Point de presse de M. Camil Bouchard, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'environnement , et de M. Serge Deslières, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de transport routier et en commun
Version finale
Le lundi 16 juin 2008, 14 h 03
Salle Bernard-Lalonde (1.131),
hôtel du Parlement
(Quatorze heures trois minutes)
M. Bouchard: Alors, je vous remercie d'être tous et toutes là. Je suis accompagné de Serge Deslières, collègue et porte-parole en matière de transports.
J'ai convoqué ce point de presse cet après-midi parce que, depuis maintenant... plusieurs fois nous avons posé des questions à la ministre des Transports et quelquefois au ministre de l'Agriculture concernant le choix qu'a fait le gouvernement libéral de déplacer l'autoroute 30 du tracé nord au tracé sud et, en écoutant les réponses et en les réexaminant, on s'aperçoit que nous avons très souvent comme réponses soit des omissions, soit des demi-vérités ou soit des faussetés, et on a pensé que ce serait important de rétablir les faits devant vous, aujourd'hui. De fait, on s'interroge sur les motifs réels qui ont guidé le gouvernement du Parti libéral dans ce choix-là et on voudrait en même temps que l'on puisse aborder ce sujet.
Concernant les faussetés, premièrement, la ministre nous dit: Les coûts du tracé sud sont à 305 millions puis ils sont toujours à... Les estimés avaient été de 300 millions puis ils sont toujours autour de 300 millions. Vous irez voir le procès-verbal, les questions et réponses lors de la séance du 10 juin. C'est son affirmation. Or, nous avons ici copie du journal Le Reflet, de la région, 28 juin 2003. Jean Dubuc, lors d'une conférence de presse durant sa campagne électorale, nous dit ceci: «La construction du tracé sud est évaluée à 110 millions de dollars.» Alors, l'estimé, là, il était à 110 millions en 2003 et le Parti libéral a fait sa campagne électorale dans la région sur cet estimé-là. Pas 305 millions, 110 millions, en 2003. Et suivront ensuite des réévaluations du projet. J'ai ici, devant moi, quelques dates: le 19 novembre 2003, 120; en octobre 2005, 135; et soudainement, au mois de février 2008, 305. Pourquoi? C'est parce que le gouvernement avait omis, dans son premier plan du tracé sud, de mentionner qu'il fallait construire une bretelle supplémentaire pour ajouter plus de sécurité et plus de fluidité pour avoir accès, du tronçon de la 30 actuelle au nouveau tronçon, un quatre kilomètres supplémentaire, toujours dans les terres agricoles, c'est ce qu'on appelle le tronçon Jean-Leman, et voilà que les estimés bondissaient à 305 millions. Alors, on est passé de 110 à 305. Et, quand la ministre nous dit: Les estimés étaient à 305, là, oubliez ça, c'est une fausseté. Et ça, là, on n'en tolérera plus, des affirmations comme celle-là.
Deuxièmement, des demi-vérités. Le BAPE... Alors, tout simplement pour terminer sur les évaluations de 2003 à 2008, là, en 2008, le gouvernement a fait paraître un très joli feuillet - je pense que c'est au mois de février 2008 - dans les journaux nationaux, vantant ses réalisations autour de l'autoroute 13. Alors, c'est là-dedans qu'on découvre que ça va coûter 305 millions.
Bon, en ce qui concerne le choix, lorsque nous posons la question, on nous dit: Mais pourquoi le tracé sud? On obtient comme réponse: Le BAPE, le BAPE de 2002, parce que le BAPE s'est dit plus en faveur du tracé sud, et voilà pourquoi nous avons opté pour le tracé sud. Demi-vérité. Le BAPE a dit aussi: Si le gouvernement choisissait le tracé nord, c'est-à-dire sur la 132 - parce que c'était aussi un tracé qui était acceptable - il faudrait apporter au tracé nord quelques modifications. Donc, il y avait quelques exigences, comme il en avait d'ailleurs, des exigences, pour le tracé sud. Alors, il y avait toujours l'option. Et, lorsque l'éminence rouge, là, de l'autoroute 30, là, M. Jean-Marc Fournier, là, se lève puis dit: C'est le BAPE 2002, bien, tout ce qu'il fait, c'est qu'il lève seulement la moitié de l'éminence; l'autre reste assise parce que l'autre cache une vérité, cache la demi-vérité, c'est que le tracé nord était aussi un choix possible. Alors, ça aussi, il faut le dire devant la population.
