(Neuf heures cinquante-quatre minutes)
Le Modérateur
: On va
continuer avec la période de questions. Patrick Bellerose, Journal de Québec.
M. Bellerose (Patrick) :
Mme Massé?
Mme Massé : Oui.
M. Bellerose (Patrick) :
Oui. Donc, on voit que M. Marissal se dit à l'aise avec le fait qu'un
policier porte un turban, pourtant ce n'est pas la position de votre parti.
Est-ce que M. Marissal n'est pas en phase avec les positions de votre
parti?
Mme Massé : Bien, absolument
pas. M. Marissal l'a dit qu'il défend tout à fait ce nécessaire compromis
politique au Québec si on veut être capables de tourner la page. Alors, ce que
lui ressent personnellement quand il dit «moi, ça ne me dérangerait pas» versus
le positionnement politique nécessaire pour faire avancer et tourner la page de
ce débat-là, c'est deux choses, et M. Marissal est totalement en phase
avec la position de Québec solidaire.
M. Bellerose (Patrick) :
M. Marissal a été magasiner une job au PLC. Maintenant, sur la question du
turban, il y a une dissension. Il y a Mme Torres aussi qui a défendu… en
fait, qui se bat contre le projet de loi n° 62 en cour. Est-ce que c'est
normal que vos candidats ne soient pas en phase avec votre programme?
Mme Massé : Bien,
là-dessus, ce que je vous dirais, c'est : Mme Torres aussi considère
clairement que, dans le débat politique actuel, Bouchard-Taylor, c'est le compromis,
on parle d'un compromis, et c'est vrai pour plusieurs acteurs à Québec
solidaire. Mais, notre position, elle la défend, elle est totalement d'accord
que Québec solidaire porte haut et fort ce compromis qui permettra au Québec
enfin de tourner la page et d'aller sur d'autres enjeux de fond, comme nos
ressources naturelles, comme l'éducation, comme la santé. Alors, moi, je pense
que tout le monde ici, là, est clair, on s'en va dans le même sens. Bouchard-Taylor,
c'est le minimum, c'est le compromis, et on veut y arriver le plus rapidement
possible pour passer à un autre appel.
M. Bellerose (Patrick) :
Juste une dernière sur M. Marissal. Êtes-vous convaincue que M. Marissal
est un souverainiste?
Mme Massé : Bien, c'est
ce qu'il nous a dit, non? C'est-à-dire que… Savez-vous, la beauté de Québec…
M. Bellerose (Patrick) :
…travailler pour le PLC, donc…
Mme Massé : Oui, non,
mais la beauté de… Est-ce que M. Marissal a dit qu'il était fédéraliste?
La beauté de Québec solidaire, là, c'est qu'on n'essaie pas de juste parler aux
convaincus, on parle largement avec les gens. Et je pense que M. Marissal
vous a dit, nous a dit — et on est avec lui là-dessus — que
la vision de Québec solidaire de la souveraineté, le processus qui nous amènera
là, il y croit. Et un jour on va y arriver, avec lui.
M. Lacroix (Louis) :
Bonjour, Mme Massé. Mais justement, sur le même thème, sur le processus,
il a aussi dit, en entrevue à CBC avec M. Finnerty la semaine dernière,
qu'en fait il ne fallait pas trop s'inquiéter avec le processus d'accession à
la souveraineté parce que Québec solidaire ne sera pas élu à la prochaine
élection, ça fait que, donc, il n'y a pas de presse, en tant que tel.
Mme Massé : Bien,
écoutez, il n'y a pas de presse... C'est-à-dire, Québec solidaire marche dans
le même sens depuis 12 ans, et on va continuer. Est-ce que c'est la prochaine
élection qu'on va prendre le pouvoir? Est-ce que c'est dans deux élections? Je
ne le sais pas. Mais ce que je sais, c'est que le premier geste que va poser Québec
solidaire, c'est de faire élire l'assemblée constituante pour nous assurer de
mettre le Québec en marche vers l'indépendance du Québec, et ça, bien, tous les
candidats de Québec solidaire trouvent ça tripant puis moi aussi.
M. Lacroix (Louis) :
Mais M. Marissal a dit qu'il fallait être réalistes, là, que Québec
solidaire ne serait pas élu à la prochaine élection. Est-ce que vous êtes de
cet avis-là? Est-ce qu'à votre avis Québec solidaire a des chances d'être élu
comme gouvernement à la prochaine élection?
