(Treize heures quarante-neuf minutes)
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Bien, écoutez, on va a convoqués aujourd'hui parce que, comme à l'habitude,
avec ce gouvernement, on a plusieurs inquiétudes par rapport à la gestion du
réseau de la santé. La première, ce qui est inacceptable pour nous, c'est
mettre fin à la gratuité des lits d'hospitalisation. Hier, l'annonce nous a beaucoup
surpris, puis je trouve ça, encore là, que je vous répète, inacceptable qu'on
puisse même penser à faire payer des patients qui sont très malades pour des
lits d'hospitalisation.
Actuellement, la règle, c'est gratuit,
sauf les gens qui veulent payer une chambre privée ou semi-privée. Mais, à
partir du moment qu'il n'existe que des chambres privées comme au CUSM et au
CHUM, c'est certain que le patient ne peut pas assumer les coûts d'hospitalisation.
Et puis de penser que, par la suite, ça va rester seulement qu'au CHUM puis au
CUSM, on sait que la pensée du ministre, c'est vraiment de taxer, probablement
qu'il va y avoir une extension pour les autres établissements de santé dans un souci
d'équité, une équité qui crée une grande injustice.
Pourquoi nous avons mis en place des
chambres à lit unique ou à double lit? C'est tout simplement pour la prévention
des infections, éviter les infections style Clostridium difficile et, de plus,
c'est une question de sécurité et de qualité. Donc, pour le bien-être du
patient, nous avons favorisé, au cours des dernières années, de n'avoir que des
chambres simples ou doubles dans nos établissements de santé et, au fur et à
mesure qu'on construit des établissements ou qu'on rénove des établissements,
on essaie d'éliminer les chambres à trois lits et à quatre lits. C'est une
question de qualité des soins.
Donc, d'aller mettre une nouvelle taxe,
parce qu'il faut l'appeler comme ça, c'est une nouvelle taxe, en demandant aux
patients de payer. En plus, je trouve ça ironique. Vous allez avoir votre
dossier médical, puis maintenant ça va prendre votre rapport d'impôt lorsque
vous allez rentrer à l'hôpital, même pour une hospitalisation de 24 heures.
Notre deuxième grande inquiétude, c'est la question
de la gestion des urgences. Auparavant, à cette période-ci de l'année — on
a fait une révision de la presse — c'est qu'on ouvrait des cliniques
de grippe, on faisait… on avait un plan pour sortir les patients en attente d'hébergement,
parce qu'on sait que c'est une période qui est très achalandée. Excepté un
court message du ministre pour dire de se faire vacciner, le ministre est
absent sur toutes les tribunes. On n'a pas l'impression qu'il y a quelqu'un qui
est à la direction du ministère de la Santé, et c'est au ministre de donner les
orientations pour sortir les patients en attente d'hébergement.
Inutile de vous rappeler que, s'il y avait
eu une entente avec les pharmaciens, à ce moment-ci, les patients qui attendent
pour une petite infection des urines ou encore des problèmes bénins pourraient
être vus par leur pharmacien puis recevoir le médicament approprié, plutôt que
d'attendre des heures dans les urgences et occuper le temps du médecin qui, lui,
pourrait être utilisé à meilleur escient.
Donc, à ce moment-ci, on pense qu'il y a
une déficience au niveau de la gestion du réseau de la santé. On commence à
voir des reportages, justement, avec un taux d'occupation de 300 % à l'Hôpital
du Suroît. Ici même, à Québec, les hôpitaux débordent. Et ce n'est pas juste
une question de température, c'est la même chose à chaque année. Donc, des
mesures doivent être prises pour corriger la situation puis essayer d'améliorer
notre système de santé.
Donc, le ministre est absent, et on lui
demande de prendre en charge les différentes problématiques du réseau. Et
plutôt que de penser que l'assurance autonomie, qui va se mettre en vigueur sur
plusieurs années si le projet de loi passe, il faut plutôt penser
qu'aujourd'hui les patients en ont besoin, ont besoin de soins et ont besoin de
quelqu'un qui soit à la commande du réseau de la santé pour pouvoir donner une
meilleure accessibilité puis une meilleure qualité des soins.
