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Point de presse de M. Simon Jolin-Barrette, ministre de la Justice, et M. Mathieu Lévesque, leader parlementaire adjoint du gouvernement

Version finale

Tuesday, November 26, 2024, 12 h 45

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Douze heures quarante-sept minutes)

La Modératrice : Je me permets de vous présenter les personnes qui se trouvent aujourd'hui devant vous. Donc, M. le ministre de la Justice et procureur général du Québec, M. Simon Jolin-Barrette, M. le député de Chapleau et adjoint gouvernemental du ministre de la Justice, M. Mathieu Lévesque, ainsi que les six membres du Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la Fédération canadienne, Mme Amélie Binette, professeure au département de droit de l'Université du Québec en Outaouais, M. Luc Godbout, professeur titulaire au département de fiscalité de l'Université de Sherbrooke et titulaire de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke, Mme Catherine Mathieu, professeure à la Faculté de sciences politiques et de droit de l'Université du Québec à Montréal, Mme Martine Tremblay, consultante en affaires publiques, ancienne sous-ministre et ancienne chef de cabinet des premiers ministres René Lévesque et Pierre-Marc Johnson, ainsi que les deux coprésidents de ce comité, donc M. Sébastien Proulx, avocat, ancien ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport et ancien ministre de la Famille, M. Guillaume Rousseau, professeur titulaire à la Faculté de droit de l'Université de Sherbrooke et directeur des programmes de droit et politiques appliquées de l'État.

Je vous explique rapidement le déroulement de la conférence de presse aujourd'hui. Donc, on va débuter par une courte déclaration des co-présidents du comité. Les membres du comité vont ensuite procéder à la remise officielle du rapport au ministre de la Justice, s'ensuivra une prise de photo officielle puis une courte déclaration du ministre de la Justice. Nous ne prendrons pas de questions à la suite de cette déclaration. Le rapport sera ensuite déposé au salon rouge et sera ainsi rendu public. Un breffage technique sera offert aux représentants des médias et les membres... par les membres du comité, pardon, à la salle RC-161 dès 15 h. Après ce breffage, les deux... Les coprésidents se rendront disponibles pour accorder des entrevues aux journalistes qui le souhaitent.

Donc, sans plus attendre, je cède la parole aux deux coprésidents du comité, MM. Sébastien Proulx et Guillaume Rousseau. Merci.

M. Proulx (Sébastien) : Merci. Bonjour à toutes et à tous, M. le ministre de la Justice, M. le député adjoint parlementaire, chers élus présents, dignitaires, représentants des... médias, pardon, et bien sûr aux membres du comité.

Alors, c'est en mon nom personnel et en celui de chacun et chacune des membres de notre comité que j'ai le privilège de vous partager notre enthousiasme et notre fébrilité. M. le ministre, nous sommes heureux de vous déposer aujourd'hui formellement le rapport de notre comité. Nous tenons à vous exprimer de vive voix notre reconnaissance pour votre confiance et pour la liberté que vous nous avez octroyée dans le cadre de la réalisation de celui-ci. Le mandat était court et les travaux étaient... ont donc été intenses. Je remercie personnellement tous les membres du comité, notre secrétaire, Me Marie-Catherine Paré, l'équipe de soutien, sans oublier notre rédactrice, Mme Guylaine Boucher.

Depuis que le mandat nous a été confié le 7 juin dernier, nous avons beaucoup lu, nous avons discuté, nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises afin d'élaborer ce que nous avons appelé une nouvelle posture constitutionnelle. Cette posture et les 42 mesures que nous proposons dans notre rapport sont autant d'opportunités pour le Québec et les Québécois de se remettre en mouvement sur le plan de la recherche d'une plus grande autonomie et sur la défense de nos compétences, de nos intérêts collectifs et de ce que nous sommes, c'est-à-dire une nation distincte des autres États fédérés. Nation qui, on ne le rappelle pas assez souvent, ne s'est pas constituée avec l'avènement du Canada en tant que fédération. Les caractéristiques qui définissent la nation québécoise étaient présentes sur notre territoire bien avant la signature de la Constitution de 1867.

