Conférence de presse de M. Robert Perreault, ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration
Forum national sur la citoyenneté et l'intégration
Version finale
Le jeudi 21 septembre 2000, 11 h 02
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Onze heures deux minutes)
M. Perreault: Merci. Alors, il me fait plaisir de donner aujourd'hui le coup d'envoi du Forum national sur la citoyenneté et l'intégration qui se déroulera jusqu'à demain, à compter de ce soir et jusqu'à demain soir au Centre des congrès de Québec. C'est un exercice démocratique qui réunira tout près de 450 participants. De fait, on a dû refuser des participants, tant l'intérêt était important. Je crois d'ailleurs que vous retrouverez dans votre pochette un peu la liste et l'éventail des participations. Ces gens représentent des organismes variés, de toutes les régions du Québec; certains organismes nationaux, d'autres régionaux, dans les domaines de l'éducation, de la culture, du développement économique, social; bien sûr, les organismes qui s'intéressent à la promotion de la participation civique, des droits et libertés de la personne, des organismes, également, qui s'intéressent aux questions qui sont liées à l'immigration, l'accueil et établissement des immigrants, des milieux universitaires et des représentants des divers organismes gouvernementaux.
Alors, qu'est-ce que c'est que ce forum? Bien, ça se veut un temps de réflexion pour tous ceux et celles qui s'intéressent à l'exercice de la citoyenneté au Québec. Qui dit temps de réflexion dit occasion de débats, d'échanges. Ce forum ne prétend par clore ces débats, ni le débat sur cette question. Mais, dans le fond, essentiellement, l'enjeu, par-delà les approches, les sensibilités diverses, l'enjeu, c'est de voir de quelle façon on peut alimenter la réflexion gouvernementale par des propositions concrètes pour permettre l'élaboration d'un plan d'action visant à soutenir et à favoriser la participation civique au Québec de l'ensemble des citoyennes et citoyens du Québec.
Alors, il y a donc eu un document de consultation que j'ai eu l'occasion de rendre public, je crois que c'était en juin dernier. Et ce document, il est parvenu, dès ce moment-là, à l'ensemble des organismes intéressés. Alors, vous en avez une copie, vous l'aviez déjà reçu. La première partie du document définit un peu la vision gouvernementale des enjeux et la seconde partie trace un certain nombre d'orientations, indique certains moyens d'action qui sont susceptibles de favoriser l'exercice de cette citoyenneté, encore une fois, sans avoir la prétention d'épuiser le sujet, au contraire.
Dans le fond, de luttes politiques en combats sociaux, le Québec s'est doté d'un ensemble de libertés, de droits et d'institutions qui ont façonné la citoyenneté québécoise. L'ensemble de ces éléments constitue un véritable patrimoine dont bénéficie aujourd'hui l'ensemble des citoyens du Québec. Et ce patrimoine, bien sûr, il est vivant. Il n'est pas statique, il s'enrichit constamment de l'influence et des apports des diverses générations de Québécois, qu'ils soient nés sur le territoire ou qu'il soient de nouveaux arrivants.
Ce forum, donc, permettra de débattre de ces questions, conscient que l'égalité des droits n'est pas toujours conforme à l'égalité des faits et permettra sûrement de nous doter de plans d'action. Déjà, d'ailleurs, le gouvernement devançant un peu les conclusions de ce forum a mis de l'avant, par exemple, dans le cadre de mon ministère deux mesures très importantes qui illustrent bien la nature des débats qu'on pourra avoir. Comment par exemple, par une loi sur l'accès à l'égalité en emploi, modifier le visage de la fonction publique québécoise pour faire en sorte qu'elle soit davantage conforme au Québec réel, un programme d'échanges pour 10 000 jeunes Québécois, entre les jeunes de la métropole et ceux des régions pour que justement chacun puisse mieux connaître la réalité du Québec d'aujourd'hui.Maintenant, le forum sera animé par Mme Madeleine Poulin, journaliste de profession qui est bien connue. Il y a un certain nombre de personnalités qui ont accepté, par-delà le point de vue gouvernemental qui a été déposé, d'alimenter leurs débats de leurs propres approches, de leurs propres réflexions. Mme Lise Bissonnette, qu'on connaît, qui est présidente-directrice générale de la Grande Bibliothèque du Québec, autrefois du Devoir ; de Mme Françoise NDuwimana, qui est responsable des programmes au Centre justice et foi; de Bernard Normand qui est le directeur général de l'Institut canadien de l'éducation des adultes; également de M. Grégory Bond, qui est professeur au Département des sciences religieuses de l'Université McGill; et M. Claude Corbo, qui est actuellement professeur au Département des sciences politiques de l'Université du Québec à Montréal qui était autrefois le recteur, qui sera chargé de présider et de conduire cet échange et qui a collaboré également à la rédaction, au départ, du document du ministère.
