(Quatorze heures quarante-deux minutes)
M. Perron (Richard) :
Bonjour. Quand on dit qu'une image vaut mille mots, vous l'avez devant vous :
tous les partis d'opposition réunis ici à l'Assemblée nationale pour appuyer la
pétition qu'on a mise en ligne ce matin qui demande la réintégration de M.
Louis Robert, notre agronome du SPGQ injustement congédié le 24 janvier
dernier parce qu'il avait osé vouloir alerter l'opinion publique sur des choses
qui étaient très inquiétantes, notamment quant à l'utilisation des pesticides
et à l'emprise des entreprises privées sur des centres de recherche publics et
financés par le ministère de l'Agriculture. Donc, je remercie vraiment tous les
partis d'opposition de faire front commun avec M. Robert.
Je lui ai parlé dernièrement, je lui parle
à tous les jours. Il est extrêmement impressionné par la mobilisation,
mobilisation qui doit s'exprimer par la mise en ligne de la pétition qu'on a
tenté de mettre en ligne à l'Assemblée nationale depuis une semaine, mais ils
ne voulaient pas qu'on mette la demande de réintégration, ce qui était
inacceptable pour nous.
Donc, on vous invite, tout le monde, à
aller sur le site Change.org pour appuyer et signer électroniquement la
pétition qui demande la réintégration de M. Robert, mais qui demande également
des excuses publiques parce que le ministre et même le premier ministre, qui en
a rajouté, ont insinué que M. Robert aurait pu être congédié pour autre
chose que ce qu'il y avait dans la lettre, c'est-à-dire divulguer publiquement
des informations inquiétantes, ce qui n'est pas le cas du tout. Donc, on
demande des excuses publiques, une réintégration et la compensation pour les
pertes de salaire perdues par M. Lamontagne. D'ailleurs, M. Lamontagne,
qui disait en fin de semaine dernière : Moi, je n'ai pas la langue de
bois, vous le savez, puis ça m'a coûté cher, ça m'a coûté assez cher la semaine
passée, je lui demanderais : À qui ça coûte le plus cher? À vous, M.
Lamontagne, qui gardez votre job puis votre salaire, où à M. Robert, lui
qui est sur le carreau sans salaire depuis le 24 janvier? Merci.
Le Modérateur
: M. Roy.
M. Roy
: Merci
beaucoup. Écoutez, la situation de M. Louis Robert et l'opacité qui
entoure les allégations du ministre à son égard mettent en lumière quand même
certains enjeux. Le premier enjeu, c'est la protection des lanceurs d'alerte.
La loi n° 87 doit être réouverte et amendée pour protéger les lanceurs
d'alerte. Et, ceci dit, la CAQ s'était positionnée pour la réouverture et
l'amélioration du projet de loi n° 87.
Deuxième enjeu : protection de la
santé publique et de l'environnement. Y a-t-il des études qui démontrent la
toxicité de certains produits dans l'agriculture au Québec aujourd'hui? Bon, le
ministre devra répondre à ces questions-là.
Troisième enjeu : l'autonomie des
chercheurs au Québec. Est-ce normal et acceptable que des chercheurs subissent
des pressions et de l'intimidation pour ne pas divulguer des résultats de
recherche importants sur la santé et l'environnement?
Et un nouvel enjeu, qui est celui de
l'attaque de la crédibilité des fonctionnaires de l'État. Quand le ministre a
dit : Les ayatollahs de l'environnement, ce qu'il a essayé de faire, c'est
d'attaquer la crédibilité de la fonction publique.
Donc, nous, on appuie la pétition, et ce
qu'on demande, c'est la réembauche, des excuses et une compensation symbolique
et monétaire pour M. Louis Robert. Merci.
Le Modérateur
: Merci. M.
Barrette.
M. Barrette : Alors, bonjour,
tout le monde. Alors, évidemment, vous comprendrez que je suis ici avec ma
collègue, Mme Montpetit, sur un sujet qui à mon avis est d'une grande gravité.
Sans reprendre les commentaires qui ont été faits, je vais quand même insister
sur un point. Il y a deux enjeux ici. Évidemment, comme mon collègue M. Roy
vient de le dire, il y a un enjeu fondamental, qui est celui des lanceurs
d'alerte, et on appuie tout à fait M. Perron et son organisation à cet
égard-là, il y a un message à envoyer à la population qui doit être plus clair;
et l'enjeu, évidemment, de santé publique.
