(Neuf heures une minute)
Le Modérateur
: Donc,
bonjour. Bienvenue à ce point de presse sur le droit à l'amour. Donc, vont
s'adresser à vous aujourd'hui Mme Emmanuelle Chaloux, du front commun pour les
personnes assistées sociales du Québec, M. Simon Pouliot et M. Robert Dupuis,
qui vous feront des témoignages, ensuite Mme Véronique Laflamme, du FRAPRU, M.
Serge Petitclerc, du Collectif pour un Québec sans pauvreté, M. Alexandre Leduc,
député de Québec solidaire pour Hochelaga-Maisonneuve, Mme Monique Sauvé, pour
Fabre, du Parti libéral, et M. Harold LeBel, de Rimouski, pour le Parti
québécois.
Donc, M. LeBel va commencer.
M. LeBel : Bonjour, tout le
monde. Une conférence de presse sur le droit à l'amour, un peu particulier. Et
ici je ne parle pas de l'amour entre le gouvernement et les municipalités
aujourd'hui. On parle du droit à l'amour des gens qui vivent la pauvreté, qui
sont à l'aide sociale, souvent, et qui sont obligés de déclarer leur condition
de vie maritale et faire en sorte qu'ils sont coupés. Souvent, des dettes
s'accumulent. Vous allez avoir des témoignages qui vont vous le dire tantôt.
On va distribuer aussi à tous les députés
aujourd'hui un carton à la veille de la Saint-Valentin qui dit : Imaginez
ne pas avoir le droit de vivre avec la personne qui fait battre votre coeur. On
espère pouvoir convaincre tout le monde d'une façon transpartisane. J'ai des
gens ici du Parti libéral et de Québec solidaire. On pense que les gens de la
CAQ vont être sensibles à ça aussi. Moi, je pense qu'on est rendus là. On
serait capables de faire un grand pas pour aider les gens à se sortir de la
pauvreté puis leur permettre de vivre dans la dignité, vivre leur vie de couple
dans la dignité.
Ça fait que je laisse les gens vous parler
des situations qu'ils vivent.
Le Modérateur
: Mme
Chaloux.
Mme Chaloux (Emmanuelle) :
Bonjour. Je me nomme Emmanuelle Chaloux et je suis représentante du Front
commun des personnes assistées sociales du Québec. Demain, 14 février 2020, des
milliers de Québécoises et Québécois célébreront la Saint-Valentin. Au front
commun, depuis des années, cette fête de l'amour est plutôt symbole de l'injustice
que vivent les personnes assistées sociales lorsqu'elles sont en couple. Au
Québec, la notion de vie maritale a été une grande avancée pour le mouvement
des femmes et le mouvement LGBTQ+, une lutte que ces personnes ont gagnée après
de dures batailles.
Malheureusement, à l'aide sociale,
l'application de la notion de vie maritale est plutôt synonyme de contrôle
abusif et d'atteinte à l'autonomie des personnes. Pour que le ministère déclare
qu'il y a vie maritale, il faut remplir trois critères : la cohabitation
de 12 mois consécutifs, le secours mutuel et la commune renommée. À première
vue, on pourrait dire que l'application de la notion ressemble à ce qu'on
pourrait retrouver à l'impôt. Toutefois, il y a plusieurs différences majeures
qui méritent d'être soulignées.
La première différence se situe au niveau
de l'autonomie financière. Les personnes déclarées en vie maritale à l'aide
sociale sont considérées comme un ménage. Dans le cas de deux personnes
assistées sociales, leurs prestations sont sévèrement amputées. Deux personnes
recevant chacune 690 $ seules reçoivent 1 049 $ pour les deux, une
perte de 24 % par rapport au montant auquel elles auraient droit
normalement. De plus, la prestation est versée à une seule personne dans le
ménage, ce qui peut causer des situations litigieuses entre conjoints et
conjointes et ouvre la porte à la violence économique. La situation est encore
plus problématique si l'une ou l'autre des personnes conjointes travaille. La
personne assistée sociale n'a plus droit à une prestation dès que son ou sa
conjointe gagne un peu plus de 1 443 $ par mois et devient alors
complètement dépendante financièrement.
