(Dix heures trente-quatre minutes)
Le Modérateur : ...Linda
Caron, représentante de l'opposition officielle, M. Haroun Bouazzi,
représentant de Québec solidaire, et M. Joël Arseneau, représentant du Parti
québécois, ensuite, prendront la parole Mme Anabelle Grenon Fortin, du Groupe Moëlle
épinière Québec... et motricité Québec, Kevin McLean, des Invalides au front,
et M. Dominique Salgado, du Regroupement des activistes pour l'inclusion du
Québec. Alors, on est prêts à commencer.
Mme Caron : Alors, bonjour. J'étais
ici, le 20 septembre, avec la COPHAN et les Invalides au front. On
demandait au gouvernement de retirer son pourvoi contestant la décision, le
jugement du Tribunal administratif du Québec selon lequel l'article 120.1 de la
Loi sur le Régime de rentes du Québec porte atteinte au droit à l'égalité
fondée sur des déficiences physiques ou mentales. J'ai posé des questions en
Chambre à ce sujet, j'ai fait un débat de fin de séance avec le ministre du
Travail, en remplacement du ministre des Finances, rien n'y fait, la CAQ ne
bouge pas. Je reviens donc, aujourd'hui, avec mes collègues des deuxième et
troisième oppositions, en compagnie de MÉMO-Québec et des Invalides au front
aussi, quelques personnes sont ici, et de même que la COPHAN. Je redemande au
gouvernement de se conformer au jugement du TAQ, et j'invite les députés de la
CAQ à sortir de leur silence, et à se demander eux-mêmes pourquoi leur
gouvernement persiste à vouloir appauvrir les personnes invalides en coupant
leurs revenus de 18 % à 24 % à l'âge de 65 ans, en pleine crise du
logement et en pleine crise de perte du pouvoir d'achat. Est-ce que vous
attendez que ces personnes se retrouvent dans l'itinérance?
La CAQ vous répondra qu'elle a augmenté la
rente d'invalidité de 17 % à 19 %, mais détrompez-vous, ce n'est pas
une augmentation de la rente, c'est une diminution de la pénalité, qui était
jusqu'à 36 % l'an passé. Et, en 2022, avec son projet de loi n° 17,
sachant la cause devant les tribunaux, la CAQ s'est arrangée pour faire une
entourloupette plutôt cynique, qui aura des effets dévastateurs et péreins sur
les personnes invalides. La CAQ a modifié la loi de manière à obliger les
personnes invalides à faire un non-choix, en vigueur dès le 1er janvier 2024.
La CAQ leur donne ce choix : choix A, toucher uniquement la portion qui
est la rente d'invalidité uniforme de 558,71 $ par mois, et de vivre avec
ça de 60 à 64 ans; choix B, de prendre cette rente d'invalidité plus la rente
variable, selon ce qu'ils auront accumulé dans leur régime, et d'accepter, d'emblée,
d'avoir une pénalité à 65 ans, comme s'ils avaient choisi de prendre une
rente... une retraite anticipée, donc, comme maintenant. La différence, c'est
que ce sera moins évident que la pénalité porte atteinte au droit à l'égalité
sur la base d'une déficience physique ou mentale, parce qu'on n'invoquera plus
l'invalidité comme raison de la pénalité. On va plutôt invoquer un ajustement
basé sur l'âge. Autrement dit, on joue sur les mots, d'une manière, à mon sens,
assez cynique et cruelle, sans se soucier de la capacité de survivre des
personnes invalides. Alors, de grâce, donnez aux invalides les moyens de vivre
et de préserver leur dignité. Merci beaucoup.
