(Onze heures onze minutes)
Le Modérateur : Bonjour à tous. Bienvenue à cette conférence de presse portant sur le projet de loi n° 56 portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d'union parentale. Vous parlerons aujourd'hui le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, la ministre de la Famille, Suzanne Roy, et la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, Kariane Bourassa.
M. Jolin-Barrette, je vous laisse la parole.
M. Jolin-Barrette : Oui, ce sera Mme Bourassa pour débuter.
Mme Bourassa : Parfait. Bon. Bonjour à tous. Je suis très heureuse d'être aujourd'hui en compagnie de mes deux collègues, la ministre de la Famille, Mme Suzanne Roy, et mon collègue le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, afin, finalement, de souligner le dépôt du projet de loi n° 56 qui porte sur le droit de la famille en matière de conjugalité.
Plusieurs d'entre vous le savent, je suis la plus jeune femme à siéger à l'Assemblée nationale lors de cette législation, et comme aussi belle-maman de deux cocos, et je l'espère, un jour, future maman moi-même, tout ce qui concerne la famille me touche particulièrement. La réforme qu'on va vous présenter est donc particulièrement importante non seulement pour moi, mais également pour tous les futurs parents du Québec.
Vous savez, lorsqu'on s'engage en politique, c'est avec la conviction profonde qu'on va pouvoir améliorer les choses pour les Québécois et les Québécoises d'aujourd'hui, mais pour plusieurs, et c'est mon cas, ce qu'on veut surtout, c'est améliorer le monde dans lequel nos enfants vont vivre.
Les politiques québécoises... publiques québécoises qui encadrent notre vivre-ensemble doivent refléter nos valeurs, les spécificités et l'évolution de notre société. On a constaté au fil des dernières années que le droit de la famille s'est éloigné peu à peu du portrait de la société actuelle. Il n'était plus suffisamment représentatif de la dynamique des familles québécoises d'aujourd'hui. Leurs réalités, leurs modèles, leurs besoins ne trouvent pas toujours de réponses adaptées dans le droit de la famille tel qu'il existe présentement.
Pour notre gouvernement, c'est important que les jeunes parents et que tous les citoyens du Québec puissent se retrouver et se reconnaître dans les lois qui nous gouvernent. Et les appels à l'action n'ont pas d'ailleurs manqué dans les dernières décennies pour qu'une réforme soit entreprise.
À titre d'exemple, en avril 2013, le Comité consultatif sur le droit de la famille a été mis sur pied et a entamé une importante mobilisation des travaux d'analyse. En juin 2015, son rapport mettait la table pour une réforme en profondeur du droit de la famille au Québec.
Plus près de nous, en 2019, le rapport... Plus tard, trois ans plus tard, le rapport de la Commission citoyenne sur le droit de la famille de la Chambre des notaires parlait aussi de la nécessité d'agir en matière le plus rapidement possible.
En 2019, notre gouvernement lançait des consultations publiques sur le droit de la famille qui ont eu lieu aux quatre coins du Québec. Cet exercice nous a permis d'écouter la population, mais surtout de constater à quel point les familles québécoises ont changé au cours des dernières années mais aussi au cours des dernières décennies.
La population a assez attendu. Maintenant, il nous fait plaisir de vous présenter un pan majeur de l'importante réforme du droit de la famille que nous menons depuis maintenant trois ans.
Alors, je vais céder la parole à mon collègue qui va entrer dans les détails, et c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui. Alors, le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette.
M. Jolin-Barrette : Merci. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, Mme la ministre de la Famille, merci d'être présentes aujourd'hui. Alors, c'est toujours un plaisir de vous retrouver.
Aujourd'hui, je souhaite m'adresser aux couples, aux futurs pères, aux futures mères et à tous ceux et celles qui relèveront ce grand défi que celui d'être parent.
Parfois, ils se pointent le bout du nez de manière inopinée et arrivent dans nos vies comme une surprise. D'autres fois, ils sont attendus, planifiés et leur arrivée fait rêver depuis longtemps. Malgré souvent qu'ils soient responsables des cernes qui les entourent, ils sont également la prunelle de nos yeux. Ils sont à l'origine de nos inquiétudes les plus profondes et représentent notre plus grande richesse, ils sont source de fierté et de motivation, ils nous poussent à grandir, à nous dépasser et nous font redéfinir très certainement nos limites, ils changent nos vies et font avancer la société. Devant des choix législatifs parfois complexes, nos enfants doivent être notre boussole. Notre gouvernement a entrepris en 2021 une vaste réforme du droit de la famille, la plus importante depuis celle du ministre Marc-André Bédard. Tant pour la première phase que celle que nous vous présentons aujourd'hui, l'intérêt de l'enfant demeure notre fil conducteur et notre première préoccupation.
Nous nous sommes d'abord attaqués au volet filiation en adoptant le projet de loi n° 2, Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et modifiant le Code civil en matière de droits de la personnalité et d'état civil, qui a permis des avancées significatives, on peut penser notamment au droit à la connaissance des origines pour tous les enfants, peu importe la façon dont ils viennent au monde, l'admissibilité universelle à l'aide juridique de tous les enfants lorsque la direction de la protection de la jeunesse intervient et l'obligation pour le tribunal de considérer la violence familiale, incluant la violence conjugale et sexuelle, dans toutes les décisions concernant l'enfant.
Nous avons également adopté le projet de loi n° 12, Loi portant sur la réforme du droit de la famille en matière de filiation et visant la protection des enfants nés à la suite d'une agression sexuelle et des personnes victimes de cette agression ainsi que les droits des mères porteuses et des enfants issus d'un projet de grossesse pour autrui. Alors, grâce à cette loi, l'an passé, une mère dont l'enfant est issu d'un viol peut désormais refuser à l'agresseur l'établissement de sa paternité auprès de l'enfant, un agresseur sexuel peut être tenu de verser une indemnité pour subvenir aux besoins de l'enfant issu de son viol et un processus clair et prévisible et sécuritaire est créé pour encadrer la grossesse pour autrui, de sorte que les droits des enfants et des mères porteuses soient protégés.
Le projet de loi n° 56 déposé aujourd'hui vient poser le troisième jalon de l'importante réforme du droit de la famille que nous menons, le volet conjugalité, que nous savons très attendu.
Pour bien comprendre la direction que nous prenons aujourd'hui, il importe de se souvenir d'où l'on vient. Il y a tout juste 60 ans, en février 1964, Marie-Claire Kirkland-Casgrain, première femme élue députée et première femme à intégrer le Conseil des ministres, faisait adopter la loi n° 16, la Loi sur la capacité juridique de la femme mariée.
Avant l'entrée en vigueur de cette loi, le régime matrimonial au Québec ne reconnaissait pas les femmes mariées comme des personnes juridiques autonomes. Si la loi conserve la primauté du père, elle permet toutefois l'établissement d'une certaine égalité entre les époux dans la direction de la famille. C'est un premier pas important qui permettra notamment aux mères québécoises de prendre des décisions pour leurs enfants en l'absence de leur mari, des décisions aussi fondamentales que le consentement à des soins médicaux.
Ce n'est toutefois qu'en 1977 que la notion de puissance paternelle devient l'autorité parentale et, en 1980, que l'égalité totale entre les époux sera consacrée. Cette année-là, le ministre de la Justice, feu Marc-André Bédard, entame une réforme en profondeur du Code civil du Québec. Les familles changent au Québec et l'heure est alors à la redéfinition de notre contrat social.
