Conférence de presse de M. Lawrence S. Bergman, président de la Commission des transports et de l'environnement, M. Simon-Pierre Diamond, porte-parole de l'opposition officielle en matière de développement durable et d'environnement, et de M. Camil Bouchard, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'environnement
Recommandations contenues dans le rapport de la Commission des transports et de l'environnement sur la gestion des matières résiduelles
Version finale
Le mardi 10 juin 2008, 11 h 32
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Onze heures trente-deux minutes)
M. Bergman: Alors, bonjour, mesdames messieurs. Je m'appelle Lawrence Bergman. Je suis le président de la Commission des transports et de l'environnement. Je suis accompagné de M. Jean Domingue, le vice-président de la commission, et par M. Simon-Pierre Diamond, qui est porte-parole de l'opposition officielle en matière de développement durable et environnement, ainsi que M. Camil Bouchard, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'environnement.
Au nom des membres de la Commission des transports et de l'environnement, nous sommes très heureux, mes collègues et moi, de vous présenter le rapport sur la gestion des matières résiduelles, qui contient 43 recommandations.
Les autres membres de la commission étaient M. Jean Damphousse (Maskinongé), M. Serge Deslières (Beauharnois), M. Luc Ferland (Ungava), M. Pierre Gingras (Blainville), Mme Johanne Gonthier (Mégantic-Compton), M. François Ouimet (Marquette), M. Pierre Reid (Orford), M. Gerry Sklavounos (Laurier-Dorion), aussi M. Martin Camirand (Prévost), Mme Agnès Maltais (Taschereau) et M. Claude Roy (Montmagny-L'Islet).
En novembre 2007, les membres de la Commission des transports et de l'environnement décidaient de se livrer à une réflexion sur les enjeux liés à la gestion des matières résiduelles. La commission s'était donné pour objectif d'en arriver, au terme de sa consultation, à recommander aux autorités compétentes des pistes d'action afin de réactualiser la pratique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998 à 2008.
En guise d'amorce à un large débat, la commission avait préparé un document de consultation dans lequel des questions étaient lancées. La commission avait dû se limiter à quelques aspects de la gestion des matières résiduelles afin d'être en mesure d'en faire une analyse plus détaillée qui lui permettrait ensuite de tirer des conclusions claires.
Le nombre de témoins entendus, de mémoires soumis ainsi que celui des réponses et commentaires en ligne témoignent de l'importance de la gestion des matières résiduelles pour la société québécoise. En effet, lors des auditions tenues pendant sept jours, du 6 au 26 février 2008, la commission a reçu 49 groupes qui sont venus lui présenter leur mémoire. De plus, la commission a reçu 89 mémoires par Internet, et 225 personnes ont répondu à son questionnaire en ligne. La commission dévoile aujourd'hui les résultats de cette consultation. Ceux-ci se retrouvent à l'annexe IV du rapport. Nous sommes reconnaissants envers tous les groupes et les personnes qui ont accepté de participer à cette consultation.
La commission a pris connaissance de tous les points de vue exprimés. Elle a choisi de se concentrer sur les sujets les plus récurrents. Ainsi est-il question de la réduction à la source des matières résiduelles, puis des matières organiques, des contenants de boissons à remplissage unique, des résidus domestiques dangereux, des matières résiduelles issues des secteurs industriel, commercial et institutionnel ainsi que des secteurs de la construction, de la rénovation et de la démolition, et enfin de l'élimination des matières résiduelles.
Cependant, la commission a cru bon d'ajouter une dernière section renfermant quelques questions autres que celles abordées dans le document de consultation mais qui ont été soulevées au cours de l'exercice. Ces sujets touchent les plans de gestion des matières résiduelles, la base de données, le secteur de l'économie sociale, la recherche et le développement.
J'aimerais maintenant, avant de passer la parole à mes collègues, vous parler de deux sujets abordés dans le rapport: les contenants à remplissage unique et les résidus domestiques dangereux.
En ce qui concerne les contenants à remplissage unique, la question de ces contenants à remplissage unique a fait l'objet de nombreux commentaires durant la consultation. Plusieurs arguments en faveur ou contre l'élargissement de la consigne ont été présentés. La commission a longuement réfléchi sur les meilleurs moyens à mettre en place pour augmenter la récupération des contenants à remplissage unique et elle en est venue à la conclusion que la collecte sélective semble le système le plus performant.
