(Quatorze heures une minute)
M. Lamontagne : Bonjour. Bonjour
à tous. Écoutez, grand, grand plaisir d'être ici. Vous savez, il y a des
institutions qui font partie du paysage depuis tellement longtemps que parfois
on les tient pour acquises et on en vient à oublier le rôle fondamental et
stratégique qu'elles jouent pour une collectivité ou un secteur d'activité. À
bien des égards, l'Institut de technologie agroalimentaire fait partie de cette
catégorie.
L'histoire de cette institution a commencé
en 1859, avec la création de l' École supérieure d'agriculture de
Sainte-Anne-de-la-Pocatière, et s'est poursuivie en 1892 avec la fondation de
l' école de laiterie de la province de Québec de Saint-Hyacinthe. L'air de
rien, depuis plus de 150 ans, l'ITA et ses deux campus procurent au
secteur agroalimentaire année après année ses matières premières les plus
précieuses, le savoir et l'expertise.
À l'heure actuelle, l'ITA, bien, c'est
près de 300 employés qui se consacrent au développement des compétences de
plus de 900 étudiants en formation initiale, sans compter la clientèle de
la formation continue et des autres formations spécialisées. Un taux de
placement moyen de 98 % pour l'ensemble des diplômés des sept programmes
de D.E.C. Et puis c'est plus de 1 000 offres d'emploi reçues chaque
année.
Par ses activités, l'ITA constitue
certainement le vaisseau amiral de la formation agroalimentaire du niveau
collégial au Québec, un vaisseau amiral qui fait cependant face à des vents
contraires depuis des années. En effet, l'ITA est aux prises avec un cadre
institutionnel mal adapté qui mine sa capacité à maintenir sa compétitivité et
à accomplir sa mission et du même coup favorise son déclin. À moyen terme, le
statu quo pourrait menacer sa pérennité.
Nous sommes en présence d'une école qui doit
fonctionner avec les règles de jeu d'un ministère. Ce cadre agit comme un
carcan qui est préjudiciable à plusieurs égards dans un établissement
d'enseignement. Cette situation a maintes fois été étudiée par les
gouvernements, au cours des 30 dernières années, sans pour autant que le
problème ne soit réglé.
Le rapport de la Commission sur l'avenir de
l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois, aussi connu sous le vocable du
rapport Pronovost, formulait une recommandation allant dans le sens d'une
autonomie accrue de l'Institut de technologie agroalimentaire. La Politique
bioalimentaire 2018-2025 fait, pour sa part, explicitement référence à une
volonté d'affirmer le leadership de l'ITA en matière de formation
bioalimentaire technique.
Notre gouvernement est aujourd'hui déterminé
à agir, et c'est précisément pourquoi j'ai... cette raison que j'ai déposé ce
matin, avec fierté, le projet de loi n° 77, visant à
constituer l'Institut de technologie agroalimentaire du Québec.
L'ITAQ serait géré par un
conseil d'administration et poursuivrait sa mission sur les campus de
Lapocatière et de Saint-Hyacinthe. Notre objectif est de créer un organisme
autre que budgétaire, soumis aux mêmes exigences que les autres organismes
gouvernementaux institués au cours des dernières années et qui offre des
formations dans un domaine spécifique, notamment l'Institut de tourisme et
d'hôtellerie du Québec et le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
La création d'un tel
organisme passe obligatoirement par une loi. Cette démarche trouve sa source
dans l'importance que notre gouvernement accorde à l'éducation. L'ITA roule
depuis plusieurs décennies avec le frein à main en fonction. Il est plus que
temps de desserrer ce frein et de libérer son potentiel.
Concrètement, bien,
davantage d'autonomie et de flexibilité vont procurer à l'ITA plusieurs
avantages. L'ITAQ serait géré comme une école et non comme un ministère. Son
modèle de gestion et le recrutement de personnel seront mieux adaptés à sa
mission. De plus, l'ITAQ aurait la possibilité de générer et d'accumuler des
revenus autonomes et de bénéficier de donations privées. L'établissement serait
aussi admissible à différents programmes gouvernementaux, dont les programmes
qui viennent aider la recherche. Ça permettrait de valoriser toutes les
installations de pointe dont elle dispose et, ultimement, ça va venir aider
l'ITA à assumer pleinement son mandat national, notamment en permettant de
faciliter les partenariats et la collaboration avec d'autres institutions
d'enseignement en région partout au Québec.
Alors, les besoins changent,
le contexte économique change, les technologies changent, le monde change, bien,
les organisations doivent forcément s'adapter. La présente démarche vise un
objectif qui est simple : permettre à l'ITA de pouvoir réaliser pleinement
sa mission au bénéfice de ses étudiants, du secteur et de ses entreprises.
