(Quinze heures six minutes)
M. Coiteux : Alors, mesdames
messieurs, bonjour. Je suis très heureux d'être ici, devant vous, aujourd'hui
pour vous présenter le projet de loi n° 15, un projet de loi qui concerne
la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des
réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État.
On va commencer par le début de cette
histoire. Écoutez, lorsque j'ai été nommé président du Conseil du trésor, l'une
des premières questions que j'ai posées à mes fonctionnaires, c'était de
savoir : Bien, il y a combien de personnes qui travaillent dans le secteur
public au Québec? Et, très honnêtement, la réponse m'a un peu surpris, essentiellement
parce qu'il y a eu une certaine hésitation, qui était un peu la suivante :
Bien, M. le ministre, ça dépend un peu de ce qu'on entend par «secteur public».
Il y a la fonction publique, il y a le secteur parapublic, il y a le
péripublic, et ce sont tous des univers différents, sur lesquels on a
différentes informations, à des dates différentes, et souvent en fonction de catégories
aussi différentes. Et, dans les faits, là où on avait le plus d'information
puis surtout de l'information, je dirais, en temps réel, là, en temps qui est
utile pour la gestion des ressources humaines, c'était essentiellement dans la fonction
publique, évidemment qui est beaucoup plus près, là, des activités du gouvernement
lui-même, mais ça ne représente ultimement qu'environ 15 % des employés de
l'État. Autrement dit, ce n'est pas qu'on n'a aucune information concernant les
85 % restants, mais cette information, elle nous arrive avec un délai
important et elle n'est pas nécessairement exactement de la même nature que
l'information qu'on a pour la fonction publique.
Alors, pour moi, dès le départ, il était
très clair que le gouvernement n'avait ni les pouvoirs, ni les moyens de
planifier et de suivre adéquatement l'évolution des effectifs dans l'ensemble
du secteur public québécois, et c'est l'origine de ce projet de loi. Alors, ce
projet de loi s'inscrit, par contre, évidemment, dans un esprit qui est
beaucoup plus général que ce questionnement.
Dans quoi on est actuellement au Québec?
On est au coeur d'un exercice ambitieux de modernisation et de repositionnement
pour un État moderne, qui possède tous les outils nécessaires pour remplir adéquatement
sa mission. Et évidemment, dans ce contexte-là, le gouvernement doit être en
mesure de bien connaître l'affectation des effectifs, notamment afin de pouvoir
bien les déployer, là où sont les véritables besoins, et c'est particulièrement
vrai pour les réseaux de la santé et de l'éducation.
On observe, par ailleurs, une croissance
annuelle de l'effectif, dans l'état actuel des choses, à environ 6 250
équivalents temps complet par année, et cette croissance est attribuable en
grande partie au réseau de la santé et des services sociaux, à l'éducation et
non pas à la fonction publique, mais néanmoins ça rend plus difficile
l'objectif d'atteindre l'équilibre budgétaire.
Vous savez, les dépenses de rémunération représentent
une dépense importante pour l'État. Si on les met en rapport aux dépenses de
programmes, on avoisine les 60 %, alors elles doivent donc inévitablement
faire partie de la stratégie gouvernementale de meilleure gestion des dépenses.
Le gouvernement doit savoir à quelle fin est utilisé l'argent des
contribuables. Ce projet de loi s'inscrit aussi dans un engagement que nous
avons pris auprès de la population, soit celui d'atteindre l'équilibre
budgétaire pour 2015‑2016 et de le maintenir pour les années suivantes.
D'ailleurs, l'atteinte de l'équilibre budgétaire, ça vaut la peine de s'en
rappeler, elle était prévue pour l'exercice 2013‑2014, et c'était un objectif
qu'on s'était donné comme gouvernement dès 2008‑2009. On s'était donné
l'objectif de l'atteindre cinq ans après la récession. Bon, force est de
constater qu'on n'a pas livré la marchandise. Alors, maintenant, il n'est plus
question de rater la cible. Nous passons à l'action et nous agissons
maintenant, dès maintenant et pour l'avenir.
