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Point de presse de Mme Agnès Maltais, porte-parole de l’opposition officielle responsable de la région de la Capitale-Nationale

Version finale

Le mardi 6 février 2018, 13 h 15

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Treize heures dix-huit minutes)

La Modératrice : Alors, bonjour à toutes et à tous. Mme Agnès Maltais, la députée de Taschereau, est accompagnée de Janie St-Yves, qui va prendre la parole avec elle, ensuite, Mme Dominique Grenier, et ensuite Mlle Florence Mireault va prendre la parole. Mme Maltais, la parole est à vous.

Mme Maltais : Merci. Alors, aujourd'hui, je déposerai une pétition et j'interpellerai le ministre de la Santé pour que soient couverts les soins et les traitements liés à l'amélogenèse imparfaite, et ce, pour tous les âges.

Des familles sont venues me rencontrer à mon bureau de comté, sont venues m'expliquer qu'il y avait une maladie au Québec qui n'était pas couverte par l'assurance maladie. Je suis tombée à terre. Je suis estomaquée, d'autant que c'est une maladie qui s'attaque aux dents des enfants. Pourquoi ils sont venus me voir? Parce qu'ils sont laissés à eux-mêmes, parce que cette maladie s'attaque à l'émail dentaire, et, quand on parle de dents, la Régie de l'assurance maladie du Québec ne couvre plus les soins et les traitements à partir de l'âge de 10 ans. Ils sont laissés à eux-mêmes à partir de leurs 10 ans. Alors, ils m'ont parlé de leurs difficultés autant psychologiques que financières résultant de la non-couverture des traitements dentaires dont ils ont besoin.

Alors, les personnes qui sont ici avec moi, les mères, les pères de famille, vous expliqueront ce que ça implique dans leur vie au quotidien. Mais je veux bien le dire, là, on ne parle pas de traitement esthétique, de négligence ou de mauvaise hygiène dentaire. La RAMQ ne couvre pas les soins à partir de neuf ans parce qu'ils considèrent qu'ensuite c'est aux parents et aux enfants à prendre soin de leurs dents. Mais là on parle de dents qui n'ont pas d'émail, de dents qui s'effritent en mastiquant, d'enfants qui ne peuvent même pas croquer dans une pomme. On ne parle pas non plus de coûts minimes pour les familles. On parle de... Ça peut varier entre 50 à 100 000 $ par enfant. Si notre famille a deux enfants, il y en a ici qui ont deux enfants qui ont cette maladie, on peut parler de 200 000 $ par famille.

Moi, j'avais compris qu'au Québec, la Régie de l'assurance maladie du Québec, c'était pour que personne n'ait à payer pour des soins de santé, et c'est ce qui est en train de se passer.

Alors, ce que le ministère répond aux familles, parce qu'on l'a interpellé et on a interpellé la régie, c'est de faire des demandes de cas par cas. Ça fait qu'ils peuvent recevoir des petits montants, 500 $ jusqu'à 2 000 $ par personne, et même il y a des personnes qui n'arrivent pas à recevoir cette aide très minime. À chaque fois, ça veut dire qu'on leur demande, à eux et à elles, de demander la charité puis demander ce qu'on accorde à tous les autres Québécois et Québécoises.

Alors, ça n'a aucun sens. L'amélogenèse imparfaite, c'est une maladie génétique, elle est connue, elle est reconnue par les médecins spécialistes en dentisterie, par l'Ordre des dentistes et par les généticiens. C'est une maladie qui met en danger beaucoup plus que les dents. Elle met en danger la santé globale des personnes qui sont atteintes. L'amélogenèse imparfaite doit avoir la même couverture de soins que n'importe quelle maladie.

Pour vous expliquer ce que ça veut dire dans la vie de ces personnes, je vais laisser des parents vous parler.

La Modératrice : Merci. Madame Janie St-Yves.

Mme St-Yves (Janie-Claude) : Merci. Bonjour à tous. Je m'appelle Janie-Claude St-Yves et je suis une fière maman de cinq enfants, dont Florence, qui est atteinte de l'amélogenèse imparfaite. Je prends aujourd'hui la parole en mon nom, mais au nom aussi d'un groupe de Québécois et Québécoises, adultes et enfants, qui sont atteints d'amélogenèse imparfaite.

L'amélogenèse imparfaite, c'est une maladie rare et orpheline. C'est une maladie d'origine génétique qui affecte le développement de l'émail des dents de bébés et des dents d'adultes. Nos enfants souffrent et d'une douleur intolérable. Les dents s'effritent, sont hypersensibles au froid, au chaud, au sucré et à l'acidité. Nos enfants ont de la difficulté à mastiquer. Ils recrachent ou évitent certains aliments, refusent de manger ce qu'on leur offre. Ils s'étouffent avec des bouts de dents. Leurs dents sont plus vulnérables aux caries et aux maladies parodontales. Ils hurlent de douleur quand on leur brosser les dents. À trois ou quatre ans, nos enfants ont déjà eu une dizaine de rendez-vous chez le dentiste. Ils ont la bouche pleine de couronnes et ont reçu un traitement de canal pour réduire la douleur.