La commission recommande donc au ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs de privilégier une structure unique basée sur la collecte sélective pour améliorer la récupération des contenants à remplissage unique, pourvu que les systèmes de récupération hors foyer et des édifices à logements multiples aient démontré leur efficacité. En outre, les résultats des projets pilotes de la Table pour la récupération hors foyer portent à croire que, lorsque les citoyens sont à l'extérieur de leurs foyers et qu'ils ont accès à l'équipement approprié, ils se comportent de la même façon que chez eux.
En ce qui concerne les résidus domestiques dangereux, la commission endosse pleinement le principe de la responsabilité élargie du producteur. Elle a noté la récente annonce de la ministre d'étendre la responsabilité élargie du producteur sur certains produits et elle propose d'aller encore plus loin en adoptant des règlements pour tous les résidus domestiques dangereux non assujettis à un programme. La commission recommande également de mettre en place des campagnes pour informer les citoyens sur les risques des résidus domestiques dangereux pour la santé et l'environnement. Ces campagnes d'information devraient bien sûr indiquer aux citoyens les lieux et les méthodes de collecte de ces résidus. Enfin, la commission croit qu'il est nécessaire d'augmenter substantiellement l'offre des installations de récupération pour permettre aux citoyens de se défaire des résidus domestiques dangereux.
Maintenant, je cède la parole à M. Diamond.
M. Diamond: Merci, M. Bergman. Je vais vous parler de la réduction à la source des matières organiques et l'élimination des matières résiduelles.
Concernant la réduction à la source, nous croyons que c'est le pilier central d'une gestion durable des matières résiduelles. Elle a donc recommandé, la commission, de consolider la priorité de la réduction à la source dans la nouvelle politique de gestion des matières résiduelles, notamment en faisant un suivi évaluatif du Règlement sur la compensation pour les services municipaux fournis en vue d'assurer la récupération et la valorisation de matières résiduelles. La commission croit également qu'il est primordial d'accroître les activités de sensibilisation, d'information et d'éducation de la population, particulièrement auprès des jeunes dans les écoles, car ils sont d'importants agents de changement.
La commission a pris acte du lancement, le 21 avril dernier, du code des bonnes pratiques sur l'utilisation des sacs d'emplettes et recommande à RECYC-QUÉBEC, aux municipalités et surtout aux commerçants de favoriser l'usage des sacs réutilisables.
Nous avons également recommandé que des campagnes de sensibilisation soient menées sur la pratique de l'herbicyclage concernant les matières organiques. L'objectif de la politique de gestion des matières résiduelles de 1998 à 2008 est de récupérer 60 % des résidus compostables. Le taux de récupération des matières organiques est pourtant actuellement très faible. Il se situe autour de 8 %. Nous avons constaté que beaucoup d'étapes restent à franchir pour atteindre l'objectif fixé. Cependant, on a noté que de réels progrès sont en voie de se matérialiser dans plusieurs municipalités. La consultation montre que le Québec est en train de prendre un tournant majeur en faveur de la récupération et du compostage des matières organiques. Dans un contexte mondial de hausse des coûts des denrées, de prix de l'énergie et des changements climatiques, la commission trouve impératif de tirer profit de la richesse contenue dans les matières organiques plutôt que de les éliminer.
En conséquence, nous recommandons au ministère de fixer un échéancier pour arriver à des objectifs enfouissement zéro des matières organiques en s'assurant d'utiliser des technologies appropriées et de respecter les particularités régionales. Cet échéancier devra prévoir les ressources nécessaires, par exemple en mettant sur pied un programme de financement des infrastructures de valorisation. De plus, nous avons noté qu'il existe plusieurs technologies de compostage qui semblent présenter des bénéfices notables sous certaines conditions. Il est néanmoins évident que les modalités pour s'assurer du succès du compostage sont différentes selon qu'une région est densément peuplée ou que sa population est dispersée. La commission recommande donc de privilégier les technologies de valorisation des matières organiques les moins dommageables pour l'environnement physique, social, en tenant compte des besoins régionaux. Elle recommande aussi de définir une norme des odeurs, en concertation avec les intervenants du milieu.
