Point de presse de M. André Fortin, porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé
Version préliminaire
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Thursday, February 27, 2025, 11 h 40
Hall principal de l'hôtel du Parlement,
hôtel du Parlement
11 h 54 (version non révisée)
(Onze heures cinquante-six minutes)
La Modératrice : Bonjour et
bienvenue à ce point de presse de M. André Fortin, porte-parole de l'opposition
officielle en matière de santé. Ce point de presse concerne l'intention de la
Coalition avenir Québec de réduire l'accès à la mesure du patient d'exception.
Pour ce point de presse, il est accompagné de M. Jonathan Pratt, le directeur
général du Regroupement québécois des maladies orphelines, de Me Paul G.
Brunet, avocat et P.D.G. du Conseil de la protection des malades, et de Mme
Julie Carignan, qui est atteinte d'un cancer très rare. Ces derniers prendront
la parole suivant M. Fortin.
M. Fortin :Oui. Merci. Je veux vous dire que c'est... j'ai trouvé
particulièrement scandalisant le fait que la Coalition avenir Québec rejette la
motion qu'on a présentée, aujourd'hui, demandant à ce qu'il n'y ait pas de
changement à la... à la notion de patient d'exception et à la mesure de patient
d'exception. Ce qu'on comprend, là, c'est qu'au cours des prochaines semaines
le gouvernement va venir resserrer les règles autour des médicaments qui sont
octroyés aux patients à partir de la mesure du patient d'exception. Et ces
patients-là, là, ce sont des... ce sont des Québécois et des Québécoises qui
comptent sur ces médicaments-là, qui sont atteints d'une maladie rare, qui sont
atteints de cancer rare et qui ont besoin d'un traitement un peu différent, d'un
traitement qui n'est pas le traitement usuel, mais qui est celui qui fonctionne
pour eux. Alors, de dire à des gens malades, de dire à des gens qui sont
inquiets de leur état de santé, de dire à leur famille qu'on va venir resserrer
les règles, parce qu'il y a de l'abus, je trouve ça particulièrement choquant.
La motion qu'on a présentée, là, le
gouvernement nous a dit : Non, on ne va pas voter pour parce qu'on
considère qu'il y a déjà eu des consultations, ce qui est complètement faux. Il
n'y en a eu aucune, consultation qui a eu lieu au cours des derniers mois. Le
gouvernement est venu nous dire : On ne vient pas restreindre l'accès, ce
qu'on vient faire, c'est resserrer les règles parce qu'il y a de l'abus. Moi, j'aimerais
qu'il nous dise quels patients abusent de cette mesure-là en ce moment. Parce
que les patients qui ont... qui font... qui font l'utilisation de cette
mesure-là, ils ont besoin des médicaments. C'est une question pour eux, bien
souvent, là, de vie ou de mort. Oui, c'est une question de qualité de vie, mais
il y a des gens qui, bien malheureusement, s'ils n'ont pas accès aux
médicaments d'exception, vont décéder. Et ça, je ne peux pas comprendre que le
gouvernement de la Coalition avenir Québec vienne resserrer, restreindre l'accès
à des médicaments qui fonctionnent pour des gens. Il y a des... il y a des gens
avec moi ici, aujourd'hui, là, qui peuvent vous l'expliquer bien mieux que moi,
mais de savoir que, pour une question budgétaire, on va venir empêcher des
Québécois d'avoir accès à des médicaments dont ils ont besoin, des médicaments
qui assurent leur qualité de vie, qui assurent qu'ils demeurent en vie, c'est
absolument scandalisant. Je me tourne vers Jonathan Pratt.
M. Pratt (Jonathan) : Oui.
Donc, bien, bonjour, tout le monde. Merci pour l'occasion, là, de... en fait,
de me laisser l'occasion de parler de cet enjeu-là. Effectivement, ça fait en
fait depuis plus de deux ans, là, qu'on se fait dire qu'il va y avoir des
modifications au patient d'exception. Ça a commencé en avril 2023. Puis, en
fait, ces changements-là vont venir potentiellement restreindre justement l'accès
aux médicaments, puisqu'on veut mettre de la pression sur les fabricants,
justement, qui s'occupent de la production de ces médicaments-là et de les
mettre en vente pour les patients.