Je veux vous rappeler que la tenue de cet événement avait été évoqué au moment de la campagne électorale, donc il y a maintenant plus de deux ans et il avait été prévu initialement pour le printemps. À l'automne 1999, nous avions annoncé que compte tenu de la tenue du Sommet sur la jeunesse et le Québec, nous en reportrions la tenue à l'automne 2000 et nous avons donc, au mois de mai, annoncé la date et rendu public, en juin, le document. Il s'est tenu cet été deux forums vituels en ligne. Plus de 1 200 personnes y ont participé. Nous avons reçu des milliers de demandes téléchargées un peu partout, du Québec et d'ailleurs dans le monde, qui s'intéressent à ces questions parce que ce genre de débat n'est pas propre au Québec. Il se déroule dans bien des sociétés occidentales et nous avons eu l'occasion de rencontrer, en juillet et en août, toute une série d'organismes, que ce soit dans le milieu des jeunes, dans le milieu des femmes, dans le milieu de l'immigration et dans les milieux socioéconomiques et également en région.
Donc, ce soir, nous donnerons le coup d'envoi, demain se dérouleront les travaux. Vous avez le programme dans votre document. Et, encore une fois, en résumé, je dirais que ce Forum sera un succès, dans mon esprit, dans la mesure où il pourra mettre l'accent sur ce qui nous unit et nous rassemble plutôt que ce qui nous distingue et parfois nous divise, et qu'il nous permettra de dégager des propositions concrètes d'action pour faire en sorte que toutes les Québécoises et tous les Québécois aient clairement le sentiment de pouvoir participer comme citoyens à part entière à la vie publique et à la société québécoise.
M. Grant (John): Questions en français.
M. Brunet (Claude): M. Perreault, quelle est la place du projet souverainiste dans l'élaboration du concept de citoyenneté au Québec?
M. Perreault: Oui. Les Québécois forment un peuple. Ils ont une histoire qui leur est commune, ils ont des institutions publiques, ils se reconnaissent dans une Assemblée nationale, et là-dessus, il y a unanimité de tous les partis à l'Assemblée nationale, tant le Parti libéral que le Parti québécois, et je pense également, probablement, de l'ADQ; j'en suis convaincu. Donc, il est tout à fait normal que l'État du Québec souhaite, à ce moment-ci, prendre un temps d'arrêt et de réflexion avec les citoyens du Québec sur la nature de leurs relations, sur les gestes à poser pour faire en sorte que l'ensemble des citoyens québécois se sentent dans le coup.
Et même si une telle réflexion ne peut faire abstraction de notre histoire et de notre réalité – on ne discutera pas de concept théorique, on ne fera pas des définitions de dictionnaire sur le civisme, on va devoir parler de notre réalité concrète. Dans mon esprit, c'est un débat qui se justifie, peu importe l'option politique du gouvernement en place.
C'est un débat nécessaire, c'est un débat utile parce qu'il se pose des questions, il y a des questions importantes, des interpellations importantes qui nous sont posées. Et donc, on souhaite, comme société, prendre un temps d'arrêt pour réfléchir à ces questions et voir comment on peut améliorer la qualité de vie démocratique de notre société, le rapport des citoyens à l'État, l'égalité des droits, l'égalité des chances. C'est, à mon avis, indépendamment de toute compréhension de la conclusion de cette histoiree – j'ai évidemment la mienne et je ne m'en cache pas – mais je pense que c'est normal que l'État du Québec pose cette question, comme de tels débats existent dans d'autres sociétés.