L'autre différence se situe au niveau des
mesures de contrôle entourant l'application de la notion de vie maritale à
l'aide sociale. Le fait est que les personnes assistées sociales se font marier
malgré elles lorsqu'elles tentent de s'entraider. Par exemple, être colocataire
peut mener à une accusation de vie maritale, ou, encore, même si deux personnes
vivent dans des logements séparés, elles peuvent se faire enquêter pour
déterminer si elles passent plus de temps chez l'une ou chez l'autre. Si le
ministère décide d'enquêter et demande à n'importe qui dans l'entourage des
personnes si elles vivent en couple, cela peut être suffisant pour décréter
qu'il y a vie maritale. Le ministère peut aussi appliquer rétroactivement la
mesure et réclamer des sommes complètement ridicules qui endetteront les
personnes concernées pour des années, voire des décennies à venir.
Contrairement aux autres citoyennes et
citoyens, les personnes assistées sociales sont coupables jusqu'à preuve du
contraire. Le fardeau de la preuve leur incombe si elles décident d'aller en
appel, ce qui ne fait aucun sens. Il n'est donc pas surprenant que tant de
personnes assistées sociales s'isolent. En effet, selon le recensement de 2016,
56 % de la population québécoise serait en couple, mais cette proportion
diminue à 15 % chez les personnes assistées sociales. Pourtant, elles
bénéficieraient grandement de l'entraide que vivre à deux peut apporter, comme
de se partager les coûts de logement et de la nourriture, pour ne nommer que
ceux-ci.
Pour mettre fin à cette injustice, le Front
commun des personnes assistées sociales du Québec revendique depuis plusieurs
années la chose suivante : une personne, un chèque. Dans le Plan d'action
gouvernemental pour l'inclusion économique et la participation sociale 2017‑2023,
le gouvernement reconnaît d'ailleurs ce droit pour une partie des personnes
assistées sociales. Dans son plan d'implantation d'un revenu de base, le gouvernement
prévoit qu'en 2023 les personnes ayant accès à ce revenu de base auront chacune
un chèque sans pénalité. Alors, pourquoi ne pas reconnaître ce droit pour
l'ensemble des personnes assistées sociales? Il s'agirait d'un geste simple
pour enfin permettre l'autonomie économique des personnes et mettre fin aux
mesures de contrôle abusives liées à l'application actuelle de la notion de vie
maritale.
En terminant, rappelons que l'aide sociale
est un droit que nous nous sommes donné comme société afin de pouvoir vivre
dignement, peu importe notre statut d'emploi. Avec les années, ce droit s'est
grandement effrité, et il plus que temps que le gouvernement fasse des gestes
concrets pour le rétablir, comme l'élargissement du revenu de base à l'ensemble
des personnes assistées sociales. Bonne Saint-Valentin!
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. M. Simon Pouliot va venir nous lire un témoignage.
M. Pouliot (Simon) : Bonjour.
La personne qui devait vous parler aujourd'hui a croulé sous la pression que
l'aide sociale fait vivre. C'est une personne courageuse qui vit plusieurs difficultés,
et, demain, elle est convoquée au Tribunal administratif du Québec par rapport
à sa dette. La pression combinée de s'exposer devant les médias et de devoir se
défendre devant l'appareil judiciaire l'a paralysée. Je lirai donc son
témoignage. Le voici.
J'aurais aimé mieux ne pas avoir cet
entretien avec vous, mais je pense à tous ceux et celles, dont moi-même, qui
ont été lésés et opprimés. Je suis ici pour parler de ce que j'ai vécu. Sous de
fausses accusations, on a arrêté mes prestations d'aide de dernier recours au
mois d'août 2019, me réclamant, par le fait même, 96 000 $ solidairement
avec mon colocataire.
Mon histoire de dette commence en 2018.
