(Treize heures trente-huit minutes)
La Modératrice : Bonjour à
tous et à toutes. Bienvenue à ce point de presse concernant la Commission
spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie. Alors,
prendront la parole, lors de ce point de presse, Mme Véronique Hivon, députée
de Joliette, pour le Parti québécois, Mme Sandra Demontigny, atteinte d'une
forme précoce et héréditaire de la maladie d'Alzheimer, le Dr Georges L'Espérance,
président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, M.
David Birnbaum, député de D'Arcy-McGee, pour le Parti libéral du Québec, et
finalement Vincent Marissal, député de Rosemont, pour Québec solidaire. On va
commencer avec les prises de parole, dans l'ordre que je viens d'énoncer, et on
prendra vos questions par la suite. Je cède la parole à Mme Hivon.
Mme Hivon : Merci
beaucoup. Bonjour, tout le monde. Comme vous voyez, je suis bien accompagnée aujourd'hui.
Donc, salutations à mes collègues, à Mme Demontigny et à Dr L'Espérance.
Si on est réunis ici aujourd'hui, c'est
pour rappeler l'importance du travail qu'on a fait au cours de la dernière
année, qui a mené, donc, en décembre dernier, à cet important rapport de la commission
spéciale sur l'évolution de la loi sur les soins de fin de vie, un travail
complètement transpartisan, une extraordinaire démarche, comme la première qui
avait mené à la loi sur les soins de fin de vie, qu'on a faite de manière
totalement transpartisane, avec 11 recommandations unanimes,
consensuelles.
Et donc aujourd'hui c'est vraiment le
temps de montrer à nouveau que le Québec sait écouter sa population, que le
Québec sait être précurseur, que le Québec sait avoir des réponses aux besoins
des personnes qui sont souffrantes, aux besoins des personnes qui vivent des
maladies graves et qui anticipent leur fin de vie d'une manière qui est remplie
d'angoisse et de détresse.
Alors, c'est dans cette optique-là qu'on a
mené ces travaux-là qui ont conduit à une recommandation centrale, qui est
celle de permettre une demande anticipée d'aide médicale à mourir pour les
personnes atteintes de maladies neurocognitives dégénératives, comme la maladie
d'Alzheimer.
Donc, aujourd'hui, tout simplement, ce qu'on
veut envoyer comme message au gouvernement, c'est qu'on lui tend la main. On
lui tend la main pour qu'on puisse travailler de manière tout à fait
collaborative, en mettant toutes les énergies qui sont nécessaires, pour adopter,
avant la fin de la présente législature, un projet de loi qui va venir mettre
vraiment concrètement dans la loi les recommandations, qui sont très fouillées,
du rapport, dont, évidemment, de manière centrale, la demande anticipée d'aide
médicale à mourir. Et, si on fait ça, ce n'est pas pour nous, ce n'est pas pour
les élus de l'Assemblée nationale, c'est pour des gens qui sont concernés, qui
le demandent, pour la population du Québec qui souhaite voir arriver ce
changement.
Et je cède donc la parole à une personne
qui est directement touchée par cet enjeu, Mme Sandra Demontigny.
Mme
Demontigny
(Sandra) :Bonjour. Je me sens émue de
vous parler aujourd'hui. J'ai le pleur facile, O.K., vous m'excuserez. Donc,
mon nom, c'est Sandra Demontigny. Je suis atteinte de la maladie d'Alzheimer
sous sa forme génétique. Je suis maintenant au stade modéré de la maladie. J'ai
eu mon diagnostic en 2018, et puis, avec les années qui passent, bien, ça
évolue, c'est sûr.
