(Huit heures deux minutes)
M. Leduc : Bonjour, bonjour.
J'espère que vous allez bien en ce jeudi matin. Deux sujets ce matin, deux
motions, en fait. On va suivre avec attention le vote qui aura lieu à la fin de
la période des questions sur la motion d'hier, la motion du mercredi que nous
avons déposée sur la rémunération des stages en éducation. Vous savez, il y a
une grande pénurie de main-d'oeuvre, en ce moment, de professeurs. Il y a un
taux alarmant d'étudiants en enseignement qui quittent avant la fin de leur
formation. Il y a un taux aussi de nouveaux professeurs qui quittent la
profession en début de carrière, alarmant. Mais pour avoir un impact rapide et
réel sur le nombre d'enseignants qu'on forme et qui pourraient rester sur les
bancs d'école et obtenir leur licence, leur capacité de pouvoir aller
enseigner, on propose de financer l'ensemble des stages.
Moi, avant que ce soit mon collègue, Sol,
le porteur de dossier en enseignement supérieur, j'étais le responsable du
dossier, je me rappelle qu'on en parlait dans le temps de M. Roberge, quand il
était ministre de l'Éducation, donc avant même la pandémie, du financement de
ces stages-là. Il nous avait promis que ça s'en venait rapidement. Ça n'a
jamais été fait. Ça serait quelque chose de facile, rapide à mettre en place et
qui aurait un impact rapide dans le milieu pour faciliter la rétention des
étudiants, étudiantes dans le bac et, on l'espère, donc, leur arrivée rapide
sur le marché du travail.
L'autre motion dont je veux vous parler,
c'est la motion sans préavis de ce matin que Québec solidaire dépose, qui en
lien avec le tramway de Québec. Vous avez vu les commentaires de M. Legault en
France, mais vous avez aussi peut-être vu les commentaires de M. Poilievre à
Ottawa. On est plus inquiets que jamais de la réalisation de ce tramway-là. On
dirait que tout conspire pour que ça déraille, sans faire de mauvais jeu de
mots. Et on va demander, donc, à l'ensemble des partis de l'Assemblée nationale
de générer un consensus, on pense qu'il est déjà là, le consensus, mais on veut
le solidifier, pour demander à l'ensemble des partis fédéraux présents à la
Chambre des communes de s'engager à financer le tramway de Québec. On veut
vraiment envoyer un message clair que la classe politique québécoise est unie à
travers les partis politiques ici, que c'est un consensus de l'Assemblée
nationale qu'il faut financer... il faut que le fédéral mette de l'argent dans
le projet de tramway à Québec afin qu'il se réalise dans les plus brefs délais.
Voilà.
Journaliste : Le... Juste sur
le principe, là, parce que vous allez me dire : Le projet de loi n'est pas
déposé, là, mais Simon Jolin-Barrette, ce matin, va déposer une loi, là, pour
encadrer le partage d'images sans consentement, là, va aller un peu plus loin
que ce que le fédéral fait, là, du côté du Québec. Trouvez-vous que c'est une
bonne chose d'aller resserrer ce type de règle... de mettre des règles pour
encadrer...
M. Leduc : Comme vous le
dites, on va attendre de voir la couleur du projet de loi, mais, de prime
abord, ça nous semble une intervention pertinente. Moi, mon seul bémol, il est
sur la forme. Vous le savez, on a en ce moment une commission spéciale sur le
temps d'écran. On parle de ce sujet-là dans cette commission-là. Ça fait que je
suis juste un peu surpris qu'on intervienne, législativement parlant, sur un
thème d'une commission spéciale qui est loin d'avoir terminé ses travaux, qui
est prévu d'avoir un rapport en mai. Ça fait que c'est juste la coordination de
ces deux affaires-là qui m'a un peu étonné quand j'ai appris qu'il y avait un
projet de loi. Encore une fois, on va le voir. Peut-être que finalement ce
n'est pas tout à fait dans le cadre de la mission de la commission, mais
j'espérerais qu'on ne fasse pas plein de projets de loi sur les thèmes de la
commission spéciale qui n'est pas encore terminée.
Journaliste : Sur les stages,
qu'est-ce que vous pensez de la proposition de la ministre Déry hier? Elle a
demandé, en fait, aux universités de faire en sorte que la dernière année se
passe au complet sur le terrain, là. Elle a dit : Ça, ça nous faciliterait
la tâche pour qu'on puisse les rémunérer.