Et d'ailleurs, si vous avez remarqué, lorsque le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir, il a complété 2 km qui étaient déjà prévus dans les plans, sur le tracé nord, sur la 132, et les gens qui l'empruntent maintenant en sont très heureux, là, c'est une autoroute semi en tranchée qui permet un accès au voisinage, dans le voisinage de Candiac, les deux premiers kilomètres, mais qui arrête à un stop parce que, bon, on a décidé d'aller du côté du sud. Alors, c'est une demi-vérité.
Les omissions. À chaque fois que l'on parle du tracé sud, vous ne verrez jamais un ministre ou une ministre se lever pour dire: On a choisi le tracé sud parce que la CPTAQ était contre trois fois. Ils n'ont jamais dit... Ils ne le disent pas, évidemment. Mais, dans les avis que le gouvernement a reçus à propos du tracé sud, il y a trois avis d'un tribunal administratif, trois avis, en 2002, en 2004, en 2006, qui disent au gouvernement: Ce choix est inacceptable, puisque vous avez un autre tracé possible - parce que, eux, ils avaient bien lu le BAPE - il y a un autre tracé possible au nord, que vous pouvez emprunter et qui ne sacrifie pas 550 ha des plus belles terres du Québec. Parce que vous savez très bien que le tracé sud traverse des terres qu'on appelle A1, c'est-à-dire... Au Québec, il y a 2 % de belles terres, là, puis, parmi celles-ci, il y a 50 % des terres qui sont de très haute qualité, de très haute qualité parce qu'on peut y cultiver plus longtemps et une plus grande variété de produits. C'est en plein là que l'autoroute passe. Alors, omission. Jamais, jamais, jamais.
La seule qui m'en ait parlé ouvertement, parce que j'ai posé la question, c'est la ministre de l'Environnement, lors de l'étude des crédits. Puis je lui ai dit: Moi, là, si j'avais des avis comme ça de la CPTAQ, ça m'empêcherait de dormir. Bien, elle a dit: Pas moi. Pas moi. Ça ne l'empêche pas de dormir, la ministre de l'Environnement, les avis de la CPTAQ. Et j'avais demandé à la ministre de l'Environnement de nous dire quels étaient les avantages pour l'environnement de prendre le tracé sud, et jamais elle n'a été capable de nous le dire. La ministre, durant cette séance-là de l'étude des crédits, m'a répondu que c'était le meilleur choix, puisque nous défendions le tracé nord et que nous n'avions pas été élus dans le comté durant deux élections successives, on faisait la démonstration que le choix avait été le bon pour le gouvernement libéral. Bien, moi, je trouve que ça, c'est plus une réponse d'organisatrice de comté qu'une réponse de ministre de l'Environnement.
Et enfin, les cachettes, les cachettes. Combien nous coûte Lafarge? Mon collègue Deslières a posé la question plusieurs fois. Un porte-parole de la compagnie Lafarge avait dit: C'est en deçà de 400 millions, ce qu'on demande. Et la ministre, alors que mon collègue a affirmé cela, la ministre lui a fait dire qu'il avait dit que c'était 400 millions. Non. Un, ce n'est pas ce que mon collègue a dit, et, deux, nous n'avons jamais su combien les accommodements qu'on a pu avoir entre le gouvernement et Lafarge ont pu coûter au gouvernement. Pourtant, la ministre a dit, en Chambre, que c'était déjà un accord convenu, que c'était fini, les négociations avec Lafarge. Combien? Il n'y a personne qui le sait. On veut savoir combien. Pas de cachette, s'il vous plaît.
Non plus qu'on ne sait pas trop, trop quelles sont les conclusions globales et entières avec la communauté de Kahnawake. Ce qu'on sait qu'il y a eu, c'est qu'il y a eu une cession de terres à la faveur de la communauté de la réserve de Kahnawake, de l'ordre de, nous dit-on, 250, 350 ha ou quelque chose comme 700 acres, mais on ne sait pas quelle est la valeur consentie à ces propriétés puis on ne sait pas non plus s'il y a d'autres éléments attachés à cette entente. On ne sait pas non plus combien a coûté le contrat avec M.Parisella, qui a été engagé comme négociateur par le gouvernement dans ce dossier-là.