On va aussi... En fait, ce qu'on... ce qu'on
soupçonne, c'est qu'évidemment le gros enjeu, là, dans l'histoire, c'est que,
depuis deux ans, on se fait dire que ce n'est pas une question de coût, mais le
principal enjeu, c'est que la mesure du patient d'exception nous coûte des
centaines de millions de dollars par année, mais on va sauver la vie de plus de
50 000 patients. Puis ce qui se passe, en fait, essentiellement, c'est que
l'utilisation, justement, de ces médicaments-là, et donc on se fait dire que ce
n'est pas efficace, on se fait...
11 h 59 (version non révisée)
M. Pratt (Jonathan) : ...on
se fait parler de pertinence clinique entre autres. Bien, en fait, ce n'est pas
vraiment démontré. Donc, les... il y a plusieurs médicaments qui sont prescrits
par les médecins sous le patient exception, et les données en fait ne sont
jamais recueillies pour ces médicaments-là sur une longue période. Un exemple
que je peux donner, c'est le syndrome de Morquio. Donc, il y a un médicament
qui existe depuis 2010, ça fait maintenant 15 ans, et c'est plus d'une
cinquantaine de patients qui ont accès à ce médicament-là sous le patient
exception, mais je le répète, ça fait 15 ans. Donc, est-ce qu'on a récolté
des données de ces patients-là depuis les 15 dernières années? On n'en a
aucune espèce d'idée. On se fait dire par le gouvernement que ce n'est pas une
priorité. La seule chose qu'on se fait dire, c'est qu'on veut resserrer les
règles, et mettre plus de bâtons dans les roues pour les fabricants, et
ultimement, ce qui risque d'arriver, c'est que ces fabricants-là ne viendront
plus au Québec, ne viendront plus au Canada, et ça va encore une fois réduire
justement le nombre de médicaments disponibles aux Québécois et Québécoises.
Puis l'autre enjeu aussi, c'est qu'on on
parle de maladies rares, on parle de maladies orphelines, il faut dire qu'il en
existe plus de 8000 de ces maladies rares là, et je n'inclus même pas les
cancers rares dans ces... dans les maladies rares. Donc, on peut... on peut
deviner que le chiffre est vraiment, vraiment beaucoup plus élevé. Et de ces
maladies-là, il existe seulement 5 % des maladies pour lesquelles on a un
traitement efficace. Donc, parfois, évidemment avec la recherche et
développement, bien, on va trouver des médicaments qui ont une indication
thérapeutique très bien ciblée, mais qui pourraient être efficaces pour d'autres
indications thérapeutiques, et ça, malheureusement, ça passe... je dis
«malheureusement» parce que ça passe sous le patient d'exception, et là aujourd'hui,
on nous dit que, bien, il y a des mesures qui s'en viennent restreindre ces
changements-là.
La dernière chose que j'aimerais ajouter,
c'est par rapport aux consultations. Personnellement, avec la collaboration de
d'autres groupes de patients, on a eu une seule rencontre, à l'automne, qui a
duré une heure de temps, où on a reçu en fait essentiellement un cours INESSS 101.
Donc moi, je ne considère pas que c'est une consultation publique. Et on a
aussi fait appel à différentes instances médicales, le Collège des médecins, la
Fédération des médecins spécialistes, il n'y a personne, en fait, qui a été
consulté par rapport à cet enjeu-là.
