(Quatorze heures trente et une minutes)
Mme Massé : Oui. Bonjour, tout
le monde. Notre premier ministre était à Davos la semaine dernière pour vanter
la croissance économique du Québec. Mais, sur la planète Québec, le vrai monde,
eux autres, ils n'en profitent pas.
Le meilleur exemple de ça, c'est le
logement. Sur papier, tout va bien. Le marché de l'immobilier est en
croissance. Les promoteurs construisent des tours, des condos. Ça prend de la
valeur. Mais, dans la vraie vie, là, les loyers explosent. Des locataires sont
évincés pour faire rénover leur loyer puis, bien sûr, voient le prix augmenter.
Le téléphone n'arrête pas de sonner dans nos différents bureaux parce que les
familles ne savent plus à quel saint se vouer. On va démêler ça pour la CAQ.
Là-dedans, il y a juste les spéculateurs qui s'enrichissent. Les autres, ce
qu'ils vivent, c'est une crise du logement.
M. Nadeau-Dubois : La première
chose qu'on demande à la CAQ, et c'est le début pour trouver une solution,
c'est de se sortir la tête du sable. Il faut regarder la réalité en face. Le
Québec traverse une crise du logement, et il y a des centaines de milliers de
familles qui en sont les victimes. Mais, une fois qu'on a regardé la réalité en
face, il faut trouver des solutions. À Québec solidaire, on met aujourd'hui sur
la table deux solutions qu'on propose à la ministre.
Premièrement, il faut mettre un frein à la
montée en flèche des loyers. Entre 2018 et 2019, le loyer moyen au Québec a
augmenté deux fois plus vite que l'inflation. Pour les gens, ce que ça veut
dire concrètement, au quotidien, c'est que le besoin de base du logement gruge
une part de plus en plus grande de leur chèque de paie. En ce moment, les
locataires doivent s'arranger avec leur proprio ou doivent passer des mois
devant le tribunal du logement pour contester les hausses injustifiées.
La bonne nouvelle, c'est qu'il y a des solutions.
À Québec solidaire, notre solution, c'est un plafond légal à la hausse des
loyers. Si un propriétaire veut dépasser ce plafond-là, c'est possible, mais il
devra, lui, aller devant la Régie du logement justifier sa démarche, factures à
l'appui. L'idée ici, ce n'est pas d'empêcher les rénovations. Bien au
contraire, c'est d'empêcher les abus. Cette solution-là, on ne la sort pas de
notre chapeau. Elle existe ailleurs. Elle existe en Ontario et ça marche. Il y
a un plafond obligatoire sur les hausses de loyer qui existe en Ontario depuis
2006. Il y a une loi là-bas qui limite les hausses de loyer à l'inflation.
Donc, c'est une solution concrète qui a fait ses preuves.
Mais ce n'est pas tout. Deuxièmement,
Québec solidaire propose de construire des nouveaux logements locatifs
abordables, pas des HLM en carton, des logements faits pour accueillir des
familles ordinaires. Il y a 15 000 logements sociaux qui, en ce moment, au
Québec, sont en attente d'être construits. Et l'argent qu'on ne dépense pas
pour construire ces logements-là, bien, ironiquement, il retourne dans les
caisses de l'État pour engranger les surplus. Ne pas construire des logements,
donc ça fait l'affaire du gouvernement, mais, pour les locataires, c'est
indécent.
Mais ce qui est encore plus indécent,
c'est que, l'année dernière, la Coalition avenir Québec a construit seulement
835 logements, 835 logements, en un an. À ce rythme-là, ça va prendre quatre
mandats seulement pour rattraper le retard de 15 000 logements qu'on a
actuellement. Les familles à Rouyn-Noranda, à Saint-Hyacinthe et à Joliette,
ces familles-là n'en peuvent plus d'attendre. Elles ne pourront pas attendre
quatre mandats. Il faut 5 000 logements cette année pour répondre aux
besoins les plus criants. Et après il va falloir un plan pour rattraper le
retard. La CAQ doit livrer. Elle doit livrer maintenant. C'est une urgence
nationale, en fait. Le Québec, c'est vrai, ce n'est pas encore Toronto, ce
n'est pas encore Vancouver. Mais, si le gouvernement ne fait rien, c'est
exactement là qu'on s'en va.
Pendant que le premier ministre se
félicite de la croissance économique record, dans la vraie vie, sur le terrain,
il y a des centaines de milliers de familles québécoises qui ont de la
difficulté encore à trouver un logis salubre ou abordable. Une économie qui
permet à Lino Saputo de posséder autant d'avoirs que 24 000 familles
québécoises médianes mises ensemble, une économie qui laisse près de
200 000 familles québécoises payer plus de 50 % de son revenu pour se
loger, cette économie-là, ce n'est pas une économie qui profite à tout le monde,
c'est une économie déréglée. C'est la vérité gênante qu'on veut rappeler à la
CAQ tout au long de la session. Et, au 1er juillet, le gouvernement va être
jugé très durement s'il n'a rien fait.
M. Fontecilla : La crise du
logement, c'est d'abord des chiffres inquiétants. À Montréal, le taux d'inoccupation
est à 1,5 %, à Gatineau, même chose, à Granby, 0,9 %, à
Saint-Hyacinthe, 0,4 %, à Rouyn-Noranda, 1 %. C'est du jamais vu en
20 ans, depuis la fin de la dernière grande crise du logement, au tournant des
années 2000. Et, si vous avez le malheur d'avoir des enfants, c'est encore
pire. À Drummondville, par exemple, le taux d'inoccupation des logements
familiaux atteint un famélique 0,2 %. Trouver un logement pour une
famille, c'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin.
