(Onze heures vingt-deux minutes)
Mme David (Gouin) : Je suis extrêmement
heureuse de présenter, ce matin, le projet de loi n° 492. Pour la petite
histoire, c'est un projet de loi qui est une sorte de remake amélioré du projet
de loi que j'avais déposé, à peu près à la même période l'année dernière, sur
la protection des locataires aînés. Pourquoi est-ce que je redépose un nouveau
projet de loi? C'est bien simple, c'est que, depuis des mois, j'ai eu des
discussions avec le ministre de l'Habitation, avec son équipe, on a peaufiné le
projet de loi de l'année dernière, on a éliminé les irritants. Moi, ce que je
voulais, c'est d'en arriver à un point où j'étais à peu près assurée de l'appui
du gouvernement du Québec à un projet de loi dont l'unique but, c'est vraiment
de protéger au maximum les locataires qui ont 75 ans, qui ont 80 ans,
et qui, dans les quartiers centraux de nos grandes villes, sont trop souvent
évincés parce que des propriétaires veulent faire plus d'argent avec des
logements qu'ils louaient parfois depuis 30 ans à des personnes âgées.
Alors, pour l'essentiel, c'est un projet
de loi qui dit ceci : Vous voulez évincer une personne aînée soit à
faibles revenus ou qui a un handicap, bien, vous devrez la reloger, vous devrez
la reloger dans un logement équivalent et pas trop loin de chez elle, et là il
y a des technicalités. Très important parce que ça va faire qu'un certain
nombre de propriétaires vont hésiter à évincer parce qu'après il faut se donner
la peine de trouver un logement équivalent, et puis tant mieux! Moi, ce que je
vise, c'est que les locataires aînés puissent rester dans leur logement. Dans
le cas où le propriétaire décidera d'aller de l'avant, bien, il trouvera,
effectivement, un logement comparable avec un peu les mêmes services autour,
avec à peu près la même grandeur, à peu près le même prix pour la personne
aînée.
Je veux dire que mon projet de loi a l'appui
de tous les grands regroupements nationaux d'aînés et, en terminant, je veux
signaler aussi que le leader du gouvernement entend appeler le projet de loi
très rapidement et que je peux espérer, je pense, vraiment, raisonnablement,
une adoption du principe avant l'ajournement, suivie de consultations vers la
fin de l'été et d'une adoption à l'automne. Donc, ce serait, pour Québec
solidaire, le tout premier projet de loi adopté de son histoire. On sortira le
champagne l'automne prochain!
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Quelles modifications vous avez dû faire pour avoir l'aval du gouvernement?
Mme David (Gouin) : Là-dessus,
je vais être très claire : aucune modification ne remet en cause le
principe du projet de loi, hein, que je viens de vous expliquer; on veut évincer,
on reloge. Ça, ça demeure intact. Mais, par exemple, l'ancien projet de loi
parlait de personnes en situation de vulnérabilité, et là c'est un peu
juridicocompliqué. Il fallait spécifier tout ça : qu'est-ce que la
vulnérabilité, quels sont les grilles qui peuvent nous permettre... On a décidé
de l'enlever et de dire tout simplement : Les personnes aînées couvertes
par le projet de loi sont ou bien à faibles revenus ou bien en situation de
handicap, ce qui était vraiment beaucoup plus simple. Je me suis rangée aux
arguments parce que c'étaient des bons arguments, tout simplement.
Là où on a travaillé bien fort aussi,
c'est pour trouver quelque chose de raisonnable quant à la distance qu'il y
aura entre l'ancien logement et le nouveau logement, selon qu'on est dans le
quartier central d'une grande ville, selon qu'on est à Montréal ou selon qu'on
est en région. Soyons clairs, le problème que je soulève par le projet de loi
existe très, très peu en région. C'est un problème de quartiers centraux des
grandes villes, des quartiers qui prennent une grande valeur, où il y a
beaucoup de spéculation immobilière et où des propriétaires trouvent plus
intelligent d'évincer des aînés. Moi, j'en ai eu à mon bureau, des dames, là,
de 85 ans qui habitent là depuis 30 ans, parce qu'ils veulent faire
de l'argent… Ça se passe très peu en région, mais il fallait quand même avoir
des spécificités pour Montréal, autres grandes villes et régions.
