(Quinze heures deux minutes)
Mme Rinfret (Marie) : Merci
infiniment. Bonjour. Je vous remercie de vous joindre à moi aujourd'hui pour la
présentation du rapport spécial du Protecteur du citoyen concernant les causes
de la crise qui a durement frappé de nombreux CHSLD durant la première vague de
la pandémie de la COVID-19. Je suis accompagnée de Me Hélène Vallières,
vice-protectrice aux Affaires institutionnelles et prévention.
Durant la première vague, nous avons tous
et toutes été sous le choc de la multiplication des foyers d'éclosion de la
COVID-19 dans les CHSLD. Pendant des semaines entières, des résidents et des
résidentes ont été privés de soins essentiels et coupés de leurs proches. Les
morts se sont comptés par milliers parmi les personnes hébergées.
Parallèlement, les membres du personnel de soins ont porté les services à bout
de bras. Une part importante d'entre elles et d'entre eux ont dû quitter leurs
postes, frappés par la COVID-19 et par l'épuisement.
C'est dans ce contexte alarmant et sans
précédent que j'ai annoncé, le 26 mai 2020, la tenue d'une vaste
enquête concernant la gestion gouvernementale de la crise dans les CHSLD lors
de la première vague de la COVID-19. Une telle décision découle de notre
mandat. Le Protecteur du citoyen veille au respect des droits des personnes qui
font affaire avec les ministères et les organismes du gouvernement du Québec
ainsi qu'avec le réseau de la santé et des services sociaux. Mes équipes se
sont alors fixé comme objectif de lever le voile sur les points suivants :
premièrement, au coeur de la crise de la COVID-19, quelle avait été la réalité
terrain dans les CHSLD durant ces semaines dramatiques? Et ensuite, qu'elles
étaient les causes d'une telle crise humaine et sanitaire?
Étant donné l'urgence, nous avons publié
dès le mois de décembre 2020 un rapport d'étape portant sur le déroulement
des faits dans les CHSLD durant la crise. L'état de situation donnait la parole
aux personnes ayant vécu cette crise en première ligne : des personnes
hébergées, des proches de celles-ci, des membres du personnel en CHSLD et des
gestionnaires des CISSS et des CIUSSS. Ces témoins, les uns corroborant les
autres, ont décrit le drame qui a plongé les CHSLD dans un véritable chaos.
Notre rapport d'étape comportait cinq priorités d'action pour apporter des
correctifs urgents dans la gestion des CHSLD.
Faisant suite à cette première phase des
travaux, je rends public, aujourd'hui, le rapport final qui, cette fois, cerne
les causes des événements. Pour ce faire, nous avons accueilli, recueilli la
version d'autorités gouvernementales et d'experts en gestion d'établissements
de santé et de services sociaux, en gériatrie, en gestion de crise, en
épidémiologie ainsi qu'en prévention et en contrôle des infections.
D'abord, un constat s'impose : la
crise de la COVID-19 a poussé l'ensemble du réseau de la santé dans ses
derniers retranchements et a révélé un manque flagrant de robustesse et
d'agilité des structures et des fonctionnements dans les milieux de vie et de
soins de longue durée. L'absence de toute marge de manoeuvre quant aux
ressources humaines en est une consternante illustration.
J'en viens aux facteurs ayant exacerbé la
crise. En tout premier lieu, en prévision de l'arrivée de la COVID-19 au
Québec, les autorités du ministère de la Santé et des Services sociaux ont tenu
pour acquis que les hôpitaux seraient l'épicentre des événements d'où le
transfert de personnes hospitalisées vers les CHSLD pour libérer près
d'un millier de lits. De nombreuses personnes âgées vulnérables ont vécu
des déménagements précipités vers les CHSLD sans pouvoir être accompagnées, ce
qui a contribué à les fragiliser davantage et à placer les milieux de vie qui
les accueillaient en surcapacité.
Par ailleurs, des autorités ont reconnu
que les personnes qu'on sortait des hôpitaux pour les envoyer dans les CHSLD
n'étaient souvent pas testées, ce qui pouvait faire d'elles des vecteurs de
transmission.
Les CHSLD, pour leur part, n'avaient pas
été préparés pour assurer cette prise en charge de façon sécuritaire. Étant
donné la configuration des lieux, par exemple, il était souvent pratiquement
impossible d'y implanter efficacement des aires de confinement des zones
froides ou chaudes. Dans le cadre des préparatifs, ces milieux de vie auraient
dû recevoir des consignes adaptées à leur réalité et des ressources pour
renforcer leurs faiblesses.
Les risques concernant ces milieux n'ont
pas été correctement évalués. Cette évaluation a été effectuée par une
direction ne disposant pas des champs d'expertise nécessaires. Les CHSLD, on
l'a tellement dit dans le passé et plus récemment avec les événements, étaient déjà
affectés par un manque chronique de personnel. Ils ont donc été nettement
dépassés par l'augmentation soudaine de leur clientèle et par les soins à
assurer à des personnes en lourde perte d'autonomie, donc particulièrement
vulnérables.
S'est ajoutée à cela la contamination
d'une part importante des membres du personnel qui ont dû s'absenter subitement
du travail. Le ministère de la Santé et des Services sociaux n'a pu empêcher
formellement la mobilité de main-d'oeuvre, n'ayant aucune donnée chiffrée,
complexifiant toute décision à ce sujet. Il y avait la crainte de rupture de
soin.
On manquait non seulement de personnel
dans les CHSLD, mais, en plus, les intervenants et les intervenantes n'étaient
pas formés en matière de prévention et de contrôle des infections. Une telle
lacune n'a pas été prise en considération par le ministère lors de la
préparation à la pandémie.
