(Dix heures cinquante-huit minutes)
M. Legault : Bien,
bonjour, tout le monde. Je veux revenir sur le budget qui a été déposé hier par
le ministre des Finances. D'abord, c'est important de rappeler que l'année
dernière on a fait un choix stratégique avec lequel on vit bien aujourd'hui, c'est-à-dire
de réduire les impôts pour 4,6 millions des Québécois. Cette année, on a
fait un autre choix important, investir massivement en éducation et en santé
pour améliorer l'accès et la qualité des services dans les deux grands réseaux.
Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'on est en train de redresser ces grands
réseaux, puis on ne voudrait pas faire l'erreur qui a été faite par des
gouvernements précédents de ne pas associer ces redressements ou ces réformes
avec les budgets nécessaires pour être capables de se donner les moyens de nos
ambitions. Donc, avec ces deux choix qu'on a faits l'année dernière et cette
année, on accepte un déficit, mais on va le... on va rétablir l'équilibre
budgétaire progressivement sur cinq ans. Puis j'ai très confiance qu'on va y
arriver.
Maintenant, pourquoi les baisses d'impôts?
Vous l'avez vu, les oppositions m'ont posé beaucoup de questions. Bien, c'était
nécessaire de le faire à cause de l'augmentation du coût de la vie. Donc, en
fait, les revenus additionnels qu'on a eus, on les a redonnés aux Québécois. On
avait besoin d'aider les Québécois qui déjà avaient beaucoup de misère avec
l'inflation, avec le coût de la vie. Donc, je continue de penser que c'est un
choix qui est responsable, de protéger le pouvoir d'achat des Québécois.
Maintenant, comment on va rétablir
l'équilibre budgétaire? Bien, deux choses. D'abord, c'est important, là, de
faire la distinction entre l'économie puis finances publiques. Ce qu'on fait
depuis cinq ans, ce qui n'avait pas été réussi dans les 15 années
précédentes par le gouvernement libéral, c'est d'accélérer la croissance
économique par habitant, entre autres en accélérant les investissements des
entreprises. Donc, on a réussi depuis cinq ans à battre le reste du Canada au
total de cinq points. On est passés d'un écart de 20 % à 15 % alors
que les libéraux étaient restés à 20 % d'écart pendant les 15 années.
Donc, on va continuer à accélérer la croissance économique. Ça amène puis ça va
amener des revenus additionnels.
La deuxième chose qu'on va faire, puis on
a commencé un peu à le faire hier, c'est d'abord faire le ménage dans les
crédits d'impôt aux entreprises. Étant donné qu'on est maintenant au plein
emploi, il y a beaucoup de crédits d'impôt qui sont donnés sur la base des
salaires, sur la base de la création d'emplois, alors qu'aujourd'hui, ce qu'il
nous manque, ce n'est pas des emplois, c'est des employés, ou il nous manque
des emplois bien payés. Puis là-dessus, bien, on va aider les filières, comme
la filière batterie, où on est capable d'augmenter le nombre d'emplois bien
payés.
L'autre chose qu'on va faire, c'est qu'on
va réviser les dépenses pour réduire la bureaucratie, pour être capables
d'enlever les dépenses qui ne sont pas efficaces. Donc, on pense que ces
mesures-là vont nous permettre de revenir à l'équilibre budgétaire
progressivement sur cinq ans.
Journaliste : M. Legault,
votre promesse de baisse d'impôt est étalée sur 10 ans, hein, deux points
et demi sur 10 ans. Est-ce que cet engagement-là tient toujours?
M. Legault : Bien,
écoutez, dans le prochain mandat, on aura sûrement le temps de se reparler de
ça, mais je pense qu'on doit effectivement regarder pour continuer à augmenter,
dans un troisième mandat, les impôts des Québécois parce que les impôts au
Québec sont dans le plafond puis ça nuit à l'économie. Donc, on a livré ce
qu'on avait promis dans le mandat actuel. Maintenant, on aura le temps de se
parler.
Journaliste : Vous avez dit
augmenter, mais je présume que vous voulez dire baisser.
M. Legault : Baisser.
Baisser.
Journaliste : Vous avez dit
vouloir redresser, là, les...
M. Legault : Augmenter
les baisses, je voulais dire.
Journaliste : Vous avez dit,
M. Legault, que vous alliez vous affairer à redresser les grands réseaux,
éducation, santé.
M. Legault : Oui. Oui.
Journaliste : On va les voir
quand, ces résultats-là?
