(Huit heures une minute)
Mme Nichols : Alors, bon
matin. Ça me fait plaisir d'être parmi vous pour vous jaser un petit peu du
projet de loi n° 37, qui a été déposé par la ministre
des Affaires municipales et l'Habitation, projet de loi qu'on nous demande,
évidemment, là, d'adopter, d'adopter rapidement, projet de loi important, je
vous le dis d'emblée, là. C'est un projet de loi où on vient combler, là,
certaines lacunes, en fait, où on a levé la main, là, dans les deux dernières
années, entre autres, là, relativement à la clause du... à la crise du
logement.
On est en faveur du projet de loi n° 37. C'est un bon projet de loi, le projet de loi n° 37. Il y a particulièrement, là, la partie municipale
sur le droit de préemption que les municipalités réclament. On l'a dit aux
municipalités, on le réitère, c'est vraiment important, le droit de préemption,
surtout dans le contexte dans lequel on est, en lien avec l'habitation, où on
cherche des endroits pour faire du logement social, du logement abordable, du
logement communautaire, donc. Puis on sait que c'est important aussi, là, pour
l'ensemble des municipalités du Québec puisque le droit de préemption,
seulement, là, Montréal a présentement ce droit-là.
Autre point important aussi du projet de
loi n° 37, c'est la clause sur les fins de
convention, les OBNL. C'est un gros bravo, là, de venir intervenir sur les fins
de convention, les OBNL, parce qu'on le sait, on l'a vu, là, dans les derniers
mois, il y a eu vraiment, là, des grosses problématiques, Sherbrooke,
Richelieu. On est contents. J'ajouterais même... ou on verra si on arrivera
avec un amendement, mais de donner la possibilité à la ministre de revenir six
mois en arrière, justement, pour intervenir dans ces transactions-là, qui,
disons-le, sont plutôt suspectes.
Bon projet de loi. Je vous dirais, là, le
seul bémol, le seul bémol du projet de loi n° 37, c'est la clause F.
M. Fortin :
…
Mme Nichols : Oui, le seul
bémol et le gros bémol, me souffle mon leader, et je suis d'accord, le gros
bémol, c'est la clause F. Vous savez, la clause F permet, pendant cinq ans, d'augmenter
le coût des loyers sans avoir à se justifier. Ici, dans le projet de loi n° 37, on passe de cinq à trois ans. Le trois ans... On ne comprend
pas pourquoi on passe de cinq à trois ans, mais définitivement le trois ans est
préjudiciable et ne vient surtout en rien, là, régler, là, le problème, là, de
la crise du logement. On pose des questions, à savoir le trois ans, il vient d'où.
On ne le sait pas. Est-ce qu'on a mis les numéros 1 à 4 dans un chapeau, on a
pigé 3 puis on met trois au lieu de cinq? Le trois ans n'est pas justifié. Il n'y
a pas personne qui l'a demandé. Nous, on ne l'a pas demandé. Il est dans le
projet de loi.
Comme je dis, c'est un projet de loi
important, puis je pense qu'il faut l'adopter pour l'ensemble de... le bénéfice
des Québécois et des Québécoises. Et je demande à la ministre de retirer la
clause F pour pouvoir adopter rapidement le projet de loi n° 37,
justement, là, pour régler, là, une partie des différents enjeux en habitation
puis aussi donner le fameux droit de préemption à nos municipalités, qui l'attendent
tellement... qui l'attendent depuis longtemps. Alors, voilà, voilà, en lien... notre
position avec le projet de loi n° 37.
Bien sûr, nous entendrons, là, les groupes
aujourd'hui. Il y a l'UMQ et la FQM. Jusqu'à 10 h 30 ce soir, là, il
y a différents groupes, là, qui viendront nous partager leurs positions. Je
suis certaine que vous savez qu'on les a déjà consultés puis que personne ne
comprend, là, le trois ans vient d'où. Je suis d'avis que ça prendrait peut-être
une étude d'impact, justement, pour savoir, la clause F, là, si on la réduit. Parce
que c'est une augmentation qui est étalée sur cinq ans qu'on veut réduire à
trois ans. Ça fait que moi, je vois juste des préjudices puis je ne vois pas
comment ça peut être bénéfique ni pour le locataire mais ni pour le locateur.
Elle avait sa raison d'être. Maintenant, il faut juste comprendre, là, pourquoi
on vient légiférer dans ce sens-là. C'est un préjudice qui est quand même, je
le réitère, là, assez important.
M. Bellerose (Patrick) : La
solution que vous proposez pour la clause F, ce serait quoi, de l'enlever
complètement ou de mettre un pourcentage maximal sur un nombre d'années?