En ce qui a trait au compostage à domicile et communautaire, la commission est consciente que ce n'est pas la panacée, étant donné les différents types d'habitation ou d'environnement urbain. Toutefois, ce procédé permet la réduction à la source dans les quartiers pourvus de terrains assez grands pour y épandre le compostage et en tirer ainsi des bénéfices. Voilà pourquoi la commission recommande d'encourager le compostage à domicile et communautaire. Quant à l'élimination, les membres de la commission, après avoir visité des lieux d'enfouissement technique et avoir écouté les participants à la consultation, sont d'avis que beaucoup de progrès ont été accomplis dans les méthodes d'élimination des matières résiduelles. Sans remettre en question les principes et la hiérarchie des 3RV-E, nous sommes convaincus que, pour un certain temps, les sites d'enfouissement technique continueront d'être une solution valable pour l'élimination des résidus ultimes.
La commission croit fermement que la redevance à l'élimination a réussi à rendre plus concurrentielle la récupération des matières résiduelles. Pour cette raison, nous avons décidé de recommander au gouvernement de hausser significativement la redevance dans le but de détourner les résidus des sites d'enfouissement. Je vais céder maintenant la parole à mon collègue, M. Bouchard, pour parler des différents autres sujets de la commission. Merci.
M. Bouchard: Alors, merci, M. Diamond. Les membres de la commission ont noté des progrès indéniables de la récupération dans les secteurs industriel, commercial, institutionnel, ce qu'on appelle les ICI, et dans le secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition, les CRD. Aussi les membres croient-ils qu'il faut continuer sur cet élan. Notamment, on a vu des résultats assez spectaculaires dans le domaine des résidus d'asphalte, de béton, de brique, de pierre et de bois dans les CRD. Nous sommes convaincus que plus de sensibilisation et d'information ferait encore hausser les taux de récupération dans ce secteur.
Par ailleurs, le secteur de la restauration, des bars, de l'hôtellerie est peu sollicité pour la récupération des matières recyclables. Or, la proportion de plastique, de verre et de métal qui est générée est considérable. Cette industrie se heurte à une problématique bien particulière: les circuits de collecte sont quasi inexistants ou très peu structurés, et les coûts, lorsqu'il y a des services, sont très élevés.
De fait, les membres de la commission ont été sensibilisés, tout au long des auditions, à la problématique des effets de l'accroissement de la consommation hors foyer. La commission juge qu'il est essentiel d'accroître de façon significative les taux de récupération hors foyer si le Québec veut atteindre ses objectifs de récupération. Nous sommes convaincus que l'une des clés pour augmenter la récupération hors foyer réside dans le déploiement d'une meilleure offre de service, et nous formulons une recommandation, la recommandation 21 en ce sens.
La consultation montre aussi la nécessité d'un mécanisme de suivi de la mise en oeuvre des plans de gestion des matières résiduelles et d'appréciation des résultats selon des indicateurs qui sont communs et connus de tous. C'est pourquoi la commission recommande au ministère d'adopter de telles mesures de résultat.
Quant au système des indemnités qui sont versées aux municipalités pour l'élimination des matières résiduelles, la commission recommande au ministère de baser le calcul de ces indemnités sur des critères de performance qui tiennent compte des particularités locales et régionales.
Les entreprises du secteur de l'économie sociale sont des piliers importants de la réduction et du réemploi des matières résiduelles. Bien que des programmes d'aide soient à leur portée, la commission prend note que différents problèmes affaiblissent leur potentiel. Elle recommande donc au gouvernement, en collaboration avec RECYC-QUÉBEC, de mettre en place des mesures pour mieux soutenir ces institutions d'économie sociale tout en s'assurant qu'elles ne représentent pas une compétition inéquitable pour les entreprises à but lucratif.
Plusieurs ont fait remarquer à juste titre que le potentiel de valorisation qui est utilisé dans le calcul qui est fait de l'atteinte des objectifs... que le potentiel de valorisation est difficilement mesurable. La commission croit qu'il serait préférable de développer un indice de mesure de la génération des matières résiduelles qui tienne compte de la croissance économique.
En conclusion, je pense que je peux témoigner ici pour mes collègues qu'à plusieurs égards cette commission fut une expérience fascinante. Nous nous réjouissons de la forte participation aux consultations ainsi que des propositions et des suggestions qui ont été présentées pour améliorer la réduction à la source de la génération de ces matières et pour en promouvoir la valorisation.
