(Onze heures trois minutes)
Mme Labrie : Bonjour, tout le
monde. Contente de vous voir nombreux, nombreuses ce matin. Hier, Gabriel et
moi, on a passé la journée en tournée en Estrie. On a d'abord commencé notre
journée à rencontrer des locataires à Granby, qui sont victimes de rénovictions
massives, de tactiques déloyales d'intimidation, de stratégies complètement
immorales pour les tasser de là. Beaucoup de ces personnes-là sont des
locataires aînés à faible revenu qui paient moins de 600 $ par mois en ce
moment et qui se retrouvent dans la situation où le marché locatif à Granby est
en bas de 0,4 % d'inoccupation. Donc, la situation, elle est tragique. Ce
qu'on a vu hier, c'est des personnes qui notamment pourraient être protégées
par la loi Françoise David, si elle est élargie. Donc, moi, j'espère qu'on va
avoir un suivi prochainement de la part du gouvernement de François Legault sur
ce dossier-là. Il y a une... Il y a une... Il y a une situation de crise à
laquelle il faut répondre par des moyens immédiats pour soutenir les gens dans
la détresse qu'ils vivent, puis on a déjà eu une rencontre avec
Mme Duranceau à ce sujet-là. On est dans l'attente de leur part d'une
deuxième rencontre. J'espère qu'on ne se fera pas «ghoster» par son équipe,
mais, dans tous les cas, nous, on va encore travailler avec eux parce qu'on
sent la détresse des gens sur le terrain. Donc, c'est l'appel qu'on leur lance
aujourd'hui.
M. Leduc : Merci, Christine.
Grosse semaine en droit du travail. Demain, c'est le 1er mai. C'est le
moment où s'applique la hausse du salaire minimum au Québec, qui est toujours
décrétée alentour du temps des fêtes. Je vous rappelle que cette année, on
passe de 15,25 à 15,65. C'est une maigre hausse de 50 sous seulement, ça
fait à peine 20 $ par semaine. C'est complètement à côté de la track.
C'est inutile... pas inutile, mais c'est insuffisant pour faire face à la
hausse du coût de la vie, à la hausse du coût de loyer. Donc, encore une fois,
moi, je suis triste que la CAQ n'ait pas accepté d'aller un peu plus loin. On
avait vu des hausses plus fortes dans le passé, des 75 sous, des uns
dollars, et ce n'est vraiment pas à la hauteur de la situation.
Toujours dans le droit du travail, cette
semaine, on recommence l'étude du projet de loi n° 51 sur la construction.
Plusieurs thèmes sont à l'ordre du jour. Je vous en soumets seulement un.
Aujourd'hui, c'est la question des quotas de femmes sur les chantiers. Le
ministre s'est dit qu'il était ouvert à la question. Il veut une meilleure
présence des femmes sur les chantiers. Or, je n'ai pas eu de nouvelle à cet
égard-là, si ça serait intégré dans les amendements. J'ai hâte de pouvoir en
débattre avec lui cette semaine. On a commencé ce matin. J'y retourne en
courant dès que le point de presse se termine dans les prochaines minutes.
Merci.
Journaliste : Mme Labrie,
ça fait deux femmes qui questionnent le leadership de Gabriel
Nadeau-Dubois, qui disent qu'elles ressortent épuisées complètement de leur
passage à Québec solidaire. Est-ce que M. Nadeau-Dubois doit réfléchir,
avoir une réflexion sur son type de leadership?
Mme Labrie : Bien, écoutez,
je pense que les gens font des parallèles entre deux situations qui sont
quand même assez différentes. Catherine avait une vision assez différente de la
politique de celle de Gabriel et Manon. Elle voyait très peu de sens à ce qu'on
fait ici comme travail à l'Assemblée nationale, et ça créait effectivement
des... des situations difficiles. Du côté d'Émilise, elle a toujours extrêmement
valorisé le travail parlementaire et ce qui se faisait à l'Assemblée nationale,
donc il n'y avait pas de choc de vision à ce niveau-là, là, avec Gabriel. Bien
au contraire, elle voulait être présente sur le terrain, mais pour ramener les
enjeux qu'elle voyait sur le terrain ici. C'est ça qui lui tenait à cœur.
Donc, au niveau de la façon de travailler
de Gabriel, moi, ce que je vois, c'est quelqu'un qui travaille avec les autres.