Vous savez, moi, j'ai un message à donner
à M. Lamontagne : s'il avait voulu ne pas être dans cette
situation-là, il aurait pu répondre clairement aux questions et il aurait pu et
dû probablement, à la case départ, ne pas s'embarquer dans cette voie-là. Il a
été informé d'une situation qui est sérieuse en termes de santé publique. Il a
choisi une voie qui devra être démontrée comme étant la bonne, mais il aurait
pu choisir d'autres voies.
Alors, aujourd'hui, la population vit un
grand doute. Je fais partie de cette population-là, dans mes fonctions
parlementaires, mais je comprends tous ceux et celles qui, actuellement — la
population en général — s'inquiètent. Et je suis aussi tout à fait en
accord avec tous ceux et celles qui regardent cette situation-là et qui considèrent
que, possiblement, M. Robert aurait été le bouc émissaire d'une démarche
inappropriée. Je passe maintenant la parole à ma collègue, Mme Montpetit.
Mme Montpetit : Merci. Alors, effectivement,
on a tous répondu, tous les partis de l'opposition, sans hésitation, à l'appel
du président du SPGQ pour venir demander la réintégration de Louis Robert.
Vous n'êtes pas sans avoir qu'il y a près d'une quarantaine de questions qui
ont été posées à l'Assemblée nationale en seulement six jours depuis le début
de la session, tant au ministre de l'Agriculture qu'au premier ministre, des
demandes de commission parlementaire pour faire toute la lumière sur ce dossier
parce qu'à chaque question qui a été posée, les réponses du ministre de
l'Agriculture ont soulevé, finalement, plus de questions que de réponses, et
les demandes restent sans réponse.
Donc, on demande qu'évidemment toute la
lumière soit faite sur ce dossier, sur ce qui s'est passé avec M. Robert,
mais surtout qu'il soit réintégré parce que, si le ministre continue de se
cacher, ne répond pas aux questions, lui, il occupe toujours ses privilèges
comme ministre, bien, M. Robert est toujours à la maison, sans salaire,
sans motif de renvoi, de congédiement. Donc, on épaule effectivement le SPGQ là-dedans,
dans la demande de réintégration. Et, pour aller plus loin aussi, on souhaite
savoir davantage ce que M. Robert dénonçait sur les impacts des pesticides
sur la santé publique, sur la santé des Québécois, sur les aliments. Il faudra
que la lumière soit faite sur toutes ces questions. Merci.
Le Modérateur
: M.
Marissal.
M. Marissal : Merci. Merci à
mes collègues d'être ici. M. Perron, bienvenue. Merci pour l'excellent
travail que vous faites, en particulier dans ce cas-ci.
Il s'est passé quelque chose de grave, fin
janvier, au Québec, quand un dénonciateur, un lanceur d'alerte, un
professionnel, un agronome a voulu attacher le grelot et dire : Il y a des
dangers, il y a des dangers imminents, même pour la santé des gens, et que cette
personne a perdu son emploi.
Ensuite, on a vu un ministre commencer par
se vanter d'avoir autorisé lui-même ce renvoi, ce qui ne se voit pas
souvent — et heureusement — dans notre démocratie, pour
ensuite, ce même ministre, revenir, marcher sur sa peinture puis se beurrer les
pieds à ne plus être capable de se souvenir quel chemin il a pris et quelle
version il va nous raconter.
Vous avez un vrai front commun ici,
transpartisan, parce que ça dépasse largement l'idéologie de nos propres
partis. Une démocratie qui n'a pas de loi pour protéger ses lanceurs d'alerte,
c'est comme une auto à laquelle il manque une roue. Il faut absolument que le
gouvernement de la CAQ qui est maintenant au pouvoir donne suite à ses belles
intentions du moment, de l'époque où elle était dans l'opposition, pour rouvrir
cette loi et puis pour la compléter. Une loi, c'est perfectible, ça vit dans le
temps, c'est organique. Je pense que cette loi était de bonne volonté, au
départ. On se rend compte maintenant qu'elle a des failles. La principale
faille, on la voit bien, c'est qu'elle bloque notamment la voix des
dénonciateurs vers les médias. Moi, je voudrais juste vous rappeler, étant
ex-journaliste, j'ai peut-être un petit parti pris. Cela dit, pas de médias,
pas de Watergate, pas de scandale des commandites. Et puis ici au Québec, on
n'aurait pas non plus fait toute la lumière sur la corruption et les histoires
dont on a entendu parler dans le secteur de la construction.
