(Treize heures deux minutes)
Le Modérateur : Alors,
bienvenue, tout le monde, à cette conférence de presse, mesdames, jeunes
messieurs et jeunes dames également, entre autres Henri, là, avec qui j'ai fait
connaissance tout à l'heure, un petit bonhomme d'à peu près... probablement pas
un an. On vous souhaite la bienvenue à tous en ce jeudi après-midi pour cette
conférence de presse de Ma place au travail. Pour vous dire, en présence, il y
a évidemment Myriam Lapointe-Gagnon, fondatrice du mouvement Ma place au
travail, Mme Jennifer Maccarone, il y a également Isabelle Melançon du PLQ. Pour
Québec solidaire, il y a Manon Massé, Christine Labrie et, pour le Parti
québécois, nous avons ici aujourd'hui Myriam Perry Mélançon.
Et, dans l'ordre, je vais céder la parole
à Jennifer Maccarone tout de suite, qui, elle, va la céder à... appelons-là la
vedette de la journée.
Mme Maccarone : Bien oui, on
a plusieurs vedettes de la journée aujourd'hui, c'est pour dire. Merci
beaucoup, Jack. Alors, c'est avec grand plaisir qu'on vous accueille aujourd'hui
pour le point de presse de Ma place au travail pour célébrer leur un an. Eh
oui, c'est avec grand plaisir que je suis accompagnée par mes collègues
féminines, Isabelle Melançon, Manon Massé, Christine Labrie et Méganne Perry
Mélançon. On est également accompagnées, évidemment, par beaucoup de joie de
nos enfants qui nous accompagnent aujourd'hui, ainsi que la fondatrice de Ma
place au travail, Myriam Lapointe-Gagnon, et ses collègues Maude, Carolanne,
Karen, Kimberly, Liliana... Marielle, Nelly. Alors, avec pas plus d'attente,
je cède la parole à Myriam. Merci.
Mme Lapointe-Gagnon (Myriam) : La
dernière fois que je me suis présentée à ce micro, mon fils Jules, il avait
juste sept mois. J'étais épuisée, j'étais en colère, j'étais déçue, mais j'étais
rempli d'espoir puis d'amour. Ma place au travail n'avait alors qu'un trimestre
de vie. Maintenant, on fête notre premier anniversaire. Maintenant, Jules est
âgé de 16 mois. L'enfant et le mouvement grandissent, évoluent côte à côte,
apprennent à se tenir debout et à parler avec de plus en plus d'assurance.
Jules a trouvé une place en garderie, il n'y
a pas trop longtemps, puis il l'a perdue. Fermeture d'un milieu familial, comme
tant d'autres, et retour à la case départ. Bientôt, je n'aurai plus de place
pour lui et je n'aurai donc plus de place pour moi. Ouf! Un an de mobilisation
avec des bébés dans les bras, avec des suces dans les mains.
Quand on devient parent, on répète sans
cesse que le temps passe trop vite. En accouchant d'un simple mouvement
citoyen, je ne me doutais pas à quel point tout évoluerait aussi rapidement.
Parce que, oui, il s'en est passé de belles et grandes choses dans les 12
derniers mois, mais pas assez. Dans ce tourbillon effréné d'entrevues, d'actions,
de propositions, j'entends toujours les voix désespérées de milliers de parents
s'élever. Je repense à notre premier coup d'éclat sur les réseaux sociaux, et
on dirait que c'était il y a 10 ans. Je repense à notre haie de poussettes
devant l'Assemblée nationale, tôt le matin, au premier passage à Salut,
bonjour! J'étais tellement nerveuse, apeurée. Je n'avais jamais fait ça. Je me
rappelle aussi de la décision de nous créer un symbole, symbole qu'on porte
toutes fièrement aujourd'hui, symbole qui représente le casse-tête dans lequel
nous nous retrouvons. J'étais émue de voir les députés le porter quelques jours
après la lancée de ce symbole-là.