Mme Nichols : Bien là,
ce qu'on propose en lien avec le projet de loi n° 37,
c'est de la retirer complètement pour qu'on puisse l'étudier.
M. Bellerose (Patrick) : ...à
long terme?
Mme Nichols : À long
terme, oui, on propose de venir l'encadrer. Même que, si la ministre, là, veut
rester... si la ministre propose le trois ans... Parce que, là, on a regardé
divers scénarios avec le trois ans, on se disait : Bien oui, on pourrait
peut-être prévoir un pourcentage, on pourrait peut-être se dire 10 %... Puis
je donne ça comme ça, là, je ne l'ai pas calculé, là, mais on pourrait dire,
mettons, 10 % par année. L'objectif, là, c'est d'avoir de la
prévisibilité, mais autant pour le locataire que pour le locateur. Elle a une
raison d'être là, la clause F. Puis même hier, là, la ministre, là, lors de
l'adoption du principe, elle disait, là : Soyons honnêtes, tout le monde
est maintenant capable... les propriétaires sont maintenant capables d'évaluer
les coûts. Oui et non, là, parce qu'on est dans une période d'inflation, là, on
le sait que les coûts sont quand même assez difficiles à évaluer, là, quand on
construit, donc c'est difficile pour le propriétaire aussi. Puis cette
clause-là, c'est ce à quoi elle servait, elle permettait, là, l'ajustement sur
cinq ans pour que le propriétaire, là, puisse rentrer dans ses coûts de
construction.
M. Duval (Alexandre) : Mme Laforest
a dit que c'était pour s'arrimer au rôle d'évaluation municipale, qui était sur
trois ans, et a dit aussi que c'était une demande, entre autres, de la CORPIQ,
des promoteurs immobiliers, de garder la clause F. Est-ce qu'on doit craindre
que les augmentations importantes soient encore plus importantes sur trois ans
pour que les propriétaires puissent récupérer ce qu'ils, normalement,
récupéreraient sur cinq ans?
Mme Nichols : En fait,
il y a un gros préjudice pour les locataires, là, tu sais, on leur demande, là,
d'encaisser une hausse qui aurait pu être étalée sur cinq ans en trois ans. Un,
ça ne vient en rien aider, là, la crise du logement. Puis il y a un préjudice
aussi, hein? On dit tout le temps, là : Les méchants propriétaires, là. Ça
n'aidera pas non plus à leur réputation en passant de cinq à trois ans. Puis la
CORPIQ va être là aujourd'hui, donc il y aura des questions dans ce sens-là.
Mais on a déjà reçu, là, leur position. Puis il n'y a pas personne, là, qui est
en faveur, je n'ai pas vu personne qui est en faveur du trois ans. Sincèrement,
là, je ne comprends pas pourquoi on arrive au trois ans. Je ne le comprends
pas, je ne vois un avantage pour personne.
M. Pilon-Larose (Hugo) : M.
Fortin, la loi n° 66, à quoi ça a servi, finalement?
M. Fortin :C'est une sacrée bonne question : À quoi ça a servi,
la loi n° 66, là? Je vous remets en contexte de
l'époque où le gouvernement a présenté d'abord le projet de loi n° 61,
qu'ils ont dû retirer, mais le projet de loi n° 61,
le gouvernement a émis des... ou a fait des points de presse un peu partout au
Québec, a sorti ses ministres régionaux un peu partout au Québec pour dire :
Ces projets-là, c'est important, ils doivent être adoptés, ces projets-là
doivent être commencés le plus rapidement possible. Puis là, aujourd'hui, on
apprend qu'il y a la moitié des projets qui n'ont même pas été lancés.
Pourtant, dans cette liste-là de projets, il y en a, des projets qui étaient
importants à lancer, et je suis d'accord là-dessus. Et c'est pour ça qu'à la
fin de la journée, quand le projet de loi n° 66 a été
retravaillé, redéposé, on a pu en venir à un accord là-dessus. Mais là
d'apprendre aujourd'hui que tout ça, là, tout ce show de boucane là, c'était
pour dire aux Québécois : Oui, on va relancer l'économie, on va lancer ces
projets-là, on va le faire rapidement, mais que, dans la plupart des cas, il
n'y a absolument rien qui a avancé... Le gouvernement, disons, s'est un peu... s'est
mis de la pression sur les épaules, et aujourd'hui on voit qu'il n'a pas fait
le travail nécessaire.
M. Pilon-Larose (Hugo) : ...dans
le fond, que c'est impossible au Québec d'aller vite dans des projets
d'infrastructure? On est condamnés à ce que ça prenne toujours du temps?
