To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > News and Press Room > Press Conferences and Scrums > Conférence de presse de M. Benoît Dubreuil, commissaire à la langue française

Advanced search in the News and Press Room section

Start date must precede end date.

Conférence de presse de M. Benoît Dubreuil, commissaire à la langue française

Version finale

Wednesday, November 20, 2024, 13 h 30

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Treize heures trente-cinq minutes)

Le Modérateur : Bonjour. Bienvenue à cette conférence de presse du Commissaire à la langue française, Benoît Dubreuil. Il dépose aujourd'hui un rapport sur le français comme langue commune qui s'intitule Comprendre le recul, inverser les tendances. Il est accompagné aujourd'hui de Stéphanie Cashman-Pelletier, commissaire adjointe, et de Marc Tremblay-Faulkner, analyste.

M. Dubreuil, sans plus attendre, je vous laisse la parole.

M. Dubreuil (Benoît) : Merci beaucoup. Bonjour à tous. Alors, le rapport que nous déposons aujourd'hui répond à l'exigence prévue à l'article 198 de la Charte de la langue française, qui demande au Commissaire à la langue française d'analyser le suivi quinquennal de la situation linguistique réalisée par l'Office québécois de la langue française et qui lui demande de présenter, dans les six mois, ses conclusions et ses recommandations dans le but de favoriser l'utilisation du français comme langue commune. Alors, pour répondre à cette exigence, nous avons d'abord mené une série d'études complémentaires qui nous ont permis de décrire plus précisément le recul du français et de mieux en comprendre les causes.

Nous avons conclu que, depuis le début des années 2000, l'usage du français avait diminué, d'une façon non négligeable, dans les pratiques culturelles et sur le marché du travail, que ces reculs étaient particulièrement visibles dans les régions de Montréal et de Gatineau. Le rapport que nous publions aujourd'hui cherche à expliquer comment ce recul a été possible, en dépit de la politique linguistique ambitieuse qui a été menée par le Québec au cours des dernières décennies. Nous y soutenons que la Charte de la langue française a permis de renforcer, de multiples manières, le statut du français au Québec. Toutefois, elle a montré ses limites face aux principales tendances qui alimentent aujourd'hui le recul de cette langue.

Alors, nous mentionnons quatre enjeux. Premièrement, les mesures visant la sélection et la francisation des personnes immigrantes n'ont pas permis d'atteindre, chez ces personnes, un équilibre entre l'utilisation du français et de l'anglais qui soit comparable à celui observé dans la société d'accueil. Deuxièmement, la fréquentation obligatoire de l'école française, à elle seule, n'a pas permis de corriger ce déséquilibre, parce que l'utilisation du français demeure insuffisante lorsque les jeunes ne s'insèrent pas, de manière durable, dans des réseaux plus larges où le français est utilisé de manière habituelle. Troisièmement, l'augmentation de la connaissance de l'anglais, puis l'exposition croissante des Québécois à cette langue dans l'univers numérique ont mené à son adoption dans un nombre croissant de contextes professionnels, sociaux et culturels. Quatrièmement, l'évolution de l'économie a mené, dans plusieurs secteurs, à une multiplication des échanges avec l'extérieur du Québec et à une utilisation toujours plus grande de l'anglais.

Nous concluons que le recul du français observé au cours des deux dernières décennies n'est pas de nature conjoncturelle. Et, de plus, en raison des écarts observés entre les générations plus âgées et les générations plus jeunes, ce recul est susceptible de se poursuivre au cours des prochaines années. Pourtant, l'avenir n'est pas écrit. Il est toujours possible de freiner le recul d'une langue, même si le niveau de difficulté augmente avec le temps.

Dans le rapport que nous présentons aujourd'hui, nous proposons au gouvernement un ensemble de mesures qui visent à infléchir de manière progressive les tendances défavorables que nous avons relevées. Dans un premier temps, nous réitérons les recommandations que nous avons formulées dans nos rapports précédents concernant l'importance d'accueillir une immigration plus francophone. À la lumière des contraintes pratiques et financières qui limitent l'efficacité de la francisation ainsi que de la réalité sociolinguistique de la région de Montréal, une immigration plus francophone est essentielle pour stabiliser la situation du français à moyen terme.

Dans un deuxième temps, nous recommandons au gouvernement de mettre en œuvre de nouvelles mesures touchant les domaines de l'éducation, de la culture, de l'enseignement supérieur et de l'économie. Ces mesures visent globalement deux objectifs : accroître les préférences des jeunes et des nouveaux arrivants pour le français et renforcer les contextes et les réseaux au sein desquels le français pourra s'imposer facilement comme langue commune.

En culture, nous recommandons au gouvernement du Québec de présenter rapidement, à l'Assemblée nationale, un projet de loi sur la découvrabilité des contenus culturels francophones. Nous lui recommandons également de réviser ses mécanismes de soutien à la culture dans le but d'appuyer de manière cohérente la production et la diffusion de contenus culturels québécois et francophones.

En éducation, nous recommandons justement au gouvernement de faire de la découverte de ces contenus culturels québécois et francophones un objectif stratégique du système d'éducation. Nous recommandons également qu'ils mettent en œuvre, chaque année du primaire et du secondaire, des jumelages entre écoles de milieux différents qui seront axés sur la réalisation d'activités collaboratives, de découvertes culturelles. En enseignement supérieur, nous recommandons que le gouvernement se fixe une cible de 85 % d'enseignement en français dans le but d'accroître progressivement, par un cumul de mesures, la place de cette langue dans les collèges et les universités.

En économie, nous recommandons que le gouvernement révise ses mécanismes de soutien au développement économique dans le but d'y intégrer de manière cohérente et transparente les considérations linguistiques. Nous recommandons également qu'il appuie, au sein des organismes offrant des services réguliers à l'extérieur du Québec, l'intégration des technologies langagières comme la traduction automatique dans le but de faciliter l'utilisation du français.

