(Huit heures vingt et une minutes)
M. Nadeau-Dubois : Bonjour.
Depuis plusieurs jours maintenant, le gouvernement de la Coalition avenir
Québec répète qu'on est soit pour le projet de loi n° 61 soit pour la
relance de l'économie. Bien, c'est un faux dilemme. C'est un faux dilemme
total. On peut être pour la relance de l'économie sans vouloir maganer
l'environnement, sans vouloir affecter la démocratie, sans vouloir mettre en
danger les fonds publics. On peut faire les deux. Dans les derniers jours, tous
les défenseurs du bien commun qui sont venus en commission parlementaire l'ont
dit : On peut faire mieux. On peut faire plus vite sans le projet de loi
n° 61, sans instaurer un régime d'exception quasi permanent au Québec.
C'est pour cette raison-là qu'hier,
conjointement, les trois partis d'opposition, avec le député indépendant Guy
Ouellette, ont déposé leurs conditions. Nous avons déposé nos conditions à ce
que l'étude du projet de loi n° 61 se poursuive dans les prochains jours.
Par contre, on ne fait pas seulement exprimer des conditions. On veut également
être constructifs. On veut être constructifs. On veut faire des propositions
pour aider le Québec à relancer son économie plus rapidement sans affecter
l'environnement, sans mettre en danger la démocratie, sans mettre en danger les
fonds publics.
C'est pour ça que, ce matin, Québec
solidaire va faire une proposition au gouvernement du Québec, une proposition
qui vise à augmenter l'efficacité du ministère de l'Environnement parce que
nous, on croit, à Québec solidaire, qu'on peut être plus efficaces en matière
d'environnement tout en restant aussi exigeants. On pense que le ministère de
l'Environnement peut travailler plus vite, peut travailler mieux, sans mettre
en danger les milieux humides, sans affaiblir les réglementations
environnementales.
On va donc faire, ce matin, avec une
motion, cette proposition au gouvernement. Et je vais laisser ma collègue Ruba
Ghazal vous expliquer cette proposition.
Mme Ghazal : Alors, bonjour, tout
le monde. Donc, le gouvernement nous casse les oreilles depuis des semaines
avec le fait que les projets… faire les analyses environnementales de façon
rigoureuse, bien, ça prend trop de temps. Eh bien, comme le dit mon collègue
Gabriel Nadeau-Dubois, on a une solution qu'on lui propose, et c'est celle,
bien, d'embaucher plus de monde au ministère de l'Environnement, plus de
professionnels, d'amener des renforts au ministère de l'Environnement pour
faire ce travail-là, et donc pour faire des évaluations environnementales qui
soient complètes, qui soient rigoureuses, qui ne réduisent pas les exigences,
et aussi qu'on ne contourne pas les lois et règlements qu'on se vote ici, à l'Assemblée
nationale.
Donc, c'est la proposition, ce matin, avec
la motion que je vais déposer en Chambre, qui dit : Vous voulez accélérer
les projets? Très bien, embauchez plus de monde pour faire le travail comme il
faut pour protéger l'environnement tout en relançant l'économie.
M. Laforest (Alain) : Ça
coûte combien?
M. Nadeau-Dubois : Nous, on ne
fait pas une proposition. On ne dit pas au gouvernement : Embauchez
200 personnes ou 300 personnes.
M. Laforest (Alain) : Si tu
engages une personne, c'est un peu ridicule. C'est quoi, l'effectif...
M. Nadeau-Dubois : Le gouvernement
connaît très bien les besoins au ministère de l'Environnement. C'est à lui à
choisir combien de gens il veut engager. On ne va pas écrire le budget du ministère
de l'Environnement à sa place. Par contre, ce qu'on lui donne, là, ce qu'on met
sur la table, c'est une proposition concrète pour l'aider à atteindre ses objectifs,
des objectifs qu'on partage, mais par un autre moyen, parce que ce n'est pas
vrai qu'on doit choisir entre l'environnement ou la relance. On peut faire les
deux. Et tous les experts le disent : Oui, il y a des délais évitables au ministère
de l'Environnement, et la première cause de ces délais, c'est le manque de
personnel. Il faut du renfort au ministère de l'Environnement pour que, oui, on
accouche plus vite de certaines autorisations sans diminuer les exigences. C'est
ce que le gouvernement dit vouloir faire. Bien, aujourd'hui on lui met sur la
table une proposition pour y arriver.
