(Huit heures quarante-quatre minutes)
M. Nadeau-Dubois : Bonjour,
tout le monde. Bon mercredi matin. On souhaite, bien sûr, réagir à nouveau au
budget du Québec qui a été déposé hier. Et je veux vous parler du grand oublié
de ce budget, le logement.
Quand François Legault a pris le pouvoir,
en 2018, il ne reconnaissait pas l'existence d'une crise du logement. Ça a pris
des années à Québec solidaire pour convaincre le premier ministre que la crise
du logement existait. On a fini par obtenir une victoire, le premier ministre a
reconnu que la crise existait.
Par la suite, on a fait des dizaines de
propositions pour régler la crise du logement au Québec, et puis, à chaque
fois, François Legault nous a répondu que ce n'étaient pas des bonnes
solutions. Donc, il a refusé d'instaurer un registre des loyers au Québec, il a
refusé d'abolir la clause F, qui permet des explosions de loyers, il a refusé
de mettre en place un moratoire sur les rénovictions, il a refusé de protéger
les aînés vulnérables contre les évictions sauvages.
Et, à chaque fois qu'il refusait nos
propositions, François Legault nous disait la même chose, il nous disait :
Le vrai problème, ce n'est pas ça, le vrai problème, c'est qu'on ne construit
pas assez de logements et de maisons au Québec. Chaque fois que je lui ai posé
une question sur la crise du logement, et j'en ai posé pas mal, François
Legault m'a toujours répondu : Le problème, c'est l'offre, il faut
augmenter l'offre, il faut construire plus de maisons et de logements au
Québec.
Alors, on s'attendait, au milieu de la
pire crise du logement en 40 ans, à ouvrir le budget, hier après-midi, et à
voir des mesures historiques pour stimuler la construction de maisons et de
logements au Québec. Quelle surprise, quelle déception totale : il n'y a
rien de neuf dans ce budget-là pour construire plus de maisons et de logements
au Québec. C'est un oubli impardonnable. On est au milieu de la pire crise du
logement en 40 ans. Un quatre et demi, au Québec, à cette heure, ça coûte
2 000 $. Il y a des familles qui sont jetées à la rue, il y a des aînés
qui se font évincer par des spéculateurs, il y a des familles qui s'entassent
dans des logements trop petits et il y a des familles qui font le deuil d'acheter
leur première maison.
On avait besoin d'un budget historique en
matière de logement. Il y a un sondage qui est sorti, cette semaine, qui
montrait que la crise du logement, c'est une priorité pour 89 % des
Québécois et des Québécoises. Oublier la crise du logement dans le budget, c'est
un oubli impardonnable de François Legault.
M. Bouazzi : Merci, Gabriel.
Moi, je vais parler rapidement des mauvais choix qui ont été faits par le
passé, le manque de vision, ou la drôle de vision, je dirais, plutôt, du
gouvernement de la CAQ, qui avait, en fait, prévu, l'année dernière, de mal payer
les infirmières, les enseignants, les enseignantes, alors qu'à chaque début d'année
il manque des milliers d'enseignants dans notre réseau public, alors qu'il y a
des milliers d'infirmières qui quittent notre réseau parce que, justement, les
conditions ne sont pas à la hauteur, alors que la fonction publique doit être
attrayante pour pouvoir offrir des services de base, qui sont l'éducation et la
santé.
Entre autres, plutôt que de prévoir de
bien payer ces gens-là, ils ont préféré faire des baisses d'impôts aux mieux
nantis. Je rappelle ici que les baisses d'impôt pour les personnes qui gagnent
plus de... 100 000 $ et plus vont nous coûter à peu près 600
millions de dollars à chaque année, de manière récurrente, et c'est bien à
cause de ces mauvais choix de l'année dernière qu'on se retrouve aujourd'hui
devant le déficit dont vous parlez.
Rappelons au passage, quand même, que,
dans ce déficit-là, il y a un 2,2 millions... milliards qui va au Fonds des
générations et donc, évidemment, qui pourrait être investi pour la grande dette
des prochaines générations, qui est la question de la crise climatique. Merci.
Journaliste : L'abandon des
subventions pour Roulez vert, qu'est-ce que vous en pensez?
M. Nadeau-Dubois : C'était un
programme qui devait être revu, là. Maintenant, la prochaine étape, c'est de s'assurer
que les véhicules électriques soient disponibles pour les Québécois,
Québécoises. Nous, on veut que le gouvernement du Québec agisse plus rapidement
pour forcer les constructeurs automobiles à rendre plus de véhicules
électriques disponibles au Québec. C'est des demandes qu'on fait depuis
longtemps. Le programme devait être revu, il y a un consensus là-dessus, assez
large, au Québec. Maintenant, il faut accélérer la mise en marché des véhicules
électriques au Québec.