M. Brunet (Claude): Mais, si vous me permettez, si le sentiment d'appartenance de l'ensemble des Québécois est plus fort au Québec, est-ce que c'est de nature à favoriser l'option souverainiste?
M. Perreault: C'est de nature à favoriser la cohésion de notre société, c'est de nature à nous interpeller chaque fois qu'il y a des situations qui excluent certains de nos concitoyens de la vie publique, de la vie en société, chaque fois que nos institutions démocratiques sont mises en péril, et c'est l'enjeu. L'enjeu, c'est très concrètement de faire en sorte que les citoyens du Québec se reconnaissent comme tels, se reconnaissent dans leurs institutions, aient le sentiment que cette société poursuit son chemin vers une société qui est plus juste, plus égalitaire, plus solidaire puis plus démocratique.
Alors donc, on ne parlera pas de civisme à ce Forum, on va parler de citoyenneté, le civisme étant un certain nombre de qualités, de vertus qui, en quelque sorte, favorisent aussi, par-delà les droits, par-delà la vie publique, l'exercice de la citoyenneté, bien sûr.
M. Grant (John): Norman Delisle.
M. Delisle (Norman): M. le ministre, je comprends mal votre notion de citoyenneté québécoise, on la définit comme la capacité juridique d'une personne à participer à l'exercice du pouvoir par le droit de vote et l'éligibilité aux fonctions publiques. C'est la citoyenneté canadienne, ça, qui permet de voter, il n'y a pas de citoyenneté québécoise au sens juridique du mot.
M. Perreault: À ce que je sache, ce sont les lois de l'Assemblée nationale qui définissent aussi les règles du jeu, les lois, nos institutions démocratiques. Il y a une telle réalité qu'un peuple québécois, il y a une telle réalité que la lutte de ce peuple pour garantir ses libertés démocratiques et civiles. Le Québec est un des endroits au monde où s'est constitué le premier Parlement responsable. Il y a eu des batailles historiques pour ça. Évidemment, ça nous ramène loin en arrière, mais, après, il y a eu, dans notre histoire, plein d'autres – et le document en fait état – luttes. Que ce soit sur le plan social, par exemple les luttes des syndicats, la lutte des femmes pour la reconnaissance de leurs droits, c'est inscrit à notre Charte des droits. Le Québec constitue un État, il y a ici un peuple, et il y a donc un rapport entre ces citoyens et l'État.
Je ne dis pas qu'il n'existe aucun rapport de citoyenneté entre les Québécois et le Canada dans le contexte canadien actuel, bien au contraire, mais, comme gouvernement, chez nous, nous nous préoccupons actuellement de ce que sont nos responsabilités, et, nos responsabilités, c'est de voir de quelle façon, ici, au Québec, on construise chaque jour une société où les citoyens se sentent citoyens de plein droit, tous les citoyens sans exception et ce qu'il faut faire pour y arriver. C'est au coeur de la réflexion. Maintenant, c'est une réflexion qui, bien sûr, s'enracine dans une certaine histoire. Elle ne peut être déconnectée de cette histoire. Cette histoire a ses particularités.
M. Delisle (Norman): Vous êtes bien conscient que, si le Directeur des élections veut m'inscrire sur la liste électorale au Québec, ce qu'il va me demander, c'est si j'ai la citoyenneté canadienne. Ça va être ça sa question.
M. Perreault: Oui, le document traite ça. Voyez-vous, vous l'abordez. C'est un angle d'approche. On peut aborder la question de la citoyenneté par une approche juridique, technique. Puis on pourrait avoir ensemble de longs débats sur la différence entre nationalité, citoyenneté, les concepts anglophones de citizenship versus les concepts européens. Peut-être qu'il y aura des juristes à ce forum et que ce sera l'angle d'approche qui les préoccupera particulièrement. Il y a bien d'autres angles d'approche. Il y a des gens, par exemple, qui vont sûrement, à l'occasion de ce forum, nous rappeler qu'il ne suffit pas que notre Charte prévoit l'égalité des droits, encore faut-il qu'il y ait égalité des chances. Puis, pour qu'il y ait égalité des chances, par exemple, il faut éliminer, dans l'accès à la fonction publique, des billets discriminants. D'autres gens vont nous rappeler qu'au plan social tout le monde n'est pas égal, et puis que pour que les citoyens puissent jouer leur rôle à part entière, puis se sentir dans le coup, puis vraiment jouer le jeu démocratique, bien, il faut aussi qu'il y ait des programmes qui leur donnent la capacité d'intervenir. Il y a peut-être des gens qui vont nous parler davantage de démocratie municipale dans le contexte de la fusion des municipalités.