M. Leduc : Pour faire ça, il
faudrait une réforme complète des bacs en enseignement au Québec. C'est une
opération majeure. Ce n'est pas simple. Ce n'est pas nécessairement en soi une
mauvaise idée, moi, je serais ouvert à ce qu'on en discute, mais ça ne se fera
certainement pas demain matin. C'est une opération majeure de réformer en
profondeur les bacs d'éducation dans l'ensemble des facultés d'enseignement. Ce
qui serait facile à mettre en place demain matin, c'est la rémunération des
stages.
Journaliste : ...
M. Leduc : Bien oui, bien
oui. Elle nous met sur une autre piste. Elle dit : Ah! ça, ça pourrait
être intéressant à explorer. Elle pellette ça dans la cour des facultés
d'enseignement. M. Drainville fait la même chose. D'ailleurs, à notre
connaissance, ils ne sont pas tout à fait wi-fi les deux là-dessus, mais ça,
c'est un détail.
La proposition qui fait consensus dans le
milieu étudiant, qui fait consensus chez les associations étudiantes, qui est
d'ailleurs une demande qui est faite depuis des années... la CAQ s'est déjà
mouillée à faire ça, rémunérer les stages étudiants, ils ne l'ont jamais fait,
faisons ça. Si on veut réformer les bacs en enseignement, discutons-en, mais ne
le faisons pas à la place de la rémunération des stages quatre. On peut faire
les deux en même temps, il n'y a pas de problème.
Journaliste : Qu'est-ce que
vous pensez du sondage de la Fédération autonome de l'enseignement qui dit que
le... un parent sur trois ne considère plus que l'école publique est gratuite?
M. Leduc : On n'est pas
surpris. On les connaît, les chiffres. Nous-mêmes, on en a compilé
quelques-uns, là. Ça peut coûter très cher, aller à... aller à l'école.
L'université... On fait le lien avec le sujet précédent. Aller à l'école
publique, ça coûte très cher au Québec. Ça peut coûter en moyenne, là, par...
évidemment, il y a plein de variations, mais jusqu'à 2 400 $ par
élève. Ça fait que vous avez une famille de trois au primaire, secondaire, ça
monte à 6 000 $, 7 000 $ rapidement. Ça fait longtemps
qu'on le sait que ce n'est plus gratuit, l'école publique, malheureusement.
C'est un problème au Québec. On a différents gouvernements, que ça soit le PQ,
les libéraux, maintenant la CAQ, qui ont laissé la chose aller parce qu'ils ont...
ils n'avaient pas une concentration peut-être assez forte sur l'école publique.
Un gouvernement solidaire changerait la situation, ça, c'est certain.
Journaliste : Comment?
M. Leduc : Bien, en
abolissant certains frais. On a une proposition en ce moment sur la question
des dîners, des lunchs qu'on pourrait fournir dans les écoles publiques. Ça
serait une des manières qu'on aurait pour baisser la facture.
Journaliste : Parce que les
écoles publiques ont mis beaucoup de l'avant des programmes particuliers pour
se distinguer un peu du privé, tout ça, puis ces programmes-là, souvent, sont
payants. Donc, est-ce que vous demanderiez aux écoles d'abandonner ce genre de
programmes là ou de les rendre gratuits?
M. Leduc : Non. Pour
l'histoire des programmes particuliers, là, je vais laisser ma collègue, Ruba,
peut-être vous répondre plus spécifiquement, là. C'est elle qui maîtrise le
dossier chez nous. Mais la question d'une facture qui gonfle et qui gonfle dans
l'école publique, c'est un enjeu, à notre avis, qu'il faut régler. On est
désolés de voir que ce n'est pas quelque chose qui semble intéresser le
gouvernement de la CAQ.
Journaliste : Puis sur le
même thème on voyait aussi ce matin que... Je ne l'ai pas avec moi, là, mais il
y a une école privée à Montréal qui...
M. Leduc : À Laval ou à...
oui, je pense.
Journaliste : ...oui, qui a
acheté des terrains parce qu'ils font des surplus... D'ailleurs, le directeur a
payé quelque 300 000 $, et qui fait des surplus, et qui a finalement
acheté des parcs, là, puis des chalets. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
M. Leduc : Bien, c'est une
étrange utilisation de deniers. Ça ne serait pas inintéressant
qu'éventuellement peut-être la Vérificatrice générale jette un coup d'oeil
là-dessus.