J'avais déclaré à l'aide sociale que je ne pouvais vivre seul. À partir de là,
l'aide sociale m'a fait la vie dure. Elle m'a alors demandé de faire remplir un
formulaire d'attestation par mon médecin qui attesterait mon incapacité à
rester seul. S'en est suivi que mon médecin n'a pas voulu remplir cedit
formulaire. Pourtant, on me reconnaît la contrainte sévère à l'emploi, mais,
tout d'un coup, on me demande de prouver que j'ai une contrainte. Trouvez
l'erreur. Et c'était la première démarche parmi plusieurs pour venir me
coincer.
En 2019, on m'accuse de vivre en vie
maritale. Ils ont dit qu'ils avaient des témoins. Je trouve qu'il y a ici
présomption de culpabilité. Puis le ministère envoie une missive comme quoi je
ne recevrai plus aucune prestation à partir d'août 2019. Comme vous pouvez vous
en douter, cela m'a perturbé profondément. Et, comme ce n'était pas déjà assez,
on me réclame 96 000 $ en dettes. Selon le ministère, je suis
considéré vivre maritalement depuis 2005. Depuis 2005, ils me réclament toutes
les sommes versées.
Mon lien avec mon colocataire en est un de
colocation. J'ai décidé de vivre ainsi en raison du coût élevé de la vie et
parce que j'ai à coeur l'entraide entre les personnes. Je n'ai jamais caché que
j'habitais en colocation. On me dit que j'ai enfreint la loi avec 15 années de
retard. J'aurais aimé le savoir avant. J'aurais agi autrement. Étant une
personne vulnérable, je ne compte plus les journées complètes à vivre de
l'anxiété paralysante. Ce qui m'a aidé à passer au travers, c'est ma foi dans
le système car j'ai toujours cru à un règlement avec l'aide sociale.
Ma présence ici aujourd'hui suggère que
j'ai très hâte de tourner la page et de reprendre une vie normale. Je pensais
naïvement que les gouvernements voulaient enrayer la pauvreté. C'est pour cette
raison que je fais appel à vous pour me soutenir dans ma démarche. Je suis
présentement à bout de souffle et de ressources. À l'aide! Je ne devrais pas
avoir à quémander mes prestations d'aide sociale.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. M. Dupuis va venir vous faire un court témoignage.
M. Dupuis (Robert) : Bonjour.
Témoignage d'horreur de Robert Dupuis. En 2016, j'ai reçu une lettre du ministère
comme quoi j'aurais fraudé l'aide sociale. D'un seul coup, toutes mes
prestations ont été coupées. Je suis désormais perçu comme un criminel. Et
voilà que je dois plus de 70 000 $ au ministère. Pourquoi? Parce que
j'habite avec un coloc et que le ministère a déterminé que nous étions en vie
maritale.
Pourtant, il avait été clairement nommé à l'aide
sociale que j'habitais avec un coloc, notamment pour des raisons évidentes de nécessité
financière. Les prestations de l'aide sociale ne permettent pas à une personne
seule de vivre dans un logement convenable. J'avais affirmé que je payais un
montant de 500 $ par mois qui était partagé avec mon coloc. Les agents
étaient au courant de ma situation, convenue et tolérée depuis des années. Ils
voyaient mes rapports d'impôt, les lettres diverses, institutions et choses...
Les choses étaient claires. Cela n'a pas empêché le ministère d'affirmer que je
vivais en couple avec mon coloc, et ce, depuis 14 ans. Le ministère s'est
basé sur la parole des voisins, avec qui nous sommes en conflit pour des
raisons de perturbation et de mauvais voisinage, pour affirmer que j'avais maintenant
un conjoint, et me réclamant 14 années d'arrérages d'aide sociale.
Actuellement, je dois vivre des revenus de
la personne avec qui je vis puisque le ministère m'a enlevé tous mes revenus.