Le volet familial est le premier auquel s'attaque le ministre. Le 5 mars 1980, il présente à l'Assemblée nationale un projet de loi qui allait devenir la plus importante réforme du droit de la famille et définir le cadre familial québécois pour les décennies à venir. La Loi instituant un nouveau code civil et portant réforme du droit de lafamille vient préciser les droits et les obligations du mariage tels qu'ils s'appliquent encore aujourd'hui 44 ans plus tard, et prévoit des protections qui tiennent compte de l'intérêt de l'enfant en cas de séparation. À l'époque, en 1980, alors que 92 % des conjoints se marient, c'est la très grande majorité des couples qui sont concernés par la réforme.
Le portrait a depuis drastiquement changé, le nombre de couples mariés a chuté en l'espace... et en l'espace de 40 ans, la proportion des couples en union libre à quintuplé, passant de 8 % à 42 %. Pour vous donner un comparable, la Suède est le pays qui affiche le plus haut taux d'union libre dans le monde et il se situe à 33 %, comme vous pouvez le constater sur le document qui circule en carrousel.
Ce nouveau contexte social commande donc une évolution de notre droit, car outre certaines avancées qui méritent d'être soulignées, comme l'institution de l'union civile en 2002 qui aura permis aux conjoints de même sexe de se marier et d'adopter un enfant, force est de constater qu'un fossé s'est creusé entre la réalité conjugale des Québécois et le régime juridique en vigueur. Le maintien d'un tel fossé n'est pas sans conséquence, particulièrement sur les enfants, lesquels naissent désormais en grande majorité hors mariage, à hauteur de 65 %.
Depuis l'affaire très médiatisée, Éric contre Lola, une vaste réflexion dans la société a été entamée. Au lendemain de la décision tout aussi attendue que controversée de la Cour suprême du Canada en 2013, il revenait au législateur québécois de trouver le bon équilibre, celui qui correspondait à la réalité des familles québécoises d'aujourd'hui. Certains diront que ce jugement a souligné les limites du droit de la famille quant aux protections accordées aux femmes et aux enfants, d'autres y verront un rappel de l'importance de respecter la spécificité du droit civil québécois qui place l'autonomie décisionnelle au coeur de ses fondements sociétaux. Si la décision suscite encore aujourd'hui les débats, un consensus social s'en dégage : le statu quo n'est plus possible. Et nous sommes tous d'accord, aucun enfant ne devrait faire les frais de la séparation de ses parents, que ces derniers soient mariés ou non.
Lorsqu'un enfant vient au monde, la dynamique familiale change, tous les parents s'entendront pour dire qu'il y a un avant et un après les enfants. Dès lors, la question «qu'advient-il si nous nous séparons?» prend une tout autre dimension à partir du moment où les enfants sont là. Mais quand tout va bien, bon nombre de parents n'ont pas envie ou n'ont tout simplement pas le réflexe de penser à ce qu'ils feront s'ils se séparent. Et, dans les faits, ce ne sont pas tous les parents qui prennent le temps d'avoir cette importante discussion. Il est donc de notre responsabilité de prévoir un filet de sécurité pour que les enfants soient protégés en cas de séparation de leurs parents. L'objectif est de limiter autant que possible les contrecoups de la séparation pour l'enfant.
Partants du principe qu'un enfant qui se retrouve au milieu d'une rupture sera certainement affecté et déboussolé émotionnellement, nous voulons éviter qu'il ne soit en plus déraciné de son milieu et qu'il perde ainsi ses repères. Nous voulons lui offrir la stabilité, la sécurité et la quiétude qui l'aideront à traverser cette période de changement. Afin d'atteindre cet objectif, le projet de loi n° 56 se décline en quatre mesures phares.
Tout d'abord, le projet de loi propose d'introduire un nouveau régime d'union parentale qui s'appliquerait aux conjoints de fait qui souhaitent éventuellement devenir parents. L'union parentale sera ainsi formée lorsque les conjoints deviennent les parents d'un même enfant et, après l'entrée en vigueur de la loi, qui font vie commune et qui se présentent publiquement comme un couple.
La formation de l'union parentale entraînerait la constitution d'un patrimoine, celui-ci serait composé de la résidence familiale, des meubles de la résidence ainsi que des véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille. Comme mentionné, l'idée ici est de mettre en place les protections nécessaires pour éviter que l'enfant ne subisse les contrecoups de la rupture de ses parents.
Le nouveau régime s'appliquerait automatiquement aux conjoints de fait dès que les conjoints seraient rendus... dès que les conditions seraient remplies, mais il importe de préciser que le régime ne serait pas obligatoire. Les conjoints pourraient ainsi, d'un commun accord, retirer des biens du patrimoine d'union parentale ou se retirer complètement de son application. Au Québec, l'autonomie décisionnelle est au coeur de notre droit civil, il importe que les gens continuent d'avoir le choix et qu'ils soient libres de décider pour eux-mêmes.
Soulignons aussi que les parents non mariés qui le souhaiteraient et dont les enfants sont nés avant l'entrée en vigueur de la loi pourraient décider d'adhérer au patrimoine d'union parentale et bénéficier d'un processus simplifié.
Le projet de loi n° 56 propose aussi d'instaurer une mesure de protection sur la résidence familiale. Nous voulons éviter qu'un parent ne se retrouve du jour au lendemain en position de vulnérabilité avec ses enfants parce qu'il ne possédait aucune part de la maison familiale. Il est ainsi à la merci des décisions de son ex-conjoint, propriétaire des lieux. Ce genre de revirement peut être particulièrement déstabilisant pour un enfant qui se voit forcé de quitter son nid familial à très brève échéance.
Afin de protéger les enfants et de leur assurer la meilleure stabilité possible, les conjoints en union parentale, tout comme les conjoints mariés, bénéficieraient des mesures de la protection de la résidence familiale. Ainsi, en cas de séparation, le tribunal pourrait attribuer un droit d'usage temporaire de la résidence familiale au conjoint qui obtient la garde des enfants. Cela signifie qu'un conjoint pourrait, pour un temps donné, demeurer dans la résidence familiale malgré qu'il n'en soit pas le propriétaire, cela lui laisserait le temps de planifier la suite et ainsi assurer une transition plus douce pour les enfants.
La réforme que nous proposons prévoit également une mesure visant à contrer la violence judiciaire. Au cours des dernières années, on nous a relaté divers cas où un citoyen se sert du système de justice pour nuire à son ex-conjoint en multipliant les procédures judiciaires qui sont souvent onéreuses et bien évidemment très stressantes. Et, trop souvent, ce sont les enfants qui se retrouvent au milieu des conflits et qui en subissent les impacts, ne sachant pas trop comment ils doivent se positionner face à leurs parents. Nous donnons ainsi les outils aux tribunaux pour déceler ce type d'abus en matière de droit familial et les sanctionner.
Finalement, la dernière mesure-phare du projet de loi concerne l'héritage et prévoit de nouveaux droits successoraux pour les conjoints en union parentale. À l'heure actuelle, si un conjoint de fait décède sans testament, 100 % de son héritage ira à ses enfants. Cela signifie que, dans un cas où, par exemple, le conjoint survivant, qui aurait partagé sa vie avec le défunt et vécu dans la même maison pendant 20 ans en plus d'y élever leurs enfants, n'aura droit à rien. Il risque ainsi de se retrouver dans une situation de précarité financière alors qu'il traverse déjà des moments difficiles. C'est insensé, nous en convenons tous.