Journaliste : Savez-vous
pourquoi le programme... qu'est-ce qui... qu'est-ce qui clochait?
M. Nadeau-Dubois : Bien, les
véhicules électriques, quand même, sont en... ont une popularité grandissante.
On a des investissements urgents à faire en transport collectif. Je pense que
c'était raisonnable de revoir ce programme-là pour prioriser des
investissements en transport collectif. Par ailleurs, le gouvernement ne fait
pas ce bout-là du chemin. C'est le gros problème du budget.
Journaliste : ...vous voulez
dire?
M. Nadeau-Dubois : Nous, on
était en faveur de transformer ce système-là. Est-ce qu'on l'aurait fait plus
progressivement? Peut-être, mais, globalement, c'est un programme qui devait
être revu, là. Les véhicules électriques, les ventes augmentent rapidement au
Québec. En ce moment, l'enjeu, c'est surtout qu'il en manque. La demande existe,
les Québécois, Québécoises, ils veulent faire des choix plus écologiques. Il
faut que les constructeurs mettent plus de véhicules électriques sur le marché.
Journaliste : Avec le
vieillissement de la population, là, on prévoit... M. Girard laissait entendre,
2027‑2028, qu'il pourrait retourner à l'équilibre budgétaire, mais il repousse
possiblement en 2020‑2030? Est-ce qu'on a un problème d'équité entre les
générations?
M. Nadeau-Dubois : Bien, on a
un gros problème d'équité entre les générations, au Québec. On est en train de
céder une dette climatique qui risque de devenir impayable pour la génération
de mes enfants, là. On est en train de céder à la prochaine génération une
crise du logement où on prend du retard en matière de construction de maisons,
en matière de construction de logements. C'est très inquiétant pour les
générations futures, un gouvernement qui néglige les deux crises fondamentales
du Québec, la crise du logement, qui est la crise la plus urgente, puis la
crise la plus inquiétante, qui est la crise climatique.
Journaliste : Et la dette,
ça, ça ne vous inquiète pas?
M. Nadeau-Dubois : La dette
publique du Québec, elle est sous contrôle. On a, en ce moment, moins de dettes,
en proportion de notre PIB, qu'avant la pandémie. La dette qui est vraiment
alarmante, c'est la dette environnementale qu'on est en train de laisser aux
générations futures.
Journaliste : Sur Northvolt, qu'est-ce
que vous voulez entendre de la part de M. Fitzgibbon, aujourd'hui, là, qu'on
n'a pas entendu encore depuis toute cette histoire du désaveu de Benoit
Charette la semaine dernière?
M. Bouazzi : Aujourd'hui,
parce qu'il fait une déclaration aujourd'hui?
Journaliste : Non, parce qu'il
est présent puis qu'on aura l'occasion de le questionner.
M. Bouazzi : O.K. Bien, écoutez,
sur Northvolt, il y a plusieurs choses à dire. Nous, je vous avouerais qu'on
est vraiment très déçus, plus généralement, sur la question de la filière
batterie, là. Toute la question de l'acceptabilité sociale a pris énormément de
plomb dans l'aile, étant donné le manque de clarté, les fausses vérités, les
choses qu'on cache aux Québécoises et aux Québécois dans ce qui a trait au
BAPE, en partie.
Dans le deal en lui-même, vous savez, il y
a très peu de transparence. On met 7 milliards d'argent public, on ne sait
pas à quel moment est-ce qu'on va le récupérer. Quand on met 7 milliards
d'argent public, on s'attend à avoir non seulement des revenus, mais aussi du
contrôle. Vous parliez tout à l'heure des voitures électriques, il n'y a aucune
garantie, dans ce contrat-là, que 100 % des batteries n'aillent pas dans
les voitures en Californie, par exemple, et ça, ça voudrait dire qu'on a
subventionné, nous-mêmes, parce qu'il y a quand même un 3 milliards et
demi qui est... pour chaque batterie qui sort, nous, on va mettre de l'argent
de notre poche, et qui va faire en sorte qu'il y ait des voitures électriques
qui vont être moins chères, mais possiblement toutes à l'étranger.
Journaliste : Mais qu'est-ce
que ça dit sur la crédibilité du ministre Charette, son aveu par rapport au
fait qu'on a fait sauter le BAPE à Northvolt?
M. Bouazzi : Bien, c'est
vraiment... M. Charette devrait prendre beaucoup plus au sérieux son rôle en
tant que ministre qui est là pour garantir un bon environnement pour les
Québécoises et Québécois, en parallèle avec, effectivement, l'accompagnement
des compagnies. On a l'impression que son principal rôle, c'est d'accompagner
une multinationale étrangère, sur le dos des réglementations environnementales,
au nom de l'environnement, ce qui est quand même cocasse et osé, je dois
avouer.