Ouf! Je me souviens aussi avec émotion de
la journée d'étude que nous avons organisée avec zéro moyen financier et avec
Pauline Marois comme invitée d'honneur. Quel honneur! Je souris aussi en
repensant à tous les appuis que nous avons reçus, aux grands-parents qui se
sont levés debout, des maires et des mairesses, partout au Québec, dans toutes
les régions, qui ont appuyé le mouvement dans les conseils municipaux. Je me
souviens des employeurs, des entreprises qui se conscientisent, lentement mais
sûrement, qui apprennent à changer la culture du travail. Parce que c'est ça
aussi qu'on fait dans Ma place au travail. Tous les syndicats du Québec ont
répondu à l'appel et ont lancé à leurs membres notre pétition, pétition que
j'étais venue déposer à l'Assemblée nationale quand Jules avait sept mois. 19 000 signataires.
Ouf! J'étais venue vous la présenter ici.
Je repense souvent à ce discours-là, livré à la fois avec le poids et la force
d'avoir un bébé dans les bras, émotive, épuisée, mais droite et fière, comme
aujourd'hui, convaincue de l'importance du message à livrer. Je me sens comme
ça encore aujourd'hui.
Ma place au travail, c'est aujourd'hui
bien plus qu'un cri du cœur, mon Henri. C'est plus grand que moi, c'est plus
grand que nous. Notre communauté virtuelle s'est transformée en OBNL qui s'appuie
sur le dévouement et sur la volonté de plusieurs bénévoles qui donnent de leur
temps avec des bébés dans les bras, tout en cherchant des places en garderie.
Ce n'est qu'un début. On a maintenant un
conseil d'administration aussi qui prend... puis un OBNL qui se remplit de
membres à tous les jours. Ce n'est qu'un début, parce qu'en s'organisant, on
cherche à aller chercher la crédibilité nécessaire pour veiller au respect des
besoins des familles, pour lutter contre le recul historique de la condition
féminine. Et, oui, ça fonctionne. Nous, ce qu'on fait, ça fonctionne.
Ma place au travail, je suis fière de vous
le dire aujourd'hui, a été invité au 66e Forum des ONG affiliées à l'ONU
pour parler d'agentivité des femmes dans les sphères sociales et politiques.
Parce qu'avec plus de femmes pour protéger l'intérêt des mères et des enfants,
on n'en serait pas rendu là aujourd'hui. On se demande d'ailleurs pourquoi il
n'y a pas de halte-garderie ou de CPE à l'Assemblée nationale.
On nous entend, on nous écoute, on nous
fait de l'espace sur toutes les plateformes pour amplifier la voix des parents.
Les ministres commencent tranquillement à nous ouvrir la porte : Isabelle
Charest, on la rencontre demain. Jean Boulet, on commence à avoir un petit peu
de nouvelles. L'équipe de M. Legault, pas M. Legault, mais son équipe,
on ne sait pas trop qu'est-ce qui s'en vient, une rencontre possible. La crise
actuelle fait toujours la une des journaux.
Ces réussites, c'est un baume sur notre
coeur de mères franchement inquiètes et en colère. Ce mouvement n'a pas eu
autant d'impact à cause d'une seule personne. Ce mouvement a de l'impact parce
qu'il s'inscrit dans une détresse sans nom, partagée à la grandeur de la
province. La pénurie de places en milieux éducatifs à l'enfance touche des
dizaines de milliers de familles directement et crée une onde de choc qui
s'étend à toutes les sphères de notre société. Les mères que l'on prive de leur
place sur le marché du travail sont parties prenantes de notre économie et ce retour
en arrière là, il est inacceptable.
L'égalité des sexes au Québec, c'est une
valeur fondamentale. On ne peut et on ne doit pas laisser aller ce qui se passe
en ce moment. Il est temps plus que jamais d'être féministe. Ça, ça veut dire
de laisser le choix aux mères de retourner ou non sur le marché du travail. Ça,
ça veut aussi dire de laisser le choix aux pères de faire le même choix et de
ne pas avoir à prendre une deuxième job pour survivre financièrement à une
inflation sans précédent. Ça, ça les prive de leurs enfants.
