(Quatorze heures cinquante-trois minutes)
M. Derraji : Bonjour.
Écoutez, la réforme de l'immigration annoncée par M. François Legault
démontre une fois de plus le décalage entre son discours en campagne électorale
et celui qu'il tient encore, une fois élu. Au fait, ce François Legault est
prêt à dire n'importe quoi pendant la campagne électorale et dire le contraire
une fois élu, on le voit... on l'a vu, plutôt, lors de l'annonce du troisième
lien, maternelles quatre ans, là, maintenant, au niveau de l'immigration. Il
déclarait qu'il était suicidaire d'augmenter les seuils d'immigration pendant
la campagne électorale, quelques mois plus tard, on le voit faire le contraire
de ce qu'il a déclaré pendant la campagne électorale.
Autre chose. Aujourd'hui on assiste à un
recul majeur de la part du gouvernement caquiste par rapport à la réforme du
Programme de l'expérience québécoise. Aujourd'hui la ministre de l'Immigration
jette à la poubelle la réforme de son ex-collègue, M. Simon
Jolin-Barrette, qu'il a faite en 2019. Encore une fois, on voit le côté
brouillon et pas fiable de ce gouvernement. Je suis prêt à prendre vos
questions.
Journaliste : Pensez-vous qu'il
y a un bassin suffisant de potentiels immigrants francophones au Québec, M. Derraji,
pour atteindre les objectifs, là, que le gouvernement s'est fixé, là, dans
cette réforme?
M. Derraji : Je ne pense
pas. D'ailleurs, le gouvernement lui-même, à certains moments, il a ouvert la
porte aux francotropes. Moi, je pense que c'est une erreur grave, si on ne
regarde pas d'autres bassins, comme les bassins francotropes, il y a beaucoup
de gens. Une langue, ça s'apprend quand on vit au Québec, et nous avons
beaucoup d'exemples.
Le problème du gouvernement est le suivant :
les ressources en francisation ne sont pas là. Je vous donne un exemple. À
Québec, là où on est maintenant, ça prend au-delà de 34 jours pour
commencer un cours de francisation. Le taux d'abandon est énorme : à
Rouyn-Noranda, ça dépasse 40 %. Lors de l'étude du crédit, on l'a vu, avec
la ministre de l'Immigration, par rapport aux taux d'abandon, de décrochage,
que ce soit à temps partiel et à temps plein.
Journaliste : Francisation
Québec, pour l'instant, c'est un terme, c'est un slogan.
M. Derraji : C'est un
gros mystère.
Journaliste : Qu'est-ce que
vous vous attendez, de ce programme-là, ce nouveau programme là?
M. Derraji : Bien, mes
attentes sont très élevées parce que le système de la francisation maintenant
ne marche pas. Je viens de le mentionner, il y a un délai énorme avant que les
immigrants commencent leurs cours. C'est démontré maintenant que, même les
temporaires... Et je sais que M. Legault est habile au niveau politique, il
ne veut pas parler des temporaires, ça ne fait pas son affaire. Et, au niveau
des temporaires, la liste aussi est énorme. Il y a beaucoup de temporaires qui
aimeraient suivre des cours de francisation. Ils ne sont pas capables, parce qu'il
y a manque de profs, manque de places, et ça prend beaucoup de temps avant de
démarrer une classe. Donc, ça ne marche pas, au niveau de la francisation. Il
ne veut pas parler des travailleurs temporaires étrangers, mais il se contente
encore une fois de parler des seuils, sachant que ce même premier ministre
disait, pendant la campagne électorale : C'est suicidaire, augmenter les
seuils.
Journaliste : Mais là ça se rapproche
de ce que, vous, vous aviez proposé?
M. Derraji : Vous parlez
de la campagne électorale?
Journaliste : Au niveau des
seuils, parce qu'il me semble que, vous, c'étaient à peu près 70 000, là. Dans
leur cas, ils proposent 60 000, mais, avec les étudiants, ça pourrait
aller à 70 000, là.
