(Neuf heures trente-six minutes)
M. Fournier : Alors, je
vais vous parler un peu des développements, là, concernant le dossier de la
vente de La Presse. Vous avez vu ce qu'on voit dans les médias présentement
et, bon, la sortie publique qu'a faite La Presse sur la nouvelle
structure qu'ils veulent se donner, mais cette nouvelle structure passe par une
vente de La Presse. Alors, même si on n'est pas trop au courant, je
veux quand même vous dire que c'est un cas d'exception. La Presse,
pour être vendue, doit avoir une autorisation législative qui date d'un
testament de 1913. La dernière loi privée qui a été faite sur le sujet était en
1967, tant et si bien que, pour faire sa transformation, La Presse
a besoin d'une nouvelle loi. Normalement, pour changer une loi
privée... on a une loi privée, mais les délais de publication et l'ensemble des
étapes pour une loi privée sont très longs, et, s'il fallait les suivre, bien,
ça serait à l'automne seulement que se ferait cette transformation-là. La Presse
demande s'il est possible d'y procéder plus rapidement, auquel cas ce
serait par une loi publique. Et nous avons indiqué que nous serions disposés à
le faire si les autres partis et les députés indépendants étaient d'accord pour
le faire.
Alors, ce matin, j'ai écrit à... et, sans
vouloir parler pour tous les autres, je crois savoir que La Presse
a parlé aux différents partis politiques de l'Assemblée. Alors, ce matin,
j'ai... je viens d'écrire, en fait, à mes collègues des différentes formations
ainsi que les députés indépendants, ce qu'on fait toujours dans l'ensemble de
nos processus parlementaires, pour leur indiquer que, s'ils sont d'accord avec
un projet de loi qui vise simplement à enlever l'obligation législative de
vente ou, autrement dit, d'exercer pour la dernière fois une autorisation à
l'égard de la vente, s'ils sont d'accord avec ça, on pourrait procéder avec une
étude et une adoption du projet de loi le jour même, qu'en vertu d'une
obligation de transparence on pourrait se donner une journée, soit la veille ou
quelques jours avant cette journée d'adoption, une consultation particulière
où, évidemment, on pourrait recevoir les propriétaires de La Presse,
le syndicat, enfin les personnes directement concernées par la vente, pour
entendre leur point de vue.
Alors, je leur ai indiqué que je
souhaitais savoir au cours de la journée quelle était leur position. S'ils
veulent me dire qu'ils vont me le donner demain, on peut attendre à demain, on
n'est pas à des... ce n'est pas des ultimatums, c'est simplement pour pouvoir
se gouverner et savoir comment on pourrait prévoir la chose pour La Presse.
Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas de
faire un projet de loi pour faire des nouvelles règles de financement pour La Presse
ou intervenir dans des règles fédérales, c'est simplement l'obligation qu'a La Presse,
que n'ont pas les autres. Parce que mon souvenir... par exemple, pour Le Soleil,
et, je crois, il y a d'autres journaux qui ont été vendus dernièrement, puis il
n'y a pas eu de loi à l'Assemblée nationale, là. Alors, eux, ils sont pris avec
une obligation particulière, et donc, pour les mettre dans la même situation
que tous les autres, on procéderait à une dernière autorisation législative
avant des futures ventes par la suite.
Alors, voilà où on en est. Là, je sais qu'il
y avait quelques-uns d'entre vous qui posaient des questions sur le processus.
Alors, on va attendre d'avoir les réponses des autres partis et on pourra vous
en dire plus par la suite.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Est-ce que c'est des gens à La Presse
qui vous ont demandé de faire ça? Dans le fond, là, cette initiative-là…
M. Fournier : Les communications
que j'ai avec La Presse sont à l'effet… Parce que, quand on a été
avisés de leurs intentions, bien, évidemment, c'est eux-mêmes qui nous ont dit qu'il
y avait une loi privée qui les concernait, là. Nous, on ne passe pas nos
journées à lire des lois privées de 1967. Alors, quand on a été avisés de ça,
on a dit : Bon, bien, très bien, mais il va falloir que vous ayez l'aide
des partis d'opposition, vous devez leur parler.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : À quel moment La Presse vous a avisés?