En plus de ces recommandations qui visent des domaines particuliers, nous demandons au gouvernement de mettre sur pied une planification linguistique régionale, particulièrement dans les régions de Montréal et de Gatineau. En effet, dans ces régions, la situation du français est fragilisée, et cette langue parvient plus difficilement à s'imposer comme langue commune, que ce soit à l'école ou dans les milieux de travail. Ces plans régionaux devraient miser... mobiliser les différents acteurs gouvernementaux, municipaux, communautaires dans le but d'accroître de manière cohérente la préférence pour le français des jeunes et des personnes immigrantes, ainsi que les réseaux et les contextes au sein desquels le français pourra s'imposer facilement.

Le recul du français est le résultat d'un ensemble de facteurs qui se sont mis en place progressivement au cours des dernières décennies et qui, de manière cumulative, ont affaibli la capacité du français à s'imposer dans les écoles, les milieux de travail et les activités culturelles. Il ne faut pas pointer du doigt les individus, mais nous avons le devoir de trouver des solutions collectives. Les mesures recommandées dans ce rapport interpellent un grand nombre d'acteurs des milieux gouvernementaux, culturels, éducatifs et économiques, alors j'en appelle à leur responsabilité.

L'approche que nous proposons part du principe qu'il existe au Québec un large consensus à l'idée de maintenir le statut du français comme langue commune. Elle part aussi du principe que seule une intervention transversale et transformatrice qui dépasse les simples mesures administratives sera susceptible de faire converger les Québécois de diverses origines vers une utilisation plus fréquente du français comme langue commune.

La question linguistique au Québec a souvent été une source de division et de polarisation. Mais le renforcement du français peut aussi être un projet rassembleur et une source de cohésion sociale. Nous ne partons pas tous du même point, mais nous pouvons tous contribuer, chacun à notre manière, à rendre le français un peu plus présent. Alors, pour certains, cette contribution consistera à développer les compétences de base qui leur permettront d'utiliser le français dans des interactions simples. Pour d'autres, elle consistera à s'exposer un peu plus aux contenus culturels québécois et francophones dont la diversité est plus grande que jamais et qui nous permettent d'entrer en relation les uns avec les autres. Pour d'autres encore, il s'agira de faire preuve de leadership dans leur milieu et de partager avec leurs collègues, leurs amis ou leurs familles, leur passion de vivre l'expérience unique d'une vie en français en Amérique du Nord.

Alors je vous remercie de votre attention et je suis disponible pour répondre à vos questions.

Le Modérateur : Oui. C'est ce qui nous mène à la période des questions, en commençant avec Patrick Bellerose, Le Journal de Québec.

Journaliste : Bonjour à tous. M. Dubreuil, vous proposez votre propre recommandation, là, pour l'enseignement du français au niveau supérieur. Je présume que vous avez étudié l'idée de la loi 101 au cégep. Pourquoi l'avoir écartée? En fait, est-ce que vous l'écartez carrément et pourquoi ne pas avoir été dans ce sens-là?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, l'application de la loi 101 au cégep, pour nous, c'est une proposition qui est légitime, et globalement on pense que sa mise en œuvre contribuait... contribuerait en fait à renforcer le français. Alors, cependant, nous pensons que la proposition que nous avançons est plus pertinente. D'abord, elle concerne l'ensemble de l'enseignement supérieur. Hein, c'est important parce que nos études montrent que l'enjeu n'est pas propre aux collèges, mais concerne tout autant les universités. Ensuite, c'est une approche qui offre une grande flexibilité. Elle nous permettrait de renforcer aussi progressivement car, j'insiste, la place du français en tenant compte de la réalité particulière des établissements d'enseignement supérieur.

Finalement, je pense qu'elle nous permettrait aussi d'éviter deux écueils. D'abord, éviter de compromettre la viabilité financière des établissements anglophones et ensuite elle nous éviterait aussi de ramener en fait, de manière soudaine, plusieurs milliers d'élèves qui ont déjà adopté l'anglais comme langue habituelle vers les cégeps francophones, notamment au centre de l'île, dans l'ouest de l'île, ce qui pourrait y fragiliser d'autant plus la place du français.

Par ailleurs, peut-être terminer là-dessus, en mentionnant que ça fait quand même un bon 25 ans qu'on discute de cette possibilité d'élargir la loi 101 au collégial sans nécessairement réussir à trouver de consensus. Alors, on pense qu'aujourd'hui on amène une proposition qui a le mérite d'ouvrir la discussion de manière plus large, de créer peut-être un nouveau monde de possibilités et de discussions entre les différents établissements d'enseignement et les différentes parties prenantes qui s'y intéressent.

Journaliste : Le 85 % que vous proposez, c'est dans l'ensemble du réseau. Donc, il y a quand même des cégeps et des universités qui fonctionneraient majoritairement en anglais. Comment est-ce qu'on peut ramener les gens vers le français s'ils vont à l'école, au cégep, à l'université et parlent anglais la plupart du temps?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Ce n'est pas évident. Je vous dirais que tout le rapport qu'on propose aujourd'hui vise à nuancer peut-être la distinction qu'on a entre une école française et une école anglaise. Traditionnellement, on se disait dans les années 70, si les gens étudient en français, ils vont devenir des francophones, s'ils étudient en anglais, ils vont devenir des anglophones. Aujourd'hui, on comprend que ce n'est pas exactement ça qui se passe. Dans un établissement, il y a toujours...

Journaliste : ...disent un petit peu ça, là. C'est pour ça que je suis un peu surpris.