Les hausses des quantités de matières résiduelles nous préoccupent, même si nous avons noté des progrès considérables dans divers aspects de leur gestion au cours des dernières années. Comme la politique de gestion des matières résiduelles vient à échéance cette année, la commission a voulu recommander aux autorités compétentes des pistes d'action en vue de la réactualiser. Les quelques éléments soumis à la réflexion n'épuisent pas bien sûr toutes les dimensions liées à cette question, mais nous avons bon espoir que les recommandations présentées dans ce rapport constituent des solutions durables pour améliorer la gestion des matières résiduelles, pour promouvoir le recyclage et la récupération et pour favoriser la mise en valeur en particulier des matières organiques, le but ultime étant d'atteindre l'objectif d'enfouissement zéro des résidus récupérables ou valorisables.
Enfin, vous aurez noté que le rapport a été imprimé en quantités limitées et qu'il a été imprimé sur du papier recyclable. Merci.
M. Bergman: Est-ce qu'il y a des questions?
Mme Beauchemin (Malorie): Au niveau de la collecte sélective des contenants à remplissage unique, il semble qu'il y ait des voix des deux côtés. Il y a des gens qui prônaient un élargissement de la consigne. Pourquoi avoir suggéré l'autre voie?
M. Bergman: Si je peux prendre la réponse, on voit que la collecte sélective est en progression nette, en hausse. Il y a maintenant 97 % des résidences... la collecte sélective, et les habitudes des citoyens vont dans ce sens. La clé, c'est certainement d'installer ce régime dans les résidences à multilogement et aussi dans les restos, les hôtels et les bars. Et on le dit très, très clairement, il y a maintenant la table hors foyer, qui a été fondée en 2007, et on dit très clairement qu'on privilégie ce moyen, mais pourvu qu'il y ait un succès, une augmentation de la collecte dans les résidences à multilogement et dans les restos, les bars puis les hôtels. Alors, c'est vraiment une...
Mme Beauchemin (Malorie): ...par rapport à la consigne, par exemple, qui pourrait être élargie aux bouteilles de vin, aux bouteilles de jus?
M. Bergman: Oui, mais on voulait privilégier une méthode, une méthode qui serait la plus efficace. Mais ce n'est pas pour demain, il doit y avoir une amélioration de la collecte sélective, comme j'ai dit, dans les résidences à multilogement et dans le hors foyer, comme les aires collectives... les aires communes, les restaurants, les hôtels, les bars. Et la table hors foyer a été fondée en 2007 pour cette raison. La table hors foyer est composée de RECYC-QUÉBEC, Collecte sélective Québec, la SAQ et d'autres institutions.
M. Diamond: Je peux rajouter des éléments. Ce qu'on a remarqué, avec la consigne, c'est qu'actuellement elle est en déclin et non pas en progression. Je vous donne des exemples, là, de statistiques sur les boissons gazeuses consignées. En 2004, c'était 73,3 % qui étaient récupérées grâce à la consigne. En 2005, on tombait à 70,8 %; en 2006, à 69,3 %; puis aujourd'hui, en 2007, là, les dernières statistiques, 66,8 %. Et puis ça, là-dedans, il y a un 5 % environ, là, de récupérées dans les centres de tri, qui sont réacheminées par la suite dans les statistiques de la consigne.
Mme Beauchemin (Malorie): ...fait partie de ça?
M. Diamond: Qu'on calcule effectivement.
Mme Beauchemin (Malorie): Qui est dans le 66 %.
M. Diamond: Parce qu'on les récupère, puis bon le 0,05 $ est réacheminé. Donc, il y a à peu près un 5 % qui se retrouve dans les bacs à récupération. Donc, ce qu'on voit, c'est qu'il y a un déclin, selon toutes statistiques, là, par exemple des boissons gazeuses consignées. En opposition, la collecte sélective, elle, est en progression. Donc, nous, on pense que, si on met des équipements dans les arénas, dans les lieux publics, pour permettre aux gens, là, de disposer de leurs produits, bien là, à ce moment-là il n'y aura aucun inconvénient. Au net, on va être gagnants.
Mme Beauchemin (Malorie): O.K., mais ce n'est pas répondre aussi à l'argument des supermarchés, qui sont tannés des gobeuses à l'entrée qui...