M. Bouazzi : Merci. Je
voudrais rappeler déjà dans quel contexte on est pour les personnes aînées en
général. Le gouvernement a laissé tomber une bonne partie des personnes qui
vivent des grandes difficultés par rapport aux évictions, par exemple, qu'ils
vivent, par rapport aux soins à domicile, qui sont très déficitaires, par
rapport aux listes d'attente en CHSLD. Bref, il y a une liste très longue des
difficultés, et, aujourd'hui, nous sommes ici pour parler d'une des pires, et
je vous avouerai qu'en tant que député c'est, de loin, ce que j'ai entendu de
pire qui touche les aînés. C'est une injustice qui dure depuis 1997. C'est une
discrimination, et ce n'est pas Québec solidaire qui le dit aujourd'hui, ni le
Parti libéral, ni le PQ, mais c'est la commission des droits de la personne qui
l'a déclaré après des études.
On parle de personnes vulnérables, de
personnes qui ont eu toutes sortes de difficultés dans leur vie, des personnes
qui, arrivées à cet âge-là, ont encore plus besoin que d'autres de services, et
de ces maigres économies, et d'un RRQ plein et complet. C'est une injustice
totale. Le fonds, aujourd'hui, est en bonne santé. On ne parle pas de quantité
d'argent faramineuse. Il serait temps pour non seulement le respect de la
dignité des personnes invalides, mais aussi la dignité de tout le Québec au
complet. Par comment on traite nos aînés qui sont dans des situations les plus
difficiles dit beaucoup de choses sur nous.
Ça fait que notre demande, aujourd'hui,
est commune et claire vers le gouvernement de la CAQ : Élevez-nous là où
on devrait être, et arrêtons cette discrimination innommable, et passons juste
à autre chose. Ce n'est pas normal qu'on attende un quart de siècle pour régler
cette injustice. Les gouvernements sont passés les uns après les autres. On est
dus, aujourd'hui, pour le changement. Merci. Je passe la parole à M. Arseneau.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
Alors, je remercie mes deux collègues, Mme Caron, M. Bouazzi,
ainsi que tous les gens qui sont ici présents pour s'allier, pour lancer le
même message, un message qui a été porté, là, particulièrement depuis le 28 juillet
dernier, depuis, essentiellement, le jugement du Tribunal administratif du
Québec qui juge donc que la mesure, la pénalité qui est infligée aux aînés en
situation d'invalidité est discriminatoire. Il y a eu une mobilisation
importante avant, mais encore davantage depuis cette décision pour convaincre
le gouvernement de ne pas aller en appel et de modifier les articles du Régime
des rentes du Québec, pour pouvoir s'assurer d'un revenu décent pour les
personnes qui arrivent à l'âge de la retraite.
Il faut bien comprendre qu'à l'heure
actuelle on considère que les personnes qui sont reconnues en situation
d'invalidité sont considérées comme si elles prenaient une retraite anticipée à
60 ans, et c'est la raison pour laquelle on va leur prélever une partie de
leur rente à partir de 65 ans, c'était 36 %, maintenant, c'est
24 %. Ça demeure discriminatoire, ça demeure insensible, ça demeure
inacceptable.
Et moi, je voudrais dire que, si on est
réunis aujourd'hui, c'est parce qu'il y a l'occasion pour le gouvernement
d'agir, à l'occasion, donc, de la présentation de la mise à jour budgétaire de
la semaine prochaine, où on veut se dire sensibles à la situation difficile sur
le plan économique de nombreux Québécois qui font face à des hausses de prix ou
à des hausses du coût de la vie, et, parmi ces personnes les plus vulnérables,
il y a, évidemment, les personnes aînées, et encore davantage les personnes
aînées en situation d'invalidité.
Donc, n'allez pas croire qu'à l'heure
actuelle la raison pour laquelle le gouvernement n'agit pas, c'est une raison
financière. Le Régime des rentes du Québec est en bonne santé financière, sa
pérennité n'est, d'aucune façon, menacée. Ce n'est pas une question, non plus,
juridique, lorsqu'on vous dira : On ne peut pas vraiment se prononcer
parce que le dossier est judiciarisé. Il est judiciarisé parce que le
gouvernement décide de déposer son pourvoi.