M. Laforest (Alain)
:
Quand vous avez lancé les PPP CHUM, CUSM, qu'est-ce que vous aviez prévu,
justement, pour faire en sorte que le contexte allait changer, là, qu'il n'y en
aurait plus, de chambres à quatre…
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
À l'époque, là, la position, quant à moi, elle était assez claire. C'est qu'en
ayant des chambres privées uniques, à ce moment-là, les chambres, à ce
moment-là, deviendraient gratuites. Sauf que, comme de fait, les patients qui
ont peut-être des assurances, à ce moment-là, on pourrait avoir un certain
montant au niveau des assurances. Mais il n'y avait pas question de charger
directement au patient en fonction des revenus et il n'était certainement pas
question d'avoir une nouvelle façon d'aller chercher des revenus
supplémentaires au niveau du CHUM et du CUSM.
M. Chouinard (Tommy) : Mais
le montant refilé à l'assureur, ça avait pour effet de faire augmenter la prime
du patient.
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Oui. Oui, excepté qu'on sait que l'orientation future du ministre… du ministère
de la Santé, notre orientation, c'était qu'on s'en allait de plus en plus vers
des chambres simples et des chambres doubles, donc on aurait de moins en moins
besoin, dans certains établissements, d'utiliser, justement, la formule des
assurances. Parce que vous savez que, lorsque c'est médicalement indiqué,
théoriquement, la chambre devrait être gratuite, et, pour le patient qui n'a
pas d'assurance, il n'a pas à payer sa chambre d'hospitalisation.
M. Laforest (Alain)
:
Le 60 millions que le ministère de la Santé va chercher, là, en frais
d'hospitalisation, vous seriez allé le chercher où? Les finances publiques
craquent de partout, là.
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Oui, c'est ça, mais il faut… c'est l'amélioration de la performance. Il y a
encore beaucoup de travail à faire au niveau de l'amélioration de la
performance. Il y a des projets également, vous avez vu, pour améliorer la
productivité du réseau de la santé, il y a des grandes orientations qui ont été
prises également pour essayer de dégager des nouveaux revenus. Mais ce n'est
certainement pas en ayant une nouvelle taxation, c'est-à-dire en chargeant plus
au patient… Et dans le système, ce n'est pas seulement que ceux qui avaient des…
qui auraient des assurances qui seraient taxés, ce serait également le simple citoyen
qui n'a pas d'assurance, et qui a un emploi, et qui, lui, serait appelé à
cotiser selon son revenu. De plus, toutes les tracasseries administratives…
L'autre inquiétude que les gens n'ont pas
beaucoup mentionnée, ça, ça voudrait dire qu'il faudrait pratiquement que vous
donniez votre rapport d'impôt à l'hôpital pour qu'il soit en mesure d'évaluer
si, oui ou non, vous avez la capacité de payer pour une chambre
d'hospitalisation. Et la majorité des patients ne restent seulement que deux,
trois ou quatre jours, donc ça va être un grand problème administratif.
M. Chouinard (Tommy)
:
L'hypothèse qui est examinée, l'une des hypothèses, un des scénarios examinés
actuellement, c'est justement... c'est de faire payer ceux qui ont une
assurance privée. Donc, je comprends que, même à l'époque, c'était discuté et
que vous êtes favorable à cette mesure-là.
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
C'est que, si c'était seulement que… on allait chercher seulement que
l'assurance, comme c'est dans tous les autres établissements, ça pourrait être
regardé. Mais l'hypothèse que nous avons entendu parler, sur la table, ce
n'était pas celle-là, c'était vraiment en fonction des revenus, et c'est tous
les citoyens, indépendamment s'ils ont ou pas des assurances, qui pourraient
être appelés à payer.
Et, je le rappelle, l'importance d'avoir
des lits simples ou des lits doubles dans des chambres d'hôpital, c'est une
question de prévention des infections, de sécurité et de qualité, et il ne faut
pas remettre ça en question, mais plutôt il faut voir comment on peut continuer,
justement, à pouvoir rénover notre réseau de la santé et offrir de plus en plus
ce type de lits parce que c'est ça qui est le plus sécuritaire.
M. Laforest (Alain)
:
Si ma mémoire est bonne, en 2003, M. Bolduc, sur votre autre sujet, le thème de
la campagne électorale de Jean Charest, ce n'était pas de régler le problème
des engorgements dans les urgences?
