(Huit heures vingt-huit minutes)
M. Nadeau-Dubois : Bonjour.
Content de vous retrouver ce matin. D'abord, quelques mots sur ce qu'on apprend
chez Radio-Canada ce matin. On apprend donc que le gouvernement du Québec s'est
directement ingéré dans une formation sur le racisme et qu'en fait le gouvernement
a mis fin à une formation parce qu'il n'aimait pas les mots qui étaient
utilisés dans la formation. C'est très contradictoire, pour un gouvernement qui
a fait adopter une loi sur la liberté académique, qui n'a pas arrêté de dire à
quel point la liberté académique, c'était important. Là, on a une intervention
politique qui vient mettre fin à une formation commandée à des chercheurs
universitaires parce que les mots dérangent les oreilles des élus de la CAQ. C'est
de l'ingérence politique, ça n'a pas sa place puis ça démontre toute la
contradiction du discours de la CAQ sur la liberté académique.
Mais permettez-moi aussi de faire un pas
de côté puis de dire que cette histoire-là, c'est une belle illustration de ce
qui arrive quand on centralise trop notre système de santé. Déjà, suite à la
réforme Barrette, ce qu'on voit, c'est des CIUSSS qui n'ont même pas assez d'autonomie
pour faire de la formation de leurs employés et qui sont à la merci d'interventions
politiques en haut lieu, parce que les patrons à Québec n'aiment pas les mots
qui vont être dans une formation pour le personnel. C'est ça que ça donne quand
on centralise trop le système de santé.
Vous comprendrez que notre crainte et la
crainte de bien des gens, aujourd'hui, c'est qu'en centralisant encore
davantage le système avec la réforme Dubé on voie encore plus de ces
situations-là se produire. Déjà, l'histoire d'aujourd'hui révèle le très faible
niveau d'autonomie locale, le très faible niveau d'autonomie régionale dans
notre système de santé, et là on a sous les yeux une réforme qui va centraliser
encore davantage et qui va enlever le peu d'autonomie locale et régionale qu'il
y avait encore dans notre système de santé.
Ça fait que des histoires comme ça, ça
montre à quel point notre système de santé est déjà trop centralisé et qu'il
faudrait le décentraliser davantage plutôt que faire, comme souhaite le faire
Christian Dubé, une autre réforme de centralisation. Donc, la crainte que j'ai
ce matin, c'est que la réforme Dubé donne lieu à encore plus de ces
situations-là où des directives partent en haut lieu, de Québec, et sont
appliquées directement sur le terrain, en manquant de respect pour l'autonomie
locale et régionale des institutions de santé.
Je veux aussi vous parler, ce matin, d'une
motion qu'on va déposer. Vous avez... en fait, tout le monde a été surpris, la
semaine passée, de voir plus de 1 000 experts du domaine de l'intelligence
artificielle appeler à une grande pause pour réfléchir à la manière de bien
encadrer les nouvelles technologies d'intelligence artificielle à travers le
monde. Et le Québec ne fait pas exception. Vous savez que mon collègue, Haroun
Bouazzi, a déjà tendu la main aux autres partis pour demander qu'on organise
une commission parlementaire sur l'intelligence artificielle au Québec. Nos
lois ont été écrites à une époque où ces technologies-là n'existaient pas. Il
faut moderniser le cadre législatif au Québec pour mieux réguler ces
pratiques-là.
Ce matin, on va déposer une motion pour
aller chercher un consensus de l'Assemblée nationale quant à la nécessité de
tenir cette commission-là rapidement. On souhaite que la commission débute ses
travaux avant la fin de la présente session parlementaire. On veut répondre à l'appel
des experts, répondre à l'appel de l'industrie. Ces gens-là sont ceux qui
connaissent le mieux ces technologies-là et ces gens-là nous disent : Wo!
Minute, il faut prendre le temps de réfléchir et d'encadrer ces pratiques-là.
Je pense qu'on a une responsabilité, comme législateurs, de répondre à leur
appel. C'est ce qu'on va faire ce matin à Québec solidaire.
Une voix : ...
M. Nadeau-Dubois : Je vais
laisser la parole à mon collègue, puis on prendra vos questions par la suite,
avec plaisir.
M. Marissal : Oui. Bien,
merci, Gabriel. Vous savez, le projet de loi n° 15, qu'on peut appeler,
là, dorénavant, la réforme Dubé, c'est un immense morceau, hein, c'est un
immense magasin dans lequel il y a énormément de rayons, là, puis, des fois, en
bougeant un peu certaines choses, on trouve d'autres affaires. On n'a pas fini
d'en trouver.
