(Onze heures quatre minutes)
Mme Ghazal : Merci. Alors,
bonjour, tout le monde. Comme vous le savez, la COP débute aujourd'hui. Donc,
elle va durer pendant deux semaines. Moi, je vais y aller la semaine prochaine,
en même temps que le ministre Benoît Charette.
On le sait tous, la CAQ a un immense
déficit de crédibilité quand il s'agit d'environnement, de lutte aux
changements climatiques. Et, moi, ce que j'ai envie de faire aujourd'hui, c'est
de demander au ministre Charette de saisir l'opportunité de sa présence à la
COP et aussi du fait que le plan de lutte aux changements climatiques qu'il
doit présenter n'est pas encore présenté, donc de saisir cette opportunité pour
augmenter sa crédibilité en matière d'environnement. Et c'est pour ça que
j'aurai trois demandes à lui faire.
Mais, tout d'abord, avant de vous parler
de ces demandes-là, la semaine passée, il y a eu un rapport du programme des Nations
unies sur l'environnement, qui a publié, en fait, où est-ce qu'on en est en
matière d'émissions de gaz à effet de serre. Donc, ce qu'on voit ici en rouge,
c'est les gigatonnes de gaz à effet de serre émises, mondiales. Ça, c'est en
date d'aujourd'hui, ce qui a été émis jusqu'à maintenant. Et, si on continue la
tendance actuelle, bien, on voit qu'on ne s'en va pas vraiment dans la bonne
direction, ça continue à augmenter. On a ici les émissions si les États
respectaient les objectifs de l'accord de Paris. Et, si on écoute ce que les
scientifiques nous disent, où il faut que le réchauffement climatique soit de
2 °C et même de 1,5 °C d'ici 2100, bien, ils disent que les émissions
de gaz à effet de serre ne devraient pas aller vers là, mais plutôt ici. Ça, c'est
pour le 2°, et ça, c'est pour le 1,5°.
Maintenant, ce que j'ai fait. Évidemment, le
programme des Nations unies n'a pas mis les chiffres du Québec, et j'ai ajouté
ceux du Québec. Donc, on voit les émissions en date d'aujourd'hui et on voit la
tendance actuelle. Elle s'en va vers le haut. Mais, si on veut atteindre les objectifs
du gouvernement pour limiter le réchauffement climatique, si le Québec veut
être un leader et contribuer à limiter le réchauffement climatique, bien... Le gouvernement
a dit : Nous, on veut réduire nos émissions de gaz à effet de serre, d'ici
2030, à 37,5 %. Donc, ça, ça veut dire qu'il faut être là, et même,
jusqu'en 2050, d'atteindre la carboneutralité. Donc, on voit qu'on ne s'en va
pas vers la bonne direction. Le plan du gouvernement n'est pas là encore. Et
c'est pour ça que j'aurai ces demandes-là.
Donc, la première chose importante, c'est
que le gouvernement vient... Le ministre a déposé un projet de loi, le projet
de loi n° 44, qui est en train de totalement chambouler la gouvernance
climatique. Et il y a beaucoup de choses inquiétantes qu'on va avoir la chance
d'en parler à l'hiver prochain, mais il y a un élément important que je lui
demande tout de suite de mettre, c'est un outil important, le budget carbone.
C'est quoi, le budget carbone? Il faudrait qu'on se mette dans la tête de gérer
les émissions de gaz à effet de serre de la même façon qu'on gère les finances
publiques, qu'on gère l'argent des Québécois. C'est-à-dire qu'au lieu de se
dire : Bien, on se fixe des objectifs à très, très long terme, en 2030, on
va réduire de 37,5 %, bien, par exemple, c'est comme si on se disait :
On va réduire les coûts, mais on ne se met pas d'objectif de limite chaque
année, combien d'argent ou combien, dans ce cas-ci, d'émissions de gaz à effet
de serre on peut émettre. Donc, il faut faire une limite, et, pour ça, ça prend
un outil qui est utilisé en Grande-Bretagne, qui est le budget carbone. Et il y
a une opportunité pour que le ministre le mette dans son projet de loi si on
veut vraiment être sérieux puis atteindre notre objectif.