Au cours des prochaines années, le
gouvernement misera notamment sur les départs à la retraite afin de répondre à
des besoins jugés prioritaires, tout en freinant la croissance de l'effectif du
secteur public. Il faut donc nous doter des moyens nécessaires pour mieux
encadrer et contrôler les effectifs et être en mesure de bien planifier les
services offerts aux citoyens, et ce, à l'intérieur des moyens financiers réels
qui sont les nôtres. Alors, le projet de loi déposé aujourd'hui se divise en
trois volets principaux. Il y a un volet de dénombrement des effectifs, il y a
un volet de gel des effectifs et il y a un volet qui consiste à baliser les
contrats de service pour qu'on s'assure que ces contrats ne puissent contourner
la loi si celle-ci est adoptée.
Alors, on va reprendre ces volets. Tout
d'abord, donc, le projet de loi permettrait d'assurer un dénombrement des
effectifs dans l'ensemble du secteur public québécois, son ensemble. Vous savez
qu'un gel d'embauche s'applique déjà au personnel de la fonction publique, mais
ce projet de loi prévoirait également, non pas le gel de l'embauche, mais le
gel des effectifs des secteurs public, parapublic et péripublic jusqu'à la fin
de l'exercice financier 2015‑2016, ainsi que l'a annoncé mon collègue Carlos
Leitão dans le budget qui a été présenté au mois de juin dernier; le but,
évidemment, étant de rétablir l'équilibre budgétaire dès l'an prochain, mais
aussi d'améliorer la gestion des effectifs maintenant et pour l'avenir.
Alors que nous souhaitons appliquer un gel
des effectifs au secteur public, nous voulons en même temps éviter qu'une voie
de contournement ne se crée et que le nombre de contrats de services augmente
en parallèle. C'est une préoccupation que nous avons, et nous proposons par
conséquent des mesures concrètes pour éviter une telle situation. En effet, le projet
de loi établirait qu'un organisme public ne puisse conclure un contrat de
service si celui-ci avait pour effet d'éluder les mesures de contrôle relatives
aux effectifs. Ainsi, la conclusion de tout contrat de service par un organisme
public durant les périodes soumises à des mesures de contrôle devrait
généralement être autorisée par son dirigeant. Le projet propose de renforcer,
à cet égard, l'imputabilité des dirigeants liée à de telles décisions. Et par
ailleurs un pouvoir de surveillance serait conféré au président du Conseil du
trésor à cet effet.
Afin de s'assurer du respect de la loi, si
celle-ci est adoptée, des mesures de reddition de comptes, de vérification et
de surveillance additionnelle sont prévues, tel que cela vous a été présenté
lors du briefing technique. Dans le contexte actuel de modernisation, de
repositionnement de l'État et de redressement des finances publiques, il
devient absolument indispensable de bénéficier rapidement de données fiables
sur les ressources qui oeuvrent dans les différents champs d'activité du
secteur public. Ce projet de loi nous permettra de recueillir les renseignements
nécessaires à une meilleure planification de nos effectifs en fonction des
besoins et d'optimiser l'efficience de la prestation des services aux citoyens.
Il s'inscrit en toute cohérence avec le plan du gouvernement en ce qui concerne
le redressement des finances publiques en permettant de mieux contrôler les
effectifs et de les affecter là où sont les priorités, et, bien entendu, de
rétablir l'équilibre budgétaire dès le prochain exercice financier.
J'en appelle donc à la collaboration des
partis d'opposition afin que nous adoptions rapidement ce projet de loi. Si l'opposition
souhaite des consultations, nous sommes ouverts à entendre les différents points
de vue. En ce qui a trait à l'opération gouvernementale générale, dans ce
contexte de modernisation, le gouvernement souhaite que tous les ministères et
organismes, de même que les employés et les partenaires de l'État, participent
à cet effort national qui est essentiel à notre prospérité. Je vous remercie.
La Modératrice
: Pour
la période de questions, Tommy Chouinard, LaPresse.
M. Chouinard (Tommy)
:
J'aimerais savoir… un gel des effectifs pour… public, parapublic, péripublic,
comme vous dites, pour, donc, l'année 2015, l'année 2016 également, les
exercices financiers. Le projet de loi prévoit ce gel pour trois mois, c'est-à-dire
pour les trois premiers mois de l'exercice… les trois premiers mois de l'année
2015, pardon, en disant que ce gel doit… en fait, est fixé sur le nombre
d'employés qu'il y avait en 2014, là, environ. Bon. Pourquoi est-ce que cette
période-là est plus courte que ce que vous nous annoncez comme gel?