Nos adolescents et nos adolescentes sourient moins. Ils cachent leurs dents, qui sont jaunes, tachées, mal positionnées, déformées, usées. Ils sont victimes de moqueries depuis l'enfance. Certains s'isolent, refusent de se montrer en public et peuvent même avoir des pensées suicidaires. Depuis qu'ils sont petits, l'alimentation, le brossage de dents, voire l'inspiration d'une bouffée d'air trop froid sont synonymes de douleur. Certains rêvent de se faire arracher toutes les dents pour ne plus souffrir.

Comme parents, on souffre aussi, mais on est là, impuissants. On leur tient la main lors des multiples rendez-vous chez le dentiste, l'orthodontiste, le prosthodontiste, le pédiatre, le généticien, le neurologue, le psychologue, et j'en passe. Quand leurs 20 dents de bébé se font restaurer avec des couronnes en acier ou des métaux composites, on est là pour les encourage et leur dire que leurs petites dents en métal sont belles. Quand les dents d'adulte arrivent, bien, on est là pour chacune des 32 dents et aussi pour les aider à passer à travers des longs et pénibles traitements d'orthodontie, de prosthodontie, etc. On est là, mais, comme parents, on souffre beaucoup.

Tous ces soins et traitements qu'ont reçu et que devront recevoir nos enfants et nos ados ne sont pas le résultat d'une détérioration normale des dents. Ce n'est pas le résultat non plus d'une quelconque négligence de notre part. Le résultat, c'est d'une maladie génétique, un accident de la nature qui a eu le malheur de se manifester en s'attaquant aux dents de nos enfants. Mais alors pourquoi la RAMQ ne couvre-t-elle pas les frais associés à cette maladie? Est-ce que c'est parce que ça s'attaque aux dents? Ça nous semble terriblement injuste. C'est une maladie comme une autre qui affecte la santé physique et psychologique de nos enfants.

En plus, au Québec, la RAMQ cesse de couvrir les traitements et les soins dentaires dès l'âge de 10 ans. L'amélogenèse imparfaite, c'est un processus à long terme qui coûte cher. Certains membres du groupe ont dû réhypothéquer leur maison, emprunter de l'argent à la banque pour couvrir les frais associés à la maladie. D'autres doivent organiser régulièrement des activités de financement, cumuler les emplois, travailler les fins de semaine, sans compter les nombreux rendez-vous qui nous font manquer du travail. La pression financière est énorme. Quelle famille peut se permettre de supporter seule un tel fardeau financier? Les familles se mettent donc en situation de précarité financière en essayant de faire soigner leurs enfants. Et des enfants souffrent, car leurs parents n'ont pas les moyens de leur offrir cet accès aux soins.

Alors, ça on trouve que ça n'a pas de bon sens, M. Barrette. Le gouvernement doit étendre la couverture de soins de l'amélogenèse imparfaite, et ça, à tous les âges.

La Modératrice : Merci. Maintenant, Mme Dominique Grenier.

Mme Grenier (Dominique) : Bonjour, mon nom est Dominique Grenier. Je suis la maman de Mathilde, 15 ans, et de Marie-Pierre, qui a maintenant 17 ans, toutes deux atteintes d'amélogenèse imparfaite.

Je caractériserais l'enfance de mes filles comme une souffrance, de la douleur, de la douleur physique et de la douleur psychologique, même lorsqu'elles respirent. Lorsqu'elles étaient petites, elles me disaient : Maman, j'ai mal quand je respire de l'air chaud ou de l'air froid. Alors, imaginez lorsqu'elles mangent.

Encore aujourd'hui, adolescentes, mes filles souffrent énormément. Elles ont subi la reconstruction dentaire de chaque dent avec des composites. Ensuite, elles ont subi des chirurgies maxillo-faciales. Ensuite, de l'orthodontie pendant deux ans et demi. Et mon aînée est en train de subir des traitements de reconstruction dentaire avec des couronnes pour chaque dent. Donc, l'été passé fut passé chez le dentiste. À tous les vendredis, Marie-Pierre avait à recevoir des traitements au niveau de ses dents pour des couronnes. Donc, ce fut des week-ends paisibles à la maison, oui, vous conviendrez, mais très souffrant pour elle, comme adolescente de 17 ans qui doit s'isoler. Elle était en pleurs et elle souffrait également.