Je suis très conscient que, quand on aborde ces questions, on aborde... Et, d'ailleurs, le mot «forum», à matin, dans le dictionnaire, je le relisais, ça se dit: «une grande rencontre sur un sujet complexe». On aborde un sujet qui a de multiples dimensions. Et, encore une fois, je ne pense pas qu'on va épuiser la totalité de ses dimensions en fin de semaine, ni même tenter d'en retenir une définition comme étant la bonne, la seule, l'unique. Mais, encore une fois, si on pouvait quand même convenir qu'il y a quand même un tronc commun qui devrait nous unir et nous rassembler par-delà la diversité de nos appartenances et de nos histoires et que ce tronc commun constitue, dans le fond, un peu le bagage, le patrimoine civique québécois et qu'on a intérêt à, de temps en temps, faire le point sur la qualité de ce patrimoine puis voir de quelle façon il doit évoluer.
Le Modérateur: Paul.
M. Roy (Paul): Mais, concrètement, qu'est-ce qui peut résulter d'un exercice comme celui-là? des mesures? des politiques?
M. Perreault: Bien, je vous donne deux exemples qui sont sortis du gouvernement dans le cas présent et qui, normalement, si le forum s'était tenu au printemps, auraient sûrement été au coeur des discussions. J'ai parlé du projet de loi sur l'accès à l'égalité en emploi. Ce n'est pas un détail. On ne pourra jamais convaincre l'ensemble des citoyens du Québec qu'ils sont citoyens à part entière s'ils ne se reconnaissent pas dans les institutions publiques et, au coeur de la citoyenneté, il faut placer cet enjeu, alors on avait du chemin à rattraper là-dessus. Alors, il y a un projet de loi actuellement devant l'Assemblée nationale. C'est un exemple concret, c'est un gros morceau, c'est 500 000 postes de la fonction publique et c'est toute la capacité de modifier notre attitude là-dessus.
C'est un exemple, je dis, c'est un exemple. Il y a d'autres exemples qui sont donnés dans le document et puis les participants, écoutez, il y en a 450. Ce pourquoi, on les convoque, c'est justement pour avoir des idées sur ce qui, d'après eux, d'après elles, pourrait constituer un plan d'action concret nous permettant d'avancer là-dessus puis, encore une fois, comme on disant tantôt, il y aura sûrement plusieurs angles d'approche. Je sais, par exemple, que les groupes communautaires, pour les avoir rencontrés, vont sûrement davantage insister sur l'égalité des chances réelles, donc sur les programmes qui donnent à tous les citoyens la capacité d'intervention. Il y aura des discussions là-dessus et des propositions.
Le Modérateur: François.
M. Cardinal (François): Vous dites souhaiter, M. Perreault, que tous les citoyens se sentent Québécois mais quand on lit la Gazette ce matin, on ne peut que constater un certain scepticisme face à quelque chose qui est qualifié d'exercice de relations publiques...
M. Perreault: J'allais dire: Choisissez vos lectures. Non. Ha, ha, ha!
M. Cardinal (François): Oui, mais ça représente quand même une certaine portion de la population.
M. Perreault: Non, non, mais regardez. J'ai dit tantôt, et je le répète, ça a été un engagement pris au moment de la campagne électorale. Si vous regardez ce qui se passe actuellement en France, en Angleterre, même aux États-Unis, si vous regardez même ce qui se passe au Canada, il va se tenir au mois d'octobre, là, une semaine canadienne sur la citoyenneté. La volonté des États de faire le point, par exemple, toute l'interpellation sur la mondialisation, tout ça, on parle de la fin... Je veux dire, il y a plein de débats autour de ces questions et il y a eu même dans votre journal, il y a un an, de nombreux débats qui tournaient aussi autour de ces questions sans nécessairement les aborder sous l'angle de la citoyenneté.