M. Derraji : Ça pourrait
dépasser, parce que, si vous avez vu un des scénarios au niveau du PEQ, il n'y
a pas de limite, parce qu'ils sont déjà là sur le territoire.
Journaliste : Oui, c'est ça.
Mais, tu sais, si on y va avec une moyenne, autour de... tu sais, on nous
disait que, dans les dernières années, le plus haut chiffre qu'il y avait eu, c'était
8 000, à peu près, ce qui nous amènerait à 68 000, tu sais, disons 69 000,
70 000, donc c'était la cible que, vous, vous aviez envisagée, donc vous
ne trouvez pas qu'ils se rapprochent quand même de ce que vous aviez proposé?
M. Derraji : Ils se
rapprochent d'un portrait, mais oublient l'autre portrait. C'est pour cela, j'ai
déposé un projet de loi, pour avoir le portrait des travailleurs temporaires
étrangers.
Au fait, ce que M. Legault a
instauré, et, ça, on le voit maintenant depuis les cinq dernières années, c'est
tout le volet des travailleurs temporaires étrangers. La question qui se pose
aujourd'hui : Pourquoi M. François Legault refuse d'inclure le
portrait des travailleurs temporaires étrangers dans la planification
pluriannuelle? Ces personnes utilisent les mêmes services que les permanents :
logement, services publics, garderies, santé. Regardez ce qu'on vient de voir
dans les médias au niveau de Rimouski, où des étudiants n'arrivent pas à
trouver une place pour se loger et donc ils sont incapables de rejoindre leurs
cours. Donc, on ne peut pas lancer une planification pluriannuelle avec un faux
portrait, c'est une fausse planification.
Journaliste : Et, sur le
principe, au lieu de... vous critiquez les manques de ressources en
francisation, mais, sur le principe d'accueillir des gens qui parlent déjà le
français, et d'en accueillir plus qui parlent déjà le français, ça semble tenir
la route, théoriquement?
M. Derraji : Dans un
monde idéal, c'est parfait. On n'est pas les seuls à aller chercher des talents.
Ça, je pense, M. Legault, il l'oublie. Et encore une fois, regardez, les
exemples ne manquent pas au Québec. Si M. Legault voulait appliquer cette
mesure à l'époque où les parents de notre ex-collègue Carlos Leitão voulaient
venir au Québec, on n'aura pas vu... on ne va pas voir un Carlos Leitão au
Québec.
Donc, ce que je dis au gouvernement :
Encore une fois, pour ne pas dire n'importe quoi, pour ne pas faire une fausse
annonce et des slogans qu'on veut ramener des francophones, de permettre à des
francotropes, qui veulent venir et choisir le Québec, des cours faciles pour
apprendre, et, une langue, ça s'apprend, hein?, c'est les mesures qui manquent,
c'est la flexibilité.
Journaliste : Pour justifier
ça, M. Legault dit que les indicateurs pour le français sont dans le
rouge, que ça prend des mesures exceptionnelles. Est-ce que vous êtes d'accord
que les mesures sont dans le rouge et que ça prend une mesure exceptionnelle?
M. Derraji : Ça fait
cinq ans que, M. Legault, il est là, je pense qu'il parle de son bilan. Il
parle de son bilan, parce qu'au niveau de la francisation, lors de l'étude du
crédit, ça a été démontré : taux d'abandon, de décrochage très élevés, que
ça soit temps partiel ou temps complet.
Et on en revient à la question des
temporaires : Pourquoi on n'a pas misé sur des cours de francisation pour
les travailleurs temporaires? Ils veulent rester, pourquoi ne pas les
accompagner, pourquoi pas ne pas adapter les cours de francisation aux
temporaires?
Journaliste
: Merci.
M. Derraji : C'est bon?
Merci.
(Fin à 14 h 59)