Alors, écoutez, là, franchement, là, on a affaire à un dossier où les coûts ont été estimés à quatre fois moins de leur coût réel entre 2003 et maintenant, puisqu'il faut ajouter à la facture un engagement du gouvernement libéral de reconfigurer la 132 en boulevard urbain pour diminuer les bouchons qu'ils anticipent toujours, parce que, l'autoroute étant dans le sud et les citoyens n'ayant aucun moyen de la rejoindre directement parce que c'était interdit par le BAPE dans sa préférence pour le côté sud, ils disaient: À condition qu'on ne fasse pas d'embranchement direct entre les municipalités et l'autoroute qui passe au sud, bien les bouchons vont exister toujours parce que 70 % de la circulation, c'est une circulation locale. Devant cela, le gouvernement a dit: On va vous arranger ça en 2016, on va reconfigurer le boulevard. Mais ça, c'est des frais énormes, et on a déjà entendu des chiffres qui tournent autour de 100, 110 millions de dollars qu'il faut rajouter à la facture parce qu'autrement on n'aurait qu'un seul tracé, celui du tracé nord.
Alors, moi, je pense que la démonstration est faite: il n'y a ni d'avantage au niveau des coûts, mais il y a certainement des affirmations qui ont été fausses là-dedans, il n'y a pas d'avantage au niveau environnemental, il n'y a pas d'avantage pour l'agriculture. Pour les citoyens, les avantages quant à l'accès à l'autoroute telle qu'elle sera située sont très mitigés. Alors, c'est quoi, les vraies raisons? C'est ce qu'on demande au gouvernement depuis le début. Quels sont les véritables motifs? Et, nous, on pense qu'il y a suffisamment là-dedans de matière, de mystère, de demi-vérités, d'omissions et de faussetés pour que le Vérificateur général s'intéresse au dossier.
M. Deslières: Et d'autant plus, si vous permettez, que tout ça, là, a fait en sorte de retarder l'autoroute 30. Parce que, comprenez-nous bien, là, nous, ce que nous voulons, c'est l'autoroute 30 le plus vite possible, mais à la bonne place, c'est-à-dire dans la logique historique du fait que, sur la 132, toutes les expropriations étaient faites depuis une trentaine d'années. Alors, tout ça, vous faites le constat qu'il n'y a pas d'autoroute à cause de la décision inexplicable de ce gouvernement-là d'aller sur le tracé sur les terres agricoles.
M. Deschênes (Alexis): Souhaitez-vous la suspension des travaux?
M. Bouchard: Pardon?
M. Deschênes (Alexis): Souhaitez-vous la suspension des travaux de la 30?
M. Bouchard: Mais les travaux sont suspendus d'eux-mêmes quasiment parce qu'à chaque fois que le gouvernement veut faire un pas en avant, il s'aperçoit qu'il y a plein de dossiers qui ne sont pas réglés. Allez rencontrer...
M. Deschênes (Alexis): ...parce qu'il y a des choses qui se font, on a vu des images, on voyait les trucks se promener, là.
M. Bouchard: Il y aurait seulement une façon de stopper les travaux, c'est de les commencer tout de suite sur le tracé nord. Moi, je ne vais pas me poser, aujourd'hui, en personnage qui va dire: Il faut arrêter les travaux, faire un moratoire puis attendre trois ans avant qu'on décide d'autre chose. Il y avait une décision de le faire sur le tracé nord, les emprises sont faites, l'égout pluvial, l'égout pluvial est installé. Les commerces se sont installés à l'extrême limite des terrains expropriés pour recevoir l'autoroute 30, alors...
M. Chartrand (Yves): J'ai couvert la crise amérindienne en 1990. Quand on est sorti de cette crise-là, tout le monde, à Montréal, disait: Il faut une autoroute qui contourne la réserve pour que, si jamais il y a une chose qui se reproduit, on ne soit pas bloqués comme ça l'a été en 1990. Est-ce que ce ne serait pas ça, la raison du tracé sud, c'est-à-dire contourner la réserve, alors que, la 132, on entre dedans directement?
M. Bouchard: Non. Dans les deux cas, dans les deux cas, le tracé de la 132, qui est est-ouest, aboutit au tracé 30, là, à la 30 dont vous avez parlé et qui relie Sainte-Catherine, ici, et Châteauguay, en bas, donc nord-sud. Donc, le tracé de la 132 rejoint la 30 qui est déjà faite là pour contourner la réserve, de même que le tracé sud.