Soyons clairs, la liberté testamentaire demeure et un conjoint pourra toujours décider de partager son héritage d'autre façon. Cela dit, en l'absence de testament, nous proposons que l'héritage d'un conjoint en union parentale soit réparti ainsi : un tiers pour le conjoint survivant, pourvu qu'ils aient fait vie commune durant au moins un an avant le décès et qu'ils soient en union parentale, et deux tiers pour le ou les enfants, comme cela s'applique en mariage.
Cette réforme propose une solution équilibrée et qui reflète la nouvelle trajectoire familiale qu'empruntent désormais les Québécoises et les Québécois. Il est hors de question de marier les gens de force au Québec. La réforme met ainsi en place les protections nécessaires pour les enfants qui, de nos jours, naissent majoritairement hors mariage, tout en maintenant le libre choix pour les couples qui souhaitent convenir d'une entente qui leur est propre.
La famille est au fondement même de notre société, elle est monoparentale, homoparentale, nucléaire, recomposée, peu nombreuse ou traditionnelle, elle se redéfinit continuellement.
Le droit de la famille constitue sans doute l'un de nos cadres juridiques les plus fondamentaux, il nous concerne toutes et tous. En tant que volet important de notre droit civil, il constitue également un trait distinctif de la société québécoise. Comme le rappelait à juste titre le ministre de la Justice, Marc-André Bédard, en 1980, le Code civil n'est pas une simple loi parmi d'autres, c'est l'expression du droit courant du pays, c'est le reflet d'une certaine façon de penser, de concevoir l'organisation des rapports humains et de parvenir à la solution de justice. C'est donc un droit essentiellement dynamique parce qu'il transpose l'état de la société et il la suit dans son évolution.
Ces dernières années, le droit de la famille s'est souvent retrouvé à la remorque de la société, si bien qu'un rattrapage s'avère aujourd'hui essentiel. Notre droit se doit de mieux refléter les réalités des familles du Québec moderne. La famille québécoise a grandement évolué et le droit qui l'encadre doit en faire tout autant.
Je vous remercie de votre attention et je vais céder la parole à Mme la ministre de la Famille.
Mme Roy (Verchères) : Merci. Merci beaucoup, Simon. Merci de déposer ce projet de loi, un projet de loi qui est important, qui suit justement l'évolution des familles, les avancées. Ce projet de loi va nous permettre justement d'avoir des avancées pour les familles du Québec, et je pense que c'est important.
Comme le soulignait... hein, j'écoutais Simon nous parler de l'évolution du droit de la famille, il me semble quec'était hier, là, où on connaissait, au Québec, les grandes tablées d'enfants qu'avaient nos grands-parents, tous issus suite à un mariage, donc un modèle qui était le même, qui était unique. Traditionnellement, la mère était à la maison, le père était le pourvoyeur.
J'ai envie de vous dire, heureusement, aujourd'hui, ces réalités-là ont beaucoup évolué et, au Québec, bien, c'est 80 % des mères québécoises qui ont un enfant en bas de six ans qui sont sur le marché du travail. Donc, c'est important. Et c'est ça, la société québécoise 2024. Si on se compare, par exemple, à l'ensemble canadien, bien, c'est plutôt un taux de près de 70 %.
Alors, ces données nous démontrent toute l'importance de se doter d'un cadre légal typiquement québécois, plus moderne, qui va mieux répondre aux besoins et aux réalités des familles d'aujourd'hui, mais j'ai envie de vous dire aussi des enfants de demain. Alors, c'est extrêmement important. Le projet de loi n° 56 qui vient d'être présenté par mon collègue de la justice y contribue concrètement. Puis j'ai envie de dire je l'applaudis parce qu'à cause de sa justesse et de son équilibre, où on maintient justement la décision des gens, le respect des gens, mais en protégeant ce qu'on a de plus précieux, nos enfants.
Je pense notamment à la protection, évidemment, de la résidence familiale, le nid, hein, qui est souvent la source de sécurité, de réconfort pour nos enfants. C'est un point de repère, un point de repère important dans la vie d'un jeune enfant. Quand il y arrive une séparation, ce n'est déjà pas facile comme situation, donc je pense que la résidence familiale, quand on peut... évidemment, on ne peut pas toujours la conserver, mais, quand il arrive une séparation, si on peut au moins s'assurer que les choses se fassent en douceur, ça va nous permettre que l'enfant puisse aussi y être préparé. La mesure de protection permet d'éviter justement à l'enfant de subir les aléas des décisions d'un parent qui serait en colère — ça arrive quelquefois quand il y a des séparations — puis qui déciderait, du jour au lendemain, de faire maison nette puis exiger le départ de la résidence familiale. Je pense qu'on limite ainsi la possibilité des impacts de la séparation sur les enfants et sur le cheminement des enfants. Donc, je pense, c'était important de le tenir en compte.
Le développement de nos enfants, bien, il doit... il est au coeur de nos progrès sociaux, puis c'est ce qu'on souhaite au Québec. L'intérêt des enfants, je pense que c'est ce qui guide ta réforme puis je trouve ça intéressant que tu l'aies fait avec cette juste mesure-là du respect de l'évolution des familles mais aussi avec ce sens superimportant de protéger nos enfants.
Hier, à l'Assemblée nationale, on adoptait le projet de loi sur la protection au niveau des services de garde éducatifs, alors je pense que ça démontre bien tout le souci qu'on a de pouvoir protéger ce qu'on a de plus précieux dans la vie, nos enfants, nos petits-enfants.
Et, Simon, tu vas toujours pouvoir compter sur moi comme alliée pour soutenir, pour protéger nos enfants, et c'est ce que fait le projet de loi n° 56. Alors, je te félicite de t'être mis au travail pour, justement, aider à moderniser les cadres qui régissent nos familles. Merci.
Le Modérateur : Merci à vous trois. On va passer à la période des questions. On est beaucoup, donc je vous demanderais quand même de vous limiter, puis, au pire, on reviendra avec des questions, là, si on a le temps. Je commence avec TVA Nouvelles, Alain Laforest.
Journaliste : Bonjour à vous trois. M. le ministre, je vais vous demander un exercice de concision.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Journaliste : Un couple en union libre avec un enfant, à partir de l'adoption du projet de loi, qu'est-ce que ça change?
M. Jolin-Barrette : Les couples qui auront un enfant après l'entrée en vigueur de la loi vont être assujettis au régime l'union parentale, ça signifie que la maison, les autos servant à l'usage de la famille, les meubles de la maison sont couverts dans le patrimoine d'union parentale. Il y a la protection de la résidence familiale et il y a également la possibilité d'avoir une prestation compensatoire.
Pour tous les couples qui ont déjà des enfants avant l'entrée en vigueur de la loi, le régime ne s'applique pas, à moins qu'ils souhaitent qu'il s'applique et qu'ils fassent un geste positif pour que le régime s'applique à eux, comme c'est le cas pour un contrat de vie commune.
Pour les gens auxquels le régime s'applique, donc ceux qui ont des enfants qui sont nés après ou qui adoptent un enfantaprès l'entrée en vigueur de la loi, ils ont toujours la possibilité également de se retirer du patrimoine d'union parentale en allant chez le notaire ou de retirer certains biens.
Journaliste : Un couple en union libre sans enfant, mais qui éventuellement souhaite en avoir, qu'est-ce que ça change?