La seule entrée d'argent est que je reçois de la TPS, et le crédit d'impôt de
solidarité est de 35 $. Vous comprendrez que ma situation empêche d'avoir
un logement ou de subvenir à tout autre besoin. Je dois donc vivre aux crochets
de mon colocataire qui fait environ 1 400 $ par mois, une situation
qui le met lui aussi dans des situations de précarité. Pour m'en sortir, je
dois vivre de surplus alimentaires et d'autres... plus concrètement, fouiller
dans les poubelles, les conteneurs. Quand ça ne suffit pas, les banques
alimentaires sont là pour m'aider et à subvenir à mon besoin essentiel, me nourrir.
La dette initiale établie en 2017 au
montant de 77 000 $... Depuis, malgré toutes les sommes versées au
ministère, soit 115 $ aux 15 jours, la dette et les intérêts étaient
de 86 000 $. À l'heure actuelle, on s'en va vers 100 000 $
de dettes. La figure de l'épée de Damoclès est insuffisante pour évoquer tout
ce qu'on peut ressentir comme pression dans cette situation intenable, injuste
et sans recours. Quelle motivation peut-on avoir à retourner au marché du
travail, à faire quoi que ce soit pour améliorer la situation quand on sait que
tout qu'est-ce qu'on va gagner va servir à payer une dette fabriquée de toutes
pièces par le ministère, qui se fout de notre bien-être? Je vais probablement
mourir avec cette dette, et elle aura traîné mon coloc et moi dans la pauvreté
extrême de notre vie.
Nous sommes malheureusement nombreux à
nous faire avoir par les techniques inhumaines du ministère. Face à l'énormité
de la situation, la pression colossale, je viens, un jour, de parler d'idées
suicidaires à mon avocate d'aide sociale. L'avocate m'a royalement ignoré.
Ensuite, je lui ai demandé si le Protecteur du citoyen pourrait faire quelque
chose dans ce type de... et l'avocate a pouffé de dire comme si elle savait que
ça n'allait rien donner. J'ai appelé un cabinet d'avocats privé, même chose.
J'ai fait appel sans succès. Je répète, je n'ai pas de revenu depuis plus de
trois ans. J'ai l'impression que, pour le ministère, on est juste une gang de
bisons qu'on s'arrange pour pitcher en bas d'un précipice afin de récolter le
peu de chair qu'il nous reste sur l'os. Merci beaucoup.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. Donc, Mme Véronique Laflamme va venir nous parler pour le FRAPRU.
Mme Laflamme (Véronique) :
Bonjour. Le témoignage de Robert dit tout, dit tout sur le désespoir des gens
dont le revenu d'aide sociale ne permet pas de payer le loyer. Le loyer,
actuellement, le loyer moyen au Québec pour une chambre à coucher, c'est
716 $. Le montant du chèque d'aide sociale est de 690 $. Alors,
faisons le calcul, c'est impossible d'arriver avec un tel montant. Même avec
contrainte à l'emploi, le chèque de 828 $ nous laisse au bout du compte
28 $ par semaine si notre loyer est bien le coût du loyer moyen, parce que
la Société canadienne d'hypothèques et de logement fait bien remarquer que les
rares logements disponibles sont au moins 25 $ plus chers que ces
montants.
Donc, ça urge de mettre fin à cette
coupure pour vie maritale pour donner un peu d'air aux gens qui, finalement,
tous les mois, doivent se mettre en situation de survie, compromettre leur
santé physique et mentale, compromettre même leur sécurité. Donc, aujourd'hui,
on lance un message clair en unissant notre voix à celles du Front commun des
personnes assistées sociales, du Collectif pour un Québec sans pauvreté et des
trois partis d'opposition. Mettons fin à cette coupure injuste.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. M. Serge Petitclerc, pour le Collectif pour un Québec sans pauvreté.
