(Onze heures quarante minutes)
M. Paradis : Bonjour. Je vous
remercie d'être si nombreux, aujourd'hui, à ce point de presse. Alors, deux
choses. Je suis content de voir l'ensemble du gouvernement et des députés à
Québec pour la présentation du budget, parce qu'hier on a fait un accroc à ce
qui est une tradition longuement établie, c'est-à-dire que la journée précédant
le budget, on fait ça à Québec. Comme gars de Québec, moi, ça m'a... c'est
quelque chose qui m'a choqué, qu'on modifie cette tradition-là, alors qu'on
veut valoriser le rôle de la capitale nationale en faisant tous les événements officiels
ici, dans la capitale nationale.
Deuxième chose, j'arrive... je sors à l'instant
de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 51, donc, sur la
modernisation du secteur de la construction. On a commencé à entendre des
groupes en consultations particulières. Alors, ça va être intéressant de voir
ce qu'on nous dit là-dessus. Mais déjà ce matin est paru un article qui fait
état d'une étude qui a des chiffres, des données de base qui diffèrent de
celles dont le gouvernement nous a parlé et qui sont à la base de son projet de
loi n° 51. Alors, on a hâte de continuer à écouter à ce que les parties
prenantes vont nous dire sur ce projet de loi là.
Journaliste : Bien, peut-être,
pour continuer là-dessus, d'abord, justement, à la lumière de cette étude que l'Inter
a commandée, est-ce que M. Boulet doit, dès le début du processus, là, corriger
le tir, revoir sa réforme?
M. Paradis : C'est sûr qu'il
y a une chose qui semble revenir constamment avec ce gouvernement, non
seulement depuis sa réélection en 2022, mais dans son premier mandat aussi, c'est
la question de la planification, de savoir sur quelle base, sur quelles données
probantes on se base pour faire des grandes réformes, hein? On pourrait parler
des garderies à quatre ans, on pourrait parler du troisième lien. On pourrait
parler, donc, de ce projet de loi, parce qu'on vient toucher...
C'est bien de moderniser un secteur qui,
depuis 30 ans, n'a pas connu de réformes majeures, mais sur la base de quelles
données on procède? J'ai bien hâte d'en savoir plus là-dessus parce que, voyez-vous,
là, il était... Le groupe qui vient de témoigner s'intéresse particulièrement à
la place des femmes dans le secteur de la construction, et un des objectifs
déclarés, c'est de favoriser l'intégration des femmes au secteur de la
construction, et elles nous disent : Nous n'avons pas été consultées. Et
ce qu'elles nous recommandent, c'est qu'avant de travailler sur ces
questions-là, on s'assure qu'on a un portrait adéquat de la situation et des
bonnes données pour procéder. Alors, c'est un exemple, mais l'étude de ce matin
parle aussi de la question de la pénurie de main-d'œuvre, de la maximisation de
la capacité qu'on a déjà avec les travailleurs déjà formés qui sont au Québec
et dont on ne maximise pas le temps de travail. Alors, ça va être intéressant,
là, d'en savoir plus dans les prochains jours.
Journaliste : ...maintenant
sur le budget. Vous parlez d'un accroc, finalement, à la tradition. Est-ce que
M. Girard, M. Legault doivent des excuses au maire de Québec?
M. Paradis : Le gouvernement
verra ce qu'il veut faire avec ça, mais il y a une de vos collègues hier qui
écrivait... j'ai aimé ça, elle a parlé du réflexe Québec, d'avoir le réflexe capitale
nationale, de l'avoir... d'avoir de l'ambition pour la région, pour la ville de
Québec, de respecter l'esprit de la loi qui a été adoptée en 2016, qui a
modifié la Charte de la Ville de Québec et qui dit : Les événements
officiels, ça se tient dans la capitale nationale.
Hier, ce qui s'est passé, c'est que là on
voulait faire une annonce, on voulait des belles photos, on voulait faire...
donc, il y avait un... ce qu'on pourrait qualifier, là, d'intérêt électoraliste,
et, pour faire ça, on a décidé d'enlever quelque chose à la capitale nationale,
c'est-à-dire cette tradition que la journée précédente... précédant le budget,
on est dans la capitale nationale.
Alors, moi, j'aimerais ça que le
gouvernement s'explique pourquoi ils ont choisi ça, pourquoi ils ont décidé,
donc, de ne pas respecter cette tradition d'être à Québec, j'aimerais avoir des
réponses à cette question-là.
Journaliste : Ils auraient pu
faire le même exercice dans une école de Québec, par exemple. Là, ça aurait été
correct?