Je suis donc très fier du
projet de loi que j'ai déposé ce matin et je suis convaincu que les membres des
partis d'opposition partagent l'objectif que nous avons qui est de donner les
meilleures conditions à l'ITA pour assurer son succès et celui de ses
étudiants.
C'est un nouveau chapitre de
l'histoire de l'ITA qu'on entame aujourd'hui, en vous rappelant que la première
page s'est écrite en 1859. Alors, longue vie à l'ITAQ. Merci.
La Modératrice
: Merci,
M. le ministre. Alors, s'il y a des journalistes qui ont des questions, vous
pouvez prendre la parole.
Mme Gamache (Valérie) :
Comment assurer dans... Je comprends que dans les règles de gouvernance il y a
certaines règles. Mais pouvez m'expliquer comment s'assurer qu'autant les gens
de La Pocatière que les gens de Saint-Hyacinthe vont tirer avantage de ce
nouveau modèle?
M. Lamontagne : Bien, dans un
premier temps, les premiers qui vont tirer profit de ce modèle-là, c'est les
étudiants. Qu'ils soient placés au campus de La Pocatière ou qu'ils soient au
campus de Saint-Hyacinthe, c'est une maison d'enseignement qui a ces deux
campus-là. Et puis la flexibilité où l'autonomie qu'on va lui conférer va lui
permettre, dans un premier temps, d'avoir de nouvelles possibilités au niveau
de l'embauche.
Puis la clé, si on veut, quand on parle de
qualité d'enseignement, c'est l'arrimage des compétences des gens qui
dispensent de l'enseignement avec les besoins puis avec la réalité de ces
enseignements-là. Alors, aujourd'hui, l'ITA a un peu les mains attachées par la
Loi sur la fonction publique, par toutes les... Les façons de recruter du
personnel pour un ministère versus une maison d'enseignement sont complètement
différentes. Alors, aujourd'hui, l'adoption d'un projet de loi comme ça va
permettre d'avoir de nouvelles manières, si on veut, de pouvoir opérer puis
avoir du personnel.
Alors, les premiers qui vont gagner de
tout ça, là, c'est vraiment les étudiants, peu importe qu'ils soient à La
Pocatière ou qu'ils soient à Saint-Hyacinthe.
Mme Gamache (Valérie) : Sur le
modèle, par exemple, de l'ITHQ, il y a un conseil d'administration, je
comprends que c'est un peu ça. Quelle sera la parité, par exemple... Est-ce
qu'il y aura une parité de représentativité entre les deux campus sur ce
conseil d'administration là pour prendre les décisions?
M. Lamontagne : Bien, en
réalité, première des choses, le conseil d'administration va être formé de 15 personnes.
Sur les 15 personnes, il y a 10, ça va être vraiment des administrateurs
indépendants, et il y a cinq personnes qui vont venir : directeur des
études, directeur général de l'ITAQ, après ça un représentant des professeurs
puis un représentant des élèves par campus. Alors il va y avoir cinq personnes
qui sont associées à l'organisation et puis il va y avoir 10 personnes
nommées au conseil d'administration, là, qui vont être des administrateurs
indépendants.
La Modératrice
:
Prochaine question.
M. Patelli (Yannick) : ...conseil
d'administration se retrouver avec un seul campus au Québec?
M. Lamontagne : Avec...
pardon?
M. Patelli (Yannick) : Un
seul campus au Québec.
M. Lamontagne : Non, non.
L'objectif, bien, non... puis aussi la vocation nationale. Tu sais, ça remonte
à 1859, si on veut, là. L'Institut de technologie agroalimentaire a vraiment
une vocation nationale, elle dispense, je veux dire, les sept programmes qui
sont disponibles de formation collégiale. C'est la seule institution qui
dispense les sept programmes de formation collégiale. Alors, elle a tout...
tout est en place, puis les infrastructures aussi en termes d'hectares de
terres, la ferme biologique, et tout ça, là.
Alors, l'idée en arrière de tout ça, c'est
de renforcer l'ITA, puis ultimement, bien, ça va être de renforcer sa présence
sur le territoire, ses campus. Puis aussi ça va permettre à l'ITA, si elle
veut, de développer des modèles d'affaires qui vont permettre aussi de créer
des alliances avec d'autres organisations, d'autres maisons d'enseignement
aussi, toujours dans un objectif, c'est de promouvoir la formation du
bioalimentaire puis d'avoir toujours les meilleures formations en fonction de
l'ère dans laquelle on va être, là.
M. Patelli (Yannick) : Est-ce
que le fait que ça ne soit plus sous le joug du ministère en tant que tel,
est-ce que ça va permettre aux administrations d'avoir plus de latitude dans...
pour engager du personnel d'enseignement, etc.?