M. Jolin-Barrette : Le régime va s'appliquer à partir du moment de la naissance de l'enfant. Donc, deux conjoints de fait, actuellement, supposons qu'ils ont 22 ans, qui prévoient avoir un enfant en 2026, si le projet de loi est adopté comme c'est prévu, le régime va démarrer au 30 juin 2025, donc si vous avez un enfant après le 30 juin 2025, vous allez être couverts par le régime, c'est-à-dire la maison, la résidence familiale, les autos et les meubles vont être dans le patrimoine d'union conjugale... d'union parentale, à moins que vous excluiez en allant chez le notaire.
Journaliste : ...Mme Bourassa n'est pas couverte, là.
Mme Bourassa : On n'a pas d'enfant.
Mme Roy (Verchères) : Pas encore.
M. Jolin-Barrette : On n'a pas d'enfant.
Journaliste : Donc, elle n'est pas couverte.
M. Jolin-Barrette : À moins qu'elle décide de s'y assujettir avec son conjoint. Donc, ça, c'est important pour nous d'assurer un filet de sécurité pour les couples qui auront des enfants, mais ça n'empêche pas les Québécois et les Québécoises de s'insérer dans le régime s'ils le souhaitent, en tout respect de leur liberté contractuelle, leur liberté, de leur volonté, l'autonomie décisionnelle.
Et, la même chose, si vous avez un enfant après l'entrée en vigueur de la loi, vous pourrez vous exclure, si vous le souhaitez, mais pas de la protection de la résidence familiale.
En bref, on ne voulait pas marier les Québécois de force, mais on veut assurer une protection, un filet de sûreté pour les enfants.
Le Modérateur : Hugo Pilon-Larose, La Presse.
Journaliste : Pourquoi avez-vous choisi justement de prévoir un «opting out», que le régime n'est pas obligatoire après son adoption, pour les gens en union libre qui ont des enfants?
M. Jolin-Barrette : En fait, le régime est obligatoire à partir du moment où l'enfant il naît. Cependant, on maintient l'autonomie décisionnelle des couples. Donc, pour nous, c'était important puis c'est un élément fondamental du droit civil de faire en sorte de laisser la liberté aux gens de décider de quelle façon ils souhaitent organiser leurs affaires personnelles tout en assurant un minimum pour les enfants. Donc, ça revient à avoir une discussion de couple.
Le régime s'applique à tous, à ceux qui ont des enfants après l'entrée en vigueur de la loi, cependant, on laisse la possibilité aux gens de soit bonifier le régime, hein, parce que ça, il y a la possibilité de bonifier le régime pour les conjoints de fait ou de s'exclure du régime s'ils le souhaitent.
Et l'union parentale est distincte du mariage, et donc si les gens souhaitent se marier avec les protections associées au mariage, c'est un choix qu'ils font. S'ils ont des enfants après l'entrée en vigueur de la loi, on vient mettre un filet de sécurité pour les enfants, mais on maintient quand même le droit des parents de choisir de quelle façon ils veulent organiser leur rapport. Mais s'ils veulent s'en exclure, ils devront aller chez le notaire, avec les conseils juridiques du notaire, pour être informés sur quelles sont les conséquences de se soustraire du régime.
Journaliste : Une personne qui pourrait avoir été contrainte de se soustraire du régime, notamment dans une relation teintée de violence conjugale, pourrait-elle faire valoir qu'au moment de s'en soustraire elle n'avait pas la réelle possibilité d'avoir accès à la protection prévue par l'union parentale?
M. Jolin-Barrette : Oui, la réponse à cette question-là, c'est oui. Le notaire est chargé de vérifier le consentement libre et éclairé de la personne au moment de la signature. Et si jamais, pour une raison quelconque, la conjointe était sous l'emprise de monsieur, en situation de violence conjugale, son consentement pourrait avoir été vicié, alors, oui, ce serait une possibilité.
Comme ça s'est fait dans le cas du patrimoine familial, également, en 1989, il y a eu des dossiers où madame avait signé le renoncement avant la date d'entrée en vigueur du patrimoine durant la période transitoire puis le tribunal a fait fi de ce retrait-là pour dire : Bien, écoutez, il y avait une situation problématique, le consentement n'avait pas été donné d'une façon libre et éclairée.
Journaliste : Puis, une petite précision, pourquoi avoir choisi, et c'est un thème qui était d'ailleurs abordé dans le rapport Roy de 2015, de ne pas inclure les familles recomposées dans l'union parentale?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, les familles recomposées peuvent être assujetties au régime d'union parentale, si elles ont... si les nouveaux conjoints ont un enfant ensemble. Le déclencheur du régime d'union parentale est le fait d'avoir un enfant ensemble après l'entrée en vigueur de la loi, c'est ce qui est générateur du régime. Donc, ce que l'on vise, c'est vraiment... La loi va entrer en vigueur, et, si vous avez un enfant après, vous l'adoptez après la loi, exemple, supposons que vous aviez déjà des enfants puis que vous avez un nouvel enfant avec votre nouvelle conjointe, bien là, à ce moment-là, le régime va s'ouvrir.
Le Modérateur : Caroline Plante, La Presse Canadienne.
M. Jolin-Barrette : Bonjour.
Journaliste : Bonjour. Est-ce que votre projet de loi a fait l'objet de discussions en amont avec les groupes? Est-ce que la réception était bonne?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, j'ai fait des consultations. Le projet de loi a été présenté aux parlementaires il y a tout juste une heure. Mais effectivement, depuis que je suis ministre de la Justice, vous savez, j'ai... c'est la... le troisième jalon de la réforme en droit de la famille, c'est le dernier jalon que je dépose. Alors, je consulte les groupes depuis 2020, depuis que je suis ministre de la Justice.
Donc, on a décidé, dans un premier temps, de prévoir la filiation pour les enfants, ensuite la grossesse pour autrui, puis de garantir... En fait, j'avais le choix de séparer la réforme. Je fais ce choix-là pour prioritairement régler les questions de protection des enfants puis ensuite de faire la conjugalité. Mais, oui, j'ai consulté plusieurs groupes.
Journaliste : Puis peut-être une petite question technique comme ça, mais pour adhérer ou s'exclure, il va y avoir des frais de notaire, là, si je comprends bien, est-ce que ça pourrait décourager certains couples, là, d'adhérer?
M. Jolin-Barrette : En fait, pour vous exclure du régime d'union parentale, effectivement, vous devez impérativement aller chez le notaire pour, supposons, ne pas être assujetti à la résidence, ou au partage des autos, ou au partage des meubles, supposons que vous ne voulez pas que ça s'applique, donc de retirer un bien ou de retirer la totalité du régime.
Donc, oui, il y aura des frais de notaire, mais je pense que c'est important d'avoir un officier public de confiance impartial comme le notaire qui va renseigner les gens adéquatement sur quelles sont les conséquences de se retirer de ce régime impératif là... de ce régime obligatoire là après la naissance de l'enfant.
Si vous êtes dans une situation où vous avez des enfants présentement — la loi va entrer en vigueur — et vous souhaitez être assujetti au régime, à ce moment-là, il va y avoir un formulaire simplifié, vous n'avez pas besoin d'aller chez le notaire. Puis, par une convention écrite entre... entre les conjoints... et on va avoir sur le site de JuridiQC, donc, qui est le site d'information juridique du gouvernement, un formulaire simplifié qui va permettre aux gens de le remplir et qui va décider... qu'ils vont décider d'adhérer.
Ce n'est pas différent du fait que les conjoints actuellement peuvent convenir d'un contrat de vie commune, les conjoints de fait, tous les conjoints de fait peuvent le faire, mais nous, on va avoir un formulaire simplifié avec ce régime-là, si les gens veulent adhérer.