Mme Massé : Québec
solidaire va faire son travail, Québec solidaire fait, depuis toujours, son
travail, et les gens ont l'opportunité d'entendre parler de nous, de notre
façon de vouloir changer le Québec. Et ça, est-ce que ça pourrait nous porter
au pouvoir? Oui, si les gens le décident. Est-ce que ça va le faire? Bien, ça,
c'est au monde de le décider.
Le Modérateur
: Alain
Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain) :
Vous avez dit : On ne parle pas juste aux convaincus. Est-ce que M. Marissal
est convaincu?
Mme Massé : Bien, M. Marrissal
est totalement avec Québec solidaire sur la question de la souveraineté et de
sa démarche. Alors, je pense que, oui, il est convaincu, sinon il ne serait pas
là, il n'aurait pas fait ce choix-là.
M. Laforest (Alain) : M. Lisée
y est allé d'une nouvelle proposition, là, en disant qu'il ferait un projet de
loi sur la laïcité. Vous venez de parler de Bouchard-Taylor, donc on comprend
que vous vous rapprochez de la position du Parti québécois, là.
Mme Massé : Je vous
rappellerais que c'est peut-être eux autres qui se rapprochent enfin de ce
compromis-là. Mais ils rajoutent une petite coche qui fait que ce n'est pas le
compromis Bouchard-Taylor. Et ça, si M. Lisée est sérieux, il va falloir,
à un moment donné, qu'il lâche du lest, comme à Québec solidaire on lâche du
lest, parce que c'est ça, un compromis, et il faut le faire parce qu'il y a une
multitude de gens qui, actuellement, au Québec, souffrent de l'absence du
compromis politique qu'il faut faire en matière de laïcité de l'État.
M. Laforest (Alain) :
C'est quoi, le lest? Pouvez-vous être plus explicite là-dessus? Qu'est-ce qui
vous dérange dans ce qu'il propose, là?
Mme Massé : Bien, par exemple,
qu'au niveau des services de garde on interdise les personnes qui portent... et,
dans le cas du Parti québécois, on le sait, c'est qui portent le hidjab, de
pouvoir offrir les services en service de garde. Nous, à Québec solidaire, on
dit : Ces gens-là ne sont pas en position de coercition, ils ne
représentent pas l'État, même si c'est un service public, alors on dit :
Arrêtons de mêler les choses, et voilà pourquoi il faut retourner à Bouchard-Taylor.
M. Laforest (Alain) : La
clause ancêtre, ce n'est pas assez pour vous, là?
Mme Massé : Bien là, si
vous dites : Dans le temps, c'était correct, puis à cette heure ce n'est
plus correct, bien, voyons donc!
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Reconnaissez-vous qu'il y a un désaccord entre Mme Torres et vous sur la
prestation et la réception des services à visage découvert?
Mme Massé : Bien, à Québec
solidaire, là, ce n'est pas monolithique, le monde ne pense pas tous exactement
pareil la même chose. C'est un débat qui anime nos sociétés, c'est un débat qui
anime nos réflexions. Et je pense que, Québec solidaire, la position de Québec
solidaire a été claire : pour nous, la prestation de services à visage
découvert, c'est fondamental. Alors donc, est-ce qu'il y a des... Est-ce
qu'elle se rallie à notre position? La réponse, c'est oui, puisqu'elle brigue
le poste de candidate dans Outremont... Outremont... c'est quoi le...
Une voix
: Mont-Royal.
Mme Massé : ...Mont-Royal,
merci.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Donc, vous dites qu'aujourd'hui elle est pour la prestation, la réception de
services à visage découvert, en plus de souscrire aux recommandations du rapport
Bouchard-Taylor que vous avez intégrées dans votre programme, c'est ça que vous
dites?
Mme Massé : Écoutez, Mme Torres,
sur une base personnelle, a porté... a ébranlé un projet de loi qui était, entre
vous et moi, insoutenable, on n'a pas arrêté de le dire durant la commission
parlementaire. Mon collègue Gabriel est intervenu plusieurs fois en disant :
Ça ne tient pas la route. Ce que Mme Torres a fait par la voie juridique,
c'est aller démontrer que ça ne tenait pas la route.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que vous appuyez, vous, la démarche du Conseil national des musulmans du
Canada?
