume à une affaire d'élection. C'est un scandale de voir en temps d'élection les deux partis organiser des convois pour racoler les absents du comté qui sont précisément ces messieurs dont le droit de suffrage se pose sur le domicile, et il importe d'y mettre fin au plus tôt.

M. Plante (Beauharnois), dans quelques mots de réplique, insiste encore sur le fait que le vote plural entraîne des dérogations à la loi électorale qui défend que des sommes soient payées directement ou indirectement pour le transport des voteurs.

M. Galipeault (Bellechasse) propose que le débat soit ajourné.

M. Langlois (Montréal no 3) demande aussi que la Chambre émette son opinion sur la question aujourd'hui même.

Il craint que l'ajournement soit un avis d'enterrement. Il s'étonne qu'on ne soit pas pressé du côté ministériel à accueillir la proposition. Il est surpris de la manière dont le gouvernement considère cette motion, étant donné qu'elle est d'une portée vraiment libérale.

Il trouve étrange qu'un gouvernement libéral hésite à se prononcer sur un principe qui a toujours été réputé libéral et qui est présenté par un député conservateur.

Il aurait proposé cette motion lui-même, mais il craint toujours que sa mauvaise réputation ne nuise aux bonnes mesures comme celle-là. On sait que toutes les mesures qu'il propose sont dangereuses. L'expérience lui a montré que ses mesures n'étaient pas bien vues, alors il a préféré laisser la chose au député de Beauharnois (M. Plante).

Notre loi électorale devrait être empreinte davantage du véritable sens libéral. Le vote ne devrait pas se baser sur la richesse des individus, mais sur le principe: "One man, one vote".

Il croit absurde que l'on base le cens électoral sur la richesse individuelle, et la Chambre devrait être unanime là-dessus. Les abus et les injustices auxquels donne lieu le système actuel suffisent à le faire condamner par tout homme soucieux d'un peu de justice.

Le système belge proposé comme exemple par le député de Saint-Hyacinthe (M. Bourassa) ne pourrait pas s'appliquer avantageusement dans notre province.

La Chambre devrait être unanime sur cette question. C'est d'ailleurs une mesure libérale (applaudissements de l'opposition) et le député de Beauharnois (M. Plante) ne prend pas le gouvernement à la gorge avec cette mesure. Si le gouvernement n'est pas opposé au principe "One man, one vote", rien ne l'empêche d'étudier la question et d'arriver avec une réforme à la prochaine session ou à une autre session.

Quand bien même l'on ne ferait rien cette année, l'on pourrait toujours étudier la question ou, si l'on ne veut pas se fatiguer, en confier l'étude à un comité de députés.

Il pense qu'il serait bon de référer ces motions à un comité pour qu'elles soient étudiées et qu'un rapport soit fait. Ce n'est là qu'une opinion que j'exprime devant la Chambre, dit-il, et si cette motion est adoptée elle ne fera qu'autoriser le gouvernement à étudier la question.

Tout le monde devrait être unanime en faveur de ce principe, car l'heure est arrivée d'en faire une juste application.

On ne devrait pas s'opposer à une mesure qui vient de l'opposition quand elle est dans la bonne voie.

M. Galipeault (Bellechasse) propose, appuyé par le représentant de Verchères (M. Geoffrion), que le débat soit ajourné.

La motion étant mise aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Benoît, Bissonnet, Blouin, Bourassa, Carbonneau, Cardin, Caron (L'Islet), Caron (Matane), Daigneault, Décarie, Delâge, Delisle, Devlin, Dion, Dupuis, Finnie, Gaboury, Galipeault, Gault, Gendron, Geoffrion, Gosselin, Gouin, Kelly, Lafontaine (Berthier), Lafontaine (Maskinongé), Langlois (Saint-Sauveur), Leclerc, Lesieur Desaulniers, Létourneau, Lévesque, Mackenzie, Mercier, Mousseau, Neault, Patenaude, Pennington, Perron, Petit, Pilon, Robert (Saint-Jean), Robillard, Taschereau, Tellier, Tessier, Thériault, Vilas, Walker, 48.

Contre: MM. Bernard, D'Auteuil, Giard, Godbout, Langlois (Montréal no 3), Lavergne, Plante, Prévost, Séguin, Sylvestre, Tanguay, Tourigny, 12.

Ainsi, la motion est adoptée.

Renvoi de la défense

M. Perron (Gaspé) propose, selon l'ordre du jour et appuyé par le représentant de Bellechasse (M. Galipeault), que les amendements faits en comité général au bill 158 amendant le code de procédure civile soient adoptés par la Chambre.

Adopté sur division.