M. Dubreuil (Benoît) : C'est-à-dire qu'il y a un impact, il y a clairement... Il y a un impact d'étudier en français pendant plus longtemps, mais l'impact, il peut... il peut être de différentes natures. C'est-à-dire, si vous ramenez aussi du côté francophone des gens qui sont déjà habitués de socialiser en français, vous pouvez aussi réduire les possibilités d'utiliser le français dans les collèges, dans les collèges francophones.

Journaliste : Puis un exode vers le côté... le réseau anglophone.

M. Dubreuil (Benoît) : C'est-à-dire qu'à la fin du secondaire il y a une partie des jeunes qui sortent des écoles françaises, qui sont déjà meilleurs en anglais, qui ont déjà l'habitude de socialiser en anglais. On sait que dans certaines écoles secondaires, dans certains milieux, ça va faire en sorte que ça va être même difficile de socialiser en français et que l'intégration entre les amis va plutôt se faire en anglais plutôt qu'en français dans le système francophone.

Il faut comprendre qu'il y a deux dynamiques linguistiques dans une école, il y a de la langue classe, celle que le prof impose en fait, ou qu'on... qui est imposée par le professeur, mais ensuite il y a toute la socialisation autour. Et on se retrouve dans une situation où les deux dynamiques peuvent être... peuvent être différentes. Le français peut fonctionner comme ça et l'anglais s'imposer du point de vue horizontal. Donc, c'est ça qu'il faut prendre en considération aussi.

Le Modérateur : Merci. Je vais tout de suite... Je vais me permettre quelques questions, François Carabin, Le Devoir, parce que je veux poursuivre sur le même sujet, là. Vous dites dans votre rapport que le ratio de 85 % pourrait être atteint par un cumul de mesures, et vous parlez notamment du plafonnement des inscriptions ou du nombre de places dans les cégeps anglophones. Ça, c'est déjà en place par le biais de la loi no 85... 96, pardon. Vous parlez aussi de mesures susceptibles d'accroître la proportion d'étudiants internationaux dans les établissements francophones. Vous avez vu le projet de loi de M. Roberge, qui vise essentiellement à départager davantage, envoyer davantage d'étudiants étrangers dans des programmes francophones. Est-ce donc dire que le gouvernement du Québec a déjà posé des gestes qui vont vous permettre... qui vont permettre, c'est-à-dire, d'atteindre cet objectif-là assez facilement?

M. Dubreuil (Benoît) : À atteindre, non, mais effectivement ça fait progresser. Puis moi, je suis intervenu dans le débat en commission sur le projet de loi no 74 pour dire que je pensais qu'on avait besoin d'une meilleure répartition linguistique des étudiants dans les collèges et les universités. Donc, ça, oui, ça va quand même faire progresser le français, ça le fait déjà d'ailleurs, on a déjà une tendance un peu favorable qui est en... qui est en cours.

Cela dit, je pense que si on veut se rendre aux 85 % dont je parle, il va falloir faire plus que ça. Je pense que la principale mesure qui nous permettrait de nous en rapprocher, c'est - en fait il y a deux principales mesures - c'est d'orienter la croissance des effectifs vers les universités francophones, comme on l'a fait pour les collèges, et aussi d'introduire une part de bilinguisme, des cheminements bilingues, dans les universités anglophones.

Donc, l'idée de ça, elle est très simple, c'est-à-dire qu'on comprend la motivation de plusieurs personnes qui sortent des écoles secondaires françaises de vouloir améliorer leur anglais. Donc ça, c'est tout à fait légitime. Mais aussi ce qui se passe, c'est qu'il y a beaucoup de jeunes, comme je l'ai mentionné, qui sortent des écoles secondaires et qui sont déjà très habitués de socialiser en anglais. Et pour eux, le passage à l'enseignement supérieur en anglais est comme une espèce de cheminement naturel.

Donc, l'idée, c'est d'avoir des mesures qui vont permettre à ces jeunes-là de rester en contact avec le français. Donc, on n'est pas dans des mesures radicales qui risquent de leur changer complètement leur comportement. C'est simplement de se donner toutes les chances que ces jeunes-là continuent de développer des compétences professionnelles, certains espaces de socialisation en français, pendant leurs études supérieures.

Journaliste : En sous-question. Bon, quand vous nous avez présenté les études puis vos constats il y a quelques semaines, si je ne m'abuse, c'est trois semaines, deux semaines, vous avez parlé de la probabilité qui était beaucoup plus grande pour une personne qui étudiait au cégep et à l'université en anglais d'occuper un emploi dans un milieu anglophone. Donc, vous faites une espèce de lien de causalité. Mais est-ce qu'en fait on ne peut pas la prendre ou prendre cette réflexion-là de l'autre bord puis se dire que c'est des personnes qui veulent aller à travailler en anglais et donc qui s'en vont étudier en anglais au cégep et à l'université? Comment on fait pour régler ce problème-là si... c'est ça, si c'est un problème?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, c'est-à-dire que les chiffres qu'on présente quand même, c'est un modèle statistique qui neutralise, là, l'effet des différents secteurs économiques et des différents niveaux d'emploi, aussi le parcours antécédent. Donc, c'est sûr que, quand on fait un modèle statistique, on n'est jamais à l'abri, là, qu'il y ait une variable qui vienne... qui vienne créer une fausse idée de causalité, là. Donc ça, c'est toujours... c'est toujours possible, mais quand même, on est confiant qu'il y a quand même un impact. Ça s'appuie aussi sur notre lecture de la recherche, la recherche qualitative, où on est capables de voir en fait quels sont les mécanismes. Le fait d'être exposé pendant des années, à une langue dans un cadre formel, d'apprendre la terminologie, d'apprendre à faire son travail, d'augmenter la probabilité aussi d'être en contact avec des gens qui utilisent cette langue de manière habituelle, ce sont des mécanismes qui expliquent le développement des préférences linguistiques. Donc, on est quand même assez assez solides sur l'effet qu'a la scolarisation en anglais.