Mme Massé : Laquelle?
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Qui avait attaqué la loi n° 62.
Mme Massé : À Québec
solidaire, ce qu'on dit depuis toujours, c'est que, pour des raisons de
sécurité, identification, c'est important de découvrir le visage. Ça, c'est la
position de Québec solidaire. Moi, je ne connais pas de façon spécifique la
position du conseil, et, à ma connaissance, Mme Torres n'est pas une
représentante du conseil. Là, à un moment donné, il faut arrêter de mélanger
les poires puis les pommes, là. Quand tu es travailleuse, travailleur à quelque
part, bien, tu fais ce que ton boss te demande. Mais, quand tu te présentes
comme candidate à un parti politique, bien, tu adhères ou non, et Mme Torres
adhère à la vision de Québec solidaire.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Une dernière question. Là, la semaine dernière, on croyait voir un fédéraliste
qui joint les rangs de Québec solidaire, quelqu'un qui ne souscrit pas, à
première vue, aux recommandations de la commission Bouchard-Taylor, qui joint
Québec solidaire, alors que le programme de Québec solidaire est aux antipodes.
Comment expliquez-vous qu'il y ait ce sentiment-là que les gens vont joindre
Québec solidaire peut-être pour des grandes valeurs, mais pas nécessairement
parce qu'ils souscrivent au programme?
Mme Massé : Sincèrement,
est-ce que vous croyez que tous les membres d'un parti politique adhèrent à
100 % sur l'ensemble des propositions d'un parti politique? Moi, ce que je
vous dis, c'est qu'à Québec solidaire ce qu'on demande des gens qui aspirent à devenir
des candidats pour Québec solidaire, c'est d'adhérer à nos positions. Et ceci
étant dit, le droit de dissidence, à Québec solidaire, ça existe, ça s'exprime
dans un cadre défini par le parti, et ce n'est pas dramatique. Parce que les
blocs monolithiques, là, ce n'est pas vivant, puis de faire taire du monde qui
ne pense pas exactement comme toi, ce n'est pas l'expression d'une vie
démocratique saine. Alors, nous, c'est plutôt de se dire : Écoutez, la
réflexion, le doute, ça fait partie de la vie, et, si on s'en va dans le même
sens et si c'est dans ce sens-là, bien, venez-vous-en avec nous autres parce
qu'il y a de la job, puis pas rien que sur la question de la laïcité puis la
question de l'indépendance, il y a beaucoup de job à faire.
M. Croteau (Martin) :
Bonjour, Mme Massé. Qu'est-ce que ce droit à la dissidence laisse
entrevoir pour un parti qui aspire à gouverner? C'est-à-dire que ça pourrait
être imprévisible comme gouvernement, non?
Mme Massé : Non, je ne
pense pas parce que le droit à la dissidence, c'est dans notre fonctionnement
comme parti politique au niveau de notre cheminement, je dirais. Mais, à partir
du moment — puis nos membres vont débattre de ça dans un futur
rapproché — où on gouverne, l'objectif qu'on a mis au jeu, qui n'est
pas encore adopté par nos membres, par exemple, c'est que le Conseil des
ministres soit le lieu où les décisions se prennent à la majorité simple.
Alors, un coup que la décision est prise à la majorité simple, bien, tu
appliques la décision qui a été prise. Alors, moi, je pense qu'entre comment
Québec solidaire chemine sa démocratie pour permettre justement de se
rassembler autour d'un projet social, d'un projet politique comme celui de
Québec solidaire et Québec solidaire quand il va gouverner, on ne fera pas
copier-coller nos règles du jeu, là. On se comprend?
M. Croteau (Martin) :
Quand vous lisez les articles et les chroniques, les opinions, les textes qui
ont été publiés dans la dernière semaine, est-ce que vous trouvez que
M. Marissal a réussi sa rentrée en politique?
Mme Massé : Hi! je pense
qu'il a été barouetté, là, tabarnouche! Je le trouve fait fort. Il a été
barouetté parce que, dans les faits, ça démontre que Québec solidaire, on
commence à être pris au sérieux en tabarnouche parce que, quand tu barouettes
quelqu'un comme ça, là, tu es en train de dire que le parti, Québec solidaire,
est tellement crédible qu'on va se mettre à brasser la cage pas rien qu'à peu
près.