Ce mouvement, c'est beaucoup plus qu'une
question de parents, c'est avant tout une question d'enfants et de bébés. Puis
c'était pour ça qu'on voulait les avoir, même s'ils pleurent, même si, des
fois, ils sont tannants, parce qu'ils sont plus vulnérables que nous puis il
faut leur accorder de la place. Quelle est la place d'un bébé au Québec? Quelle
importance donnons-nous au fait que nos poupons ne partent pas sur la même
ligne de départ? L'égalité des enfants, de nos enfants, a su toucher le coeur
de personnes d'horizons variés, si bien qu'à plusieurs reprises, notre cause a
su rallier les voix des députés en transcendant les frontières partisanes,
comme c'est le cas aujourd'hui. Mesdames, merci d'être là ensemble.
Ah! En regardant le chemin parcouru, nous
avons de quoi être fiers. Avec la peur au ventre, la rage au coeur, les bras
chargés de bébés, les parents, surtout les mères, se sont levés. Pendant un an
maintenant, elles ont demandé qu'on les entende, qu'on les considère, ainsi que
leurs enfants, mais surtout qu'on les aide.
C'est en portant leur message aujourd'hui
que je demande à notre gouvernement d'agir. L'attente, elle a assez durée, les
parents sont fatigués, à bout de ressources et inquiets de ne pas pouvoir
subvenir aux besoins de leur famille, de voir leurs enfants privés d'une place
à laquelle ils devraient avoir droit. Et s'il y a une chose qu'on apprend en
devenant parents, c'est de trouver de l'énergie là où il n'y en a plus. Parce
que, quand il s'agit de nos enfants, parce que, quand on n'a pas le choix, pour
eux, de continuer à se battre, bien, on va le faire. On va toujours le faire.
Hier, le ministre de la Famille a dit
qu'il voulait que nous soyons la dernière génération à être au cœur du manque
de places en garderie. Aujourd'hui, son gouvernement a refusé du revers de la
main trois motions des trois oppositions, une proposant une aide d'urgence aux
familles, l'autre pour la subvention du réseau de milieux familiaux et de CPE à
100 %, et, la troisième, la reconnaissance qu'on existe, que notre
mouvement existe.
Faisons mieux, faisons plus. Prenons les
dollars dans un autre ministère si le ministère de la Famille préfère se
concentrer uniquement pour la création de places. On vous rappelle que vous
avez reçu 6 milliards du fédéral pour compléter le réseau. Où est la
moitié de cet argent-là? Il est temps que le gouvernement soit aujourd'hui un
gouvernement pour toutes les familles du Québec. Le ministère de la Famille est
en train de remanier la Loi sur les services éducatifs à l'enfance et il a une
occasion historique de faire que l'accès à une place en services de garde
devienne un droit comme le droit à l'école, pour que nos enfants n'aient pas à
encore vive la même bataille.
Pourquoi c'est long? Ils disent que c'est
long parce que le débat sur cette question est essentiel et que le ministre ne
veut rien entendre sur la question du droit à une place en services éducatifs à
l'enfance. On est tannés d'avoir à vendre la docilité de nos enfants sur les
réseaux sociaux en espérant décrocher une place avec un C.V. de bébé. On est
tannés de vendre notre docilité en tant que femmes, de se dire qu'il ne faut
pas pleurer, il ne faut pas crier trop fort parce que ça dérange. Ça va faire.
En attendant que tous les enfants aient
les mêmes droits, il faut que les parents, qui n'ont pas accès à une place en
milieu de garderie, puissent obtenir une aide monétaire d'urgence maintenant, ça
fait un an qu'on le demande, et non un étalement du RQAP, un prolongement sans
ajouter d'argent. Ce n'est pas notre demande.
Ce samedi 19 mars, ce samedi qui
vient, les parents et toutes les personnes qui sont des alliés de la cause
sortiront dans la rue ici, à l'Assemblée nationale. Il y a des parents qui
montent de l'Abitibi avec des bébés dans l'auto pour demander que des actions
adéquates soient mises en oeuvre par le gouvernement caquiste. Nous invitons
toutes les personnes concernées à se joindre à nous pour les femmes, pour les
parents, mais surtout pour nos enfants. Est-ce que c'est ça qu'on veut laisser
à nos enfants? Est-ce que c'est ça, la place d'un enfant au Québec? Non. C'est
non. Merci.