Le deuxième élément, le plan de lutte...
en fait, ils appellent ça le Plan d'électrification et de changements
climatiques, que le ministre doit soumettre sous peu. Bien, il devrait être
vérifié par un expert indépendant parce que, là, il va y avoir une liste de
mesures qui vont être mises en place, et c'est le gouvernement qui nous dit que
ça va nous permettre d'atteindre les objectifs. Maintenant, ce qu'il faut,
c'est que chacune des mesures dans ce plan-là soit évaluée par un expert
indépendant, neutre, qui nous dise que : Est-ce que c'est vrai que ça va
nous permettre d'atteindre la bonne trajectoire et non pas continuer comme
aujourd'hui?
Troisième demande que je lui fais, c'est :
Aucun soutien public à l'industrie des énergies fossiles et aux infrastructures
qui les soutiennent. On le sait, par exemple, il y a le projet de GNL Québec.
Le gouvernement a fait un pas où il a accepté notre motion qui dit : Pas
d'argent du Fonds vert ne doit aller dans ce projet-là. Eh bien, il doit faire
un pas de plus et dire : Aucun fonds public ne doit aller dans un projet
qui n'a aucun sens, qui est totalement absurde dans cette ère de lutte aux
changements climatiques, même chose pour toute l'industrie des énergies
fossiles.
Dernier élément que je veux ajouter. Vous
savez, la COP a lieu à Madrid. Et donc j'ai beaucoup réfléchi. On a réfléchi
est-ce qu'on y va, sachant que le gouvernement de Madrid a mis en prison des
élus démocratiques catalans, qui sont aujourd'hui en prison. Et finalement ce
que j'ai décidé de faire, c'est que, tout de suite après la COP, j'irai passer
quelques jours en Catalogne pour parler avec nos alliés, les gens... en fait,
pas nos alliés. Nous, nous sommes leurs alliés. C'est les gens qui luttent, des
mouvements indépendantistes, des gens de la société civile, des partis
indépendantistes, que je vais rencontrer.
Et en même temps aussi je vais profiter de
mon séjour pour aller porter des messages de solidarité que je suis en train de
recueillir cette semaine de la part des Québécois... et aller les porter en
main propre aux prisonniers catalans. Il y a eu discussion pour qu'on les
rencontre. Et je vais avoir cette... répondre à l'appel qui est lancé par le
peuple catalan et aller rencontrer notamment ces prisonniers politiques pour
leur remettre ces messages en main propre. Merci.
Mme Gamache (Valérie) :
Quelques questions. Tout d'abord, vous avez parlé de GNL Québec. Vous avez
obtenu l'assurance que le gouvernement n'investirait pas d'argent du Fonds
vert. Le Fonds vert, par le p.l. n° 44, est appelé à
se modifier. Est-ce que vous avez l'impression que le gouvernement pourrait
détourner sa promesse ou se détourner de cet engagement-là?
Mme Ghazal : Bien là, c'est
une motion qui a été votée. On ne l'a même pas appelé Fonds vert. On l'a appelé
comme le nouveau terme, qui est le FECC, donc c'est le Fonds d'électrification
et de changements climatiques. Et c'est ce qui a été marqué dans la motion, que
cet argent-là ne devrait pas aller là-dedans. Maintenant, c'est une motion
qu'il a votée en Chambre, ce n'est pas un ordre. Mais, moralement, il ne
devrait pas y avoir d'argent là-dedans, sauf que ça, c'est juste du Fonds vert.
Il pourrait décider, par le biais de toutes sortes de façons, de financer ce
projet-là. Les évaluations environnementales ne sont pas encore complétées. Il
faut attendre de les compléter.
Malheureusement, le gouvernement n'a pas
voulu faire ça en un seul tout parce que c'est un projet immense, énorme,
gazoduc GNL, qui va avoir des impacts immenses. En séparant, c'est peut-être
parce qu'il a un préjugé favorable envers ce projet. Il veut qu'il ait lieu. Donc,
aucun argent des Québécois ne doit financer une énergie fossile. Le gaz
naturel, c'est une énergie fossile. Et, si on veut être sérieux, puis arrêter
d'aller là, puis qu'on veut vraiment atteindre nos objectifs, il faut que ça
reste dans le sol.
Mme Gamache (Valérie) : Quelle
image donnera le Québec à la COP25 dans les deux prochaines semaines?
Mme Ghazal : Bien, justement,
c'est qu'on a une opportunité de démontrer une image de leader. Mais en ce
moment M. Charette ne peut pas aller à la COP et se péter les bretelles en
disant que nous, on est des leaders parce qu'on a l'hydroélectricité et parce
que, par exemple, on participe à la bourse du carbone, etc., parce qu'il suffit
juste de montrer ça à n'importe qui et de voir qu'on ne peut pas se targuer
d'être des leaders. Les faits, les chiffres le démontrent. Et le gouvernement
est arrivé en campagne électorale les mains vides. Et, jusqu'à aujourd'hui,
plus d'un an plus tard, on n'a toujours pas de plan d'action. Là, il va le
déposer maintenant.