Les traitements coûtent une fortune. Présentement, 30 000 $ sont investis pour la bouche d'une de mes filles. Je vous dirais, oui, des prêts à la banque et réhypothéquer une maison, également. M. Barrette, je vous demande de prendre conscience de ce dossier, de prendre au sérieux cette maladie génétique que les enfants ici sont aux prises. Et il faut prendre au sérieux cette maladie qui peut avoir vraiment des répercussions physiques et psychologiques. Alors, merci.

La Modératrice : Merci. Maintenant, Mlle Florence Mireault.

Mme Mireault (Florence) : Bonjour. Je m'appelle Florence Mirault, j'ai 14 ans et je suis atteinte d'une maladie génétique rare qui s'attaque à mes dents. J'ai le malheur d'avoir eu, sur chacune de mes dents de bébé et chacune de mes dents d'adulte, cette malformation. Cet état me fait souffrir autant quand je mange que quand j'ai des réparations ou des opérations. C'est donc à tous les jours, même trois fois par jour, que la douleur me rappelle mon état.

Pour désensibiliser un peu mes dents, on m'a posé des couronnes sur toutes les dents. À ce jour, j'ai eu quatre opérations sous anesthésie générale. Résultat, une douleur plus tolérable, mais une bouche toute en métal. Cela affecte le goût des aliments, mon alimentation et ma façon de parler. Dans ma ville, je n'ai rencontré personne ayant cette maladie. C'est donc depuis la maternelle que je dois faire face aux questions, aux moqueries et aux sarcasmes des autres. Ça, je trouve que c'est ce qui est le plus souffrant.

Pour terminer, M. Barrette, bien que cette maladie ne soit pas le résultat d'un manquement de ma part, je veux vous dire que je suis une fille d'action et que je m'engage à faire les efforts suivants. Je peux apprendre à gérer mon stress avant les opérations et je peux m'habituer à me passer d'une grande variété d'aliments. Je peux même m'entraîner à ne pas me laisser atteindre par les remarques méchantes. Mais il y a quelque chose que je ne peux pas faire toute seule, et j'ai besoin de vous, M. Barrette. Pouvez-vous m'aider à enlever le poids de la facture qui vient avec ma maladie génétique? Pouvez-vous vous engager à m'aider, M. Barrette, s'il vous plaît?

Mme Maltais : Alors, voilà pour le contenu de la pétition qui sera déposée cet après-midi.

La Modératrice : On va passer maintenant aux questions. Pascal Dugas, de QMI.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Oui. Est-ce que c'est une maladie exceptionnelle ou est-ce qu'il y a d'autres maladies qui s'attaquent aux dents qui ne sont pas remboursées par la RAMQ, à votre connaissance?

Mme Maltais : À ma connaissance, c'est le premier cas que j'ai comme ça. Les parents sont venus m'expliquer ça. C'est une maladie très, très, très rare. Il n'y en a pas beaucoup. Il y a peut-être une centaine de familles au Québec, mais qui ne sont pas en contact. C'est très difficile parce qu'il n'y a pas longtemps que les dentistes ont vraiment réalisé à quel point c'est une maladie génétique. Alors, ils sont en train de se repérer. Mais ce n'est pas un énorme nombre au Québec, ce n'est pas beaucoup d'argent pour la Régie de l'assurance maladie, mais c'est un poids financier immense pour chacune de ces familles.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Donc là, il y a une pétition. Est-ce que vous avez déjà discuté avec M. Barrette de cette problématique-là par le passé?

Mme Maltais : Jusqu'ici, on a discuté beaucoup avec la Régie de l'assurance maladie du Québec, et ils ne veulent pas sortir du cadre. Donc, c'est un premier appel à M. Barrette. Il y aura d'autres discussions ensuite. Comprenez bien, c'était à la régie, jusqu'ici, que ça se passait. Maintenant, on est en train de l'amener à M. Barrette, et c'est le cri du coeur des parents.

M. Dugas Bourdon (Pascal) : Le cadre, il dit quoi exactement?

Mme Maltais : Le cadre, ce qu'il dit, c'est que les soins dentaires ne sont pas couverts à partir de l'âge de 10 ans. Or, ce n'est pas des soins dentaires, c'est une maladie, c'est une maladie génétique. Depuis quand on accepte, au Québec, que les gens paient pour les maladies, pour soigner les maladies génétiques? Ce n'est pas un médicament qui a à passer par l'INESSS. Des fois, on entend parler de maladie où on dit : Il faut que le médicament soit approuvé. Ce n'est pas ça, c'est des soins dentaires parce que... On disait tout à l'heure, hein, si ces parents-là, ces enfants-là avaient une maladie du poumon, on ne se poserait pas de question, si c'était au foie, on ne se poserait pas de question, c'est à l'émail des dents. Voilà.

La Modératrice : Merci beaucoup.

Mme Maltais : Je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose, mais c'est mon cri. Merci.

(Fin à 13 h 31)

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