Alors, vous voyez, on était vraiment dans
des discussions assez techniques pour rendre le projet de loi vraiment conforme
à ce qu'on voulait pour le rendre acceptable, moi, je dirais, par toutes les
parties en présence, donc du côté des locataires comme du côté des
propriétaires. Mais là il faudra voir, je m'attends quand même à des débats
assez vifs.
M. Bélair-Cirino (Marco) : La
réaction a été quand même rapide l'année dernière et pratiquement violente.
Donc là, vous estimez avoir réussi à apaiser leurs principales craintes avec ce
nouveau projet de loi?
Mme David (Gouin) : Écoutez,
la CORPIQ et autres associations de propriétaires sont un petit peu, par
définition, contre tout nouveau règlement qui encadre le droit au maintien dans
les lieux, dans le logement. C'est comme un peu une question de principe.
Alors, je ne m'attends pas à ce que la CORPIQ me dise : Merci beaucoup,
Mme David, vous êtes vraiment une femme formidable. On va encore me
traiter de socialiste, ce n'est pas grave.
Mais on va vraiment plaider, au cours des
consultations… Puis c'est un projet de loi vraiment raisonnable. Et moi, j'ai
des amis propriétaires de soit un immeuble ou quelques immeubles et, s'il le
faut, je les amènerai ici, à l'Assemblée nationale. Ce ne sont pas tous des
affreux gauchistes, et je vous jure que ces gens-là me disent : Moi, je
suis prêt à dire publiquement, n'importe quand, que, non, je ne mettrai jamais
dehors une dame de 85 ans, ça ne se fait pas, ça, dans la vie. Alors, c'est
un peu ça que je veux dire par mon projet de loi. Puis moi, je pense que beaucoup
de propriétaires sont d'accord avec ce que je défends.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Mais,
à l'heure actuelle, la législation et la réglementation permettent à des
propriétaires de mettre à la porte des personnes aînées qui occupent, depuis de
longues années, un logement?
Mme David (Gouin) : En
invoquant tout simplement la nécessité d'agrandir ou de subdiviser le logement,
ce n'est pas plus compliqué que ça. Dans certains cas, c'est vrai et puis, dans
d'autres cas, ça n'est pas vrai. Et là il y a tout le problème de la
spéculation, dont je pourrais vous parler deux heures.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
…combien de personnes…
Mme David (Gouin) : Ça, c'est
impossible de le savoir parce que ça n'est pas noté, ça n'est noté nulle part.
Ce que je peux vous dire, par contre, c'est que, dans ma circonscription — c'est
Gouin, mais c'est Rosemont—La Petite-Patrie — à Montréal, le
comité logement est débordé par les cas d'éviction. Et là on n'est pas du tout
dans la situation des mauvais payeurs, hein? Vous oubliez tout ce pan-là, là,
ce n'est pas ça. Mais de plus en plus, dans nos quartiers, les cas d'éviction
se multiplient pour agrandissements, subdivisions. Et, dans un certain nombre
de ces cas-là, en fait, il s'avère, quelques mois plus tard, que ça n'était pas
vrai, c'est revendu, c'est transformé en condos, les gens font du profit avec
ça. Il y a toutes sortes de choses qui se passent, là.
Alors, mon projet de loi n'arrête pas
toute la spéculation immobilière à Montréal, soyons clairs, il ouvre simplement
une petite fenêtre. Il dit aux aînés : On va respecter votre droit au
maintien dans les lieux. Parce que des infirmières, des travailleuses sociales,
des chercheurs en politique publique nous ont démontré, depuis des années, que,
plus on vieillit en âge, plus c'est difficile de déménager, et qu'il y a à ça
des conséquences psychosociales importantes.
Et moi, je fais appel, dans le fond, au
sens de la solidarité, qui est assez répandu chez les Québécois, y compris chez
un bon nombre de propriétaires : S'il vous plaît, laissez les aînés
tranquilles.
M. Robitaille (Antoine)
:
Sur les terres patrimoniales de Sillery, votre formation politique a posé
plusieurs questions, là. Donc, est-ce que le ministère de la Culture fait bien
son travail?