M. Coiteux : Non. Ce qu'il
faut, c'est d'avoir un point de référence. Alors, il va falloir établir des
enveloppes d'effectifs par ministère, par société d'État, et ces enveloppes-là
doivent avoir un point de référence. On gèle à partir de quoi, de combien?
Alors, il va falloir connaître la situation exacte des effectifs au cours des
trois premiers mois de l'année 2014 pour que ça nous serve de point de
référence à partir duquel on va pouvoir geler à partir du premier trimestre de
2015. C'est ça, l'objectif, ici. On a besoin d'un point de référence,
essentiellement.
Mais, maintenant, le gel va s'appliquer
pendant le dernier trimestre de notre année financière 2014‑2015 puis durant
l'ensemble de notre année financière 2015‑2016, qui va se terminer, donc, le 31
mars 2016.
M. Chouinard (Tommy)
:
D'accord. Est-ce qu'au-delà de cette période le gouvernement entend maintenir
ce gel ou il pourrait aller plus loin et fixer des cibles qui sont plus basses
que le niveau d'effectifs préalablement fixé?
M. Coiteux : Non. L'objectif
ici est d'éviter, au cours de cette période exigeante, hein, de retour à
l'équilibre budgétaire… d'éviter une croissance des effectifs qui aurait lieu
si on ne se dotait pas des outils nécessaires, à travers, notamment, ce projet
de loi, cette loi si elle est adoptée. Au-delà de ça, la possibilité d'exercer
un contrôle va demeurer dans la loi, mais il n'est absolument pas prévu
d'étendre le contrôle des effectifs au-delà du laps de temps que je viens
d'indiquer.
Si, plus tard, dans l'avenir, on se
retrouvait à nouveau dans une situation où il serait nécessaire de recourir à
une période de gel des effectifs, de contrôle des effectifs, nous aurions les
outils nécessaires puisqu'on aurait cette loi.
M. Chouinard (Tommy)
:
Une dernière chose. C'est que, dans les plans de… les scénarios qui sont à
l'étude, là, pour la révision des programmes puis les compressions, il y a le
ministère de l'Emploi, par exemple, qui prévoit, pour réaliser des économies,
de se départir de quelque chose comme 500 employés… j'y vais de mémoire, là, sur
le papier qu'on a fait, là, mais 500 employés occasionnels.
Donc, est-ce que je comprends que le gel
n'est… si on décrète un gel des effectifs, ça ne veut pas dire, par ailleurs,
que, si des compressions sont nécessaires, on doive se départir d'employés?
M. Coiteux : Bon, deux choses
ici. D'abord, en ce qui concerne la révision des programmes, aucune décision à
l'égard de quelque programme que ce soit n'ayant encore été prise, je ne
commenterai pas des scénarios qui auraient pu être évoqués pour diverses
raisons, là. Parce qu'il n'y a pas de décision de prise, donc il n'y a pas
encore une annonce de ce qu'on va faire dans un programme particulier. Alors,
c'est une question qui est hypothétique ici, bien entendu.
Maintenant, les cibles d'effectifs
soumises au gel sont des maximums, on s'entend. Et donc, si, dans certains cas,
il pourrait y avoir moins d'effectifs puis qu'on continue de donner les
services à la population parce qu'on a réorganisé les choses, parce qu'on fait
mieux les choses, parce qu'on a amélioré notre efficience, il n'y a aucune
contradiction entre ce projet de loi là et d'autres initiatives qu'on pourrait
prendre, par ailleurs.
La Modératrice
:
Jocelyne Richer, LaPresse canadienne.
Mme Richer (Jocelyne)
:
Oui. Bonjour, M. Coiteux. On parle d'un gel global des effectifs, mais est-ce
que vous vous donnez le droit, si je peux dire, quand même, d'augmenter les
effectifs, par exemple, dans un ministère ou un organisme et de réduire le
nombre d'effectifs dans un autre?
M. Coiteux : Bon. Alors, il y
a quand même des responsabilités qui sont conférées au ministre responsable,
particulièrement dans les réseaux de l'éducation et de la santé. On ne peut pas
envisager, notamment, un gel d'effectifs par école, ne serait-ce que parce
qu'il peut y avoir l'ouverture d'une nouvelle école, et donc si, avant
l'ouverture, elle était à zéro, elle ne va pas rester à zéro. Il va falloir
pourvoir des effectifs nécessaires à l'école pour qu'elle puisse fonctionner.