Là, ce matin, je voudrais vous parler plus
particulièrement de notre inquiétude quant à l'avenir des CLSC. Il est écrit,
textuellement, puis quand on regarde les fiches explicatives du gouvernement,
que les CLSC vont perdre leur mission. Si vous n'avez pas de mission dans une
organisation, dans un organigramme gouvernemental, aussi bien dire que vous n'existez
plus, vous ne servez à rien, vous ne recevez d'ordre de personne, vous êtes donc
obsolète et inopérant, dans les faits. Ça m'étonne beaucoup parce que, déjà que
les CLSC ont été mis à mal, au Québec, là, depuis une trentaine d'années,
notamment par le corporatisme médical, mais aussi par l'acharnement des
gouvernements successifs qui ont décidé que les CLSC, ce n'est pas bon, ils n'en
veulent pas, ce n'est pas ça qu'on veut, alors que, pourtant, ça fait
exactement ce que le ministre Dubé cherche : le bon service au bon endroit,
par la bonne personne, avec accessibilité locale et communautaire... Ça fait
que là-dessus, au moins, Christian Dubé puis moi, on s'entend, là, on veut ça,
tout le monde veut ça, au Québec. Puis ça, ça s'appelle un CLSC.
Alors, pour une raison, plusieurs raisons
que je n'expliquerai pas ici ce matin, ce serait trop long, les CLSC se sont
fait torpiller de toutes parts depuis des années, et là ce qui en reste...
quand on regarde le projet de loi de M. Dubé, il veut mettre le clou, le
dernier clou dans le cercueil des CLSC. Pourtant, pourtant, les CLSC, ils ont leur
importance, ce qui en reste. Moi, j'ai fait une tournée, comme je vous l'ai dit
souvent, au Québec. Enlevez, par exemple, le CLSC, là, de Fort-Coulonge, dans le
Pontiac, là, vous laissez un immense trou de services de première ligne à toute
une population qui est déjà mal servie. Même chose dans certains coins de
Montréal, où les CLSC, d'ailleurs, étaient donnés en exemple comme quelque
chose qui fonctionne bien par M. Dubé l'an dernier dans son plan.
Alors, moi, je vais poser des questions.
On va faire la motion du mercredi, aujourd'hui, là-dessus, précisément, parce
que c'est un pan important, puis je voudrais m'assurer que M. Dubé ne mette pas
le dernier clou dans le cercueil, qu'il garde au moins ce qu'on a avec les
CLSC, parce que, sinon, là, c'est au communautaire, c'est à la communauté... c'est
les communautés locales qui seront attaquées directement par le projet de loi
n° 15, qui va mettre la hache là-dedans. Alors, ce sera l'objet de notre
motion du mercredi. Je tends la main aux autres partis. Nous sommes tous des
députés, nous avons tous des localités, des groupes communautaires, des
communautés, dans nos circonscriptions, je demande à mes collègues d'appuyer la
motion que je vais déposer et débattre aujourd'hui, justement pour le bien-être
de la population, localement.
M. Laforest (Alain) : M.
Nadeau-Dubois, est-ce que le gouvernement du Québec doit s'excuser à Jean
Charest?
M. Nadeau-Dubois : On a créé
l'UPAC, à l'époque, pour attraper les bandits et pour remettre de l'argent dans
les coffres de l'État, puis finalement on n'a pas attrapé grand monde, puis on
remet de l'argent dans les poches de Jean Charest. Je comprends le monde d'être
frustré par le travail de l'UPAC. Je partage leur frustration. C'est
regrettable qu'on en soit rendu là. S'il y a des excuses qui doivent être
faites, c'est à l'ensemble de la population québécoise, pour ne pas avoir livré
la marchandise dans la lutte à la corruption. C'est très décevant pour tous les
gens qui espéraient qu'on... que les gens qui sont... qui étaient en poste de
responsabilités pendant les pires années des moeurs politiques québécoises
récentes, là, bien, que ces gens-là rendent des comptes à la population.
M. Lacroix (Louis) : Vous
pensez que M. Charest ne mérite pas ces 385 000 $ là?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
écoutez, le jugement a été rendu, on est dans un État de droit, ça fait que
moi, je...
M. Lacroix (Louis) : Non,
mais vous dites ça avec dépit, là.