Nous proposons au gouvernement du Québec, aux élus de l'Assemblée nationale, de faire preuve d'audace et de courage. Nous sommes d'avis que les enjeux constitutionnels n'ont pas à être solutionnés tous ensemble lors d'un grand soir ou d'une procédure complexe hors de notre contrôle. Nous sommes d'avis que le Québec peut et doit agir lorsque c'est opportun et lorsqu'il le décide unilatéralement.

C'est pourquoi j'illustrerais notre posture de la façon suivante. Lorsqu'on peut agir seul, nous le faisons, lorsqu'on peut agir unilatéralement, nous proposons que le Québec initie une modification constitutionnelle qui devrait être ratifiée par le Parlement fédéral.

Cette posture, nous l'avons déclinée pour chacun des thèmes que nous avons abordés dans notre rapport. Pour chaque enjeu discuté, nous nous sommes intéressés aux façons d'agir unilatéralement d'abord, et nous avons défini le chemin ou les moyens à prendre. Mon collègue Guillaume, avec qui j'ai eu le plaisir de partager la coprésidence du comité, viendra d'ailleurs dans quelques instants de vous résumer les grandes propositions de notre rapport.

La vision proposée n'est ni caquiste, ni libérale, ni péquiste, ni solidaire, ni même conservatrice, mais elle est québécoise.

Je termine en faisant le souhait partagé par mes collègues du comité que les Québécois, les parlementaires, les titulaires de charges publiques entrevoient l'avenir constitutionnel du Québec avec un nouveau regard, qu'en lieu et place d'un attentisme dépassé ou de la réalisation de quelques gestes ponctuels, tous et toutes s'approprient dès maintenant et pour l'avenir les outils... les outils constitutionnels, pardon, actuels et ceux proposés dans notre rapport pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire des outils à utiliser pour acquérir davantage d'autonomie, défendre nos compétences et nos choix collectifs, renforcer nos spécificités et nos libertés. Merci.

M. Rousseau (Guillaume) : Alors, bonjour, tout le monde. Alors, je me joins à Sébastien pour dire à quel point ça a été un honneur, un plaisir de travailler avec toute l'équipe du comité sur les enjeux constitutionnels. Donc, le comité comme tel, mais vraiment l'équipe de soutien a été incroyable. Alors, merci beaucoup à tout le monde. Et ça a vraiment été un travail d'équipe. Un rapport d'une telle ampleur, d'une telle profondeur en quelques mois, forcément, ça prenait beaucoup de mains à la pâte, alors merci à tout le monde.

Sébastien vous résumait à l'instant la posture. Effectivement, on a une nouvelle posture, mais en plus de la posture, on a des recommandations précises qui sont en toute cohérence avec cette posture.

Alors, vous le savez, depuis plusieurs années au Québec, et avec une intensité particulière au cours des derniers mois, il est beaucoup question de l'adoption d'une constitution québécoise formelle, codifiée. Plusieurs mémoires déposés au Comité sur les enjeux conventionnels parlaient d'ailleurs de cette idée d'une constitution québécoise. Alors, nous vous annonçons que le Comité sur les enjeux constitutionnels recommande l'adoption d'une constitution québécoise et, en complément, la création d'un conseil constitutionnel, d'une commission parlementaire dédiée aux affaires constitutionnelles ou internationales et d'une citoyenneté québécoise.

Notre rapport propose aussi la création... ou plutôt l'adoption d'une loi-cadre sur la liberté constitutionnelle. Vous le savez, depuis 1867, j'ai envie de dire, il y a des ingérences du fédéral dans les compétences du Québec, alors que le Québec réclame non seulement le respect de ses compétences, mais il en veut encore plus de compétences. Alors, on se dit : Il est temps que tous les organismes publics, tous les ministères se mettent au service de la cause de la liberté conditionnelle du Québec. Alors, on propose une loi-cadre. Chaque organisme, chaque ministère va être appelé à adopter des plans d'action, à rendre des comptes pour que tout l'État québécois soit vraiment sur les rangs pour défendre la liberté conditionnelle du Québec. Donc, ça, c'est deux de nos gestes unilatéraux que l'on propose.