Par contre, le ministre de l'Éducation, dans son enveloppe d'effectifs, va
avoir la possibilité d'allouer les ressources là où sont les besoins. Donc, il
aura une flexibilité quant à l'allocation des effectifs à l'intérieur des
réseaux. Ça va être sous la responsabilité des ministres concernés, bien sûr.
Et maintenant, si, dans des circonstances
exceptionnelles, il y avait lieu de dépasser les seuils, il faudrait que ça
passe par une dérogation, comme actuellement il y a un gel d'embauche dans la
fonction publique. Ça ne veut pas dire que, dans des cas absolument
nécessaires, il est interdit d'embaucher, mais ça ne se fait pas
automatiquement. Il faut solidement justifier tout ça, il faut passer par une
demande de dérogation.
Alors, il y a un frein très sérieux qui va
être mis à la croissance des effectifs, mais on va toujours faire preuve du
plus grand discernement, et c'est au ministre concerné de s'assurer que les
services aux citoyens vont être donnés.
Mme Richer (Jocelyne)
:
On voit, dans le projet de loi, que les mots «surveillance», «vérification», ça
revient souvent. Est-ce que vous ne craignez pas de braquer les réseaux, les
dirigeants d'organisme, etc.?
M. Coiteux : Non. D'abord,
parce qu'il est nécessaire, pour un État moderne, de connaître la situation, la
quantité de personnes, à quelle fonction sont affectées les personnes dans les
réseaux qui sont totalement financés par l'État, en définitive. C'est
nécessaire d'avoir cette connaissance. Alors, partager l'information à
l'intérieur du secteur public et surtout que le gouvernement ait l'information
en temps réel, c'est juste une demande qui est tout à fait naturelle, normale.
Et on aurait d'ailleurs dû le faire avant, mais là on le fait maintenant. D'accord?
Pour le reste, on vit une période pendant
laquelle, effectivement, on doit tous faire des efforts ensemble pour rétablir
l'équilibre budgétaire, et, dans ces efforts qu'on doit faire ensemble, il faut
éviter une croissance des effectifs qui viendrait compromettre l'atteinte de
l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Et là je crois que tout le monde comprend
que, dans ce contexte-là, on doit faire des efforts particuliers. Il est nécessaire,
bien entendu, d'éviter que des voies de contournement soient prises, parce que
ça pourrait être une possibilité. Alors, on ferme cette possibilité, mais, en
même temps, on rend le dirigeant de l'organisme concerné imputable et
responsable de prendre ses décisions. Ce n'est pas au président du Conseil du
trésor à justifier chaque contrat de service, mais par contre, le dirigeant,
lui, il doit s'assurer qu'il n'est pas en train de contourner les objectifs de
la loi. Je pense que c'est un équilibre qui est approprié.
La Modératrice
: Davide
Gentile, Radio-Canada.
M. Gentile (Davide) : Donc,
si je comprends bien, M. Coiteux, tout ça, ce resserrement-là, qui est global,
ça prend fin en avril 2016. Ou est-ce que la loi continue à s'appliquer quant à
la reddition de comptes, etc., après?
M. Coiteux : Regardez, il est nécessaire
que l'État connaisse la situation et sache exactement combien de personnes
oeuvrent à l'intérieur du secteur public. Ce n'est pas normal qu'on n'ait pas
cette connaissance fine qui est nécessaire à une prise de décision éclairée en
temps réel. Alors, l'un des objectifs de la loi, c'est de nous doter des outils
nécessaires pour avoir cette connaissance fine. Alors, ça, ça va rester toujours.
Maintenant, en ce qui concerne le gel des
effectifs, qui est une disposition prévue dans la loi, elle pourra s'exercer à
l'avenir aussi si c'est nécessaire. Donc, la loi va demeurer. La loi, elle est
permanente. Maintenant, notre intention à court terme, c'est de n'appliquer
cette disposition de la loi, qui consiste à geler les effectifs, uniquement,
pour l'instant, pour la période qui va commencer au 1er janvier 2015 et qui va
se terminer à la fin de l'exercice financier 2015‑2016. Plus tard, si jamais un
jour il devient encore à nouveau nécessaire, pour une période déterminée,
d'effectuer un contrôle des effectifs, on n'aura pas besoin de faire une
nouvelle loi. La loi va nous donner tous les pouvoirs pour le faire.