L'identification des CHSLD comme des
entités vouées uniquement à leur mission de milieu de vie, et non comme un
milieu de soin, a contribué à cela. Plusieurs nous ont dit que cette approche
milieu de vie pouvait venir en contradiction avec les mesures de prévention et
de contrôle des infections. Autrement dit, l'approche milieu de vie pouvait par
exemple faire en sorte qu'on ne veuille pas indisposer les résidents et les
résidentes par la vue de personnel portant masque, gants, visière et blouse.
L'absence de gestionnaires sur place dans
les CHSLD a conduit à la désorganisation des services de certains milieux. Sans
gestionnaire local, il était difficile, voire impossible, d'appliquer les
multiples consignes venant du ministère et devant souvent être mises en place
en toute urgence. Sans gestionnaire sur place, l'encadrement des ressources humaines
appelées en renfort a fait défaut. Des personnes ainsi parachutées se sont
trouvées sans supervision et sous-utilisées par rapport à leurs compétences et
à leurs disponibilités.
Au début de la première vague, le personnel
des CHSLD ne disposait pas en temps opportun des équipements de protection
individuelle nécessaires pour freiner efficacement la propagation et éviter
d'être eux-mêmes atteints. Cela s'explique notamment par les bris
d'approvisionnement en raison de la dépendance du Québec aux manufacturiers
étrangers.
Ce qui n'a pas aidé non plus, c'est
l'absence au sein du ministère et dans le réseau de système d'information à
jour et générant des données centralisées sur l'état des inventaires en temps
réel et à l'échelle locale et nationale. Sans ces données, les autorités
pouvaient difficilement s'assurer que les établissements et leurs installations
disposaient du matériel nécessaire.
Un autre problème se posait du fait que le
personnel dans les CHSLD n'avait pas la formation nécessaire pour utiliser ces
équipements en contexte bien particulier de pandémie et de haute contagion. Je
vous parlais d'équipements de communication désuets. Des personnes nous ont dit
que les efforts pour contrer la pandémie avaient été confrontés à la culture du
fax comme mode de transmission dans le réseau des soins. Ce qu'on veut en
pareil contexte, nous on dit ces décideurs, c'est de l'information fiable et en
temps réel. C'est indispensable, chaque minute compte et des vies en dépendent.
Le manque de renseignements fiables a par exemple nui à la gestion des
ressources humaines, à l'obtention d'un portrait juste des éclosions et à la
diffusion d'information de nature épidémiologique.
Voyons, voyons… Le présent rapport
comporte 27 recommandations. Nous recommandons au ministre de la Santé et
des Services sociaux de mettre en place différents outils au regard de la
mission fondamentale du système de santé en matière d'hébergement et de soins
de longue durée pour les personnes aînées.
Nous mettons l'accent, par exemple, sur
l'importance d'une politique en matière d'évaluation et de gestion de risques
concernant les CHSLD et de placer le principe de précaution au centre de toute
démarche d'évaluation. Les CHSLD hébergent et soignent des personnes hautement
vulnérables. À ce titre, il est impératif qu'un plan… voyons, détaillé, pardon,
soit élaboré et mis en oeuvre afin de renforcer leur capacité à appliquer des
mesures rigoureuses en prévention et contrôle des infections.
Une stratégie quant aux équipements de
protection individuelle doit être élaborée pour solidifier les chaînes
d'approvisionnement. Nous recommandons des actions pour ce faire.
Un plan provincial de déploiement de
main-d'oeuvre d'urgence dans le réseau de la santé et des services sociaux pour
permettre, lorsque nécessaire, de mieux tirer profit de ressources en renfort.
Des protocoles de déploiement de main-d'oeuvre en contexte exceptionnel sont à
prévoir avec les ordres professionnels, les fédérations et les associations de professionnels
de la santé et des services sociaux, les syndicats et les établissements d'enseignement.
Des partenariats avec des organisations de la société civile en mesure de
déployer des effectifs en renfort de dernier recours devraient aussi être
conclus. Le personnel est la pierre angulaire de la capacité du réseau de
la santé et des services sociaux à offrir des soins et des services de qualité.
Nous recommandons donc l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie
nationale de lutte à la pénurie de main-d'oeuvre et de promotion des métiers et
des professions dans le domaine de la santé et des services sociaux et que les
mesures d'aide et de soutien mises en place après la première vague soient
maintenues et que de nouvelles mesures soient déployées afin de prendre soin de
ceux et celles qui, à leur tour, prennent soin des personnes hébergées et pour
assurer leur rétention.
Étant donné l'inestimable contribution des
personnes proches aidantes, leur accès aux CHSLD ne doit jamais être interdit,
à moins d'une situation exceptionnelle et de courte durée. Cet accès doit être
encadré, et les personnes proches aidantes doivent être reconnues, soutenues et
impliquées en tant que partenaires essentiels, et ce, en respect de leur
volonté et de leur capacité d'engagement.
Afin de reconnaître la mission et le
caractère unique des CHSLD au sein des CIUSSS et des CISSS, les gestionnaires
responsables doivent avoir un statut et des conditions d'exercice d'encadrement
qui leur permettent de faire preuve d'un leadership fort, fondé sur les
particularités de ce milieu de vie. On l'a vu, les décisions des autorités ont
connu des ratés, étant donné des voies de communication inefficaces. Le ministère
doit se doter de systèmes intégrés d'information afin d'obtenir en tout temps
et en temps réel les renseignements pour guider la gestion quotidienne
permettant un arrimage entre les hautes autorités et les personnes sur le
terrain et documenter ces décisions dans un souci de transparence et d'imputabilité.