Journaliste : Est-ce que vous
pouvez lui demander, ou ça serait votre proposition?
M. Leduc : Certainement.
Certainement. On va regarder ça cet après-midi. Comme je vous disais :
C'est ma collègue Ruba qui est responsable du dossier, mais je pense qu'elle
est déjà en train de faire des vérifications pour faire une opération de ce
genre.
Journaliste : Sur
l'immigration, pour revenir sur les propos de M. Legault, hier, là. Votre
collègue, M. Cliche-Rivard a été assez clair, sauf peut-être sur un point.
C'est quoi, la proposition ou la position de Québec solidaire? Si les autres
provinces refusent d'accueillir des demandeurs d'asile, comme le demande le
Québec, est-ce que la province doit se résigner à les garder sur son territoire?
M. Leduc : Bon, la première
chose qu'il va falloir faire là-dedans, c'est faire l'indépendance du Québec.
Parce que si on veut contrôler l'ensemble de nos leviers, ici, sur le
territoire du Québec, il faut avoir l'ensemble de nos leviers, puis, en ce
moment, on ne les a pas. Non seulement on est tributaire d'un gouvernement qui
décide de faire des choses à sa façon... un gouvernement qui va d'ailleurs
peut-être changer. Je ne suis pas sûr que ça va aller mieux sous
M. Poilievre. L'avenir nous le dira, mais ça serait la première chose à
faire ici, puis c'est désolant de voir que M. Legault, qui était lui-même
un ancien indépendantiste, ne fait pas ce constat-là.
Maintenant, on parle ici d'êtres humains,
là, hein? On n'est pas... On dirait que ça me rappelle les mauvaises années du
débat sur le chemin. Roxham. On est-tu capable de voir que c'est un enjeu
sérieux et c'est un problème, mais aussi de constater que c'est des êtres
humains qui fuient... qui fuient la misère puis qui fuient le danger. J'ai une
famille, moi, dans Hochelaga-Maisonneuve qu'on a parrainé un peu récemment, là,
pour s'assurer qu'ils puissent rester ici. Ils étaient l'objectif des cartels
de drogue. Ils avaient été la cible... Parce qu'ils avaient refusé de payer des
protections dans leur village d'origine au Mexique pour être sous la
supervision des cartels puis ils étaient la cible. Puis là le gouvernement au
début lui disait : Vous aviez rien qu'à changer de ville ou d'État à
l'intérieur du Mexique. Mais les cartels... les téléphones, Internet, ils
savent comment vous retrouver. C'est juste ici qu'ils étaient vraiment hors de
la portée. Ça fait que c'est des vraies personnes. Ils étaient des réfugiés.
Puis on a réussi à les garder parce que la communauté s'est mobilisée. Les
gens, ils étaient intégrés. Ils avaient du travail. Les élèves allaient à
l'école. Les élèves parlaient presque plus français qu'espagnol. Ça fait que
c'est du vrai monde qui ont des vraies réalités, mais c'est un vrai problème.
Je n'ai pas de solution magique à vous soumettre ce matin. Mais j'aimerais ça
qu'on arrête de présenter ça comme des chiffres, un peu comme M. Legault
le fait parfois, puis on va juste tasser tel nombre de personnes à gauche, à
droite. Un instant, là, c'est des vrais humains avec des vrais parcours de vie.
Journaliste : ...comment
ça... Vous dites : Ça nous permettrait de contrôler nos leviers. Mais ça
ne fait pas en sorte qu'on accueillerait moins de demandeurs d'asile, à moins
que je me trompe. Qu'est-ce que ça changerait au juste?
M. Leduc : Bien, on aurait
nos propres représentations à l'étranger. On pourrait faire nos propres...
notre propre travail auprès des pays qui vivent des crises humanitaires et qui
voient leurs citoyens quitter le territoire. Là, on ne peut pas vraiment faire
ça, là. On a à peine des missions économiques dans quelques endroits,
principalement aux États-Unis et en Europe. On n'a pas d'ambassade à proprement
parler. On n'a pas de déploiement de politique internationale digne d'un pays,
là, d'un pays du G7, ça serait un outil qu'on aurait.
Journaliste : Je ne comprends
pas qu'est-ce que ça changerait.