Moi-même, je suis une femme qui travaille auprès de Gabriel puis je vous dirais
que, quand je... Sincèrement, là, quand j'entends des gens dire qu'on... qu'on
ne donne pas assez d'espace aux femmes dans ce parti-là puis qu'ils n'ont pas
de leadership au sein du parti, ça me dérange beaucoup, parce que moi, je sens
que j'en ai du leadership dans ce parti-là. Ça m'affecte qu'on nous considère
comme des subordonnés. Je ne me sens pas comme ça puis je trouve ça insultant,
à la limite, de l'entendre puis je dois vous dire que je ne suis pas la seule,
là. Il y a énormément de femmes qui ont des postes de direction à Québec
solidaire, autant à l'aile parlementaire qu'à la permanence du parti. On a une
voix au sein de ce parti-là. Elle est forte. D'ailleurs, moi, j'en sens l'influence
au sein de mon parti. Donc, je trouve ça assez particulier, là, que ça circule,
cette idée-là, que... parce que certaines personnes ont eu des situations plus
difficiles que... que les femmes n'auraient pas d'espace à Québec solidaire.
Journaliste : ...est-ce
qu'elle a fabulé? Est-ce qu'elle a inventé ça? Ça vient d'où? Parce qu'elle,
elle dit vraiment, là, qu'elle a... qu'elle a eu un parcours difficile avec...
et une relation difficile avec lui. Elle a imaginé ça?
Mme Labrie : Écoutez, Émilise
a fait une course qui était très éprouvante l'automne dernier, puis je peux
vous en parler parce que j'ai fait la même course. C'était extrêmement
difficile. On est sorties de là toutes les trois épuisées, et peu importe
laquelle d'entre nous l'aurait emporté, on serait arrivées à genoux, là, pour
entrer dans ces fonctions-là. C'est ce qui s'est passé avec Émilise. Assurément
que, quand elle est entrée en fonction, elle était déjà épuisée. Donc, son
épuisement s'est accentué par la suite. Il y avait des circonstances
particulières qui rendaient sa tâche difficile. Émilise a posé un regard très
critique sur elle-même et ses accomplissements depuis qu'elle était en
fonction. Et je trouve ça dommage pour elle parce que moi, je les ai vues
cheminer, ses idées, au sein de parti depuis qu'elle était là. J'en ai vu des
choses changer à l'interne depuis qu'elle était là et en très peu de temps
d'ailleurs. Puis je dois même vous dire que ça m'a surprise, que ça commence à
bouger aussi vite. Parce que c'est une structure qui est lourde, Québec
solidaire, quand même, au niveau de la gouvernance. Quand on est élu, on est
porte-parole, hein? On n'est pas chef à Québec solidaire, on ne décide de rien
tout seul. Puis Émilise a quand même réussi à manœuvrer avec beaucoup d'agilité
pour faire changer des choses à Québec solidaire. Donc, je trouve ça dommage
qu'elle se soit sentie incapable d'y arriver. Je ne sais pas où elle avait mis
la barre, à quel rythme elle voulait réussir à faire ça, mais moi, j'ai trouvé
qu'elle a réussi à apporter des changements dans son court passage.
Journaliste : Donc, c'est une
mauvaise perception qu'elle a eue? Parce qu'il faut essayer de comprendre ce
qui s'est passé. Elle, elle dit qu'elle a vécu quelque chose de difficile, que
ses relations étaient difficiles avec M. Nadeau-Dubois et son entourage, que
c'était une espèce d'entourage fermé fait pour lui, en fait, là. Alors, c'est
une mauvaise perception? Vous, vous dites complètement le contraire.
Mme Labrie : Bien, écoutez,
moi, ce que je vous dis, c'est qu'Émilise était... elle est arrivée dans cette
fonction-là fatiguée, assurément. Puis ça... ce n'est pas... Je ne dis pas ça
contre elle, là, je veux dire, je l'aurais emportée ou Ruba l'aurait emportée,
ça aurait été la même chose. C'est une course qui était difficile, qui était très
longue par ailleurs. Donc, c'est certain que ça complexifie les choses. Elle
n'est pas arrivée là au maximum de son potentiel, Émilise, puis je... C'est
pour ça que je disais hier que je suis déçue qu'elle n'ait pas donné plus de
temps au processus parce qu'elle avait tout le potentiel pour réussir, Émilise,
puis elle avait déjà commencé d'ailleurs à faire des gains au sein du parti.
Journaliste : ...