Il revient également au ministère de la
Santé et des Services sociaux d'adopter un plan d'action national comprenant
des mesures concrètes, structurantes et durables visant à reconnaître la
complexité de la prestation des soins et des services en CHSLD et à améliorer
les milieux de vie et leur qualité selon des données probantes. De plus, les
principes directeurs à respecter en matière de qualité et d'organisation de ces
milieux de vie devront, pour en assurer la pérennité, être encadrés par des
mesures législatives.
Nous recommandons aussi de renforcer les
mécanismes de contrôle et de suivi de la qualité de ces milieux de vie pour y
déceler les manquements et les correctifs à y apporter en temps opportun. Un
comité-conseil et de vigie devra être mis sur pied pour apporter au ministère
l'éclairage requis au sujet de mesures concrètes, structurantes et durables
pour améliorer de manière continue la qualité des services dans les CHSLD.
Je recommande, et cette fois au ministre
de la Santé et des Services sociaux, de proposer l'instauration d'actes de
commémoration annuels des victimes de la COVID-19 dans les CHSLD et des
personnes qui y ont travaillé directement ou indirectement auprès d'elles. Il
importe de garder en mémoire ce que ces personnes ont vécu afin que cela soit
le moteur d'actions et de changement durables.
Et, pour terminer, dans une volonté de
veiller à ce que les améliorations durables soient enfin apportées, non
seulement le ministère de la Santé et des Services sociaux devra nous faire un
suivi serré de l'état d'avancement de l'implantation de nos recommandations
ainsi que de celles des rapports d'enquête portant sur le même sujet, mais nous
nous engageons à faire état des suivis de nos recommandations chaque année dans
notre rapport d'activité, et ce, jusqu'à leur implantation à notre
satisfaction, afin que les annonces se concrétisent et que les milieux de vie
de nos aînés en soient le reflet.
Nous avons collectivement un devoir
d'apprendre et de s'améliorer pour donner aux personnes hébergées et à ceux et
celles qui en prennent soin des milieux de vie, de soins et de travail humains
de qualité. Si nous saisissons cette opportunité comme elle doit l'être, les
actions concrètes prises en ce sens demeureront l'héritage le plus important de
cette crise. Je vous remercie de votre attention.
Le Modérateur
: On va maintenant
passer à la période de questions réservée aux journalistes et on va commencer
avec Valérie Gamache, de Radio-Canada.
Mme Gamache (Valérie) :
Bonjour, Mme Rinfret. Tout d'abord, j'aimerais savoir si, dans le cadre de
votre enquête, vous avec eu accès aux fameux rapports d'inspection dont il a
été question à l'enquête de la coroner, des rapports, on nous dit du côté du
ministère des Aînés, qui n'existent pas ou, en tout cas, qui ne sont pas
disponibles. Vous, avez-vous vu ces rapports-là, et à quel point ils ont été
aidants, dans votre enquête, pour faire la lumière sur ce qui s'est passé?
Mme Rinfret (Marie) :
D'abord, vous le savez tous, nos enquêtes sont conduites privément. Écoutez,
nous avons obtenu, dans le cadre de notre enquête, tous les documents, tous les
renseignements qui ont été nécessaires à émettre les constats et les recommandations
qui se trouvent dans notre rapport.
Mme Gamache (Valérie) : Est-ce
que ces rapports-là précisément ont apporté une lumière particulière à votre
enquête, ont teinté, à quelque part, les constats, je veux dire, assez
dérangeants, là, que vous faites?
Mme Rinfret (Marie) : Pardon?
Je n'ai pas…
Mme Gamache (Valérie) : À quel
point ces rapports-là vous ont amenée à dresser le constat qui est assez
dérangeant que vous faites de ce qui s'est passé de la première vague?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
indépendamment des rapports, la somme des témoignages recueillis, des
expertises obtenues, des documents et renseignements colligés nous amène au
constat que nous faisons. Ce n'est pas, je vous dirais, ce n'est pas un document
ou un rapport en particulier, c'est vraiment l'analyse de la situation en
fonction des faits que nous avons analysés rigoureusement à partir de
témoignages obtenus de la part des autorités, de la part de l'ensemble des
personnes, au fond, qui sont intervenues dans cette crise, d'experts également,
une analyse comparative avec l'Ontario et la Colombie-Britannique à certains
égards.
Bref, c'est ce qui appelle au constat et
surtout, je vous dirais, surtout, et c'est ce que je veux que vous reteniez aujourd'hui,
aux recommandations. Il est temps de passer à l'action. Aujourd'hui, je vous
présente les résultats de notre enquête, les constats qui nous appellent à
faire mieux et à des recommandations qui devraient, je le souhaite, nous
permettre d'être meilleurs.
Le Modérateur
: Alain
Laforest, TVA.
M. Laforest (Alain) : Bonjour
à vous deux. Mme la protectrice, j'aimerais savoir précisément, parce qu'on
l'écrit dans votre rapport, mais j'aimerais l'entendre de votre bouche, là, à
partir de quand les directions de CHSLD ont été avisées qu'il y avait un problème
majeur avec la COVID et qu'on devait prendre des interventions? Parce que là il
y a des messages qui sont contradictoires qui circulent actuellement. Dans
votre rapport, c'est assez bien écrit, là.
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
les faits ne mentent pas, hein? La chronologie des faits, elle est énoncée, les
CHSLD, les premières éclosions sont arrivées autour du 23 mars. Et en
conséquence, à partir de la mi-avril, les renforts sont arrivés, on a pris
conscience de l'ampleur de la crise dans les CHSLD, et, à partir de là, des
actions ont été prises.