M. Gentile (Davide) : O.K.
Qu'est-ce qui vous garantit qu'il n'y aura pas… c'est une méthode connue, en
santé entre autres, je pars à la retraite, je reviens le lendemain avec un contrat,
là.
M. Coiteux : Bien, voyez-vous,
le dirigeant va devoir être… Il va devoir signer chacun des contrats de service
personnellement, et les justifier, et donner une reddition de comptes. Le
Conseil du trésor, moi comme président en l'occurrence, j'ai des pouvoirs de
vérification. Et il y a un certain nombre de sanctions qui sont prévues à la
loi, je pense que vous avez eu un briefing technique avant, pour s'assurer que
les dirigeants respectent l'esprit et la lettre de cette loi-là qui vise à
éviter ce genre de situation.
M. Gentile (Davide) : Vous
souriez depuis tout à l'heure. Vous avez l'air de trouver ça surréaliste que ça
n'ait pas été fait avant.
M. Coiteux : Bien, je ne peux
pas présumer des discussions qui ont eu lieu avant. Ce qui est probablement
vrai, c'est que mon prédécesseur au Conseil du trésor ne semblait pas avoir la
même préoccupation que moi à l'égard de la connaissance fine du nombre de
personnes oeuvrant dans le secteur public. Moi, j'ai cette préoccupation réelle,
et d'autant plus que c'est nécessaire pour un État moderne.
Alors, si on ne s'est pas posé la question
avant, je ne le sais pas, je n'étais pas là. Mais il faut apporter une réponse,
et, voyez-vous, ça n'a pas pris longtemps avant qu'on y apporte une réponse. Ça
ne fait que six mois qu'on
est au gouvernement.
La Modératrice
: Régys
Caron, Le Journal de Québec.
M. Caron (Régys)
:
Bonjour, M. Coiteux. Gonjour, Mme Blackburn, M. Ferron. Est-ce
qu'on peut accoler des économies, M. Coiteux, à ce que vous annoncez aujourd'hui?
M. Coiteux : Oui. Alors, on
anticipe… C'est parce que, voyez-vous, s'il y a ces 6 250 personnes qui
s'ajoutent à chaque année si on ne fait rien, bien, on est capables, à partir
de là, de calculer un rendement financier de la portion gel des effectifs de ce
projet de loi. Alors, on anticipe, pour l'année financière 2015‑2016, un
rendement financier de l'ordre de 500 millions de dollars.
M. Caron (Régys)
: Le
projet de loi n° 15, est-ce que c'est le pouvoir d'employeur que le
gouvernement parlait de se donner lors de la présentation du budget?
M. Coiteux : Oui, oui. Un
employeur doit d'abord connaître qui sont ses employés, combien sont-ils, que
font-ils, et il a besoin de les avoir avec un laps de temps nécessaire à la
prise de décision, ce qui n'était pas le cas, ce qui n'est pas encore le cas,
là, tant que le projet de loi ne sera pas éventuellement adopté, ce qui n'était
pas le cas, donc, et on se donne les outils nécessaires pour effectivement
jouer un rôle d'employeur, mais avec une certaine décentralisation. On
s'entend, les dirigeants vont rester responsables de leurs décisions, de la
gestion de leurs organismes, mais ils auront à nous informer sur une base
régulière de leurs effectifs et ils auront à respecter aussi, dans le cadre des
objectifs qui sont les nôtres pour l'exercice financier prochain et pour le
reste de l'année financière 2014‑2015, ils auront à respecter cet objectif, cet
effort qu'on leur demande de contribuer au retour à l'atteinte de l'équilibre
budgétaire en évitant une croissance de leurs effectifs.
M. Caron (Régys)
:
Est-ce qu'il y aura d'autres projets de loi pour étayer ce pouvoir d'employeur?
M. Coiteux : Bien, je crois
que, pour l'instant, on se donne des pouvoirs nécessaires pour atteindre les
buts qu'on s'est fixés. Pour la suite des choses, écoutez, on verra. Je vous
dis, on est dans un exercice de modernisation de l'État. On fait beaucoup de
travail. Voyez-vous, on fait la révision des programmes, on se donne des
pouvoirs ici pour mieux connaître nos effectifs dans le secteur public, être
capables de gérer la croissance des effectifs. Il y a une réforme qui s'en
vient en santé, il y a des réformes qui vont venir dans d'autres secteurs. Le
gouvernement a un programme de modernisation de l'État qui est très, très, très
important. Alors, je pense que, pour l'instant, ça va suffire du côté, là, de
ce rôle d'employeur, et on verra pour l'avenir.
