(Dix heures trente-cinq minutes)
M. Deltell: Alors, mesdames messieurs, bonjour. Écoutez, nous sommes devant une situation de manque flagrant de jugement dans l'exercice des fonctions politiques versus le judiciaire.
Nous, à l'ADQ, nous estimons qu'il est primordial d'avoir une distinction très forte entre le politique et le système policier. Dans le cas présent, il y a eu une ingérence directe qui nous apparaît inacceptable, et Jacques Dupuis, le ministre de la Sécurité publique, a fait preuve d'un manque de jugement très grave, et ce, à deux reprises, dans le cas qui nous intéresse.
Tout d'abord, en acceptant de rencontrer à son bureau de circonscription un citoyen qui était... qui se disait maltraité concernant une situation de port d'armes. À sa face même, il n'aurait pas dû accepter cette rencontre-là. Pourquoi? Parce que la question du port d'armes est une question purement technique qui relève exclusivement du monde judiciaire, du monde policier. Ça appartient aux policiers à juger si, oui ou non, quelqu'un peut avoir le port d'armes. Le politique n'a strictement rien à voir à ça. Donc, que M. Dupuis savait que c'était le point qui voulait être débattu, il a accepté ça, c'est d'abord une erreur de jugement.
Mais, pire, il a mandaté un membre de son cabinet pour faire un appel à la Sûreté du Québec. Alors là, c'est une deuxième erreur, c'est encore plus grave parce que non seulement il accepte d'accueillir une situation semblable à son bureau mais, en plus, il mandate des gens de son bureau pour faire des démarches auprès de la Sûreté du Québec. C'est de l'ingérence pure entre le politique et le policier, et, dans notre système, pour nous, c'est tout à fait inacceptable.
C'est pour ça qu'on estime que M. Dupuis a fait preuve d'un manque de jugement très grave, qui entache sa réputation, qui entache notre processus policier et qui donc commande une action sévère de la part du premier ministre. Il faut absolument que le premier ministre fasse la lumière là-dessus, demande des comptes à son ministre. Et je tiens à vous rappeler qu'en d'autres temps Jean Charest a déjà quitté le Conseil des ministres fédéral pour avoir appelé un juge. Alors, quand on constate que le ministre de la Sécurité publique s'ingère directement dans un processus de port d'armes, d'un permis de port d'armes, c'est une ingérence directe dans le monde policier, je crois que le premier ministre a des comptes à demander à M. Dupuis.
M. Chartrand (Yves): ...M. Deltell, il y a une autre facette à ça qu'il faut voir, c'est... Il y a un processus rigoureux qui est en place pour accorder un port d'armes. Comment ce processus-là peut-il être... Là ce que vous dites, c'est que l'intervention de M. Dupuis a eu clairement un impact sur la décision, puisqu'il avait été refusé une première fois et que, dans une seconde tentative, après avoir rencontré le ministre, il l'a obtenu. Comment le processus peut être aussi fragile par rapport à ça? Est-ce qu'effectivement vous croyez que, parce qu'il y a eu un coup de téléphone du bureau... un coup de téléphone ou un contact avec le bureau du ministre, que c'est ça qui a fait que la décision a été renversée?
M. Deltell: J'espère que non, mais la question doit être posée et la réponse doit être donnée par les autorités de la Sûreté du Québec et aussi par M. Dupuis, parce que M. Dupuis a accepté à deux reprises d'intervenir directement dans une question qui relève essentiellement du monde policier. La question du port d'armes, je m'excuse, là, ce n'est pas un cas de comté, là. Moi, comme député, j'en reçois à tous les jours, des citoyens qui m'amènent un cas de comté. La question d'un port d'armes, ce n'est pas un cas de comté, là, ce n'est pas quelqu'un qui a une difficulté avec un organisme public. On parle du port d'armes. C'est policier pur, ça relève uniquement du policier. Et, que le ministre de la Sécurité publique qui accepte d'accueillir dans son bureau quelqu'un qui a un problème avec son permis de port d'armes, c'est un manque de jugement colossal. Et, pire que ça, il demande à quelqu'un de son cabinet d'appeler la Sûreté du Québec, c'est double ingérence tout à fait inacceptable. M. Dupuis a fait preuve d'un manque de jugement terrible dans cette situation-là, et il faut qu'il en paie le prix.