M. Laforest (Alain) : Juste
pour être clair, avant la mi-avril… C'est-à-dire, il y a eu une conférence de
presse le 12 mars ici, dans cette salle, où le premier ministre annonce,
et la ministre responsable des Aînés annonce qu'il y aura des mesures qui
seront prises dans les CHSLD. Avant ça, selon votre enquête, est-ce qu'il y a
eu des indications parce que vous avez parlé de la culture du fax, est-ce qu'il
y a eu des indications à l'effet qu'il y avait des choses à faire? Ou, tout
simplement, on s'occupait trop des hôpitaux et pas assez des CHSLD?
Mme Rinfret (Marie) : Je vous
dirais tout ce que vous venez de présenter, c'est ça qui s'est passé, hein? En
fait, l'enquête documente très bien le fait que la stratégie nationale était
basée sur : libérons des places dans nos hôpitaux. On croyait vraiment, et
en toute bonne foi, que l'épicentre de la crise se vivrait dans les centres
hospitaliers, et, de ce fait, le délestage s'est amorcé. Et à compter du mois
de mars, de la mi-mars, des personnes ont été dirigées vers les CHSLD qui, là,
rapidement, ont été en surcapacité.
Ensuite, après l'annonce de l'urgence
sanitaire, là, il y a beaucoup… Attendez un petit peu, là. L'autre page. Donc,
le 12 mars, le 13 mars, la veille, le 12, on a transmis aux CISSS
et aux CIUSSS, donc aux établissements, pas encore aux installations, le Guide
pour l'adaptation de l'offre de service en centre d'hébergement et de soins de
longue durée en situation de pandémie COVID-19. Ce guide-là, je dois
le dire, il est assez général par ailleurs. Il ne donne pas d'indications très
précises, notamment, sur la prévention et le contrôle des infections ni les
équipements de protection, comparativement à celui qui a été fourni en Colombie-Britannique,
où là, vraiment, on prend par la main les personnes qui… le personnel soignant
de l'équivalent des CHSLD là-bas.
Le Modérateur
: Simon
Bourassa, Noovo.
M. Bourassa (Simon) :
Bonjour, madame. Trouvez-vous qu'il y a une dichotomie entre les constats que
vous faites et qui sont élaborés dans le rapport et ce qu'on entend dans les
audiences de l'enquête de la coroner Kamel présentement?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
notre rapport vous présente la globalité de l'enquête que nous avons faite,
donc de l'ensemble des témoignages, des documents, des renseignements que nous
avons obtenus, que nous avons analysés, et c'est, je vous dirais, la grande
différence. Donc, on n'est pas dans l'analyse de chaque témoignage émis ou
reçu, mais plus vraiment dans l'appréciation de l'ensemble des éléments. Et c'est
ce qu'on vous présente cet après-midi.
M. Bourassa (Simon) : …pour
rétablir la confiance du public envers ces établissements que sont les CHSLD,
parce que, là, la confiance, elle n'existe plus.
Mme Rinfret (Marie) : Je vous
dirais de se mettre au travail le plus rapidement possible. Pour moi, il est important,
il est extrêmement important de reconnaître la mission particulière des CHSLD,
qui sont un milieu de vie et un milieu de soins, d'aller immédiatement vers les
recommandations que nous proposons et, ma foi, mettre en place le plan pour
éliminer la pénurie de main-d'oeuvre, s'assurer que chaque CHSLD a le personnel
nécessaire pour offrir les soins, avec un gestionnaire sur place, une
personne... une équipe clinique de soins, un intervenant pivot qui prend la
personne, la personne aînée, la personne hébergée, et qui l'amène jusqu'en fin
de vie par rapport aux soins qui sont nécessaires pour elle.
Donc, vous le voyez, c'est difficile pour
moi de cibler une recommandation. C'est un tout. Il faut s'arrêter maintenant,
c'est le devoir que je nous donne, un devoir de mémoire, pour faire en sorte
que plus jamais… et maintenant, pour toujours, nos personnes aînées obtiennent
des soins de qualité, qu'ils soient à la maison ou en CHSLD.
Le Modérateur
: Tommy
Chouinard, LaPresse.
M. Chouinard (Tommy) : Oui,
bonjour. J'aimerais savoir, Mme Rinfret, si vous avez eu quelque preuve, trace
écrite, directive, peu importe, là, quant à une intervention du gouvernement,
des autorités du ministère de la Santé, en janvier, pour demander aux CISSS et
CIUSSS de se préparer à la pandémie puis de faire en sorte de préparer tout le
réseau, y compris les CHSLD.
Mme Rinfret (Marie) : Je vais
laisser Me Vallières répondre à cette question-là, si vous me le
permettez.
Mme Vallières (Hélène) :
Alors, écoutez, ce qu'on sait, évidemment, c'est qu'il y a eu la mobilisation
du réseau de sécurité civile, là, donc, les instances de sécurité civile pour
mettre en place, actualiser le plan de pandémie, là, H1N1. Donc, on sait qu'il
y a eu des démarches, là, pour préparer les établissements en ce sens-là, mais ça
restait une préparation générale, donc ça restait une préparation qui visait à
préparer notamment le milieu hospitalier pour accueillir, là, des patients
atteints en grand nombre. Donc, l'idée, à cette étape-là, c'était de dégager de
la capacité hospitalière. Ce qu'on a constaté dans notre enquête, c'est que les
préparations spécifiques aux CHSLD et les consignes, là, particulières données
aux établissements sont venues à la mi-mars, autour du 12 mars.