M. Fortin :Bien, je pense que c'est possible. Si je les regarde un à
la fois, ces projets-là, là, il y en a, des projets qui auraient pu avancer,
là-dedans, dans la liste des... Je vais prendre des projets dans ma région
parce que je les connais bien. À Maniwaki, il y a un projet de CHSLD qui a été
annoncé, approuvé en 2017, de reconstruction d'un CHSLD. Et ça, c'était urgent,
là, parce que, justement, il y avait des résidents de CHSLD qui, à chaque fois,
l'eau montait, là, sur la rivière Gatineau, devaient être évacués. Bien, ces
résidents-là ont été évacués encore cette année parce que le gouvernement n'a
pas bougé dans ce projet-là.
C'est possible de faire avancer ces
projets-là. C'était possible avant le projet de loi n° 66,
c'était possible de le faire encore plus rapidement. Mais, encore là, ça prend
une volonté gouvernementale, ça ne prend pas juste des investissements, pas
juste des annonces, mais ça prend une volonté de travailler sur chaque projet,
individuellement, pour qu'il bouge, pour qu'il soit accéléré. C'est ça qui n'a
pas été fait, malheureusement. Le gouvernement s'est donné des outils, très
bien, mais encore faut-il qu'il fasse le travail, puis ça, ça n'a pas été fait.
M. Lacroix (Louis) : Comment
vous avez trouvé l'attitude de M. Legault hier sur l'immigration? Parce
qu'il est revenu, encore une fois, en Chambre, en conférence de presse, pour
justifier, en fait, le fait qu'il fallait aller chercher les pouvoirs en
réunification des familles, que, si on continue à parler... si on ne parlait
pas français, en fait, dans les maisons des immigrants qu'on ramène avec le
programme, bien, que le français était condamné. Il a continué, il a persisté à
dire ça hier.
M. Fortin :Je vais juste lancer la discussion rapidement avant de
passer la parole à mon collègue porte-parole en matière d'immigration. M. Legault,
en fin de semaine, là, a dit une sottise totale en parlant de la possibilité
que le Québec devienne une Louisiane. Je vous rappelle qu'il y a 93 % ou
94 % de gens qui parlent très bien le français au Québec. C'est 1,8 %
en Louisiane. Et depuis il essaie de se rattraper.
Malheureusement, quand il nous parle de
langue parlée à la maison, il fait complètement fausse route. Ce n'est pas de
ses affaires, quelle langue les Québécois, les nouveaux arrivants parlent à la
maison entre eux. Si un nouveau Québécois fait le choix d'enseigner sa langue
maternelle à son enfant, à son fils, à sa fille, ce n'est pas des affaires du
gouvernement. Tout ce que M. Legault fait en ce moment, là, c'est
d'essayer de rattraper, tranquillement, pas vite, étape par étape, la sottise
qu'il a faite en fin de semaine.
M. Lacroix (Louis) : Mais
c'est quoi, il fait ça par manque de compassion, par manque de connaissance,
par manque... Qu'est-ce qui, à votre avis, l'amène à avoir ce jugement-là?
M. Fortin :M. Legault joue au bonhomme Sept-Heures en ce moment,
là, il essaie de faire peur aux Québécois sur cette question-là. Nous ne
deviendrons pas une Louisiane. Il y a en masse de protections au Québec pour
s'assurer que nous ne devenons jamais une Louisiane. C'est deux mondes
complètement. Alors, M. Legault, je pense qu'il fait un peu exprès pour
faire peur aux Québécois sur cet enjeu-là.
M. Laforest (Alain) : Même
sur 50, 100 ans, vous maintenez qu'il n'y a pas de danger pour le
français, là? Moi, je ne parle pas de la langue parlée, là, vous avez le droit
de parler ce que vous voulez dans la maison, là, mais à l'extérieur de la
maison. Prenons le cas de Montréal, où on voit qu'il y a une progression de
l'anglais dans la métropole, vous, vous ne croyez pas que, sur une période de
50, 60, 70 ans, il y ait un effritement du français?
M. Polo : Bien, si on
parle de l'allusion à la Louisiane, hier soir, le démographe Marc Termote a
qualifié d'une totale exagération l'allusion à la Louisiane par le premier
ministre Legault. C'est le même démographe qui est utilisé par ce même
gouvernement.
Maintenant, par rapport à la langue dans
l'espace public, nous, comme formation politique, nous sommes d'accord qu'il y
a des défis, qu'il y a un progrès, qu'il y a des améliorations, qu'il y a du
travail à faire. Nous avons mis de l'avant 27 propositions à ce niveau-là.