Cela dit, comme on l'explique dans notre rapport, c'est un effet qui est cumulatif. Donc, il n'y a pas un moment où tout à coup ça devient trop, puis là, tout à coup, on devient anglophone. Tu sais, ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, c'est vraiment un cumul de facteurs. Donc, le fait qu'il y ait des Québécois qui soient exposés à l'anglais dans l'enseignement supérieur, des Québécois francophones, en soi, ce n'est pas un problème. Pour moi, ce qui compte vraiment, c'est que les forces à terme s'équilibrent pour que la situation linguistique soit stable. Donc, il faut trouver des manières de répondre aux besoins des gens, de faire de l'immersion anglaise, par exemple, d'être dans des contextes anglophones tout en s'assurant qu'on minimise le risque, à l'échelle globale, le français s'affaiblisse. C'est ça vraiment qu'on cherche à faire, là. On cherche à maintenir ces deux objectifs-là en même temps.

Le Modérateur : Merci. Je vais passer à Hugo Lavallée, Radio-Canada.

Journaliste : Oui. Bonjour, M. Dubreuil. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu quand même pas mal de protestations dans le réseau des cégeps quand le gouvernement a décidé d'imposer trois cours, dans les différentes matières, en français. Là, si je comprends bien, votre proposition, ce serait d'étendre ce genre de mesures là puis de faire la même chose dans les universités aussi. Connaissant les enjeux de liberté académique, enjeux aussi d'autonomie des universités, comment est-ce qu'on peut atteindre cet objectif-là sans rogner dans cette autonomie-là?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Moi, ce qui m'a vraiment convaincu d'aller dans cette direction, c'est quand j'ai vu ce qui se faisait en Catalogne, et le plan qu'ils ont développé, là, pour renforcer la présence de la langue catalane. Et puis j'ai eu l'occasion de discuter avec beaucoup de personnes qui ont été impliquées, là, dans ces discussions-là, puis je leur ai posé vraiment les questions : Comment vous faites concrètement? Et la manière d'y arriver, c'est vraiment d'engager une discussion avec les établissements d'enseignement eux-mêmes et de s'entendre sur des objectifs.

La réalité, c'est que pour de grandes universités, il y a beaucoup d'occasions de mettre du français dans les formations, particulièrement dans les gros programmes. Vous savez, il y a des programmes, par exemple en administration des affaires, à Concordia, c'est des... un nombre très, très, très élevé de jeunes qui entrent. Même chose avec les... en informatique, par exemple, en génie informatique, on sait que c'est des domaines qui sont très fragiles, par la suite, sur le marché... où le français est très fragile, par la suite, sur le marché du travail, puis c'est de grosses cohortes. Donc, on peut introduire une partie de l'enseignement en français, je pense, sans déstabiliser le modèle d'affaires de l'établissement. Et le jeune qui lui aura préféré étudier principalement en anglais, mais quand même va avoir peut-être un certain nombre de cours, ça reste à déterminer, mais qui vont lui permettre d'apprendre la terminologie. Puis dans ces cours-là, quand même, il va s'assurer que son français demeure... demeure actif. On vise principalement les jeunes qui sont issus du secondaire français, hein? Gardez ça... on garde ça à l'esprit aussi, là, même si moi, j'aimerais aussi qu'il y ait beaucoup plus d'anglophones, que ce soit du Québec ou du reste du Canada qui viennent au Québec pour étudier en français. Je pense que ça, ça serait aussi... ça nous aiderait aussi à atteindre un meilleur équilibre.

Journaliste : Vous avez mentionné tout à l'heure, là, le fait qu'il y avait des limites à la francisation dans le cas de l'immigration, puis que c'est la raison pour laquelle vous incitiez le gouvernement à aller de l'avant puis à... en fait, c'est déjà en train d'être implanté, là, avec la sélection d'immigrants qui ont déjà une certaine connaissance du français. Il y a quand même ce discours social qu'on a beaucoup entendu ces dernières années, que la francisation allait régler les problèmes qu'on soulevait sur la question de la langue, là. Si je déduis bien, par contre, de ce que vous nous dites, c'est que ce n'est pas le cas, il y a une part de... quoi, de mythe, là, un peu derrière ça de penser qu'on peut franciser tout le monde.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, j'en ai parlé... j'en ai parlé, en fait, dans mes rapports, là, plus le printemps dernier, la francisation, c'est important, c'est un droit. On l'a reconnue comme un droit, et il faut le respecter, s'assurer que ce droit-là a une réalité. Mais, par ailleurs, c'est vrai que, dans la dynamique sociolinguistique plus large, le fait d'avoir ou pas accès à des cours de français gratuit, c'est une des variables qui va amener la personne, un, à apprendre la langue, et deux, à l'utiliser.

Le défi principal qu'on a, au Québec, en matière d'usage du français, c'est qu'évidemment beaucoup de gens qui arrivent au Québec, lorsqu'ils ne connaissent pas le français et qu'ils viennent spécifiquement... ils ne viennent pas spécifiquement pour vivre en français, généralement, les gens ont une connaissance de l'anglais, souvent, les gens vont se retrouver dans des milieux où ça se déroule plutôt en anglais, vont se socialiser dans des milieux où l'anglais est la langue habituelle. Et c'est là que ça devient difficile, en fait, de faire basculer les gens, faire basculer une personne qui a ses habitudes, qui est déjà dans un milieu, qui est déjà dans un réseau. Dire qu'on va l'amener à changer ses comportements linguistiques en lui offrant des cours gratuits, il y a une limite à ça.