M. Bergeron (Patrice) :
Est-ce que, dans la logique… Dans le droit parlementaire, une motion, c'est
comme un ordre du Parlement. Le Parlement peut donner un ordre au gouvernement
d'embaucher plus de monde au ministère de l'Environnement puis, vraiment, de
prendre des budgets pour aussi payer plus de monde?
M. Nadeau-Dubois : Pour que la
motion soit adoptée, le gouvernement doit voter pour. Donc, à partir du moment
où le gouvernement lui-même vote : Je souhaite améliorer les effectifs,
bien, c'est une manière pour le gouvernement, en votant pour cette motion, de
dire : C'est une bonne solution, on va l'appliquer.
M. Bergeron (Patrice) : …une
vingtaine de pages d'amendements ce matin sur le projet de loi n° 61.
M. Nadeau-Dubois : Ça me dit
que les contre-pouvoirs fonctionnent encore au Québec. Ça veut dire que, quand
la Vérificatrice générale, le Barreau du Québec, tous les partis d'opposition,
la Protectrice du citoyen, quand tous ces gens-là disent : C'est un projet
de loi abusif, bien, ça fonctionne. Alors, ça montre que, contrairement à ce
que le gouvernement lui-même semble parfois penser, les contre-pouvoirs
fonctionnent.
Ceci étant dit, les amendements en
question, on les a reçus très tôt ce matin. Alors, comment dire? Québec solidaire
ne fera pas l'erreur que la CAQ a faite, c'est-à-dire de travailler trop vite
et de mal travailler. On va prendre le temps de lire les amendements. On va
prendre le temps de les analyser dans les prochaines heures. Et on va répondre
au gouvernement quand on aura le temps, quand on aura fait le tour du contenu
de ces amendements.
M. Bellerose (Patrick) : Mais,
quand même, ça dit que la première version était mal formulée, mal rédigée?
M. Nadeau-Dubois : Ah bien,
ça, vous ne me le faites pas dire. C'est-à-dire que le fait que le gouvernement
dépose aujourd'hui une vingtaine d'amendements, c'est la démonstration que tous
les gens qui ont dit que c'était un projet de loi mal foutu avaient raison.
Ceci étant dit, moi, je ne suis pas ici pour sabrer le champagne, là. Je suis
ici pour dire : On va prendre les amendements, on va les lire, on va les
analyser. On va faire notre job comme il faut et on va continuer les
discussions avec le gouvernement.
M. Dion (Mathieu) : Il y a eu,
dans les derniers jours, bien, en fait hier, quelques éléments qui ont été
dévoilés par le ministre lui-même. Ce matin, on apprend aussi, en matière
d'environnement, qu'il y aurait deux mesures qui seraient modifiées. À la
lumière de ça, est-ce que c'est de bon augure pour la suite des choses, à votre
avis?
M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est-à-dire,
ça montre au moins que la possibilité de s'entendre existe encore. Ça montre
que c'est toujours possible d'arriver à une entente, et ça, c'est une bonne
nouvelle. Il n'y a personne qui veut bloquer la relance économique. Il n'y a
personne qui veut bloquer le projet de loi n° 61 juste pour embarrasser le
gouvernement. Nous, on a trois critères : la protection des fonds publics,
la protection de l'environnement, la protection de la démocratie. Et, si on est
capables, avec le projet de loi n° 61, de remplir ces critères-là, bien,
on va être en voiture, là. Mais on vient de recevoir les amendements. Alors,
moi, je ne suis pas en mesure de vous dire ce matin si ces amendements-là
répondent à ces critères-là. Mais on va faire notre job comme il faut. On va
les lire, les analyser. Et il y aura des discussions avec le gouvernement.
M. Laforest (Alain) :
Qu'est-ce que vous pensez des frasques d'André Boisclair?
M. Nadeau-Dubois : Ah mon
Dieu! Qu'est-ce que je pense des frasques d'André Boisclair? Honnêtement, je
pense qu'il y a des choses bien importantes en ce moment au Québec. Je pense
que le débat qu'on a sur le projet de loi n° 61, il est déterminant pour
ce que va avoir l'air le Québec dans les deux prochaines années. Puis les
frasques, plus que les frasques, là, les comportements douteux
d'ex-politiciens, je n'ai pas envie de vous parler de ça.
M. Laforest (Alain) : Ça ne
vous dérange pas qu'il y ait des gens qui aient fermé les yeux?