M. Diamond: Bien, ça faisait partie des arguments, entre autres. Mais ce n'est pas ça qui a fondé l'essentiel de notre décision. L'essentiel de notre décision a été fondé sur les résultats, et puis, selon les résultats, on a tout intérêt à y aller avec la collecte sélective. Ce qu'il faut savoir, c'est que, lorsque le système de la consigne a été implanté, la collecte sélective n'était pas offerte partout au Québec, alors qu'aujourd'hui c'est 97 % du Québec qui a des bacs bleus chez eux, là. Donc, le service est là. Il faut miser sur ce service-là.
M. Bergman: Je dois aussi dire que le taux de récupération à domicile maintenant, disons pour les boissons alcooliques, c'est 74 %; les bouteilles d'eau, 57 %; les bouteilles de jus; 45 %; le lait, 26 %. Et ça, c'est seulement à domicile, mais les chiffres, on n'a pas les chiffres pour hors domicile. Alors, avec une implantation, comme a dit mon collègue, de meilleures structures, on va avoir un meilleur taux de récupération dans la collecte sélective.
Mme Beauchemin (Malorie): Première chose, M. Diamond, vous avez parlé de l'enfouissement zéro des matières organiques, un échéancier, on voit ça sur combien d'années? Puis qu'est-ce que ça voudrait dire concrètement? C'est que toute matière organique doit être compostée?
M. Diamond: Absolument. Mais pas simplement les matières organiques. L'enfouissement zéro, c'est les organiques puis aussi les ultimes. Nous, on pense qu'il faut absolument changer le paradigme dans la gestion des matières résiduelles pour qu'on valorise davantage, pour que ce soit la valorisation et non pas l'enfouissement qui soit la solution.
La commission évidemment ne se penche pas sur les échéanciers, laisse le soin au gouvernement de le faire. Nous, ce qu'on souhaite, c'est enfouissement zéro et puis que la réalité régionale aussi soit prise en compte. Et puis on laisse le gouvernement faire le reste du travail. Mais la commission recommande évidemment de changer complètement le paradigme pour que l'enfouissement ne soit plus une solution, mais qu'on y aille davantage avec la valorisation.
Mme Beauchemin (Malorie): L'enfouissement zéro, ce n'est pas irréaliste?
M. Diamond: Absolument pas. D'ailleurs, on a eu toutes sortes d'intervenants qui nous ont fait la démonstration qu'il existe des technologies le permettant. Là, le débat sur la technologie, ce n'est pas à nous de le faire, mais évidemment ça existe et c'est souhaitable.
M. Bouchard: Peut-être que vous aurez remarqué que, dans l'intervention que j'ai faite, on parle d'enfouissement zéro des matières organiques et des matières valorisables. Alors, je pense que c'est un objectif qui est réaliste à moyen terme, oui.
Mme Beauchemin (Malorie): À moyen terme ou à court terme?
M. Bouchard: À moyen terme. Il faut prendre le temps de bien cerner les technologies qui sont appropriées et qui ne contribuent pas à la détérioration de l'environnement, c'est très important, celles qui sont les plus efficaces, celles qui sont à la portée de certaines communautés urbaines peut-être plus volumineuses que d'autres, et d'adapter l'ensemble des technologies aux besoins de chacune des régions.
M. Bergman: Et il y a un bénéfice pour notre société dans le traitement biologique, il y a le compost, le biogaz, alors il y a un bénéfice réel pour notre société de divertir ces matières organiques des sites d'enfouissement et pour les valoriser.
M. Diamond: D'ailleurs, la commission va même plus loin que ça, là. À la proposition 7 de notre rapport, on fait mention d'un programme d'infrastructures pour la valorisation des déchets. Donc, nous, ce qu'on souhaite, c'est qu'il y ait du financement rattaché à ça.
M. Spéciel (Olivier): Justement, au sujet du financement, il y a des chiffres qui démontrent qu'au niveau des inspections pour les sites d'enfouissement un inspecteur vient en moyenne une fois par 10 ans sur ces sites-là. Alors, j'ai trois questions.