M. Fournier : J'ai parlé
avec M. Crevier, la fin de la semaine dernière, et il m'a annoncé que,
mardi de cette semaine, il allait faire des annonces.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Avant ça, vous ne lui aviez pas parlé?
M. Fournier : J'ai parlé
à M. Crevier, je crois, jeudi dernier. C'est peut-être vendredi, là, mais…
M. Bellerose (Patrick) :
Vous n'aviez eu aucun contact sur l'avenir de La Presse dans les
mois précédents?
M. Fournier : Non. Bien,
honnêtement, là, moi, mon implication commence jeudi dernier quand
M. Crevier me dit qu'est-ce qui va arriver bientôt, là. En lisant les
journaux, je comprends que ça fait un bout de temps qu'ils y pensent, mais je
ne pense pas que c'était… leur première réflexion était sur la question législative,
là, j'imagine, là. Je pense qu'ils ont d'autres choses à penser que ça. Mais moi,
j'interviens sur la question de la loi privée, en fait.
M. Bellerose (Patrick) :
Mais pourquoi c'est urgent de faire ça avant la fin de la session plutôt qu'au
prochain mandat?
M. Fournier : Honnêtement,
ça peut être une loi privée à l'automne, là. Si vous me demandez à moi personnellement,
là, j'ai beaucoup d'autres lois.
M. Bellerose (Patrick) :
Mais là vous êtes prêt à accélérer son processus. Pourquoi est-ce que c'est
pertinent ou urgent?
M. Fournier :
La Presse
nous demande si on est en mesure d'accélérer le pas. J'ai dit : La seule
possibilité, c'est que j'aie un consentement des autres partis et qu'on le
règle en une journée, un, deux, trois. Je ne suis pas là pour empêcher La Presse.
Si je peux faciliter, ça va, mais je ne peux pas faciliter seul, à cette étape
de nos travaux. Si vous voulez, je peux vous reparler de la date du
15 mai, là, pour vous expliquer ce que ça veut dire pour vrai, mais il est
clair que j'ai besoin de l'autorisation de tout le monde.
M. Bellerose (Patrick) :
Est-ce que La Presse vous a expliqué pourquoi elle souhaite aller
rapidement?
M. Fournier : Bien, je
comprends que c'est une question de décision qui est prise, puis à partir de ce
moment-là ils veulent la mettre à l'effet. Je vais leur laisser eux-mêmes
répondre à la question, ça les concerne, c'est leurs intérêts. Moi, je suis là
en termes de leader pour voir comment on peut favoriser une décision qui, si
elle était commune et unanime, puisse être prise rapidement.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Avez-vous des exigences sur la transparence de la
nouvelle structure, sur sa…
M. Fournier : Dans mon
cas à moi, là... puis j'applique un peu la logique, d'ailleurs, que les collègues
M. Lisée, M. Legault et, je pense, M. Nadeau-Dubois, je pense
que c'est lui qui a commenté pour QS... qui indiquaient que... et ils étaient
dans une étape autre que la vente, là, ils disaient que La Presse
devrait avoir les mêmes droits, mêmes obligations et pas plus que tous les
autres, que tous les médias devraient être dans la même situation d'égalité, si
on veut. Et moi, à l'égard de ce qui nous est demandé, je ne suis pas en train
de faire un régime de financement de La Presse, c'est simplement un
régime de vente. Et tous les autres médias peuvent être vendus sans passer par
la loi, donc c'est ce régime... Moi, je m'intéresse à la question de l'égalité
de situation pour LaPresse, qui découle, dans son cas,
d'une loi privée qui, aujourd'hui, n'est plus...
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Mais pourtant, en devenant un OBNL, la direction
reste exactement la même, personne n'a annoncé une démission. Est-ce que vous
souhaitez connaître la structure, quand même, avant de leur donner le O.K.?
M. Fournier : Je n'ai pas
de commentaire à faire sur... Moi, je n'ai pas à intervenir dans la structure,
comme je n'interviens pas dans la structure lorsque Le Soleil a été
vendu. L'institution qu'est l'Assemblée nationale n'a pas, selon la loi privée,
à faire cela. Elle a à autoriser, selon la loi privée qui existe, une vente.