M. Nadeau-Dubois : Bien, avec
dépit, j'espère, Seigneur!
M. Lacroix (Louis) : Vous
dites : On n'a pas arrêté grand-monde puis on met de l'argent dans les
poches de Jean Charest.
M. Nadeau-Dubois : Bien oui. Bien,
j'espère.
M. Lacroix (Louis) : Qu'est-ce
que ça implique, ça?
M. Nadeau-Dubois : Bien, ça
implique que... ce que je veux... je veux dire, qui n'est pas dépité, ce matin,
de voir qu'on a... on s'est donné une institution au Québec dont la mission,
c'était d'attraper les corrompus et, rappelons-nous, d'aller chercher l'argent
que les Québécois, que les Québécoises ont perdu dans les scandales de
corruption pour le ramener dans notre caisse commune, dans les coffres de
l'État. Et là, plusieurs années plus tard, à cause d'une série de
dysfonctionnements puis d'incompétences à l'UPAC, on se retrouve avec, d'abord,
très peu de gens qui ont été attrapés, et on est obligé de donner de l'argent
public à Jean Charest.
Je veux dire, comment ne pas y voir un
gâchis total sur le plan de la lutte à la corruption au Québec? Ce n'est pas ça
qu'on voulait. Pensez-vous qu'on a créé l'UPAC en se disant : Eh! On va
créer l'UPAC pour faire un chèque de 400 000 $ à Jean Charest? Non.
Quand on a créé l'UPAC, on voulait faire un chèque aux Québécois, Québécoises
pour les rembourser de s'être fait avoir par un système de corruption pendant
des années au Québec. C'était pour ça qu'on a créé l'UPAC. Donc, c'est
regrettable, c'est un gâchis.
M. Lacroix (Louis) : Donc, ce
qui s'est passé, c'est... Ce que vous regrettez, c'est que l'UPAC n'a pas été
capable de prouver que M. Charest est un corrompu?
M. Nadeau-Dubois : Bien, ce
que je regrette, c'est que l'UPAC n'a pas été à la hauteur de sa mission. Et ce
n'est pas la première déception, là, dans le cas de l'UPAC, c'est le moins
qu'on puisse dire. Moi, je pense qu'une énorme question se pose quant à
l'avenir de l'UPAC. Est-ce que c'est encore le bon moyen, est-ce que c'est
encore le bon outil pour lutter contre la corruption au Québec? Je pose la
question. Je reconnais que je n'ai pas la réponse définitive à cette
question-là, mais je fais partie des Québécois, des Québécoises qui se disent :
Comment en est-on arrivé là?
M. Gagnon (Marc-André) : Donc,
le Parti libéral et Jean Charest, pour Québec solidaire, même à la lumière de
ce jugement-là, ne sont blanchis de rien?
M. Nadeau-Dubois : Bien, le
rapport de la commission Charbonneau était clair : il y a eu, au moment où
Jean Charest gouvernait le Québec, un système qui était corrompu sur le plan du
financement des partis politiques. Ce n'est pas mon opinion, c'est la
conclusion du rapport de la commission Charbonneau. Les Québécois n'ont pas
oublié ça.
M. Robillard (Alexandre) : M. Tanguay,
il disait que la marque libérale a été ternie par les fuites puis tout ce qui a
circulé autour de ça. Donc, Est-ce que vous êtes d'accord avec lui?
M. Nadeau-Dubois : Ce qui a
terni la marque libérale, c'est les moeurs politiques du Parti libéral, c'est
sa manière de faire de la politique, c'est les multiples scandales de
corruption qui ont éclaté pendant que ce parti-là gouvernait le Québec. C'est
ça qui a fait mal à la marque libérale. Ce qui a fait mal à la marque libérale,
c'est l'obstination de ce premier ministre, Jean Charest, et de son
gouvernement pendant des années à ne pas déclencher d'enquête publique sur la
corruption au Québec. Ça, ça a fait mal. Est-ce que les fuites... Je comprends
que M. Tanguay trouve que les fuites n'ont pas aidé, c'est vrai, mais, je
veux dire, rappelons-nous, là, tout ça, c'est une histoire qui a commencé il y
a à peu près 15 ans, où les scandales de corruption se sont mis à éclater
les uns après les autres.
M. Robillard (Alexandre) : Est-ce
que les fuites ont contribué à un dommage excessif pour le Parti libéral du
Québec?
M. Nadeau-Dubois : Je vais
laisser les élus libéraux évaluer les dommages sur leur marque politique, là.