M. Chartrand (Yves): Vous avez parlé de la démission de M. Charest lorsqu'il avait appelé un juge. Est-ce que vous dites que, dans le cas de Dupuis, ça devrait être la même chose?
M. Deltell: Honnêtement, je ne vois pas comment on pourrait faire autrement, puis la raison est fort simple. Je veux dire, c'est une ingérence directe du politique dans le monde policier. Souvenez-vous que M. Charest, il y a 25 ans, à titre de ministre, avait... était intervenu dans le monde judiciaire, avait appelé un juge. Et la condamnation était venue immédiatement: Dehors, un ministre ne peut pas faire ça. Dans le cas présent, nous devons préserver, nous devons sauvegarder l'immunité entre le politique et le policier. Le jour où le politique s'insère dans le policier, malheureusement les règles sont brisées et la confiance est amochée.
M. Chartrand (Yves): Est-ce qu'on peut en déduire que vous allez demander sa démission en Chambre?
M. Deltell: Ça appartient au premier ministre; ça, c'est clair. Mais le premier ministre a une...
M. Chartrand (Yves): Est-ce que vous allez l'exiger?
M. Deltell: Bien, regardez, les faits, les faits malheureusement conduisent à ça. Est-ce qu'il y a d'autres explications qui méritent d'être connues? La réponse appartient au premier ministre. C'est le premier ministre qui, lui, en son âme et conscience, peut voir si, en effet, il estime qu'il y a eu une intervention ─ nous, on estime que oui ─ qui est tout à fait inacceptable. Et, dans le cas présent, le premier ministre n'aura pas d'autre choix que de demander le départ de son ministre de la Sécurité publique parce que, je vous le répète, c'est une ingérence directe entre le politique et le policier, et, dans notre État, on ne peut pas accepter ça.
M. Chartrand (Yves): Des questions sur d'autres sujets, est-ce que je peux ou... Oui? Je voudrais savoir, avoir une réaction de votre part, M. Deltell, concernant justement encore M. Dupuis et le premier ministre, qui ont fait des contributions à la Fondation Garnierkids.com, qui appartient à Joe Borsellino, qui est un constructeur qui a eu des contrats dans la construction de garderies, qui a été mêlé à quelques histoires un peu douteuses, notamment, à Montréal, il avait invité un M. Marcil en Italie, qu'il a fallu qu'il démissionne.
Comment vous réagissez à des... au premier ministre puis à M. Dupuis qui se sert de son budget discrétionnaire pour donner à cette fondation-là qui, elle, accorde des... donne de l'argent à des hôpitaux reliés à des causes pour les enfants, au lieu de donner l'argent directement aux hôpitaux, donc?
M. Deltell: Bon. C'est un cas qui est très délicat, puis je pense que le premier ministre a été clair aussi là-dessus, concernant M. Dupuis. Puis, moi, je vais vous dire, parce que M. Dupuis, bon, on sait son histoire avec son enfant, et tout ça, puis je veux être très, très prudent dans cette affaire-là, monsieur... parce que... M. Chartrand, parce que, moi le premier, dans ma circonscription, je reçois souvent des demandes comme ça, des gens qui aimeraient qu'on donne un coup de main à une fondation. Puis, nous, on évalue toujours ça en fonction de la fondation, en fonction des objectifs qui sont recherchés là-dedans. Et, dans le cas présent, nous estimons que la fondation a des objectifs nobles.
Que le premier ministre, que M. Dupuis aient décidé eux-mêmes, en leur âme et conscience, d'aider cette fondation-là parce que ça rejoignait leurs préoccupations et ils estimaient que c'était une bonne cause, ça leur appartient, et je respecte ça. Maintenant, est-ce qu'ils auraient pu faire ça, donner directement à une fondation d'hôpital? Ça, je vous dirais que, moi, comme député, je reçois souvent des demandes comme ça et je laisse au bon jugement, aux gens à faire ce qu'ils veulent faire avec ça, mais, moi, comme élu, ce que je regarde, c'est: Est-ce que l'intérêt public, l'intérêt commun est préservé dans ça? Ça peut aller d'un coup de main à un organisme caritatif comme les Chevaliers de Colomb, un organisme qui s'occupe des jeunes comme la maison des jeunes, ou des scouts, ou tout ça. Et ça, ça appartient vraiment au jugement du cas-par-cas. Dans le cas présent, je ne voudrais pas aller plus loin que ça, eu égard à ce que vous savez.