Le Modérateur : Merci
beaucoup, Myriam. Merci, Myriam. Nous allons passer maintenant à Jennifer
Maccarone du Parti libéral du Québec.
Mme Maccarone : Écoute,
après un discours tant senti, ça va être difficile de prendre la parole. Merci
beaucoup, Myriam. Merci beaucoup, mesdames, toutes les dames qui sont avec nous
aujourd'hui. Je pense que ça fait la démonstration de notre solidarité puis
aussi la démonstration du besoin dans le réseau.
Mais ce que Myriam a dit, c'est vrai,
c'est concret, c'est la réalité sur le terrain. Ce qu'elle partage, c'est des
valeurs que nous partagions, je pense, solidairement aussi, mais, oui, le Parti
libéral. Puis ça me fait beaucoup penser, Myriam, quand tu as mentionné une
place à... l'accès à la garderie universelle, mon collègue Marc Tanguay, il
avait déposé son projet de loi 897. Le gouvernement refuse d'appeler ce
projet de loi. Puis ça, c'est pour s'assurer qu'on aura un accès universel pour
tous les enfants de la province du Québec, comme nous avons un accès dans le
réseau de l'éducation.
Nous avons aussi demandé une extension du
Régime québécois à l'assurance parentale pour les parents qui sont inscrits sur
la place 0-5 ans. C'est facile, c'est faisable. Alors, on ne comprend pas
le refus du gouvernement. Ça fait un an depuis que Ma place au travail est née.
C'est un groupe qui demande au gouvernement une chose toute simple, avoir une
place en service de garde pour pouvoir retourner au travail. C'est simple et
pourtant, comme j'ai mentionné tantôt au Salon bleu, la liste d'attente ne
cesse pas de baisser. Les milieux familiaux continuent à fermer. Les autres
places qui se réalisent se font à compte gouttes. Le projet de conversion, ça
prend une éternité à se mettre en place. Les éducatrices sont épuisées et elles
quittent le réseau, les parents sont désespérés. Nous sommes à quelques mois
des élections, et on peut dire que la liste d'attente n'a jamais été aussi
élevée que dans le passé. Bref, on a plus de parents qui sont en détresse. Ce
serait le premier gouvernement qui aura fermé plus de places qu'il en aura
ouvert. C'est historique. C'est du jamais vu.
On peut dire que Mathieu Lacombe, c'est un
très bon communicateur, je pense qu'il n'y a personne qui va dire le contraire,
mais c'est un bon parleur et un petit faiseur. C'est le temps d'agir, ils ont
tous les moyens pour agir, alors c'est le moment pour le faire. On attend un
dépôt du budget mardi prochain. Le gouvernement va pouvoir utiliser tout
l'argent qu'il a reçu du fédéral pour agir sur le terrain pour régler le cas.
Il y a des familles qui sont en attente. Il y a des femmes qui sont en attente.
Il y a des bébés qui sont en attente. Il y a un Québec qui est en attente.
Merci.
Le Modérateur : Merci
beaucoup. Nous allons passer la parole à Mme Christine Labrie de Québec
solidaire.
Mme Labrie : Merci.
Merci à mes collègues de toutes les formations politiques qui sont ici
aujourd'hui, Jennifer, Méganne, Isabelle, Manon Massé, qui m'accompagnent
également. Merci à toutes ces mères. Et on en a un petit échantillon avec nous,
ce matin, là, mais c'est un tellement gros mouvement et un tellement beau
mouvement qui s'étend à travers tout le Québec. Et je suis contente que ce
mouvement-là existe pour faire entendre la voix des parents.
Ça fait des années qu'on a des problèmes
avec le réseau de services de garde éducatifs à l'enfance et qu'il manque des
places. Ça s'est intensifié dans les dernières années. Et on avait besoin
d'entendre ces voix-là dans l'espace public, parce que les femmes sont vraiment
pénalisées par le réseau déficient qu'on a en ce moment. Il n'y a pas assez de
places pour tout le monde, puis on ne peut pas accepter qu'en 2022, au Québec,
des femmes doivent choisir entre avoir un enfant et avoir une autonomie
financière, avoir une vie professionnelle. Ça ne se peut pas. Moi, je ne peux
pas tolérer ça.
