Point de presse de Mme Yolande James, porte-parole de l'opposition officielle en matière de développement durable et d’environnement
Version finale
Le mercredi 21 novembre 2012, 13 h 30
Salle Bernard-Lalonde (1.131),
hôtel du Parlement
(Treize heures trente-quatre minutes)
Mme James: Alors, bonjour, mesdames et messieurs. Dans les derniers rebondissements de l'affaire Breton, ce matin, je crois qu'on assiste essentiellement à un «cover-up» de la part du gouvernement. Vous allez me permettre un anglicisme. J'espère que la ministre de l'Éducation va me pardonner de m'exprimer en langue étrangère. Mais, de toute évidence, à la fois par les manoeuvres et les réponses du leader du gouvernement ce matin à l'Assemblée nationale, le gouvernement tente d'étouffer la chose.
Il est tout à fait, rapidement, pertinent de revenir un peu à la fois sur l'incident... Il ne faut certainement pas oublier que, le 24 octobre dernier, selon de multiples sources, il y a eu une rencontre où le ministre actuel de l'Environnement et du Développement durable a rencontré les employés du BAPE. Il a rencontré les commissaires à huis clos. Il faut certainement... Dans la séquence des événements, avant de les rencontrer il avait déjà congédié maintenant l'ex-président, M. Renaud. Il a rencontré les commissaires à huis clos, à portes fermées, il a passé ses messages pour s'assurer, j'imagine, que les gens ont bien compris. Quelques jours plus tard, la semaine dernière, il a congédié M. Fortin.
Par la suite, par de multiples, encore une fois, sources et articles, on comprend qu'il y a plusieurs contradictions que le ministre n'a jamais et n'a toujours pas clarifiées. Quand on parle de contradictions, je veux dire, clairement, d'une part, lorsque je lui ai posé les questions... ou lorsque le chef, aussi, de l'opposition officielle lui a posé des questions, il a répondu que la liste de cellulaires... il n'avait jamais demandé la liste. Quelques minutes plus tard, son attachée de presse affirme: Non, non, non. On l'a bel et bien, on l'a bien, la liste. Puis, samedi dernier, on apprend dans les journaux que la porte-parole du BAPE explique un échange où il y a eu destruction d'une liste.
Écoutez, de toute évidence, on lui a donné, je lui ai donné de multiples occasions de répondre, de clarifier la situation sur qu'est-ce qui s'est passé, compte tenu... Et ça, ce n'est pas... ce n'est pas banal, pardon, de revenir sur l'importance non seulement du BAPE et des commissaires... Contrairement à ce que le ministre de la Justice a affirmé à l'Assemblée nationale hier, les commissaires ne sont pas les employés du ministre de l'Environnement. Ils ont, en vertu de l'article 6.5, là, de la loi, les pouvoirs de faire enquête.
Alors, dans les circonstances, on a de la difficulté à comprendre pourquoi le ministre ne s'explique toujours pas. Il a arrêté de poser des questions, et en plus, et en plus, ce qui est encore plus grave, la première ministre adhère à sa théorie de visite de courtoisie. Elle adhère à ça. La question aussi se pose: Pourquoi? On le sait, là, on sait que, lorsqu'elle sortait de la tempête, de la crise du PQ, la première personne, c'était Daniel Breton, d'accepter de se présenter pour le Parti québécois. On comprend qu'elle a une dette envers lui. Qu'est-ce qui se passe, là? Mais c'est inacceptable.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé la motion, qu'on dépose la motion. Et, lorsqu'on lit la motion, l'objectif est très clair: c'est de faire la lumière sur des événements, sur la rencontre du 24 octobre. Alors, je comprends maintenant. S'il y avait encore un doute dans notre esprit ce matin sur s'il y avait quelque chose à cacher de la part du Parti québécois, c'est le leader du gouvernement qui nous l'a confirmé ce matin, lorsqu'il essaie d'étouffer la chose en essayant d'utiliser des prétextes ou des manoeuvres réglementaires pour bloquer la recevabilité de la motion.
Mais, soyons clairs, je pense que, pour les citoyens, c'est notre rôle comme parlementaires de faire la lumière de cette situation-là. Et on souhaite que le ministre se présente en commission parlementaire afin de finalement expliquer ce qui s'est passé le 24 octobre dernier.
M. Robillard (Alexandre): Donc, est-ce que vous croyez le ministre Breton quand il vous dit que c'était une visite de courtoisie puis que ça a simplement servi à assurer les membres du BAPE de l'indépendance de leur travail? Est-ce que vous le croyez?
Mme James: Bien, d'une part, le ministre n'a jamais donné d'explications suffisantes ni concrètes face à ce qui s'est passé lorsque je lui ai posé, à maintes reprises, des questions à l'Assemblée. Encore ce matin, vous avez eu l'exemple. Lorsque je lui ai donné encore l'occasion d'en parler, il m'a répondu: J'ai à coeur les enjeux de l'environnement. Il ne nous a jamais, ni à vous ni à ses pairs à l'Assemblée nationale, donné d'explications, alors qu'on lui a donné l'occasion de le faire. Si on arrive aujourd'hui à l'étape où on doit déposer une motion et où on souhaite entendre le ministre en commission parlementaire, c'est parce qu'il n'a, de tout évidence, pas donné d'explications non seulement suffisantes...