M. Chartrand (Yves): Je ne comprends rien de ce que vous me dites.
M. Bouchard: Bien, regardez, la question que vous me posez, c'est: Est-ce que vous un tracé ou l'autre arrive... Est-ce qu'un tracé contourne la réserve et l'autre non?
Une voix: ...
M. Bouchard: Ce que je vous dis, là, c'est qu'il y a déjà un segment de la 30 qui est construit, ce qui était conséquent à la crise de 1990 et conséquent au décret au Conseil des ministres de l'époque pour exproprier le bout de terrain, là, les terres qui étaient... dont on avait besoin pour construire le tronçon pour contourner la réserve de Kahnawake, et ce tronçon est d'orientation nord-sud, alors que ce dont nous vous parlons, c'est du tronçon est-ouest qui se connecte... La 132 se connecte là, et le tracé sud se connecte là aussi sur le même tronçon. Donc, ça n'a rien à voir.
M. Chartrand (Yves): Vous dites aussi que, bon... Vous donniez des estimés tantôt, là, que ça a passé de 105, je pense, à...
M. Bouchard: 110.
M. Chartrand (Yves): ...110 à 305, et vous nous donnez comme raison le fameux 4 km, là, qui s'est ajouté. 4 km, là, ça ne coûte pas 200 millions, quand même?
M. Bouchard: Non, en effet. Et là il y a un écart donc dans les estimés, qui peut être dû au fait que, comme le disait le contremaître ou le gérant de chantier à l'époque, les premiers estimés sont plutôt grossiers, on va réajuster les estimés au fur et à mesure, etc. Puis on est passés de 110, 125, 130, bon, etc. Puis le 305, c'est une fois convenus l'addition du 4 km, l'addition d'un viaduc nécessaire pour enjamber à ce niveau-là parce que l'autre ne suffit plus puisqu'on ne l'emprunte plus, un nouveau viaduc au-dessus de la 15, un nouveau viaduc au-dessus de la 30 actuelle, dont vous parliez tantôt, là, près de la réserve de Kahnawake, alors c'est...
Une voix: Les expropriations.
M. Bouchard: ...bon, les expropriations qui n'avaient peut-être pas été évaluées à leur juste niveau. Peut-être que les négociations avec Lafarge... On n'a aucune idée, mais tout ce qu'on sait, c'est que ce n'est pas vrai que le coût est à 305 et qu'il a toujours été à 305. Il a été à 110 parce que le projet a été présenté à la population, à l'époque, comme un tronçon de 8 km dans le tracé sud, alors qu'à la fin on se retrouve avec un tronçon de 13 km...
M. Chartrand (Yves): Un peu comme ...
M. Bouchard: ...et d'échangeur...
M. Deschênes (Alexis): Si vous jugez qu'il y a suffisamment de cachettes, d'omissions et de manque de transparence pour que le Vérificateur général mette son nez là-dedans, est-ce qu'il n'y a pas suffisamment de cachettes et d'omissions pour qu'on demande aussi une suspension des travaux?
M. Bouchard: Bien, moi, j'ai un devoir parlementaire d'alerter le Vérificateur général sur ce dossier-là.; c'est ce que je fais maintenant. Et je ne suis pas en mesure de commander ou non l'arrêt des travaux, mais je suis en mesure de demander au Vérificateur général d'examiner le dossier, par exemple.
M. Perron (Sébastien): M. Deslières a demandé à plusieurs reprises quel était le montant alloué pour l'expropriation dans le dossier de Lafarge. Mais est-ce que ce n'est pas normalement.... Est-ce que c'est une information qui est normalement publique?
M. Deslières: Mais, normalement, là, il y a...
M. Perron (Sébastien): ...d'autres négociations qui sont en cours...
M. Deslières: Il y a tellement peu de transparence. Et on conviendra, là, que ce n'est pas vrai qu'avec 5 km et 13 km, ça va coûter... la ministre répète que ça va coûter le même coût, avec les expropriations, Lafarge, Goodfellow, tout ça. Au nom du bien public, les citoyens et citoyennes normalement devraient savoir le coût. C'est fini, Lafarge. Est-ce que la ministre peut arrêter de nous donner des demi-vérités et nous dire clairement comment est-ce qu'a coûté Lafarge, combien est-ce que va coûter Goodfellow, combien vont coûter les expropriations des terres agricoles, combien elle va coûter, la négociation avec la communauté de Kahnawake?