M. Caron (Régys)
:
Autre chose. Est-ce que les employés à statut précaire du gouvernement et de la
fonction publique en général doivent s'inquiéter?
M. Coiteux : Regardez, il y a
des gens qui vont partir à la retraite et qui, dans un contexte de gel des
effectifs, dans les cas où c'est nécessaire pour maintenir les services à la population,
bien, il va y avoir de l'embauche. Ce n'est pas un gel de l'embauche. Alors, il
y aurait un renouvellement du personnel à l'intérieur du secteur public québécois
dans ce contexte-là. Il y aura des jeunes qui vont s'insérer dans le secteur
public à la faveur des départs à la retraite.
Donc, on n'est pas en train d'empêcher les
perspectives pour les jeunes, mais, par contre, on doit s'assurer qu'il n'y ait
pas une croissance qui puisse compromettre le retour à l'équilibre budgétaire.
La Modératrice
: Pascal
Poinlane, Radio-Canada.
M. Poinlane (Pascal)
:
M. Coiteux, on parlait avec votre collègue Barrette puis tout à l'heure, il
nous disait qu'à chaque année la croissance dans le réseau de la santé, c'est
5,8 % du personnel. Est-ce qu'on comprend qu'en vertu du projet de loi
n° 15, pour les années à venir, ça va être zéro?
M. Coiteux : Bien, vous savez
qu'il s'en vient avec une réforme importante. Il y a une autre loi, il y a un
autre projet de loi qui est celui de la réforme dans le secteur de la santé, et
il va y avoir la disparition de certains postes administratifs, là, avec la
disparition des agences régionales.
Pour la prochaine période, là, la
prochaine période 2015‑2016, une fois tenu compte des effets de son projet de
loi, effectivement, il va y avoir une enveloppe d'effectifs à gérer, et ça va
être vrai dans le réseau de l'éducation comme ça va être vrai dans le secteur
de la santé, mais, en même temps, le projet de loi, vous avez vu, il y a un
article qui dit très bien que la gestion des effectifs dans les réseaux va
devoir se faire dans l'esprit d'assurer les services aux citoyens. Et ça, ça va
être très important, et, si jamais ça ne fonctionne pas bien, bien, les
ministres ont un pouvoir d'intervention, de directive pour s'assurer
qu'effectivement en santé ça soit le patient qui soit au premier plan et, en
éducation, que ça soit l'élève.
M. Poinlane (Pascal)
:
Sauf votre respect, là, est-ce que vous ne rêvez pas un peu en couleurs en
pensant qu'avec le vieillissement de la population, vraiment, là, il n'y aura
aucune augmentation de personnel jusqu'en… fin 2016?
M. Coiteux : Ça va être
important pour nous d'assurer qu'il n'y ait pas de croissance des effectifs
pendant cette période d'une année et demie, hein? On ne parle pas d'une période
de 10 ans, on parle d'une période d'une année et demie pour le segment contrôle
des effectifs, gel des effectifs. La question du dénombrement, bien, ça,
écoutez, on ne va pas arrêter à la fin du mois de mars 2016. Ce n'était pas
normal qu'on n'ait pas cette connaissance.
La période de gel qu'on annonce, c'est une
période qui est plus ou moins courte, plus ou moins longue, mais elle n'est pas
pour l'éternité, là. On comprend qu'il y a des besoins croissants dans la
société, mais actuellement on est convaincus qu'avec les départs à la retraite
on est capables de gérer les effectifs de manière à assurer les services aux
citoyens tout en ramenant l'équilibre budgétaire, et ça, ça passe par
différentes initiatives, dont celle-ci.
M. Poinlane (Pascal)
:
Même en santé?
M. Coiteux : Dans tous les
secteurs.
La Modératrice
: Marco
Bélair-Cirino, Le Devoir.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, bonjour. Comment qualifiez-vous, à l'heure actuelle, votre pouvoir de surveillance
sur les sociétés d'État? Puis qu'est-ce que le projet de loi vient changer à
cet égard-là?