M. Nadeau-Dubois : Peut-être
un ajout là-dessus. Je pense que la conclusion que beaucoup de gens tirent de
ce qui s'est passé dans les derniers mois, c'est que M. Charette est au service
d'un agenda économique, et c'est l'agenda de Pierre Fitzgibbon. Il devrait être
au service des Québécois et des Québécoises. Son mandat, c'est de protéger
l'environnement, pas de protéger la crédibilité du ministre de l'Économie puis
de protéger les ambitions d'affaires de M. Fitzgibbon et de M. Legault.
L'environnement puis l'économie, en 2024, ça doit aller ensemble, mais ça ne
doit pas vouloir dire que l'environnement... le ministère de l'Environnement
est juste l'assistant des projets de développement économique. Ce n'est pas
pour ça qu'on s'est donné un ministère de l'Environnement, au Québec, c'est, au
contraire, pour qu'il y ait un chien de garde de l'Environnement puis que, oui,
on développe des beaux projets dans nos régions pour créer des emplois, mais
qu'on le fasse en respectant l'environnement, en mettant l'environnement au
cœur des projets, pas au service de projets qui viennent de multinationales. Je
dirais qu'il y a une trahison du rôle que devrait être... du rôle que devrait
avoir le ministère de l'Environnement au Québec.
Journaliste : Est-ce que
M. Charette est un chien de garde de l'environnement?
M. Nadeau-Dubois : Non.
M. Bouazzi : Et, si je peux
rajouter juste un point, M. Charette a donc changé de discours pour dire :
Non, effectivement, les règles, si on les avait mises plus sérieuses et
strictes, qu'on ne les avait pas changées, il n'y aurait pas eu cette
compagnie-là. Il nous dit maintenant : Moi, j'ai besoin de cette
compagnie-là pour atteindre mes objectifs de baisse de gaz à effet de serre.
Il ment aux Québécoises et aux Québécois.
Nous avons fait une demande d'accès à l'information pour dire :
Donnez-nous le moindre document, le moindre PDF, PowerPoint, le moindre
courriel qui associe une baisse de GES au Québec de toute la filière batterie,
en fait. Et la réponse a été... la seule chose qui n'a pas été caviardée, dans
les réponses que nous avons eues du ministère de l'Économie... parce qu'ils
nous ont répondu qu'il n'y avait pas le moindre document qui parlait de baisse
de gaz à effet de serre associée à la filière batterie.
Donc, malheureusement, nous, c'est ça
qu'on voulait pour cette filière batterie là. On voulait développer une
nouvelle industrie, s'assurer qu'on participe à baisser les gaz à effet de
serre ici et, évidemment, valoriser les matières premières qu'on a au Québec.
Malheureusement, on ne comprend pas quel genre de deal... Et puis, évidemment,
on aimerait bien plus de transparence et moins de mensonges, dans ce cas-là,
parce que, clairement, ce n'est pas...
Journaliste : Révision de la
taille de l'État, est-ce que c'est possible de faire ça sans couper des
fonctionnaires ou des postes et sans couper aussi dans les services, comme le
prétend Mme LeBel?
M. Nadeau-Dubois : Nous, notre
priorité, ce n'est pas la réduction de la taille de l'État, là. Je veux dire,
s'il y a de la bureaucratie inutile, on ne la défendra pas, mais la priorité,
ça devrait être construire plus de logements, construire plus de maisons,
investir en santé, en éducation, préparer le Québec aux changements
climatiques, préparer l'avenir pour les prochaines générations. Ça devrait être
ça, la priorité de François Legault, puis c'est notre priorité.
Journaliste
: Est-ce
qu'on ne peut pas faire ça en, justement, sauvant de l'argent en réduisant...
M. Nadeau-Dubois : S'il y a
des affaires inefficaces, s'il y a de la bureaucratie inutile...
Journaliste : Vous n'êtes pas
sûr qu'il y en a?
M. Nadeau-Dubois : Bien, la
démonstration doit être faite par le gouvernement, puis, si cette démonstration
là est faite, je veux dire, qui va se lever en matin en disant : Moi, je
vais défendre la bureaucratie inutile? Personne, mais cette démonstration-là
doit être faite.
Journaliste : About the fact that the most disappointing for you with the budget
is about the climate crisis... but Mr. Legault and his Finance Minister are
doing... are putting some steps together for this, to... this.
M. Nadeau-Dubois :
Can you repeat the question?
Journaliste
: The climate crisis. But you're saying that this… that has been
forgotten.
M. Nadeau-Dubois : Well, the big mistake of that budget, the main thing that is
missing, is the housing crisis. The Government said : It's going to be healthcare and education. Well, one
thing is missing, it's housing. We need... It should be a priority. In the
middle of the worst housing crisis in 40 years in Québec, it should be a priority to build more homes. That budget has nothing new, nothing to build
more homes for Quebeckers. It's
an unacceptable mistake.