M. Chouinard (Tommy) : Maintenant,
vous savez, Mme Rinfret, il y a des gens qui vont être tentés de dire :
Bon, bien, oui, la Protectrice du citoyen, c'est le quart-arrière du lundi
matin, là. Elle, elle arrive, la crise était… bon, est à peu près derrière
nous, en tout cas, la première vague est très certainement derrière nous, elle
porte un jugement sur ce qui a été fait et elle ne tient pas du tout, du tout
compte du caractère d'urgence qu'il y avait à l'époque, de ce qu'on savait puis
de ce qu'on ne savait pas de la situation. Qu'est-ce que vous répondez à ça?
Mme Rinfret (Marie) : Je
répondrais à ça que c'est tout le contraire. On a tenu compte et on tient
compte encore du contexte d'urgence sanitaire, du contexte exceptionnel de la
pandémie. On a beaucoup entendu que l'avion se construisait en plein vol, et
c'est très vrai. Cependant, ce qu'on constate dans notre enquête, c'est que les
faiblesses, les lacunes qui avaient déjà été constatées dans les centres
d'hébergement de soins de longue durée n'ont pas été évaluées à la hauteur du
risque qu'ils comportaient dans un contexte de délestage, donc pour permettre
d'augmenter la capacité hospitalière, ce qui, en soi, était très correct, là,
de libérer des lits.
Là où le bât blesse, c'est que, lors de
cette libération-là vers les centres d'hébergement de soins de longue durée, on
n'a pas évalué le risque associé à ce délestage-là. Est-ce qu'il y avait du
personnel suffisant? Est-ce que le personnel qui était en poste était formé en
matière de protection, de contrôle des infections? Est-ce qu'il y avait de l'équipement
de protection individuelle suffisant? Est-ce que le personnel connaissait la
façon d'utiliser ces équipements-là? Cette évaluation n'a pas été faite, et
conséquemment la crise s'est vécue dans les CHSLD.
M. Lacroix (Louis) : Je vais
risquer une question. Vous dites, au paragraphe 178 de votre rapport, que
les… je ne l'ai pas devant moi, là, malheureusement, mais je vais le citer à
peu près de mémoire, là, que les résidents, les résidents ont été,
littéralement, mis de côté à la suite de ce qui s'est passé. Qu'est-ce que vous
voulez dire par là? De quelle façon est-ce que les gens ont été mis de côté?
Mme Rinfret (Marie) : C'est
qu'on n'a pas, dans le cadre des préparatifs de la pandémie, on… Dans le cadre
de l'élaboration de la stratégie gouvernementale, on n'a pas tenu compte des
vulnérabilités des CHSLD à savoir le manque de personnel, le manque de
connaissances en matière de prévention, je dirais même de culture, là, en
matière de prévention et de contrôle des infections. Je vous l'ai dit, il y a
des… la philosophie du milieu de vie s'oppose, en quelque sorte, à la culture
de prévention et de contrôle des infections. On ne veut pas faire peur aux
résidents. Eh bien, tout ça n'a pas été pris en compte lors de l'évaluation des
risques du transfert des personnes qui étaient dans les hôpitaux, dans les
centres hospitaliers, notamment, vers les CHSLD. Ce qui fait que, bien, à
terme, ce sont les résidents et les résidentes qui ont été victimes de ce
fait-là.
M. Lacroix (Louis) : Mais, en
même temps, quand on lit votre rapport, on se rend compte aussi qu'on savait
déjà une bonne partie des problèmes qu'il y avait dans les CHSLD que ce soit le
problème de main-d'oeuvre, bon, qui n'était pas suffisante, etc., là. Alors,
est-ce que c'est une forme de négligence d'avoir fait ça, d'avoir transféré des
gens qui, bien souvent, pouvaient être atteints de la COVID-19 sans évaluer le
risque qu'il y avait sur la santé des… est-ce que c'est une forme de négligence
à votre avis?
Mme Rinfret (Marie) : Honnêtement,
je ne crois pas. Je ne crois pas, et je m'explique : Oui, on savait qu'il
y avait un manque de personnel, enfin, on l'a beaucoup dit. Maintenant, encore
une fois, on a travaillé en silo, c'est-à-dire que la vision
hospitalo-centriste, la crainte qui nous venait de l'Italie était vraiment de
mettre l'urgence, et on est en situation d'urgence, ici, là. C'est pour ça
lorsque, M. Chouinard, vous me posiez la question : Est-ce que vous
avez tenu compte de ce contexte-là? Tout le temps, tout au long de la rédaction
du rapport. Et conséquemment on a fait pour le mieux à partir des informations
qui ont été recueillies auprès des directions responsables.
Alors, quand on regarde à l'annexe II du
rapport, le comité de stratégie qui gérait la pandémie, on se rend bien compte
que la direction générale responsable des personnes âgées et des proches
aidants n'y participait pas au tout début. Donc, on n'avait pas la
connaissance, si vous voulez, de ces milieux. Et au surplus, et c'est documenté
dans le rapport, cette direction n'avait pas l'expertise clinique. Elle
dépendait donc soit de la Santé publique ou d'autres directions au sein du
ministère. D'où nos recommandations de travailler, de maintenir les liens de
communication.
Depuis la première vague, le ministère a
créé, notamment, une direction responsable de la prévention et du contrôle des
infections, a favorisé également les échanges entre la direction responsable
des CHSLD et la direction de la Santé publique ainsi qu'avec les directions de
la prévention et du contrôle des infections. Donc, à cet égard-là, il y a des
améliorations qui sont en cours.