Donc, évidemment, je veux qu'on me comprenne bien, là, je ne suis pas en train de dire que ça ne sert à rien et qu'il ne faut pas le faire, mais il ne faut pas avoir de pensée magique.

Le Modérateur : Vincent Larin, La Presse.

Journaliste : Oui. Moi, j'aimerais... une question de développement économique. C'est quand même tout un changement de paradigme que vous proposez là. Est-ce que vous... est-ce que vous reconnaissez que ça pourrait avoir un impact en termes de... ça pourrait augmenter, donc, la bureaucratie, peut-être, réduire l'attrait du Québec pour les entreprises, là, de certains domaines dont vous avez... vous avez parlé?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, je pense que ça dépend comment on le met en œuvre. Je pense qu'on peut poser exactement la même question des normes environnementales ou du droit du travail, tu sais, tout ce qui fait partie de la responsabilité sociale des entreprises, on peut toujours se poser la question. Ensuite, effectivement, il faut faire une mise en œuvre de ça qui est intelligente.

Je ne pense pas que c'est très, très compliqué de se poser la question. Je veux dire, il faut voir c'est quoi, la nature des emplois, que font les gens dans leur vie, dans leur travail quotidien et d'où vont venir les gens qui vont occuper les emplois. Donc, à partir du moment où on répond à ces deux questions-là, moi, je peux vous dire assez facilement si le français va réussir à s'imposer facilement comme langue commune ou pas.

Puis je pense que cette information-là, elle doit être prise en considération par les décideurs qui, ensuite, pourront décider de dire : Bien non, nous on considère que c'est tellement payant, tel domaine, que tant pis si des gens travaillent en anglais, on en a besoin pour des raisons stratégiques. De la même manière qu'en environnement on fait parfois aussi le choix de prendre des décisions qui ne sont pas optimales parce qu'on considère qu'on en a besoin.

Journaliste : Une question toute simple, en fait, sur la portée des mesures que vous suggérez aujourd'hui. Si je prends l'annexe 2, avec l'énumération de toutes les mesures, essentiellement, sept des huit mesures, vous dites que la portée de l'effet est grande. Est-ce que je pourrais quand même vous demander de hiérarchiser, peut-être, ou nous dire celle que vous pensez qui a le plus d'impact parmi toutes celles que vous proposez aujourd'hui?

M. Dubreuil (Benoît) :  Je me doutais qu'on me poserait la question... qu'on me poserait la question. Bien, en fait, j'ai vraiment de la difficulté parce que moi, je vois ça comme étant une chaîne. C'est comme une sorte de chaîne causale. Donc, les gens rentrent, avec l'immigration ou la naissance, ensuite, il y a l'école, ensuite, il y a le contexte culturel, ensuite, il y a l'enseignement supérieur, ensuite, il y a le marché du travail, puis tout ça est lié. Puis, quand on renforce un maillon, on renforce tout ce qui vient par la suite. Puis, quand on affaiblit un maillon, bien, on affaiblit tout ce qui vient par la suite. Donc, à chaque fois qu'on fait du progrès sur une des recommandations qu'on a avancées, on facilite l'atteinte de toutes les autres recommandations. Je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire.

Si on a une immigration plus francophone à l'entrée, la question d'avoir des plans régionaux pour amener les gens à adopter le français, ça devient très facile parce que les gens vont juste l'adopter sans qu'on ait besoin de ne rien faire. Vous comprenez? Donc, si on réussit, à travers l'école, à bien faire en sorte que le français soit la langue commune, que les gens s'identifient à la culture québécoise, à la culture québécoise, qu'ils aiment ça, bien, ensuite, on diminue aussi l'intérêt que les gens ont pour penser aux milieux anglophones aux études supérieures. Donc, pour moi, là, vraiment, ça représente un continuum, puis, à chaque fois qu'on travaille sur un morceau, on se facilite le travail pour les autres morceaux.

Le Modérateur : Sébastien Desrosiers, Radio-Canada.

Journaliste : Bonjour, M. Dubreuil. Peut-être juste deux précisions. D'abord, sur l'économie, sur votre proposition de... votre recommandation de réviser les mécanismes de soutien au développement économique pour y intégrer des considérations linguistiques. Si je prends un exemple d'actualité, Northvolt, disons, le gouvernement du Québec décide de lui accorder un bloc d'énergie, on va demander à l'entreprise, présentement, de répondre à un certain nombre d'exigences environnementales. Ce que vous dites, c'est que, selon la recommandation que vous présentez, l'entreprise aurait également dû s'engager à respecter un certain nombre d'exigences linguistiques.

M. Dubreuil (Benoît) : Oui, en fait, ou on aurait pu leur demander quel était leur plan, par exemple en matière de dotation des 4 000 postes. Et peut-être que ça s'est fait, moi, je ne le sais pas, mais moi, j'aimerais savoir d'où vont venir les 4 000 employés de Northvolt, d'où viendrait les 4 000 employés de Northvolt, puis quelle est la nature des tâches qu'ils vont réaliser. Et sur la base de cette information là, moi, je pourrais vous donner un avis assez précis à savoir : Est-ce que c'est plausible ou pas plausible que les gens vont pouvoir travailler en français, que le français va être la langue habituelle de socialisation dans l'entreprise? C'est assez... je pense, c'est assez facile sur la base de ce qu'on a comme compréhension des milieux de travail.

Journaliste : Mais à votre connaissance, donc, est-ce que ça se fait ou ça ne se fait pas systématiquement?

M. Dubreuil (Benoît) : Moi, je n'ai jamais entendu parler que ça se faisait. Donc, si ça se fait, je vais être très... absolument ravi de savoir que ça se fait.