Dans toutes les crises, malheureusement,
il y a des gens qui en profitent. Le gouvernement laisse des spéculateurs sans
scrupules donner une mauvaise image aux propriétaires en faisant des passes de
cash avec leurs logements. Les rénovictions sont devenues monnaie courante. Des
gens vivent dans l'intimidation pour les inciter à partir de leur logis,
surtout les personnes vulnérables. Les histoires d'horreur s'empilent dans nos
bureaux de comté. Des spéculateurs achètent des immeubles de logements,
expulsent les locataires et les transforment en hôtels avec des plateformes
comme Airbnb et compagnie. Bref, le monde du logement, c'est devenu le far
west.
Mais ce n'est pas juste les locataires qui
vivent la crise. Les familles qui se tournent vers l'achat d'une maison
s'endettent en moyenne de 150 % de leurs revenus, un record. Elles sont
pressées comme des citrons par un marché immobilier hors de contrôle. Le
logement est devenu le terrain de jeu des plus riches, des hôtels clandestins
et des spéculateurs étrangers qui n'occupent même pas leurs logements. Nous, à
Québec solidaire, on a des solutions pour ceux et celles qui habitent nos
villes au Québec. Merci.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Est-ce qu'il y a des questions sur le sujet? Vincent Larin, QMI.
M. Larin (Vincent) : Je serais
curieux de savoir... Quand vous parlez des logements que le gouvernement
devrait construire, vous dites que ça ne doit pas être des HLM, des logements
sociaux. C'est quoi, la différence? Puis est-ce que c'est vraiment le rôle du
gouvernement de se lancer dans l'immobilier comme ça pour loger les gens, selon
vous?
M. Fontecilla : Tout d'abord,
il y a différentes formules de logement. Il y a les HLM, les habitations à
loyer modique. Il y a les coopératives d'habitation. Il y a des logements gérés
par des organisations sans but lucratif, les OSBL. Le gouvernement peut choisir
une de ces formules-là.
Il faut savoir qu'au Québec et au Canada
on ne construit plus des HLM destinés aux populations les plus vulnérables, les
plus démunies depuis 1994, depuis que le gouvernement fédéral de Jean Chrétien
s'est retiré de ce secteur-là. Le Québec a été une des seules provinces à
garder un programme de logement social qui finance soit des coopératives
d'habitation ou des OSBL en habitation. Donc, c'est des formules qui sont
différentes, qui correspondent à des publics différents. Les coopératives
d'habitation correspondent à des gens qui veulent s'impliquer, qui veulent
assumer la gestion d'un immeuble, ce qui n'est pas toujours facile. Et les OSBL
d'habitation s'adressent à des segments de population un peu plus vulnérables.
Mais, par rapport à votre question
fondamentale, est-ce que le gouvernement devrait s'impliquer dans la
construction de logements, nous, à Québec solidaire, on pense que oui. Le
logement, avant d'être une marchandise, avant d'être un bien pour spéculer, c'est
avant tout un droit, et le droit, c'est au gouvernement d'assurer que tout le
monde ait un toit sur la tête.
La Modératrice
: Est-ce
qu'il y a d'autres questions?
M. Nadeau-Dubois : Je vais peut-être
ajouter un élément qui est important. Les 15 000 logements dont on parle
aujourd'hui, c'est des logements qui ont déjà été promis, et une majorité qui
ont déjà été même budgétés. Donc, on ne vient pas ici dire : Le
gouvernement doit faire quelque chose qu'il n'a jamais réfléchi à faire. On
vient demander à la Coalition avenir Québec d'au moins livrer ce qu'il avait
promis de livrer, d'au moins ne pas répéter l'échec libéral, c'est-à-dire
annoncer des logements puis ne pas les construire. Donc, on ne demande rien
d'original. On demande au moins qu'ils livrent la marchandise sur les logements
qu'ils ont promis. Et, en pleine crise du logement, c'est la moindre des choses.
Avant même de faire des nouvelles annonces, là, commencez donc par faire ce que
vous avez promis de faire.
M. Larin (Vincent) : Je sais que
c'est très hypothétique, mais, si le besoin est si criant et qu'ils ont déjà
été promis, ces logements-là, pourquoi est-ce que vous pensez que la Coalition
avenir Québec ne les fait pas, n'avance pas plus vite que ça dans le dossier?
M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est
une excellente question. C'est un choix politique. C'est une question de
priorités. Est-ce qu'on juge que la crise du logement, c'est une priorité au
Québec en ce moment? Nous, on pense que oui. Et les chiffres qu'on a nommés, on
ne les invente pas, là. Quand il y a des taux d'inoccupation en bas de 1 %
ou autour de 1 %, c'est plus bas que ce qu'on a vu depuis le début des
années 2000, là. Donc, il y a un choix politique à faire. Et la CAQ doit
réaliser qu'il y a 40 % de locataires au Québec. On ne peut pas les
laisser tomber. C'est un gouvernement qui a donné un gros coup de pouce aux
propriétaires les plus fortunés en baissant leurs taxes scolaires, là, en début
de mandat. Je pense qu'il est temps qu'ils réfléchissent aussi aux locataires.
M. Larin (Vincent) : Merci.
La Modératrice
: Est-ce
qu'il y a des questions sur l'actualité? Merci beaucoup.
(Fin à 14 h 42)