D'autre part, on propose des modifications constitutionnelles unilatérales. Donc, que le Québec seul décide de modifier la Constitution canadienne. Vous le savez, ça, c'est fait dans la loi n° 96 pour consacrer l'existence de la nation québécoise, de sa langue commune et officielle, le français. Ça a également été fait pour abolir l'obligation pour les députés de prêter serment au roi. Donc, c'est possible. On propose de poursuivre dans cette voie. Par exemple, on propose que le Québec, unilatéralement, décide d'inscrire dans la Constitution canadienne le principe du prolongement international des compétences québécoises, autrement dit, la doctrine Gérin-Lajoie. Donc, il y a plusieurs choses que le Québec peut faire unilatéralement, et on en... on a beaucoup d'idées dans ce sens-là, mais on reconnaît évidemment que, parfois, il y a des limites qui sont posées par la Constitution canadienne et que le Québec ne peut pas repousser unilatéralement.

Donc, on propose également un certain nombre de modifications bilatérales. Et là c'est important de comprendre bilatérale, et non pas multilatérale complexe. On ne propose pas une grande ronde constitutionnelle à la Meech, à la Charlottetown. Ce n'est pas ce qu'on propose. Nous, ce qu'on propose, c'est les modifications bilatérales qui requièrent seulement l'accord du Québec et du fédéral, comme ça s'est fait en 1997. Lors de la déconfessionnalisation des commissions scolaires, il y a eu une modification bilatérale et ça a fonctionné.

Donc, autrement dit, nous, on s'inspire de ce qui a fonctionné, des modifications unilatérales, bilatérales, et non pas de ce qui n'a pas fonctionné, les grandes rondes de négociations constitutionnelles avec des procédures de modification requérant l'unanimité des états fédérés, donc des provinces. Ce n'est pas ce qu'on a retenu comme solution. Et ce qu'on a découvert, ou du moins, ce qui a confirmé nos travaux, c'est que la procédure de modifications conventionnelles unilatérales, la procédure de modifications constitutionnelles bilatérales, elles ont de grands potentiels. Ensemble, elles ont un grand potentiel. Il y a beaucoup de réformes conditionnelles qu'on peut apporter pour agrandir la liberté conditionnelle du Québec, sans avoir demandé de permission aux autres provinces. Donc, c'est ce qu'on propose, et on a beaucoup d'idées dans ce sens-là, dans notre rapport. Donc, on a plein de modifications conditionnelles qu'on propose, mais elles peuvent toutes se faire par la voie unilatérale ou bilatérale, seulement Québec-Ottawa, comme en 1997.

Donc, notre rapport est à la fois audacieux mais réaliste. Et là s'ajoute à tout ça un paquet de recommandations précises en matière d'immigration, de culture, de relations internationales, de fédéralisme notamment. Bref, tout ce qui était dans le mandat, c'est couvert dans le rapport. Alors, M. le ministre, M. le député et l'ensemble des parlementaires, je pense qu'il y a beaucoup de travail qui vous attend. On en a eu dans les derniers mois. Maintenant, c'est à votre tour. Merci beaucoup.

La Modératrice : Merci beaucoup, M. Rousseau. J'inviterais M. Rousseau et M. Proulx à remettre le rapport officiellement à M. Jolin-Barette.

M. Proulx (Sébastien) : Oui, certainement.

Des voix : ...

La Modératrice : Attendez, on va prendre une autre photo, parce que les gens n'étaient pas très bien positionnés.

Des voix : ...

La Modératrice : Voilà.

(Interruption)

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, je pense qu'il faut...

La Modératrice : Il faut se rapprocher.