Je suis émue parce que je trouve ça beau d'entendre
Mme Hivon qui dit que notre société est rendue là puis que les gens
parlent pour avoir accès à l'aide médicale à mourir anticipée. Quand on
regarde, entre autres, dans le rapport, à quel point le pourcentage de gens qui
sont en faveur de l'aide médicale à mourir anticipée… c'est au-dessus de
80 %, là, si je ne m'abuse, c'est beaucoup. Puis c'est aussi beaucoup de
personnes qui sont en attente. Je fais partie de ceux-là. On ne sait pas
vraiment dans combien de temps que ma maladie va évoluer. On s'attend à ce qu'il
me reste à peu près deux à trois années de vie acceptables.
L'aide médicale à mourir anticipée, ce que
c'est, dans le fond, c'est d'être capable de partir en sérénité. Si moi, je
savais, aujourd'hui, que je peux faire une demande anticipée et puis qu'au
moment où je l'aurai choisi je pourrai dire : O.K., c'est maintenant, c'est
clair que je dormirais mieux la nuit, alors qu'en ce moment j'essaie de... Moi,
je ne peux pas retenir ma maladie, même si je voudrais, là, ce n'est pas
possible. Mais il y a un compteur qui est là, puis je le sais que je ne suis pas
toute seule, au Québec, qui le vit, et puis de savoir que, oui, c'est
disponible, alors que, quand on lit le rapport, on voit que c'est une
recommandation très, très forte, d'aller de l'avant vers les directives
anticipées… Donc, je demande aussi que les élus puissent donner le dernier
petit coup de pouce qu'il faut pour être capables de passer cette
recommandation-là, qui est les directives anticipées.
Moi, je suis porte-parole de l'association
québécoise mourir dans la dignité, et puis j'ai une page Facebook qui est très
active, et beaucoup de gens m'écrivent et m'interpellent par rapport à l'aide
médicale à mourir, et je suis en mesure de vous dire que le besoin est vraiment
là. Puis je pense que, comme civilisation, comme population, on est rendus là,
d'être capables de se donner la possibilité de vieillir en santé et en dignité.
Voilà.
Mme
Hivon
: Dr
L'Espérance.
M. L'Espérance (Georges) : Merci
beaucoup. Merci au comité transpartisan. Je suis Georges L'Espérance, président
de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité.
Écoutez, je pense que Sandra a à peu près
tout dit dans son allocution d'émotion. 80 % des patients... des personnes
au Québec sont en accord avec les demandes anticipées d'aide médicale à mourir
pour les maladies neurodégénératives cognitives. Tous les critères de la loi
doivent être respectés, bien évidemment, telle qu'elle est maintenant. Il faut
aller de l'avant.
Le rapport transpartisan qui a été déposé
par Mme Hivon et ses collègues est remarquable d'adéquation, remarquable de
concision. Les recommandations sont formidables. Je ne suis pas un législateur,
mais il me semble qu'on peut prendre les recommandations et les transférer, ou
les transmettre, ou les traduire en un projet de loi qui serait déjà une grande
avancée. Et, encore une fois, comme avec le projet de loi n° 2
initialement, au Québec, on pourra montrer une voie très progressiste pour
aider tous les gens qui vont souffrir de maladies neurodégénératives cognitives
et leur permettre d'avoir des mois ou quelques années supplémentaires, comme Mme
Demontigny vient de le dire.
Voilà. Je pense que Sandra a tout dit. Je
laisse la parole aux autres. Merci.
M. Birnbaum : Bonjour,
tout le monde. J'ai eu l'honneur de servir comme vice-président de cette Commission
spéciale sur l'évolution de la Loi concernant les soins de fin de vie et
l'honneur de témoigner la solidarité, le progrès, la conscientisation de notre
population québécoise de poursuivre ce débat de façon responsable, sérieuse et
compatissante. Nous avons fait le travail, et là, au nom de Sandra, au nom des
gens qui sont au cœur de l'enjeu que nous avons examiné avec soin, avec détail,
il faut agir.
Je crois que c'est important de nous
rappeler à la fois de la complexité, mais de l'importance des questions devant
nous. Mais les Québécoises et Québécois comprennent aussi et ils nous accordent
la responsabilité d'agir de façon responsable, ponctuelle, mais vite aussi.