Mais, quand il s'agit... et je reviens, quand il s'agit de la langue
parlée à la maison, quand le premier ministre fait un lien et dit : C'est
un tout, excusez-moi, le contrat moral de l'immigration n'a jamais inclus la
langue parlée à la maison. Et ça, nous allons toujours nous tenir debout contre
toute affirmation en ce sens-là.
M. Laforest (Alain) : Pourquoi
il fait ça, selon vous?
M. Polo : Comme mon
collègue l'a mentionné...
M. Laforest (Alain) : Non,
non, vous, personnellement, là, vous, pourquoi vous pensez que François Legault
veut aller dans votre chambre à coucher?
M. Polo : Bien, moi, je
pense qu'à la fin de la journée, là, le premier ministre l'a fait en 2018,
aujourd'hui, il essaie de le refaire, il essaie de prendre les immigrants et
l'immigration non francophones comme étant les boucs émissaires et il essaie de
mettre des Québécois à part entière contre la majorité francophone, il essaie
de diviser pour passer son message, il joue sur la méconnaissance, il joue sur
la définition de l'autre pour, justement, stigmatiser encore plus une minorité
de Québécois qui font tous les efforts à tous les jours pour bien et mieux
s'intégrer à l'intérieur du Québec.
M. Bergeron (Patrice) : Comment
pensez-vous que l'opinion publique québécoise juge, justement, ce genre de
propos là, selon vous?
M. Lacroix (Louis) : Il
s'adresse à qui quand il dit ça?
M. Polo : Comment... Moi,
j'ai confiance dans la maturité des Québécois. Moi, j'ai confiance que mon
exemple n'est pas un cas d'exemple... n'est pas un cas anecdotique. Il y en a,
c'est la très grande majorité. Nous sommes des fiers Québécois à part entière.
Le contrat moral n'a jamais exigé qu'à terme la langue parlée à la maison
devait être laissée tomber. Quand j'ai atterri, il y a 40 ans, là, au
Québec, on ne m'a jamais demandé de laisser mon identité personnelle à
l'aéroport avant de commencer à fonctionner au Québec. Et ça, nous allons
toujours, toujours le refuser.
Par contre, nous faisons tous les efforts
et nous demandons, nous sommes les premiers aussi à le demander, qu'il y ait
encore plus d'efforts à faire pour valoriser, consolider et développer la langue
française auprès des Québécois, des nouveaux arrivants.
M. Lacroix (Louis) : M.
Polo, il s'adresse à qui, M. Legault, avec ces messages-là nationalistes
sur l'immigration? Vous dites : Il essaie de faire peur au monde. Il
s'adresse à qui? C'est qui, à l'autre bout, là, qu'il veut toucher?
M. Polo : Bien, moi, à
la fin de la journée, là, moi, je pense que le message qu'il lance à une
certaine partie de la population aujourd'hui, là, c'est les Québécois d'origine
immigrante non francophones qui se sentent attaqués et blessés par ces
propos-là. À la fin de la journée, c'est ça qu'il faut mentionner.
M. Lacroix (Louis) : ...ça,
c'est les gens qui sont blessés, mais lui, là, il ne fait pas ça pour blesser
les gens. Lui, il s'adresse à quelqu'un quand il dit : Il faut aller
chercher les pouvoirs en immigration, puis l'immigration non francophone menace
le français, etc. Ce message-là, il l'adresse à qui, vous pensez?
M. Polo : Il l'adresse à
la population en général, mais en utilisant un épouvantail qui est complètement
exagéré, qui ne fait aucune, aucune mention de tous les efforts et de tous les
résultats qui démontrent, à terme, que l'immigration non francophone adopte le français
dans l'espace public, au travail et au niveau de la scolarisation.
M. Laforest (Alain) : ...est-ce
qu'il attise la peur de l'autre?
M. Polo : Bien, c'est
clair qu'il attise une méconnaissance de l'autre et une méconnaissance des
bienfaits de l'immigration, c'est ça, à la fin de la journée, et il cherche à
créer encore plus de division au sein des Québécois, alors que les Québécois
immigrants non francophones font les efforts, quotidiennement, pour s'intégrer
en français, pour se scolariser en français, pour utiliser le français dans
l'espace public.
M. Carabin (François) : Est-ce
qu'il souffle sur les braises de l'intolérance?
M. Polo : Non, ça, ce
n'est pas à moi à juger.
M. Bellerose (Patrick) : Le
ministre Boulet utilise maintenant l'immigration temporaire. Il dit : Il y
a 177 000 immigrants temporaires, finalement, au Québec, environ la
moitié qui sont étudiants. Est-ce que, pour vous, cette nouvelle donnée là
change la donne, justement, sur le fait qu'une politique d'immigration, c'est
un immigrant temporaire qui ne maîtrise pas le français?