C'est une question qui est éminemment
politique, et c'est une décision politique à laquelle on s'attend, de la part
du gouvernement de la CAQ, de faire preuve, donc, de bienveillance, de faire
preuve également de sensibilité pour la cause que tous les gens qui sont ici
réunis viennent défendre une fois de plus. Alors, je remercie, encore une fois,
les invités, et je passerais la parole à Mme Grenon, du MEMO.
Mme Grenon Fortin (Anabelle) : Bonjour.
Bonjour, merci beaucoup. Pour citer mon directeur général, M. Walter Zelaya, la
pénalité était discriminatoire il y a 11 ans, quand MEMO-Québec a levé le
drapeau pour signaler cette discrimination, elle l'a été après la modification
législative de 2022 et elle le sera toujours après les modifications qui
entreront en vigueur en 2024, les modifications, là, dont Mme Caron a si
bien... vous a si bien entretenu.
C'est une discrimination qui est limpide
pour les 28 000 personnes, que la rente... qui perçoivent des rentes
d'invalidité, mais je vous dirais que ces 28 000 personnes-là sont aussi les
arbres qui cache la forêt, parce qu'une invalidité, une rente invalidité est
obtenue à la suite d'une incapacité mentale ou physique grave et prolongée à
obtenir ou occuper un emploi rémunérateur. Ça, ça peut toucher tous les
députés, peu importe leur formation politique, ça peut toucher tous les
individus puis ça peut toucher la famille de tout le monde.
C'est donc un appel à tous que j'aimerais
lancer aujourd'hui, autant à l'Assemblée nationale qu'aux personnes à la
maison. On lance une... On a lancé, en fait, la semaine dernière, le
25 octobre, une pétition qui est disponible sur le site de l'Assemblée
nationale et aussi sur la page d'accueil du site Internet de MÉMO-Québec. C'est
une pétition qu'il faut signer en grand nombre, que vous soyez touchés
directement par cette pénalité-là ou pas. C'est un message fort qu'il faut
lancer au gouvernement, au gouvernement caquiste. C'est relativement
historique, là, dans ce dossier-là, qu'il y ait autant un consensus d'un point
de vue politique, communautaire et civil pour qu'il y ait l'abolition de cette
pénalité-là et l'abolition des modifications, là, de l'application de la
pénalité qui sera indirecte en 2024. Le gouvernement ne peut pas continuer
comme ça, ne peut pas espérer un prochain mandat, avoir l'assentiment de la
société civile en continuant d'appliquer cette pénalité discriminatoire là.
Donc, merci beaucoup. Puis je laisserais
la parole à M. Kevin McLean.
M. McLean (Kevin) : Merci,
Anabelle. Bonjour, je suis Kevin McLean. Je suis accompagné de Me Sophie
Mongeon. Nous sommes les co-porte-paroles des Invalides au front.
Je suis heureux, ce matin, un front commun
des oppositions, et un message clair à la CAQ, et un soutien inestimable pour
les Invalides au front. Les membres des Invalides au front ne comprennent pas
que le gouvernement ne revienne pas sur sa décision d'aller en appel du jugement
du TAQ. Pourtant, ils ont le pouvoir de le faire. Pour notre gouvernement et
les procureurs, ce sont des chiffres, mais, pour nos membres, les impacts au
quotidien sont très importants. Pour mon père, il recevait une rente de
1 160 $ mensuellement d'invalidité et, après sa rente de retraite
amputée, il recevait 670 $ mensuellement. Avec leur entêtement, ils
s'attaquent aux plus démunis de la société, tant par leur âge que leur
invalidité, et les appauvrissent. Pourquoi contester? Qu'avez-vous à gagner?
Comme société, le gouvernement doit
protéger les plus vulnérables tels que nos aînés invalides. Le stress,
l'insécurité, les décisions déchirantes que vivent les personnes lors de la
réception de la lettre qui les informe que cette pénalité... est inacceptable.