Moi, ce que je sais, c'est que, pour les Québécois, pour les Québécoises, ce
qui a fait mal, d'abord et avant tout, c'est les pratiques, c'est les scandales
de corruption qui ont été mis au jour sous les années libérales. C'est d'abord
ça qui a fait mal au Parti libéral.
M. Lecavalier (Charles) : M. Tanguay
souhaite que les bandits qui ont fait les fuites se retrouvent en prison. Êtes-vous
d'accord avec lui?
M. Nadeau-Dubois : Oui.
M. Lecavalier (Charles) : Pourquoi?
M. Nadeau-Dubois : Parce
qu'il n'y a pas de corruption, il n'y a pas de système de corruption sans
individu corrompu. Un système, ça ne flotte pas dans les airs, ça s'incarne
dans des individus. Il y avait des gens au courant de ces pratiques-là, il y
avait des gens qui organisaient ce système-là. Le rôle de l'UPAC, c'était de
les trouver, de les accuser puis de leur faire rendre des comptes à la
population québécoise. Ce mandat-là, l'UPAC ne l'a pas vraiment accompli. Il y
a eu quelques arrestations, c'est vrai, au niveau municipal, il faut le
concéder, mais au niveau québécois...
M. Laforest (Alain) : ...
M. Nadeau-Dubois : Oui, mais
j'y arrive.
M. Laforest (Alain) : Ceux
qui ont les fuites, est-ce que ce sont des corrompus? Ceux qui ont fait les
fuites, là?
M. Nadeau-Dubois : Ah! je ne
saisissais pas que la question... Les bandits, c'est les gens qui ont fait des
fuites?
Une voix : ...
M. Nadeau-Dubois : Bien, s'il
y a des gens qui ont contrevenu à la loi en faisant volontairement des fuites
aux médias, ces gens-là doivent être tenus responsables. Ça, il n'y a pas de
nuance là-dessus. Mais je constate que M. Tanguay est très, très, très fâché
contre les gens qui ont fait des fuites, et je le comprends, moi, je suis aussi
fâché. Je suis également fâché contre les gens qui sont responsables... qui ont
été responsables de la corruption au Québec pendant des années. Je pense qu'il
faut être fâché contre les deux, disons ça comme ça.
M. Lacroix (Louis) : Alors,
est-ce que vous pensez que M. Charest était au courant de ça? Est-ce que vous
pensez... Vous dites qu'il y avait des gens qui organisaient ça, donc vous
sous-entendez qu'il y a des gens qui étaient au courant de ce qui se passait?
M. Nadeau-Dubois : Bien là...
M. Lacroix (Louis) : À votre
avis, est-ce que M. Charest était au courant de ce système de corruption là?
M. Nadeau-Dubois : Est-ce
qu'il y a quelqu'un au Québec...
M. Lacroix (Louis) : Sans
l'avoir organisé, est-ce que vous pensez qu'il était au courant?
M. Nadeau-Dubois : Oui, oui,
mais est-ce qu'il y a quelqu'un au Québec qui pense, après avoir relu le
rapport de la commission Charbonneau, qu'il y avait plein de corruption mais
qu'il n'y avait personne qui ne savait rien? Je veux dire, ce n'est pas
sérieux. Qu'est-ce que savait exactement M. Charest? Je ne le sais pas, je ne
suis pas enquêteur, dans la vie, mais il y avait, au Québec, pendant qu'il
gouvernait le Québec, des problèmes de corruption systémique. Il y avait, au
Parti libéral, pendant que M. Charest gouvernait le Parti libéral, des
problèmes de corruption. Qu'est-ce que lui savait, personnellement, moi, je ne
suis pas enquêteur, mais, à un moment donné, le gros bon sens a ses droits.
Tout le monde au Québec est d'accord, bien, peut-être à part les libéraux
eux-mêmes, là, mais, je veux dire... qu'il y a des gens qui savaient ce qui se
passait, voyons donc!
M. Gagnon (Marc-André) : ...simple,
Jean Charest...
M. Nadeau-Dubois : Il n'y
avait pas de la corruption, mais c'était de la corruption spirituelle puis
c'étaient des... Je veux dire, il y avait des gens en chair et en os qui
avaient des pratiques problématiques.
M. Gagnon (Marc-André) : Donc,
Jean Charest ne mérite pas d'excuses ni de la part de l'UPAC ni de la part du
gouvernement?