M. Leduc : Quand on a un pays
qui va vivre une crise, on peut aller faire des représentations puis aller
passer des messages aussi dans ce pays-là. Je me rappelle quand il y avait eu
la crise des migrants notamment, il y avait des ministres fédéraux qui étaient
allés dans certains endroits, notamment aux États-Unis ou dans d'autres pays,
pour essayer d'amenuiser le message de M. Legault, là... de
M. Legault, de M. Trudeau. Rappelez-vous quand il y avait twitté «le
Canada, c'est les portes ouvertes, et puis tout le monde est bienvenu ici».
Bien, ça avait été pris au sens littéraire du mot par beaucoup de personnes.
Bien, il avait dû finalement envoyer des ministres officiels en représentation
dans les différents pays, dans les différentes communautés pour essayer
d'amenuiser ce message-là. Le Québec n'a pas ces pouvoirs-là, n'a pas cette...
ce déploiement-là, n'a pas cette infrastructure-là, diplomatique. Si on était
un pays, on pourrait se doter de cette stratégie-là.
Journaliste : ...fonctionné.
M. Leduc : Bien, écoutez, là,
après ça, on peut faire le bilan. À l'époque, ça avait fonctionné un peu, il me
semble, mais ce n'est pas suffisant, ça, c'est certain.
Journaliste : On the protest plan today for the preseason games of the Kings, what
is important in those protest? Like, what do you want citizens to understand or
to think about because of those preseason games...
M. Leduc :
Yes. The message is clear, and it's the
same since a year now. The CAQ Government has lost his sense of priorities, preferring
to finance multimillionaires, hockey professional players and owners to come
play a preseason, unofficial game here in Québec, rather than financing, for
example, community groups. We have a mental health crisis. We have lots of
children who are going to the school hungry. That should be the priority,
instead the financing the Los Angeles Kings.
Journaliste :
And is this example should remain in
people's mind as the CAQ is marking the half of its second mandate today,
precisely?
M. Leduc :
Yes, it's the 3rd of October. It was
the time of the election... two years ago. So, the date is important because
remember, two years ago, the CAQ was on the top, more MNAs than ever. One of
the biggest proportion of MNAs, since, I guess, the Quiet Revolution. That's a
lot about the... «le mode de scrutin», how do you say that in English, the way
of voting?
Journaliste :
Yes, voting process.
M. Leduc :
Voting process, that's another topic.
But the Kings the Kings, the big cheque they wrote is marked the start of their
downfall in a way. And this is what we want to send as a message, that the
problem with the CAQ, we see it for many years now. But it has been very
important, it has been very... clearer since this moment. And we want to
emphasize that the priority... the CAQ has lost its sense of priorities, it
needs to focus on something else.
Journaliste : Peut-être en
français là-dessus... on a le temps. Pour vous, c'est quoi, la signification,
vous venez de l'expliquer en anglais, là, mais...
M. Leduc : Aujourd'hui, il y
a une manifestation organisée par différentes personnes. Il y aura des députés
de Québec solidaire qui y seront, notamment mes collègues Etienne et Sol de
Québec, mais, je pense, Christine aussi, là, la porte-parole sera là. Et le but
est d'envoyer le message que ça fait longtemps, là, que la CAQ a perdu le sens
des priorités. Mais, en particulier, il y a un an, quand on a appris cette
histoire-là de financement des Kings, c'était plus clair que jamais, ça a
d'ailleurs marqué un peu le début de la chute pour la CAQ, la chute dans les
sondages, la chute dans les appuis. La chute du gros bon sens, même ses propres
députés à la CAQ critiquaient, même sans se cacher, cette décision-là assez
étonnante. Et on a vu les exemples s'accumuler depuis le temps. On a encore eu,
pas plus tard que la semaine dernière, si je ne me trompe pas, la coupe de golf,
la coupe des présidents de golf qui est un peu dans le même registre.
Donc, la CAQ n'a pas un bon sens des
priorités. Nous, on veut leur envoyer ce message-là qu'ils doivent se resaisir,
que c'est mieux... plus important de financer des banques alimentaires, de
financer des initiatives en matière de santé, des initiatives en matière de
santé mentale, d'initiatives en matière de sécurité alimentaire, notamment le
lunch à l'école, il devrait se pencher là-dessus, financer ça, à la place de
financer des multimilliardaires.
Journaliste : Merci beaucoup.
M. Leduc : Bonne journée,
tout le monde.
(Fin à 8 h 16)