Donc, j'implore en fait le gouvernement,
le ministre Dubé, avec le cœur sur la main, justement de penser à ces plus de
50 000 personnes, puis on ne parle pas des personnes présentement qui ont le
patient d'exception. Moi, je pense à tous les futurs patients, je pense aux
gens, je pense aux parents qui vont avoir un enfant, qui vont développer une
maladie pour laquelle il existerait peut-être un médicament qui est approuvé
par la FDA aux États-Unis ou par l'EMA en Europe, mais qu'ici on ne l'aurait
pas parce qu'on vient restreindre ces règles-là.
Donc, pour toutes ces raisons-là, je
demande au gouvernement de vraiment faire une consultation beaucoup plus large
afin de s'assurer de trouver peut-être des meilleures solutions et d'avoir
justement l'avis de différentes parties prenantes pour savoir justement c'est
quoi la bonne chose à faire pour l'avenir. Donc, voilà. Merci. Je laisse la
parole à M. Brunet.
M. Brunet (Paul G.) : L'ancienne
Loi sur la santé et services sociaux prévoyait qu'il y avait une façon de
procéder pour obtenir, par exemple dans des situations médicales particulières
ou encore le patient d'exception, qui était relativement efficace, même s'il y
avait certains combats que nous devions mener pour que les gens obtiennent le
médicament dans certaines circonstances particulières.
Ce que l'on craint avec l'avènement du projet
de loi n° 15, c'est que ce qu'on a alourdi dans le processus d'obtention
de médicaments lors de situations médicales particulières finisse par s'appliquer
en matière de patients d'exception et qu'on alourdisse ainsi le processus en
impliquant, en invitant littéralement l'INESSS à venir se pencher sur le sujet.
Oui, l'INESSS était impliqué autrefois, mais a posteriori, des démarches du
médecin et a posteriori de l'administration du médicament. Là, on impose
littéralement l'examen par l'INESSS des différentes questions et des
différentes soumissions pour des nouveaux médicaments.
En fait, ce qui est plutôt ironique, c'est
qu'alors que le projet de loi dit lui-même, dans son propre titre, de rendre le
système de santé plus efficace, ironiquement, on vient l'alourdir et le rendre
encore plus inefficace en matière de patients d'exception. On a beaucoup de
difficulté avec ça. Nous, on est ici parce qu'il y a 50 000 patients
qui sont sous la rubrique patients d'exception et on apprécie évidemment cette
question-là. Mais pour les futurs patients, la question que je pose au
gouvernement, si vous restreignez l'accès aux médicaments d'exception,
êtes-vous en train de nous dire que, dans le fond, les gens qui seront trop
malades et à qui on ne pourra pas trouver de traitement sauf si on allait avec
le patient d'exception, ces gens-là se retrouveront en hôpital, à l'urgence et,
pourquoi pas, c'est ce qu'on pense que vous suggérez qu'ils demandent l'aie
médicale à mourir...
12 h 04 (version non révisée)
M. Brunet (Paul G.) : ... — c'est
en tout cas ce qu'on pense que vous suggérez — qu'ils demandent l'aide
médicale à mourir. On trouve ça un peu scandaleux. Et on demande au
gouvernement de faire attention de consulter les principaux groupes, ce que
nous, on n'a pas eu l'occasion de faire, d'être consultés, et qu'on continue à
obtenir et à permettre aux médecins de prescrire le bon médicament pour le bon
patient, et que ce médicament-là soit reconnu sans avoir à passer par l'INESSS
et de bureaucratiser, sinon d'alourdir encore plus le processus, et surtout de
rendre un médicament qui... à la fin d'une course et de toute cette
bureaucratie, qu'on se fasse dire que le médicament n'était pas efficace. Je
comprends. Si vous administrez un médicament après des mois ou des semaines de
tergiversations avec les autorités diverses auxquelles on veut s'astreindre ou
nous soumettre l'approbation, c'est sûr que le patient va mourir, et ce sera de
votre faute.
La Modératrice : Mme
Carignan.
Mme Carignan (Julie) : Bonjour
à tous. Je suis extrêmement reconnaissante d'avoir l'opportunité de pouvoir
parler au nom des gens comme moi, qui depuis trois ans ai été touchée par un
cancer rare. En fait, c'est un message personnalisé pour le ministre et ses
équipes.