M. Nadeau-Dubois : Mais si...
Bien, d'abord, le jugement a été rendu. Moi, je ne conteste pas la validité du
jugement. Il doit être respecté, il doit être appliqué. Si l'UPAC veut
s'excuser pour les fuites, qu'ils le fassent. Qu'ils ne s'excusent pas juste à
Jean Charest, qu'ils s'excusent aux Québécois, Québécoises qui voulaient que
l'UPAC... qu'ils s'excusent, que l'UPAC s'excuse aux Québécois, Québécoises
pour avoir échoué à accomplir sa mission.
M. Gagnon (Marc-André) : Ma
question, c'est : Est-ce que Jean Charest, l'ancien premier ministre du
Québec, l'ancien chef du Parti libéral, mérite des excuses?
M. Nadeau-Dubois : M. Charest
a gagné sa cause. Il va recevoir un chèque d'à peu près 400 000 $
d'argent public. Si l'UPAC veut rajouter des excuses, qu'ils le fassent. Moi,
j'aimerais ça, entendre des excuses de la part des libéraux pour la corruption
qu'ils ont faite au Québec. C'est parce que moi, là... M. Charest, il a gagné
sa cause. Moi, ce que je vois, c'est un jugement qui a été rendu. Moi, je pense
que M. Charest a gagné sa cause devant les tribunaux. Il va recevoir un chèque
de 400 000 $. Il a gagné sa cause.
M. Desrosiers (Sébastien) : ...Québec
devrait aller en appel, selon vous?
M. Nadeau-Dubois : Je n'ai
pas pris connaissance du jugement. Je ne suis pas qualifié pour juridiquement
trancher cette question-là, mais moi, comme citoyen, je partage le sentiment de
bien des citoyens aujourd'hui qui se disent : Comment on en est arrivé là?
M. Gagnon (Marc-André) : Mais
est-ce que vous êtes conscient, quand même, du fait que, si l'UPAC s'était
excusée, les contribuables auraient économisé 400 000 $?
M. Nadeau-Dubois : Je ne
comprends pas la prémisse de votre question.
M. Gagnon (Marc-André) : M.
Charest, au départ, au début des procédures, demandait des excuses.
M. Nadeau-Dubois : Bien, je
vais vous dire, si l'UPAC avait bien fait son travail, ils n'auraient pas eu
besoin de s'excuser ni de signer un chèque de 400 000 $. Puis, pour
moi, c'est ça, la question fondamentale, ce matin : Qu'est-ce qu'on fait
avec l'UPAC? Devant cette succession de gâchis, qu'est-ce qu'on fait avec l'UPAC?
Parce que, bien sûr, s'ils s'étaient excusés, ça n'aurait pas coûté 400 000 $,
mais, s'il n'y avait pas eu de fuite, s'ils avaient fait leur travail, si ça
n'avait pas été incompétence par-dessus incompétence pendant des années, à
l'UPAC, il n'y aurait eu ni excuses ni chèque de 400 000 $. La
question, ce matin, c'est celle-là : Qu'est-ce qu'on fait avec l'UPAC? Je
n'ai aucune prétention d'avoir la réponse définitive à ça, mais les Québécois,
les Québécoises voient ça ce matin puis ils se disent : Comment c'est
possible qu'on signe un chèque de 400 000 $, alors que la job de...
alors que le travail de l'UPAC, c'était le contraire, c'était de mettre de
l'argent dans les coffres de l'État québécois?
M. Gagnon (Marc-André) : Est-ce
que les responsables des fuites, c'est des bandits?
M. Nadeau-Dubois : Bien, si
les gens ont brisé des lois, si les lois sont... si c'est des lois criminelles,
oui, c'est des criminels. On peut appeler ça des bandits si on veut. S'il y a
des gens, à l'UPAC, qui ont brisé des lois, ils doivent être tenus
responsables. On peut mettre le qualificatif qu'on veut, bandits, criminels, si
c'est illégal, c'est illégal, puis les gens doivent respecter la loi, surtout
au sein même des corps de police. Je veux dire, il ne s'agit aucunement
d'excuser ou de minimiser des infractions à la loi si elles ont été commises,
surtout que les principales victimes de ces incompétences-là, c'est qui, bien,
c'est les Québécois, Québécoises, eux-mêmes, qui pensaient qu'ils obtiendraient
justice à travers l'UPAC puis qui, aujourd'hui, se rendent compte que leur
argent va être utilisé pour signer un chèque de 400 000 $ à Jean
Charest.