M. Duchesne (Pierre): ...il y a familles politiques d'organisateurs dans le comté et très associées au Parti québécois, qui favorisent le tracé sud. Est-ce que ce n'est pas tout simplement ce qui explique votre vitalité dans ce dossier-là?
M. Bouchard: Bien, je vous demande pardon, j'ai mal entendu.
M. Duchesne (Pierre): Dans ceux qui favorisent tout le tracé sud, il y a des familles politiques, là, très associées au Parti québécois, puis il y en a qui expliquent même...
M. Bouchard: Qui favorisent le tracé sud ou le tracé nord?
Une voix: Le tracé nord.
M. Duchesne (Pierre): Le tracé nord. Pardon. Le tracé nord, excusez-moi.
M. Bouchard: Je pense qu'on n'est pas sur le bon tracé.
M. Duchesne (Pierre): Alors, le tracé nord. Donc, il y a des familles politiques très associées au Parti québécois qui ont parlé en faveur de ça. Et même, dans les cercles péquistes, on dit qu'on a perdu le comté à cause de ça. Est-ce que ce n'est pas ça qui explique votre vitalité dans ce dossier-là?
M. Bouchard: Bien, regardez, là, s'il y avait des avantages électoraux, là, ça ferait longtemps qu'on ne compterait pas là-dessus parce qu'on a apparemment perdu deux élections parce qu'on serait pour le tracé nord. Alors, on ne peut pas faire deux choses en même temps: dire qu'on va gagner des élections parce qu'on est en faveur du tracé nord, puis constater qu'on en a perdu deux avant, et se faire dire qu'on les perdait à cause du tracé nord...
M. Duchesne (Pierre): ...décidé de ne plus en parler de ça, vous vous souvenez?
M. Bouchard: Bien, qu'est-ce qu'on fait, là? On en parle parce qu'on trouve que c'est aberrant puis on découvre, au fur et à mesure que ce dossier-là évolue, que les estimés, tels qu'ils étaient au point de départ et tel que ça a été vendu à la population, n'ont rien à voir avec les coûts actuels. Même le tracé qui avait été présenté en 2003 n'a rien à voir avec le tracé actuel, puisqu'ils ont été obligés de rallonger le tracé de 4 km pour pouvoir assurer, disent-ils, plus de fluidité et de sécurité au transport. Alors, écoutez, moi, je vous le dis, là, je le fais, je le fais en toute transparence puis en toute bonne foi. Et, quand vous aurez... Moi, j'y vais, sur le terrain, là-bas, là, puis je vois les terres, puis je les ai marchées, puis j'ai rencontré les agriculteurs, puis j'ai rencontré les gens qui sont affectés par ça...
M. Deslières: ...drame humain, là.
M. Bouchard: Puis, regardez, là, franchement, là, tu sais, on est dans la crise alimentaire, puis tout le monde se bat la coulpe parce qu'on sacrifie nos terres un peu partout dans le monde puis on a de la misère à nourrir notre monde. Puis là on dit: On va sacrifier, on va goudronner littéralement 110 ha de terres puis on va en enclaver 440 autres pour les rendre... Ça, ça va les rendre très vulnérables, vous le savez très bien, au dézonage puis aux pressions du commerce et des gens qui vont vouloir s'établir dans cette enclave-là. C'est des histoires qu'on connaît.
M. Duchesne (Pierre): Est-ce qu'il y a de l'opportunisme politique ou non là-dedans?
M. Deslières: Non, mais regardez, trois éléments sur lesquels on a toujours basé notre action politique dans ça: un, nous voulons avoir la 30 le plus rapidement possible; deux, protection des terres agricoles; trois, il y a un gouvernement qui nous parle de développement durable, quelle est l'explication que la ministre de l'Environnement a donnée à mon collègue lors des l'étude des crédits et autres questions pour expliquer un geste qui va à l'encontre de tous les principes qui sont contenus dans notre politique de développement durable? Et, troisième élément, l'explication, les coûts: Pourquoi dépenser trois fois plus, quatre fois plus, quand ils ont un choix, une possibilité de faire une autoroute, tel que prévu depuis 30 ans? Comme mon collègue vient de le dire, le chose bâti est prévu pour ça.