Mme Labrie : Bien, moi, je
trouve que oui. Après ça, je comprends son épuisement. Puis c'est très
important de se respecter là-dedans, puis elle a fait un choix pour sa santé,
et puis ça, bien, il ne faut pas remettre en question quand une personne prend
une décision comme ça. Mais je... Je pense encore, moi, qu'Émilise avait tout
ce qu'il fallait comme personne pour faire cheminer ses idées au sein du parti.
C'est quelqu'un que j'ai vu exercer du leadership autour d'elle dans les
dernières années avec succès. D'ailleurs, il y a beaucoup d'idées qui se
retrouvent dans le cahier de propositions, la déclaration de Saguenay, qui sont
des choses qu'elle poussait depuis un moment à Québec solidaire et qui s'y
retrouvent. On a mis en place des porte-parole régionaux à Québec solidaire
suite à son arrivée. Ça, c'est grâce à elle. Ça fait longtemps qu'on en parlait
puis c'est elle qui l'a fait aboutir. Donc, c'est... Des accomplissements, il y
en a eu. Je pense qu'elle avait mis pour elle-même la barre très, très haute,
puis je ne le lui reprocherai jamais parce que moi-même, je me mets des
attentes élevées pour mon travail, mais elle s'est jugée trop vite, je pense,
sur les résultats.
Journaliste : ...je pense que
le terme est... correctement, elle s'est fait gronder, qu'elle a dit, et
qu'elle a été invalidée dans ses besoins. Donc, même si on laisse de côté M. Nadeau-Dubois,
là, qu'on ne personnalise pas nécessairement le débat, dans le leadership de
Québec solidaire et dans la gestion, est-ce qu'il faut revoir la façon de
fonctionner? Parce qu'elle, elle a dit : Je suis arrivée, j'étais face à
un mur, on m'a même grondée et invalidée dans mes besoins.
M. Leduc : Le terme
«gronder», je ne suis pas dans les souliers d'Émilise, puis ce serait à elle de
raconter un peu plus en détail qu'est-ce qu'elle veut dire par là, mais ce que
je comprends, c'est qu'il faisait référence à des retours, des bons feedbacks,
en bon français, qu'on a parfois quand on est député avec nos collègues des
communications. Moi, à la fin de l'exercice tantôt, je risque d'avoir un petit
texto ou un petit appel d'une collègue des communications pour me dire si elle
a trouvé que ça a bien été ou pas, la conférence de presse. C'est normal, c'est
leur travail. C'est là que nous, on est ouvert à des suggestions, à des
critiques pour s'améliorer. C'est le but de faire ces retours-là. Est-ce
qu'après ça la façon dont c'était fait, le bon ton... je ne le sais pas, je ne
suis pas dans ses souliers. Mais moi...
Des voix : ...
M. Leduc : ...juste pour
terminer, moi... juste pour terminer, moi, ça m'est arrivé des fois, que j'aie
reçu des critiques de mes collègues des communications que je trouvais
exagérées ou un peu dures, j'ai fait : Voyons! Ce n'était pas si pire que
ça. Est-ce que, là, elle fait le pas d'aller dire : Oui, mais, non, je me
suis fait gronder? Moi, je n'ai pas considéré, par exemple, quand j'ai des
retours critiques de mes collègues... des communications, que je me fais
gronder.
Journaliste : Mais là, là,
l'impression que ça laisse, là, parce que les deux, là, vous dites qu'elle a eu
une mauvaise perception, qu'elle est peut-être arrivée fatiguée, qu'elle est...
Alors, j'ai l'impression que vous mettez toute sur sa responsabilité à elle le
fait qu'elle soit partie et rien sur M. Nadeau-Dubois. J'ai l'impression que
vous êtes en train de défendre M. Nadeau-Dubois. Alors... Parce que je
n'entends aucune critique sur sa façon de faire, sur son entourage, sur
l'équipe de M. Nadeau-Dubois.
Mme Labrie : Je comprends.
Journaliste : Comprenez-vous?
Mme Labrie : Oui.
Journaliste : L'impression
que ça donne, là, c'est que vous l'accaparer, elle, puis...