M. Nadeau-Dubois : Je pense
que certains comportements ont été tolérés, dans les hautes sphères de la société
québécoise, pendant trop longtemps, et que le Québec est en train de changer,
puis que ce qu'on a toléré, on ne le tolère plus, ce qu'on a accepté, on ne
l'accepte plus, puis ça, c'est une bonne nouvelle. Puis ce n'est pas juste vrai
pour M. Boisclair, hein? C'est vrai pour plusieurs figures de pouvoir qui, au Québec,
comme ailleurs, ont bénéficié d'un climat de tolérance où, parce qu'on était
des «big shots», on pouvait s'en permettre. Et ça, c'est en train de changer
puis c'est une belle évolution sociale.
M. Bellerose (Patrick) : Il y
a un élément qui rejoint directement l'État québécois, où est-ce qu'on a ramené
le délégué général du Québec à New York en lui faisant signer une entente de
confidentialité. Est-ce qu'on doit dévoiler l'entente, faire la lumière sur les
agissements du délégué général à New York à l'époque?
M. Nadeau-Dubois : Honnêtement,
je ne suis pas juriste, là. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette
question spécifique sur l'entente de confidentialité.
M. Bellerose (Patrick) : ...sur
ses agissements, quand même, à New York : la drogue, les jeunes garçons?
M. Nadeau-Dubois :
L'important, c'est de faire la lumière sur ce qui était légal puis ce qui était
illégal. S'il y a eu des comportements illégaux, je fais confiance aux
tribunaux pour faire la lumière sur les comportements illégaux. Je ne pense pas
que le débat ici, c'est sur le style de vie, c'est sur les actes légaux ou
illégaux. Puis je fais confiance aux tribunaux pour faire la lumière sur s'il y
a eu des gestes illégaux de posés. Surtout dans le cadre d'une fonction
publique, là, en effet, c'est encore plus pertinent de faire la lumière
là-dessus. Mais je pense qu'il faut juste éviter de tout mélanger, là. La
lumière doit être faite sur s'il y a eu des gestes illégaux. Moi, je ne veux
pas qu'on fasse le procès d'un style de vie, même excentrique.
M. Bergeron (Patrice) :
Mme Ghazal, sur le 44, que je suis, donc, les travaux en commission
parlementaire, je regarde ce que l'opposition fait, mais là ça semble vraiment
s'étirer. Partis à ce rythme-là, j'ai l'impression que vous allez finir ça
l'année prochaine. Est-ce que vous n'êtes pas en train de vouloir mettre du
sable dans l'engrenage pour ne pas que le p.l. n° 44
soit adopté, finalement?
Mme Ghazal : Écoutez, moi, je
ne regarde pas le délai, je ne gère pas le temps, et tout ça. Moi, ce qui est
important pour moi... Puis, si vous le suivez, je suis très, très contente,
chaque amendement que j'apporte, c'est vraiment pour bonifier le projet de loi.
Et d'ailleurs il y a des amendements, après un travail avec le ministre, on a
réussi à les amener et à les faire adopter. Donc, ce n'est pas inutile, par
exemple les risques climatiques qu'on a ajoutés, que j'ai ajoutés dans le
projet de loi.
Malheureusement, il y a d'autres
amendements que le ministre ne veut pas, aussi simples que de faire une analyse
d'impact climatique. C'est-à-dire que chaque projet de loi, chaque décision,
chaque politique de tout le gouvernement, tous les ministères et les organismes
publics, qu'il y ait une analyse pour voir est-ce que ça a un impact sur le
climat, d'avoir ce réflexe climat, de la même façon qu'on le fait, par exemple,
pour alléger les délais administratifs pour les entreprises ou les coûts
administratifs pour les entreprises. C'est un processus qui existe. J'ai
proposé qu'on le fasse aussi pour le climat, et malheureusement le ministre a
refusé.
Mais, si vous suivez vraiment la commission,
c'est un travail... Notre objectif est de l'améliorer. Et je vais ajouter que,
dans ce projet de loi n° 44, on est en train d'aussi changer la LQE, la
Loi sur la qualité de l'environnement, et d'où notre inquiétude encore très
grande… Tout ce travail-là qu'on fait, où, même, j'ai déposé un amendement pour
que, dans la Loi sur la qualité de l'environnement… on parle de l'urgence
climatique, que ça soit écrit, que ça ne soit pas juste... C'est une motion qu'on
a votée, les 125 députés. Bien, de la mettre dans la loi... et le ministre
a dit qu'il était ouvert. Il a même déposé un amendement, un peu écrit
différemment, mais où il reconnaît l'urgence climatique dans la loi. Eh bien,
avec le projet de loi n° 61, la façon qu'il est écrit, là — il y
a eu des amendements, on va analyser ça — mais c'est comme si ce qu'on
est en train de faire au projet de loi n° 44 pourrait être annulé par le
projet de loi n° 61. Donc, il y a vraiment des liens à faire qui sont
extrêmement importants.