Je ne comprends pas... Depuis trois ans, j'accompagne
des gens... En fait, il y a un an et demi, je suis venue ici pour venir
débattre puis protéger les accès aux médicaments d'exception pour les patients
qui étaient hospitalisés. Évidemment, aujourd'hui on parle de patients d'exception.
J'en fais partie. Je ne comprends pas pourquoi les gens que j'ai connus il y a
trois ans, qui m'ont déjà quittée, n'ont pas eu cette opportunité-là de...
Parce que le patient d'exception existe. Aujourd'hui, j'espère qu'on va le protéger,
parce que même ce programme-là est difficile à aller chercher par le support de
nos médecins. Les patients qui ont eu... qui auraient eu besoin de ce
programme-là, malheureusement, n'ont pas pu l'avoir, et donc, au lieu d'avoir
accès à l'innovation, ont plutôt eu accès à leurs funérailles. Donc, ça, c'est
quelque chose qui vient me chercher tout personnellement.
Et, pour le ministre Dubé, j'aimerais ça
qu'on comprenne... J'ai consulté mon hémato-oncologue hier puis je lui ai
demandé : Qu'est-ce que ça veut dire si on resserre ce programme-là? Qu'est-ce
que ça veut dire si on resserre l'accès à l'innovation? Eh bien! sa réponse a
été fort simple : Je pense que tous les hémato-oncologues qui suivent des
patients touchés par le cancer, des cancers rares, les maladies orphelines,
tout ça, je pense qu'eux, leur mission ultime, c'est de soigner leurs patients
avec des médicaments qui fonctionnent et d'arrêter de soigner les gens avec des
médicaments qui ne fonctionnent pas, et on est d'avis qu'actuellement les
médicaments innovants sont souvent utilisés très tard dans le parcours de soins
des patients. Et donc je pense qu'en diminuant en plus l'accès, non seulement
on attend que ces patients-là ne soient pas en santé pour bien répondre à ces
médicaments-là, on les condamne un peu en quelque sorte.
Puis ce qu'il m'a partagé aussi — puis
je peux le nommer : le Dr Maxime Chénard-Poirier, du CHU de Québec — il
m'a dit : Julie, on a un bijou au Canada, on fait... on est... On a un
bijou. On a une opportunité, ici dans notre province, d'avoir un programme qui
permet justement d'explorer l'innovation, et il n'y a aucune façon à l'heure
actuelle de traquer ou d'avoir une traçabilité sur les bienfaits de ces
nouveaux médicaments-là chez les patients qui en ont besoin. Ce serait le fun
qu'on préserve ce programme-là puis qu'on s'en serve comme outil pour équiper
ou outiller l'INESSS à pouvoir approuver ces solutions-là plus rapidement.
Parce que la réalité, c'est qu'il y a un
an et demi, je venais ici pour aller... pour avoir une recommandation favorable
pour une compagnie en particulier pour donner accès à un médicament innovant à
des patients atteints de cholangiocarcinome. On a eu... La compagnie à qui j'ai
discuté a eu une approbation de Santé Canada, a eu finalement la recommandation
favorable de l'INESSS, et le médicament n'est toujours pas listé, et on est
deux ans plus tard. Puis, je vous le confirme, ces gens-là, là, pour qui j'ai
milité ne sont plus avec moi aujourd'hui pour voir que je suis encore là pour
continuer à me battre pour eux.
Donc, M. le ministre, vos équipes, s'il
vous plaît, donnez-nous une chance de briller au Québec puis de faire briller l'innovation,
donnons l'exemple aux autres provinces puis sauvons les gens au lieu de les
laisser tomber. Je vous remercie beaucoup. Bonne fin de journée.
La Modératrice : Merci
beaucoup. Bonne fin de journée.
(Fin à 12 h 09)