Or, en ce moment, LaPresse est dans une situation que les
autres n'ont pas, une obligation supplémentaire, et, à ce stade-là, si c'est le
consentement de tous les membres de l'Assemblée, on est prêts à y procéder.
Mais c'est simplement pour les mettre dans la même situation que les autres, en
fait.
M. Croteau (Martin) : M. Lisée
souhaitait une commission parlementaire sur cette question. Est-ce qu'il est
possible de satisfaire cette exigence-là?
M. Fournier : C'est ce
que j'ai dit tantôt, c'est-à-dire que je suis d'accord pour qu'on puisse avoir
une journée de consultations pour entendre... qui précéderait. Mais, avant de
tenir cette journée-là, il est important pour nous de savoir si on est tous
d'accord pour qu'il y ait autorisation à lever, là, l'obligation législative,
là, à l'égard de la vente, qui est une condition ou une restriction que LaPresse
a et que les autres médias n'ont pas, donc pour les mettre dans la même situation
que tous les autres. Si tout le monde s'entend là-dessus, on va être en mesure
de tenir une journée pour entendre toutes les parties et ensuite procéder, en
une journée, à tout l'ensemble des étapes.
M. Bellerose (Patrick) :
Vous avez été très critique du rôle de M. Péladeau, qui est à la fois
actif en politique et propriétaire de presse. Qu'est-ce qui fait que ce double
rôle là est acceptable pour M. Taillefer?
M. Fournier : Là, on
change de sujet?
M. Bellerose (Patrick) :
Oui.
M. Fournier : Dans le cas
de M. Taillefer, il ne sollicite pas un poste électif ni à l'Assemblée ni
au gouvernement. Pour le reste, je ne voudrais pas commencer à faire des commentaires
à l'égard de propriétaires de médias lorsque je parle de médias sur un autre
sujet.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Votre chef, à l'époque, avait parlé de l'importance
de prendre des précautions. Est-ce que vous en avez pris avant d'accepter que
M. Taillefer se joigne à votre équipe?
M. Fournier : Je ne peux
pas commenter la question sur cet aspect-là. Je n'ai pas de discussion avec M. Taillefer,
ça ne relève pas de ma responsabilité. Là, il n'est pas au gouvernement puis il
ne sollicite pas de poste électif.
M. Bellerose (Patrick) :
Ça serait important de prendre des précautions, genre, pour éviter que M. Taillefer
utilise ses médias pour influencer l'électorat?
M. Fournier : À ce que
je... Je ne veux pas faire de commentaire là-dessus, surtout ce matin, lorsque
je vous parle d'un média en particulier. Je ne voudrais surtout pas commencer à
commenter les médias.
Mme Prince (Véronique) :
Mais, M. Fournier, au-delà des médias, là, c'est quelqu'un qui a le bras
long, comme on dit, là, parce qu'il est impliqué dans des grappes industrielles
sur les véhicules intelligents, il est sur des conseils d'administration, il
est aussi avec Téo Taxi. Donc, son implication et sa relation avec le
gouvernement font en sorte qu'il y a quand même une certaine proximité de ses
affaires et de sa nouvelle position. Alors, quelles sont, justement, les
précautions qu'il devrait prendre? Il n'y a pas un conflit d'intérêts possible?
M. Fournier : Bien, son
conflit d'intérêts, c'est de devenir membre du Parti libéral du Québec. Alors,
les gens qui deviennent membres du Parti libéral du Québec, je ne pense pas qu'ils
mettent leurs fonds en fiducie sans droit de regard, là. Il ne devient pas
député, il ne devient pas ministre, il ne devient pas… dans le gouvernement, il
ne devient pas président d'Hydro-Québec, là.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Mais il a accès à des informations privilégiées. C'est
un lobbyiste, M. Taillefer, puis tout à coup il va avoir accès à des
informations privilégiées.
M. Fournier : Je ne sais
pas à quoi vous faites référence, là, pour être franc, là.
M. Bellerose (Patrick) :
Êtes-vous en train de dire que le rôle de M. Taillefer n'a aucune
influence dans la réaction de M. Couillard?
M. Fournier : Je ne
comprends pas votre question.