C'est une bataille qui dure depuis cinq ans, il est temps que ça cesse. Il faut
aider les gens qui, comme mon père, se sont retrouvés avec une prestation
réduite à 65 ans. Les invalides sont isolés, démunis, et désemparés, et
surtout sans voix. Respectez le jugement qui donne justice aux personnes en
situation d'invalidité. M. le premier ministre, M. Legault, je m'adresse autant
à votre bon sens politique que l'être que vous êtes et qui veut le bien-être
des Québécois. Il est encore temps de reculer et de montrer de la compassion.
Écoutez et prouvez une fois pour toutes que vous respectez ceux et celles qui
ont été les bâtisseurs du Québec, vos aînés. Les Invalides au front vous diront
merci.
Le Modérateur : Maintenant,
M. Dominique Salgado, du COPHAN.
M. Salgado (Dominique) : Bonjour
à tous, madame, monsieur. Je me nomme Dominique Salgado, je suis directeur
général du CAPVISH, Comité d'action des personnes vivant des situations de
handicap, et également membre de la COPHAN, qui est la Confédération des
organismes des personnes handicapées du Québec.
J'ai le mandat de dénoncer une fois de
plus, ce matin, les pénalités imposées par le Régime des rentes du Québec aux
personnes invalides, une dénonciation aussi que partage le RAPLIQ, dont les dirigeants
sont absents ce matin. En fait, le RRQ impose depuis trop longtemps des
pénalités illégitimes aux personnes invalides, une pratique qui mérite une
critique urgente. Et c'est la raison de notre présence aujourd'hui. Ces
pénalités, souvent appliquées sans discernement, ajoutent un fardeau financier
considérable aux individus déjà confrontés à des défis quotidiens.
Alors, les membres de la COPHAN et leurs
partenaires demandent ainsi le retrait total des pénalités de la rente
d'invalidité, qui sont complètement discriminatoires, rappelons-le. Les effets
pervers et limitatifs de la prise en compte du revenu du couple pour l'accès de
diverses prestations ou programmes destinés aux personnes en situation de
handicap sont aussi une autre source de discrimination. Au lieu de fournir un
filet de sécurité adéquat, le RRQ inflige des pénalités disproportionnées aux
personnes en situation d'invalidité, ce qui réduit leur allocation et compromet
également leur accès à des ressources vitales. Cette politique insensible
aggrave les difficultés des personnes déjà confrontées à des obstacles
physiques et financiers qui sont quand même très considérables.
Le Tribunal administratif du Québec avait
pourtant reconnu qu'il y avait une importante discrimination dans la forme
actuelle de la loi et l'application de ces règlements, mais le gouvernement
Legault a pris la honteuse décision d'aller en appel du jugement. Il est
impératif que les autorités reçoivent cette politique et reconnaissent...
revoient, en fait, cette politique et reconnaissent les besoins spécifiques des
personnes invalides. Les pénalités du Régime des rentes du Québec constituent
une injustice qui doit être corrigée pour garantir une protection sociale
équitable pour tous les citoyens.
En plus d'aller à l'encontre des droits de
la personne, ces pénalités iraient aussi à l'encontre de la Convention relative
aux droits des personnes handicapées édictée par l'ONU et risqueraient aussi
d'avoir une commotion à l'international. Cette pratique injuste soulève des
questions cruciales sur l'équité et la compassion au sein de notre système de
protection sociale. Il est temps d'agir maintenant pour mettre fin à ces
pénalités punitives et d'offrir un soutien adéquat aux personnes invalides pour
assurer évidemment leur bien-être et aussi, j'ose espérer, leur dignité. Merci
de votre attention.
Le Modérateur : Pour les
journalistes qui sont présents, on est prêt à prendre vos questions sur le
sujet du jour.
Journaliste : Juste une
précision. Je ne sais pas qui peut répondre parmi vous, là, mais quel
ministre... avec quel ministre avez-vous eu des échanges? Puis vous n'avez
perçu aucun signe d'ouverture, zéro, là?