Ma première question c'est: Est-ce que vous avez des recommandations par rapport à la possibilité de financer ce qu'on a appelé la police verte? Je pense qu'il y a eu un article de Michel Corbeil, dans Le Soleil, il y a à peu près deux semaines, sur le fait que, cette police verte, elle n'a pas les moyens de ses ambitions. Donc, ma première question, c'est: Est-ce que vous avez des recommandations claires, au ministère, par rapport à une possibilité de financer une équipe qui puisse mener des enquêtes?
La deuxième question, elle porte sur le financement donné aux municipalités. Il y a quelques municipalités, dans leur mémoire déposé, qui ont signifié que, lorsqu'elles faisaient affaire avec des entreprises qui ne respectaient pas les règlements, elles n'avaient pas les moyens financiers de faire des poursuites, de mener des recherches. Donc, est-ce que là aussi - c'est ma deuxième question - il va y avoir un financement pour les municipalités, spécifiquement lorsqu'elles doivent entreprendre des poursuites judiciaires face à des entreprises qui ont des moyens et des avocats parfois très dispendieux?
La troisième question, elle porte sur la recommandation 17 par rapport aux résidus domestiques dangereux. Vous recommandez... Vous suivez la recommandation du ministère qui a annoncé, le 17 mars 2003, un projet de règlement. On est rendu plus de cinq ans plus tard. Qu'est-ce que vous avez comme échéance précise par rapport à ce projet de règlement sur les résidus domestiques dangereux? Et, si vous avez un échéancier précis, en quoi ça ne vient pas contredire la recommandation 24 où vous suggérez d'alléger la réglementation par rapport aux cimenteries?
M. Bergman: Si je peux prendre les questions, collègues, en ce qui concerne le financement, ce n'était pas le but de notre étude et nos études, et on laisse le tout, en ce qui concerne le financement, au ministère. C'était notre but pour faire des recommandations et pour laisser... on n'avait pas les moyens pour étudier le financement des recommandations mais pour faire des recommandations.
En ce qui concerne les résidus domestiques dangereux, il y a un règlement proposé par le ministère qui a vraiment à coeur la responsabilité élargie des producteurs, règlement qui mise sur les produits électroniques, les piles et les lampes fluorescentes, et règlement proposé qui sera déposé bientôt. Mais, nous, comme commission, on suggère au ministère d'aller plus loin en ce qui concerne les solvants, les putrescibles, les plastiques agricoles, les aérosols, et tout autre résidu domestique dangereux. Alors, on fait une recommandation au ministère dans ce sens.
Et vous rappeler qu'il y avait un règlement sur la récupération et la valorisation des contenants de peinture et... des contenants de peinture et des peintures, en l'année 2000, qui a résulté en l'organisme Éco-peinture, qui a une entente maintenant avec RECYC-QUÉBEC, et aussi un règlement sur la récupération et la valorisation des huiles usagées et des contenants d'huile en l'année 2000. Et vous rappeler qu'il y a quatre entreprises qui ont leurs propres systèmes maintenant pour la récupération, et des autres sociétés qui ont formé une société de gestion des huiles usagées, qui ont une entente avec RECYC-QUÉBEC.
M. Spéciel (Olivier): ...ces ententes-là. Mais la question, c'est, vu qu'on a démontré par le passé qu'il n'y avait pas de moyens financiers ni pour les municipalités ni pour les citoyens de... lorsque vous dites d'arriver avec des enquêtes propres qui peuvent démontrer que, malgré les encouragements, et malgré l'éducation, et les programmes d'éducation, lorsqu'il arrive de véritables problèmes, lorsqu'il arrive de véritables catastrophes, c'est difficile pour les municipalités d'avoir les moyens de poursuivre ces entreprises-là. Donc, quels sont les moyens que vous recommandez au ministère de donner à ces municipalités-là, concrètement? Et est-ce que la recommandation 23... la recommandation 24, où vous suggérez d'alléger la réglementation, ne va pas en contradiction avec la 17?
M. Diamond: Le premier sujet, concernant la première partie de votre question, ça n'a pas été un élément abordé par la commission et ça n'a pas, à ma mémoire, là, fait partie des requêtes faites par le milieu municipal. Donc, je pense qu'on n'est pas aptes à répondre à cette question-là dans un premier temps.
