(Quinze heures quinze minutes)
M. Bergeron : Alors,
bonjour. Nous sortons d'une interpellation de deux heures portant sur le manque
de vision du gouvernement par rapport aux familles de la Montérégie. Ce qu'on
constate au terme de ce deux heures de débat, c'est que ce manque de vision est
on ne peut plus flagrant devant l'absence de réponses qu'on a obtenue par
rapport à des problématiques touchant de près les citoyennes et les citoyens de
la Montérégie, qui est, je le rappelle, la deuxième plus importante sur le plan
du nombre d'habitants. C'est une région qui souffre d'un déficit structurel
historique d'infrastructures sur l'ensemble du territoire. On a développé
tardivement les services de santé et d'éducation supérieure, ainsi de suite,
dans cette région. Et, lorsqu'on veut avoir des réponses de la part de ce gouvernement
sur la vision qu'il a par rapport au rattrapage nécessaire dans la région de la
Montérégie, nous n'avons, à toutes fins utiles, pas de réponse, parce que les
familles, là, ça ne se limite pas qu'aux services de garde, et on en a parlé. Ça
passe également par les transports, ça passe par la santé, ça passe par… on a
parlé d'agriculture, également, parce les familles qui sont coincées dans la
circulation, des parents qui sont coincés dans la circulation, des gens qui
sont en attente à l'hôpital, des gens qui sont en attente de voir un médecin,
des gens qui sont en attente sur une liste pour des services de garde, c'est du
temps de moins passé à s'amuser, à prendre des repas, à faire des devoirs, et
ainsi de suite. Et, manifestement, on n'avait aucune réponse à nous donner sur l'ensemble
des problématiques.
Et, lorsqu'on évoque quelque chose d'aussi
simple que : Vous prévoyez un accroissement de congestion dans la région
métropolitaine et particulièrement en Montérégie pour les prochaines années,
quelles mesures de mitigation avez-vous prévues? Bien, on constate qu'il n'y a
aucune mesure de mitigation. On nous dit : Ça prend du temps, il faut
suivre les étapes, puis ça coûte cher. Donc, en d'autres termes, il n'y a
aucune vision et, plus que ça encore, il n'y a aucune intention de régler les
problèmes. On ne les a comme pas anticipés. Alors, les gens de la Montérégie
vivent déjà l'enfer au niveau de la congestion routière, c'est appelé à
s'accroître encore davantage au cours des prochaines années.
Alors, avec les libéraux, le message est
clair : Les familles sont condamnées à rester coincées dans le trafic,
coincées sur une liste d'attente pour l'hôpital, pour un médecin, pour des
services de garde. Et, avec la CAQ, ça n'annonce rien de mieux, loin de là.
Voilà.
Mme Lamarre : Merci.
Alors, bien, le manque de vision, ça se traduit beaucoup en santé en Montérégie
parce que, si dans l'ensemble du Québec, on a à peu près 79 % à 80 %
des gens qui ont un médecin de famille, en Montérégie, c'est encore beaucoup
moins que ça. Donc, il y a entre 26 % à 32 %, selon les trois
territoires de la Montérégie, où les gens n'ont pas de médecin de famille.
C'est vraiment difficile.
Il y a plusieurs raisons. Il y a beaucoup
de jeunes familles qui s'installent, puis en même temps on a aussi beaucoup de
résidences pour personnes âgées qui s'installent, qui se développent, qui se
construisent, et donc, quand on parle de manque de vision, je pense que c'est
ça qui ressort clairement. On n'a pas anticipé ces choses-là.
Alors, pour l'exercice de l'interpellation
aujourd'hui, je suis allée voir dans Index Santé, les gens peuvent aller voir,
c'est un index qui nous donne les temps d'attente à l'urgence. Et, aujourd'hui,
sur les huit hôpitaux de la Montérégie, il y en a six qui ont un taux
d'occupation sur civière de plus de 100 %, dont l'Hôpital Pierre-Boucher à
197 %, presque 200 %, et l'hôpital Anna-Laberge à 228 %. Et, à
Pierre-Boucher, on a 32 personnes qui sont sur civière depuis plus de 24 heures
et 15 depuis plus de 48 heures. Donc, il n'y a pas d'amélioration.
Alors, quand on est bloqués comme ça au
niveau de l'urgence, on se dit : Peut-être que le ministre nous a
dit : Allons à la super clinique. Alors, j'ai fait un test avec la super
clinique Pierre-Boucher, qui est à côté de l'Hôpital Pierre-Boucher. On est
allé voir, et ce matin, dès 9 h 30, il n'y avait plus de places
disponibles parce qu'il n'y avait que 20 places dans toute la journée pour la
super clinique Pierre-Boucher, qui devrait accueillir quelque chose comme
40 000 personnes par année, ce que le ministre leur a demandé, mais, déjà
l'année passée, ils en avaient accueilli davantage que ce que le ministre leur
a donné, c'est-à-dire qu'il y a eu 47 000.