Et ce qui me dépasse, c'est le mépris avec
lequel les demandes de ces parents-là, de ces femmes-là, le mépris avec lequel
la CAQ les traite. C'est désolant. Ces femmes-là demandent des places. On sait
que ce n'est pas possible de leur en offrir par magie, instantanément, mais ces
femmes-là, elles se précarisent financièrement, en ce moment, et elles vont en
vivre les impacts toute leur vie, jusqu'à leur retraite, jusqu'au dernier jour
de leur retraite. Ce n'est pas acceptable, comme société, qu'on les laisse
s'appauvrir parce qu'on n'a pas réussi à mettre à temps les moyens en place
pour leur offrir une place. On ne peut pas tolérer ça.
Et moi, je veux que le gouvernement
comprenne qu'on ne tolérera pas d'abandonner ces femmes-là à leur sort,
simplement parce que ça va prendre quelques années livrer les places. Et ça,
c'est si elles se concrétisent, les annonces qui ont été faites. Parce que tout
le monde, on est très au courant que des éducatrices, il y en manque. Ça ne
fait pas la queue, en ce moment, dans les programmes pour devenir éducatrice à
l'enfance. C'est une profession qui mérite d'être encore davantage valorisée.
Et les promesses, les belles promesses de Mathieu Lacombe, c'est loin d'être
certain qu'elles vont être réalisées. Et surtout, elles ne répondent en rien
aux besoins des femmes qui sont ici avec nous, ce matin, qui sont un peu
partout au Québec, à se demander comment elles vont payer leur épicerie,
comment elles vont payer leur loyer avec la hausse du coût de la vie, comment
elles vont payer la hausse d'Hydro. Ces femmes-là se demandent ça, en ce
moment, elles n'ont pas d'appel pour une place, elles sont désespérées puis
elles ne reçoivent que le mépris de la CAQ. C'est inacceptable.
Le Modérateur : Merci,
Mme Labrie. On va passer la parole maintenant à Mme Méganne Perry
Mélançon du Parti québécois.
Mme Perry Mélançon : Merci
beaucoup. Donc, dernière allocution pour nos enfants qui tiennent encore le
coup. C'est vrai que ça mobilise l'enjeu de l'avenir de nos enfants au Québec.
On le voit aujourd'hui. C'est aussi... Bien, je vais saluer rapidement, là, mes
collègues parlementaires des trois partis d'opposition, également les mamans et
leurs enfants qui sont avec nous aujourd'hui.
C'est un sentiment de déjà-vu pour moi
parce que j'ai déjà fait un exercice semblable dans mon comté, à Gaspé, à la
gare intermodale, donc ça me rappelle des beaux souvenirs. Mais,
malheureusement, ça me rappelle aussi la triste réalité, parce que ça touche
toutes les régions du Québec, hein, le problème des services de garde. Et même
que les cartes avec lesquelles travaille le ministère de la Famille sont
désuètes, la façon qu'on calcule les besoins, l'offre et la demande, ça ne
fonctionne absolument pas, ça ne tient même pas compte de la superficie. Moi,
on me disait, chez nous, alors que j'avais une liste d'attente de
185 enfants juste à Gaspé, là, un petit point sur la carte de mon comté,
ça me disait que l'offre balançait. Donc, moi, ça a été rapidement un enjeu
qu'on a dit : Wow! il y a un problème. Les parents, c'est mes collègues,
mes anciens camarades de classe, c'est mes amis, je sais la détresse que ces
femmes-là vivent.
Et ça a donné lieu, bon, à une rencontre
avec le ministre de la Famille, le premier ministre aussi en étude des crédits,
qu'on questionne et qui nous répond : Les maternelles quatre ans vont
venir tout régler, sur une liste d'attente de 180 enfants, de poupons
entre zéro et deux ans. Donc, ça a été long avant qu'il y ait quelques mesures
annoncées par le gouvernement. Encore aujourd'hui, on est à répéter les mêmes
enjeux, on fait les mêmes demandes au tout début. Je salue sincèrement le
travail et le courage des femmes de Ma place au travail et leurs membres qui
font un travail extraordinaire et qui valorisent la profession aussi, hein, tu
sais, qui sont partenaires, il faut le dire, avec Valorisons ma profession.