M. Bouchard: Il y a 71 millions qui sont déjà investis sur le tracé nord, hein? Il y a 51 millions sur le deux kilomètres qui a déjà été fait, d'autoroute, et les infrastructures qui ont déjà été prévues tel l'égout pluvial, et il y a les expropriations qui ont été complétées le long du tracé nord. Et 71 millions qui normalement auraient dû être suivis d'une mise en chantier des cinq kilomètres restants pour compléter le tracé nord. Alors, ce 71 millions là, on doit l'ajouter à la facture, puisque le gouvernement nous dit: On va être obligés de toute façon de transformer la 132 en boulevard urbain plus fluide, etc. puis là on va chercher dans des enveloppes d'à peu près 100 à 125 millions. Alors, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans ce dossier-là, c'est évident, là.
M. Deschênes (Alexis): ...répondez à Julie Boulet, qui vous dit: Vous aviez juste à le faire lorsque vous étiez au gouvernement, la 30?
M. Bouchard: Écoutez, là, quand le Parti libéral est arrivé, quand le gouvernement est arrivé au pouvoir, là, le gouvernement libéral, là, les choses étaient à ce point avancées qu'ils ont été capables de faire deux kilomètres dans les mois qui ont suivi l'élection.
Alors, il y a eu les négociations avec le fédéral. Puis d'ailleurs les négociations avec le fédéral, il faudrait en reparler, hein, parce que c'est des coûts, ça, en PPP, là, qui sont... normalement, là, qui sont divisés selon les trois niveaux de source de financement: le Québec, le fédéral et le privé. Alors, le 51 millions, là, qu'on a investi, là, sur la 132, sur le tracé nord, là, il n'est plus en PPP, ni avec le fédéral. Les investissements qu'on a consentis là, ils ne sont plus dans l'entente avec le fédéral, hein? Ce n'est pas cette partie-là qui va être en PPP. Ce qui va être en PPP, c'est le tracé sud. Alors, ça va nous coûter tout simplement plus cher parce qu'on a déchiré une entente avec le fédéral sur le tracé nord puis qu'on n'aura plus de participation du fédéral ni des privés là-dessus.
M. Robitaille (Antoine): Sur l'auto électrique, là le premier ministre a dit, hier, qu'il était d'accord avec le Parti québécois, qu'il n'y avait pas de débat avec vous là-dessus. Comment vous interprétez ça?
M. Bouchard: Non, il n'y a pas de débat avec nous là-dessus, on n'en a jamais parlé ensemble, mais...
M. Robitaille (Antoine): ...qu'il voulait investir 300 millions.
M. Bouchard: Bien, écoutez, moi, c'est la question que je pose. Nous avons déposé un plan structurant pour le développement d'une filière non pas de la voiture ni de l'auto, mais des véhicules électriques - parce que là-dedans il y a aussi les bus, il y a aussi les tramways, il y a aussi les trains et les camions, parce qu'on en fait, au Québec, des camions hybrides, etc., bon - alors le développement solide et pour longtemps d'une filière où on dit, nous: Le gouvernement d'un Parti québécois serait prêt à investir entre 250 millions à 300 millions par année, 10 ans, sur une période de 10 ans. C'est le 50 % de la contribution du gouvernement. Il attend une contribution équivalente du privé là-dedans pour avoir quelque chose de substantiel à se mettre sous la dent puis faire en sorte qu'on la développe solidement puis pour longtemps, cette affaire-là.
Et maintenant, si M. Charest nous dit qu'il est d'accord puis qu'il commence à annoncer des projets pilotes, moi, je trouve que c'est des biens petits pas, là. Qu'il nous annonce combien il est prêt à mettre; ça va être quoi, dans son budget, qu'il est prêt à consentir pour structurer l'industrie de la fabrication, la commercialisation des composantes des véhicules électriques au Québec ou des véhicules eux-mêmes, et qu'il nous dise aussi s'il est prêt, comme nous, à s'engager dans le soutien à la transformation du parc des véhicules au Québec, autrement dit, à créer un marché de toutes pièces, essayer qu'on puisse se bâtir, au Québec, une vitrine internationale de nos capacités en matière de production et de commercialisation des voitures électriques. Mous sommes prêts à le faire, nous sommes prêts à aider les gens qui possèdent de grandes flottes, par exemple, les municipalités, le gouvernement, etc., à passer de véhicules à combustion à véhicules hybrides, ou hybrides électriques, ou hybrides branchés, ou tout électriques. Ça coûte des sous, il y a un coût de différence là-dedans, on est prêts à atténuer ce coût-là avec un montant d'argent substantiel sur 10 ans. On est prêts à en discuter avec le premier ministre s'il le veut.