M. Legault : Bien, deux
choses. D'abord, on a adopté juste avant Noël deux projets de loi importants en
santé puis en éducation pour que les gens soient plus imputables dans les deux
réseaux. Deuxièmement, bien là, on conclut les négociations de conventions
collectives. On a réussi à le faire en éducation. En santé, on l'a fait avec la
CSN. Maintenant, on espère bien finaliser ça avec la FIQ, là, prochainement.
Journaliste : Donc, on va
voir ça...
M. Legault : Bien, au fur et à
mesure, là, mais d'ici la fin du mandat.
Journaliste
: M. le
premier ministre, est-ce qu'il n'y a pas une contradiction... Est-ce qu'il n'y
a pas une contradiction entre la Banque du Canada qui essaie de freiner
l'économie, prétendument pour le bien de tous, là, et vous qui pesez sur
l'accélérateur au prix d'un déficit historique?
M. Legault : Bien,
écoutez, il y a plusieurs objectifs qu'on a comme gouvernement. Quand il y a un
ralentissement économique, il y a aussi beaucoup d'économistes qui vont
dire : C'est le temps que le gouvernement aide à supporter l'économie. Je
comprends que la Banque du Canada est dans une position pour essayer de baisser
les taux d'intérêt, donc baisser l'inflation, mais on doit aussi penser aux
Québécois. Les Québécois actuellement font face à des taux d'intérêt qui sont
élevés, donc ont besoin qu'on remette de l'argent dans leurs portefeuilles.
Journaliste : Vous parlez de
baisser... de diminuer la bureaucratie, M. Legault.
M. Legault : Oui.
Journaliste : Il y a
actuellement 571 000 fonctionnaires au Québec, si on met tout le
monde, là. Est-ce que c'est trop? Est ce qu'il va falloir rationaliser dans la
main-d'œuvre?
M. Legault : Bon, d'abord, il
faut distinguer ceux qui donnent des services de ceux qui ne donnent pas de
services. Dans ceux qui donnent des services, bien, vous le savez, depuis la
pandémie, on a ajouté beaucoup de personnel, entre autres des infirmières. Dans
le dernier budget, on a ajouté aussi des enseignants, des aides à la classe
dans le réseau de l'éducation. Donc, cette partie-là, il n'est pas question de
la réduire.
Maintenant, pour ce qui est de la partie
administrative, il y a des endroits où on peut faire des gains.
Journaliste : Qu'est-ce que
les agences de notation vont penser de...
Journaliste : Où peut-on
faire des gains?
Journaliste : Où on peut
faire des gains là-dessus, M. Legault?
M. Legault : Bien, dans la
partie administration...
Journaliste : Dans les
ministères?
M. Legault : ...on va
avoir...
Journaliste : Dans les
ministères, ça a augmenté de 7,2 %, M. Legault.
M. Legault : ...on va avoir
l'occasion de faire la revue des programmes puis des dépenses, puis de vous
revenir avec un plan détaillé.
Journaliste : Mais il y a de
postes de fonctionnaires qui pourraient être coupés, soyons...
M. Legault : Bon, écoutez, il
y a, je pense, 15 000 fonctionnaires qui prennent leur retraite à
chaque année, donc on peut y aller par attrition.
Journaliste : Qu'est ce que
les agences de notation vont penser de votre budget?
M. Legault : Bien là, ces
questions-là, ce serait mieux pour Eric Girard, notre ministre des Finances. Il
est bien meilleur que moi là-dedans.
Journaliste : Vous craignez
la décote?
M. Legault : Bien, écoutez,
d'abord, là, c'est important de revenir sur les chiffres, là, parce que j'ai vu
beaucoup de monde dire : Déficit record. Quand vous regardez dans
l'histoire du Québec, là, il y a eu cinq fois des gouvernements qui ont eu un
plus gros déficit que nous autres, là. On a un déficit de 0,015 %. On a eu
deux gouvernements du Parti libéral qui ont eu des déficits de 3,1 % puis
3,3 %, puis on a eu trois gouvernements du PQ qui ont eu des déficits de
1,7 %, de 3,8 % puis de 4,7 % du PIB. Donc, on ne peut pas
regarder ça en valeur absolue, il faut tenir compte de l'inflation ou du PIB.
Journaliste : Mais vous ne
trouvez pas ça si c'est pire que ça, le déficit actuel?
M. Legault : Ce n'est pas ce
que je dis là, mais 0,015 % du PIB, je pense que c'est quelque chose de
raisonnable. Je pense qu'il faut tenir compte du fait qu'il y a un
ralentissement économique, qu'il y a une situation spéciale chez Hydro-Québec à
cause des niveaux d'eau qui nous fait perdre 1 milliard, qu'on est en
train de redresser les deux réseaux importants puis, pour ça, il faut aussi
investir. Puis il était temps, là, qu'on remette l'argent dans le portefeuille.