Ce que je recommande, dans le cadre du
rapport, c'est de nous assurer que ce mode de fonctionnement là est pérenne,
durable. Et c'est pourquoi, au-delà des actions qui ont été annoncées par le
ministre et qui ont été portées à notre attention par le ministère, on tient à
ce que le ministère nous transmette son plan d'action pour la mise en oeuvre de
nos recommandations et qu'il y ait un suivi de ces recommandations, qui est
demandé. Et je crois que la date, dans notre rapport, est le 1er mars 2022, le
premier suivi.
Le Modérateur
: Merci.
Vincent Larin, Journal de Québec.
M. Larin (Vincent) : Bonjour.
J'aurais aimé savoir si, pendant votre enquête, on vous a fait part du fait que
la Santé publique ou les autorités avaient des préoccupations, dès début
janvier, quant à la vulnérabilité des CHSLD. Voilà.
Mme Rinfret (Marie) : Oui.
Écoutez — puis là je cherche l'endroit dans mon rapport, là — c'est
au paragraphe 34 du rapport, où, on dit : «Il y avait une inquiétude pour
les personnes âgées en CHSLD, mais les informations obtenues, que nous avons
obtenues dans le cadre de l'enquête, démontrent qu'aucune action concrète et
spécifique de préparation des CHSLD sur le terrain n'a été faite avant la
mi-mars 2020.
Donc, oui, il y avait une inquiétude, mais
cette inquiétude ne s'est pas traduite, dans les faits, pour savoir quelle est
la situation dans les CHSLD, quel est le risque associé aux transferts de
personnes, de niveau de soins alternatifs dans les hôpitaux vers ces milieux de
vie, là, qui est venu créer une surcapacité dans un milieu déjà à la limite du
manque de personnel. Son personnel… l'évaluation n'a pas été faite non plus sur
l'absence du personnel qui serait atteint de la COVID-19. Donc, ça a été une
somme inouïe d'absences de prise en compte. Et c'est pour ça qu'on en conclut
que les CHSLD n'ont pas été pris en compte, dans aucun des scénarios de
préparation de la pandémie.
M. Larin (Vincent) : On a quand
même une ministre responsable des Aînés, au Québec, bon, qui est présentement
en arrêt de travail, qui était quand même là au début de la pandémie. Est-ce
que Mme Blais n'aurait pas dû jouer un rôle de leadership dans la préparation
des CHSLD?
Mme Rinfret (Marie) : Bien, écoutez,
je reviens à la façon dont la stratégie a été réfléchie. Alors, on s'est
concentré sur les centres hospitaliers, on a mis en place une cellule de crise stratégique,
opérationnelle où différents acteurs y participaient. Il y avait, en parallèle
de cela, les rencontres habituelles avec le comité de gestion du réseau, le
comité de direction, également. Et, à ce titre-là, lorsqu'on a demandé à la
direction responsable des CHSLD d'évaluer le risque, puisque cette direction-là
ne disposait pas — c'est une de nos recommandations, d'ailleurs — ne
disposait pas des ressources suffisantes pour poser une évaluation clinique du
risque de délestage des personnes vers les CHSLD, on a pris pour acquis que ces
établissements, que les CHSLD étaient en mesure de répondre à ces transferts, à
cette demande, et d'offrir les soins et les services nécessaires.
Le Modérateur
:
Marie-Michèle Sioui, est-ce que tu as une question?
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Oui. Je voudrais revenir sur votre
déclaration, Mme Vallières. Vous dites qu'on a demandé au réseau, là, je ne
sais pas si c'est les P.D.G. ou les CISSS, mais de mettre à jour le plan H1N1.
Est-ce que vous savez c'est à quel moment? Puis dépendamment du moment, en
fait, je me demande si ça, ça ne constitue pas une action concrète. Vous
écrivez dans votre rapport qu'il n'y a pas eu d'action concrète avant mars,
mais est-ce qu'on a demandé de mettre à jour ce plan-là avant le mois de mars?
Puis, si c'est le cas, pourquoi ce n'est pas considéré comme une action
concrète? Je ne sais pas si vous me suivez.
Mme Vallières (Hélène) :
Oui. Bien, écoutez, c'est parce que c'était une demande générale dans le sens
que le plan H1N1, c'était vraiment un plan très large, là, qui couvre l'ensemble
des soins et services. Nous, ce qu'on a regardé, c'est vraiment des mesures qui
visaient à préparer les CHSLD à faire face à la pandémie. Donc, évidemment, il
y a une marge entre demander de mettre à jour un plan d'action général puis
donner des outils puis des mesures concrètes de support et de soutien aux CHSLD
spécifiquement. Donc, tu sais, c'est à deux niveaux différents.
Donc, pour nous, ce n'est pas une mesure
qui aidait les CHSLD à se préparer, là, concrètement à faire face à la
pandémie. Ce n'était pas suffisant, en fait, là, ça fait partie des démarches
qui devaient être faites, là, mais ce n'était pas suffisant.
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : J'ai une deuxième question, mais si vous
pouviez avant juste me dire à quel moment ça a été demandé de mettre à jour ce
plan-là.
Mme Vallières (Hélène) :
C'était en janvier, là, si je ne me trompe pas, fin janvier.