Mais là, dire qu'on est d'accord sur le principe, bien oui, tout le monde est d'accord sur le principe d'échapper au pétrole qui nous coûte de plus en plus cher puis de s'en aller quelque part vers des alternatives. C'est facile à dire, mais est-ce qu'on est d'accord sur les moyens à prendre, puis est-ce qu'on veut faire l'effort national important qu'il faut faire? Bien là, la réponse est à M. Charest.
M. Deslières: Les offres doivent accompagner la foi, là.
Le modérateur: En anglais.
M. Duboyce (Tim): Mr. Bouchard, first of all, what are you asking the Auditor General to examine with regards to the construction of the extension of highway 30?
M. Bouchard: We want the Vérificateur général to look at the real motivation that the Government could have had in choosing the South path of the highway 30 instead of the North path. We don't understand that, as cost is concerned, as environmental elements are concerned, or agricultural issues are concerned, we just can't find any rational explanation for that choice. And we want the Vérificateur général to look at the real motivations, the real elements which could have contributed to the decision.
M. Duboyce (Tim): The broad Québec public, though, watching this has been listening to talk about the building...
M. Bouchard: I know.
M. Duboyce (Tim): ...of the 30 for 40 years now, and they're under the impression now that the issue is dealt with, and construction is just going to go ahead, we don't need to talk about this anymore. Why do we need to talk about this more?
M. Bouchard: Well, as far as I'm concerned, as far as the tar won't cover the place, I certainly don't agree that it's too late. We still have the opportunity to... so that the Government could again look over the situation and say: Look, that was a bad choice, and let's do it the way it was scheduled. And I say «scheduled». You know, if the Government had just pursued the choice that had been made before its arrival in power, we would be driving on the «autoroute» instead of talking about it.
M. Duboyce (Tim): As you know, about electric cars, the Government says it's going to make an announcement tomorrow, on Tuesday morning...
M. Bouchard: Yes, pilot projects, yes.
M. Duboyce (Tim): ...to encourage the development of electric-powered vehicles.
M. Bouchard: Yes.
M. Duboyce (Tim): What are your expectations?
M. Bouchard: Well, we heard that they would be ready to start some pilot projects with low-speed cars, low-power cars in some of our municipalities in Québec. Well, let's do it, it's not without interest, but my feeling and, I think, the feeling of the population is that we have to go much faster and go from pilot projects to real production of cars which would respond to the usual norms of circulating on highways.
M. Duboyce (Tim): Isn't it part of the problem battery technology just isn't up to... it's enough yet?
M. Bouchard: Well, yes, there are still some problems, but we know of vehicles that you can drive for certainly 200 km or so at a reasonable speed like 120, for example, top speed of 140... But, for sure, the battery is still the delicate part of the puzzle, it's the most expensive part of the puzzle, and this is why we propose to create a fund, so that we could invest in research and development so that we can solve some of these problems. And maybe we could rent a battery as we rent the water «réservoir»...
M. Dougherty (Kevin): On that subjetc, Hydro-Québec has been working on this for a long time. The problem is that, you know, we don't build cars in Québec. You can't just say: O.K. I'm gonna pop in an electric motor. They had a pilot project doing that, but, you know... It doesn't work. Hydro industry doesn't exist in Québec.
M. Bouchard: But the context is very, very, very different. All this thing started in 1982, the R&D in the area. And for sure, people were buying their liter of gas at something like $0.40 a liter, as compared to $1.50 right now. A barrel was, in 2001, a barrel was $24, as compared to $104 now. And this has an impact on your wallet, and people want alternatives now, they are looking for... So the consumers, the buyers are around to look and looking for some new products in this area, which was not the case before. So there was no pressure on private investment to go into that direction, and the Government was kind of shy to advance into that direction also because it was a risky business, and so that the message was not very clear towards Hydro-Québec as to pursue or not the research and development and the production. And I think that it's much clearer right now. At least, we are!
(Fin de la séance à 14 h 32)