M. Paradis : Ils auraient pu
faire le même exercice dans une école de Québec avec une organisation de
Québec. D'ailleurs, je suis très content aussi d'entendre qu'il y a une
organisation vraiment extraordinaire de Québec qui a été soutenue à même les
fonds discrétionnaires d'un des ministres, très bien, mais cette annonce-là
aussi, elle aurait pu être faite vendredi dernier, elle pourrait être faite
plus tard dans la semaine. Là, c'est un événement qui est relié au budget et
c'est un moment clé de la vie parlementaire du Québec, c'est un événement officiel
important dans notre vie publique, et ce qu'on a c'est une loi qui a rappelé le
statut de capitale nationale de la ville de Québec, et ça, il faut... il faut
avoir ce réflexe Québec, il faut valoriser la région.
Puis là, surtout, ça se place dans un
moment, là, où on a eu beaucoup d'interrogations sur le niveau de priorité que
ce gouvernement donne à la capitale nationale et surtout sur les résultats qui
ont été livrés sur les promesses-phares de ce gouvernement envers la capitale nationale.
Et c'est non seulement un grand point d'interrogation, on se rend compte qu'il
n'y a pas grand-chose qui a avancé.
Journaliste : Bien,
justement, là-dessus, là, parce que M. Legault nous parlait ce matin que,
bon, pour un retour éventuel à l'équilibre budgétaire, deux choses, là :
croissance économique puis diminution des dépenses inefficaces, et réduction de
la bureaucratie par la même occasion. Si on s'attarde davantage à la croissance
économique, est-ce que ça, ça passe, selon vous, par plus de grands projets pour
Québec et pour le Québec?
M. Paradis : Ce gouvernement
nous avait annoncé qu'il serait ambitieux pour la capitale nationale, et il y
avait en marche un projet ambitieux, un projet qu'on dit structurant de
transport collectif, et il a été mis sur la glace pour des raisons politiques,
pour des raisons électoralistes, on a envoyé ça à CDPQ Infra à Montréal. Alors,
la situation actuelle, qui dépend des choix du gouvernement, mais je peux y
revenir, ne peut pas servir d'excuse pour dire que là il n'y a plus d'argent
pour Québec ou, bien là, on ne peut plus avoir la même ambition. C'est
absolument important qu'on garde cette ambition-là pour Québec parce que, vous
le savez, c'est 25 ans de croissance économique à Québec qu'on a connu
sans interruption. Tigre économique, c'est ainsi qu'a été qualifiée la capitale
nationale.
Et là, pour la première fois, il y a des
signaux discordants là-dessus, là, que le... ça va moins bien sur le plan économique,
et tous les acteurs économiques de Québec ont été d'accord là-dessus, ont dit :
Bien, écoutez, là, on avait un projet locomotive, on avait un projet
structurant, puis là tout a été mis sur la glace. Ça, ça crée de l'incertitude
et ce n'est pour ça qu'on veut faire. Alors, le gouvernement, actuellement,
n'aide pas la région de Québec, n'aide pas la capitale nationale. Et, dans le
budget, il va falloir avoir des mesures, donc, pour la capitale nationale.
Journaliste : ...des choix à
venir, là. Bon, CDPQ Infra, en principe, doit remettre son analyse en juin.
Est-ce que le gouvernement devra dès lors prendre une décision sur la suite des
choses pour le tramway ou... Parce qu'on ne sait pas, peut-être qu'il pourrait
dire : Ah! bien, attendez, on va prendre le temps de réfléchir à ça cet
été puis on vous revient à la rentrée.
M. Paradis : Alors, imaginez,
si ce gouvernement nous dit que, justement, maintenant, on reçoit les
recommandations de CDPQ Infra puis là on a besoin de temps, ça, c'est du temps
qui est perdu pour l'économie de la capitale nationale. Et c'est ce qu'on a
dit, d'ailleurs, dès qu'il y a eu cette annonce-là, on a dit : Ça va durer
combien de temps? On nous dit six mois pour faire un travail qui a été réalisé
pendant des années, avec les différentes études qu'on avait déjà sur le
transport collectif structurant à Québec. Plus de délais, plus d'incertitude
pour l'économie, ce n'est pas bon pour la région. Alors, j'ai hâte de voir
qu'est-ce qu'il va y avoir dans le budget. Est-ce qu'on va prévoir... Est-ce
que les sommes qui étaient prévues initialement pour le projet vont toujours
être là? Est-ce qu'on va vouloir les décaisser, les investir le plus rapidement
possible? Qu'est-ce qu'on va faire avec les recommandations de CDPQ Infra? Puis
on ne sait pas ce que CDPQ Infra va nous... va nous recommander.
Journaliste : Mais votre
souhait, c'est... est-ce que le gouvernement se branche, prenne une décision
dès juin...
M. Paradis : Bien, je
conviens que le gouvernement va devoir prendre un certain temps pour analyser
ce que la CDPQ Infra va lui proposer, mais c'est lui qui nous a mis dans cette
situation-là, c'est le gouvernement qui nous a mis dans cette situation-là.