M. Jolin-Barrette : ...il faut se rapprocher, il faut se coller.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Alors, bonjour, tout le monde. Écoutez, vous me permettrez, dans un premier temps, de remercier les membres du Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la fédération canadienne, Mme Amélie Binette, M. Luc Godbout, Mme Catherine Mathieu, Mme Martine Tremblay, ainsi que les deux coprésidents du comité, M. Sébastien Proulx et M. Guillaume Rousseau. Un immense merci pour le travail que vous avez accompli au cours des derniers mois. Je le sais, que les délais étaient courts, mais le rapport que vous nous avez soumis est un rapport étoffé et je tiens à vous remercier grandement. Le député de Chapleau, Mathieu Lévêque et moi-même, on va analyser le tout.

Le Québec a été longtemps paralysé dans le débat opposant les partisans de la souveraineté et les partisans du statu quo. Prêt à tout pour ne pas nuire à leurs options fondamentales, chacun des deux camps a été incapable de concrétiser les avancées qui s'avéraient nécessaires pour le Québec. Or, il existe une troisième voie, celle qui permet à la nation québécoise d'avancer.

Depuis 2018, le Québec connaît une nouvelle impulsion nationaliste. C'est cette volonté d'affirmation renouvelée qui a permis notamment l'adoption de la Loi sur la laïcité de l'État après des années de débats, le renforcement historique de la Charte langue française avec la loi n° 96, la modification unilatérale de la Constitution canadienne pour y inscrire que les Québécoises et les Québécois forment une nation et que le français est la seule langue officielle du Québec et qu'il est la langue commune de la nation québécoise. Le Québec est déterminé à occuper tout l'espace qui lui revient au sein de la Fédération canadienne et à prendre tous les moyens nécessaires pour y parvenir.

C'est ce même élan qui nous a guidés vers le lancement, le 7 juin dernier, du Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels et la place du Québec au sein de la Fédération canadienne. Le mandat du comité était de recommander des mesures visant à protéger et à promouvoir les droits collectifs de la nation québécoise, à assurer le respect de son identité et de ses valeurs sociales distinctes, à garantir le respect des champs de compétence du Québec et à accroître son autonomie au sein de la Fédération canadienne.

Aujourd'hui, nous rendons public le contenu de cet important travail et nous remercions les membres du comité. Nous accueillons avec beaucoup d'enthousiasme le rapport du comité, un rapport étoffé de 42 recommandations. Au cours des prochaines semaines, nous analyserons avec sérieux les différentes recommandations du comité. Rappelons que celles-ci nous sont transmises alors que le contexte fédératif est de plus en plus teinté par un réflexe centralisateur de la part du gouvernement fédéral. L'ensemble des formations politiques représentées à l'Assemble nationale le reconnaissent, devant ces empiétements répétés dans nos champs de compétence, empiétements qui ternissent un peu plus chaque fois le pacte fédératif censé nous unir, nous devons agir, nous devons agir pour protéger nos domaines de compétence et notre autonomie. Nous devons agir pour défendre notre identité, nos valeurs et nos choix collectifs. Nous devons nous tenir debout pour les Québécoises et les Québécois. L'abdication n'est pas une option. Le Québec, c'est nous tous. Son avenir dépend de nous, et il n'appartient qu'à nous de prendre notre destin en main. Si le Québec échoue, nous échouons. Si le Québec progresse, nous progressons.

Afin d'assurer son devenir collectif, le Québec doit être en mesure de défendre lui-même son caractère distinct. La nation québécoise n'est jamais aussi gagnante que lorsqu'elle décide de prendre la place qui lui revient par elle-même et pour elle-même. Merci beaucoup.

La Modératrice : M. le ministre, on ne prendra pas de question, mais on va faire une déclaration courte en anglais.

M. Jolin-Barrette : Oui. So, first of all, I want to thank all the members of the constitutional committee that we mandate to give us that report. So, I received that report yesterday in the afternoon, and we are going to, in the next weeks, to take notice of what is in that report. But one thing is important for sure, so, there is a lot of interesting things in the document, and we will always take action for the competency of the Québec. And that's really important for the Québec nation to act on that subject. Merci beaucoup.

La Modératrice : Merci.

(Fin à 13 h 02)

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