And, of course, it's difficult not to see the other big missing piece, which is the
environment. The next generation is going to deal with huge problems in Québec
regarding climate change, and the fact that that budget forgets completely that
crisis is deeply disturbing for the future of Québec. I'm going to give you one
example : they announced a couple million dollars to fight forest fires.
Well, only last year, the forest fires cost us $200 million dollars. So, it's
not enough.
Journaliste
:
It's not enough. What would you have liked to see? Because you're not the only
one, like, criticizing the Legault Government, cities are also saying that
there's nothing for public transit.
M. Nadeau-Dubois :
Yes. Well, of course, we need to do more to fight climate change, but we should
already be preparing ourselves to adapt to climate change. That's why we were
asking for a fund to fund climate adaptation and climate resilience in Québec.
And there should have been a specific aspect of that fund for the agriculture sector which is hit violently by the climate
catastrophes we have seen in Québec in the last months. The other thing, we should do, is invest
massively in public transit. Today, there has been not one new public transit
project funded and launched by the Coalition avenir
Québec, not one project across all Québec. It's unacceptable.
Journaliste
:
And do you fear that the protests of farmers we have seen in Europe may come
here? Like, that… Because we had protests of farmers last week, in Rimouski,
for example.
M. Nadeau-Dubois :
How do you say «détresse» in English? How would you…
Journaliste
:
Distress.
M. Nadeau-Dubois :The distress is real. We are talking about people that
are losing… that are seeing their revenues fall. No one would accept that
without fighting back and without protesting. So, if we don't want to see
scenes like we've seen in Europe, we need to begin to take seriously the
distress and the crisis in the agriculture sector in Québec.
Journaliste
: One of the first things we heard from… reporting after the budget,
was : How did it go from a projected deficit, in November, of
significantly less, and now suddenly we get the news, yesterday, it's $11
billion? How do you explain that to people and, I mean, your voters as well... Government, essentially?
M. Bouazzi : Last year, the Government planned to not pay enough, to not give good situation for our teachers, our nurses and
all the people that actually bring us the services that we need in education
and in healthcare. As an example, it's totally... I understand the people that
say : How is it even possible, knowing that every September, we are
actually looking for teachers, even with no qualifications, because the people
with qualifications exist, but they decide to not come to the public sector?
Same things for the nurses, we have thousands of nurses that are actually doing
something else because the situation, right now, is terrible.
So, they planned
something wrong, and, at the other end, they actually decrease the taxes, and
just for the people that have more than $100 000 income. This decision
costs us $800 million a year, after year, after year.
M. Nadeau-Dubois : $600 million.
M. Bouazzi : 600. What did I say?
M. Nadeau-Dubois : 800.
M. Bouazzi : $600 million, sorry. Year, after year, after year, which is totally,
totally irresponsible, I mean, it's hard to see how they thought, actually… it
would be actually possible. And when we see the parents that actually have been
fighting with the teachers to have better situation for their children, the people that have been on the street with
the nurses, obviously, it was impossible to stand as a decision. I would add...
Journaliste
: ...question… isn't it a bit shocking to see the deficit go from $4
billion to $11 billion overnight?
M. Bouazzi : It's shoking, but sadly, with this approach, it's actually
something we can foresee. I mean, how… Obviously, if you don't plan for a raise
for people that you... They received less than the inflation for the past
years, and we know how inflation was actually tough. So, obviously, nobody
would accept what they actually planned. So, no, it's shocking, but,, sadly
it's really a terrible vision of what should be the budget of the QuébecGovernment.
Now, we're very happy… I
would say, actually, these people that have been fighting for their rights
saved the budget of this year because, at least, it gives dignity to these
people who… they have been fighting for their rights. I would add the same
thing for the people that are «les invalides», that have... How do you say «invalide»
in English?
Journaliste
: …
M. Bouazzi : The invalids. The invalids that have been fighting for a quarter
century for their rights, for a penalty they received at the time of the Parti québécois, that the Parti libéral actually kept, and now, after
six years, the CAQ has finally decided to stop this discrimination. These
people that have been fighting for their rights and dignity gave dignity to
this budget.
Journaliste
: What do you think about the Government... money aside from pension for a senior living with disability?
M. Bouazzi : Yes. So, this is what... We have...
M. Nadeau-Dubois : I can answer that. My colleague Haroun has
been fighting for months, since his election, in fact, to make sure that those
peoplereceive the money that they are due and
the dignity that they are due.
That penalty was invented by the Parti
québécois, was kept in place by the Liberals, and it's a very beautiful day for
those people to be able to end that injustice. It's been a big fight for Québec
solidaire and for the people on the ground. My colleague Haroun has put forward
a bill to solve that problem, so we are very, very happy to see that this
injustice will end. Thank you.
(Fin à 9 h 04)