La Modératrice
: Une
dernière question.
M. Bergeron (Patrice) :
…aussi que vous avez beaucoup parlé de la question des consultations avec les autochtones,
mais là ça semble être beaucoup plus compliqué. Est-ce qu'il y a de l'ouverture
ou des compromis qu'il serait possible d'aller chercher? Parce que je vois que
le ministre est ouvert, mais il voulait d'abord consulter les juristes.
Mme Ghazal : Oui. Bien,
ce qui a été fait avec cet amendement-là, c'est qu'on a décidé… C'est une
procédure qu'on fait, de suspendre la discussion sur l'amendement qui a été
apporté par les libéraux, auquel, évidemment, moi aussi, j'ai souscrit, et tous
les partis d'opposition, et même le ministre. C'est juste une question d'où est-ce
qu'on peut le placer, et il y a des juristes qui vont être en train d'analyser
ça.
La Modératrice
: On va
passer en anglais, s'il vous plaît.
Mme Senay (Cathy) : Good
morning.
M. Nadeau-Dubois : Good
morning.
Mme Senay (Cathy) : I don't
know if you saw this, but the Treasury Board president will hold a scrum at 9:30.
M. Nadeau-Dubois : The
what?
Mme Senay (Cathy) : The
Treasury Board president, Christian Dubé, will hold a scrum at
9:30 on Bill 61. Opposition
parties did a great job raising red flags with other groups. How important it
is to keep this momentum?
M. Nadeau-Dubois : How…
Mme Senay (Cathy) : How important it is for you, how paramount it is to keep this
momentum without being accused of stopping the reboot of the economy?
M. Nadeau-Dubois : For Québec solidaire, it's not a matter of political momentum, it's a matter of
principle. How should we kick-start Québec's economy? Should we do it while
harming the environment or should we do it in a 21st century way, which is by
the reinforcing of environmental protections? So, for me, it's not a question
of political momentum, it's a question of principle. And I think the proof of that is that, even before
the bill was actually tabled, I was already saying : Québec solidaire has three conditions, and
those are the three same conditions we are using today to examine the
amendments that were put forward by Mr. Dubé. So we have been coherent through
this. We have followed our principles through this. And that is exactly what we
are going to do today when we are going to analyze the amendments tabled by Mr.
Dubé.
Mme Senay (Cathy) : Marguerite Blais is about to table a bill about the protection, the
recognition of caregivers. How long overdue this is for you, in Québec, to have
a policy like this?
M. Nadeau-Dubois : This should have been done a long time ago. You know, we were
obsessed, in the last decades, by the deficit, by the debt. We were obsessed. A
lot of politicians were obsessed by purely economic objectives that were
completely disconnected from what was happening on the ground, especially the
way that our public services treat elderly people in Québec. So we can't wait
to read that policy, but we hope it's going to bring real and concrete
solutions to that huge problem.
La Modératrice
: Dernière question.
M. Verville
(Jean-Vincent) : On Bill 61, yesterday, the
Minister seemed to demonstrate a real flexibility. What does it tell you?
M. Nadeau-Dubois : Well, I think it's the proof that there's still hope for a
compromise. There's still a way to get a deal done. But we've just received the
amendments of Mr. Dubé, so we are going to do our job right. We're not
going to fall in the trap that the Coalition avenir
Québec fell into, which is go too fast and don't do our
job correctly. We're going to read the amendments. We're going to analyze them
and we're going to answer to the Government. But the Government has to
understand that the actual problem that they're having right now is of their
own making. They were the ones to table that bill so late that it rushed
everyone. So we are going to take the time to do our job right, and, in a few
hours, we will be able to respond to the Government.
M. Verville
(Jean-Vincent) : …to a consensus, do you
think?
M. Nadeau-Dubois : I think a consensus is still reachable. This possibility still
exists. But it's too early for me to say if those amendments will be enough.
La Modératrice
: Merci beaucoup.
M. Nadeau-Dubois : Merci. Thank you.
(Fin à 8 h 38)