M. Robillard (Alexandre) : Pour
quelle raison, selon vous, ces fuites-là se sont produites?
M. Nadeau-Dubois : C'est une
bonne question. Je ne le sais pas, je ne veux pas spéculer, mais c'est un
gâchis total.
Mme Plante (Caroline) : Est-ce
que le gouvernement doit s'excuser? Est-ce que Mme Guilbault doit s'excuser à
Jean Charest?
M. Nadeau-Dubois : Pour... à
cause du livre, là?
Mme Plante (Caroline) : Oui.
Et puis le gouvernement en général. Est-ce que le gouvernement doit s'excuser?
M. Nadeau-Dubois : Je ne vois
pas pourquoi le gouvernement actuel s'excuserait, non.
Mme Lajoie (Geneviève) : M.
Khadir, à l'époque, disait que Jean Charest était le suspect numéro un. Est-ce
que vous estimez que c'est encore le suspect numéro un, qu'on n'a pas eu,
finalement, ce qu'on aurait dû savoir au terme de cette enquête-là?
M. Nadeau-Dubois : Mon collègue,
Amir, parlait du suspect numéro un, puis je pense que bien du monde au Québec
était d'accord que M. Charest était suspecté de bien des choses, et, oui,
c'était le suspect numéro un.
M. Bossé (Olivier) : Pour
vous, c'est la fin de l'UPAC? Ça sonne la fin de l'UPAC?
M. Nadeau-Dubois : Je ne sais
pas si c'est la fin. J'espère, en tout cas, que c'est le début d'une réflexion
sérieuse, à savoir : Qu'est-ce qu'on fait avec cette institution-là? Parce
qu'il faut le reconnaître, là, le symbole, il est fort, là, le symbole est
fort. On s'est donné une institution qui était censée ramener de l'argent dans
les coffres de l'État, puis cette institution-là, à cause de... et c'est sa
faute, à cause de son gâchis, nous met dans une situation où il va falloir
signer un chèque à Jean Charest.
M. Laforest (Alain) : ...malgré
le fait que ce soit un corps de police indépendant, malgré qu'on a changé la
direction, les gestionnaires, Robert Lafrenière n'est plus là, pour vous, ça
n'a plus sa raison d'être? Parce que c'est ce que j'entends, là.
M. Nadeau-Dubois : C'est une
nuance importante, là, que vous faites, c'est-à-dire que les ratés en question
datent de la précédente direction de l'UPAC. Ce n'est pas des ratés qui se sont
produits sous l'actuelle direction. Mais je pense, puis je ne pense pas être le
seul, que le débat doit avoir lieu. Qu'est-ce qu'on fait avec l'UPAC? Je ne
sonne pas, ce matin, le glas de l'UPAC, je ne dis pas qu'on doit l'abolir, je
pose la question : Qu'est-ce qu'on devrait faire collectivement avec ça?
Parce que, franchement, c'est frustrant pour les Québécois, Québécoises de voir
des affaires comme ça.
M. Lecavalier (Charles) : Sur
la Davie, êtes-vous à l'aise que le gouvernement du Québec donne 520 millions
d'aide publique à la Davie, alors que la société de contrôle de l'entreprise
est dans un paradis fiscal?
M. Nadeau-Dubois : Pouvez-vous
répéter votre question?
M. Lecavalier (Charles) : Le
gouvernement, hier, du Québec a annoncé une aide publique de 520 millions
au chantier maritime Davie. La société de contrôle de l'entreprise se trouve
aux îles Guernesey, dans un paradis fiscal. Pour vous, est-ce que le
gouvernement du Québec devrait donner des aides publiques à des entreprises
dont les sociétés de contrôle sont...
M. Nadeau-Dubois : Bien,
notre position générale sur ces questions-là, c'est que l'État du Québec
devrait être exemplaire. Quand il investit dans des sociétés, il devrait
s'assurer que ces sociétés-là sont elles-mêmes responsables sur le plan fiscal.
Pour ce qui est de la question spécifique du chantier Davie, vous me
l'apprenez, on va regarder ça puis on va vous revenir.
M. Gagnon (Marc-André) : ...spécificité,
là, quand même, là-dessus, c'est que l'argent va être injecté dans une société
en commandite, Davie Infrastructure, qui a été créée spécialement pour
l'occasion. Donc, peut-être que ceci explique cela, là.