Votre question : Est-ce qu'il a
réussi sa rentrée politique?, en tout cas, moi, avoir été à sa place, je serais
un petit peu étourdie. Mais ceci étant dit, je dînais avec lui hier, et Vincent
n'est pas ébranlé dans sa conviction qu'il veut se mettre, avec Québec
solidaire, au service de la population du Québec.
M. Croteau (Martin) : Je
ne peux pas m'empêcher de noter que vous ne m'avez pas dit : Oui, il a
réussi sa rentrée politique.
Mme Massé : Bien,
excusez, ça, vous commencez à me connaître, hein, des fois, comment dire, je ne
vais pas direct au but, la conteuse en moi fait passer par toutes sortes de
buts. Mais, oui, il a réussi. Et pourquoi il a réussi? Parce que, une semaine
et demie plus tard, je pense que les mythes entourant M. Marissal, je
pense que les différents chemins qu'il a pris pour arriver à Québec solidaire
n'enlèvent en rien le choix qu'il a fait, c'est-à-dire de choisir Québec
solidaire comme véhicule pour se mettre au service de la population du Québec.
Et ça, pour moi, c'est une entrée réussie quand le Québec entier parle de toi.
M. Laforest (Alain) :
Est-ce que ça vous a déçue d'apprendre que, pendant toutes ses années de
chroniqueur, il n'avait pas une liberté de parole?
Mme Massé : Bien,
écoutez, déçue d'apprendre... Moi, je pense que j'ai, comme plusieurs d'entre
nous, lu souvent M. Marissal, j'ai... des chroniques je trouvais
tripantes, d'autres, je n'étais pas bien, bien de bonne humeur après lui. Comment
lui a exercé son métier, je pense que ça lui appartient, et...
M. Laforest (Alain) : Il
a quand même dit qu'il n'avait pas de liberté de parole. Est-ce que vous croyez
qu'il va s'astreindre à obtenir une liberté de parole à Québec solidaire ou il
va se restreindre encore?
Mme Massé : Bien, vous
pourrez lui poser la question éventuellement, parce que, honnêtement, moi, je
ne sens pas que ma parole est très restreinte.
M. Laforest (Alain) :
Mais je ne vous parle pas de vous, là, je vous parle de votre candidat vedette,
là.
Mme Massé : Non, mais
même comme co-porte-parole de Québec solidaire, je ne sens pas que ma parole
est restreinte, je sens que je fais partie d'un projet collectif. Alors, entre
faire partie d'un projet collectif comme Québec solidaire et être derrière sa
plume comme chroniqueur... en fait, vous verrez avec Vincent.
M. Lacroix (Louis) :
Mais pourquoi il n'est pas là, M. Marissal, justement? Parce qu'il me
semble que ça aurait été sa place, là, vous saviez qu'il allait y avoir des questions
sur la candidature de M. Marissal à la première journée de la reprise des
travaux parlementaires. Comment ça se fait? Ça n'aurait pas été opportun qu'il
soit à côté de vous?
Mme Massé :
Faites-vous-en pas, il va venir, il va venir.
M. Lacroix (Louis) :
Oui, mais pourquoi il n'est pas là? Pourquoi c'est vous qui êtes obligée de
défendre ses positions alors que lui aurait pu venir le faire?
Mme Massé : Écoutez, je
ne défends pas les positions de M. Marissal, je réponds à vos questions.
Si vous ne me poseriez pas de question là-dessus, je ne répondrais pas. Mais
soyez assuré que M. Marissal va venir, puisqu'il va venir appuyer l'équipe
parlementaire comme stratège aux affaires publiques et, dans ce sens-là, pas
comme employé, mais il sera possible de répondre à toutes vos questions comme
candidat... futur candidat dans Rosemont.
M. Lacroix (Louis) :
Mais quelle est la raison pour laquelle il n'est pas là aujourd'hui?
Mme Massé : Bien, c'est
juste... Écoutez, son contrat de travail, il ne commence pas aujourd'hui. Il
vit à Montréal, il n'est pas là, point barre, parce qu'il n'est pas là, pas
parce qu'on veut le cacher. Inquiétez-vous pas, ça va venir.
(Fin à 10 h 10)