M. Perron (Gaspé) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

M. Tellier (Joliette) propose en amendement, appuyé par le représentant de Saint-Hyacinthe (M. Bourassa), que le bill ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais dans six mois.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Allard, Benoît, Bernard, Bourassa, Carbonneau, Cardin, Caron (L'Islet), Caron (Matane), Delâge, Delisle, Devlin, Dion, Dupuis, Finnie, Gaboury, Gault, Gendron, Geoffrion, Giard, Godbout, Gosselin, Gouin, Kaine, Lafontaine (Maskinongé), Langlois (Montréal no 3), Langlois (Saint-Sauveur), Lavergne, Lesieur Desaulniers, Lévesque, Mackenzie, Mercier, Neault, Patenaude, Pennington, Petit, Pilon, Robert (Saint-Jean), Sylvestre, Tellier, Tessier, Tourigny, Vilas, Walker, Walsh, 44.

Contre: MM. Bissonnet, Blouin, Daigneault, Décarie, Galipeault, Kelly, Lafontaine (Berthier), Leclerc, Létourneau, Mousseau, Perron, Plante, Robillard, Séguin, Taschereau, Thériault, 16.

Ainsi, l'amendement est adopté.

La motion principale ainsi amendée est alors soumise et elle est adoptée.

Élections contestées

M. Perron (Gaspé) propose, selon l'ordre du jour et appuyé par le député de Bellechasse (M. Galipeault), que les amendements faits par le comité général au bill 160 amendant la loi des élections contestées de Québec soient maintenant lus une deuxième fois.

Adopté sur division.

M. Perron (Gaspé) propose, appuyé par le représentant de Bellechasse (M. Galipeault), que lesdits amendements soient maintenant adoptés.

Adopté sur division.

M. Perron (Gaspé) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

M. Bourassa (Saint-Hyacinthe) propose en amendement, appuyé par le représentant de Joliette (M. Tellier), que le bill ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais dans six mois.

Il fait remarquer que s'il y a, en matière de contestation, des abus, c'est dans la simplification et non dans la complication des procédures qu'il faut en chercher le remède.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Bernard, Bourassa, Gault, Giard, Lafontaine (Maskinongé), Lavergne, Patenaude, Prévost, Sylvestre, Tellier, 10.

Contre: MM. Allard, Benoît, Bissonnet, Blouin, Carbonneau, Cardin, Caron (L'Islet), Caron (Matane), Daigneault, Décarie, Delâge, Delisle, Devlin, Dion, Dupuis, Finnie, Francoeur, Gaboury, Galipeault, Gendron, Geoffrion, Godbout, Gosselin, Gouin, Kaine, Kelly, Lafontaine (Berthier), Langlois (Montréal no 3), Langlois (Saint-Sauveur), Leclerc, Lesieur Desaulniers, Létourneau, Lévesque, Mackenzie, Mercier, Morisset, Mousseau, Neault, Pennington, Perron, Petit, Pilon, Plante, Robert (Saint-Jean), Robillard, Tanguay, Taschereau, Tessier, Thériault, Tourigny, Vilas, Walker, Walsh, 53.

M. Lavergne (Montmagny), pendant qu'on enregistre le vote, dit: À la file les moutons!

Ainsi, l'amendement est rejeté.

La motion principale est alors soumise et résolue dans l'affirmative sur la même division renversée2. Le bill est lu une troisième fois.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Pensions alimentaires

M. Geoffrion (Verchères) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 171 amendant l'article 1150 du code de procédure civile.

Adopté.

 

En comité:

M. Geoffrion (Verchères): Cet amendement a pour but d'entrer sur la liste des causes sommaires des actions en recouvrement alimentaire.

M. Prévost (Terrebonne) discute tout l'article 1150 du code de procédure. Il voudrait retrancher de la liste des actions sommaires plusieurs causes, par exemple les actions pour argent prêté, pour services d'avocat, de notaire ou de médecin, pour impressions.

Le comité, ayant étudié le bill, en fait rapport sans amendement.

M. Geoffrion (Verchères) propose que le bill soit maintenant lu une troisième fois.

Adopté.

Il est ordonné que le greffier porte le bill au Conseil législatif et demande son concours.

Élections contestées

M. Tellier (Joliette) propose, selon l'ordre du jour, que la Chambre se forme en comité général pour étudier le bill 166 amendant la loi des élections contestées de Québec.

Adopté.

 

En comité:

Le comité étudie l'article 1 qui se lit comme suit:

"1. L'article 556 des statuts refondus, 1909, est remplacé par le suivant:

"556. La pétition est périmée par la discontinuation de poursuites durant trois mois.

"Néanmoins, la péremption n'a pas lieu lorsque la procédure est forcément arrêtée par un incident, un jugement interlocutoire, une inscription en révision ou en appel."

M. Tellier (Joliette) demande l'adoption de son projet de loi qui ferait disparaître du statut le texte déclarant que tout pétitionnaire dans une poursuite pour invalidation d'élection perdait ses droits et payait les frais de procédure s'il ne commençait pas son enquête dans un délai de quatre mois.