Alors, qu'il y ait partout dans le monde la volonté de réfléchir à ces questions et de voir de quelle façon on peut peut-être percevoir la réalité, la comprendre pour intervenir, moi, me semble parfaitement justifiée. Je veux dire, écoutez, on est 7 millions au Québec. J'ai dit tantôt que nous formions un peuple, nous avons un État, une Assemblée nationale, des institutions. De faire de temps en temps le point, par le biais d'un ministère comme le mien qui est responsable de ces préoccupations, sur la qualité de vie démocratique, l'état de nos relations entre les citoyens et l'État et les gestes qui devraient être posés pour modifier les choses, moi, me semble tout à fait justifié. C'est le contraire qui serait étonnant, me semble-t-il.
M. Cardinal (François): ...en doute la volonté d'élargir aux autres qu'aux pures laines ou aux non souverainistes...
M. Perreault: Bien, si vous lisez le document comme il faut, moi, là-dessus je me sens très à l'aise. S'il y a quelqu'un qui se sent à l'aise là-dessus, c'est bien moi. J'ai développé le premier programme d'accès à l'égalité en emploi pour les minorités visibles au Québec à la STCUM, ça fait déjà maintenant plus de 10 ans, j'ai un projet de loi devant l'Assemblée nationale sur ces questions, je me sens tout à fait à l'aise sur ces questions. Je dis tout simplement ceci: Il faut se rappeler et c'est tout ce que je veux dire que, tout aussi justifiée soit la compréhension de la diversité et de la multiplicité des appartenances, tout aussi justifié, me semble-t-il, qu'un État ait la préoccupation de ce qui peut constituer le tronc commun et ce qui peut rassembler les gens. Et donc, un tel forum, ce qu'il permet, c'est de faire un exercice sur comment... d'abord ça peut être quoi et puis comment se fait l'interrelation entre ces préoccupations qui sont à mon avis légitimes dans les deux cas.
Mme Lessard (Véronique): M. le ministre, en quoi au lendemain de ce forum-là un nouvel immigrant se sentira-t-il mieux intégré dans la société québécoise?
M. Perreault: D'abord, il faut savoir que le forum ne porte pas que sur la question de l'immigration, il interpelle toute la société québécoise. Vous pouvez être sûr qu'au forum, il y a des gens qui vont parler des jeunes dans notre société...
Mme Lessard (Véronique): ...si on parle des immigrants.
M. Perreault: Je veux dire, le forum lui-même est un moment de réflexion. Ça, je pense que ce sera la qualité du plan d'action qui en découlera et notre volonté politique de le concrétiser qui pourra permettre que les choses changent. Mais donc, c'est un moment de réflexion. On va chercher des idées, des réflexions de gens qui sont des praticiens de ça. Les gens qui sont là sont des gens qui tous les jours se préoccupent de ces questions sur le terrain. Il y a des centaines d'organismes communautaires, il y a des universitaires, il y a des spécialistes, il y a plein de monde qui, dans la société québécoise, s'intéressent tous les jours à ces questions, qui sont tous les jours en contact dans le domaine de l'immigration comme dans d'autres avec ces enjeux-là. Donc, ce qu'on fait, c'est qu'on va chercher largement leurs propositions, suggestions pour la suite des choses.
M. Hammond (Louis): M. le ministre, une question qui peut peut-être vous sembler bizarre: Qu'est-ce qu'un Québécois à vos yeux? Est-ce que c'est quelqu'un qui parle français, quelqu'un qui habite au Québec, quelqu'un... C'est quoi un Québécois?
M. Perreault: Je suis étonné que vous me posiez la question. La réponse est très claire: C'est tous ceux qui habitent le Québec. Il peut-u y avoir une autre réponse à cette question?
M. Brunet (Claude): Au lendemain du forum, si vous me permettez, est-ce que vous pensez que les habitants de ce Québec se sentiront davantage Québécois?