Il faut souligner que notre travail s'est
fait de façon assez transparente, rigoureuse, responsable et efficace. Notre
commission, au cours de plus de 200 heures de délibération, a entendu
quelque 74 experts, groupes et individus, analysé quelque
75 mémoires, réalisé un questionnaire public qui a reçu quelque
3 500 réponses. Notre commission a tenu un total de
85 rencontres, dont 46 de notre comité directeur avec Véronique, Vincent
et Nancy Guillemette. Le travail a été fait, et le consensus est clair.
Je me permets de vous lire notre première
recommandation, qui est au cœur de l'enjeu devant nous, qui doit être
assujettie à un projet de loi dans un court délai qu'il nous reste. La
recommandation : «La Commission recommande qu'une personne majeure et apte
puisse faire une demande anticipée d'aide médicale à mourir à la suite de l'obtention
d'un diagnostic de maladie grave et incurable conduisant à l'inaptitude.» En
connaissance de cause. Nous ne sommes pas en train de proposer des gestes qui
ne sont pas réfléchis, responsables et réalistes. Et cette recommandation,
entre autres, faisait sujet d'un consensus assez, assez large.
Donc, j'ose espérer que le gouvernement va
comprendre qu'on est en train de tendre la main. La possibilité réelle est
devant nous afin qu'un projet de loi à la guise de ce rapport soit adopté d'ici
l'ajournement, le 10 juin, et voilà ce qu'on souhaite au nom de Sandra, au
nom de toutes les Québécoises et tous les Québécois. Merci.
M. Marissal : Merci, David.
Dr L'Espérance, Véronique, Sandra, merci d'être là, merci d'avoir fait la route
pour être avec nous aujourd'hui, c'est important.
Tout à l'heure, quand je suis arrivé dans
la salle de rencontre avec Véronique et puis David, j'ai eu un petit sourire de
fierté parce que j'ai vu qu'on avait, sans se consulter, apporté, tous les
trois, notre document, le rapport. Je ne dors pas avec, mais j'en suis très
fier. J'en suis très fier. C'est quelque chose, dans mes quatre ans ici, que
j'ai fait avec énormément de fierté. David l'a dit : On a travaillé des
heures et des heures. Mais Véronique l'a dit aussi : Ce n'est pas pour
nous, on n'a pas fait ça pour nous. Bon, peut-être qu'un jour, malheureusement,
le malheur frappant, nous en aurions besoin. Mais ce rapport, il est complet.
Il ne fait que 11 recommandations, qui seraient liées, vraisemblablement,
par un nombre assez limité d'articles dans un nouveau projet de loi.
Mais, si formidable soit-il, ce rapport, puis
je le dis en toute humilité, c'est un bon rapport, c'est un excellent rapport,
il est incomplet tant qu'il n'y aura pas, dans la suite, un projet de loi. Et
c'est pour ça qu'on est ici aujourd'hui, parce que le temps presse. Vous le
savez, là, vous couvrez la politique ici, vous regardez le calendrier comme
nous, j'imagine, il reste quatre semaines, dont deux intensives. Faites le
nombre de jours, là, ça fait 15, 16 journées peut-être, en souhaitant qu'il n'y
ait pas de bâillon puis qu'on ne sera pas 17, 18 journées, mais, mettons,
16 journées, là, on va régler ça pour ça. Il n'y a pas beaucoup de sable
dans le sablier, mais il en reste. On est capables de le faire, mais on ne peut
pas travailler dans le vide, ça nous prend un projet de loi. Et il y a tout
là-dedans pour un projet de loi. Puis, au-delà de ce qu'il y a là-dedans, il y
a surtout la volonté, la volonté de la population du Québec d'aller plus loin,
de faire l'étape suivante, qui est celle, justement, qu'on a définie dans la
première recommandation. Alors, c'est faisable.