M. Polo : Qui a provoqué
cette situation-là? C'est la CAQ. Qui a provoqué le constat... la situation
d'avoir baissé les seuils d'immigration permanente pour faire exploser le
nombre de travailleurs temporaires depuis les quatre dernières années? C'est la
CAQ.
M. Bellerose (Patrick) : ...le
plein contrôle de l'immigration au Québec?
M. Polo : Nous, comme
formation politique, nous demandons d'avoir les contrôles sur l'immigration
temporaire pour une raison spécifique, pour que ce soit un tremplin pour l'immigration
permanente au sein du Québec et aider, justement, à pallier les problèmes
économiques, les pénuries de main-d'oeuvre, mais aussi à régionaliser cette
immigration-là et à aider à la vitalité des régions.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Lucien
Bouchard, hier, disait : Il ne faut pas compter sur Ottawa pour donner
davantage de pouvoirs au Québec en matière d'immigration. Est-ce que vous
voulez, donc, faire équipe avec le gouvernement pour le demander?
M. Polo : Bien, sur
différentes mesures, nous demandons les mêmes choses, mais pour différentes
raisons. Et je viens de le dire, par rapport aux travailleurs temporaires...
M. Lacroix (Louis) : Mais
êtes-vous contre le fait que Québec demande tous les pouvoirs en matière
d'immigration? Si vous étiez aux affaires, est-ce que vous trouveriez que c'est
une bonne idée?
M. Polo : Écoutez, la
réunification familiale, là, j'ai des membres de ma famille qui en ont
bénéficié.
M. Lacroix (Louis) : Oui,
mais ça ne veut pas dire... Si on va chercher les pouvoirs, ça veut dire que tu
peux faire ce que tu veux avec la réunification familiale, n'est-ce pas?
M. Polo : Oui. Bien, à
ce moment-là...
M. Lacroix (Louis) : Bon.
Alors, est-ce que ça, c'est une mauvaise chose, d'avoir les pouvoirs de faire
ce qu'on veut avec la réunification familiale?
M. Polo : Nous, ce qu'on
dit par rapport à la réunification familiale... Qu'est-ce que vous dites à une
travailleuse d'origine immigrante non francophone qui souhaite rapatrier son
mari et son fils? Elle va être exclue. Elle va être exclue.
Journaliste : ...
M. Polo : Non, non.
M. Lacroix (Louis) : ...ce
n'est pas ça que ça veut dire. Dans l'absolu, là, ça veut dire que, si tu as le
pouvoir de décider comment tu opères la réunification familiale, bien, comme
gouvernement, tu peux décider que, oui, on en fait venir qui sont non
francophones, mais au moins tu as le pouvoir de le faire. En ce moment, on n'a
pas le pouvoir de le faire.
M. Polo : Oui, bien,
regardez...
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
que ça, c'est mauvais, d'avoir ce pouvoir-là?
M. Polo : Non. À la fin
de la journée, nous, ce qu'on dit c'est : Demander certains pouvoirs qui
sont légitimes et qui sont réalistes, nous le faisons, nous, comme formation
politique. Maintenant, le gouvernement s'entête à mettre de l'avant certaines
demandes, mais il faut regarder au-delà des demandes spécifiques, il faut aussi
bien informer la population. Qu'est-ce que cherche ce gouvernement-là en
faisant certaines demandes spécifiques? Ça a créé encore plus de chicanes
Québec-Canada.
M. Bellerose (Patrick) : ...vous
craignez que le gouvernement Legault fasse preuve de moins de compassion que le
fédéral, présentement, quand vous dites : Qu'est-ce qu'on dirait à une
personne non francophone pour la réunification familiale?
M. Polo : C'est clair,
c'est clair. Parce que c'est vers là aussi que je veux aller. Je veux dire,
quand ma famille et moi, on est arrivés, c'est mon père qui a demandé la
réunification familiale à ma grand-mère. Est-ce que le gouvernement... Est-ce
qu'aujourd'hui, 40 ans plus tard, mon père n'aurait pas pu demander la
réunification familiale parce que sa langue maternelle n'est pas l'espagnol...
n'est pas le français? C'est ça, les incohérences. Ça fait qu'à la fin de la
journée ces 13 000 nouveaux arrivants arrivés au Québec par la
réunification familiale vont accéder... pour la plupart, vont accéder au marché
du travail, vont accéder au français, vont se franciser, vont contribuer. Et ce
n'est pas des cas d'exception, ce n'est pas des anecdotes. À la fin de la
journée, il faut regarder la question de l'immigration avec beaucoup plus d'humanisme
et beaucoup moins avec un objectif purement électoraliste et qui vise la
division au sein des Québécois.
La Modératrice : On va
prendre une dernière en français.