Mme Labrie : Bien, je vais
rectifier mes propos, alors, parce que moi, je ne voudrais surtout pas laisser
l'impression ici que je mets la situation sur les épaules d'Émilise. Je pense
qu'il y avait des circonstances qui étaient extrêmement complexes aussi pour
Émilise, du fait notamment de son éloignement, du fait qu'elle n'était pas
élue. Donc, c'est certain qu'il y avait des contraintes au niveau des
ressources qu'on pouvait mettre à sa disposition aussi. Parce que vous le savez
que nous, à... en matière d'éthique, à Québec solidaire, on se fait un devoir
d'être irréprochable. On a eu des recommandations très claires de la Commissaire
à l'éthique que les ressources de l'aile parlementaire ne pouvaient pas servir
à une personne qui n'était pas élue. Donc, c'est certain que ça compliquait les
choses, là. Oui, il y a eu des facteurs extérieurs, là, qui ont compliqué la
vie à Émilise, assurément. Ça fait que ce n'est pas... Je ne voudrais... Je ne
voudrais surtout pas que vous pensiez que je mets cette situation-là sur ses
épaules, là. Il y a eu des facteurs extérieurs.
Après, vous me posez la question sur
Gabriel. Moi, je connais Gabriel depuis six ans maintenant et je vous
dirais que c'est notamment auprès de lui que j'ai appris à exercer mon propre
leadership. Je ne vois pas en lui quelqu'un qui étouffe les personnes autour de
lui. Pas du tout. Je vois en lui... Puis d'ailleurs, dans les dernières années,
il s'est nettement amélioré à ce sujet-là. Mais c'est quelqu'un qui veut
travailler avec les autres, d'ailleurs, qui a la capacité de s'entourer de gens
compétents. Oui, il y a des gens qui le suivent depuis plusieurs années. Bien,
s'il y avait un climat si toxique que ça autour de Gabriel, pensez-vous qu'il y
aurait autant de gens qui sont ses collaborateurs depuis autant d'années? Moi,
je trouve que c'est le signal de quelqu'un qui a un... qui a un... oui, qui a
un leadership fort, qui sait bien s'entourer de gens compétents, mais c'est
quelqu'un aussi que je connais comme étant capable de favoriser
l'épanouissement de ses collègues aussi, de leur laisser de la place.
Moi, j'ai cheminé beaucoup auprès lui,
notamment quand il m'a fait confiance pour être leader parlementaire, j'ai siégé
sur le comité de direction avec lui pendant un an dans cette fonction-là, puis
je n'ai jamais senti qu'il ne me laissait pas d'espace. Au contraire, je l'ai
vu venir me consulter. On a eu des discussions qui étaient parfois
challengeantes ensemble, parfois, c'est moi qui en sortais ébranlée, parfois,
c'était lui. On était capables d'avoir ces conversations-là.
Donc, moi, je trouve que les critiques qui
sont faites à son égard sont injustes, actuellement, puis j'ai pleinement
confiance en lui. Je pense qu'on a... on a besoin de lui pour la suite des
choses.
Journaliste : ...vous entend
défendre M. Nadeau-Dubois ce matin, mais c'est quoi l'état du caucus
actuellement? Peut-être que M. Leduc peut nous en dire plus comme leader
parlementaire, mais...
Mme Labrie : Bien, le caucus
est affecté, c'est certain, par la décision d'Émilise. Plusieurs ont été pris
par surprise par sa décision. On vit un deuil, en quelque sorte, quand même,
parce qu'on s'était rallié tout le monde très rapidement derrière Émilise puis
envers le projet qu'elle portait. On voulait l'aider puis être ses alliés.
Donc, c'est un processus de deuil qu'on vit, actuellement. Certains ont vu des
signaux plus vite que d'autres parce qu'elle avait des liens plus forts avec
certaines personnes plus que d'autres. Donc, on n'est pas tous au même niveau,
je vous dirais, dans la digestion de cette nouvelle-là, en ce moment.
Journaliste : ...sur
l'insatisfaction auprès de certains membres du caucus?
Mme Labrie : Elle avait partagé
des défis, mais je vous dirais qu'elle n'était pas allée en profondeur, là, de
ce qu'elle a mis dans l'espace public, récemment. Elle avait... Elle avait,
oui, mentionné que c'était... comment... parce que je ne veux pas trahir ses
propos, là, ou les dénaturer, mais c'est certain qu'il y a avait... Elle
parlait souvent d'ajustements. Elle parlait souvent de ça. C'est un mot qu'elle
utilisait. Puis ça, c'était bien normal, écoutez, c'est une fonction
importante. Elle succédait à Manon Massé, qui avait été là pendant sept ans
en tandem avec Gabriel Nadeau-Dubois. Personne n'aurait pu faire fonctionner
tout ça comme un... comme un charme en l'espace de trois ou quatre mois.