M. Robillard (Alexandre): Mais il nie quand même. Donc, je veux juste préciser parce que, dans le fond, ce que le gouvernement dit, c'est que vous remettez en question la parole d'un député puis que, ça, selon le règlement de l'Assemblée nationale, vous n'êtes pas supposée le faire. Donc, c'est pour ça que je vous pose cette question-là. Il a nié, il a quand même nié. Il a dit non la semaine dernière. Donc, vous ne croyez pas cette réponse-là?
Mme James: Vous avez dit... Je veux juste reprendre vos propos. Ce n'est pas une question de remettre en question ce que le ministre a dit, c'est une question d'aller au fond des choses et de faire la lumière sur ce qui s'est passé. Le ministre a affirmé, que je sache, là, puis j'ai quand même suivi ça d'assez près, comme vous, qu'il n'a jamais eu la liste. Mais par la suite son attachée de presse, quelques minutes plus tard, là, a dit: Non, non, non. On l'a toujours eue... quelques jours plus tard. Puis il n'a jamais fait la lumière.
M. Robillard (Alexandre): Bien, vous ne le croyez pas.
Mme James: Ce n'est pas à croire, je ne l'ai toujours pas entendu. Je ne l'ai toujours pas entendu sur exactement ce qui s'est passé. On a des petits morceaux de question. Alors, il est temps que le ministre s'explique.
Mme Dufresne (Julie): Mais est-ce qu'à votre avis le simple fait que le ministre de l'Environnement se rende au BAPE pour rencontrer les employés et les commissaires, c'est acceptable?
Mme James: D'une part, les gens... les employés du BAPE ne sont pas les employés du ministre. Deuxièmement, je pense que, lorsqu'on regarde... Et ça, c'est un point sur... On parlait justement des déclarations du ministre, que le ministre a rencontré les commissaires à huis clos, à part, à porte fermée. Qu'est-ce qui s'est dit? De ce qu'on comprend de plusieurs sources, il aurait passé des messages qu'il aurait dit: Si vous n'acceptez pas... vous ne voyez pas les choses de la bonne façon, vous allez m'entendre, je vais vous appeler. Autour de ça, il y a toute une histoire de liste de téléphone avec des contradictions ici et là.
Et le ministre - et je reviens sur ce point-là - depuis le début qu'on pose des questions et qu'il y a des articles de journaux, il n'a jamais pris la peine, ni à l'Assemblée nationale ni devant vous, de venir clarifier les choses. Et la preuve, l'ultime preuve qu'il a quelque chose à cacher, c'est que ce matin, au lieu...
Lisez bien le libellé de la motion, elle est assez claire. Ce n'était pas de faire le procès de personne, c'est de dire... c'est de faire la lumière. C'est l'occasion parfaite pour lui de venir dire: Bon, bien, regardez, là, je vais venir vous dire exactement ce qui s'est passé. Mais, au lieu de prendre acte de ça, de l'accepter, le leader du gouvernement fait le choix de faire des manoeuvres réglementaires pour essayer d'étouffer la chose, et c'est ça qui est grave également.
Mme Prince (Véronique): Est-ce que vous êtes en train de dire aussi qu'en fait ce n'est pas tant la... C'est sûr que la teneur des messages, c'est important, puis, s'il y a une commission parlementaire, vous allez savoir c'est quoi, exactement, qui a été dit, mais est-ce que le seul fait de s'être rendu là, d'avoir été à huis clos avec les commissaires, juste avec ça, vous trouvez qu'il n'a plus la légitimité?
Mme James: Bien, c'est une question d'ingérence. La question... Avant de se précipiter, un, on va y aller par étapes. On veut... La motion, elle est libellée telle quelle parce qu'on souhaite en arriver à faire la lumière de la situation. Mais, on s'entend, si jamais on apprend que les faits, tels qu'ils ont été révélés dans les journaux, s'avèrent à être vrais, il y a certainement confirmation qu'il y a ingérence. Rencontrer des commissaires, l'équivalent des juges, là, c'est pire que de les appeler. Il les a rencontrés. Il leur a passé un message. Il avait déjà congédié une personne; quelques jours plus tard, il a congédié une autre personne. Je pense que c'est assez clair, pour les gens qui étaient là, de dire: Attention, là!
Mme Nadeau (Jessica): Qu'est-ce que vous allez faire si la motion n'est pas acceptée?
Mme James: Bien, on va y aller une étape à la fois, là. On a libellé la motion, on va attendre la décision du président.
M. Caron (Régys): Mais, Mme James, techniquement, une commission comme celle que vous demandez a-t-elle, comme dit le leader du gouvernement, un pouvoir de contrainte quant aux gens qui seraient entendus à cette commission-là?
Mme James: Contraindre...
M. Caron (Régys): Les forcer à venir témoigner.
Mme James: Je veux dire, le ministre ou... Vous parlez de... Oui, oui, on peut contraindre.