Journaliste : O.K., mais donc vous dites : Il faudrait qu'on demande à l'entreprise de nous soumettre un plan. Mais après ça, est-ce qu'il faudrait favoriser, selon vous, les entreprises dont la main-d'œuvre va être francophone?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Bien, pour moi, ça doit être un intrant de la prise de décision, de la même manière que les considérations environnementales. Donc, dans un monde idéal, si on a le choix entre deux entreprises équivalentes ou deux stratégies de développement économique qui vont donner à peu près la même chose sur le plan économique, qu'on favorise celle qui est plus... qui va faciliter l'utilisation du français, mais évidemment, on ne peut pas exclure que, des fois, il y a des décisions économiques qui s'imposent d'elles-mêmes et qui vont nuire au français. Ça peut être... il peut y avoir des situations où c'est légitime de faire reculer le français, parce que le français, c'est une des variables, c'est une des choses qui sont importantes pour nous, mais il y a d'autres choses qui sont importantes pour nous aussi. Puis ça, c'est le travail des politiciens, de justifier aussi les décisions qu'ils prennent, de justifier leurs arbitrages.

Donc, même chose avec les évaluations environnementales. Si on décide d'autoriser un projet malgré un avis négatif du BAPE, bien, un moment donné, c'est le politicien aussi qui doit dire : Bien, moi, je trouve que c'est tellement important que... C'est vraiment le même type de raisonnement, là.

Journaliste : ...des avantages et des inconvénients, peut-être une dernière précision. Vous avez parlé d'orienter la croissance des effectifs en enseignement supérieur, là, la croissance des effectifs vers les universités francophones. Est-ce que vous plaidez pour l'instauration d'un plafond, un peu comme ça a été le cas pour les cégeps après l'adoption de la loi n° 96?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Le plafond pour la loi n° 96, il est vraiment prévu dans la loi, là. Ça peut être une avenue, mais je n'ai pas... je n'y tiens pas nécessairement. Ça peut se faire aussi à travers la formule de financement. Aussi, ça n'implique pas nécessairement un changement législatif, ça peut être un plafond, un peu... comment on dit, là, mouvant, là, dans le sens où, par exemple, un taux de financement qui diminue au fur et à mesure où on se rapproche d'une cible.

Journaliste : Le maximum d'étudiants dans les universités anglophones, par exemple.

M. Dubreuil (Benoît) : Je n'ai pas nécessairement imaginé un plafond fixe. Je pense qu'il faut engager une discussion pour voir comment, progressivement, on va déplacer les choses. C'est vraiment important. Puis je veux aussi présenter ça d'une manière qui suscite aussi la collaboration. Moi, j'ai beaucoup entendu, par exemple, de la part des établissements anglophones puis de la communauté anglophone de manière générale, une volonté de faire partie de la solution. Je pense qu'il y a des manières de le faire. Il faut comprendre qu'il y a des intérêts aussi institutionnels qui sont à préserver, qu'il y a des réalités institutionnelles qui sont complexes, puis accepter de faire bouger les choses en travaillant ensemble. Oui.

Journaliste : Merci.

Le Modérateur : Merci. Thomas Laberge, La Presse canadienne.

Journaliste : Désolé, j'ai manqué le briefing technique. Donc, si je pose une question que vous avez répondue, bien, ce sera à moi de prendre le blâme. J'aimerais avoir une précision concernant la question des cours en français dans les universités anglophones. Vous avez donné l'exemple d'un programme en informatique où il pourrait y avoir des cours en français, mais j'aimerais avoir plus de précisions. Est-ce qu'il y aurait, par exemple, un quota minimal de cours que les étudiants devraient prendre, par exemple? À quel point la liberté de choix des étudiants sera encore présente dans ce genre de situation là?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Bien, c'est une bonne question. C'est-à-dire qu'on peut maintenir une liberté de choix en disant : Bien, écoutez, à partir de maintenant, on va avoir comme deux profils dans tel programme. Et puis le nombre de places dans ce profil-là va être limité puis on va favoriser les gens qui viennent du secondaire anglais ou du cégep anglais, par exemple. Et par ailleurs, il va y avoir un autre profil qui va être ouvert à tout le monde, mais qui va avoir peut-être un 30 % d'enseignement en français. Ça peut être comme ça. C'est comme ça qu'ils fonctionnent en Catalogne. Par exemple, si vous avez 15 groupes en génie civil, par exemple, bien, si, en ce moment, il y en a huit qui s'offrent en catalan, bien, la cible, c'est qu'éventuellement on passe à 12. O.K.? Puis il y a beaucoup d'étudiants.... Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il y a beaucoup d'étudiants que ça ne les dérange pas. Ce n'est pas un gros enjeu. La question de la langue, ce n'est pas nécessairement un gros enjeu pour tout le monde.

Donc, moi, on m'a dit que, dans un contexte de bilinguisme très élevé, je pense que Barcelone, Montréal, ça se ressemble un peu dans des contextes de bilinguisme très élevé. Il y a beaucoup de gens qui sont assez... qui sont prêts, en fait, à se prêter d'assez bonne foi à ça. Beaucoup de gens qui n'ont pas un rapport très idéologique aussi par rapport à la langue, hein? On voit chez beaucoup de jeunes, notamment les jeunes issus de l'immigration, il y a un rapport assez instrumental, pas de préférence, on l'a vu encore dans les études de l'OQLF hier. Donc, il y a beaucoup de gens qui sont assez flexibles, en fait. Donc, moi, je pense qu'on peut faire des progrès quand même assez importants sans rentrer dans des grosses contraintes, sans que les gens se sentent acculés au pied du mur.