C'était normal que ce soit long puis qu'il y ait des ajustements. Donc, quand
elle nous parlait de ça, moi, personnellement, je trouvais ça normal. Et puis,
ce que je voyais, c'était une organisation qui déployait tous les moyens pour
aider Émilise dans les circonstances de ce qu'on pouvait et de ce qu'on avait
le droit de faire aussi.
Journaliste : Ce qu'Émilise
et beaucoup d'autres, depuis hier, décrivent, c'est une clique qui entoure
Gabriel Nadeau-Dubois. Dans cette clique-là, il y a même des gens, beaucoup de
gens qui sont en couple, comme... dont vous en ce moment aujourd'hui, il y a la
directrice des communications du parti qui est en couple avec le chef de
cabinet, Gabriel est entouré de gens qui le suivent depuis 2012, et
certains disent que c'est très hermétique. Dans le post-mortem que Gabriel a
annoncé qu'il fera au cours des prochains jours, quelles sont vos attentes pour
que les fenêtres s'ouvrent et que ceux qui sont fâchés de ses méthodes de
travail aient voix au chapitre?
M. Leduc : Moi, ce que je
peux vous dire, là, je les connais toutes, ces personnes-là, intimement,
personnellement, encore plus depuis deux ans maintenant que je suis leader
parlementaire, c'est des gens hautement compétents. Je trouve ça regrettable
que, dans la discussion actuelle, on cherche, on dirait, à tout prix, là, un
coupable, là. C'est comme si on jouait à Loups-garous, là, puis c'est qui qu'on
pend ce soir, là, c'est qui le coupable aujourd'hui, là. Là, on cherche, là,
puis là, il faut que des têtes qui roulent, là. Bien, il y a des situations compliquées
avec des tonnes de facteurs compliqués, puis il n'y a pas nécessairement une
personne qu'on va pointer du doigt, que ça soit Gabriel, que ça soit une
directrice de com.
Journaliste : Qu'est-ce que
sont vos attentes pour que les gens qui sont fâchés aujourd'hui contre les
méthodes de travail de votre chef puissent avoir voix au chapitre dans le
post-mortem qui s'entame?
M. Leduc : Bien, d'abord, il
faudrait comprendre c'est quoi, la critique sur lesdites méthodes de travail.
Je ne suis pas sûr de saisir c'est quoi, le problème des méthodes de travail.
Parce que Gabriel, puis Christine l'a dit tantôt, là, ce n'est pas un chef,
dans le sens où c'est un gros bateau, Québec solidaire, là. Il y a un gros
comité de coordination, là, avec, quoi, 12 membres à peu près dessus. Le
comité de direction ici, on est sept, huit. C'est beaucoup de gens, puis ils se
lèvent... Gabriel, il ne peut pas se lever un matin puis dire : C'est ça
qu'on fait. Ça ne fonctionne pas comme ça à Québec solidaire, pour le meilleur
et pour le pire. Alors, on est toujours en réflexion, il n'y a jamais personne
qui est en train de dire que le modèle actuel est parfait puis imperfectible,
moi, le premier, mais, après ça, de dire qu'il faut absolument trouver une
personne coupable...
Moi, je vais donner une autre anecdote
importante, je pense, parce que ça me fait vraiment de la peine de voir qu'on
fait le... en quelque sorte, le procès de Gabriel. L'agenda d'Émilise, là,
c'était quoi? C'était beaucoup la question des régions. Elle voulait beaucoup
qu'on pousse sur les régions. Puis elle avait raison de le faire. Moi, j'ai été
témoin, comme leader parlementaire, puis je vais vous donner deux moments, où
Gabriel a voulu contribuer à l'agenda d'Émilise.
Un des moments, vous l'avez peut-être vu
passer, c'était en fin février ou début mars, il y avait tout un enjeu sur le
poisson qui s'appelle le sébaste, que moi, je ne connaissais pas, à Hochelaga,
on ne parle pas beaucoup de ça, vous vous en doutez, mais, pour les gens de la Gaspésie,
les pêcheurs, c'est un gros enjeu, puis là il y a des quotas, etc. Bien, on
voulait, dans notre tournée là-bas, avoir quelque chose, on va discuter,
c'était... c'était une réalité forte pour les gens de la Gaspésie, les pêcheurs
de la Gaspésie. Mais on a fait une motion, puis le matin où est-ce qu'on
décidait si on faisait la motion ou pas, parce qu'il y avait 150 sujets,
comme vous le savez, ce matin-là, Émilise, elle avait des enjeux de
conciliation travail-famille, c'était quand même à 7 h le matin, ces
rencontres-là. Puis elle nous avait dit que ça l'intéressait, bien, autour de
la table, Gabriel a pris le bâton, puis il a dit : Émilise a raison, on
pousse sur cette motion-là, puis on l'avance, puis on l'a déposée, puis ça a eu
un bon écho.