Mme Caron : Bien, en fait, on
a eu des échanges avec le ministre des Finances durant les consultations
particulières sur le RRQ au mois de février. Moi, j'ai posé une question en
Chambre au ministre des Finances, j'ai fait un débat de fin de séance et c'est
le ministre du Travail qui est arrivé avec ses notes pour répondre. Alors, pour
ma part, je n'ai pas vu d'ouverture, alors que c'est quand même assez évident,
surtout dans le contexte présent où l'inflation est galopante, et puis la crise
du logement, et tout ça. Et je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas
d'ouverture à travailler de ce côté-là. Mais je ne répondrai pas pour mes
collègues, je vais les laisser s'il y a quelqu'un qui veut ajouter.
M. Arseneau : On avait
également offert, au début octobre, au gouvernement de voter en faveur d'une
motion à laquelle tous souscrivaient, les trois partis d'opposition, pour
justement retirer le pourvoi et modifier le Régime des rentes du Québec pour
éliminer cette pénalité, donc cette discrimination-là. Le gouvernement s'y est
refusé.
M. Bouazzi : En plus de tout
ce qui a été dit, j'ai personnellement eu des échanges avec M. Girard,
téléphoniques, juste après la décision de justice et avant que le gouvernement
décide de contester la décision, évidemment pour lui demander de ne pas
contester cette décision-là. Étant donné que le régime est en bonne santé, la
question, évidemment, reste, c'est : Pourquoi? Et, vous savez, en
politique, on doit faire des choix, et, clairement, le ministre des Finances a
peut-être envie de distribuer, si on veut, la marge de manœuvre ailleurs, peut
être chez les employeurs, probablement sur des questions de main-d'œuvre. Nous,
on ne pense pas qu'on a le luxe, pour des questions morales, éthiques et
politiques, de faire ces choix-là quand on voit l'injustice qu'on fait vivre, à
travers nos propres lois au Québec, aux personnes invalides.
Journaliste : Mais, en même
temps, ça fait plusieurs fois qu'ils disent que, pour la mise à jour
économique, ils vont faire en sorte que les clientèles plus vulnérables soient
épargnées. Donc, votre objectif aujourd'hui, c'est, à une semaine de cette mise
à jour là, de rappeler, finalement, que vous faites partie de cette
clientèle-là.
M. Bouazzi : C'est maintenant
qu'il faut agir. Effectivement, il y a eu une motion du Parti québécois, il y a
eu des questions du Parti libéral. On a eu beaucoup d'échanges en commission.
Quand il y a eu la Commission sur le RRQ, c'est le Parti libéral et Québec
solidaire qui ont imposé que, dans le rapport, on garde la partie qui touche
aux personnes invalides, car ce n'était pas la volonté du gouvernement. On le
remercie d'ailleurs d'avoir accepté de le garder. Dans le dernier discours de
M. Girard, la question du RRQ a été abordée, jamais sur la question des
invalides. Je veux dire, ce ne sera pas une surprise pour M. le ministre des Finances
qu'il est largement temps de corriger cette situation qui est absolument
inacceptable.
M. Arseneau : Moi, j'aimerais
juste laisser la parole à un ou... enfin, un représentant ou une représentante
des groupes ici présents pour illustrer à quel point les gens dont on parle
aujourd'hui, ce sont des gens qui, au départ, ont des moyens extrêmement
limités pour joindre les deux bouts jusqu'à l'âge de 60 ans, jusqu'à l'âge de
65 ans, et qu'est-ce que ça veut dire concrètement, la prestation qu'on leur
coupe, puis qu'est-ce que ça... comment on peut imaginer vivre ou survivre avec
ça.
Mme Mongeon (Sophie) : Donc,
mon nom, c'est Sophie Mongeon. Je suis l'avocate qui a plaidé le dossier devant
le Tribunal administratif du Québec avec d'autres procureurs, dont Me Julius
Grey, André Laporte et la Commission des droits des personnes. Donc, obtenir un
gain de cause au Tribunal administratif du Québec, c'est historique, donc ça
démontre à quel point cette discrimination-là était claire. Il y avait un avis
qui avait été rendu par la Commission des droits des personnes en 2017, déjà,
qui disait que c'était inacceptable qu'on laisse aller cette pénalité-là auprès
des gens démunis. Donc, en plus, on a gagné au Tribunal administratif du Québec
avec fierté, honnêteté.