Donc, on est tous au travail pour essayer de trouver les meilleures solutions
possibles. Vous vous rappelez, Pauline Marois, quand elle a créé les places en
CPE, c'était pour deux grandes raisons, c'était pour que chaque enfant ait une
place à tarif unique au Québec, mais aussi qu'on permette aux femmes, qui sont
le plus souvent celles qui restent à la maison, de retourner au travail, de
retrouver leur passion aussi professionnelle, parce qu'on a le droit à ça nous
aussi. Vingt-cinq ans plus tard, bien, c'est un combat qui est encore à faire.
Donc, les CPE, c'est donner une chance égale pour chaque enfant. Ça veut dire
que, peu importe son milieu de vie, peu importe son contexte familial, peu
importe le revenu de son ou de ses parents, l'enfant doit avoir accès aux mêmes
services, aux mêmes services. Et donc ces jeunes enfants-là ont droit aux mêmes
services, aux mêmes places.
Donc, les efforts sont encore à faire, les
investissements aussi pour compléter le réseau des CPE. Ma collègue Véronique
Hivon l'a dit, le virage 100 % CPE, mais aussi d'appuyer les services en
milieu familial. Donc, on en sait quelque chose. Chacune des députées qui sont
là présentement dans leur comté, on vit toutes la même réalité, et il faut
continuer de lancer ce message-là, qui est hyperimportant. On sera tous encore
dans les prochaines actions portées par le mouvement. Et la vérité, bien, c'est
que les femmes, ces familles-là veulent surtout une solution à long terme.
Donc, oui, il faut une aide d'urgence, il faut... on a déjà déjà fait ces
demandes-là, mais il faut surtout qu'on rende le réseau accessible et universel
pour tous. Donc, on va poursuivre le travail. Voilà.
Le Modérateur : Alors, ceci
met fin à la conférence de presse. Je ne sais pas s'il y a une période de
questions. S'il y a des questions, on peut y aller individuellement, aussi,
pour débuter.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Bien,
allons-y au micro, si ça ne dérange pas.
Le Modérateur
:
Allons-y au micro. Parfait.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Bien,
si vous êtes d'accord qu'on poursuive brièvement. Bonjour. Merci, mesdames,
d'être présentes. Peut-être ma première question pour vous, Mme
Lapointe-Gagnon. Qu'est-ce que ça dit de nous, comme société, le fait que,
présentement, pour cet enjeu-là, que vous êtes toutes des femmes qui
représentent? Où sont les hommes?
Mme Lapointe-Gagnon (Myriam) : Ils
travaillent. Mon conjoint a travaillé cette semaine jusqu'à neuf heures le
soir, tous les soirs, parce que je suis aux études et que je ne sais pas si je
vais pouvoir aller travailler en septembre. Donc, toute la survie financière de
la famille repose sur les épaules de mon conjoint. Mon conjoint, d'ailleurs,
qui est aussi bon avec mon fils que moi, qui... ça fait juste une nuit qu'on
est partis de la maison, puis qu'il s'ennuie à en pleurer, dans le sens où on
prive les hommes aussi. Je ne veux pas qu'on accuse les hommes. Je pense qu'il
y a une question de société, une question de culture du travail. Par contre, ce
n'est pas pour rien que ce sont des femmes qui sont ici aujourd'hui. C'est
aussi parce qu'elles portent la charge mentale de trouver la place en garderie
aussi.
S'il y a quelqu'un qui a une suce dans
l'auditoire, je prendrais la suce. Parce que, sinon, ce sera mon sein. Alors,
c'est ça, je pense que c'est... il faut se regarder aller. Puis, tu sais,
tantôt, je me disais : Si on n'a pas de halte-garderie, si on n'a pas de
CPE à l'Assemblée nationale, on n'envoie pas aussi un modèle à tout le reste
des employeurs, tout le reste... Tu sais, la fonction publique devrait être un
modèle. Donc, ça part d'une société où l'égalité des sexes n'est pas acquise et
que tout le monde paie le prix. En fait, je pense que c'est ça, le message, là.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Le
ministre Lacombe a dit non, essentiellement, à l'aide d'urgence.