Cela étant, le fait de créer un régime d'union parentale, les gens peuvent toujours le bonifier aussi. Alors, les conjoints maintiennent cette liberté-là de prévoir quels sont les... la réalité dans laquelle ils évoluent. Donc, ça respecte la liberté, autant d'un côté on ajoute des choses ou on en retire suite à la naissance de l'enfant.
Le Modérateur : Louis Lacroix, Cogeco.
Journaliste : Bonjour, mesdames. Bonjour, M. Jolin-Barrette.
M. Jolin-Barrette : Bonjour.
Journaliste : Hugo a pris un petit peu la question que je voulais vous poser, c'était relativement aux familles recomposées. Quand, par exemple, vous dites, là, que si, par exemple, il y a une famille recomposée et il y a un enfant qui naît dans cette union-là, là, le régime s'applique, mais est-ce que le régime s'applique de la même façon pour tous les enfants, ou si ça crée deux catégories d'enfants?
M. Jolin-Barrette : Non, c'est la même. Il n'y a qu'un seul régime qui s'applique et tout le monde est sur le même pied d'égalité. Donc, votre union parentale, elle est faite, supposons, avec votre nouvelle conjointe. Donc, vous avez déjà deux enfants et vous déménagez avec madame, votre nouvelle conjointe. Vous avez un enfant avec madame, votre nouvelle conjointe, le régime s'enclenche. Donc, la maison qui est dans ce régime-là avec madame, la nouvelle maison devient partie de... du... des biens qui sont dans l'union parentale.
Mais je vous donne un exemple en matière successorale. O.K., là, maintenant, on étend la dévolution légale. Supposons que vous n'aviez pas de testament, bien, votre nouvelle conjointe va pouvoir hériter du tiers et le reste, le deux tiers, ça va être vos enfants. Donc, les enfants issus de votre seconde union, donc de votre nouvelle conjointe, vous avez un enfant avec cette dame-là, et supposons que vous aviez deux enfants préalablement, bien, eux aussi vont hériter. Donc, sur le deux tiers, chacun va hériter du tiers sur ce montant-là. Donc...
Journaliste : Mais la... je comprends, mais c'est parce que... Poussons l'exercice à l'extrême, là. Vous avez, par exemple, une famille reconstituée, prenons l'exemple que vous avez donné, deux enfants, mais les enfants sont moitié avec les... mettons, la mère, puis l'autre moitié du temps avec le père, etc., donc il se trouve à y avoir deux maisons familiales, là, pour ces enfants-là, là.
M. Jolin-Barrette : Non.
Journaliste : Bien, c'est parce que si le père, lui, mettons qu'il n'est pas dans le... ce n'est pas... Comprenez-vous ce que je veux dire? C'est que là on crée... Je comprends qu'on crée, avec la naissance d'un enfant, une maison familiale ou un patrimoine familial, mais les deux autres enfants qui sont dans la... dans la... dans... qui ne sont pas, eux autres... les enfants des deux, là...
M. Jolin-Barrette : Non, mais pour clarifier, là, pour clarifier, là. Dans le fond, le régime d'union parentale tout comme le mariage, rendons ça simple. Vous étiez marié dans le cadre de votre première union, la protection associée à la résidence familiale dans le cadre de votre mariage s'applique du moment où vous êtes marié puis que vous vivez avec votre première épouse.
À partir du moment où vous vous séparez puis vous divorcez, il n'y a plus de protection de résidence familiale parce que madame a son propre domicile, vous, vous avez votre propre domicile, vous êtes en garde partagée, supposons, une semaine, une semaine. Bien, dans le fond, il n'y a plus d'union, il n'y a plus de mariage, vous êtes divorcés, donc il n'y a pas de protection associée à ça.
Là, par la suite, vous vous retrouvez une nouvelle conjointe, vous avez vos enfants une semaine sur deux, vous vous retrouvez avec une nouvelle conjointe, et là vous faites l'acquisition... Supposons, madame vient habiter dans votre maison que vous avez, O.K., et là vous avez un enfant suite à ça, la maison va devenir la résidence familiale de la nouvelle union. Donc, vos enfants du premier mariage, eux, viennent résider chez vous, mais cette maison-là devient protégée, en termes de résidence familiale, due à la création de l'union parentale avec votre nouvel enfant qui naît, mais...
Journaliste : ...en tout cas, je ne veux pas être trop... puis je comprends que c'est des détails qui sont peut-être un peu... puis des situations, des cas d'espèce, mais si la même situation survient dans le cas de l'autre conjoint, là...
M. Jolin-Barrette : Là, l'autre conjoint, votre première épouse?
Journaliste : O.K. On va refaire... Mettons, là, moi, là, je m'en vais avec ma conjointe qui a deux enfants, O.K., puis ensemble on a un enfant, O.K., là on crée un univers familial. On est... On est d'accord?
M. Jolin-Barrette : L'union parentale.
Journaliste : L'union parentale.
M. Jolin-Barrette : Qui est né après l'entrée en vigueur de la loi.
Journaliste : C'est ça. Puis là vous dites que les enfants ont tous les mêmes... les mêmes... sont tous sur le même pied.
M. Jolin-Barrette : Oui. N'oubliez pas que, si votre résidence, elle était entièrement payée, c'est comme dans les règles du mariage, dans le fond, elle n'est pas partageable. Si vous l'aviez entièrement payée en biens propres avant le début de l'union, elle n'est pas partageable, comme dans le mariage.
Journaliste : O.K. Mais, pour pousser l'exemple plus loin, si l'ex-conjoint de ma conjointe, qui, lui aussi, est en garde partagée, mettons, puis a un enfant avec sa nouvelle conjointe, bien là, il y a un autre patrimoine familial qui se construit, l'autre bord.
M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est pas... c'est un patrimoine d'union parentale. S'il n'est pas marié, donc c'est le nouveau régime. Ce n'est pas différent de...
Prenez l'exemple, M. Lacroix, de vous. Vous décidez de vous marier quand vous avez des nouvelles unions. Vous étiez marié, vous divorcez une première fois, vous aviez une résidence familiale à l'époque avec votre première épouse, vous faites le partage, vous êtes divorcés, vous avez liquidé les actifs.
Vous avez une nouvelle conjointe puis vous décidez de vous marier avec elle, création d'un nouveau patrimoine également avec la nouvelle maison, même si vous avez des enfants d'un premier lit.
Même chose de son côté à elle, vous êtes également son deuxième mariage, puis elle était divorcée également, donc dans l'exemple de votre ex. Donc, c'est le même principe qu'en mariage, il n'y a qu'un seul patrimoine à la fois, comme c'est dans le cas du mariage.
Vous ne pouvez pas vous marier trois fois en même temps. Donc, à chaque fois qu'il y a fin du mariage, divorce, il y a liquidation du patrimoine. Ce n'est pas différent que si vous vous mariez une nouvelle fois. La différence, c'est que ce n'est pas le geste positif d'aller se marier au palais de justice, à l'église ou est-ce que vous le souhaitez par quelqu'un qui est accrédité, c'est plutôt la venue d'un enfant qui fait en sorte de démarrer le patrimoine d'union parentale.
L'équivalent du geste déclencheur, c'est la naissance de l'enfant. Donc, à partir du moment où l'enfant naît, votre patrimoine d'union parentale s'ouvre, et vous pouvez le refermer avec votre nouvelle conjointe en allant chez le notaire, si vous le souhaitez, pour exclure des biens ou pour exclure complètement le régime.
Journaliste : D'accord. Merci.
