Définition
Période de deux heures réservée aux débats portant sur une motion d'un député de l'opposition. Sauf en période de travaux intensifs, un tel débat a lieu au cours des affaires du jour de la séance du mercredi, d'où l'appellation « motion du mercredi ».
Inscription d'un préavis au feuilleton
Le député qui désire présenter une motion dans le cadre de ces débats doit, au plus tard à 12 h le jour de la séance qui précède ces débats, soit le mardi, transmettre un préavis pour inscription au feuilleton. Sous réserve de sa recevabilité, la motion ainsi transmise est inscrite au feuilleton du mercredi sous la rubrique intitulée « Affaires inscrites par les députés de l'opposition ».
Critères de recevabilité d'une « motion du mercredi »
En règle générale, les « motions du mercredi » doivent satisfaire aux mêmes critères de recevabilité que les autres motions. En vertu du Règlement, elles ne doivent contenir ni exposé de motif ni argumentation. Le président n'a pas à juger de l'exactitude des faits énoncés dans la motion; c'est plutôt aux députés de le faire lorsqu'ils votent sur la motion.
Amendement à une « motion du mercredi »
Pendant longtemps, la possibilité d'amender les motions du mercredi a été le sujet de discussions. Les députés de l'opposition voyaient dans ces amendements une façon de dénaturer leur motion au point de les obliger à voter à l'encontre de celle-ci. En effet, la motion du mercredi étant traitée dans le Règlement en vigueur comme toute autre motion de fond, elle pouvait donc faire l'objet d'amendements suivant les mêmes critères de recevabilité que celle-ci. Selon une décision de la présidence rendue en 1990, la seule façon de changer cet état de chose était de modifier le Règlement lui-même, ce qui a été fait au moment de la réforme d'avril 2009.
Déjà, au cours des années précédant cette réforme, les critères de recevabilité des amendements aux motions du mercredi avaient été resserrés par la présidence, celle-ci jugeant que les députés de l'opposition avaient peu d'occasions de saisir l'Assemblée de motions. L'examen d'une motion d'amendement devait donc être rigoureux afin de juger si l'amendement dénaturait ou niait le principe de la motion principale.
Depuis le 21 avril 2009, il n'est donc plus possible d'amender une motion du mercredi, sauf avec la permission de son auteur. Le cas échéant, le débat portera à la fois sur l'amendement et sur la motion principale. Le fait que l'auteur de la motion doive consentir à un amendement ne signifie pas que la présidence ne peut plus se prononcer sur la recevabilité de ce dernier. À titre d'exemple, même si l'auteur de la motion ou le leader de son groupe parlementaire permet un amendement, la présidence de l'Assemblée pourra toujours intervenir dans le cas où un député d'un autre groupe ou un député indépendant soulèverait des doutes sur la recevabilité de la motion d'amendement.
Répartition des « motions du mercredi »
Le président a le pouvoir de déterminer l'ordre dans lequel seront débattues les différentes affaires inscrites au feuilleton par les députés de l'opposition. Il le fait en tenant compte de l'ordre de leur inscription au feuilleton ou de la réception des préavis, de l'alternance entre les groupes parlementaires et de la présence de députés indépendants. Lorsque l'opposition est uniquement composée de l'opposition officielle, le choix est aisé, puisque celle-ci indique au président l'affaire qu'elle aimerait débattre.
Toutefois, lorsque l'opposition est formée de plusieurs groupes parlementaires, la répartition des motions se fait selon la représentativité de chacun des groupes et en tenant compte de la place prépondérante dont l'opposition officielle doit jouir dans l'exercice du contrôle parlementaire et de la présence de députés indépendants. La première motion du mercredi d'une période de travaux doit être accordée à l'opposition officielle. La distribution des autres motions du mercredi se fait selon un cycle qui permet de déterminer à l'avance, d'une manière objective, sans égard à l'actualité politique, l'ordre dans lequel les motions du mercredi seront réparties.
