(Douze heures six minutes)
La Modératrice : Donc,
bonjour et bienvenue à ce point de presse de Québec solidaire. Prendront la
parole Vincent Marissal, député de Rosemont, Valérie Samson, qui est D.G. de
Réplique Estrie, et Marie-Hélène Hébert, qui est la directrice générale de
MIELS-Québec. M Marissal.
M. Marissal : Merci, Camille.
Alors, bonjour. D'abord, je veux saluer nos invités, qui sont ici aujourd'hui
évidemment pour parler de prévention et de lutte au VIH-sida, les gens de
Réplique Estrie, les gens de Montréal aussi. Merci, d'abord, pour votre travail
extraordinaire. On vous accueille ici chaque année, et chaque année, on fait un
peu les mêmes constats. Et puis ces années-ci, malheureusement, on fait un
constat assez grave, que la situation ne s'améliore pas, au contraire, on
détecte de plus en plus de cas, il semble y avoir eu un certain relâchement quant
au dépistage, quant aux moyens sur le terrain aussi.
J'ai déposé, ce matin, une motion qui a
été unanimement approuvée, adoptée par l'Assemblée nationale. Je suis heureux d'avoir
entendu le ministre de la Santé, qui a reconnu qu'on a un peu baissé les bras,
et je pense qu'il disait vrai, je pense qu'il est sincère, on a un peu baissé
les bras dans notre lutte au VIH-sida. Je l'ai aussi entendu dire, après ce
constat, qu'il faut mettre davantage d'efforts, donc davantage de moyens. C'est
ce qu'on veut, c'est ce qu'on doit faire. On peut arriver à un Québec sans
VIH-sida. Malheureusement, ces dernières années, on a effectivement baissé un
peu la garde. Mais je vais continuer à faire les batailles ici, on va continuer
à faire les batailles ici. Je prends pour acquis que tous les partis du
gouvernement et de l'opposition sont à la même place quant à cette lutte
absolument essentielle. Puis, sans tarder, je vais laisser les spécialistes de
la chose vous en parler.
Mme Samson (Valérie) : Bonjour.
En fait, moi je viens vous présenter les enjeux et les barrières d'accès au
dépistage sur l'ensemble du territoire du Québec, les enjeux d'accès au
dépistage, aux soins et aux traitements. En fait, nous, on considère vraiment, puis,
en fait, c'est un fait, que, pour identifier le VIH, ça prend absolument le
dépistage. C'est la seule façon de connaître son statut, étant donné qu'il n'y
a pas de symptôme en tant que tel au VIH. S'il n'y a pas de dépistage,
évidemment, bien, la transmission est vraiment très présente. C'est ce qu'on
essaie d'éviter le plus possible.
Il y a différentes barrières, en fait. Et,
pour les barrières au dépistage, il y a entre autres le fait qu'il n'y a pas
suffisamment de... d'offres de dépistage sur l'ensemble du territoire. C'est
principalement pour les populations prioritaires. Donc, quand on cherche à
avoir un dépistage, des fois, on ne sait pas sur quelle porte cogner ou de
quelle façon pouvoir l'avoir. Il y a des endroits très précis, mais ils sont
souvent méconnus de la population pour pouvoir avoir accès à un dépistage. Il
manque effectivement de diversité de points de services, que ce soit dans les
GMF, dans les SIDEP. Il y a des médecins de famille qui en offrent aussi.
Parfois, ça peut être gênant de pouvoir demander le dépistage quand ce n'est
pas offert systématiquement. Il y a même du dépistage qui peut se faire au
privé. Donc évidemment, ça engendre des coûts, ce qui n'est pas toujours
facile, là, pour les gens de pouvoir le faire. Et ça devient peut-être moins
une priorité à ce moment-là.