Et là, maintenant, on est portés en appel,
alors que le Tribunal administratif du Québec est le tribunal spécialisé pour
rendre les décisions appropriées. Là, on est portés en appel devant la Cour
supérieure. Ensuite, c'est quoi qui nous attend? La Cour d'appel, la Cour
suprême? Vous pensez qui qui finance ces débats-là? C'est beaucoup de démarches
aussi puis beaucoup de procédures qui s'en viennent pour les gens qui sont
démunis financièrement, qui n'ont pas la santé et déjà sont dans des difficultés
financières importantes où ils se battent à tous les jours pour pouvoir se
payer les fournitures qui ne sont pas fournies par la Régie d'assurance maladie
du Québec ou auprès des assurances qui décident de ne pas payer l'entièreté de
toutes ces nécessités-là. Donc, en plus d'avoir gagné, là, on est obligés de
défendre notre point de vue à la Cour supérieure pour des gens qui n'ont pas de
sous. Qui qui qui va payer ça? Donc, en plus, cette façon-là de traiter les
gens invalides, ça fait en sorte qu'ils vont... on perdure encore l'inéquité
pour de nombreuses années.
C'est pour ça que je vous demande de vous
adhérer au groupe Les Invalides au Front, pour permettre que chaque personne
qui est toute seule, isolée à la maison, qui vit ces difficultés financières là
et personnelles, professionnelles, psychologiques... puissent se regrouper et
donner leur point de vue, comme qu'on fait aujourd'hui. Je remercie beaucoup
les partis politiques de mettre de côté leur allégeance pour le bien-être et la
bienveillance de tous ces gens-là, qui ont besoin de vous.
Donc, s'il vous plaît, M. le gouvernement
de la CAQ, arrêtez cette contestation-là, démontrez aux gens invalides que vous
tenez à eux, et c'est sûr que ça va être valorisant pour vous puis pour eux, et
ils vont donner davantage à la société québécoise. Merci.
Mme Grenon Fortin (Anabelle) : Excusez-moi.
Pour compléter ce qui a déjà été dit puis pour répondre à votre première
question, là, vous demandiez si on avait eu une ouverture quelconque, là, du gouvernement
ou d'un ministre en particulier. Il y a eu des... On a...En fait, on a abordé,
là, les interventions politiques qui avaient été faites. Les organismes
communautaires, dont MEMO Québec, font des représentations depuis plusieurs
années, là, dans ce dossier-là, on essaie de participer aux consultations sur
le Régime des rentes, là. Depuis les deux dernières consultations, qui se
donnent à peu près aux six ans, on a fait face à des refus pour participer à
chacune de ces consultations-là. Le gouvernement, clairement, sciemment, refuse
d'entendre les enjeux relatifs aux pénalités.
Puis les différents groupes qui sont ici
aujourd'hui, soit MEMO Québec, la COPHAN, le RAPLIQ, qui n'est pas présent,
puis les Invalides au front, ont eu la chance d'avoir une rencontre avec M. le
ministre Girard le 11 septembre dernier. Ça a été de la poudre aux yeux, si
vous voulez mon avis. À la fin de la rencontre, on a essayé d'avoir des
réponses claires sur l'impact que cette rencontre-là allait avoir, après une
heure d'explications, de mises en situation, d'illustrations de ce que ça fait
à des vraies personnes, des vrais êtres humains en situation d'invalidité, puis
le ministre nous a clairement fait comprendre qu'il était là pour nous
entendre, qu'il nous avait entendus, qu'il n'avait pas l'intention de faire
reculer son gouvernement, d'intervenir à l'Assemblée nationale ou de rapporter
ce qui avait été mentionné pour essayer, tu sais, d'avoir un impact quelconque,
là, dans cette pénalité-là, donc je... Puis, suite à ça, là, il y a eu une
réponse qui a été mise au feuilleton, là, de l'Assemblée nationale suite à une
question que M. Bouazzi avait posée, puis la conférence de... la rencontre du
11 septembre a été mentionnée. Donc, clairement, ça a été instrumentalisé, là,
cette rencontre-là, pour qu'il y ait apparence de consultation des groupes.