Des voix : ...
Journaliste : M. Legault,
on est passé quand même.... Au début de votre mandat, en 2018, on est passé de
surplus à 7 milliards à un déficit de 11 milliards. Donc, il y a un
écart de 17 milliards. Tu sais, est-ce que vous pensiez que ça se
passerait sous votre mandat?
M. Legault : Bien, d'abord,
deux choses, on a hérité de coupures importantes dans les services, entre
autres en santé puis en éducation, puis c'est même Gaétan Barrette qui le dit,
là, qu'on avait un rattrapage à faire. Deuxièmement, on a hérité d'une
situation où la fiscalité des individus au Québec est dans le plafond. Donc, il
était temps qu'on réduise les impôts des Québécois.
Journaliste : Mais 17 milliards,
M. Legault?
M. Legault : Bien, je pense
que je suis fier des choix qu'on a faits : investissements en santé puis
en éducation, puis remettre de l'argent dans le portefeuille des Québécois, ça
devait être fait. Puis là, maintenant, on a un déficit de 0,015 % du PIB,
puis progressivement, d'ici cinq ans, on va le résorber.
Journaliste : M. Legault,
au Québec, est-ce qu'on n'est pas pris par les changements climatiques,
c'est-à-dire que... est-ce que ça ne va pas être une situation qui va perdurer,
la situation dans laquelle on est?
M. Legault : Bien, écoutez,
d'abord on a un plan de 9 milliards. On est dans une situation où, en
Amérique du Nord, sur 60 États et provinces, c'est le Québec qui a le
moins de GES par habitant. C'est au Québec aussi...
Journaliste : Non, mais je parle
des bassins...
M. Legault : Non, mais
attendez...
Journaliste : Les bassins
sont vides, oui, l'hydraulicité.
M. Legault : Ah! les bassins
pour l'eau, O.K.
M. Legault : Bon, ce qu'on
m'explique à Hydro-Québec, c'est que, depuis longtemps, il y a toujours une
année ou deux où il y a moins d'eau puis que ça amène une correction
importante, là. Donc on peut...
Journaliste : On est en
changements climatiques, est-ce qu'on n'est pas prisonnier de ça maintenant?
M. Legault : On me dit que ça
existait même avant les changements climatiques, mais je ne pense pas qu'on
puisse anticiper pour les cinq prochaines années, là, une perte de revenus de 1 milliard
par année.
Journaliste : Pour revenir à
vos promesses de 2012, là, sur l'efficacité d'Hydro-Québec, tant qu'à y être,
vous disiez en 2012 : Il faut qu'Hydro-Québec soit très efficace. Vous
parliez de millions à aller chercher de ce côté-là.
M. Legault : Bien, écoutez,
Hydro-Québec nous dit, là, pour être capables de construire les barrages, pour
être capables de travailler sur l'éolien, ils vont devoir embaucher
35 000 employés de plus. O.K.? Puis ça, c'est de l'argent qu'on a
besoin. C'est de l'électricité qu'on a besoin pour faire notre filière
batterie, pour faire de l'aluminium vert, pour participer au grand plan mondial
pour réduire les GES.
Journaliste : M. Legault,
le nombre de fonctionnaires a augmenté de 7 % en deux ans. Votre
gouvernement, sous sa gouverne, là, a créé au moins deux ministères et une
panoplie d'organismes. La taille de l'État, elle a augmenté. Quand vous dites
qu'on va faire le ménage dans la bureaucratie, prouvez-nous que c'est crédible.
M. Legault : Bien,
écoutez, comme je vous dis, la grande partie de ces augmentations d'effectifs,
c'est pour donner plus de services en santé et en éducation.
Journaliste : ...de ce
côté-là, c'est 7 %, la hausse des fonctionnaires en deux ans. Donc, c'est
ce que je vous... Écoutez, je peux vous montrer les chiffres si vous voulez.
M. Legault : Bien, on
pourra les regarder ensemble.
Journaliste : Montrez-moi ce
que vous avez, puis je vais juste... juste sur ce point-là, mais
prouvez-nous... Quand vous dites le ménage dans la bureaucratie, O.K., en quoi
c'est crédible, ce que vous dites, quand on tient compte de ce que vous avez
fait dans le passé?
M. Legault : Bien,
écoutez, déjà, on s'était donné des cibles qu'on a atteintes depuis cinq ans
pour réduire la bureaucratie, puis on va en faire plus.