À la séance du mardi, le président informe l'Assemblée de l'affaire qui sera débattue le lendemain. Il communique cette information au cours de la période des affaires courantes, au moment prévu pour les renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Débat sur la motion
Le débat sur la motion a lieu le mercredi après-midi de 15 h à 17 h au plus tard. Le débat sur une motion ne peut durer plus de deux séances consécutives, à l'exception d'un débat portant sur une étape d'un projet de loi qui peut se prolonger au-delà des deux séances prévues. La décision de la durée du débat est cependant laissée à l'appréciation de l'opposition. La plupart du temps, le débat est limité à une seule séance puisque l'opposition préfère débattre d'un maximum de motions. Comme il s'agit d'un débat restreint, le temps de parole est réparti par le président à la suite d'une réunion avec les leaders des groupes parlementaires, en tenant compte de la présence de députés indépendants.
Mise aux voix de la motion
Le débat sur une motion du mercredi prend fin à 17 h au plus tard avec la réplique de l'auteur de la motion. Le président met alors aux voix les amendements, s'il y a lieu, et la motion telle qu'elle a été amendée ou non. Le vote sur une motion du mercredi peut toujours être reporté, et ce, indépendamment de son contenu. Si elle est adoptée, la motion devient soit un ordre, soit une résolution.
Ordres ou résolutions découlant des motions du mercredi
La motion se transforme en ordre lorsque l'Assemblée enjoint à une commission, un député ou une autre personne de faire quelque chose. L'Assemblée nationale ne peut cependant donner un ordre que dans les limites de ses prérogatives et de son autorité. Or, dans notre droit parlementaire, l'exécutif ne peut être tenu de donner suite à une motion adoptée par le législatif et n'est lié que par la législation expresse. C'est pourquoi une motion qui enjoint au gouvernement ou à un ministre de faire quelque chose engendre une contrainte qui est strictement d'ordre politique ou moral; il s'agit donc d'une résolution1. Il existe toutefois une exception à ce principe, soit l'ordre de production de documents. La présidence de l'Assemblée nationale a reconnu qu'un tel ordre lie autant le gouvernement que l'administration2.
Une motion devient une résolution lorsqu'elle exprime une opinion ou une intention ou encore affirme un fait ou un principe. Il s'agit d'une résolution, par exemple, lorsqu'elle demande au premier ministre du Québec de convoquer, dans les plus brefs délais, une commission afin d'entendre les syndicats concernés par la proposition du gouvernement quant à la réduction des coûts de la main-d'œuvre dans la fonction publique québécoise. Selon les termes employés, cette motion exprime un souhait et non un ordre de l'Assemblée3.
Ordres donnant un mandat à une commission
Par leur nature même, les motions du mercredi ont le plus souvent pour objet de critiquer ou de contrôler le gouvernement. Dans un contexte de gouvernement majoritaire, il va sans dire que ces motions ont peu de chances d'être adoptées. Par contre, la situation est différente lorsque le gouvernement est minoritaire et que les députés de l'opposition décident d'unir leurs forces au moment du vote sur une motion.
À titre d'exemple, au cours de la 38e législature, en contexte de gouvernement minoritaire, 12 des 14 motions présentées par les députés de l'opposition ont été adoptées. Lors de la 40e législature, toujours en contexte de gouvernement minoritaire, 22 des 25 motions inscrites par les députés de l'opposition ont été adoptées. De ce nombre, les motions suivantes ordonnaient à une commission parlementaire d'examiner à fond une question :
38e législature
• Le 17 octobre 2007, à la Commission de l'administration publique, « afin qu'elle fasse la lumière sur l'application de la Loi sur l'équilibre budgétaire et propose, le cas échéant, au plus tard le 20 décembre 2007, des recommandations de nature à corriger l'équilibre budgétaire artificiel ».
• Le 9 avril 2008, à la Commission de l'administration publique, « afin qu'elle fasse la lumière sur le congédiement de l'ex-délégué général du Québec à New York et qu'elle entende d'autres personnes au plus tard le 29 avril 2008 ».
• Le 14 mai 2008, à la Commission des institutions, « afin qu'elle étudie et fasse rapport, d'ici le 10 octobre 2008, sur la nature et le contexte de signature du contrat octroyé à Attractions Hippiques par le gouvernement du Québec ».
40e législature
• Le 22 novembre 2012, à la Commission des transports et de l'environnement, « afin qu'elle fasse la lumière sur les évènements concernant les interventions du ministre du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs auprès de l'organisme public et indépendant qu'est le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) et qu'elle entende, dans les plus brefs délais, le ministre ainsi que toutes les personnes qu'elle jugera nécessaire de convoquer sans compromettre l'indépendance du BAPE ».