L'autre exemple que je vais vous donner,
c'est quand on a parlé du bâillon, vous vous rappelez du bâillon, il y a eu des
tractations puis des négociations, puis on a obtenu toutes sortes de choses,
notamment de pouvoir voter le principe de projet de loi. Bien, ça a été l'idée
de Gabriel de proposer qu'on fasse le principe du projet de loi sur
l'accaparement des terres, un sujet cher à Émilise, puis qu'on permettrait, à
travers ce moyen-là, de faire avancer la question des régions. Alors, Gabriel a
objectivement... en tout cas, moi, ma perception, puis mon vécu, puis ma
vérité, ma réalité, c'est qu'il a contribué à cette... à l'avancement de cet
agenda-là.
Journaliste : ...formule de
porte-parolat... est-ce que la formule de porte-parolat, avec quelqu'un qui est
à l'extérieur du caucus, est viable? Est-ce qu'il ne faudrait pas la revoir,
cette formule-là? Parce que, dans le cas qui nous occupe en ce moment, ça a été
un obstacle important, là, pour elle. Je comprends, là, que ça ne doit pas être
facile à tous les jours, là, d'être obligé de partir de l'autre bout
complètement du Québec pour venir ici pour quelques jours, etc. Est-ce que
cette formule-là ne devrait pas être revue?
Mme Labrie : La formule du
co-porte-parolat, à Québec solidaire, ne définit pas s'il y a quelqu'un qui va
être élu ou non élu, hein? Ça, ce sont les membres qui ont fait le choix cette
fois-ci. Puis il y avait plusieurs options sur la table. Il y avait deux
candidates qui étaient élues, qui faisaient partie du caucus, il y en avait une
qui ne l'était pas. Les candidats... pas les candidats, les membres ont fait le
choix de miser sur une porte-parole non élue. Ça venait avec un paquet de
contraintes, puis on... on le savait, là, je veux dire, puis les membres ne
mesuraient peut-être pas à quel niveau ce serait contraignant, mais étaient
quand même en mesure de savoir que ça représentait, au niveau financier, un
enjeu, au niveau des déplacements, un enjeu. Il y avait quand même des choses
que les membres pouvaient entrevoir. Ils ont quand même fait le choix
stratégique de miser sur une co-porte-parole non élue. Et le résultat qu'on
voit, c'est que ça a été extrêmement difficile. Donc, moi...
Journaliste : ...c'est que ça
n'a pas marché. Est-ce que cette formule-là ne serait pas à revoir?
Mme Labrie : Bien, la
formule, c'est que ce sont nos membres qui choisissent nos co-porte-parole.
Moi, je ne veux pas qu'on revoie cette formule-là, vous comprendrez. Après ça,
c'est certain que les moyens qu'on met en œuvre pour aider une co-porte-parole
qui s'adonne à être non élue, ils sont à la hauteur de notre capacité
financière aussi comme organisation politique. Donc, il y a eu, dans les
derniers mois, beaucoup de travail pour soutenir davantage Émilise, il y a un
budget assez important de plusieurs dizaines de milliers de dollars qui a été
dégagé pour compenser ses déplacements, notamment, parce qu'il fallait qu'elle
puisse le faire en avion. Vous comprendrez que c'est comme une couple d'heures
de route, hein, à partir du Témiscamingue, venir ici. Donc...
Journaliste : ...
Mme Labrie : ...on a quand
même déployé des moyens, mais c'était... c'était une contrainte importante, ça
le reste, je pense que peut-être qu'il y a des membres qui ont sous-estimé...
peut-être qu'elle-même, Émilise, a sous-estimé le défi que ça représentait.
Mais il y avait aussi des vertus à ça. Puis moi, je comprends pourquoi les
membres ont pu y voir des vertus. Après ça, quand il y aura une nouvelle
course, les gens y réfléchiront puis prendront en considération ces facteurs-là
aussi.
Journaliste : ...justement,
est-ce que ça vous intéresse toujours d'être co-porte-parole féminine de Québec
Solidaire?
Mme Labrie : Là, moi, je vais
prendre soin des gens autour de moi en ce moment, parce que mon entourage vit
un deuil, et j'en fais partie. Donc, c'est ça qu'on fait en ce moment, là.