Concernant celle sur les cimenteries, qui fait... je pense que vous faites référence à la proposition 24 ou 23, ou du moins celle sur les cimenteries, d'alléger la responsabilité, ce n'est pas d'alléger une responsabilité, la réglementation, c'est que la requête qui a été faite à la commission, c'est qu'il existe plusieurs résidus qui sont destinés à l'enfouissement, qui pourraient être utilisés dans le procédé de fabrication des cimenteries étant donné que les cimenteries ont une combustion complète des produits, là. C'est-à-dire, actuellement, on brûle beaucoup, beaucoup de coke, qui est un résidu fossile excessivement dommageable mais, en bout de ligne, ce qui en sort n'est presque rien, puisque la combustion est pratiquement complète. On brûle actuellement des pneus, par exemple tous les pneus usagés qui sortent des sites d'enfouissement. Donc, d'alléger cette réglementation-là permet à des cimenteries d'aller chercher des matières qui sont destinées à l'enfouissement pour leurs procédés. Actuellement, ce n'était pas le cas parce que la réglementation était excessivement sévère. Bien souvent, ils faisaient les démarches envers le ministère pour avoir des produits destinés à l'enfouissement, le temps que tout le processus soit terminé et autorisé, bien les matières n'étaient plus là, là. Donc, il y avait un problème dans ce sens-là en termes de rapidité d'exécution. Donc, nous, en réalité, c'est une forme de valorisation, ce qu'on propose dans cette proposition-là, c'est de détourner ce qui est destiné à l'enfouissement pour des procédés de fabrication, et c'est tout aussi propre comme procédé.
M. Bergman: Si je juste peux ajouter...
M. Diamond: Absolument.
M. Bergman: ...on a aussi dit qu'il doit tenir compte, le ministère, de l'impact sur l'environnement et sur la santé publique, mais, comme M. Diamond l'a dit, en ajoutant des items que la cimenterie peut brûler.
M. Diamond: Absolument.
M. Spéciel (Olivier): Dernière question. Vous prévoyez des mécanismes de suivi puis des mesures de résultat advenant qu'avec ces mécanismes de suivi on obtienne des résultats qui ne soient pas satisfaisants en fonction des critères énoncés. Qu'est-ce que vous proposez? Est-ce qu'il va y avoir des mesures coercitives ou il va y avoir d'autres recommandations à la ministre?
M. Bergman: Bon, voilà, la politique québécoise de 1998 à 2008 sera maintenant renouvelée. Une nouvelle politique sera déposée par la ministre et le ministère, un échéancier choisi par la ministre pour le prochain 10 ans, et on espère et on pense que la ministre serait inspirée par le rapport qu'on dépose aujourd'hui. Notre rapport sera, on espère, une inspiration pour la ministre et le gouvernement dans la prochaine politique qui sera déposée par le gouvernement du Québec pour les prochaines 10 années.
M. Bouchard: Peut-être un ajout de réponse à ce que vient de dire M. le président. Je vous ramène à la recommandation 33 dans laquelle on suggère que les indemnités qui sont versées aux municipalités en vertu de l'élimination des matières soient assujetties à des critères de performance. Alors, je pense que ça répond en partie à votre question.
M. Spéciel (Olivier): Merci.
M. Bergman: Alors, s'il n'y a pas...
Mme Fleury (Élizabeth): Oui, moi, j'en ai une.
M. Bergman: Madame.
Mme Fleury (Élisabeth): La recommandation 3 où vous parlez de l'importance de la réduction à la source, vous parlez de favoriser l'usage des sacs recyclables. Je me demande... Je pense que c'est déjà... Les entreprises, les épiceries ont déjà, les commerçants ont déjà commencé. Ça fait longtemps, je pense, plusieurs années, où est-ce qu'on encourage cette mode-là. Est-ce qu'il n'y a pas moyen d'y aller avec une mesure... On a déjà suggéré la taxation par rapport à l'utilisation des sacs de plastique. Est-ce que ça vous a été suggéré? Si oui, pourquoi vous ne l'avez pas retenue?
M. Bouchard: Bien, de fait, la commission, dans la mission que nous nous étions donnée, toute la question des sacs de plastique n'apparaissait pas à l'agenda. Nous voulions plutôt privilégier une action ministérielle le plus rapidement possible dans le domaine, parce qu'on nous avait dit que le ministère était en voie de statuer sur la question des sacs de plastique. Vous avez vu qu'il y a eu, je pense, il y a trois semaines ou un mois, une annonce de la part de la ministre concernant l'adoption d'un code auquel les commerçants s'associeraient pour éliminer les sacs de plastique à usage unique. Une fois, j'imagine, cet essai fait et mesuré selon les impacts, peut-être serons-nous obligés d'aller à une nouvelle étape plus contraignante, mais pour le moment c'est ce que le ministère a proposé.