Il y a aussi le fait que les horaires sont
souvent compliqués ou inaccessibles, soit pour les travailleurs… ça fait que
des horaires de soir, il y en a très peu. Donc, ça met, encore là, une barrière
pour le dépistage. Sans oublier aussi le manque de personnel. On comprend que
la prévention, à certains moments, n'est pas toujours la priorité, puis qu'il y
a d'autres urgences qui sont très importantes, mais, si on ne met pas de
l'avant la prévention comme le dépistage puis si on ne met pas des infirmières
en remplacement quand ils sont soit en congé ou en congé maternité, exemple,
bien, ça fait vraiment un trou de services. Puis, à ce moment-là, bien, on
échappe vraiment plein de possibilités de pouvoir traiter le VIH.
Maintenant, pour ce qui est de l'accès aux
soins, ce n'est pas toujours aussi simple qu'on peut le penser. L'accessibilité
à des infectiologues, tout dépendamment la région dans laquelle on se trouve,
ça peut être un défi. Des fois, dans les régions... des régions, bien, déjà, il
y a la mobilité, de pouvoir avoir un moyen de transport pour aller voir son
médecin traitant pour pouvoir avoir le traitement puis avoir un suivi adéquat
également pour pouvoir avoir... Le résultat, finalement, qu'on souhaite, c'est
de devenir indétectable, là, dans la situation et ne plus transmettre le VIH.
Souvent, les infectiologues se trouvent
dans les grands centres, comme je l'ai mentionné. Donc, souvent, les gens ont
moins cet accès-là. Puis, quand on a la chance d'être dans un grand centre, on
a des grandes équipes qui entourent les infectiologues, à ce moment-là, bien,
c'est vraiment un bel avantage, mais parfois, les médecins de famille, malgré
leur bonne volonté, n'ont peut-être pas toutes les informations, ne sont
peut-être pas conscients de tous les enjeux en lien avec le VIH quand ils
accompagnent pour les traitements.
Donc, évidemment, nous, dans nos
revendications, un autre des enjeux, c'est les coûts financiers reliés aux
traitements. Nous, on revendique vraiment la gratuité pour les traitements, que
ce soient les traitements VIH, que ce soit la PrEP qui est un traitement
davantage préventif ou la prophylaxie postexposition. C'est tous des
traitements qui sont vraiment très efficaces, qui amènent les gens à ne plus
transmettre le virus du VIH. Mais il y a des coûts qui sont reliés à ça, puis
parfois ça peut être un frein pour pouvoir en avoir accès. Sans oublier tous
les gens qui n'ont peut-être pas accès à la RAMQ. C'est des démarches qui sont
quand même compliquées, des corridors de services qui peuvent être parfois très
mélangeants. Puis, quand on n'a pas accès à la RAMQ, bien, évidemment, notre
traitement, on n'est pas en mesure de pouvoir le payer, ce qui fait que le VIH
peut encore se transmettre. Donc, vraiment, il manque d'information et
d'accompagnement, que ce soit de la part d'organismes communautaires ou même il
y a des soutiens financiers, entre autres des compagnies pharmaceutiques, qui
sont très peu connus, qui peut aussi faciliter vraiment l'adhérence aux
traitements. Donc, voilà, c'est ce qui concerne le dépistage pour la grande
région de Québec. Je vous passe la parole, à Marie-Hélène, qui est plus pour
MIELS Québec.
Mme Hébert (Marie-Hélène) : Donc,
bonjour. Oui, je suis à la codirection de l'organisme MIELS Québec. Donc, comme
ma collègue Valérie a dit, en ce moment, il y a plusieurs barrières au niveau
du dépistage, notamment au niveau des horaires d'accessibilité, au niveau des
coûts qui peuvent... être à ça. Puis, de mon côté, je voulais pouvoir parler
des expériences, là, de préjugés, de discrimination, de stigmatisation que les
personnes ayant besoin d'avoir accès au dépistage du VIH, ils peuvent vivre ou
craindre de vivre, et ça, dans l'ensemble, là, des étapes du processus d'accès
au dépistage, donc en commençant, au moment de l'accueil, de la réception, lors
de la prise de rendez-vous, donc s'assurer que ça demeure confidentiel, tout ce
qui est aussi au niveau... dans la réception, pour aller chercher un dépistage,
d'avoir à nommer des facteurs, là, de... les amener à s'identifier à une
population clé, qui peut leur donner accès à ce dépistage-là.