Mme Lapointe-Gagnon (Myriam) :
Oui, il a dit non.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Est-ce qu'il y a d'autres avenues que le gouvernement peut mettre en place,
auxquelles vous avez réfléchi dans le mouvement, pour vous aider dans
l'immédiat?
Mme Lapointe-Gagnon (Myriam) : Oui,
c'est sûr que nous, depuis le début, là, c'est notre priorité numéro un, l'aide
d'urgence aux familles, hein? Urgence, ça fait un an qu'on attend. On nous dit
qu'on a répondu à notre demande en prolongeant le RQAP. Ce n'est vraiment pas
ça qu'on avait demandé. Dans tous les cas, ça ne donne pas plus d'argent aux
familles. Il y a Québec solidaire qui est arrivé avec une proposition
intéressante, hier, à ce niveau-là, d'avoir une aide financière d'urgence par
mois aux familles. Ils se sont basés sur un modèle qui existait déjà. Je sais
que les libéraux pensent par ailleurs à une prolongation du RQAP. Tu sais, il
faut réfléchir à ces questions-là. Nous, on est ouvertes à n'importe quel type
d'aide. On est allées chercher aussi des pistes au fédéral. Ça n'a jamais
fonctionné, avec une sorte de PCU qu'il y avait à l'époque. Et non seulement ça
n'a pas fonctionné, mais le ministre Lacombe était au courant qu'on faisait des
démarches avec le fédéral, puis il ne nous a jamais aidées à aller essayer
d'obtenir cette aide-là. Tu sais, moi, j'ai eu des rencontres avec le cabinet
d'O'Toole, là, puis le cabinet de Trudeau pour aller essayer d'élargir les
critères, mais jamais on n'a eu d'aide du fédéral pour aider les familles. Tu
sais, on ne disait pas : Donnez-nous l'argent, nécessairement. On disait :
Aidez-nous à aider les familles. Puis on n'a jamais eu cette aide-là.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Dernière
question. Mme Labrie, peut-être pour vous. Je veux vous poser la question,
parce qu'on a cru entendre dans les micros, pendant la période de questions, le
premier ministre vous appeler de mère Teresa quand vous avez posé des questions
sur la condition économique des femmes. Est-ce que c'est bien ça qu'on a
entendu? Et comment est-ce que vous recevez ça?
Mme Labrie : Vous avez
bien entendu. Je pense que le premier ministre reconnaît que je me suis portée
ce matin à la défense de personnes vulnérables. Je n'ai pas aimé le mépris avec
lequel il le disait et le mépris avec lequel il reçoit nos demandes, puis
j'aimerais qu'il traite les demandes de ces femmes-là avec considération,
honnêtement.
Des voix : ...
Mme Labrie : Il devrait
s'excuser de son mépris. Parce que mère Teresa, c'est une personne pour qui
j'ai du respect. Moi, c'est son mépris qui me dérange, ce n'est pas les mots
qu'il a utilisés. J'aimerais qu'il réponde à ces demandes-là, qu'il arrête
d'être méprisant envers les femmes qui s'appauvrissent en ce moment. Puis, oui,
je vais me porter à leur défense aussi longtemps qu'il le faudra. Puis il m'appellera
mère Teresa s'il veut, en autant qu'il réponde à leurs demandes.
Mme Lapointe-Gagnon (Myriam) :
...On l'invitera à être père Teresa peut-être.
M. Bourassa (Simon) : Bonjour.
Peut-être... soit Mme Labrie encore. Est-ce qu'il y a quand même de l'espoir
avec le règlement qu'il y a eu avec les conventions collectives au niveau des
éducatrices en services de garde, qu'il y a une certaine revalorisation,
pardon, de la profession qui pourrait faire en sorte que, bon, il y a plus de
femmes et d'hommes qui soient attirés dans ce domaine-là puis
qu'éventuellement, le fameux plan, là, du ministre Lacombe puisse être mis à
exécution pour la création de places, là?