Mme Fleury (Élizabeth): Est-ce que vous avez l'impression aussi, par rapport au suremballage des produits... J'ai l'impression encore qu'on encourage les entreprises à, mais je n'ai pas l'impression que... Est-ce que ce serait une bonne idée de les forcer à diminuer les emballages?
M. Bergman: M. Diamond.
M. Diamond: Oui, c'est effectivement la pièce maîtresse, la recommandation 1 de notre rapport, qui fait référence, là, au Règlement de compensation qui actuellement compense, je pense, à près... de l'ordre de 50 % les municipalités dans tout ce qui est les coûts engendrés par la collecte sélective. Et puis ça, c'est l'entreprise, hein, premier importateur, producteur, qui paie les coûts de ça. Nous, on pense que c'est un instrument important pour réduire à la source ce qui est mis sur le marché, puis d'ailleurs l'entreprise a déjà commencé.
Il est trop tôt pour voir les résultats jusqu'à maintenant parce que c'est relativement récent, mais l'entreprise, hein... On a eu toutes sortes de partenaires, de témoignages d'entreprises qui réduisent, par exemple, leurs bouteilles, réduisent les bouchons pour mettre moins de matériel sur le marché. Nous, ce qu'on statue là-dessus, c'est de dire qu'on va suivre l'évolution de cette loi-là, de ce règlement-là, et, s'il y a lieu, bien, augmenter ou diminuer, de jouer avec ces barèmes-là parce que c'est une liste qui diffère... qui est très différente d'un matériel à l'autre, bien on va jouer avec ça pour réduire à la source. Donc, c'est un moyen qui nous apparaît être directement lié à ce qui est mis sur le marché.
M. Spéciel (Olivier): Est-ce que vous qualifieriez ça de mesure écofiscale?
M. Diamond: Pas nécessairement fiscale parce qu'en réalité c'est tout simplement le principe de prise en charge, de responsabilité des producteurs ou importateurs.
M. Bouchard: Utilisateur-payeur.
M. Diamond: Une forme de responsabilité élargie, là, c'est-à-dire de ce qu'ils mettent sur le marché, il y a un coût à ça, et c'est destiné pour justement amener une conscience d'esprit que ce qui est mis sur le marché est destiné à la collecte sélective. Dans ce cas-là, ils vont avoir une compensation. Et puis, eux, bien, comme c'est des coûts engendrés, bien ils veulent diminuer ces coûts-là, il va y avoir un effort de réduction à la source de la part de l'entreprise.
M. Spéciel (Olivier): Est-ce que vous auriez pu avoir un mandat de carrément encourager des mesures écofiscales qui encourageraient les entreprises qui, elles, dans le design des produits et des services, ont déjà inclus l'impact écologique, et donc ce qu'ils mettent sur le marché peut profiter de mesures écofiscales pour que ce soit dans la recherche et le développement, entre autres?
M. Diamond: Ça aurait pu arriver. Ça n'a pas fait partie des recommandations que des participants nous ont données. Mais le règlement nous apparaît être justement cette réponse-là. Ça nous apparaît, nous, inclure à la fois un régime semi-fiscal, un régime de responsabilité de pollueur-payeur. Ça a un chapeau excessivement grand, cette loi-là, et puis on met beaucoup d'espoirs sur cette loi-là, tout en sachant qu'il faut éventuellement peut-être faire un suivi, là.
M. Bergman: On a misé beaucoup aussi sur les questions d'éducation du consommateur, des producteurs et toute la société. Ça, c'est la base du programme et de la politique de réduction des matières résiduelles, et certainement on a vu que l'éducation joue un grand, grand rôle. La sensibilité de la population en ce qui concerne la réduction des matières résiduelles et la réduction à la source, c'est une question de connaissance par la population, et la population veut une réduction à la source, et on va voir une évolution de cet item de réduction à la source dans les années qui viennent.
Il n'y a pas d'autres questions? Je vous remercie beaucoup. Merci à mes collègues.
(Fin à 12 h 8)