Il fait un plaidoyer en faveur de sa mesure. Par la loi actuelle, une pétition pour contestation d'élection qui n'est pas procédée dans trois mois est renvoyée. Or il demande par son bill que la pétition ne soit pas renvoyée si le retard est dû à un incident, un jugement interlocutoire, une inscription en révision ou un appel.

Il voudrait que l'on donnât un peu plus de chances au pétitionnaire dans une contestation d'élection que ne lui en donne la loi de 1900, telle qu'amendée par le droit d'appel accordé cette année.

L'honorable M. Gouin (Portneuf) ne comprend pas pourquoi le chef de l'opposition insiste tant sur ce projet quand personne n'a souffert depuis que le texte actuel existe. Il n'est pas juste que le défenseur soit soumis trop longtemps au régime d'incertitude qui dure pendant toutes les procédures.

Il soutient qu'il n'existe aucun exemple de personnes ayant été privées de leurs droits ou qui ont subi une injustice sous la loi actuelle, et il ajoute qu'il serait immoral qu'un pétitionnaire puisse laisser planer longtemps la menace d'une action en justice au-dessus de la tête d'un candidat élu.

Le but de la loi actuelle est de forcer l'instruction rapide des causes. Avec l'article du représentant de Joliette (M. Tellier), un pétitionnaire pourrait laisser traîner son action des années durant.

Il n'a en vue que de hâter la procédure et, s'il demande que le bill soit rejeté, c'est tout simplement parce que la loi actuellement en vigueur donne satisfaction, attendu qu'il n'y a actuellement aucune contestation d'élection pendante devant les tribunaux.

M. Tellier (Joliette): C'est sans doute en vertu de ce principe que le premier ministre vient de voter pour créer des appels qui pourront faire durer la contestation pendant des années. Le premier ministre excelle dans l'art de faire voir une question sous un autre jour que sous son jour véritable.

Il fait observer que le défendeur peut fort bien retarder les procédures, au moins aussi bien que le pétitionnaire. S'il n'y a pas de cas d'abus de la loi actuelle, c'est que les neuf dixièmes des causes sont réglées derrière le rideau. Il est reconnu que les contestations sont presque toutes réglées par entente entre les partis. Le procureur général l'ignore-t-il?

Les trois quarts auraient été menées jusqu'au bout si les pétitionnaires avaient pu procéder dans les trois mois.

Il y a une lacune quelque part et, si ce bill est adopté, on aura réussi à trouver une solution au problème. Et l'on fera ainsi preuve de plus de rigueur aux élections.

Il a toujours été contre cette loi et il est encore contre. Le premier ministre n'a pas voulu prendre la défense de cette loi en 1900 et il ne devrait pas la défendre aujourd'hui.

L'honorable M. Gouin (Portneuf) : Je ne m'y connais pas plus que le chef de l'opposition là-dessus.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) dit qu'il y a autant de mal pour un parti que pour l'autre dans de tels cas. Il répète qu'il n'y a pas un cas où quelqu'un ait souffert de la loi actuelle depuis qu'elle a été passée en 1900.

M. Tellier (Joliette) échange quelques répliques avec le ministre des Travaux publics au sujet de cette loi de 1900.

L'honorable M. Gouin (Portneuf): Six heures veut sonner. Rapportons progrès.

M. Tellier (Joliette): Votons.

L'honorable M. Taschereau (Montmorency) propose que le comité se lève.

M. Lavergne (Montmagny): Soyez donc un peu plus brave que cela!

L'honorable M. Gouin (Portneuf) consent au vote.

Le comité, ayant étudié le bill, rapporte progrès.

M. Tellier (Joliette) propose, appuyé par le député de Saint-Hyacinthe (M. Bourassa), que le bill soit maintenant considéré de nouveau en comité général.

L'honorable M. Gouin (Portneuf) dit (discrètement) au député de Soulanges (M. Mousseau): Proposez le renvoi à six mois.

M. Lavergne (Montmagny): Pourquoi ne faites-vous pas la proposition vous-même? Cela est plus brave.

M. Mousseau (Soulanges) dit que le premier ministre ne lui a pas fait signe.

M. Lavergne (Montmagny): J'affirme de mon siège que j'ai vu et entendu le premier ministre dire au député de Soulanges (M. Mousseau) de proposer le renvoi à six mois.

M. Mousseau (Soulanges) propose en amendement, appuyé par le député de Lévis (M. Blouin), que le bill ne soit pas considéré de nouveau en comité général maintenant, mais dans six mois.