Mme Montgomery (Angelica): Mr. Deltell, I think a lot of people will say... or I expect the natural response from the Government would be: It's normal for people in our riding to come to us and ask us for help for various things. So how will you respond to that when it comes to the...
M. Deltell: Well, because this is not an usual case. The point is: it's about a weapon. We ask a license to have a weapon with us, to carry a weapon... Is that the right sentence in English, «a license to carry a weapon»? O.K. So it's not the same thing of someone who would ask to have a hand for CSST, or something else, you know.
When we talk about weapon, we talk about police, so we're not talking about politics. There is a huge difference between politics and the police. There is a huge difference, there is a wall between the Sûreté du Québec and the politics. And, when the Cabinet Minister, receiving at his...in his own office, in his office a person who would like to ask for a review of a decision of la Sûreté du Québec concerning a license, a license to carry a weapon, well, it's a bad judgment.
And, after that, what he has done, Mr. Dupuis asked one of his Cabinet Members to call the Sûreté du Québec to have a response to the situation, which is a second mistake. So, in my personal... in my point of view, in our point of view, in two times, Jacques Dupuis failed in his obligation to have a wall between the politics and the Sûreté du Québec. So he failed in this situation twice.
And so this is why I think, when we remember that Jean Charest had to quit the Cabinet, the Federal Cabinet because he called a judge, I think it's the same situation there, because Mr. Dupuis had a lack of judgement in this situation. He had to respect the wall between the politics and the Sûreté du Québec, but unfortunately he failed to recognize that wall, and he intervened two times.
Mme Montgomery (Angelica): How does this affect his legitimacy as Minister of Public Security?
M. Deltell: Well, in our State, we have... we shall respect the difference between each power. And, in this case, he interfered directly in the process of the Sûreté du Québec. And, when we're talking about weapon, we're not talking about anything, you know, it's something very special.
Mme Montgomery (Angelica): And should he resign?
M. Deltell: Well, I think the decision is to Premier Charest. But, when we remember, 23 years ago, Premier Charest resigned because he made just a phone call to a judge. In that case, the Cabinet is directly, at the direct intervention in the Sûreté du Québec, which is not good.
Mme Montgomery (Angelica): Does this affect his legitimacy as Leader of the Government of the National Assembly?
M. Deltell: Well, I always thought that he was not the right guy at the right place. I think that Mr. Charest, maybe, one day, will recognize the fact that Jacques Dupuis disserves him more than he can contribute to his success.
Mme Montgomery (Angelica): What do you mean?
M. Deltell: I mean that Jacques Dupuis is not at the right place as a leader in the Government, you know. He's always in a confrontation style. We can see that every day at the period of questions. I listen to my constituents, in the week-end, talking a lot about this guy always in confrontation with the Opposition. That's not a good attitude to have in the House. We have to remember Jean-Marc Fournier, who was more on the dialogue aspect on the... He was more conciliated with the Opposition. But Mr. Dupuis, in his own style, is always arrogant with the Opposition, so I think he is not good as a leader. But that's the decision of Premier Charest.
Mme Montgomery (Angelica): Now, when it comes to... and you're probably aware of the story of festivals and the heads of festivals giving donations to the Liberal Party. What do you make of that?
M. Deltell: Well, I think it's another... another situation where the bagmen of the Liberal Party have an obligation to... in their... You know, they have a lot of influence in the business of the Government, and we condemn that. In that case, what we see, is that a «retour d'ascenseur»... I don't know. How do you say that in English? Kickback or...
Mme Montgomery (Angelica): Yes, kickback.
M. Deltell: Kickback. O.K. I was not sure of that. O.K. So what we see now is a guy saying: O.K. I receive a hand from my MNA, tough, so I will give a kickback to the Liberal Party, which is all wrong, because the MNA gave the money from the people, not from the Liberal Party. It was not the Liberal Party who helped this guy, it was the constituent... the MNA with the money of the people, not the Liberal Party money. So this is why he had to give a kickback to someone, it's to the Government not to the Liberal Party. But that's another demonstration that there is an emergency here to have a public inquiry about the influence of the Liberal Party fund-raiser in the administration of this Government.
Thank you. Merci beaucoup.
(Fin à 10 h 47)