Le message, aujourd'hui, c'est ça. Puis on
a la responsabilité collective de le faire, on le doit à des gens comme Sandra
et à tous les autres, toutes les autres qui attendent ça de nous, et on est
capables de le faire.
La Modératrice : Merci. On va
prendre vos questions.
Mme Plante (Caroline) : Bonjour
à vous tous.
M. Marissal : Bonjour.
Mme Plante (Caroline) : Donc,
je crois comprendre que votre intention, cet après-midi, c'est de mettre de la
pression sur le ministre, sur le gouvernement, d'accentuer la pression. Et,
peut-être, en complément, comment est-ce que vous envisagez, vous voyez la
suite des choses? Il nous reste très peu de temps. Le ministre Dubé a déjà
trois projets de loi en cours. Comment ça va se passer?
M. Marissal : La réponse
courte à votre question… puis je vais laisser Véronique, parce que c'est
Véronique qui a initié ça puis à tout seigneur, tout honneur, là. Puis la
réponse courte à votre pression, c'est : Est-ce qu'on veut mettre de la
pression? Oui, assurément.
Le sésame ici, en cette Assemblée, c'est :
Avec le consentement, on peut tout faire. Mais il ne reste pas beaucoup de
temps, je l'ai dit. Puis, si on ajourne, c'est foutu, ça va prendre
probablement un an avant... parce qu'il va falloir qu'on ait les élections, il
va falloir former un nouveau gouvernement, il va falloir redéposer des projets
de loi. On n'a pas à perdre cette année-là. Le travail, il a été fait, il faut
juste le finir maintenant.
Alors, oui, on met de la pression sur le
gouvernement, en rappelant que le travail a été fait de façon collégiale,
transpartisane. Ce n'est pas un gain politique pour Québec solidaire, pour le
PQ ou pour les libéraux, c'est pour la population qu'on l'a fait.
Mme Plante (Caroline) : Est-ce
qu'il y a quelqu'un d'autre qui veut ajouter quelque chose sur la suite des
choses et comment on pourrait procéder? Vous dites qu'il reste très peu de
temps. Alors, comment est-ce que c'est possible d'adopter un tel projet de loi?
Et est-ce que c'est souhaitable d'adopter un projet de loi aussi délicat, aussi
sensible rapidement?
M. Birnbaum : Je crois que
Véronique en élaborerait. Qu'on soit clairs, les...
(Interruption) Pardon. Les dispositions...
Bon, notre réalité...
M. Marissal : Ça achève.
M. Birnbaum : Oui, ça achève,
ça achève.
Qu'on soit clairs, nous ne sommes
aucunement en train de proposer une économie des gestes démocratiques. L'examen
nécessaire, ça se fait, ça se fait. Il faut… plusieurs choses à la fois. C'est
un projet de loi sur un sujet très profond et complexe, mais circoncis aussi,
circoncis aussi. Le Québec a dépensé beaucoup de temps sur ce débat déjà, les
étapes à franchir en bonne et due forme pour assurer une adoption d'un projet
de loi éclairé, et responsable, et faisable. C'est au gouvernement de chercher
les façons de le faire, et vous avez les trois autres formations qui indiquent
leur plan de collaborer le plus qu'ils peuvent afin de réaliser le résultat qu'on
souhaite aujourd'hui.
Mme Hivon : Très
concrètement, là, il peut... ce qu'on veut, c'est qu'il soit déposé dans les
prochains jours, ce qui nous laisse un mois. Nous, on offre toute notre
collaboration pour siéger le jour, la nuit. Cet enjeu-là est trop important, le
travail qui a été fait avec l'équipe qui est toute encore en place. Il y a une
synergie, il y a un momentum. Donc, on ne cédera pas, on ne lésinera pas sur la
rigueur. On va évidemment faire tout un travail en profondeur, mais avec des
gens qui ont déjà baigné là-dedans, travaillé là-dedans depuis plus d'un an, avec
des recommandations qui sont claires. On pense qu'on peut y arriver, mais il
est vraiment minuit moins une, et c'est pour ça qu'aujourd'hui c'est important
que ce message-là soit entendu et que le projet de loi soit déposé maintenant.