M. Lacroix (Louis) : Mais,
si je fais... si j'écris, là, tantôt, que le Parti libéral ne veut pas
récupérer les pouvoirs de réunification familiale, est-ce que j'ai raison?
M. Polo : Écoutez, ce
que vous devez mentionner, c'est que le Parti libéral demande des pouvoirs en immigration,
que ce soit au niveau des travailleurs temporaires, mais le Parti libéral,
aussi, contrairement à la CAQ, s'occupe des vrais enjeux qui touchent les
Québécois à tous les jours, et non pas chercher des chicanes.
M. Lacroix (Louis) : ...parce
que là, là, on touche à un point important, là. François Legault... Vous, vous
dites : Moi, ce que je crains, c'est ce que François Legault va faire avec
ces pouvoirs-là. Mais vous, les pouvoirs, les voulez-vous? Parce que vous, à
vous entendre, si vous étiez aux affaires, les pouvoirs, vous les exerceriez
avec plus de jugement, de ce que je comprends.
M. Polo : Oui,
certainement.
M. Lacroix (Louis) : Alors,
est-ce que vous les voulez, ces pouvoirs-là?
M. Polo : À la fin de la
journée... André, tu veux y aller?
M. Fortin :Non. Bien non, si tu veux... mais je peux, là.
M. Polo : O.K. Oui. À la
fin de la journée, nous, ce qu'on dit, là, c'est que, sur ces enjeux-là... Puis
François Legault l'a déjà demandé, il s'est fait dire non. Nous, à la fin de la
journée, là, nous, ce qu'on souhaite, c'est d'adresser les vrais enjeux qui
sont associés aux bienfaits de l'immigration.
M. Laforest (Alain) : Oui,
mais c'est quoi... Pouvez-vous y aller, M. Fortin?
M. Bergeron (Patrice) : Est-ce
que le Parti libéral revendique la réunification?
M. Laforest (Alain) : Vous
les voulez, les pouvoirs, ou vous ne les voulez pas?
M. Fortin :Je vais être bien clair, là. On revendique des pouvoirs du
fédéral là où il y a un enjeu. O.K.? Il y a un enjeu en ce moment avec les
travailleurs étrangers temporaires parce qu'ils ne sont pas toujours en lien
avec les besoins de main-d'oeuvre et parce que le processus est extrêmement
long et difficile. Est-ce qu'il y a un problème avec la réunification familiale
en ce moment? La réponse, c'est non. Alors, le pouvoir qu'on demande, le
pouvoir qu'on demande aujourd'hui, c'est celui pour les travailleurs étrangers
temporaires.
La Modératrice : On va
passer... Une dernière, on passe en anglais.
M. Bellerose (Patrick) : ...système
de justice, on voit encore ce matin qu'il y a des délais pas possibles pour
accéder au système de justice. Mme LeBel dit : C'est une question de
négociation syndicale. Qu'est-ce que vous demandez à Mme LeBel et aussi à
M. Jolin-Barrette?
M. Fortin :Mais qu'est-ce qui se passe avec la négociation? Si la
négociation, c'est l'enjeu, là, pourquoi ça n'avance pas? Pourquoi ça ne
progresse pas? Si elle pense qu'elle peut régler ces enjeux-là avec la négociation,
bien, qu'elle pèse sur l'accélérateur parce qu'aujourd'hui il y a des Québécois
qui ne réussissent pas à avoir leur cause entendue, qui sont libérés pour des
raisons de pénurie de main-d'oeuvre et qui, à l'inverse, ne réussissent pas à
avoir leur cause entendue pour leur libération par cause de pénurie de main-d'oeuvre.
Alors, si vraiment la négociation, c'est le point d'achoppement, bien,
Mme LeBel, qu'elle pèse sur l'accélérateur et qu'elle règle la question.
La Modératrice : En anglais...
M. Carabin (François) : Hier,
Lisette Lapointe a, disons, parlé en bien du projet de la CAQ comme véhicule
vers la souveraineté. Comment vous la voyez, cette caution morale là? Est-ce
que c'est une preuve que le gouvernement de la CAQ veut secrètement faire l'indépendance?
M. Fortin :Secrètement ou pas, M. Legault a dit, en 2018, qu'il
était indépendantiste. M. Legault a dit que, pour arriver à un consensus,
bien, il fallait rapatrier des pouvoirs en immigration, il fallait mettre une
emphase sur la langue française. Alors, si je lis le... si je suis le plan de
match que M. Legault a lui-même mis de l'avant pour qu'il y ait une plus
grande acceptation sociale de l'indépendance, bien, je trouve qu'il est en
train de suivre le plan de match à la lettre, son propre plan de match.