M. Lamontagne : Tout à fait, tout
à fait. Écoutez, au ministère, ils me donnaient l'exemple d'un directeur des
études. Il y a un des deux campus, là, qui avait besoin d'un directeur
d'études. Bien là, un directeur d'études, dans la fonction publique, là, je
veux dire, il n'y en a pas vraiment beaucoup. Alors, il y a tout un appel, il y
a une mise en candidature, puis ça prend des mois, un an, deux ans pour
trouver, puis pendant ce temps-là on a des gens qui peuvent être des directeurs
des études adjoints, dans d'autres institutions d'enseignement supérieur au Québec,
qui voudraient venir travailler à l'ITA, venir remplir ces postes-là puis qui
ne peuvent pas le faire. Bien là, maintenant, ça va être possible de le faire,
on va être en mesure de...
Un besoin d'enseignement, quand on arrive
à une situation, puis il y a un cours qui doit commencer, deux semaines avant,
le professeur, un cas de force majeure, ne peut plus donner son cours, bien, il
faut que l'institution d'enseignement puisse se revirer sur un dix cents, comme
on dit, pour être capable de trouver la personne pour venir faire l'enseignement.
Aujourd'hui, à l'ITA, ce n'est pas possible. Alors, c'est vraiment un... c'est
comme un cadre de ministère pour une maison d'enseignement. Ce que ça va faire,
c'est que ça va venir donner à l'ITA les mêmes outils ou la même flexibilité,
au niveau de sa mission d'enseignement, qu'on retrouve dans toutes les maisons d'enseignement
supérieur au Québec.
M. Patelli (Yannick) : ...parce
que ça rappelle effectivement... en 2017, je pense que Pierre Paradis avait
avancé un peu dans cet esprit-là de libérer un peu l'ITA du joug du ministère. Est-ce
que vous avez déjà des échos des oppositions qui sont en faveur, un peu, de ce
projet?
M. Lamontagne : Bien, honnêtement,
là, moi, j'ai fait répertorier... quand je suis arrivé en poste puis j'ai
décidé de m'attaquer à ce dossier-là, là, j'ai donné un mandat, au début 2019,
pour me faire faire l'historique, un peu, là, de l'histoire de l'ITA, pas son
histoire comme maison d'enseignement, mais cette idée-là, là, que ça prenait
ces changements-là. Parce que l'ITA, son cadre était vraiment mal adapté. Puis
on est remonté jusqu'en 1992. Alors, j'ai toute une documentation, là, pendant
27 ans, toutes les réflexions, les tentatives, et tout ça, qui ont été
faites, ça fait que je peux vous assurer que... Puis que ce soit dans le
rapport Pronovost, en 2008, que ce soit dans la politique bioalimentaire, tu
sais, il y a comme un consensus dans le milieu depuis des années et des années
que l'ITA doit avoir davantage d'autonomie puis être outillé davantage pour
pouvoir opérer pleinement comme une maison d'enseignement, comme les autres maisons
d'enseignement supérieur, là.
La Modératrice
: Peut-être
une dernière question. C'est tout? Donc...
Mme Gamache (Valérie) : En
quoi, très, très concrètement, là, encore sur les infrastructures... puis là
vous savez que je pense à La Pocatière, là, mais en quoi, dans les infrastructures,
ça va faire en sorte que ce sera plus facile pour un des campus de dire : Ça,
c'est ma priorité, ça, j'investis directement puis j'ai le pouvoir de le faire,
je n'ai plus les mains liées, là? Qu'est-ce que ça enlève concrètement à...
M. Lamontagne : Bien, un, ce
que ça fait, première des choses, là, il ne faut pas le voir en termes de
campus, là, il faut le voir que c'est une organisation. L'organisation, c'est
l'ITAQ, qui a deux campus. Une chose que ça va faire, c'est que ça va permettre
à l'ITA aussi, naturellement, avec l'autorisation du Conseil du trésor, mais ça
va permettre à l'ITA de contracter des emprunts, comme un cégep est autorisé à
financer des nouvelles infrastructures. Aujourd'hui, c'est quelque chose qui n'est
pas possible. Mais, en bout de ligne, le conseil d'administration, à la lueur
des besoins de l'institution, va prendre les décisions appropriées, là, pour
faire en sorte que les infrastructures qui sont en place sur un ou l'autre des
campus, là, rencontrent les besoins, là, tu sais?
La Modératrice
: Merci.
Alors, c'est ce qui met fin à la période de questions et à la conférence de
presse. Bonne journée.
M. Lamontagne : Merci
beaucoup.
(Fin à 14 h 13)