Aussi, il y a des événements de
stigmatisation, de préjugés qui ont lieu aussi, lors des contacts avec
différents professionnels de la santé. Puis sans oublier aussi la crainte que
les personnes peuvent avoir de vivre des préjugés dans l'ensemble des suivis
médicaux futurs qu'ils vont pouvoir avoir, puisque c'est des informations
sensibles qui vont être inscrites à leur dossier. Et toute cette réalité-là,
pour nous, est liée au fait que c'est seulement certaines populations
spécifiques qui ont présentement accès gratuitement au dépistage, plutôt que
l'ensemble de la population.
Évidemment, on le sait, on le voit avec
les dernières données, la pandémie a eu des impacts sur l'accès au dépistage.
On commence tout juste à en voir les impacts. On ne peut pas se permettre que
la prochaine urgence sanitaire vienne annuler les activités de dépistage pour
la population, mais particulièrement pour les personnes en situation de vulnérabilité
ou qui sont plus éloignées du système de santé.
Des bonnes nouvelles, ma collègue Valérie
a nommé certaines solutions, on en a aussi, notamment de pouvoir offrir des
campagnes de dépistage accessibles pour l'ensemble de la population, offrir également
des dépistages de masse de la même façon qu'on le fait déjà pour les campagnes
de vaccination. On propose aussi, tu sais, d'organiser des campagnes
d'information et de sensibilisation pour la population en général, pour bien
faire connaître le VIH et les risques qui y sont liés, comme quoi que c'est
toujours, là, une lutte, là, qui est actuelle, de nos jours.
On souhaite aussi qu'il y ait un
renforcement ou, en fait, une mise en place de formation continue pour
l'ensemble des professionnels quant aux bonnes pratiques liées à l'intervention
en lien avec le VIH et les ITSS. Tout à l'heure, je vous parlais de
stigmatisation. On ne croit pas que c'est lié individuellement aux
professionnels de la santé de faire des faux pas dans ce sens-là. Toutefois, il
y a un grand manque de formation à ce niveau-là puis il y a différents
organismes, en ce moment, qui existent, comme le nôtre, qui offrent des
formations auprès des professionnels et qui mettent même en place des
plateformes en ligne de formation continue pour l'ensemble des professionnels,
autant au niveau communautaire que du milieu de la santé. Donc, on dispose déjà
d'outils pour pouvoir, là, outiller nos équipes. On souhaite aussi qu'il puisse
y avoir des méthodes pour faciliter l'accès à un rendez-vous pour un dépistage
parce qu'en ce moment, pour certaines populations, réussir à avoir un
rendez-vous, c'est déjà une première étape qui est très complexe.
Comme on parlait tout à l'heure, ma
collègue Valérie nommait, au niveau des plages horaires de dépistage, de notre
côté, les plages horaires de dépistage de soir sont, et de loin, les plus
prisées. Donc, on favorise vraiment une plus grande diversité de plages
horaires afin de permettre, là, à l'ensemble de la population de pouvoir avoir
accès facilement à ces dépistages-là.
Aussi, comme Valérie mentionnait, bonifier
l'offre de dépistage en dehors du réseau de la santé, ce qui permet de
diversifier, encore une fois, les personnes qu'on rejoint, et aussi bonifier
l'accès au suivi après le dépistage afin de permettre d'avoir une cascade de
soins qui est cohérente puis favoriser une prise en charge rapide au niveau du
traitement, selon les résultats de ce dépistage-là. Merci beaucoup.
M. Marissal : Alors, merci à
vous deux pour les prises de parole. Alors, très rapidement, je veux juste
conclure, on était sur la bonne trajectoire, on a dévié un peu, on le
reconnaît, on corrige cette trajectoire, on doit, on peut faire beaucoup mieux,
on a le devoir de faire beaucoup mieux, au Québec. Je crois que c'est possible.
Je prends le ministre au mot et je donnerai suite, assurément, pour nous
assurer qu'on soit capable de reprendre le rôle qu'on avait de leader en
matière de lutte VIH-sida. Merci encore une fois à nos invités. Merci.
(Fin à 12 h 17)