M. Coiteux : Bien, d'abord,
d'obtenir des renseignements qu'on n'obtient pas, à l'heure actuelle, en temps
réel, comme pour l'ensemble des organismes du secteur public, là, c'est déjà
quelque chose de nouveau. Maintenant, les ministres concernés vont pouvoir
également, au besoin, émettre certaines directives, au besoin, je dis bien,
parce qu'encore une fois nous, on parie que les dirigeants des sociétés d'État
comme des organismes vont souscrire aux objectifs de la loi, vont effectivement
faire en sorte qu'ils participent eux aussi à l'effort national qu'on demande à
tous.
En ce qui concerne les contrats de
service, si ceux-ci… ce n'est pas que les contrats de service sont
interdits, on s'entend, là, mais, si ce sont des contrats de service
qui ont pour but d'éluder le contrôle des effectifs, bien là, effectivement, le
Conseil du trésor aura des pouvoirs de surveillance qu'il n'a pas aujourd'hui.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Puis, à l'heure actuelle, on comprend que l'ensemble des sociétés d'État ou
certaines ne participent pas à la hauteur nécessaire à l'effort national de
resserrement des dépenses?
M. Coiteux : Non, je ne
porterai pas de jugement, mais une fois qu'on demande à tout le monde de faire
un effort puis qu'on se dote d'outils nécessaires… On n'a pas voulu exclure
personne de l'univers auquel s'applique la loi à l'intérieur du secteur public,
alors on a une vision très large. Il fallait établir la frontière quelque part,
là. C'est que le gouvernement du Québec finance beaucoup d'activités au Québec,
mais il finance des activités parfois d'organismes, mais ne sont pas des
organismes du secteur public. Bien là, on n'est pas allés jusque là, mais, par
contre, on a décidé d'englober l'ensemble de notre secteur public dans le
projet de loi.
Mme Prince (Véronique)
:
J'aurais une question aussi, juste une précision par rapport aux sanctions qui
peuvent s'appliquer, pour que ce soit clair si effectivement vous vous
apercevez qu'il y a des contrats de services qui sont donnés puis ils
n'auraient pas dû l'être.
M. Coiteux : Oui. Bien, les
sanctions varient selon les organismes parce qu'ils sont constitués en
fonction… en vertu de lois qui sont différentes, là. On ne va pas changer
toutes les lois. Ils ne sont pas tous constitués en vertu d'une même loi. Dans
les réseaux, par exemple, il existe toujours des pouvoirs de vérification au
ministre, il peut exister même des pouvoirs de tutelle, de mise en tutelle au
besoin. Alors, ces pouvoirs-là sont intégrés dans la loi. Dans d'autres cas,
c'est des organismes qui pourraient se voir privés d'une subvention parce
qu'ils n'ont pas appliqué les règles. Dans d'autres cas, ils peuvent être
sommés de faire une reddition de comptes supplémentaire pour qu'on puisse
s'assurer qu'ils respectent les objectifs de la loi.
Ceci étant dit, nous, on est convaincus
que tout le monde, tout le monde va mettre tout en oeuvre, tous les dirigeants
vont participer de bonne foi, j'en suis absolument convaincu, comprenant les
objectifs, qui sont des objectifs de l'ensemble de la société québécoise. Il
faut arrêter de pelleter dans la cour de nos enfants. Sérieusement, c'est de ça
qu'il s'agit. Quand on aura équilibré le budget en 2015‑2016, là, ça aura fait
sept ans qu'on aura accumulé de la dette d'épicerie, hein, et je pense qu'on en
a déjà assez fait. Alors, l'effort qui est demandé à tous, on est convaincus
que les dirigeants des organismes, les dirigeants des sociétés d'État vont y
souscrire et faire tous les efforts nécessaires.
Alors, oui, on se donne des pouvoirs de
vérification, oui, il y a des pouvoirs de sanctions qui varient selon les
organismes, mais très honnêtement, moi, je m'attends à ce que tout le monde
participe de façon totale, et, au besoin, on interviendra, mais on va faire… on
s'attend à la bonne foi de tout le monde, et c'est ce qu'on va probablement
avoir.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Bien, pourquoi déposer un projet de loi, dans ce cas-là, le volet sur les
sanctions? Pourquoi prévoir un certain nombre de sanctions alors que tout le
monde agit de bonne foi?