M. Perreault: L'enjeu, ce n'est pas nécessairement qu'ils se sentent davantage québécois, je ne pense pas que le document pose le débat dans ces termes. Le document pose le débat dans les termes suivants: à partir du moment où... comment définir notre vouloir vivre ensemble. Parce que je pense que, comme État et comme société, il est normal de nous poser la question: Quelle est la qualité de notre vouloir vivre ensemble? Quel est l'état de notre vouloir vivre ensemble? Qu'est-ce qu'on doit faire pour améliorer cette volonté de vouloir vivre ensemble? Quels sont les gestes à poser pour y arriver? Et évidemment, c'est vouloir vivre ensemble dans un État qui s'appelle le Québec, tel qu'il est, qui a des institutions, qui n'est pas un no-man's land, qui n'est pas déconnecté ni de l'histoire ni de la réalité puis qui a des débats qui ne sont pas non plus terminés sur certaines questions, bien sûr. Mais, je veux dire, ça, ça fait partie de notre réalité. Mais c'est quoi, la qualité de ce vouloir vivre ensemble, et puis c'est quoi, les conditions qu'on doit se donner, encore une fois, pour qu'on ait toujours une société plus juste, plus égalitaire, plus démocratique, où tous les citoyens sont dans le coup.
Et c'est dans ce sens-là, par exemple, que le document dit: Pendant longtemps, puisqu'on a parlé d'immigration, on a parlé dans les années quatre-vingt-dix d'une espèce de contrat moral, par rapport à l'immigrant, qui, reconnaissant la volonté de la société québécoise de choisir le français comme langue publique commune... on avait parlé d'une espèce de contrat moral. Là, on dit: Il faut même aller plus loin, on parle d'un contrat civique. Alors, qu'est-ce qu'on veut dire? Ce qu'on veut dire, c'est qu'il faut interpeller tant la personne nouvelle arrivante que la société d'accueil sur la volonté réelle de comprendre, comme immigrant, cette société d'accueil, puis, pour la société d'accueil, sa volonté réelle de faire une place, d'intégrer. Il y a une interpellation qui est faite aux deux. Et, de ce point de vue là, il y a des choses dans notre société qui sont à changer.
M. Grant (John): Dernière en français, François.
M. Cardinal (François): M. Perreault, tout à l'heure vous faisiez mention de deux points que le gouvernement a avancés avant même que le Forum se tienne, alors que ça aurait pu être débattu au Forum. Mais là je lis, ici: proposer une politique de développement rural, aussi, qui est quelque chose qui, en fait, tarde à être déposé et devrait l'être très prochainement. Est-ce qu'on n'a pas justement mis la charrue devant les boeufs?
M. Perreault: Bien, écoutez, il n'y a pas, dans la vie d'un gouvernement, un moment donné, là, où tous les dossiers arrivent exactement au même point, à tel point, les uns après les autres, dans un ordre absolument prédéterminé; la réalité est beaucoup plus complexe que celle-là. C'est clair que ce genre de réflexion rejoint d'autres réflexions. Encore une fois, c'est un sujet complexe dont les multiples facettes peuvent en soi, chacune, faire l'objet d'un débat, et puis il y a d'autres ministères qui, compte tenu de leurs approches, peuvent développer une des facettes plutôt qu'une autre.
Nous, ici, on le pose plus sous l'angle de la citoyenneté et de l'intégration, mais vous avez raison, par exemple, la situation actuellement du décrochage de certains villages ruraux par rapport à la réalité québécoise interpelle le gouvernement. Et on pourra, à la limite, peut-être qu'il y aura des gens à ce Forum – je pense entre autres qu'il y a des représentants des régions et de l'UPA – qui voudront mettre l'accent sur cette dimension des choses.
Mais, encore une fois, c'est un sujet parapluie qui fait le tour, qui a plusieurs facettes, et moi, donc, je ne serais pas étonné, dans ce Forum, avec 450 participants, qu'il y ait bien des façons de réfléchir à cette question.
Le gouvernement en a mis une de l'avant qui tiendra compte de sa compréhension des institutions publiques, mais ce n'est pas la seule, et puis, même, à la limite, des gens pourront avoir une vision différente. Je pense que le mérite de la position du gouvernement, c'est qu'elle replace la citoyenneté et elle l'enracine dans l'histoire et dans les institutions, mais il peut y avoir d'autres approches aussi. Encore une fois, pour moi, l'enjeu de ce Forum, c'est plutôt de voir, je le redis: Quelle est cette volonté de vivre ensemble, ce vouloir de vivre ensemble, quel est le jugement qu'on porte sur sa qualité, et quels gestes qu'on doit poser pour faire en sorte qu'on reste toujours, là-dessus, vigilant, déterminé. Moi, c'est pour moi l'enjeu.