Alors, aujourd'hui, 20 patients, 20 places
seulement. Et ce qu'on dit à ce moment-là à la jeune famille ou à quelqu'un qui
accompagne un aîné, que ce soit pour un enfant qui a une otite ou que ce soit
pour un aîné qui a un zona, bien, on leur dit : Écoutez, demain matin, à 6
heures, c'est ça qu'on se fait répondre, à 6 heures, présentez-vous. Les portes
ne sont pas encore ouvertes, mais attendez sur le trottoir. À 6 h 30,
on va ouvrir les portes. À 7 h 45, on va faire l'enregistrement puis,
vers 8 heures, on va commencer à assigner les rendez-vous. Alors c'est ça,
la solution? C'est ça, le résultat d'un système de santé que le ministre a
basculé, a bousillé de tous côtés avec l'épuisement des professionnels, avec vraiment
un non-accès qui est vraiment désespérant pour la population?
Alors, c'est triste, mais c'est vraiment
la réalité à laquelle les gens de la Montérégie sont exposés. Et il faut penser
en dehors de la boîte. Il faut faire des choses qui n'ont jamais été faites. Et
il y en a deux, actions que nous, on préconise au Parti québécois, c'est le
décloisonnement des professionnels, c'est avoir des hyper... des infirmières
praticiennes spécialisées, super infirmières dans les CLSC, de 9 heures à
9 heures, sept jours-semaine, et c'est d'avoir un meilleur soutien à domicile.
C'est comme ça qu'on va dégager et libérer les urgences.
Actuellement, le ministre,
malheureusement, c'est un constat d'échec. Il focusse tout sur les médecins. Les
médecins ne fournissent plus à la tâche. Ce n'est pas parce qu'ils ne font pas
nécessairement ce qu'il faut, mais ils ne fournissent pas à la tâche. Il faut
ouvrir, avoir cette autonomie pour d'autres professionnels que,
malheureusement, le ministre et ce gouvernement semblent incapables d'avoir de
façon efficace.
En même temps, avec le budget, le soutien
à domicile n'est vraiment pas quelque chose qui a été priorisé : un petit
montant de 100 millions, alors qu'ils sont déjà en déficit de plus de
400 millions par rapport à ce qu'ils avaient annoncé, en 2014, sur le
soutien à domicile.
M. Bovet (Sébastien) : Vous
me permettrez, en tout respect pour les gens que vous avez invités dans la
salle de presse, d'aborder un sujet connexe, mais qui est peut-être lié à la
situation de la Montérégie, en fait, partout au Québec. Le ministre Barrette et
la Fédération interprofessionnelle de la santé ont annoncé aujourd'hui la mise
sur pied de projets pilotes pour abaisser le ratio patients-infirmières. 17
projets pilotes au Québec, basés sur une grille d'analyse qui s'appelle le
SNCT, semble-t-il. Qu'est-ce que vous pensez de cette approche?
Mme Lamarre : Bien, nous,
on avait déjà questionné hier le fait qu'il n'y avait rien dans le budget. Moi,
j'ai posé une question. Alors, ce n'est pas budgété. Il n'y a pas de ligne pour
ces projets-là et il n'y a pas de ligne aussi pour le personnel. On comprend
bien que les ratios ne devraient pas nous amener à arriver à la conclusion
qu'on a besoin de moins d'infirmières sur les étages, on a besoin de plus
d'infirmières.
Alors donc, pas du budget et pas de durée
pour ces projets clairement précisés. Alors, si c'est sur six mois, si c'est
sur un an, combien de temps ça va prendre pour qu'on ait suffisamment
d'échantillons pour dire : Ah! ça, c'est le bon ratio? Alors, on peut
faire durer ça très longtemps. Il y a une urgence actuellement. L'épuisement
professionnel, il est là. La crise, elle est éminente, elle est déjà installée
depuis plusieurs mois et elle n'a pas été entendue par ce gouvernement-là.
Donc, ça, c'est préoccupant. Et on a aussi une ouverture très claire du côté de
l'Ordre des infirmières qui dit : Mais il y a 1 600 infirmières
qui sont en attente, des infirmières qui sont d'origine hors Québec, mais qui
attendent, sauf que c'est tellement restreint, le nombre de personnel que le
ministre a imposé par ses compressions, qu'il n'y a pas personne qui a du
temps pour superviser des infirmières et faire en sorte qu'elles obtiennent un
vrai diplôme qui leur permettrait de travailler.
Alors, nous, on dit : Les ratios,
c'est quelque chose, mais, en parallèle, il faudrait déjà travailler sur une
augmentation de disponibilité d'infirmière parce que, quand on aura les
résultats, il faudra qu'il y ait l'adéquation et que, rapidement, on ait une
solution sur le terrain.
M. Bovet (Sébastien) :
M. Barrette et la FIQlaissent entendre que l'argent sera au rendez-vous,
qu'on parle probablement de centaines de millions de dollars et qu'il y aura
une adéquation avec la formation en cégep et à l'université. Il semble avoir
répondu, si on veut, à certaines de vos interrogations. Est-ce que ce n'est pas
une bonne nouvelle, finalement, que le gouvernement se mette en marche et essaie
de régler le problème du ratio?