Journaliste : ...sur les dépenses,
l'Association des économistes québécois note que de 2018... entre 2018 puis
2023, là, ça a augmenté au Québec de 36 %, les dépenses de votre
gouvernement, pendant que c'était 22 % en Ontario, ce qui est nettement,
là, au-dessus de la moyenne de 27 % à travers le Canada. Comment vous
justifiez ce niveau-là, cette ampleur-là qui n'a aucun équivalent dans la
fédération canadienne?
M. Legault : Bien,
essentiellement, c'est pour améliorer l'accès puis la qualité des services en
éducation et en santé. Puis il y avait un rattrapage à faire avec les coupures
de l'ancien gouvernement libéral.
Journaliste
: When you went into power in
2018, did you ever imagine that you would be tabling a budget with an 11 billion dollar deficit in absolute dollars? It
seems quite a shocker for a lot of people.
M. Legault : First, I didn't know in 2018 that I would have a pandemic. Second,
that we would have a slow down with the economy, a second one right now. Of
course, also, we saw that cuts that had been done by the Liberal Government in healthcare and in education
had to be changed. And so, if you take all that into consideration, I think
that it's not a surprise.
Journaliste
: But you were so much for fiscal discipline. And now, you are here
this morning justifying, defending the management of your government of public finances.
M. Legault : Yes, but we have to look at the real figure. This year, it's 1,5 % of the GDP. Next year, it's 1 %. In two years from now,
so before the elections, it's 0,3 %, so 0,3 of 1 % of the GDP. So, I
think it's reasonable, taking into consideration the choice we made to invest
in education and healthcare and to put back money into the Quebeckers.
Journaliste
:
But what if we talk about the word «record deficit».
M. Legault :
But it's not true.
Journaliste
:
…
M. Legault : Bien,
yes, I'm sure of that. Yes, je le sais, hein, je le sais que c'est en noir et
blanc. Mais ce qu'on voit, là, puis je vais...
Une voix :
...
M. Legault :
I'm sorry, in English. It's in English.
Une voix : …
M. Legault :
O.K. I'll… O.K. I'll give you the exact figures, all right? 1980-1981, PQ
government, deficit of 4,7 % of the GDP. 1984-1985, 3,8 %, it was a
PQ government. 1994-1995, 3,3 %, a Liberal government. 1992-1993,
3,1 % of deficit, Liberal government. And 1996-1997, 1,7 %, it was a
PQ government. This year, in 2024-2025, we have a deficit of 1,5 % of the
GDP. So, if you look in the history of Québec since 1980, it's not a record.
It's the sixth most important, but the sixth one, not the first one.
Journaliste
:
But that was 25 years ago. We're talking… The latest is 1996-1997?
M. Legault :
1996-1997.
Journaliste
:
…
M. Legault :
Yes, I know, but it was before Mr. Bouchard, Mr. Bouchard. And I think it's important. We made a choice in 1998 to come back
with a balanced budget. But when I hear... First, I
hear about 11 billion. It's not 11 billion, it's 8.8 billion. Revenue less
expenses, it's 8.8 billion. Nowhere in the world you count the reimbursement of
the debt. All right? And in the past, especially if you go back to 1980, of course
there was no generation fund, so we had to take into consideration the
inflation. Of course, when you look at a deficit of 3 or 5 billion 20 years
ago, comparing with 8.8 today, it's more in proportion of the GNP.
Journaliste
:
It's not as bad as what people are saying…
M. Legault :
I just say that it's not true that it's 11 billion and it's not true that it's
the worse. It's the sixth worse.
Journaliste : M. Legault,
on aimerait ça vous entendre faire cette démonstration-là en français, s'il
vous plaît.
M. Legault : Oui, oui. Bien
oui.
Journaliste
: ...
M. Legault : Oui, c'est ça.
Quand on regarde les déficits des années précédentes du...
Des voix : ...
M. Legault : O.K., O.K,
regardez bien, regardez bien. On a une loi, O.K., qui dit qu'on se donne comme
objectif de rembourser la dette à chaque année avec le Fonds des générations,
O.K.? Mais quand on parle au niveau comptable d'un déficit, c'est revenus moins
dépenses. O.K.? Donc, cette année, c'est 8,8 milliards.
Maintenant, en valeur absolue, le 8,8,
certains peuvent bien dire : C'est un record, mais il faut tenir compte de
l'inflation, il faut tenir compte de la croissance du PIB. Quand on regarde en
pourcentage du PIB, il y a eu cinq fois des déficits plus importants qu'un
demi-pourcent du PIB.
Journaliste : ...
M. Legault : Je ne dis pas
ça, là, j'aimerais mieux être en surplus.
Le Modérateur : Merci
beaucoup.
M. Legault : Merci, tout le
monde.
(Fin à 11 h 16)