M. Grant (John): Kevin Dougherty.
M. Dougherty (Kevin): In English?
M. Grant (John): Yes.
M. Dougherty (Kevin): First of all, I'd like to say that someone else referred to The Gazette , you can read substantially the same things in Le Devoir this morning as well ont the (?) page, so we shouldn't single out The Gazette .
M. Perreault: I read both of them.
M. Dougherty (Kevin): As for my question, you said that you're already done taking tour of the measures that would have come out of this, so why do you have to have this exercise? And where are you going with this? Do you want... my other colleague already talked about Canadian Citizenship, is it the ultimate idea to replace Canadian Citizenship with Québec Citizenship?
M. Perreault: Well, you have to know that we used to have what we call the «Semaine nationale de la citoyenneté au Québec» and this fall we decided to postpone it because we do have this Forum this year. It's not new that we... I mean, I'm minister of what is called «Relations avec les citoyens et Immigration», probably there is not such a minister in any other province in Canada, there may be some historical reason, maybe, I don't know, I let you with the question. And, in fact, we think that it's just normal that we... Well, anyway, there is an interest. Proof that we have more than 450 inscriptions and we have to refuse people. So there is interest. So maybe that's... It's because probably that is a question who do interest many people, many organizations in Québec. So let's discuss about that, let's talk about it and, mainly, let's see what can be done to improve the situation so that every Quebeckers will understand that they are all real Quebeckers.
M. Grant (John): Stuart Greer.
M. Greer (Stuart): A technical question. How much is this forum gonna cost? What's about your forum...
M. Perreault: It's something around $200 000... $200 000, yeah? Une voix: ...
M. Perreault: A little bit more than that. Usually, we have a budget for the weekly... annual Semaine des citoyennetés at about $400 000. So we, as I said before, have decided to replace it this year with this event.
M. Greer (Stuart): Going back to the question my colleague, talking about identifying with Québec citizenship over, let's say Canadian citizenship. You talked in french about looking for a common front of cohesion coming out of this forum. What do you mean by that and why would such a cohesion or a common front be so important?
M. Perreault: Well, as I said before, any society, any state – and I think Québec is a society, there is a state, we are 7 million people living here – has to be aware about cohesion and mostly about what can be done so that every citizen is feeling that he's a real part of this society and that he has his real place. So that there won't be two different types of citizens. And so, that's the main goal of this forum, is to discuss about that and the way that we can improve the situation.
M. Greer (Stuart): Just a follow-up on that. A lot of immigrants and allophones identify more with Canadian citizenship than with Quebecker citizenship. Do you find that's a problem that you have to deal with, your government has to deal with?
M. Perreault: I would say that the problem would be if they don't feel like they also Quebeckers. I can understand, personally, my own political view for the future of Québec are well known but what we have to be sure, I think that's in our interest, all of us, is to be sure that even though many people feel many or different «appartenance» – also it's in English...
Une voix: This is.
M. Perreault: ...yes, well, one of them should be Québec for sure, because they are part of this society.
M. Grant (John): Cheryl Grossman.
Mme Grossman (Cheryl): What concretely do you want to come out of this forum? I know you want people feel more in touch with their Québec identity. What concretely do you want them?
M. Perreault: Well, concrete proposals so that we can build an action plan for the Québec government, will come in few months with different measures that will be identified by all those people who are already in the field, in contact with those realities.
Mme Grossman (Cheryl): So, what does I read on page 17 of this booklet, you are talking about tension between canadian citizenship and Québec citizenship. What does this is have to do with any of the concrete proposals that you are looking at?
M. Perreault: Well, this is the first part of the document which is looking at the situation about the concept. Well, I think that it is just the reality.
Mme Grossman (Cheryl): What is the purpose of that, though in this forum, discussing this kind of things?