Mme Richer (Jocelyne) : M.
Fortin, sur un autre sujet, sur le projet de loi n° 2,
l'échec de la réforme du droit de la famille, quels commentaires ça vous
inspire, le fait que le ministre, finalement, hier soir, a dû le scinder, donc,
éviter, là, plusieurs sections, là, de son ambitieux projet de loi?
M. Fortin :Oui. Bien, d'abord, il y a des dispositions importantes qui
ont été adoptées, dans le projet de loi n° 2, des
dispositions qu'il était nécessaire d'adopter. Malheureusement, il y a, puisqu'on
est à quelques jours de la fin de la session parlementaire, plusieurs
dispositions, liées à la filiation, liées à la gestation pour autrui, qui n'ont
pu être adoptées parce que le temps nous manque pour faire cette étude-là
correctement. C'est malheureux, effectivement, que les parlementaires n'ont pas
pu, au cours des quatre dernières années, faire l'entièreté du travail.
Maintenant, c'était une bonne chose d'entendre
que le gouvernement prenait l'engagement de relancer, s'il est réélu, cette
discussion-là. Je pense que l'ensemble des formations politiques pourraient
prendre un engagement en ce sens-là, s'ils forment le gouvernement, de
s'assurer que l'ensemble des dispositions, avec certaines modifications, bien
évidemment, pourraient être mises de l'avant.
Mme Richer (Jocelyne) : Faut-il
blâmer la gestion des travaux parlementaires, le fait que ça a été étudié à la
toute fin de la session comme ça?
M. Fortin :Le gouvernement a fait ses choix. Le gouvernement savait
très bien qu'il y avait des choses qui seraient adoptées, il y avait des choses
qui ne pourraient pas être adoptées. Le ministre de la Justice a déposé de
nombreux projets de loi, il a choisi de faire l'étude du projet de loi n° 96 avant l'étude du projet de loi sur la réforme du
droit de la famille. Alors, s'il avait fait les choses inversement, peut-être
qu'on aurait eu plus d'avancées sur le droit de la famille. C'était sa
priorité, c'était son choix, et, bien malheureusement, on n'a pas pu arriver au
bout de l'étude. Mais ça ne veut pas dire que ce travail-là, qui a été mis sur
la table, ne pourra pas être poursuivi suite à l'élection, si c'est la volonté
des parlementaires. Et moi, je souhaite que ce soit la volonté des parlementaires.
Mme Senay
(Cathy) : So, Mr. Fortin, if the Liberals in
Québec were in power, you would ask Justin Trudeau for the power on temporary
workers?
M. Fortin : We're already asking for it. It's already part of the requests that
the Liberal Party has made, because the Temporary Workers Program right now
isn't fully equipped to meet the needs of the labour market, and the delays are
ridiculously long right now. So, this is a program that isn't working as well
as it should, and therefore it would be... it could be better used in the hands
of the provincial Government, which is closer to the needs of our labour market
here.
Mme Senay (Cathy) : So, no need to have the power on reunification?
M. Fortin :
Well, Mr. Legault hasn't justified the need for the powers on reunification.
What he is saying is: Family reunification is essentially a threat to the
survival of the French language, and that's why he
wants to repatriate those powers. Family reunification is about bringing
families back together. So, on that front, the program is meeting its
expectations, its goals, its objectives. And so, for us, the request that needs
to happen, of the federal Government, is to repatriate the powers on temporary
workers.
Mme Senay (Cathy) : Mr. Polo, this is a third day in a row that you're here answering
our questions on immigration, talking about your own example. Do you have the
impression that there is a strong absence of knowledge of Mr. Legault on
immigration, what it is, the lack of sensitivity, and that brings him to create
this fear of others, because he just doesn't know? He's not spending time with
immigrants, he's not spending time with cultural communities. Do you have that
impression?
M. Polo : Completely, and not just today. Actually, we were witness, four
years ago, during the campaign... his lack of knowledge of the immigration
process, first and foremost. Second of all, his lack of sensitivity is very
hurtful because there is, like myself... And my example is not just a perfect
example, it's the actual example of the vast majority of all immigrants, new Quebeckers that come to Québec. It's a lack
of sensitivity, and it's a lack of humanism, and it's a lack of respect for all
the sacrifices that all these families do on a day-to-day basis, not just to
survive and to provide their family members with a better quality of life, but
also to adopt the French language in the public space, in the workforce, at
schools as well. But whatever happens at home, it's none of his business.
M. Grillo (Matthew) : What do you think the Premier means by... when he says... In
relation to Mr. Birnbaum's tweet, what do you think he means by... when he says:
The West Island is getting upset? It's sort of a rough translation but...