Mme
Sioui (Marie-Michèle) : Fin janvier. O.K. Ma deuxième question, il y a
une disparité dans les chiffres au sujet de ces transferts-là des hôpitaux vers
les CHSLD. La semaine dernière, Mme McCann parlait de… elle avait dit en bas de
1 000, hausse de 20 %. Vous, vous arrivez avec 1 714, si je ne
me trompe pas, vous parlez d'une hausse significative de 31 %. Sur quels
chiffres on peut se baser? Comment vous expliquez cette différence-là?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez,
bien, nous, notre enquête, quand on vous parle, quand on vous parle des
chiffres, là, c'est clairement, là, les chiffres que nous avons obtenus. Et, à
cet égard-là, on a constaté que… Je vais vous lire, là, pour éviter tout
malentendu, là, on dit, et là-dessus on s'est basé sur les données du ministère,
qu'entre le 1er mars et le 31 mars 2020, on a constaté une augmentation de
31 % des admissions en CHSLD, comparativement aux autres périodes
mensuelles de l'année 2019‑2020. Donc, on a comparé cette donnée-là avec ce qui
était l'an dernier, alors que la comparaison de la ministre, pour arriver à un
20 %, elle s'appuie sur une autre comparaison.
Le Modérateur
:
Jocelyne Richer, LaPresse canadienne.
Mme Richer (Jocelyne) : Oui.
Bonjour, mesdames. J'aimerais revenir sur le fait que... votre constat comme
quoi, au tout début de la pandémie, au moment de faire les plans, les
préparatifs, les CHSLD ont été complètement ignorés, ça a été l'angle mort,
alors que le gouvernement savait que c'étaient des lieux d'hébergement
vulnérables qui accueillent une clientèle très vulnérable. Comme gestionnaire,
qu'est-ce que ça vous dit? Est-ce qu'on parle ici d'indifférence,
d'incompétence? Qu'est-ce que ça vous dit?
Mme Rinfret (Marie) :
Écoutez, ce que ça me dit, c'est qu'on a travaillé en vase clos, on a voulu… Et
je reviens à ce que c'était en mars 2020. On était en situation d'extrême
urgence, tout changeait presque d'heure en heure, ce qui fait qu'on est allé au
plus rapide...
Mme Richer (Jocelyne) :
...uniquement sur les hôpitaux, alors que tout le monde sait que les CHSLD
étaient là puis accueillaient des milliers de personnes vulnérables.
Mme Rinfret (Marie) : Il y
avait clairement, au sein du ministère, parce que c'est là où les orientations
étaient prises, hein... et il y avait clairement, au sein du ministère, un
manque de connaissance du milieu de vie et de soins qu'est un CHSLD. La
direction générale responsable des CHSLD a une expertise fine sur les milieux
de vie, mais, en ce qui concerne les soins qui doivent y être apportés, en ce
qui concerne les ressources nécessaires pour les offrir, à cet égard-là, ce
n'est pas cette direction-là qui possède l'expertise. Alors, on est allé avec
les connaissances que l'on avait à ce moment-là. On a pris pour acquis que les
CHSLD avaient une expertise en matière de prévention et de contrôle des
infections, puisqu'il y a de la grippe ou encore des gastroentérites, sans plus
se poser de questions.
Le Modérateur
: On va…
Mme Richer (Jocelyne) : Je
peux avoir ma deuxième?
Le Modérateur
: Ah oui!
Bien, vas-y. Excuse-moi, j'ai mal…
Mme Richer (Jocelyne) : J'ai
l'impression que vous êtes allés aussi loin que vous pouviez avec les moyens,
les ressources que vous avez. Maintenant, sachant ce que vous savez, est-ce que
vous seriez d'accord pour recommander la création d'une véritable commission d'enquête
publique indépendante pour faire toute la lumière sur cet épisode-là?
Mme Rinfret (Marie) : Cette
décision, elle appartient au gouvernement. Ce n'est pas à moi d'en décider.
Cependant, au moment où l'on se parle, pour moi, il est urgent de se mettre à
l'action, de se mettre au travail pour offrir aux personnes hébergées un milieu
de vie de soins de qualité, et humains, et sécuritaires.
En ce sens-là, je souhaite que les recommandations
que nous formulons cet après-midi soient mises en place le plus rapidement
possible, indépendamment de toute autre enquête qui pourrait avoir lieu sur le
sujet. Je tiens à ce qu'on investisse les ressources en temps, en énergie, en
argent dans la mise en place de mesures structurantes. Des mesures
structurantes, hein, ça fait très bureaucratique, là, mais parlons plutôt
d'offrir à nos personnes âgées des milieux de vie et de soins qui répondent à
leurs besoins de manière continue. On parle souvent de difficulté
d'accessibilité aux soins à domicile. Qu'on parte de là et qu'on se rende
jusqu'aux soins de fin de vie, puis qu'on offre des soins humains, de qualité
et sécuritaires tout au long de cette chaîne-là.
Et pour ça, selon moi, les recommandations
que nous formulons vont nous conduire à cela à partir d'une réflexion. Et donc,
pour moi, ce qui est le plus important, vraiment, dans notre devoir de mémoire,
c'est celui d'agir.
Le Modérateur
: On va maintenant
passer à la période réservée aux journalistes anglophones. Et je vais céder la
place à l'imminente collègue Raquel Fletcher.
La Modératrice : Merci. We'll start with Cathy Senay, CBC.
Mme Senay (Cathy) : When did you realize in doing the final report that hospital
transfers to CHSLDs were absolutely the wrong start and the perfect recipe for
this perfect storm?
Mme Vallières (Hélène) : Well, we investigated all through the past year, so we obtained a
lot of information, but of course we wanted to have, to gather all the
information before reporting. But it's clear in our finding that the risk
assessment associated with these transfers from hospital to CHSLDs was not done
in March when the orientations were given to organize these transfers. So, in
the chain of events, the effect of these transfers delayed in time, it took a
couple of weeks to make the effect and to come back to the Health department.