Le Modérateur : Pierre-Alexandre Bolduc, Radio-Canada.
Journaliste : Bonjour, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Bonjour.
Journaliste : Ça fait 10 ans, vous disiez, Lola... Éric contre Lola, pourquoi... Quand vous l'expliquez, ça a l'air simple, mais c'est un peu compliqué quand même, est-ce que c'est la raison pour laquelle vous pensez que les autres gouvernements n'ont pas osé toucher à ça?
M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, moi, ce que je constate, c'est que ça a été rendu en 2013. Il y a eu le rapport consultatif du droit de la famille en 2015. Nous, on agit, on agit au bénéfice des enfants, au bénéfice des personnes qui sont dans une situation de vulnérabilité. Puis la réforme du droit de la famille, on l'a faite depuis 2020.
Donc, on a commencé par les enfants, filiation, adoption, les mères porteuses. Là, on est rendus à la conjugalité. Notre gouvernement, on avance, puis on prend les... on prend les enjeux importants, les enjeux sociétaux importants, puis on n'a pas peur de s'y attaquer.
Journaliste : Pourquoi avoir décidé d'exclure, dans le régime, les REER puis le fonds de pension?
M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, ce n'est pas le mariage qu'on fait. Ça, c'est les protections associées au mariage. Et donc on laisse le choix aux gens. En mariage, oui, vous avez ces protections-là. Là, le régime d'union parentale vise à faire en sorte d'assurer une sécurité à l'enfant immédiatement pour assurer son intérêt. Alors, c'est un régime qui est distinct de celui du mariage.
Puis je pense que les Québécois doivent avoir la possibilité d'avoir des options, c'est-à-dire soit de se marier, soit s'ils ont des enfants après l'entrée en vigueur de la loi, il y aura le régime d'union parentale qui par ailleurs peut être bonifié ou qui peut être... on peut se retirer ou on peut exclure certains biens aussi. Donc, pour nous, c'est important de ne pas marier les gens de force puis d'avoir un régime fait sur mesure pour les conjoints de fait qui ont des enfants.
Journaliste : Je vais me permettre une question là-dessus, M. Jolin-Barrette. François Carabin, Le Devoir.
Vous dites que vous ne voulez pas marier les gens de force, ceci étant dit, dans votre loi, les personnes qui ne sont pas mariées et qui ont déjà un enfant, c'est comme un «opt-in», en gros, là, si j'ai bien compris, il faut poser un geste positif, c'est le terme que vous avez utilité.
M. Jolin-Barrette : Effectivement.
Journaliste : Pourquoi cette distinction entre les couples non mariés qui constituent 42 % des personnes au Québec et les couples non mariés qui vont avoir un enfant plus tard?
M. Jolin-Barrette : Oui. Mais, en fait, vous savez, je ne peux pas refaire le passé, moi, je pense que les gens ont organisé leur vie et ça a été un choix au moment où ils ont eu des enfants. Ceux qui ont déjà des enfants de deux, cinq, 10, 17 ans ou 20 ans aujourd'hui, ils ont fait des choix dans le passé de ne pas se marier, ou peut-être certains ont des contrats de vie commune également, alors on maintient l'état actuel des choses pour ces gens-là. Cependant, ils peuvent, s'ils le souhaitent, comme vous l'avez dit, s'assujettir au régime d'union parentale ou à tout autre régime s'ils le souhaitent. Ça revient à respecter leur autonomie, leur volonté; et la possibilité, elle est là.
Le législateur intervient pour les enfants qui vont naître. Donc, exemple, si jamais vous avez deux enfants actuellement puis, après l'entrée en vigueur de la loi, vous avez un troisième enfant, le régime d'union parentale va s'appliquer et va commencer à courir à partir de la naissance de l'enfant.
Journaliste : Je voulais juste comprendre avec vous. Éric contre Lola avait, bon, rendu un jugement qui disait qu'il y avait certains aspects de la loi, du régime québécois qui étaient discriminatoires, mais, malgré tout, la loi respectait la Charte des droits et libertés. Pourquoi est-ce qu'à ce moment-là c'est nécessaire d'opérer ce changement-là aujourd'hui?
M. Jolin-Barrette : Bien, ce que la Cour suprême disait, c'est qu'il y avait violation de la Charte des droits et libertés, donc de la Charte canadienne, mais que c'était justifié en vertu de l'article 1, en vertu du test de la décision Oakes, donc... puis c'était une décision qui était partagée, mais surtout, le message de la Cour suprême, c'était de dire : Ce n'est pas aux tribunaux à intervenir, mais c'est plutôt aux législateurs québécois d'intervenir et de décider, d'une façon collective, en consultant la société, de quelle façon les rapports doivent s'organiser par rapport à la famille.
Alors, aujourd'hui, le projet de loi que je vous propose, je pense que c'est un juste équilibre en faisant en sorte d'assurer la protection des enfants, tout en maintenant la liberté et l'autonomie décisionnelle des conjoints suite à la venue d'un nouvel enfant.
Le Modérateur : Patrick Bellerose, Le Journal de Québec.
M. Jolin-Barrette : Bonjour.
Journaliste : M. Jolin-Barrette, sur la question des deux régimes, là, qu'il y aura désormais pour les gens en union libre, vous ne craignez pas que ça puisse être contesté devant les tribunaux, éventuellement, parce que justement la Cour suprême disait : C'est discriminatoire, il faut modifier? Là, vous le modifiez, mais seulement pour les gens qui sont en union parentale à partir, là, de l'adoption du projet de loi.
M. Jolin-Barrette : Bien, je pense que le coeur des familles, c'est notamment le fait d'avoir des enfants. Alors, les règles, elles vont changer pour le futur à partir du moment où les gens vont avoir un enfant. On maintient cette liberté, cette autonomie décisionnelle là. Les gens qui ont organisé leur vie depuis 10, 15, 20, 25 ans, qui n'étaient pas assujettis à aucune protection... ou peut-être qu'ils ont décidé de le faire. Donc, on ne vient pas jouer dans le passé, mais on établit un régime très clair et on a... on va faciliter, avec un formulaire, sur le site JuridiQC, éventuellement, pour dire : Bien, écoutez, les couples qui ont déjà des enfants et qui souhaitent s'assujettir au régime pourront le faire, mais ce n'est pas un régime qui leur est imposé. Mais pour ceux qui auront des enfants, bien là, maintenant, les règles sont très claires.
Journaliste : Mais Lola aujourd'hui n'est pas plus protégée qu'elle ne l'était par le passé.
M. Jolin-Barrette : Bien, dans le cadre de...
Journaliste : À l'avenir, oui, mais les gens, les 42 % de Québécois, là, aujourd'hui, ne sont pas mieux protégés que par le passé.
M. Jolin-Barrette : Ceux qui vont avoir des enfants vont avoir un régime qui va assurer un filet de sécurité aux enfants. Là, on est dans une situation où on inviterait le législateur à marier de force tous les Québécois, et ce n'est pas le choix que nous faisons, nous laissons la liberté aux gens. Et, pour le futur, on indique clairement quel est le régime qui s'applique tout en maintenant l'autonomie décisionnelle.
Journaliste : ...l'idée du patrimoine parental. Mme Roy faisait remarquer, bon, que 80 % des femmes qui ont un enfant en bas âge travaillent... les prestations alimentaires qui existent déjà. Qu'est-ce que vous voulez protéger avec cette idée de patrimoine, là, parental qui est, principalement, la maison, on s'entend?