Journaliste : Juste une précision sur ce que vous avez dit. Au fond, bien, par exemple, il y aurait deux branches de... pour le même programme : un plus francophone, l'autre plus anglophone. Vous avez dit : On privilégierait les étudiants qui proviennent des cégeps francophones pour aller vers la branche francophone dans le but qu'ils maintiennent un lien avec le français. Est-ce que c'est ça, la logique?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, je trouve qu'une des choses qui est importantes pour moi, puis, je pense, c'est pour ça qu'il faut impliquer aussi la communauté anglophone puis les établissements, c'est je trouve que c'est important au Québec... mais, enfin, ça a toujours été jugé important qu'un jeune anglophone du Québec puisse faire l'ensemble de sa scolarité en anglais, qu'il dispose d'un vaste choix de programmes pour faire l'ensemble de sa scolarité en anglais. Donc, ça, je pense que c'est un principe auquel on adhère, puis qui fait partie un peu d'un contrat social avec la communauté anglophone aussi. Donc, cependant, pour ce qui est des jeunes, effectivement, qui viennent du réseau plus français, il me semble légitime de dire : On va vous demander de maintenir le lien avec le français en faisant une partie de votre scolarité en français. Ce qui n'exclut pas non plus qu'il y a des anglophones qui veulent faire une partie de leur scolarité en français, moi, je pense, ce serait très positif.

Journaliste : Oui, mais c'est ça, mais, au fond, vous ne voulez pas forcer des étudiants émanant de cégeps anglophones à faire un cursus qui aurait plus de cours en français que ce qu'il y a initialement?

M. Dubreuil (Benoît) : Il faut voir. Est-ce qu'on voudrait travailler avec la catégorie d'ayants droit, par exemple, qu'on a déjà reportée au niveau collégial, là, à partir de... la question se pose. Oui.

Journaliste : Donc, ce n'est pas exclu.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, est-ce que, sinon, on est capables... est-ce qu'on est capables d'atteindre des cibles raisonnables d'enseignement en français simplement juste en proposant les choses? Est-ce qu'on atteindrait? Moi, je pense qu'il faut essayer. Est-ce que les gens se prêteraient au jeu? Est-ce que les gens diraient : Bien oui, moi, je trouve que c'est intéressant, puis je veux aller dans cette branche-là, puis ça va me permettre de maintenir mes compétences en français, puis...

Journaliste : Merci.

Le Modérateur : Juste avant de passer aux questions en anglais, j'aimerais quand même vous entendre sur vos propositions concernant la découvrabilité des contenus culturels francophones et québécois. Bon, le ministre Lacombe a promis de déposer un projet de loi qui devrait d'ailleurs ne pas tarder. Qu'est-ce que vous vous attendez à voir dans un projet de loi comme celui-là, pas nécessairement des mesures précises, mais c'est quoi l'objectif qu'il devrait avoir?

M. Dubreuil (Benoît) : Je pense que les éléments vraiment essentiels que l'on mentionne, c'est qu'il faut qu'on réussisse à établir avec les grandes plateformes de diffusion des objectifs de mise en valeur. Donc, à travers les recherches, les requêtes que l'on fait sur les plateformes, il faut qu'il y ait un certain pourcentage de mise en valeur de contenus francophones originaux. Je pense que c'est le concept qui était proposé dans le rapport, là, qui a été soumis au ministre, et il faut aussi un cadre de mise en œuvre et de suivi qui est flexible, là, parce que la réalité, c'est que c'est un monde qui est en changement extrêmement rapide et parfois c'est difficile de comprendre exactement ce qui se passe. Les grandes plateformes sont très secrètes sur ce qu'elles considèrent être des secrets industriels. Et du côté de la fonction publique, on a de la difficulté à rester à jour pour comprendre même comment l'écosystème évolue. Donc, il faut se donner une marge de manœuvre, notamment sur le plan réglementaire, pour pouvoir faire des ajustements au fur et à mesure que la situation va changer. La manière traditionnelle de légiférer, hein, de prendre plusieurs années, prendre conscience d'un problème, légiférer, prendre plusieurs années avant de mettre en œuvre la législation, dans un contexte... avec la vitesse où changent les choses dans l'environnement numérique, on ne peut plus avoir cette approche-là. Il faut vraiment être réactif et agir.

Le Modérateur : Merci. On va penser aux questions en anglais. Phil Authier, la Gazette.

Journaliste : Good day, Mr. Dubreuil. Are you ready?

M. Dubreuil (Benoît) : Yes, I was just switching language.

Journaliste : In your document, on page 45, you say the current proportion of students studying in English in college, in university, at 22.4 %, is, in your words, too high. Can you tell us why that's a bad thing?

M. Dubreuil (Benoît) : So, the first thing is that it is not a bad thing that people choose to study in English to improve their English. It's a good thing to study in a different language to develop your language skills. The problem is that we have an imbalance in higher education. So, we move from having... like, 9% of students enroll in English schools, in elementary schools and high schools, to more than 20% in colleges and universities. The issue is that it strengthens an imbalance that exists at the end of high school, because we have a number of... And this is not the fault of English language institutions, by the way, it is linked to our implementation of the Charter of the French language in high school and elementary schools. We are not... We have not been able, we have not succeeded in making sure that every kid who ends up... who completes French high school has adopted French as a common language to socialize in everyday life, okay?

So, this imbalance is consolidated. When people, at the end of high school, spend three, four, five, six years, studying in English. And then we see this imbalance then on the labor market, especially in areas like I.T., finance and other areas where we have documented a drop in the use of French.

So, for me, it's not about preventing people to study in another language, it's just that we need to make sure that the transfer from one language to the other remains overall balanced, to make sure that, at the end of the day, we don't have a system that works more at the advantage of English than at the advantage of French.