L'amendement étant mis aux voix, la Chambre se divise. Les noms sont appelés et inscrits comme suit:

Pour: MM. Allard, Benoît, Blouin, Cardin, Caron (L'Islet), Caron (Matane), Daigneault, Décarie, Delâge, Delisle, Devlin, Dion, Francoeur, Gaboury, Galipeault, Gendron, Geoffrion, Godbout, Gosselin, Gouin, Hay, Kaine, Lafontaine (Berthier), Langlois (Saint-Sauveur), Leclerc, Lesieur Desaulniers, Lévesque, Mackenzie, Mercier, Morisset, Mousseau, Neault, Petit, Pilon, Robert (Saint-Jean), Robillard, Séguin, Taschereau, Tessier, Thériault, Tourigny, Walsh, 42.

Contre: MM. Bernard, Bourassa, D'Auteuil, Gault, Giard, Lafontaine (Maskinongé), Langlois (Montréal no 3), Lavergne, Patenaude, Pennington, Sylvestre, Tellier, 12.

M. Lavergne (Montmagny) fait une observation au sujet du député de Bagot (M. Daigneault), qui a voté pour imiter ses collègues de la droite. Il affirme qu'il a voté sans savoir de quoi il s'agissait, étant entré après la discussion3.

M. l'Orateur pose la question au député de Bagot (M. Daigneault).

M. Daigneault (Bagot) avoue que c'est vrai.

(Le nom du député de Bagot est retranché du vote.)

M. Prévost (Terrebonne), qui est entré en même temps, demande qu'on lui lise la motion.

Une voix lit la motion.

M. Prévost (Terrebonne) déclare qu'il vote contre.

Le résultat du vote se lit désormais comme suit:

Pour: MM. Allard, Benoît, Blouin, Cardin, Caron (L'Islet), Caron (Matane), Décarie, Delâge, Delisle, Devlin, Dion, Francoeur, Gaboury, Galipeault, Gendron, Geoffrion, Godbout, Gosselin, Gouin, Hay, Kaine, Lafontaine (Berthier), Langlois (Saint-Sauveur), Leclerc, Lesieur Desaulniers, Lévesque, Mackenzie, Mercier, Morisset, Mousseau, Neault, Petit, Pilon, Robert (Saint-Jean), Robillard, Séguin, Taschereau, Tessier, Thériault, Tourigny, Walsh, 41.

Contre: MM. Bernard, Bourassa, D'Auteuil, Gault, Giard, Lafontaine (Maskinongé), Langlois (Montréal no 3), Lavergne, Patenaude, Pennington, Prévost, Sylvestre, Tellier, 13.

Ainsi, l'amendement est adopté.

La motion principale ainsi amendée est adoptée.

 

Dépôt de documents:

Compagnie de chemin de fer Québec et Lac-Saint-Jean, taux de transport

L'honorable M. Décarie (Hochelaga) dépose sur le bureau de la Chambre la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 31 mai 1910, pour la production de la correspondance et du rapport par M. L. A. Vallée, ingénieur du département des Travaux publics et du Travail, concernant les taux excessifs exigés par la compagnie de Québec et Lac-Saint-Jean pour le transport des voyageurs et du fret sur ses lignes et embranchements. (Document de la session no 91)

Compagnies de chemin de fer, sommes dues au gouvernement

L'honorable M. Décarie (Hochelaga) dépose sur le bureau de la Chambre la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 18 mai 1910, pour la production de copie du compte, des instructions, des documents et de la correspondance se rapportant à l'item de $350 payé à Philéas Corriveau, avocat, sommes dues au gouvernement par des compagnies de chemin de fer et paraissant à la page 317 des comptes publics pour l'exercice finissant le 30 juin 1909. (Document de la session no 92)

Pont en fer sur la grande rivière du Loup

L'honorable M. Décarie (Hochelaga) dépose sur le bureau de la Chambre la réponse à un ordre de la Chambre, en date du 27 février 1911, pour la production de copie de toute correspondance ainsi que de tous autres documents échangés entre le gouvernement et le conseil municipal de la paroisse de Saint-Antoine de la Rivière du Loup, concernant la construction d'un pont en fer sur la grande rivière du Loup. (Document de la session no 93)

La séance est levée à 6 heures.

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NOTES

 

1. Cet extrait du discours de M. Plante est reproduit dans la Patrie du 9 mars 1911, à la page 7, et dans le Devoir du 9 mars 1911, à la page 3, avec quelques légères variations dans le vocabulaire.

2. Le Devoir précise au sujet de ce vote que "M. Gouin sonne le "fall-in", comme on dit pour jouer au soldat", ce qui veut dire qu'il s'agit d'une mesure ministérielle.

3. Cette intervention et les autres qui suivent sont tirées de l'Action sociale du 9 mars 1911, à la page 8. Notons que ce journal est généralement favorable à l'opposition. Dans cet extrait, il semble donner le beau rôle à M. Lavergne et discréditer le député de Bagot (M. Daigneault). D'ailleurs, ce dernier soulève le lendemain une question de privilège sur le sujet.