(Onze heures trente-cinq minutes)
M. Zanetti : Bonjour. Alors,
j'ai été vraiment touché par le reportage d'Enquête sur la DPJ, diffusé
hier, et aussi par tout ce qu'on y a appris, entre autres cette idée que les
logiciels, justement, décident du sort des enfants, en quelque sorte, là,
situation qui est décriée depuis 2015.
C'est comme si... Je pense qu'on a des
problèmes, des questions philosophiques très importantes à se poser au Québec en
ce moment, par rapport à ça, par rapport à notre conception de l'être humain,
de la santé mentale, de ce que c'est qu'intervenir auprès des humains puis des
enfants. Parce que, quand on apprend qu'essentiellement on a mis sur pied, dans
les dernières années, un logiciel qui vient se substituer au jugement clinique,
aux intuitions cliniques des intervenantes et intervenants de la DPJ, qui sont
là, qui connaissent les enfants, qui ont un lien avec elles, avec eux, c'est
très préoccupant, c'est choquant.
Quand on sait que cette pratique-là, ce logiciel-là,
un rapport manifestait qu'il y avait dans le milieu des intervenants et intervenantes
de la DPJ, justement, un mécontentement par rapport à l'usage de ça déjà,
depuis 2015, on ne comprend pas pourquoi en 2019, quatre ans plus tard, on n'a
pas rectifié la situation, pourquoi on n'a pas redonné la confiance qu'on doit
avoir envers ces intervenants-là qui doivent être capables de traiter les
enfants sans être obligés de jouer à travers des logiciels qui subordonnent
leur jugement clinique. C'est vraiment complètement aberrant.
Aussi, sur le sujet des médecins
spécialistes, on ne comprend pas du tout où s'en va le gouvernement. D'une
part, en campagne électorale, on disait qu'on allait chercher 1 milliard,
qu'il y avait 1 milliard de trop dans les poches des médecins spécialistes
au Québec. Et là, on envoie des messages complètement contradictoires. D'un
côté, on brandit la menace de faire une loi spéciale dans le dossier, puis, de
l'autre côté, on n'arrête pas de baisser les revendications. On était parti à
1 milliard; après ça, c'était 650 millions; cette semaine, là, c'est
rendu 500 millions. Une chance que les négociations doivent se terminer
aujourd'hui puis que ce n'est pas la semaine prochaine parce qu'on serait
peut-être rendus à leur donner de l'argent.
Il y a quelque chose qui n'a aucun sens.
Non seulement le gouvernement fait une mise à jour économique puis annonce des
surplus qui sont extrêmement importants, non seulement on voit qu'il ne va pas
tous les remettre dans les soins de santé, qui en ce moment sont en crise au
Québec, mais, en plus, il va aller se priver d'argent qui n'est pas mis à la
bonne place encore dans notre système. C'est complètement hallucinant.
Et l'urgence, là, on sent qu'il ne la sent
pas assez. L'urgence, là, c'est qu'au Québec des fois on se demande, quand on
lit les journaux, qu'est-ce qui se passe. Est-ce qu'il y a encore un filet
social? On voyait aussi qu'il y avait eu, dans les derniers mois, 15 cas
de suicide qui sont survenus pendant ou après des hospitalisations en
psychiatrie, par défaut... de manque de soutien à la sortie puis de manque de
services finalement. Il y a des besoins criants, il y a de plus en plus de
mailles dans le filet social, au Québec, tout le monde tombe dans les craques,
et là on hésite à remettre de l'argent là-dedans. Et après ça, alors qu'on est
en période de surplus, on hésite à aller chercher de l'argent dans les poches
des médecins spécialistes, qui ont des salaires qui en ce moment sont
démesurés.
Il y a quelque chose qui ne va pas avec ce
gouvernement-là. On sous-estime la crise actuellement des... santés et services
sociaux, et puis il faut que ça change, et j'espère que, pour ce qui est des
médecins spécialistes, on va aller chercher le milliard qu'on avait promis,
parce que les attentes des gens sont extrêmement élevées et les nôtres aussi.
M. Croteau (Martin) :
Soupçonnez-vous que M. Legault a été un peu trop vite en affaires en
promettant des économies d'un milliard, justement, sur l'entente avec les
médecins spécialistes?
M. Zanetti : Bien, je ne pense
pas qu'il a été trop vite en affaires. Nous, à Québec solidaire, dans la
campagne électorale, c'est aussi l'engagement qu'on prenait. Et par ailleurs
nous, on s'engageait à réinvestir ce milliard-là dans une assurance dentaire
collective, et publique, et universelle. Et donc il y a moyen de le faire en
baissant le salaire des médecins spécialistes à l'échelle du Québec. Je pense
qu'ils auront toujours des conditions extrêmement bonnes, des conditions très
compétitives, ça n'entraînera pas de problème.
Et je pense qu'il y a beaucoup de médecins
spécialistes, et j'en connais certains — un qui a même été député
ici, à Québec solidaire — qui sont un peu gênés de recevoir...
d'avoir reçu ces augmentations, dans les dernières années, et qui probablement
ne se sentent pas bien représentés non plus par cette fédération qui, là, fait
mine de faire des concessions, mais qui essentiellement s'est comportée de
façon très corporatiste pour qu'on en vienne à une situation où il faut qu'on
aille leur retrancher un milliard.
Alors, je pense qu'il y a beaucoup de
médecins spécialistes au Québec qui sont d'accord avec ça, hein? Ce n'est pas
normal qu'étant donné les ressources qu'on a au Québec et les besoins qu'on a
en santé et services sociaux qu'il y ait un milliard de trop chez les médecins
spécialistes.
M. Croteau (Martin) : Comment
vous vous expliquez, vous, que le gouvernement soit parti d'un milliard, là,
comme vous le disiez, est tombé à 650, et là on se dirigerait plus vers 500?
Comment vous vous expliquez que le gouvernement ait cédé autant de terrain dans
les négos?
M. Zanetti : Bien, c'est
difficile de l'expliquer. Ce que je constate, par contre, c'est qu'il disait
qu'il allait être imperméable aux groupes de pression. Là, bien, on voit que ce
n'est pas vrai. On voit que dans les faits, ce qui se passe, la façon dont il
se comporte... Puis on pourrait donner d'autres exemples, là, on pourrait
parler de GNL Québec aussi, là, qui continue à relayer le discours de
l'industrie dans ce domaine-là. Mais on voit qu'il y a un problème extrêmement
important. Puis là, bien, quand il fait face à des intérêts corporatistes
importants, bien, il se dégonfle. Et moi, je trouve ça inquiétant, surtout
quand il s'agit... quand on a une crise des services sociaux comme on connaît
aujourd'hui.
Une voix
: Merci.
M. Zanetti : Merci.
(Fin à 11 h 41)