(Neuf heures trente-deux minutes)
M. LeBel : Bonjour.
Aujourd'hui, c'est une interpellation. Nous deux, on va questionner la ministre
des Aînés sur un incontournable. L'incontournable, c'est de mettre en place une
commission d'enquête publique et indépendante.
La ministre nous répond souvent qu'il y a
déjà des rapports, puis les gens, les commissaires sont indépendants. Mais
nous, on demande un rapport… une commission indépendante, bien oui, mais
publique. On veut qu'un groupe, une commission d'enquête puisse amener des gens
à témoigner, que la population puisse voir ces gens-là. Les gens veulent savoir
qu'est-ce qui s'est passé au printemps.
Et les rapports, on sait ce que c'est, là.
On l'a vu dans l'article de LaPresse, ce matin, c'est assez
clair, là, les stratégies autour des rapports. On dépose une heure… un vendredi
après-midi ou on va déposer une heure après une conférence de presse d'un
ministre pour être sûr qu'il n'ait pas à répondre à des questions des journalistes.
C'est ça, des rapports qui sont déposés en cachette au gouvernement qui va le
diffuser avec des stratégies de communication.
Ce n'est pas ça qu'on veut. On veut une
vraie commission d'enquête, publique et indépendante, où est-ce que les gens
vont pouvoir voir ce qui se passe. C'est 4 000 morts, là, c'est
vraiment… ce n'est pas rien. C'est la pire tragédie meurtrière qu'on n'a jamais
connue au Québec, là. Comment on peut passer à côté d'une vraie commission
d'enquête? Je ne peux pas y croire.
Je me souviens, il y a quelques années,
quand les oppositions demandaient une commission d'enquête pour le crime… pour
la commission Charbonneau, la collusion, la corruption, le gouvernement disait
non, disait non, disait non. Mais le gouvernement a fini par plier parce que ça
en prenait une, commission. Moi, je pense qu'il va arriver la même chose. La
ministre devrait… le gouvernement devrait tout de suite acquiescer à notre
demande et mettre en place cette commission d'enquête. De toute façon, ils
devront y arriver.
Nous, on ne lâchera pas le morceau. À
chaque semaine, on va redemander cette commission parce qu'on pense que les
citoyennes… les Québécois, les Québécoises méritent d'avoir des réponses à
leurs questions. Et c'est ce qu'on va faire, ce matin, on va questionner la
ministre à ce sujet, moi et le député des Îles-de-la-Madeleine. Vas-y, Joël.
M. Arseneau : Merci, Harold.
Alors, que dire de plus? En fait, on a énormément de difficulté à comprendre
pourquoi le gouvernement n'accepte pas cette demande-là alors que l'Ontario,
qui a à peine 1 400 morts, si on compare aux 4 000 morts au
Québec, a d'emblée décidé d'aller au fond des choses.
On sent chez le gouvernement cette volonté
de vouloir balayer sous le tapis ce qui s'est passé au printemps dernier,
d'éviter de rendre des comptes, d'éviter d'aller au fond des choses, mais, ce
qui est le plus dramatique, c'est d'éviter de permettre aux gens qui sont les
victimes de cette tragédie de pouvoir comprendre ce qui s'est passé. Je pense
aux victimes, évidemment, à ceux qui sont disparus, mais à toutes leurs
familles qui sont encore aux prises avec cette tragédie et avec ce
traumatisme-là.
Et je pense qu'on doit à ces familles,
absolument, d'aller au fond des choses pour comprendre non seulement si le
système a répondu adéquatement à la crise, ce qui, à l'évidence, n'est pas le
cas, mais pourquoi, comment on a déployé les ressources, quelle a été la
réponse gouvernementale, quelles sont les décisions qui ont été prises ou les
décisions qui n'ont pas été prises qui ont donné lieu à cette tragédie.
Il y a, dans la commission d'enquête qu'on
demande, une commission d'enquête indépendante, un processus qui se veut
public, ouvert, à la portée de tous pour qu'on puisse ensemble passer au
travers, de pouvoir faire la paix avec cette tragédie printanière. Et ça, c'est
l'exercice d'une commission d'enquête. Pour plusieurs, plusieurs milliers de
familles, le processus de deuil ne peut pas se faire sans aller au fond des
choses et pouvoir comprendre. Pour accepter, il faut comprendre. Il faut aussi
tirer des leçons pour éviter qu'une telle tragédie ne se reproduise.
On ne peut plus se mettre la tête dans le
sable. Il faut donc une commission d'enquête publique et indépendante qui nous
permette de faire le tour de la question une bonne fois pour toutes. C'est
comme ça qu'on pourra tirer les leçons qui s'imposent, plutôt que de tenter,
là, de trouver des solutions faciles, comme par exemple des maisons des aînés.
Ça ne se règle pas, un dossier comme celui-là, un traumatisme comme celui-là,
avec du béton puis quelques millions investis dans des nouvelles constructions.
Le problème est beaucoup plus profond. Il
faut aller au fond des choses, et c'est ce qu'on va demander à la ministre aujourd'hui
de faire, d'aller jusqu'au bout de sa logique, où elle dit qu'on a connu un
échec. Il faut comprendre pourquoi, comment, pour en tirer les leçons
appropriées comme gouvernement, comme État. Et évidemment, comme ministre,
c'est sa responsabilité. C'est ce qu'on va plaider aujourd'hui. Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. On va prendre les questions.