Journaliste : Vous avez l'air
tous les deux très surpris de ce qui s'est passé avec Émilise Lessard-Therrien,
vous avez l'air très surpris des critiques à l'égard de Gabriel Nadeau-Dubois. Pourtant,
ce n'est pas la première fois qu'on les entend. Ce n'est pas la première
personne qui les dit. Puis votre parti a... traverse quand même une passe
difficile, là. Vous avez parlé d'argent, il y a eu des départs à l'aile
parlementaire, il y a des processus de syndicalisation qui ne fonctionnent pas,
des départs, de la grogne. Est-ce que votre bateau, là, est en crise...
La Modératrice
: On va
passer en anglais ensuite.
Mme Labrie : Vous me
demandez... Vous parlez de la surprise. Oui, je ne vous cacherai pas que je
suis surprise, parce que moi, jusqu'à dimanche, j'essayais de convaincre
Émilise de poursuivre, là, de persévérer là-dedans. On s'est parlé une heure au
téléphone, c'était très émotif. Jusqu'aux 10 dernières minutes, j'espérais
encore réussir à la faire changer d'idée pour qu'elle donne une chance plus
longue à tout ça de fonctionner. Elle a fait un choix différent, puis je le
respecte, parce qu'on ne fait pas de concessions sur sa santé, puis Émilise a
des enfants en bas âge aussi, puis les sacrifices étaient très grands pour
elle. Donc...
Journaliste : ...un bateau en
crise?
Mme Labrie : Émilise, ce
n'est pas quelqu'un qui prend des décisions en fonction des sondages dans la
vie. Moi, je ne vois pas, dans sa décision, quoi que ce soit qui a à voir avec
la conjoncture politique actuelle. Elle a pris une décision pour sa vie
personnelle et sa santé. Mais, oui, oui, oui, moi, je suis surprise. Je ne vous
cacherai pas que j'aurais... je... on... Ça ne fait même pas 48 heures que je
suis au courant, ça fait que, oui, je suis encore sous le choc.
Journaliste : ...sur les
sondages, et sur le fait qu'il y a des choses qui vont mal à Québec Solidaire,
dans le fond?
Mme Labrie : Bien, on...
comme... je vous dirais que l'ensemble de la vie démocratique québécoise va
assez mal au Québec en ce moment, donc, moi, je ne me mets pas la tête dans le
sable, ça ne se passe pas comme on voudrait nécessairement en ce moment. C'est
certain, là, qu'on voudrait voir augmenter nos appuis dans l'espace public,
d'autant plus que, tous les jours, puis je... encore hier, on rencontre des
citoyens qui ont absolument besoin des solutions qu'on propose, ça fait que
c'est certain qu'on voudrait pouvoir les mettre en oeuvre, hein, puis le plus
tôt sera le mieux, je vous dirais, face aux crises qu'on traverse. Donc,
parfois, c'est décevant de voir que ça n'avance pas au rythme où on voudrait.
Mais c'est l'ensemble de la démocratie
québécoise qui ne va pas bien en ce moment. Les taux de participation sont bas,
il y a énormément de cynisme. Donc, je pense que tout le monde a des sérieuses
questions à se poser sur cette dynamique là, puis on s'en pose, des questions,
puis on est constamment en introspection pour mieux réussir à faire avancer les
idées qu'on défend.
La Modératrice
: On
passe en anglais.
Journaliste : Est-ce que
Québec solidaire peut se permettre...
La Modératrice : S'il vous
plaît...
Journaliste : ...juste une
petite dernière : Est-ce que Québec solidaire peut se permettre une autre
course à cinq mois de la dernière course financièrement? Vous avez mentionné
aussi des impacts psychologiques, là, sur les candidates. Est-ce que QS peut se
permettre une autre course au co-porte-parole?
M. Leduc : Bien, c'est parce
que ce n'est pas de notre ressort, là, les parlementaires. C'est complètement
dans les mains de la permanence. On n'a pas de...
Mme Labrie : Bien, c'est
aussi que nos statuts prévoient qu'il y a deux co-porte-paroles, donc il y aura
assurément des paramètres pour une course, avec une période de mise en
candidature. Ça, c'est ce qui s'en vient prochainement.
La Modératrice : En anglais.
Journaliste :
There is an injunction that will be
filed at the court in Montreal, today, to, basically… like, against McGill...
encampments. The... McGill is asking the help of the police. Do you think it's
too soon, and too harsh, as a matter of strategy?