M. Bellerose (Patrick) : Bien,
vous semblez dire que c'est un simple militant. Son rôle a une influence, une importance?
M. Fournier : Bien, c'est
un militant dont on est très fiers qu'il vienne s'associer à nous, comme on
veut toujours qu'il y ait le plus de monde dans notre parti. Mais je ne
comprends pas qu'on lui demande de s'astreindre à des obligations comme s'il
était membre du gouvernement, alors que ce que j'entends, c'est que c'est le
président d'une campagne électorale d'un parti politique. Alors, s'il fallait
que tous ceux qui font de la politique maintenant répondent à des conditions
qui sont, par exemple, celles auxquelles moi, je suis astreint, je crois qu'on
peut dire qu'il n'y aurait plus de véhicules politiques, là.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Mais reconnaissez-vous qu'il va avoir accès à des
informations privilégiées?
M. Fournier : Non, je ne
peux pas reconnaître ça. Franchement, je ne sais pas comment vous pouvez,
vous-même, dire ça.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, si M. Taillefer…
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Bien, vous ne nous donnez pas accès, je veux dire…
M. Fournier : Pardon?
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : À ce que je sache, nous, les journalistes, on n'a
pas accès à ce à quoi M. Taillefer va avoir accès.
M. Fournier : Bien, je… Bien
là, vous prétendez qu'il va avoir accès à des choses. Je ne le sais pas, là.
Honnêtement, je ne connais pas ce à quoi il va avoir accès. Il va être membre
de l'équipe de campagne, il n'est pas membre du gouvernement, il ne siège pas
au Conseil des ministres.
M. Bellerose (Patrick) :
Donc, si M. Taillefer fait le saut en politique… Si M. Taillefer…
M. Fournier : J'essaie de
vous… J'essaie de comprendre. Franchement, vous me perdez.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Bien, je veux dire, il va être assis avec vous, il
va participer à des réunions avec le premier ministre, il va être au courant de
la stratégie du parti. Ce n'est pas pour rien qu'il n'y a pas de journalistes
dans ces réunions-là. Est-ce que vous reconnaissez qu'il va avoir accès à des
informations privilégiées?
M. Fournier : Du
gouvernement? Absolument pas.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Sur les orientations du parti, sur la stratégie?
M. Fournier : Ah! du
parti? Bien oui, le parti, mais, vous savez, admettons qu'on ne voit pas son
nom comme président de campagne, mais qu'il est membre puis qu'il vient au
parti politique, me posez-vous la même question? Venez dans nos réunions, là,
il y a plein de personnes dans nos réunions, là, de tous genres. Ça ne sera pas
différent.
Mme Sioui
(Marie-Michèle) : Mais est-ce que M. Taillefer va avoir accès au
caucus? Est-ce qu'il va avoir accès à des conseils des ministres avant la fin
de la session?
M. Fournier : Bien non.
Bien, il n'est pas membre du gouvernement. Votre question a de l'air à dire qu'il
vient d'être membre du gouvernement. Il n'est pas président d'Hydro-Québec, il
n'est pas… il est président de campagne de parti politique, alors…
Mme Prince (Véronique) :
Vous n'auriez pas eu besoin de lui davantage comme candidat que comme président
de campagne?
M. Fournier : Ah! écoutez,
là, je vais… Moi, je suis ici comme leader, mes responsabilités sont limitées,
je ne suis pas capable de répondre à toutes les hypothèses que vous me
soumettez. J'aimerais…
Mme Prince (Véronique) :
Mais vous êtes très impliqué dans une campagne électorale, vous allez
travailler côte à côte avec lui, là, tu sais.
M. Fournier : Oui, mais
l'autobus n'est pas encore parti.
Mme Prince (Véronique) :
Il ne vous aurait pas été plus utile comme candidat?
M. Fournier :
L'autobus n'est pas encore parti. Et moi, je vous quitte à l'instant même.
Merci beaucoup de votre venue ce matin.
M. Bellerose
(Patrick) : ...M. Taillefer fera le saut en politique…
M. Fournier :
Vous poserez les questions à ce moment-là, et surtout à lui, j'imagine.
(Fin à 9 h 48)