M. Petitclerc (Serge) : Merci.
Bonjour. Merci d'être présents. En décembre dernier, tous les partis présents à
l'Assemblée nationale ont adopté une résolution, une motion disant que c'est
important, le droit à l'aide sociale. Ça fait 50 ans que la loi existe. Il
serait temps qu'on la dépoussière parce que cette loi-là, son objectif de base
est de faire en sorte que les gens puissent subvenir à leurs besoins de base,
ce qui n'est pas le cas actuellement. On a même des gens qui ne sont pas
capables d'avoir tout simplement une prestation à cause des questions de vie
maritale. Puis ça serait temps que le gouvernement, avec les partis
d'opposition, fasse en sorte de transformer cette loi-là, de la dépoussiérer
pour faire en sorte que les personnes puissent avoir une vie minimalement
décente. Merci beaucoup.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. M. Leduc, Québec solidaire.
M. Leduc : Être prestataire
d'aide sociale au Québec, ce n'est pas la belle vie, ce n'est pas la vie
facile. Quand tu reçois 100 $ par mois en dons de tes proches, bien, il y
a des bonnes chances que ces montants-là vont être déduits de ton chèque. Quand
tu as plus de 1 500 $ dans ton compte bancaire, bien, tu pourrais
perdre une partie de ces prestations-là. Ce n'est un secret pour personne, les
prestations offertes sont loin d'être suffisantes pour joindre les deux bouts.
On en a fait cas précédemment. Dans Hochelaga-Maisonneuve, la circonscription
que je représente, c'est un enjeu majeur.
Hier, on avait une motion du mercredi sur
le logement. J'ai cité quelques cas d'annonces qu'on pouvait trouver sur
Kijiji. Bonne chance pour trouver quelque chose dans ces prix-là avec les
prestations de base de 690 $ dont on évoquait tantôt. Alors, imaginez si,
par-dessus tout ça, le gouvernement vous coupe vos parties de vos prestations
parce que vous habitez avec un coloc ou un conjoint. Imaginez si, par même une
directive du médecin qui spécifie que vous ne pouvez pas vivre seul, bien, vous
êtes quand même obligé de le faire évidemment, mais au risque de perdre des
prestations. Alors, vous vous imaginez que vous direz, comme nous ici
aujourd'hui, que ça n'a pas de bon sens et qu'il faut faire quelque chose avec
ça. Bien, c'est ce que vivent plusieurs prestataires de l'aide sociale.
Ce n'est pas normal que le gouvernement
soit au courant de cette absurdité du système et que rien ne soit fait pour la
corriger. Ce que les groupes demandent, ce n'est que le gros bon sens, c'est
d'appliquer le principe d'une personne, un chèque, et, bon, peut-être de gérer
des cas d'exception, s'il y en a, au lieu d'imposer à des milliers de
prestataires une règle qui pénalise la majorité. C'est une question
d'indépendance financière.
C'est une question d'accès au logement
aussi. Évidemment, dans un contexte de pénurie de logements, avec des taux
d'inoccupation extrêmement bas, on peut imaginer que, si on permet à des gens
de vivre ensemble, ça va pouvoir libérer un peu de logements et peut-être
rendre la chose plus facile pour trouver un logement pour les personnes qui en
ont besoin.
Finalement, l'État devrait être là pour
accompagner ses citoyens les plus vulnérables, pas pour leur mettre des bâtons
dans les roues. Et les personnes assistées sociales ont droit aussi à l'amour.
C'est le message qu'on envoie aujourd'hui. Et ça va me faire plaisir de donner
les petites cartes de Saint-Valentin à mes neuf collègues du caucus solidaire.
Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. Mme Sauvé.
Mme Sauvé : Bonjour à vous
tous. Je suis très heureuse d'être ici ce matin et de pouvoir être avec mes
chers collègues dans un élan transpartisan. Je veux remercier le collègue de Rimouski
qui a eu cette initiative. Je suis également avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve.
C'est important d'être ici et c'est important de porter la voix des personnes
vulnérables. Je veux souligner le courage des deux personnes qui ont
témoigné — M. Dupuis, entre autres, merci pour votre
courage — et les groupes qui se sont exprimés, qui portent leur voix.
Avec ces petits cartons, non seulement il faut distribuer cette réalité que les
gens vivent, mais il faut être sensible, faire front commun et pouvoir défendre
ces réalités difficiles.