Mme David (Gouin) : Écoutez,
notre attente vis-à-vis le ministère de la Culture, c'est qu'il soit
extrêmement rigoureux dans la protection du patrimoine, en général, au Québec
et, dans ce cas précis, dans la protection du patrimoine de Sillery. Je sais,
par ma collègue Manon Massé, qui travaille sur le dossier — ça n'est
pas mon dossier — qu'il y a beaucoup de discussions en cours, mais j'ai
vu aussi que le maire Labeaume traitait assez légèrement le projet de
développement touristique dans ce coin-là, donc… Je pense que le promoteur a
des appuis, et, oui, à Québec solidaire, nous comptons sur le ministère de la
Culture pour protéger le patrimoine, y compris à Sillery.
M. Robitaille (Antoine)
:
Qu'est-ce qu'on devrait faire avec les terres patrimoniales, selon vous, de
Sillery? Un «plaines d'Abraham II» ou…
Mme David (Gouin) : Écoutez,
je vous le répète, ça n'est pas mon dossier, c'est celui de ma collègue Manon
Massé, à qui vous pouvez téléphoner ou écrire. Mais je vais simplement répéter
que je connais un peu le projet De cap en cap, je trouve que c'est un bon
projet, c'est un projet qui peut être intéressant pour les gens du quartier, de
la région, pour les touristes. Il me semble qu'il faut regarder du côté de la
mise en valeur du patrimoine et d'un projet touristique plutôt que d'accorder
trop de permis à des promoteurs qui s'intéressent très peu au patrimoine.
M. Robitaille (Antoine)
:
Est-ce que vous évitez d'aborder des questions qui pourraient vous mettre en
opposition à votre soeur?
Mme David (Gouin) : Vous
savez, il y a déjà une histoire, à l'Assemblée nationale, de personnes de la
même famille qui ne sont pas dans les mêmes partis politiques, je pense aux
frères Johnson. Règle générale, ce que nous savons, c'est qu'ils évitaient de
se trouver en confrontation pour des raisons, je pense, que tout le monde
comprendra. Je fais la même chose.
M. Robitaille
(Antoine)
: Merci.
Mme Plante (Caroline)
:
Mrs. David, we are learning today that owners of private subsidised day-cares
who sell their day-cares…
Des voix
:
…
Mme David (Gouin) :
Excuse me, I don't understand nothing…
Mme Plante (Caroline)
:
Yes, I'll speak louder. So, today, we're finding out that owners of private
subsidised day-cares who chose to sell their day-cares actually made a lot of
money, and the PQ, in the House, called it a racket, they called it speculation
on the back of children. What do you think of it?
Mme David (Gouin) :
I think this is the illustration of the big difficulty we have with all these
private day-cares. We give fundings to them because we give money to the
families, you know, it's indirectly a way to funding these private day-cares,
and so some of them make a lot of money, partly with state money. And since
long time, Québec solidaire said : The day-care centers must be public,
they are «corporations autonomes»…
Mme Plante (Caroline)
:
Independent corporations, autonomous corporations…
Mme David (Gouin) :
Independent, yes, because it's a social enterprise, you know, but it's not to
make money. Day-cares are private, «les CPE», là, private, but «sans but
lucratif», bon, OK, and they depend all the way from state funding plus what parents give, and it is the parents who control the
program, the way the educators… the teachers take care of the children. That is
the best way to organize day-care au Québec, it's not the private sector, for many reasons. Today, we have one
reason, but we know also that a lot of complaints against day-care centers are
against private day-care. So, it's not a good way to give all these permits to private day-care, and we do that since 10,
12 years, too much, too much permits.
Mme Plante (Caroline)
:
What do you think the Minister should do now?
Mme David (Gouin) :
I think, what we need, really… but the Liberal Party won't do that, OK, but what
we need really is stop giving new permits to private day-care and give permits
to «centres à la petite enfance» and help them to develop themselves.
Mme Plante (Caroline)
:
And you're laughing because the Liberals…
Mme David (Gouin) :
The Liberals won't do that. We need Québec solidaire Government to do that.
Mme Plante (Caroline)
: …philosophy or…
Mme David (Gouin) : Philosophy and, in the past, we saw that they have many friends on
day-care, private day-care. But today I would say, yes, philosophy and probably
it costs less to have private day-care than to give money to «centres à la
petite enfance», but it's so better, you know.
Mme Plante (Caroline)
: And then some people benefit from what we're seeing today,
individuals benefit.
Mme David (Gouin) : Yes,
exactly.
Mme Plante (Caroline)
:
Thank you.
(Fin à 11 h 33)