M. Jolin-Barrette : Bien, vous... vous... vous le dites bien, «principalement, la maison», c'est l'actif le plus important des Québécois puis des Québécoises dans la majorité des couples. Et parfois on peut se retrouver avec des situations où monsieur ou madame est déjà propriétaire de la maison, mais pas en bien propre, dans le sens il y a une hypothèque, supposons à 90 %. Puis, dans certains couples, bien, vu que la maison était déjà au nom de monsieur ou au nom de madame, l'autre conjoint, supposons, paye l'épicerie, au bout de 10 ans de vie commune se retrouve... puis il y a une séparation, se retrouve à avoir payé les dépenses courantes et aucun actif, et monsieur ou madame se retrouve le bec à l'eau avec aucune... aucune garantie, bien, aucun actif.
Même chose au niveau de la prestation compensatoire, ça, c'est un élément qui est important auquel on ne peut pas déroger, s'il y a un appauvrissement d'un conjoint et qu'il y a un enrichissement corrélatif de l'autre conjoint, il y aura maintenant désormais la possibilité d'un recours qui va être facilité. Exemple, un des deux conjoints s'occupe principalement de la famille, fait des sacrifices et permet à l'autre de s'enrichir en fonction du travail, mais c'est un rééquilibrage qu'on amène, une possibilité que ce soit plus équitable. Donc, c'est les... les outils qu'on a utilisés.
Et je pense que pour la majorité des... des couples au Québec, le fait de venir couvrir la résidence familiale, c'est fort important, parce qu'on ne veut pas se retrouver avec des situations où, supposons, un des conjoints est propriétaire exclusif de la maison et que... rencontre un nouveau, nouvelle conjointe, puis le lendemain matin, en 24 heures, envoie les enfants à la rue avec l'ex-conjoint, puis se retrouvent démunis. Donc, c'est des mesures, je pense, qui sont dans l'intérêt des enfants de protection, de stabilité.
Donc, tout le régime a été réfléchi en fonction de l'intérêt des enfants, de la stabilité, d'assurer un filet de sûreté pour eux en cas de séparation parce que, vous le savez, bien souvent, ce sont eux qui subissent les premières conséquences de la séparation entre des adultes.
Le Modérateur : Laurence Royer, Noovo.
Journaliste : Oui. Bonjour. J'aimerais juste comprendre, pour être certaine de bien, bien comprendre, là, quelle est la différence entre des conjoints de fait qui ont un enfant et des conjoints, justement, en union parentale.
M. Jolin-Barrette : Mais, dans le fond, l'union parentale va démarrer à partir du moment où vous allez avoir un enfant. Donc, exemple, aujourd'hui, les conjoints de fait qui ont un enfant, le régime ne s'applique pas à eux, le régime va s'appliquer à partir du moment de l'entrée en vigueur de la loi qui est prévue le 30 juin 2025.
Donc, si vous avez un enfant après le 30 juin 2025, vous êtes conjoints de fait, le régime va s'appliquer à vous, ça veut dire la maison, les autos et les meubles, ça va faire partie de votre patrimoine d'union parentale.
Si, avant l'entrée en vigueur de la loi, votre famille, elle est déjà faite, vous avez déjà vos enfants, le régime de l'union parentale ne s'applique pas à vous et votre situation ne change pas, à moins que vous décidiez volontairement de vous y assujettir avec votre conjoint ou votre conjointe. Donc, c'est ça, la différence majeure.
Donc, pour le futur, tous les couples vont être assujettis à partir du moment où vous allez avoir un enfant ou adopter un enfant après l'entrée en vigueur de la loi, à moins que vous vous excluiez en allant chez le notaire.
Journaliste : O.K. Juste une petite précision aussi, là, quand on parle, là, de la... le patrimoine... le patrimoine d'union parentale à la naissance d'un enfant, c'est tous les biens qui ont été acquis même avant, là, la naissance de l'enfant?
M. Jolin-Barrette : Non.
Journaliste : Non? O.K.
M. Jolin-Barrette : Non, c'est uniquement la maison, les autos, les véhicules...
Journaliste : Oui, mais ça peut être acquis avant, là, la naissance de l'enfant. Par exemple, on a acheté une maison puis après on a eu un enfant, ça s'applique?
M. Jolin-Barrette : Oui, sous réserve que c'est la portion qui est acquise après la naissance de l'enfant.
Donc, faisons quelque chose de simple, là, vous avez... vous avez une maison de 100 000 $, O.K., vous l'avez acheté à votre nom personnel avant la naissance de l'enfant puis vous avez mis 50 000 $ de mise de fonds, donc il reste une hypothèque de 50 000 $. Au moment de la naissance de l'enfant, il reste une hypothèque de 50 000 $, la maison, elle vaut 100 000 $. Donc, en biens propres, vous avez 50 000 $ dans votre patrimoine personnel à vous. À partir de la naissance de l'enfant, le 50 000 $ suivant qui reste à payer sur l'hypothèque, même si vous continuez à la payer seul, ça, ça devient partageable. Donc, supposons, là, qu'il n'y a pas de prise de valeur, tout ça, vous vous séparez trois ans plus tard, puis que la... le 50 000 $, il est entièrement payé, il y a un 25 000 $ qui devient partageable.
Donc, les biens qui étaient acquis avant le mariage... pardon, avant l'union parentale, sont pleinement protégés. Donc, si votre maison de 100 000 $ vous l'aviez entièrement payée, elle ne rentre pas dans le patrimoine d'union... d'union parentale parce qu'elle était entièrement acquise à vous. Par contre, la résidence familiale va s'appliquer. Et, pour le reste, c'est la valeur accumulée qui devient partageable après.
Donc, les gens vont savoir, comme en mariage, ça, ce n'est pas différent, que les règles s'appliquent clairement, et que la maison, la partie non payée, non acquise devient partageable comme c'est le cas pour les règles actuelles.
Même chose, on protège les héritages qui sont versés, supposons, sur un bien d'union parentale. Les remplois également. Exemple, vous étiez propriétaire, vous achetez une nouvelle maison plus grande parce que vous avez la venue d'un enfant, mais vous aviez déjà un condo qui servait de résidence familiale, puis elle était à vous avant la naissance de l'enfant, à ce moment-là, cet argent-là, il est protégé également. Même chose pour les fruits et les revenus des placements des sommes que vous aviez auparavant aussi, ça également, c'est protégé.
Le Modérateur : Une petite dernière précision de Caroline Plante.
Journaliste : ...ce régime d'union parentale serait unique au Canada?
M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, dans le reste du Canada, c'est des règles qui sont différentes. Donc, nous, on a un régime propre au Québec, mais on était le seul État fédéré à ne pas prévoir de règles pour les conjoints de fait, donc, qui n'étaient pas mariés.
Donc, dans les autres États fédérés, ce sont des règles différentes. Certains font le choix qu'après x nombres de temps de vie commune, supposons, notamment en Ontario, bien, il y a un régime qui s'impose aux conjoints. Nous, le choix qu'on a fait, c'est de dire : Écoutez, le régime s'applique à ceux qui ont des enfants. Donc, deux personnes qui ont 40 ans, qui n'ont pas d'enfant ensemble, qui décident de devenir un couple, eux, ils vont avoir la liberté de convenir de ce qui leur convient, même s'ils habitent 10 ans ensemble.
Nous, ce qu'on dit, c'est que, pour protéger les enfants, on met un régime obligatoire en place à la naissance de l'enfant, duquel on peut s'exclure en allant chez le notaire.
Le Modérateur : On va passer aux questions en anglais. Cathy Senay, CBC.