Alors, oui, j'ajoute ma voix à tous ceux
qui sont avec moi et les milliers de personnes au Québec qui se retrouvent dans
des situations dramatiques telles que celles qui ont déjà été exprimées. Je
veux souligner le travail aussi des organismes communautaires qui travaillent à
l'accompagnement de ces personnes et faire en sorte qu'encore une fois leur
voix puisse être portée.
Vous savez, j'ai travaillé pendant près de
20 ans dans l'action communautaire, dans les milieux communautaires, et j'ai
été témoin de cette détresse, des impacts réels, concrets que peut représenter
la diminution de prestations en raison d'une cohabitation. Alors, je suis
sensible, je suis dans une grande écoute par rapport à ce que j'entends, qui,
clairement, clairement, est une situation tellement dramatique pour ces
personnes.
Alors, aujourd'hui, prenons le temps — oui,
le droit à l'amour — d'être ici... rapporter l'importance des mesures
concrètes pour améliorer le sort de ces milliers de Québécois et de
Québécoises. Et, si on a eu, le gouvernement précédent, ce grand déploiement du
Plan d'action gouvernemental pour l'inclusion économique et la participation
sociale, avec le revenu de base qui était un élément historique, il faut
poursuivre l'élan. Il faut être à l'écoute de ces gens. Il faut être dans la
nuance et la souplesse pour assurer une justice sociale.
Alors, oui, merci pour cette initiative,
mais c'est le début d'un dialogue. C'est le début d'un dialogue transpartisan,
à faire en sorte qu'on puisse changer les choses. Merci beaucoup.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. M. Lebel.
M. LeBel : Oui. Rapidement, en
terminant, merci, Alexandre, merci, Monique. Merci aux groupes qui sont là. Merci
aux gens qui ont témoigné. Ce n'est pas facile, témoigner comme ça. Je pense à
Mélanie Dumais, qu'on a aidée il y a quelques mois à pouvoir vivre en couple avec
son ami. Je pense à d'autres qui attendent. Je pense à Karine Fortin, dans ma
circonscription. Je pense à Marc-Alexandre Gaudreau qui attend depuis
longtemps, qui est découragé, que je sais qu'il nous écoute. Je pense à tous
ceux-là qui nous écrivent via les médias sociaux, qui vivent cette
situation-là.
Je vous dis, il y a des fois qu'on peut
croire que ça va se régler, puis je pense qu'on est là, aujourd'hui, les partis
politiques de l'opposition. Je pense que les gens, aussi, du gouvernement sont
sensibles à ça. J'espère, j'ose espérer qu'aujourd'hui on fait un pas en avant
vers une solution à ce dossier-là, vers un changement pour permettre aux gens
de vivre leur vie de couple comme il faut, en toute dignité, puis permettre à
des gens de vivre en colocation parce qu'ils ont besoin de le faire, puis sans
avoir peur d'être dénoncés et sans avoir peur d'accumuler des dettes comme vous
accumulez. C'est complètement sans bon sens.
Ça fait que tantôt je vais sûrement poser
des questions à la période des questions s'il n'y a pas de changement. Je
l'annonce d'avance. C'est rare qu'on fait ça. Mais je le fais en pensant que
tous les partis ensemble, on va comprendre le gros bon sens puis on va réussir
à régler ça. Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup. On va passer aux questions sur le sujet. M. Bergeron, La Presse
canadienne.
M. Bergeron (Patrice) :
Bonjour à vous tous. Là, il s'est dit beaucoup de choses, mais je veux juste
bien comprendre, là. Essentiellement, ce que vous demandez, c'est qu'il y ait
une personne, un chèque, donc une prestation par personne, peu importe le
nombre de personnes qui habitent ensemble, qu'ils soient colocs, qu'ils soient
mariés ou, bon, qu'ils habitent ensemble, de toute façon. C'est bien ça, là, si
je comprends bien?