M. Nadeau-Dubois : On va
regarder ça puis on va vous revenir là-dessus.
M. Denis (Maxime) : ...des
barrages, lorsque Pierre Fitzgibbon et M. Legault parlaient de barrages. Là,
Hydro-Québec fait une étude sur la question à Tête-à-la-Baleine. Est-ce que
vous appuyez l'idée?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
nous, notre position sur les nouveaux barrages, elle est très simple, hein,
c'est-à-dire que nous, on n'a pas d'opposition de principe à des nouveaux
barrages au Québec. Ce qu'on pense, c'est que le fardeau de la preuve repose
sur les épaules du gouvernement. C'est eux qui doivent faire la démonstration
que ces barrages-là sont pertinents et nécessaires pour l'avenir énergétique du
Québec. Et cette démonstration-là, elle, n'a pas été faite. Il n'y en a pas, de
plan à long terme pour l'avenir énergétique du Québec. On a une cascade de
décisions individuelles et on a l'impression spontanée de Pierre Fitzgibbon. Nous,
on n'a pas d'opposition, en théorie, à des nouveaux barrages, mais le
gouvernement doit faire la démonstration que c'est nécessaire, que c'est
pertinent et que ça s'inscrit dans une vision à long terme. Cette
démonstration-là n'a pas été faite.
M. Laforest (Alain) : ...dans
le plan stratégique qu'on regarde la possibilité d'avoir de nouveaux barrages.
M. Nadeau-Dubois : Oui, mais
le plan stratégique a été rédigé et présidé par Mme Brochu, qui vient de s'en
aller, et tout le monde se demande si ce n'est pas justement à cause d'un
désaccord sur la mission et l'avenir d'Hydro-Québec. Il nous faut un BAPE
générique, c'est ce que demande tout le monde, pour planifier l'avenir énergétique
du Québec, pour refaire cet exercice-là et voir qu'est-ce qui est réellement
nécessaire ou pas. Puis nous, en campagne électorale, déjà, on le disait :
Pas d'opposition à Québec solidaire, par principe, à des nouveaux barrages,
mais pas n'importe comment, et c'est au gouvernement à faire l'exercice de nous
démontrer que c'est nécessaire.
M. Laforest (Alain) : Êtes-vous
d'accord avec l'augmentation de la capacité éolienne, l'augmentation de
capacité des barrages? On dit qu'on va manquer d'électricité.
M. Nadeau-Dubois : On a
besoin de plus d'électricité, au Québec, pour atteindre nos objectifs de lutte
aux changements climatiques, personne de raisonnable ne conteste ça, mais il y
a plusieurs manières de générer plus d'électricité. La première manière, c'est
d'en dépenser moins, de faire de l'efficacité énergétique. Il y a un potentiel
éolien à développer. Il y a un potentiel solaire — timide, mais quand
même — qui existe au Québec. Il y a plein... il y a des technologies
de stockage d'énergie également qu'on peut développer. Il y en a, des solutions
pour se libérer des capacités électriques, pour électrifier la société
québécoise, mais de deux choses l'une : d'abord, il faut un plan général,
un plan global, ce que le gouvernement du Québec n'a pas, puis, deuxièmement,
il faut un plan pour atteindre nos objectifs de lutte aux changements
climatiques, nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre, et ça non
plus, le gouvernement Legault ne l'a pas. Il nous dit qu'il faut plein
d'électricité pour décarboner, mais il n'a pas de plan pour décarboner.
M. Robillard (Alexandre) : Est-ce
que l'intérim probable qui a été évoqué hier par M. Fitzgibbon, c'est le
signe que c'est plus difficile que prévu de trouver un nouveau P.D.G. pour
Hydro-Québec?
M. Nadeau-Dubois : Moi, je ne
suis pas... Tu sais, personne, à Québec solidaire, n'est impliqué dans les
tractations autour de la...
Journaliste : ...
M. Nadeau-Dubois : Par
rapport à la nouvelle direction d'Hydro-Québec. Nous, on fait partie des gens
qui auraient souhaité un processus un peu plus transparent. Je sais que des
collègues de l'opposition avaient fait une proposition en ce sens-là. Nous, on
aurait souhaité un processus plus transparent.
Et, de toute façon, au-delà de l'individu,
ce qui est important, c'est la vision. C'est pour ça qu'il faut un BAPE
générique sur l'avenir énergétique du Québec, pour qu'au-delà de la personne
choisie il y ait une vraie réflexion collective, démocratique sur qu'est ce
qu'on va faire avec notre énergie, l'énergie des Québécois, Québécoises dans
les prochaines décennies.