M. Carabin (François) : Mme
Hivon, vous pouvez rester au lutrin, encore là-dessus, désolé de rester dans la
poutine parlementaire, mais le règlement de l'Assemblée nationale dit qu'il
faut qu'un projet de loi soit déposé avant le 15 mai pour qu'il soit
adopté dans la présente législature. Est-ce qu'il y a moyen pour vous de
contourner ce règlement-là si jamais le projet de loi est déposé, disons, le
24 mai?
Mme Hivon : Oui, bien,
premièrement, on n'est pas rendus au 15 mai, donc il y a plusieurs
journées. Moi, j'ai plein d'espoir qu'il va être déposé avant le 15 mai,
première des choses.
Et, deuxième des choses, par consentement,
on peut tout faire, et on l'a déjà fait. Je vous donne un exemple. Pour la
levée de la prescription pour les agressions sexuelles, pour les poursuites de
personnes qui ont été victimes d'agression sexuelle, un peu comme ça, on avait
réussi à s'entendre. Là, évidemment, il va falloir faire un travail rigoureux,
là, on ne lésinera pas sur la qualité du travail. Mais on pense qu'en un mois,
en travaillant de longues heures, on est capables d'y arriver.
M. Carabin (François) : M. Marissal
l'a dit plus tôt, c'est un travail que vous avez fait de façon transpartisane.
Des élus de la CAQ étaient représentés à la commission, puis, au bilan, le
premier ministre s'est engagé à déposer un projet de loi. Comment ça vous fait
réagir de voir qu'aujourd'hui il n'y ait toujours pas de texte législatif et
que le gouvernement ne soit pas représenté avec vous aujourd'hui?
Mme Hivon : O.K. Je vais
laisser Vincent puis David répondre s'ils veulent. Mais, sur le fait que
Mme Guillemette n'est pas là, en fait, Mme Guillemette, pour des
raisons qui lui appartiennent, ne pouvait pas être là, mais elle est informée
et elle est solidaire de la démarche d'aujourd'hui. Puis, pour le reste...
M. Marissal : …
M. Birnbaum : Mais j'ai
été juste... Merci, Vincent. Juste pour insister à nouveau que notre demande
est crédible et réaliste. Vous pouvez entendre par ça qu'on prend pour acquis
qu'il y a du travail d'élaboré sur un projet de loi. On insiste sur la
crédibilité, le réalisme derrière notre proposition aujourd'hui.
M. Marissal : Mais c'est
sûr que le temps se fait de plus en plus court. Je l'ai dit, regardez le
calendrier, on parle presque en nombre d'heures d'ici la fin de la session.
Donc, ça va nous prendre un texte législatif sur lequel travailler. Est-ce qu'il
est prêt, est-ce qu'il chemine, est-ce qu'on peut le déposer rapidement? Ensuite,
on prendra les mesures pour qu'on soit capables de l'adopter rapidement. Mais
ce que j'ai dit tout à l'heure, et je me répète : On a le temps de le
faire. Ce n'est pas idéal. On aurait souhaité l'avoir bien avant ça.
Moi, je siège sur la Commission santé et
services sociaux, puis il y a eu, à un moment donné, là, une espèce de délai, là,
pendant six ou sept semaines, on n'a pas siégé du tout, et il y avait déjà
pourtant deux ou trois projets de loi, trois, à ce moment-là, déjà, qui étaient
dans le pipeline législatif.
Vous savez, gouverner, c'est choisir;
choisir, c'est prioriser. Je ne peux pas m'empêcher de trouver ça un peu
dommage, puis je suis sûr que je ne suis pas le seul, qu'on arrive là, comme ça,
en fin de session, puis qu'on n'a toujours pas ce texte législatif.