Mme Chaloux (Emmanuelle) :
Oui.
M. Bergeron (Patrice) : O.K. Très
bien. Ça touche combien de personnes, ça, au Québec? C'est des milliers, des
centaines? Est-ce qu'on a une idée statistique, là?
Mme Chaloux (Emmanuelle) :
Les données ne sont pas sorties encore, ne sont pas très récentes à ce
niveau-là. Ce que je peux vous dire, par exemple, c'est que les dettes des
personnes assistées sociales s'élèvent à 800 millions de dollars puis que
c'est la grande majorité qui est reliée aux questions de vie maritale.
M. Bergeron (Patrice) : Est-ce
qu'on sait combien ça coûterait pour le trésor public de mettre cette mesure-là
en place, là, une personne, un chèque, par rapport au budget actuellement, là,
qu'on verse en aide sociale au Québec?
M. LeBel : On voit qu'il y a beaucoup
de personnes qui sont touchées par ça, par le montant des dettes. Et c'est là
que j'ai un appel au gouvernement. Le gouvernement a toutes ces
statistiques-là. Le gouvernement peut faire ces études-là. Et ce qu'on
aimerait, c'est de la transparence avec eux, travailler avec eux pour bien
identifier qui ça peut toucher et combien ça peut coûter. On est vraiment... On
n'est pas là pour prendre le gouvernement à contrepied. On est là pour essayer
de voir avec eux autres comment on pourrait s'asseoir ensemble, puis y
travailler, puis analyser concrètement la situation.
M. Bergeron (Patrice) : Et,
par exemple, on pourrait être quatre colocs, je donne un cas d'espèce, et puis
tout le monde touche le chèque de 690 $ par mois sans avoir de coupures,
donc pour un total de 2 800 $ par mois, puis se payer un logement
décent à quatre chambres ou trois chambres. C'est ça, si je comprends bien, là?
Mme Chaloux (Emmanuelle) :
Bien oui.
M. Bergeron (Patrice) : O.K.,
O.K. Je voudrais savoir est-ce que c'est... Bien, il y a beaucoup de règles
qui ont été mises en place depuis... On sent des décennies d'une loi qui
devrait être dépoussiérée, selon ce que vous dites. Il y a toujours eu...
Est-ce que des mesures de contrôle ne sont pas nécessaires, par contre, là, ce
qui pourrait être la justification normale du gouvernement, des mesures de
contrôle parce qu'il y a eu des cas de fraude avec les années?
Mme Chaloux (Emmanuelle) :
Bien, écoutez, je vais vous dire bien franchement que nous, ce qu'on voit sur
le terrain, c'est du harcèlement des personnes les plus vulnérables dans notre
société. Je veux dire, en bout de ligne, combien ça coûte, cette mesure-là?
Combien d'argent est-ce qu'on économise en termes de procédures judiciaires, de
certificats médicaux? Le poids sur le système de santé est incroyable. Puis, je
veux dire, à un moment donné, si on veut se demander combien cette mesure-là,
elle coûte, je pense qu'il faut aussi se demander quelles économies on va
pouvoir faire.
M. LeBel : Sur les contrôles,
je ne voudrais pas qu'on laisse entrevoir... Puis souvent c'est ça, le préjugé
par rapport aux groupes de pression, c'est dire qu'ils veulent tout avoir sans
qu'il y ait de contrôle. Je n'ai jamais entendu ça, moi, quand je rencontre les
groupes de pression. Ce n'est pas ça. Il faut revoir la loi. Il faut revoir
avec eux autres comment ça peut être fait, et revoir le cadre de cette loi-là
de dernier recours, et s'asseoir ensemble avec le gouvernement, et refaire le
cadre, revoir les choses. Est-ce qu'il y a des choses qu'il faudrait... comme
mettre certaines règles? Probablement, mais il faudrait juste le travailler
ensemble.