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Puis il y a eu beaucoup de choses de faites. Vous avez vu le nombre de groupes
de médecine de famille, de cliniques-réseaux, et également on essaie le plus
possible de trouver des places pour des patients en attente d'hébergement.
C'est un dossier qui continue à préoccuper les Québécois, qui est toujours
présent.
M. Laforest (Alain)
: C'est
parce que vous accusez le ministre de ne pas être là…
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Bien, le ministre n'est pas là pour…
M. Laforest (Alain)
:
…dans l'engorgement, mais c'est parce que ça n'a pas changé depuis 10 ans.
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Oui, mais le ministre n'est pas là pour la gestion au quotidien. Si vous
regardez par contre, dans les 10 dernières années, on était très présents.
Lorsqu'il arrivait des crises dans les urgences, on s'occupait, on sortait, on
faisait des communications au niveau de la population. On ouvrait des lits de
débordement. Et puis, au cours des dernières années, il y a également eu des
cliniques de grippe qui ont été mises en place, mais l'arrivée des groupes de
médecine de famille, des cliniques-réseaux a beaucoup apporté parce que ça a
permis d'ouvrir des plages horaires pour les médecins les fins de semaine et le
soir. Il y a eu du travail de fait, mais je reconnais, il y en a encore à
faire.
M. Bovet (Sébastien)
:
Bien, juste — j'ai manqué un bout — sur le principe de
faire payer, selon les revenus, les gens pour des chambres à l'hôpital, est-ce
que vous êtes d'accord?
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Ah! C'est inacceptable. Moi, je pense que c'est une question d'inéquité. Ça va
à l'encontre de l'universalité des soins et, de plus, ça va être des
tracasseries administratives. Puis je ne comprends pas que, si on y va en
fonction des revenus, pour une hospitalisation de deux, trois jours pour une
gastroentérite qui peut demander à ce qu'on reste à l'hôpital, on va charger au
patient puis on va lui demander de nous prouver c'est quoi, ses revenus, puis
d'avoir son rapport d'impôt.
Honnêtement, là, ça n'a pas de bon sens,
puis je ne pense que… c'est dommage que le ministre n'est pas sorti pour dire
qu'il était contre ça, puis je trouve que c'est une idée qui doit être évacuée
immédiatement.
M. Bovet (Sébastien)
:
Mais, de façon pratico-pratique, est-ce que ça voudrait dire que, dans les
hôpitaux, dorénavant, les chambres à deux et seules seront automatiquement
gratuites?
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Ça pourrait être ça, parce que vous savez que ça représente environ 60 millions
de dollars de revenus sur un budget de 30 milliards. Donc, ce n'est quand
même pas un gros montant par rapport à l'ensemble du budget du réseau de la
santé. Et l'avenir va justement être, peut-être, d'offrir des soins gratuits en
hospitalisation, comme c'est prévu. Et même les... on parlait tantôt des
assurances, à partir du moment que vous avez seulement des chambres uniques, le
plus important, c'est que vous allez également sauver au niveau de la qualité
des soins.
Vous savez qu'un patient qui a le
Clostridium difficile va rester plusieurs jours en hospitalisation, et ça va
entraîner des coûts supplémentaires. Donc, il va y avoir une économie également
de faite par le fait qu'il va y avoir moins d'infections et moins de
complications.
M. Bovet (Sébastien)
:
À votre connaissance, est-ce que ça a été chiffré, ce gain de santé, de passer
de chambres de trois à quatre à des chambres de un à deux?
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Non. Ça n'a pas été chiffré, puis, à ma connaissance, même le ministre actuel n'a
pas les chiffres. Mais on peut estimer que, si vous diminuez votre nombre
d'infections, vous diminuez vos complications parce que les patients sont mieux
pris en charge, et il y a une amélioration au niveau de la qualité. À ce
moment-là, il va y avoir une certaine économie. Mais l'objectif final, c'est
certainement d'avoir une universalité au niveau des soins en termes
d'accessibilité.
Le Modérateur
: Ça
répond? Merci.
M.
Bolduc
(Jean-Talon)
:
Merci beaucoup.
(Fin à 13 h 58)