Cela dit, on est là pour être bons joueurs.
On peut le faire. Si ça arrive, on va le faire, mais il faudrait que ça arrive.
M. Carabin (François) : Mme Demontigny,
je me demandais si vous aviez parlé récemment au ministre de la Santé. Puis, si
ce n'est pas le cas, avez-vous un message à lui lancer aujourd'hui?
Mme
Demontigny
(Sandra) :Bonne question. Non, je ne lui
ai pas parlé. En fait, on ne s'est jamais parlé.
Bien, en fait, le message est un peu celui
que j'ai livré tantôt et le même que... je m'en allais dire mes collègues, on
travaille ensemble, mais c'est : En effet, le temps presse, puis ce n'est
pas juste d'un point de vue politique, dans le sens théorique, là. Il y a des
gens comme moi, puis on est plusieurs milliers de personnes, notre compte à
rebours est parti, puis il n'arrête pas, puis chaque journée qu'on perd, bien,
on la perd, puis elle ne reviendra plus.
Puis l'enjeu avec l'aide médicale à
mourir, c'est qu'il faut être apte à consentir. Je sais que ça n'arrivera pas
du jour au lendemain, que je perdrai mon inaptitude, mais honnêtement je pense
qu'il n'y a pas un soir, en me couchant, que je ne dis pas : D'un coup que
je la perdrais puis que, là, je ne peux plus. Ce n'est pas comme ça que ça
marche, là, mais c'est comme si tout se joue là-dedans, si je perds mon
inaptitude, parce que, pour moi, c'est hors de question de vivre la fin d'une
maladie d'Alzheimer, je ne veux pas ça. Puis je l'ai déjà dit ouvertement en
commission : C'est beaucoup plus doux, partir avec l'aide médicale à
mourir, que partir par nos propres moyens.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
Juste une question pour vous encore, Mme Hivon. Je veux juste être bien,
bien certain d'avoir compris les nuances, là. Si ce n'est pas déposé avant le
15 mai, là, il n'y a pas de... vous pourriez refuser d'en débattre. Est-ce
qu'à ce moment-là vous êtes prêts à adopter le projet qu'on va vous proposer de
façon unanime?
Mme Hivon : Vous voulez
dire sans modification?
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
...
Mme Hivon : Bien non, on
ne peut pas donner un chèque en blanc, là, ça, c'est sûr.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
Donc, il faut que ce soit avant le 15 mai.
Mme Hivon : Ah! non, en
fait, deux choses. Sur l'échéancier, en fait, bien sûr qu'on veut qu'il soit
déposé dans les prochains jours, ne serait-ce que 15 mai, pas 15 mai,
parce que chaque jour compte pour être capables de le travailler puis d'avoir
le maximum de temps pour faire le meilleur travail possible. Parce que c'est
sûr que, s'il est déposé trois jours avant la fin de la session, bien, on ne
pourra pas adopter un projet de loi d'une telle ampleur, d'une telle
sensibilité en trois jours. Donc, nous, on dit : Il faut le déposer le
plus rapidement possible.
En plus, quand il est déposé avant le
15 mai, il n'y a pas de démarche exceptionnelle, il n'y a pas de
consentement unanime qui doit être demandé, alors que, si c'est après le
15 mai, pour qu'il soit adopté, il faut le consentement unanime. Donc,
dans ce temps-là, évidemment, je pense qu'on l'aurait, si tout le monde est de
bonne foi, mais il y a moins de garanties. Alors, pour toutes ces
raisons-là, on demande vraiment au gouvernement, et surtout, je dirais, pour
respecter le travail incroyable qui a été fait de manière rapide, mais
rigoureuse, en embarquant la population et les experts avec nous, il faut
déposer ce projet de loi là. C'est une question de respect pour les personnes
qui ont mis leur confiance en nous.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
On a attrapé le ministre Dubé ce matin, dans le corridor, il avait l'air
assez confiant. Maintenant, je reviens avec le fait que Mme Guillemette n'est
pas là. Mais avez-vous eu des échanges avec la CAQ au cours des dernières
heures, des derniers jours à ce sujet-là?