Mme Gamache (Valérie) : Justement,
concernant sa responsabilité, comment jugez-vous que Marguerite Blais devra...
doit se comporter maintenant devant ce qui s'est passé ce printemps...
M. LeBel : Comment elle
doit se comporter?
Mme Gamache (Valérie) :
...qu'elle n'a pas pris ses responsabilités?
M. LeBel : Bien, à
l'émission Enquête, à Radio-Canada, c'était un peu pathétique, là, de
voir qu'elle repoussait toujours le blâme, le premier ministre qui décide, le ministre
de la Santé. C'est justement ce que les citoyens ne veulent pas voir, là, des
gens qui se renvoient la balle : Ce n'est pas moi qui est responsable,
c'est toi, c'est toi qui prends des décisions, ce n'est pas moi, c'est toi.
C'est ça qu'on ne veut pas.
La ministre, là, elle est arrivée... Puis
c'est quelqu'un de bien qui est arrivé, qui veut défendre les aînés, elle s'en
est fait une marque de commerce. Bien, aujourd'hui, il faut qu'elle livre la
marchandise, elle n'a pas le choix. C'est elle qui a la responsabilité. Le premier
ministre l'a nommée là, puis il savait pourquoi : parce qu'elle avait
cette aura de responsabilité des aînés. Maintenant, il faut qu'elle vive avec
ça puis qu'elle réponde aux questions. Juste répondre aux questions, c'est sa responsabilité
comme ministre. Elle ne peut pas renvoyer la balle toujours, toujours dire que
c'est la faute des libéraux, dans le temps, quand on sait qu'elle a déjà été ministre
dans le temps des libéraux.
On ne peut plus... Les gens qui ont vu ça
à la télé, là, pendant le printemps passé, qui voyaient, là, le CHSLD Herron,
les gens qui ont vu ça, les gens qui ont écouté l'émission Enquête, qui
ont vu que la ministre dit que c'est un échec, que le gouvernement a eu un
échec, les gens qui entendent ça, ils ont besoin de réponses. Puis elle, elle
doit donner des réponses.
M. Arseneau : Juste un
complément. Mme Blais a dit : Le pouvoir, c'est relatif. Nous, ce
qu'on lui dit aujourd'hui : Vous avez le pouvoir aujourd'hui de commander
une enquête publique, vous avez une chance de corriger les erreurs du passé en
s'assurant de pouvoir aller au fond des choses pour ne plus qu'elles se
reproduisent.
Donc, cette responsabilité ministérielle
là, là, si elle a échoué au cours du printemps, aujourd'hui, le test de vérité,
c'est : Est-ce qu'on va continuer d'échouer? Est-ce qu'on va continuer de
s'enfoncer dans le déni sur ce qui s'est passé comme pire tragédie, au Québec,
une tragédie qui a touché principalement les personnes âgées, les aînés? Est-ce
que, sur le plan gouvernemental, on accepte cette espèce d'âgisme là, lié à la COVID-19,
où on semble concéder qu'il était quelque part naturel que l'on abandonne les
personnes âgées à leur sort dans les CHSLD au cours du printemps?
Il est là le drame. Le drame, il s'est
joué au printemps, mais il continuera aussi de se prolonger dans le temps si la
ministre et si le gouvernement refusent aujourd'hui de prendre leurs
responsabilités par rapport à ce qui s'est passé et sur ce qui doit se faire maintenant
pour éviter que ça ne se reproduise dans l'avenir.
Mme Gamache (Valérie) :
M. LeBel, juste en terminant, concernant les manifestations qui se
préparent demain, à Rimouski, est-ce que le taux d'inquiétude augmente?
M. LeBel : Ce qu'on m'a dit du
côté gouvernemental c'est qu'on va faire respecter les règles. Les règles qu'on
a apprises cette semaine, c'est que, s'il y a une manifestation, les gens
doivent porter le masque et avoir la distanciation physique adéquate. Je
m'attends à ce que le gouvernement fasse respecter ces règles. C'est, ce qu'on
m'a dit.
Pour le reste, je continue à penser que ce
n'est pas une bonne idée de venir parader à Rimouski samedi. De faire du
covoiturage de Québec ou d'ailleurs pour venir parader, aller dans nos
dépanneurs, aller partout, ce n'est pas vraiment une bonne idée. Mais je suis
pour la liberté d'expression, ça fait qu'on verra ce que ça donne.
Mme Gamache (Valérie) :
...l'impression que ça va dégénérer puis que, quand tout... Faire respecter les
règles, c'est quand même procéder à des arrestations. On a l'impression qu'on
va faire des martyrs de...
M. LeBel : Moi, tout ce que je
peux faire, c'est de faire confiance aux policiers, faire confiance aux gens
qui devront faire respecter. Le gouvernement, il met en place les règles. On
verra comment ils vont les appliquer, mais il faut les appliquer.
Puis la meilleure façon qu'il n'y ait pas
rien, qu'il n'y ait pas de problème, c'est de ne pas la faire, cette
manifestation-là, c'est de ne pas la faire. Passez votre message autrement. Maintenant,
avec les médias sociaux, là, il y a plein de façons de passer des messages.
Allez-y, passez vos messages. Mais ne venez pas parader à Rimouski. On ne sait pas
comment ça peut tourner, puis ce n'est pas une bonne idée.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup.
(Fin à 9 h 42)