Mme Mignacca (Franca G.) :...Radio-Canada… earlier,
what do you make of that when you see, you know, the cultural sensitivity
training the....
M. Nadeau-Dubois :
You know, there was... it's clear that
there was a political intervention because the CAQ officials did not like the
language, the words that were in that formation. It's pretty ironic and it's a
contradiction for a government that has said that academic freedom is so
important for them. They just intervened into the content of a formation
written by two scientists because they don't like the words that those
scientists used. And it is also an example of the centralization we have
already in our system. Now, we have a healthcare institution at the regional
level that does not have even the power to do a formation for is own employees.
They have official from Quebec City intervening to stop them doing a simple
formation for their employees. So, that's an illustration that our system is
already very, very centralized. There is already a very, very little autonomy
at the regional level in our system. I have to underline the fact that we have,
right now, a new reform of the healthcare system that will centralize it even
more and will get rid of the very small autonomy that is still left in our
system.
Mme Mignacca (Franca
G.) :
I mean,
aside from the, you know, the changes of the healthcare system, what else do
you feel the Government should do at this point, now that the story has come
out? Are you hoping to see the minister react?
M. Nadeau-Dubois :
Well, there should not have been a
political intervention in the first place. I don't know if they will change
their minds. They should. They should let regional authorities form their own
employees. And if the scientists employed to do such a formation say it's pertinent
to use a concept, they should let the scientists use that concept, and that
concept then could be debated between the employees. I mean, no one is being
censored to contest or to debate the content of a formation, but I don't see
why words should be banned or formations should be closed because some
ministers don't like the words that are in the formation.
Mme Mignacca (Franca
G.) :
And on
your...
M. Authier (Philip) :
I was going.... Go ahead.
Mme Mignacca (Franca
G.) :
On UPAC…
You can go.
M. Authier (Philip) :
O.K.. In the
days… Mr. Lafrenière has left UPAC. In the days since all of these leaks and
the incidents, the UPAC has said it's improved itself, it's actually now a real
police force, it has a new leader. Do you think, as a result of all this, there
still needs to be more of a shake-up, in UPAC, there has to be more... like
more of an inquiry into how it operates, or someone needs to be policing the
police?
M. Nadeau-Dubois :
You know, I have the humility to
recognize this morning that I dont't have the perfect solution to this problem.
Québec solidaire doesn't have an already made-up
solution to solve the problem with UPAC, but let's say one thing : There
is a problem with UPAC, there is a big problem with UPAC, it's a recuring
problem. That institution has a huge credibility deficit, and we need to ask
the question : What are we doing with this? Because that institution was
founded to do two things, to catch the criminals, the corrupted people, and to
bring back money into the public Treasury. This morning, what we see is that
not a lot of corrupted people were caught and we're actually signing a cheque
to Jean Charest. So, what a frustrating situation for Quebeckers!
M. Authier (Philip) :
But, as a citizen, don't you think Mr.
Charest deserves an apology?
M. Nadeau-Dubois :
You know, I think all Quebeckers deserve an apology for the huge mess,
for the huge mess into our fight against corruption. UPAC has not been up to
the task, it's a euphemism to say so, and the Liberal Party should put forward
excuses to Quebeckers for what
they did during… when they were in power. Mr. Charest won his cause before the
tribunal, he gained his plea, he will have $400,000 in his pockets, he has his
victory, but the Quebeckers
have won nothing.
Mme O'Malley (Olivia) :
So, what's your… you say you can't come
up with solutions, right now, but what's your message to these Quebeckers who are frustrated and had trust
in this system?
M. Nadeau-Dubois :
First, my message is that I understand
their frustration, I share their frustration. You know, we've been fighting for
people… for corrupted people to be, you know, for them to… how do you say
«rendre des comptes»… held accountable. So, we've been fighting for those
people to be held accountable for their actions, the corrupted people in
Québec, because there is no corruption system without individuals that
participate in that system.
So, it's a huge mess,
it's very frustrating, I know the «commissaire» of UPAC will be in front of us
in a few weeks, during the audition for the credit. We will have very serious
questions for him and for the minister responsible for UPAC also, because
something needs to be done. It's not normal that the institution that was put
forward to fight corruption is unable to do it and that trips on itself at the
point of signing a cheque to Jean Charest.
(Fin à 8 h 58)