Mme Hivon : Oui, oui,
bien sûr, on a des échanges. Donc, on a de bons échanges avec Mme Guillemette.
Elle était présidente et solidaire de toute cette démarche. Donc, c'est certain
qu'ils savent à quel point on y tient. Ils savent que Mme Demontigny, Dr
L'Espérance sont ici aujourd'hui. Ils savent à quel point, à chaque fois qu'on
fait des conférences ou qu'on aborde le sujet, c'est la première question qui
arrive : Qu'est-ce qui arrive avec la demande anticipée, si je me projette,
et que j'ai la maladie d'Alzheimer, et que je voudrais le demander à l'avance?
Donc, ils sont bien au fait de ça, et là c'est entre leurs mains.
Nous, ce qu'on souhaite, ce n'est pas un
dépôt pour un dépôt, c'est un dépôt pour qu'on puisse l'adopter, donc un dépôt
en temps utile.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
Je peux-tu poser des questions en anglais pour mes collègues de CBC? Ils ne
sont pas là, mais… Mme Hivon, peut-être. Why are you coming
together to announce this now? How urgent is it that the bill is passed?
Mme
Hivon
: Yes, I will start, and then David, who is pretty, pretty good in
English, I think, can complete.
We're here today all together
because we worked really hard on this transpartisan special commission which
tabled, last December, this report, and we feel that we worked for the people
of Québec, for people like Sandra Demontigny, for people who see their capacity
fading away, and we recommend that this very important issue to be tackled,
which is to allow people to ask in advance for medical aid in dying when
circumstances are met, of course, when they have a diagnosis, and all of that. And
today we come together to tell the Government that we offer them all our
collaboration. We are in a situation where we want to collaborate to be able to
adopt a legislation before the end of this session.
So, maybe David can
complete.
M. Bolduc
(Pierre-Alexandre) : …actually, I have a question...
they had a... the colleagues had a question for you. As the Official
Opposition, can you reiterate what you're calling on the province to do?
M. Birnbaum :
Very clearly, very clearly, in
conjunction with the other parties of the Opposition that are here with us, we
are calling on the Government to act on the rigorous and serious work that was
done by the commission I had the privilege of serving as vice-president for,
which is to act on our recommendations and to allow those who are before
diagnosis of neurodegenerative diseases to make their views known… their wish about
when and under strict circumstances they can avail themselves of end of life
care, medical aid in dying. That's what the report calls for.
This report was done with
great diligence, transparency. There was a public consultation for which 3 500
Quebeckers participated, there were deliberations with some 74 groups and
individuals. We spent 85 meetings, some 200 hours, working on this consensus
that became very clear, that Quebeckers are ready for this.
Now, if they're ready, as
we heard from Sandra Demontigny, they are ready to make sure that their futures
are taken care of in a humane, transparent and responsible way, and without
delay. That means that this Government can act on the work we did, between now
and the end of this legislative session, to responsibly, fairly and
democratically adopt a bill that respects the recommendations we put forward.
M.
Bolduc (Pierre-Alexandre) : Mme Demontigny, je peux-tu vous poser une
question en anglais? C'est vous, là…
Mme Demontigny (Sandra) : «Eh
boy!» Non, mais, dans mon autre vie, j'étais capable. Ah! allez-y, M.
Marissal.
M. Marissal : Non, mais…
Mme
Demontigny
(Sandra) : Non, non, allez-y.