Mme Lamarre : Bien, il y
a eu un manque de vision. Ça, c'est sûr. Le ministre, pendant quatre ans, a
imposé des coupes et il n'a pas regardé jamais derrière lui qu'est-ce qui se
passait sur le terrain. Alors, on a un épuisement. On a vraiment un déficit
actuellement d'infirmières, d'infirmières auxiliaires, de préposés. C'est là,
là.
Alors, moi, ce que j'entends, c'est que
les solutions sont à long terme encore. Je veux dire, il n'y aura pas de
changement avant un an, et donc ça, c'est très préoccupant parce qu'il faut
absolument qu'il y trouve des solutions immédiatement et qu'il déploie en
parallèle des façons d'améliorer le nombre d'infirmières, de préposés, et de
les garder, et de faire des offres d'emploi qui sont satisfaisantes,
respectueuses, je vous dirais, parce que c'est ça que les infirmières ont
déploré, c'est que leurs conditions de travail sont carrément irrespectueuses
et ne leur permettent plus d'assurer la sécurité des patients.
Donc, on est dans des solutions, mais ces
solutions-là, elles n'auraient pas à être évoquées actuellement si on n'avait
pas coupé de façon outrageuse durant les quatre dernières années. Et, malgré le
fait qu'on dit qu'on avance, bien, moi, je suis encore très préoccupée parce
que je sens très bien que l'urgence, elle est immédiate et qu'il faut trouver
des solutions. Les gens ne pourront pas tenir encore six mois, un an dans des
conditions comme celles-là. Le cri d'Émilie Ricard, là, il est réel, et sa
condition n'a pas changé, à elle, depuis trois mois où elle a fait sa sortie.
M. Bovet (Sébastien) :
M. Bergeron, je me permets de vous interpeller sur la grève du zèle des
contrôleurs routiers de la Société de l'assurance automobile du Québec qui
arrêtent, semble-t-il, des autobus, des autocars pour vérifier que les normes
sont bien respectées. Est-ce que le gouvernement se traîne les pieds dans cette
négociation?
M. Bergeron :
Manifestement, oui. Il y a, je dirais, des litiges entre le gouvernement et les
contrôleurs routiers, qui datent de nombreuses années, au-delà du
renouvellement de la convention collective, qu'on pense à cette demande de
longue date des contrôleurs routiers de pouvoir faire appliquer le Code de la
sécurité routière, demande qui est bloquée par des intérêts corporatifs ici et
là. Mais, quoi qu'il en soit, il y a des attentes, il y a des besoins, il y a
des demandes qui sont faites par les contrôleurs routiers depuis nombre
d'années.
Évidemment, ce qu'on constate, c'est
l'incapacité du gouvernement à gérer et régler des problèmes de relations de
travail, notamment particulièrement avec les contrôleurs routiers, et, en bout
de piste, celles et ceux qui en souffrent, ce sont les citoyennes et les
citoyens qui sont comme pris en otage de cette situation-là. Et, en bout de
piste, c'est la sécurité publique qui doit primer, qui doit être au premier
chef de nos préoccupations.
Alors, si les règles sont telles qu'on
doive faire ces vérifications-là dans une perspective de sécurité publique,
soit, mais il ne faut pas que ça devienne, je dirais, un enjeu d'une négociation,
là. Alors, ça ne doit pas être un enjeu ni pour les contrôleurs routiers ni
pour le gouvernement qui déciderait tout à coup de ne plus faire appliquer les
règles telles qu'elles sont édictées.
M. Bovet (Sébastien) :
Le gouvernement, justement, et je vous l'apprends peut-être, mais a adopté… le
ministre des Transports a adopté un arrêt ministériel pour ne plus obliger les
autobus à se promener avec un permis spécial pour le surpoids. Il semble que
les contrôleurs routiers faisaient des vérifications de surpoids des bus, qui,
la plupart du temps, sont en surpoids, mais il y avait une certaine tolérance.
Là, semble-t-il qu'ils n'ont plus besoin d'avoir un permis. Est-ce que le
gouvernement adopte la bonne approche?
M. Bergeron : Bien,
encore une fois, les règles, telles qu'elles ont été édictées, s'appuyaient
sur, je dirais, un objectif. L'objectif n'a pas changé. Et la raison pour
laquelle le gouvernement a décidé d'adopter ce décret, c'est simplement pour,
je dirais, cacher ou faire en sorte qu'on mette de côté la problématique
particulière dans laquelle il s'est retrouvé en raison de sa propre turpitude.
Alors, plutôt que de tasser de côté le problème en adoptant une mesure
transitoire ou temporaire pour éviter qu'on se retrouve avec des difficultés,
pourquoi est-ce qu'il ne règle pas avec les contrôleurs routiers? Il me semble
que ça serait la chose la plus simple à faire.
M. Bovet (Sébastien) :
Merci.
Une voix
: Merci
beaucoup.
(Fin à 15 h 29)