• Le 17 avril 2013, à la Commission sur l'administration publique, pour qu'elle tienne des audiences publiques afin d'entendre les membres du Comité sur les conditions d'emploi des titulaires d'emplois supérieurs en provenance de l'extérieur de la fonction publique.
• Le 25 avril 2013, à la Commission des finances publiques, afin qu'elle procède à des consultations particulières sur le rapport intitulé Innover pour pérenniser le système de retraite déposé à l'Assemblée nationale par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité.
• Le 8 mai 2013, à la Commission de la santé et des services sociaux, afin que celle-ci « tienne des consultations particulières à compter du mercredi 29 mai 2013 sur le projet de règles du gouvernement péquiste abrogeant la disposition qui prohibe la vente, le service et la consommation de boissons alcooliques à l'intérieur des aires de jeux ».
• Le 23 mai 2013, à la Commission de la santé et des services sociaux pour qu'elle « tienne des consultations particulières à compter du mercredi 5 juin 2013 sur la gestion du Centre hospitalier de l'Université de Montréal par l'actuel directeur général ».
• Le 30 octobre 2013, à la Commission des finances publiques, pour qu'elle « entende le Vérificateur général du Québec, le lundi 4 novembre 2013 à compter de 14 heures, au sujet de sa volonté de mettre en œuvre le mandat confié par l'Assemblée nationale, le 24 septembre dernier, à la suite de l'adoption d'une motion l'enjoignant à analyser la mise à jour économique que présentera le ministre des Finances et de l'Économie relativement à l'année 2013-2014 ».
• Le 14 novembre 2013, à la Commission des institutions, afin qu'elle « entende le ministre de la Justice le jeudi 28 novembre 2013 à compter de 15 heures, concernant les commentaires de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse rendus publics le 17 octobre 2013 sur les orientations gouvernementales au sujet du projet de charte des valeurs québécoises ainsi que sur le caractère inconstitutionnel du projet gouvernemental ».
• Le 20 février 2014, à la Commission des finances publiques, pour « qu'elle fasse toute la lumière sur les circonstances entourant l'investissement de 2 999 999,70 $ du Fonds de solidarité FTQ dans la société Capital BLF en juillet 2008 et qu'à cette fin, la commission entende la première ministre, l'ancien président et chef de la direction de Capital BLF, M. Claude Blanchet, ainsi que toutes les personnes qu'elle jugera nécessaire de convoquer ».
Ordres de production des documents
À part les ordres enjoignant à une commission d'exécuter un mandat, certains ordres adoptés par l'Assemblée dans le cadre des affaires inscrites par les députés de l'opposition visaient la production de documents par un organisme public ou une personne désignée.
39e législature
• Le 29 septembre 2010, à Hydro-Québec, afin qu'elle lui transmette, « dans les plus brefs délais, les informations relatives à tous les contrats octroyés de 2000 à 2010, notamment le nom de toutes les entreprises qui ont soumissionné, le mode d'attribution, le montant de chacune de leur soumission ainsi que le montant réel des déboursés, incluant les dépassements de coûts, pour chacun des contrats octroyés ».
40e législature
• Le 24 septembre 2013, le Vérificateur général du Québec afin « d'analyser la mise à jour économique que présentera le ministre des Finances et de l'Économie relativement à l'année 2013-2014 ».
Projets de loi étudiés lors des motions du mercredi
De 1984 à 2014, seulement quatre projets de loi ont fait l'objet de débats dans le cadre de motions du mercredi4. Aucun d'entre eux n'est allé plus loin que l'étape de l'adoption du principe.
Historique
Jusqu'en 1984, il n'y a pas comme telle de période réservée aux motions inscrites par les députés de l'opposition, mais celles-ci sont débattues comme les autres motions émanant des députés.
À partir de 1984, une période fut réservée expressément aux députés de l'opposition, avec l'apparition dans le Règlement, aux articles 97 et suivants, d'une nouvelle section intitulée « Affaires inscrites par les députés de l'opposition ».
Pour citer cet article
« Affaires inscrites par les députés de l'opposition », Encyclopédie du parlementarisme québécois, Assemblée nationale du Québec, 15 décembre 2014.