Donc, je vous dirais que tout le monde en
ce moment, là, fait tout ce qu'ils peuvent pour essayer de sensibiliser le
gouvernement, pour essayer de leur faire comprendre que ce... le recours qu'ils
sont en train de nous faire vivre, à tout le monde, là, en ce moment est
complètement absurde, c'est dû à l'acharnement judiciaire, puis on est face à
... il n'y a aucune ouverture, là, de leur côté, puis c'est complètement
incompréhensible. Merci beaucoup.
Journaliste : Bonjour.
Peut-être, Me Mongeon, comme précision : lors des audiences devant le TAQ,
quelles étaient les... de quelle façon le gouvernement justifiait, lors des
audiences, là, le maintien de la pénalité?
Mme Mongeon (Sophie) : Bien,
dans le fond, là, il indiquait... Bien, au départ, le législateur n'a jamais eu
l'intention de créer une pénalité pour les personnes qui demandaient une rente
d'invalidité. Ça a été mis en place en 1999, et puis, par la suite, l'objectif,
c'était pour assurer la pérennité du système. Donc, à ce moment-là, les fonds
étaient questionnables, à savoir s'il y en avait assez pour les générations
futures. Donc, c'est à ce moment-là que la pénalité a été mise en place.
Donc, ça a été un des arguments
principaux, à ce moment-là, du procureur général lors des audiences, comme
quoi, effectivement, à l'époque, ça avait été mis en place pour assurer les
finances à long terme.
Journaliste : ...encore une
question d'argent, là.
Mme Mongeon (Sophie) : Une
question d'argent aussi, puis qu'effectivement il n'y avait pas plus de
discrimination envers les gens handicapés que ceux qui décidaient de prendre
leur retraite volontairement. Donc, ça, ç'a été pas mal l'argument. Et,
évidemment, là, les commissaires... bien, les juges n'ont pas retenu tout ça.
Il n'y avait pas eu vraiment de preuve actuarielle qui avait été déposée, qui
disait qu'au contraire, si cette pénalité là était abolie, qu'il y aurait une
difficulté financière à long terme. Je pense qu'étant donné que cette preuve-là
n'a pas été soumise, à ce moment-là, il n'y avait plus lieu de maintenir cette
discrimination-là qui, peut être, avait eu à l'époque, peut être, une
nécessité, ce que je doute encore. Mais, bon, aujourd'hui, c'est clair qu'elle
n'est plus nécessaire, qu'elle devrait être abolie. Donc, la première étape,
c'est de l'abolir, et puis, par la suite, il y a plein de possibilités pour
permettre aux gens qui ont été pénalisés de retenir une petite compensation
sans mettre en danger les finances publiques. Faites-moi confiance.
Journaliste
: Merci.
Le Modérateur : Merci
beaucoup.
Mme Caron : Est-ce que je
peux ajouter qu'il y a une capitalisation, je crois, de 106 milliards dans
la caisse du RRQ et qu'on ne peut pas, de toute manière, faire subir... faire
porter le fardeau à 28 000 personnes invalides, le fardeau de la
caisse du RRQ, quand il y a plus de 4 millions de cotisants puis il y a
plus de 2 millions de personnes qui en profitent, là, qui retirent. On ne
peut pas demander à 28 000 invalides de soutenir ce fardeau-là pour
tous les autres au Québec, ça n'a absolument aucun sens.
Le Modérateur : Merci
beaucoup. C'est ce qui conclut ce point de presse.
(Fin à 11 h 01)