Donc, s'il veut vraiment être un leader,
moi, je lui dis d'arriver avec le budget carbone, ce que je viens de
mentionner. C'est un outil qui est déjà utilisé. S'il va à la COP puis il en
parle, je lui conseille aussi d'en parler avec les gens qu'il va rencontrer, les
élus des autres pays, et d'en apprendre plus sur cet outil-là, qui est de plus
en plus utilisé, pour vraiment être sérieux puis arriver à nos objectifs. Donc,
le budget carbone, s'il arrive avec ça, là, il y aurait une augmentation de
crédibilité.
Mme Gamache (Valérie) : Est-ce
que M. Legault aurait dû se rendre à Madrid pour cette rencontre-là?
Mme Ghazal : Bien, c'est sûr
que le plus important, si on veut montrer que la lutte aux changements
climatiques est vraiment le défi de notre siècle, que c'est extrêmement important,
puis qu'on est sérieux... Oui, bien sûr, surtout, le premier ministre devrait
être là pour montrer à quel point c'est important parce qu'on ne peut pas juste
parler... d'un côté, dire : On est les leaders, on a l'hydroélectricité,
on est très, très bons, regardez, quand on se compare, on se console... C'est souvent
ça, ce que le premier ministre nous dit. Bien, s'il est vraiment sérieux, puis
il veut être un modèle, puis montrer la voie, bien, au moins, s'il y allait
puis qu'il apprenait, par exemple, pourquoi un budget carbone... En tant que
comptable, moi, je n'ai pas besoin d'expliquer à M. Legault c'est quoi, un
budget, dans la vie, mais je me dis : Il devrait peut-être, en tant que
comptable... Puis, s'il veut que ça soit sérieux, les émissions de gaz à effet
de serre devraient être traitées de la même façon. Ça fait qu'il aurait pu
aller là-bas en apprendre davantage puis amener ça ici.
Mme Gamache (Valérie) : Dans
un autre dossier, projet de loi n° 34. On est à quelques jours de la fin
de la session. Il n'y a qu'une seule rencontre de prévue pour étudier le projet
de loi article par article. Avez-vous l'impression qu'on s'en va droit vers un
bâillon?
Mme Ghazal : Écoutez, moi,
j'ai déposé en Chambre une motion demandant au gouvernement de continuer, que
les oppositions et tout le monde, on continue à faire notre travail jusqu'au
bout, parce qu'il y a énormément d'éléments importants et qui vont avoir des
impacts durables sur les tarifs d'Hydro-Québec, et non pas de faire un bâillon,
et le gouvernement a voté contre cette motion. Donc, ça, ça veut dire... Le message
est clair. On arrête de travailler puis nous, on a fait notre tête sur ce
projet de loi là, même si pas juste les partis d'opposition, tous les experts,
les grands consommateurs industriels, qui ne sont pas souvent nos alliés, les
gens qui protègent les consommateurs, là, domestiques, tous ces gens-là, tout
le monde est contre ce projet de loi là parce qu'il est totalement illogique et
totalement déconnecté de la réalité. Mais le gouvernement va aller de l'avant,
et c'est vraiment, vraiment dommage. On aura fait tout...
Mme Gamache (Valérie) :
Avez-vous fait votre deuil, à quelque part, de cette bataille-là?
Mme Ghazal : Non, non, non.
Nous, on continue. Comme vous dites, là, il y a une rencontre. On continue
jusqu'au bout. On n'arrête jamais. Jusqu'à la dernière seconde, je garde
espoir. Même s'il y a un bâillon, il y a même des amendements qu'on peut
amener, et ils sont déjà prêts. Je suis prête à mener la bataille jusqu'au bout
parce que c'est vraiment un sujet beaucoup trop important et qui va durer
pendant de très longues années. De mettre la Régie de l'énergie... comme ça,
là, de l'affaiblir à ce point-là, le chien de garde des consommateurs, pendant
cinq ans, c'est vraiment un manque de transparence flagrant.
Mme Gamache (Valérie) : Merci
beaucoup.
La Modératrice
: Merci.
(Fin à 11 h 15)