Là, actuellement, il ne faut pas perdre le
focus sur ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a des situations... 100 000 $
de dettes, là, ça n'a pas de maudit bon sens, là, parce qu'il a été dénoncé par
un voisin. Et ça, là, ce n'est pas que lui. On en a dans toutes nos
circonscriptions. Ça fait que prenons ça, prenons cette situation-là qui est
injuste, après ça essayons de faire comprendre ça au gouvernement. Puis je
pense qu'ils sont capables de comprendre. Je pense qu'ils vont vers ça. Essayons
de redéfinir le cadre. C'est sûr qu'il y aura des questions à se poser, mais
travaillons ensemble.
M. Bergeron (Patrice) : J'ai
vu tout à l'heure que le ministre, Jean Boulet, était passé, là. Il avait
semblé porter l'oreille à vos témoignages. Est-ce que vous avez déjà fait des
approches auprès de lui ou est-ce que vous allez le rencontrer dans les
prochains jours ou semaines, peu importe qui dans le groupe, là, ici?
M. LeBel : Bien, c'est comme
mes collègues Alexandre et Monique disaient, là, on essaie de... ce qu'on veut
faire, c'est trouver une façon transpartisane de travailler ce dossier-là. J'ai
parlé à M. Boulet hier. Je lui ai dit ce qu'on faisait. Je l'ai même
averti que j'allais lui poser une question. Vous voyez, plus transpartisan ou
transparent, c'est dur à faire. On croit que... Je pense qu'il y a une ouverture.
Il y a une ouverture de lui. Il est sincère. Maintenant, comment on peut
travailler ça? Qu'est-ce qu'on se donne comme échéance? Puis les groupes ici
sont tous de bonne foi. Tout le monde veut y arriver.
Et Alexandre, ce qu'il ramène, c'est sur
la crise du logement qui s'en vient. Il y a des choses qui s'entrecoupent, là.
Il y a du monde qui va se retrouver à la rue, là, à Montréal. J'ai vu
Sherbrooke... Il y a des femmes, là, chez nous, qui n'ont pas de logement,
qui... ami, ami, ami, de logement en logement. Ça fait qu'il y a une situation
qui est particulière qu'il faut voir puis qu'il faut essayer... Il faut trouver
des solutions. Il ne faut pas essayer, il faut les trouver.
M. Bergeron (Patrice) :
Merci.
Le Modérateur
: Merci beaucoup.
M. Bossé, Le Soleil.
M. Bossé (Olivier) : Juste un
détail. Cet aspect-là de vie maritale, ça existe depuis quand dans la loi à peu
près?
M. Petitclerc (Serge) : Toujours.
Mme Chaloux (Emmanuelle) : Depuis
toujours.
M. Bossé (Olivier) : O.K.
M. Petitclerc (Serge) : Bien,
depuis l'adoption de la loi, en fait, puis c'est dans d'autres lois aussi, en
fait. C'est la même chose quand on parle du supplément de revenu garanti ou de
la pension de vieillesse au fédéral. C'est comme une logique constante de... À
partir du moment où deux adultes sont considérés comme un couple, ce qui est
déjà discutable, bien, on considère que ces gens-là ont besoin juste de
l'équivalent d'un adulte et demi comme prestations.
Et, dans le cas de l'aide sociale, il y a
une question de droit qui est en arrière de ça aussi. Je veux dire, le Québec
adhère à des traités internationaux qui reconnaissent le droit à un niveau de
vie suffisant. On met des personnes dans des situations épouvantables avec des
prestations aussi basses, et, à partir du moment où les gens arrivent à se
mettre ensemble pour essayer de partager des frais, il y a toutes sortes de
pénalités. Il y a la vie maritale, mais on pourrait parler de d'autres mesures
aussi. Si un enfant habite avec ses parents, il peut se voir couper sa
prestation de 100 $. À partir du moment où un individu a des chambreurs, à
partir d'un certain nombre de chambreurs, il peut se faire couper sa
prestation. Dans le fond, tout est mis en place pour diminuer des prestations
qui sont déjà insuffisantes.
M. Bossé (Olivier) : Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup.
(Fin à 9 h 27)