M. Perreault: You are referring to the place where we say that there are two different models of integration that are proposed here to the new immigrants.
Mme Grossman (Cheryl): I'm talking about a talk of the Constitution and how... M. Perreault: And that's the reality. No?
Mme Grossman (Cheryl): Right. Yes. But a lot of people are, like you read in the paper, in The Gazette , and in Le Devoir people are saying, this and they are pointing this specifically that this is part of a PR blitz. What's your reaction to that?
M. Perreault: I saw the paper from ...(?) from the Canadian Institute at McGill and from some other people. Well I can understand that people may have different point of view about the future of Québec, as I said before, my personal options are very clear. My understanding of what would be the best is very well known. But I have to repeat that this document is a document that any Québec government would have been able to release.
M. Grant (John): Peter Armstrong.
M. Armstrong (Peter): There is a sentiment among English minority groups in Québec that issues of, you know, citizenship and integration especially are loaded here. You know, it's a loaded issue. Do you feel that at all and specially in step...
M. Perreault: What do you mean by «loaded issue»?
M. Armstrong (Peter): It's more to attend just the integration, the nationalist aspect of it, the sovereignist aspect of it. It's not just a simple debate of how to get more people to Québec, it's how to make people feel more Québécois.
M. Perreault: I think that's one of the... I think that people who are living in Québec are Québécois. As I said before, there is, here, an history, there are institutions, there is a Government, there is a National Assembly, and every parties from both parts of the Assembly do recognize that. So, it's normal that, in this document, we discuss about what is our responsibility, and it's about the relation between the Québec citizens and their Government and their institutions and what we have to do here, in Québec, to improve the situation.
M. Grant (John): If everybody has finished, if I can for a minute, I have myself a question.
M. Perreault: Yes.
M. Grant (John): Is it possible to promote what you call citizenship without promoting what most people understand as patriotism?
M. Perreault: Well, it would be an interesting maybe topic during this Forum. Personally, I think that citizenship is something that is more universal, and I think it's more inclusive, and I think that if you read correctly the document, you will find it. C'est beau?
M. Grant (John): Merci beaucoup.
Mme Lessard (Véronique): M. le ministre, une dernière peut-être. Vous êtes aussi député de Mercier.
M. Perreault: Oui.
Mme Lessard (Véronique): Que penser de cet avis du Conseil de la langue française au sujet des raisons sociales des commerces qui les exclura de se plier à l'affichage?
M. Perreault: Vous parlez d'un avis récent de l'Office?
Mme Lessard (Véronique): Bien, ça va être publié le mois prochain, je crois. En tout cas, peu importe, l'histoire de Second Cup.
M. Perreault: O.K. Honnêtement, je n'ai pas pris connaissance de l'avis. J'en prendrai connaissance dans le détail, là. Je n'en ai pas pris connaissance, j'étais occupé par d'autres affaires, là. Mais donc, vous parlez de... L'avis porte sur...
Mme Lessard (Véronique): Bien, ne bougez pas, là, je vais vous aider.
M. Delisle (Norman): L'obligation des raisons sociales d'avoir un nom en français.
M. Perreault: Ah, O.K.
M. Delisle (Norman): Ça va être abandonné, semble-t-il.
M. Perreault: O.K. Ça va être abandonné?
M. Delisle (Norman): On va plutôt chercher de manière, comment dire, à les convaincre et non pas à les obliger.
M. Perreault: Oui, parce que les raisons sociales, on est dans un domaine assez international, hein. J'avoue que, honnêtement, là, ce n'est pas un sujet sur lequel j'ai vraiment eu l'occasion de me pencher. Il y en a bien d'autres, par rapport à la langue française, dont je pourrais parler, mais celui-là, ce n'est pas...
Mme Lessard (Véronique): Oui, mais il y a des commerçants chinois qui ont dû se soustraire à la loi, et là, maintenant, il y en a des plus gros qui ne devront pas le faire. Est-ce qu'il y aura des changements, vous pensez?
M. Perreault: Écoutez, honnêtement, je n'ai vraiment pas eu l'occasion de me pencher là-dessus, j'ignore quelle est la réflexion qui est à la base, la problématique. Je vais en prendre connaissance.
Merci.
(Fin à 11 h 39)