And we can say that it's probably around the 10th of April that the Health
department realized the situation had gone way too dramatic and they needed to
stop the transfers at that point.
Mme Senay (Cathy) : And when you realized that it's only on March 18, if I
remember well, or March 12 that finally a general, only general
guidelines, March 12, that only general guidelines were sent to CHSLDs,
only that. That was nothing compared to what they had to do to make sure that
CHSLDs were ready. So, they were wrong on that side.
Mme Vallières (Hélène) : Well, they didn't plan, I guess they took for granted that CHSLDs
would be ready to face eclosion of the sickness. I think they didn't anticipate
the lack of training about infection and prevention... infection control and
prevention measures that needed to be in place. They didn't evaluate the impact
of staff being absent from work because of the virus, and the impact of
overflowing already fully… the CHSLDs were at full capacity and, in many cases,
in over capacity, so the impact of the transfer was not anticipated as well.
So, what we're saying is
that the Health department did not evaluate the risk associated with all these
measures that were taken to prepare hospitals. So, the focus was on hospitals
and was on freeing beds in hospitals in order to prepare for the virus. Which
was not a bad thing, right, it was needed to get ready, but they didn't also
consider the impact on CHSLDs of all these measures.
Mme Senay (Cathy) : I just have one last question to ask you, that is important to me. In my entourage, I have family members that are scared to go
in CHSLDs since what happened in the first wave. How will you ensure that the
trust will come back with your report?
Mme Vallières (Hélène) : It's important to
say that since the first wave of the pandemic, many actions were taken by the
Health department, by the establishments, the CISSS and CIUSSS. So, a lot of
actions were put in place in order to make sure we have all these measures in
place, so infection, prevention and control measures are reinforced and there
are now local management. So, there are many measures that were put in place.
It's a good start. And we're here to make sure that these measures will last in
time and will strengthen these environments, this housing environment for
elderlies, so that they have a good quality of care. And we will follow up on
all the recommendations that we
make until they are fully implemented.
La Modératrice
: Phil Authier, the Montreal Gazette.
M. Authier (Philip)
: How do you do? I just want to ask you, there's a clause in your
report in which people challenged senior health officials about… because they
could see what was happening already in the CHSLDs, and nobody… it says that
nobody listened to them. Is our health system truly that dysfunctional?
Mme Vallières (Hélène) : Well, we can say, for many years, CHSLDs were on the back burner of
the health system, understaffed, and the problems were there for many years,
right? So, in preparing for the pandemic, the same issue reappeared, where the
CHSLDs were not seen as places where care are given, active care, at some
point, and during the pandemic, active care was asked from the employees of
these CHSLDs, and they were not prepared to do so. So, it's not surprising to
see that the Health Department did not think of preparing adequately the CHSLD
because for many years they were not at the center of the health system.
So, what we are here to
say is that these events, these dramatic events need to be an incentive for
change. They need to encourage us to make radical changes and to rethink the
model of CHSLDs to ensure the proper quality of care, to define what we want to
see as a standard of cares, all across CHSLDs, whether they are public or
private, and to ensure that the standards of cares are met and that we
recognize the complexity as well that these living environment represent in
terms of living... a place where elderly people live, but they also receive
care, sometime with an intense level.
Une voix
:Thank you.
Mme Fletcher (Raquel) : I also have some quick questions. Raquel Fletcher, Global news. I'll ask you them, but I'll just
have you answer into the…
Mme
Vallières (Hélène) : Oh! Yes, sure. It's alright.
Mme Fletcher (Raquel) : Yes, you can look at Cathy. I just want to go back to the guide
that you said was given on March 12th, and I'm just wondering if you could
clarify, as you did in French, that these directives that were given to the
CIUSSSs et the CISSSs at that time were not the same guides that we saw in British Columbia. For instance, what was the difference and what was
lacking in the Québec guide?
Mme Vallières (Hélène) : Well, the guide transferred… given to the CISSSs and CIUSSSs, in
March 12th, they were general guides asking CHSLDs to adapt their
services. So, they specified which services needed to be maintained and which
services needed to… put aside for the time of the pandemic. They were general
orientations. For example, it's that they needed to gather protection equipment,
well...
But the guide did not
specify specifically what the CHSLD needed to put in place to really prepare
for this virus in particular, compared to the guide that was provided in British Columbia, where it's really an infection prevention control
and a guideline very specific to the coronavirus, really detailing what are the
questions you need to ask, what are the symptoms you need to watch for, what
are the guidelines to put, personal equipment, in order
to follow the good practices. So, it's really a step by step guide helping
these CHSLD to really know exactly what to do and what to put in place. And
this is what was needed at that point to have really precise orientation on
what measures they needed to put in place.
Mme Fletcher (Raquel) : Do you believe that you had access to everything that you needed
to, that you were able to conduct a thorough investigation? Is there anything
that you weren't able to do in this investigation that a public independent
inquiry would be able to?
Mme Vallières (Hélène) : We received everything we asked for, every document. We had a good collaboration from all the actors. And I
would add that the witnesses that we interviewed were very frank and open with
us. So, we really feel that we identified the causes of this crisis specific to
the CHSLD. For sure, we can evaluate the measures that were put in place since
then, and our propositions, our
recommendations are really what we feel is important to put in place right now in order to change things in a very concrete way for this living environment.
Une voix :
Merci.
Mme Vallières (Hélène) :
Merci.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Ceci conclut la conférence de presse.
(Fin à 15 h 59)