Mme Labrie : J'espère
que oui. Moi, ce que j'entends sur le terrain, c'est que les nouvelles
conventions collectives ont permis de freiner l'exode, donc de retenir les
éducatrices qui sont là et qui partaient en très grand nombre, hein, jusqu'à
très récemment. J'ai cru comprendre qu'on avait commencé à freiner cet
exode-là.
Par contre, au niveau du recrutement, moi,
je ne le vois pas du tout. Les programmes qui ont été mis sur pied dans les
derniers mois pour recruter des éducatrices donnent de très, très, très faibles
résultats compte tenu des milliers d'éducatrices dont on a besoin pour offrir
les places. Alors, moi, leur promesse de compléter le réseau en 2024, je n'y
crois pas tant qu'on ne sait pas comment on va recruter les
15 000 éducatrices que ça prend.
Et c'est pour ça que la mesure d'aide
d'urgence, elle est importante. Ça va durer longtemps avant qu'on réussisse à
offrir des places à toutes ces femmes-là, ici, pour qu'elles puissent retourner
travailler. C'est plusieurs années d'attente, c'est plusieurs années
d'appauvrissement. Et chaque mois de congé forcé sans solde, ça a un impact sur
toute la vie financière de ces femmes-là.
M. Bourassa (Simon) : Peut-être
pour madame Maccarone. C'est principalement le modèle proposé par le ministre
Lacombe, présentement, qui ne fonctionne pas ou qui n'est pas envisageable à
court terme? C'est principalement ça, la critique que vous avez envers la façon
dont on veut créer des places où on souhaite créer des places, là?
Mme Maccarone : Bien,
c'est vrai, on l'a déjà dit, on a deux ministres. On a un ministre qui dit
qu'il veut développer un réseau 100 % subventionné, mais quand on étudie
le projet de loi 1, il refuse de mettre dans sa loi qu'on va avoir un
accès universel pour tous les enfants. Alors, c'est quand même deux discours
totalement différents. Il ne veut pas légiférer pour s'assurer que ça serait un
droit. Il parle de développer jusqu'en 2024, mais au rythme qu'il développe
actuellement, ça va prendre 25 ans.
Il a fait des promesses en février 2019 de
développer 13 500 places. À date, on est rendu à
4 000 places. Ça veut dire que tous les bébés qui sont actuellement
avec nous aujourd'hui, les parents vont être grands-parents. Puis ça va être
les enfants actuellement en attente d'une place qui vont toujours être en
attente d'une place.
Alors, il faut que la babine marche avec
les bottines, c'est le temps d'y aller... ou, peut-être, c'est l'inverse.
Oui... c'est l'inverse. En tout cas, je pratique mes expressions.
Une voix : ...
Mme Maccarone : C'est ça.
Mais, comme j'ai dit tantôt, c'est un très bon communicateur, tu sais, c'est un
bon parleur, mais un petit faiseur. Il est bon pour communiquer son message,
puis les gens y croient. Mais la réalité, c'est concret, sur le terrain, ça ne
se développe pas. Il peut faire tant d'annonces qu'il veut, tant que nous
sommes en manque d'éducatrices, on ne peut pas ouvrir des places. Tant qu'on ne
convertit pas le réseau privé, on n'aura pas plus de places.
Puis je sais que ça fait moins de belles
annonces quand on fait de la conversion, mais ça reste que c'est nécessaire sur
le terrain. Puis le milieu familial continue à fermer leurs portes. C'est le
temps d'agir.
Le Modérateur : Merci. Alors,
mesdames, messieurs, merci de votre présence. Mesdames, bravo! Merci à
Jennifer, Isabelle, Parti libéral du Québec, aux gens de Québec solidaire, aux
gens du Parti québécois, aux femmes qui étaient présentes cet après-midi. Et un
coup de chapeau aux petits amis du Québec qui sont là, les petits amis. Henri,
Jules et les autres, merci beaucoup. Au revoir, bonne journée.
(Fin à 13 h 31)