M. Caron (Régys): Donc, vous pourriez juger nécessaire qu'ils soient entendus, là.
Mme James: Ce n'est pas moi, la commission.
M. Caron (Régys): La commission.
Mme Dufresne (Julie): Mais elle a ce pouvoir-là...
Mme James: La commission.
Mme Dufresne (Julie): ...de contraindre le ministre à venir...
Mme James: La commission.
Mme Dufresne (Julie): ...assister ou participer à la commission?
M. Caron (Régys): Et qui peut-elle contraindre? Des députés seulement?
Mme James: Non, je ne crois pas. Selon le libellé de la motion telle qu'elle est écrite - je veux la citer, mais je ne l'ai pas devant moi - ça peut être le ministre, mais ça peut être d'autres personnes, évidemment pertinentes aux événements du 24 octobre, évidemment.
Mme Dufresne (Julie): Y compris, par exemple, des commissaires du BAPE?
Mme James: Par exemple.
Mme Nadeau (Jessica): Est-ce que vous pensez que ça pourrait être juste une erreur de débutant du ministre?
Mme James: Bien, si le ministre a fait une erreur, je... Ce n'est pas à moi de qualifier ce qu'il a fait ou pas fait, c'est à lui d'expliquer son geste. Écoutez, M. Breton est ministre de l'Environnement. C'est une... Tu fais partie de l'Exécutif. C'est un rôle qui est extrêmement important. J'imagine que, lorsqu'il est passé d'activiste à ministre, on lui a expliqué ses responsabilités. Alors, on doit assumer aussi la suite de nos gestes.
M. Caron (Régys): Le leader du gouvernement a évoqué le risque que ça tourne en tribunal d'inquisition. Il a parlé d'autres moyens de clarifier la situation. Seriez-vous prêts à envisager d'autres moyens?
Mme James: Bien, écoutez, ce qui est clair, là, quand je regarde... j'écoute le leader du gouvernement depuis ce matin mais aussi depuis le début de l'affaire Breton, c'est qu'ils essaient d'étouffer la chose. Quand le ministre dit qu'il y a d'autres possibilités pour M. Breton d'exprimer ce qu'il a à dire, je comprends. Ça fait des jours, ça fait des semaines qu'on lui en parle puis qu'il a eu la chance, et en Chambre et ici, de dire ce qui s'est passé. Il ne l'a jamais fait.
Si on a pris la décision de déposer cette motion-là, c'est parce qu'on n'a toujours pas eu de réponse. Et M. Bédard ne pourra pas protéger, ou couvrir, ou cautionner M. Breton. Il doit répondre aux questions. Je suis parlementaire, nous sommes parlementaires à l'Assemblée nationale. C'est notre rôle, c'est notre rôle de faire la lumière des choses, et l'outil pour le faire, c'est une commission, et on entend s'en servir.
Mme Plante (Caroline): Mrs. James, why was it necessary to table a motion and come out here again today to talk about this, about Mr. Breton? We've heard about him last week. He said: No, I didn't do anything wrong, I did... Was it really necessary to table that motion today?
Mme James: Well, I think it's important to come back to... The first point is that, if there was any doubt that there was an issue in terms of the Government, the PQ Government, trying to hide something, I got the confirmation of that this morning in question period. When we tabled the motion... And what the motion says - and I really do invite you to go back and read it - is that we simply invite the Minister, give him the opportunity to explain what happened, tell us what happened.
And, if today we come to a point where we have to vote on this motion, it's because, time after time, question after question, article after article, we have yet to have received an answer from the Minister. This morning, when I gave him, again, the umpteenth opportunity to respond to the different allegations that were in the paper, he said: I really do care about the environment. That's all good, but the issue is: You have done worse than potentially... have done worse than calling a judge when he went to the BAPE's office and met, behind closed doors, the commissioners. Why hasn't M. Breton answered that? And, if we're asking for a commission, it's because he has repeatedly avoided the issue and has not been willing to answer.
Mme Plante (Caroline): What did he do that's so wrong? It could've been just a rookie mistake.
Mme James: Well, what did he do that's so wrong? First of all, when you are a minister... Everybody knows the separation of powers: executive, legislative and judiciary. When you are a minister, those responsibilities are very important. And I imagine that, when he did take the oath, those responsibilities were explained to him.
When you are meeting with «des commissaires» - and I... in French - ... Section 6.5 of the law clearly says that the commissioners have the power of a... equivalent almost to a «quasi judiciaire» judge, so it is not the Minister's employees. In that sense, they have the power, as people do know, to make important inquiries and also important recommendations.
So, when the Minister has not denied meeting with commissioners behind closed doors after having fired one person and then, after meeting them, fired a next, let's just say that the circle of doubt just gets bigger and bigger. Not to mention, this morning, now that I see that the PQ Government is trying to throw the book at the receivability of a motion that simply says: Hey, we want to hear what you have to say, to me, that proves you have something to hide.
Le Modérateur: Merci.
Mme James: Merci.
(Fin à 13 h 50)