M. Coiteux : Bien, de un, on
n'a pas l'information à l'heure actuelle. Le projet de loi va nous donner une
information qui n'existe pas.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais le volet sanctions?
M. Coiteux : Bien, le volet sanctions,
il est nécessaire. Je pense que, dans tous les cas où on a besoin d'avoir un
pouvoir d'intervention… Il faut prévoir tous les cas. Je fais appel à la
collaboration de tous et, très honnêtement, moi, je suis optimiste de nature,
hein, et je m'attends à ce que ça se passe comme ça.
Maintenant, si jamais, si jamais il y avait
des problèmes, par exemple si les services à la population étaient mis en cause
parce que, dans la gestion des effectifs, on n'a pas privilégié les bonnes
choses, bien, le ministre responsable aura des pouvoirs de directive. Donc, on
prévoit tout ça dans la loi, mais on s'attend à la pleine collaboration de tout
le monde, et c'est ce qu'on anticipe.
La Modératrice
: Je
pense qu'il y aurait… il y a une seule dernière question en français, de Tommy.
M. Chouinard (Tommy)
:
Une petite précision. Quand on parle du gel des effectifs, là, est-ce qu'on
comprend à la fois les employés réguliers, occasionnels, les cadres, les…
Est-ce que, là, vraiment, on inclut tout le monde?
M. Coiteux : Oui, tout le
monde, tout le monde. Alors, ultimement, là, ça va se transformer en quelque
chose comme l'ensemble des heures rémunérées. Ça va ressembler à ça,
ultimement, peu importe à quelles occupations ces heures ont été consacrées,
mais on va vouloir les connaître par type d'occupation.
La Modératrice
: C'est
beau pour le français?
M. Bélair-Cirino (Marco) : Bien,
juste rapidement. On nous a remis un organigramme avec des chiffres. Alors, on
dit qu'il y a 639 900 individus dans les différents organismes. Alors, la
marge d'erreur… il y en a… c'est quoi, plus ou moins 30 000, 50 000?
M. Coiteux : Écoutez, je vais
vous le préciser lorsque la loi va être mise en application parce que, là, on
va le savoir avec exactitude. Écoutez, ce qui se passe ici, c'est que ces informations-là
n'ont pas été nécessairement transmises en vertu des mêmes catégories, selon
les mêmes barèmes, et elles n'ont pas été transmises aux mêmes dates, parce que
les mécanismes de collecte de données ne sont pas les mêmes selon qu'il
s'agisse de la fonction publique, des commissions scolaires, du réseau de la
santé. Alors que, là, on va pouvoir avoir de l'information uniforme pour
l'ensemble du secteur public, et ça va être une grande première.
La Modératrice
: On a
juste un collègue en anglais, ça fait que tu peux poser autant de questions que
tu veux.
M. Vendeville
(Geoffrey) : Bonjour. Hi. I was just wondering
how you got this estimate of 640,000 public sector posts.
M. Coiteux :
This is a very rough estimate. As I mentioned in French in the last question,
it's basically a result of different sources of information that come at
different points in time. And obviously we want to have a more uniformed way of
presenting the information and, above all, we need that information in real
time, because ultimately what we need is an information base with which we will
be able to take decisions.
M. Vendeville
(Geoffrey) : You touched on this already, but
when you're talking about the difficulty of getting a head count for public
sector employees, you smiled. Why did you smile?
M. Coiteux :
I smiled because I thought, before coming into
politics, that it would be an easy thing, and I realized, just a couple of
weeks after starting, that I needed to have a new law, a new legislation to get that information.
So perhaps the question has been asked before by my
predecessors, but certainly, in the case of Mr. Bédard, who was in my place a
few months ago, it didn't seem to be a priority. For us, it is a priority, and
it is a priority because we don't think that a modern State should be blind
about how many people work for the State and also because we have this firm
objective of reestablishing budget balance by the end of the next fiscal year.
M. Vendeville
(Geoffrey) : And how will this help balance
the books, this bill?
M. Coiteux : How?
M. Vendeville
(Geoffrey) : How will this bill help to reach…
M. Coiteux : In terms of a financial target here? Well, we estimate that, for
the whole of the fiscal year 2015‑2016, we should be able to get something like $500 million.
M. Vendeville
(Geoffrey) : OK. Great. Thanks.
M. Coiteux :
Thank you very much.
(Fin à 15 h 37)