M. Marissal :
If I just may add on this, as the
saying goes, time flies, and we are running out of time. But we are still, and
I insist on that, we're still able to make it through, but, in order to do
that, we need a draft bill from the Government. So, if they have actually this
draft bill, it would be nice for these people, and for us, and for the rest of
the population of Quebec, to table that draft bill so we can study it. But I
repeat : Time is running out, but we still have time to do this, to study
the draft bill and to adopt it.
M.
Bolduc (Pierre-Alexandre) : Merci.
M. Birnbaum : Merci, Vincent.
Mme Demontigny (Sandra) : O.K.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) : Ce
n'est pas grave, là. On va découper, on va prendre les bons bouts, là.
Mme
Hivon
: Vous
pouvez enlever votre masque.
Mme
Demontigny
(Sandra) : Ah oui! C'est vrai…
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) :
Vous pouvez vous tromper. Il n'y a pas de souci.
Mme Demontigny (Sandra) : Bien
oui, je vais faire mon gros possible.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) : Je
vous lis la question, Sandra. How would an expansion of the
law on assisted dying affect your day-to-day life?
Mme Demontigny
(Sandra) :
If
the project... if the law is adopted?
M.
Bolduc (Pierre-Alexandre) : Tout ce que vous nous avez expliqué
tantôt, là, que vous...
Mme Demontigny (Sandra) :
Moi, j'ai des... Je sais sûrement ce que j'ai dit parce que je dis souvent la
même chose, mais je ne me souviens pas ce que j'ai dit exactement tantôt, ça
fait que...
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) : …le
soir…
M. L'Espérance (Georges) : ...
Mme Demontigny (Sandra) : S'il
est adopté, O.K.
I will sleep better at
night, that's the more important thing. When I go to sleep, every night, I'm
thinking about this. The thoughts are just coming along, so I try to forget
them or... It's like if I can realize, in the night, when I'm alone, that
this... I speak Spanish too, so it's a bit confused in my head. «La maladie»...
Des voix :
The illness.
Mme Demontigny
(Sandra) : …the illness is all around me, all
in me, because, in the day, I'm doing all my things. So, it's this, I will
sleep better, and I will enjoy all my days a lot more, because I will be in the
present time, thinking in the present time, and not being afraid of what is
coming, because I don't know which speed it will come, because I can be few
months and it's stable, and then, after, I can lose something that is very
important. So, that's it.
M. Bolduc
(Pierre-Alexandre) :
Thank you very much. Avez-vous quelque chose à dire en
anglais, M. L'Espérance?
M. L'Espérance (Georges) : Si
vous avez une question.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) : Bien,
écoutez, après ça, je vous laisse tranquille, là.
M. L'Espérance (Georges) : Non,
il n'y a pas de problème.
M. Bolduc (Pierre-Alexandre) : Il
y en avait une pour vous. How will what you're asking for
today improve the quality of life of people suffering from neurodegenerative
diseases?
M. L'Espérance
(Georges) :
Well,
the main impact, I think, would be the calm and the serenity that a law project
like this one will bring to those people like Sandra and all the others that we
have many questions : I have a diagnosis of Alzheimer's, what can I do?
May I have medical aid in dying? Yes, you may have medical aid in dying now
because you're apt, but you will lose six months, one year, two years of a
pretty nice life with your family, with all your… people around you.
So, that's… a project
like this would bring those patients to take all the time they have with their
beloved, and then go to the end of their disease, and don't have that anxiety
that they will end, like, you know, all those people that are in hospices and are dying in very bad
conditions, human bad conditions, even with palliative care. So, that kind of
law would be very, very progressive and would be very careful for all those
patients, and there will be a lot of patients. By 98 years old, the numbers are
that one on two person will have Alzheimer's disease or any kind of
neurodegenerative disease, which is terrible.
M.
Blouin (Pierre-Alexandre) : Merci pour votre gentillesse. Merci.
M. L'Espérance (Georges) : Ça
me fait plaisir.
Des voix : Merci.
La Modératrice
: Bon
après-midi.
(Fin à 14 h 10)