Journaliste : Mr. Jolin-Barrette, what do you say to couples who have a child or children and are not married today? What do you tell them?
M. Jolin-Barrette : Well, I told them, we have no intention to forcing Quebeckers into marriage… was out of the question. I'm saying: We're not going to marry everybody in Québec. What we tabled today, it's that when we will have a new child after the sanction of the bill, there will be a new regime that will apply to protect the family residence, the cars and the... «les meubles»?
Une voix : Furniture.
M. Jolin-Barrette : Furniture inside the home. And you will be able to be out of the regime if you go in front of a notary and that he will explain you what are the consequences to be doing an opting out from the regime.
And for all the couples right now who are not married, they have the possibility to opt in in the new regime if they want. So, we will have a formula that will be on our website JuridiQC, which is an information site of the Québec Government about the justice system, that will be easy to fulfill and that you will be able to do it.
So, we do... we don't want to impose rules about people who already have child right now.
Journaliste : I'm curious to know, are you hoping your bill will create discussions around tables for families during the Easter weekend?
M. Jolin-Barrette : Well, maybe, maybe. You know what we say, when you are in a family reunion, in a family gathering, you do not talk about religion, you do not talk about politics, so maybe they will talk about my bill.
Journaliste : …talk about common law.
M. Jolin-Barrette : I mean, that's an important bill to be sure that we will protect the interest of the child, of the children, and I think the family law didn't «evoluate» as the way that the society makes his evolution. So, that's really important to put some certain protection for the children that will be born after the bill pass, and we… we are in a balanced situation when we respect the autonomy of the will of the people, the parents, and we put some protection to be assured that when the people get separated, that the child is often protected.
Le Modérateur : Franca Mignacca, Global News.
Journaliste : Good afternoon.
M. Jolin-Barrette : Good afternoon.
Journaliste : Before I get to my questions, I just… one technical aspect I just want to clarify, the opt-in option, is that only for common law partners who already have children or for those without children as well?
M. Jolin-Barrette : It's open for everybody.
Journaliste : O.K., so all common law…
M. Jolin-Barrette : All common law…
Journaliste : …regardless of whether they have children or not.
M. Jolin-Barrette : Yes. And it's not different that the possibility that they have right now. If I'm in a situation and I don't have any children, I can make a contract with the other part of my union, my common law union, and we can decide what we want until it's under the public… you cannot do things… obligation against the law, be sure, but you can manage how will be the situation of your separation already.
So, what we will do, it's a simplified formula that the people who wants… who go in that regime. And same thing for people that the regime will apply to them, so «l'union parentale» when you will have a kid, a child after the bill will be passed, you can… you are able to make a bonification on that regime, if you want so. So, you can go… you can do it by yourself, to say: We want more things in the regime. But you have also the possibility to go to see a notary and say: Well, I don't want that my car is in the regime, so we take off that, or we take all the regime off. What you are not able to do an opting out from the new regime is the «résidence familiale», the protection. So, the fact that we'll… you will not be able to take out your children from the house, from the Monday to the Tuesday, and the fact that «la prestation compensatoire» will apply if you have a loss for the common law spouse that will be… have lost because of the relation.
Journaliste : More generally speaking, why is this bill in particular so important to you?
M. Jolin-Barrette : I think it's really important because what I did and what the Government did, since we're there, is to protect child and the interest of the child. So, we want to be sure that every child has the protection for stability and to be sure that he will not be disadvantaged. So, that's really important. So, we put a clear base to say: If you have children, it comes with obligations, consequences. And that's what we did in Bill 2, in Bill 12 and now we're doing Bill 56. That's… that was a big thing to do, it takes… it took us three years to do that, but I think we have a balanced regime and I think we all know that, when you have a kid, your life is changing really much, and I'm not talking only about sleeping.
Le Modérateur : Matt Grillo, CTV.
Journaliste : Yes, hi.
M. Jolin-Barrette : Hi.
Journaliste : What would you say to couples who've been together for a very long time, civil unions or common law, but they might not have any kids? What's in this bill for them and, you know, is that a potential development? Because, if I'm understanding correctly, the game changer is really the birth of a child, that's what really impacts what's included in the bill. So, what's in it for a couple who may not have kids?
M. Jolin-Barrette : You understand really clear, it's the birth of the child that changes that. We make a choice not to marry everybody in Québec, but to be sure that when you have a new child, you have more protection that will apply for the child. And that's a choice that we will... that we are doing, not to cover all the couples without child, but they always have the possibility to arrange some contracts between themselves to have more protection. We have... We want to maintain the freedom of the will, and that's... we do. There are many options for these kinds of couples, they can go in wedding, they can make a contract, they can decide to go in our new regime. So, they have the opportunity of expressing their own will.
Journaliste : How do you think this would have changed Éric vs Lola?
M. Jolin-Barrette : Well, if the regime was in place, the house will be inside the regime, the cars with a s, I suppose there were more than one car, and the furniture, and I suppose there were many furniture. The other important thing, it's the family residence will be protected. And the other important thing, it's «la prestation compensatoire».
So, that's... we facilitate when there's a loss from one of the spouses in the regime, that said that if you do everything in the house, and the other spouse has the possibility to work harder, and there is an «enrichissement» of that... of that… that person, there's a possibility to ask for «prestation compensatoire».
So, we have a tool to equilibrate the relationship and what you're putting in your relation by yourself, and we don't talk just about money, your implication with the child, your implication in the house, with the family, there's a value of that, and, with that recourse, we are opening that.
Le Modérateur : Philip Authier, The Gazette.
Journaliste : So, children would be better protected?
M. Jolin-Barrette : Yes.
Journaliste : Can you expand?
M. Jolin-Barrette : «Bien», first of all, the family residence. The fact that we apply the same rule that we already have in wedding about the family residence is the fact that you will not be able… if you own your... the residence... the house only by yourself, at 100%, you will not be able to sell it or to rent it without the consent of the other spouse.
The other important thing, it's that, if you have the custody of the child, you will be able to ask to live in the house during the time of the procedure, during a lapse... the time of the procedure, to have the stability for the children. So, that's an important thing for the child.
Also, the fact that half of the house will be... will be able to be shared because of the regime, it's the basic of the stability for the child, that the mother or the father has the possibility. We do not want situation that, when you have child, that's a union after, we need to have some mechanism to be balanced and to protect the child.
Le Modérateur : Merci. C'est ce qui met fin à cette conférence de presse... Oh! Franca Mignacca, pardon.
Journaliste : ...clarify one more thing. Just to be clear, why does this only apply to future children and not children... couples that already have children?
M. Jolin-Barrette : Because there is a lot of people who already have children and they organized their life with the regime that was in place. So, there were no rule about that, no protection, even if they decided to do so. So, now the children are aged from 2, 4, 10, maybe they have 25 years old or 30 years. So, we don't want that the State says that we are changing the rule back in the time. But for these people, they have the possibility to opt in in the new regime. So, we don't want to... that... forcing the Quebeckers into marriage, so we have a clear choice, and we say: For the future, the rules are clear, and we will make the possibility for those who want to be in the new regime, the possibility to fulfill «un formulaire» and to be there.
Journaliste : ...don't change the past, if I understand correctly.
Journaliste : Not retroactive.
M. Jolin-Barrette : We don't change…
Journaliste : Not retroactive.
M. Jolin-Barrette : ...we don't change the past.
Le Modérateur : Merci beaucoup.
M. Jolin-Barrette : Merci, tout le monde.
(Fin à 12 h 16)