Journaliste : You... When the Government applied Bill 96, the measures in the CEGEP system imposing more French course... courses in the CEGEP system, there was quite a bit of resistance, and... it has proven to be very difficult to apply, as we've seen, from their point of view. But, today, you say you want to use a similar logic, also on page 45, similar logic to the university system. Now, how are you going to apply that to a university system which defends its autonomy and has already been hit by the other rules that have been imposed on non Québec students, the tuition rules, so that basically they're dealing with a lot of financial problems as a result of this? So, how can you proceed further? Why would you recommend going further down this path?

M. Dubreuil (Benoît) : In terms of the... in terms of Bill 96, I understand that there has been a lot of criticism regarding especially the implementation and especially the fact that it was very, very fast. I'm not sure that there was such a big resistance towards the idea of adding at least a portion of education in French for kids who come out of French high school. I don't think there is that much resistance against the idea, but I think implementation was heavily criticized by the director generals of the CEGEPs. I think the keyword here is «collaboration and flexibility».

And that's why I draw from this experience from Catalonia, where they have adopted a similar plan to strengthen the use of Catalan language in universities with the ambitious objective of moving from 60% to 80% of teaching in Catalan over three or four... four or five years and... But it requires a discussion with English language institutions to see : What are you able to do? What would make sense, in terms of your overall programing? We understand that, in some programs, it won't be feasible. For instance, if you have a small program that depends from attracting students from the rest of Canada or students from abroad, this program probably needs to function in English only. But, if you have a big program that draws thousands of students from French CEGEPs, English CEGEPs, but people who came from French language high schools, it should be possible to include a certain proportion of teaching in French, so that these kids remain in contact with French during the duration of their higher education.

Le Modérateur : Merci. Cathy Senay, CBC.

Journaliste : Mr. Dubreuil, I remember when McGill and Concordia were trying to avoid the... an increase of fees, tuition fees for out-of-province students studying in English in McGill University. They had this counter proposition to increase the number of... to make courses in French mandatory to their students. So, this... this proposition exists already, and I think it's still... I think. Do you have doubts actually, that it has not been applied?

M. Dubreuil (Benoît) : In fact, in fact, those are courses of French, and we are talking about beginner level courses to reach level five. So, that's a different... that's kind of a different target.

Journaliste : It isn't enough for you.

M. Dubreuil (Benoît) : It's totally different. This one is about having people who come from the rest of Canada or from abroad learn a bit of French to go through the beginner level, which by the way, is not sufficient to have a professional job in French, but it's a... The strategy that the government does apply is to say, if you are to stay like three, four, five years in Québec, we'll have you do at least some French, do at least some French. So,  my approach is about something..., something different, which is... Yes?

Journaliste : When you go over all the the measures that have been put in place in Bill 96 for cegeps, this policy... tuition policy for McGill and Concordia, do you... so basically you believe that is not enough, but you don't want to apply Bill 101 to cegeps and universities?

M. Dubreuil (Benoît) : Again, the key word is flexibility. So, in terms of the regulation for students coming from other provinces, I think we still don't have a perfect, clear view of what will be the medium-term impact. So. This year, McGill, for instance, has decided to provide scholarships to students to overcome counterweight of the impact of the of the changes to tuition fee. I think that next year they said that it would not be the case. So, will this provoke a drop in enrollments at McGill? If it is the case, it means that we are moving closer to the target, which means that the target will be easier to to achieve. OK? If they decide... if the government also make a decision to have some real redistribution of student permits for foreign students, this might also take us closer to the objective. That's why I... the approach is to say, let's agree..., agree on a target that would be a balanced solution that we should try to reach in the medium term and see how we can bring different measures together by having a discussion and allowing us to have flexibility. But I think the key... the key difference, like if I  take the biggest... the measure that would have the biggest impact in terms of number is probably about introducing a part of teaching in French in institutions. Yes?

Journaliste : The anglophone institutions?

M. Dubreuil (Benoît) : Yes, yes, yes.

Journaliste : Because the 85%, you want to reach that level when? When would that... would that be, which year?

M. Dubreuil (Benoît) : We don't... we don't propose a time frame. It would be very tricky. Like to be honest, we can't move very, very fast in higher education because when you have a person that begins a degree, she's there for three or four years. So, between the time you think of something, and it becomes reality in undergrad's studies, it can take like four or five years. OK? So, I think like having a major, major impact within three, four, five years is not really on the table. I think it's more like five years and more that we can really have a shift. And again, I've emphasized the need to approach this in a way that is sensitive to the financial viability of institutions. I know that a lot of concerns we're already focused on this, and I think that's also one of the benefits of saying instead of just making English language institutions smaller, we will rather promote French by including or introducing a part of French language education in these institutions, we allow us more room, more flexibility to to avoid putting the finances of these institutions at risk.

Journaliste : And one last question. When you say to reorient new investments in infrastructure towards francophone universities.

M. Dubreuil (Benoît) : Yes.

Journaliste : I mean, that will spark a very strong reaction from McGill, Concordia, and Bishops, because it's an accumulation of measures that they will take into consideration.

M. Dubreuil (Benoît) : Like, I know that...

Journaliste : So, why don't you... Why do you go that far?

M. Dubreuil (Benoît) : I think at McGill, like, their number one issue is more about asset maintenance. We have a big issue about asset maintenance. But should we invest to make McGill, which is already like close to 40,000 students... should we invest new buildings to reach like a capacity of 45,000, to reach a capacity of 50,000 students? Should we do that? Like, is it... And then what is the target and what will be the impact on French? So, that's also the discussion that we need to have. If we want... If we say we want to grow higher education institutions bigger, then I would like to know how much... by how much we will make them bigger.

Le Modérateur : Merci. C'est ce qui met fin à cette conférence de presse. Bonne journée.

M. Dubreuil (Benoît) : Merci.

(Fin à 14 h 21 )

Participants

  • Dubreuil, Benoît

Document(s) Related