Journaliste
: Le West Island s'énerve.
M. Fortin : S'énerve? I didn't hear what he said, I trust that David and other
colleagues heard it properly, though. Mr. Legault is a son of the West Island,
maybe he can explain it better than I can, but if his point is that the West
Island people are not full Quebeckers and they think
differently than the rest of Quebeckers, he's going to have to justify that. To
me, every Quebecker, no matter where they are, on the island of Montréal or on
the territory of Québec, are full-on Quebeckers. If he is saying that a few MNAs,
because they speak English, think differently, it's up
to him to explain that. I think we have common goals, common values, I think
there is a lot more that brings us together than
divides us in Québec.
M. Authier (Philip) :
How do you think he... I've asked you
this question before, but he doesn't seem to take criticism all that well. What
do you think of that?
M. Fortin :
No, he doesn't seem to take criticism
all that well. The Premier is somebody who, if he makes a mistake, he may admit
it quickly, but once he decides that, no, he's going to keep his line, he won't
backtrack on an issue. And he made a mistake this weekend, he made a glaring
mistake, he made an obvious mistake. And, right now, he's sending people like
Simon Jolin-Barrette to protect him during question period, but Mr. Legault
should look at what he said, look at how it divides society, look at what he's
actually trying to accomplish here. If his goal... And I heard Lucien Bouchard,
yesterday, speak, and Lucien Bouchard is somebody... you can agree or disagree
with his fundamental beliefs and values, but he is somebody who did manage to
speak to every Quebecker. I am
not sure, when Mr. Legault speaks the way he did this weekend about Québec becoming a Louisiana or the threat of
immigration... I'm not sure he's somebody who speaks to every Quebecker when he does that.
M. Authier (Philip) :
Have you... Mr. Polo, should he
apologize to you in the House?
M. Polo :
It's not about myself, it's about
millions of Quebeckers that
have gone through the same sacrifices than myself and my family have gone
through. It's about talking to them, it's about learning, it's about respecting
their sacrifices.
What we're also very
upset is that moving threshold or that moving target. When will it be enough,
based on Mr. Legault's and the CAQ's definition of what is a real Quebecker? When will it be enough? When many
people like myself have gone to French schools, use French in the public space,
in the workforce... in the workspace, OK, we respect, we value, we try to use
French in the best way, we're trying to be as good citizens as possible. We
work, we contribute to the economic, social and the democratic development of Québec. When will it be enough? And what he
said over the past weekend and what he repeated in the House this week is that
it's still not enough. That was never part of the moral contract of
immigration. That was never part of the moral contract.
And so what we're hearing
today is that he wants to have a say about what we do in our own private space,
and that is unacceptable. That is a right that we're not willing to give away
and that we will defend until... We have to make sure that he recognizes that
it's none of his business to have a say in what we do or how we speak at home.
Mme Senay (Cathy) :
One last question, Mr. Fortin. Mrs. Anglade, I mean, it's the intensive session, she
was not here yesterday, she's not here today and she's not going to be here
tomorrow. What is this strategy? She's absent, and its the intensive session. She
is the opposition leader, the official opposition leader. She has to face the
Premier.
M. Fortin :
The big difference between intensive
session and all the other sessions is that the committees sit longer, is that
there's one more day during the week, but it's mainly the committee work that's
done to pass a lot of legislation because it's the end of the session. So, I
wouldn't link one to the other. I think it's justified for every party leader
to make decisions on whether they are more useful in the House or they are more
useful meeting Quebeckers. Last
week, she was here. This week, she was here for a day. Next week, she'll be
here. It's up to party leaders to make their decisions. Gabriel Nadeau-Dubois
wasn't here on Tuesday either. I think it's all part of their strategies and
their decisions, and every decision is the right one.
Mme Senay (Cathy) :
So, for now, she's more useful outside?
M. Fortin : I think some days, she's more useful inside the Assembly. Some
days, it's more useful to meet Quebeckers face to face. She will be here all week next week to debate with
the Premier. But it's up to every party leader to make those decisions.
M.
Laforest (Alain) : Rapidement, sur l'immigration, ça va se finir comment?
M. Fortin :
Ça va se finir comment? Bien, c'est une très bonne question. Moi, j'espère que
ça se termine avec François Legault qui réalise la teneur de ses propos, la
division qu'il crée avec ses propos, qui réalise qu'il y a des Québécois qui se
sont sentis, disons, heurtés par ses propos, puis qui réalise que ce n'est pas
de ses mosus d'affaires, la langue que les Québécois, immigrants ou non,
choisissent de parler avec leurs enfants, avec leurs parents dans leurs salons
puis dans leurs cuisines.
(Fin à 8 h 35)