Alors, le gouvernement ne pourra pas utiliser ce rapport pour tergiverser puis
revenir encore, peut-être, avec des retournements de veste, des lapins qu'on
sort du chapeau pour retarder encore plus le projet. Là, le gouvernement va
avoir un devoir de diligence, puis on va déjà en avoir des indices dans le
budget, qu'est-ce qui va être prévu pour la capitale nationale.
Journaliste : À quand la
décision, selon vous? Combien de temps il serait raisonnable de prendre pour
analyser...
M. Paradis : Le plus
rapidement possible.
Journaliste : C'est une
réponse de politicien que vous faites, là.
M. Paradis : Bien, c'est une
réponse de politicien, mais, écoutez, là vous me demandez de faire un petit peu
de politique-fiction, parce qu'on ne sait pas ce qu'il va y avoir dans le
rapport, dans l'analyse de CDPQ Infra, qu'est-ce qu'elle va proposer comme
solution, qu'est-ce que ça va être en termes de coûts. Est-ce que c'est
complètement différent de ce qu'il y avait déjà sur la table ou est-ce qu'elle
va, en quelque sorte, adouber les décisions qui avaient déjà été prises? On ne
le sait pas, donc c'est difficile... Si c'est une solution complètement
nouvelle, on peut imaginer que ça prenne un petit peu plus de temps. Mais la
règle ici, c'est que c'est le gouvernement qui nous a mis dans cette
situation-là, et il va avoir un devoir d'agir extrêmement rapidement, de ne pas
utiliser ça comme des excuses pour attendre, attendre, attendre, puis là, comme
par hasard, on va se retrouver en période électorale, et le gouvernement va
pouvoir encore nous faire des promesses puis encore, peut-être, faire
différemment selon le résultat des élections. Donc, ça, c'est... ça, ce ne sera
pas acceptable.
Journaliste : Vous avez
peut-être vu sinon, dernière question, dans les pages du journal, on a un autre
exemple, là, ce matin, de caviardage extrême à Investissement Québec. Comment
vous qualifiez la réponse qu'ils nous ont donnée, là, où on voit que le nom des
fournisseurs est masqué, etc.?
M. Paradis : Il y a un
autre... une autre pratique qui se répète, cas après cas, projet après projet,
avec ce gouvernement, et c'est celui du manque de transparence, du manque
d'information, non seulement du manque de proactivité pour expliquer aux
Québécoises et aux Québécois les tenants et aboutissants des décisions puis des
investissements qu'on fait, par exemple dans le projet de Northvolt, comme dans
d'autres, mais également, quand on a des demandes d'accès à l'information,
c'est du caviardage, là, c'est des documents qui sont pratiquement noirs au
complet. Je comprends que, dans certains cas limités, il peut y avoir des
raisons, prévues dans la loi sur l'accès à l'information, qui font en sorte que
certaines informations limitées, je le redis, sont caviardées, mais là c'est
presque tout qui est caviardé.
Or, c'est... l'État n'appartient pas au
gouvernement. L'État, c'est l'État des Québécoises et des Québécois, qui ont le
droit d'avoir accès à l'information, qui ont le droit de savoir sur quelle base
sont prises les décisions, et pourquoi le gouvernement investit tel montant
dans tel projet, de quelle façon c'est géré. Et là, quand on dépense ici, on
parle de millions de dollars de nos impôts, de nos taxes qui sont utilisés par
certaines personnes et on n'a pas l'information de base pour comprendre de quoi
il s'agit et pour en vérifier, donc, vérifier la légalité, si tout ça est
légal, si tout ça a été bien fait, bien, il y a une dose de transparence qui
est absolument requise pour que les Québécois le sachent.
Journaliste : ...il semble y
avoir, dans l'interprétation de la loi, une tendance à peser très fort sur le
crayon-feutre noir, là.
M. Paradis : C'est non
seulement une question d'interprétation, c'est une question de posture. Ça
dépend, au départ, de la volonté du gouvernement. Il y a ce qui s'appelle
l'acceptabilité sociale, puis ça, c'est une politique gouvernementale. On veut
générer de la confiance, on veut que les gens disent : On a confiance en
vous parce que vous nous dites de quoi il en retourne. Et cette confiance-là,
elle génère une mobilisation qui favorise l'avancement du Québec, l'avancement
économique, l'avancement social. Mais là on a une posture qui dit : le
moins on va en dire, le moins on va communiquer d'information, le mieux on va
s'en porter. Or, c'est l'inverse qu'il faut favoriser, puis ça, on l'a vu
projet après projet, cas après cas.
Journaliste
: Merci.
M. Paradis : Merci à vous.
(Fin à 11 h 52)