M. Leduc :
Listen, I'm a former student union
activist, so I know some things about protests and organizing. I was not
surprised to see those encampments appear a few days ago, as I saw it appear in
a lot of American campuses. So, I think it's a right to do those kinds of
protests. I'm not in a particular position about are they... could they do it,
could they not. I think they can, it's a way to express themselves on a very
important matter. It's also a right for McGill to go in front of the court and
ask for their help. I just wish, because I saw other types of encampments...
you may remember the one in Hochelaga-Maisonneuve a few years ago, with the
person in a... situation d'itinérance... how do you say that in English...
Journaliste :
People... homelessness.
M. Leduc :
...homelessness, yes, homelessness
people, and I was very angry about the way it was dismantled. So, I'm asking,
I'm asking McGill to go very gently with this issue, because it's important,
what's happening in Gaza, with the bombings, and the families, and the children
suffering and dying, it's horrible. So, it's OK to express ourselves within
this type of protest encampments, it's also OK for McGill to go in court, but
please, please, go gently with... for the actions.
Journaliste :
...la réaction sur McGill en français.
M. Leduc : Bien, moi, je suis
un ancien activiste étudiant, donc je connais très bien comment on organise des
actions, puis pourquoi on le fait. Dans la situation actuelle, ce que je
comprends, c'est, bien sûr, une espèce de suivi de ce qui se passe sur des
campus américains, donc c'est tout à fait approprié comme méthode. Ça fait que
moi, je reconnais leur droit, bien sûr, de manifester à travers ça. C'est une
cause importante, c'est absolument horrible, ce qui se passe, en ce moment, à
Gaza. Je reconnais aussi le droit à l'institution d'aller devant la cour. Puis
moi, j'ai été témoin d'un campement dans Hochelaga-Maisonneuve, pour les
personnes en situation d'itinérance, qui avait été démantelé de façon
complètement horrible, presque inhumaine, je dirais. Puis je souhaite, je
souhaite et j'invite McGill à y aller avec beaucoup de doigté et de gentillesse
pour la suite.
Journaliste
: Are you worried about… that
things could degenerate, the climate could degenerate?
M. Leduc : On the campus?
Journaliste
: Well, if the… when the police walk in.
M. Leduc : I hope that they have learned lessons from the past, that when
there's a campment of this type… and we cannot still go back furthermore, was
it, in 2010, when the people was encamping in downtown Montréal, about the
distribution of wealth and equality, etc.
Journaliste
: …it's a war against the Hamas and Israel.
M. Leduc : I know…
Journaliste
: There is tension, there are tensions.
M. Leduc : So, yes, there's tensions and I hope that… from one side, the… the
campers have spokespersons that are able to speak to McGill, to the police, and
I hope that the police have learned from the savage decampment that has been
done in Hochelaga-Maisonneuve, two years from now, and they will not do the
same again.
Journaliste
: Just quickly, Mme Labrie, I'd like to hear you on the situation
with Mme Lessard-Therrien. I know you mentioned that the situation between her
and Mme Dorion weren't exactly the same, they're different, but this is still
the second woman coming out of the caucus, saying she felt she wasn't heard.
So, are you saying there is no need for change? What's your message on that
today?
Mme Labrie : That's not what I said, I said that we are constantly in
introspection to work better in Québec solidaire, I am part of those introspections. I feel I have leadership in
this party. So, I feel very disturbed when I see people around saying that
women in Québec solidaire don't
have leadership in this party. It's not true, it's offending.
Journaliste
: It's just that there were talks to offer more resources to Émilise
Lessard-Therrien. So, that was not…
Mme Labrie : There were talks to offer more resources.
Journaliste
: Yes. So, that was part of the solution. She left in such a short
period, she left, it shows there is a more profound dissension in your party.
Are you afraid that this is the start of a breaking point for Québec solidaire?
Mme Labrie : What I know is that there was serious discussion to improve the
resources to help Émilise doing her work, and that she did not want to try
more, that was her decision. She said: I don't want to try more. I'm… I'm
leaving, she said… she said: I want to leave, instead of trying more. So, it's
her decision. I don't see a dissension in this situation, I see a woman who had
very big ambitions and who was affected by all the difficulties in her
position, regarding the circumstances of her position, and she decided to
protect her health, that's what she decided.
Journaliste
:
Merci beaucoup.
M. Leduc : Merci, tout le
monde.
(Fin à 11 h 31)