Alors, on est solidaires ici avec
M. Perron et avec M. Robert, et on demande effectivement de le
réintégrer, de lui présenter des excuses et de rouvrir cette loi, et on
s'attend à ce que ce soit fait promptement. Et puis j'en profite pour demander
aussi aux Québécois et aux Québécoises : Allez apposer votre griffe sur
cette pétition. Elle est extrêmement importante pour la suite des choses. Merci.
Le Modérateur
: Merci.
M. Ouellette.
M. Ouellette : Merci. Être le
sixième, c'est toujours un défi. Merci, M. Perron, de votre invitation.
Présentement au Québec, nous avons le droit de nous exprimer, nous avons le
droit d'être en désaccord puis nous avons surtout le droit de remettre en
question les décisions gouvernementales. On a des lois qui permettent aux
citoyens de dénoncer des actes répréhensibles et de s'adresser aux médias, et
ce, à l'abri des représailles. Présentement au Québec, nous avons le droit
d'être considérés innocents jusqu'à preuve du contraire, et je sais de quoi je
parle. En conséquence, M. Robert doit être traité de la sorte et être
réintégré dans ses fonctions, le temps qu'une enquête soit effectuée par une
entité habilitée à le faire. Il est primordial de déterminer aussi si la
séparation des pouvoirs fut respectée, et qui est le réel décideur imputable
dans le dossier.
J'offre tout mon support à M. Robert,
et je pense que vous en avez un très bel exemple ici autour de moi, et ce, en
insistant tous les jours auprès du gouvernement pour qu'il respecte les règles
qui sont en vigueur au Québec. Merci.
Le Modérateur
: Merci.
On va passer à la période de questions. On va essayer de garder ça une question,
une sous-question. Mme Prince.
Mme Prince (Véronique) :
Oui, bonjour. Bien, peut-être que la question pourrait s'adresser à vous,
M. Perron. Ne serait-il pas peut-être approprié à ce moment-ci d'entendre
la version de M. Robert directement? Parce qu'on ne l'a jamais entendu
dans aucun média, on n'a jamais su réellement de son côté ce qui s'était passé.
Est-ce qu'il ne devrait pas, à ce moment-là… Y a-tu une possibilité qu'il
puisse raconter sa version?
M. Perron (Richard) :
Ça, c'est la question à 1 million de dollars dont je viens de discuter
avec une productrice de M. Arcand seulement quelques minutes avant
d'entrer ici. Tout le monde veut avoir M. Robert. Par contre, les
indications de nos procureurs sont formelles : M. Robert ne peut pas
s'exposer publiquement alors qu'il a été accusé de vouloir salir son employeur
publiquement, pour s'exprimer présentement. S'il le faisait, il pourrait nuire
à la suite des choses dans la défense de ses intérêts. Et, si on lui
conseillait de le faire ou on lui permettait de le faire, il pourrait
poursuivre le syndicat selon l'article 47.2 du Code du travail, qui nous
oblige à bien défendre nos membres.
Donc, malheureusement, c'est impossible.
Il a dû refuser une invitation à Tout le monde en parle. Et le résultat,
ça a été que Tout le monde en parle n'a même pas voulu en parler, la
question de la semaine. Donc, tout le monde veut avoir M. Robert. Je trouve
ça très malheureux qu'il ne puisse pas lui-même s'exprimer, mais nous
devons — je suis avocat de formation, je sais de quoi je
parle — nous devons suivre les conseils de nos procureurs, et
M. Robert le comprend très bien.
Mme Prince (Véronique) :
Mais vous ne pensez pas que c'est à son désavantage? Parce que là on a une
situation dans laquelle le ministre répond quand il veut, parce qu'il ne se
présente pas toujours devant les médias. En Chambre, souvent, vous devez vous
reprendre pour obtenir une réponse. Donc, on a la version que le ministre veut
bien nous donner, mais finalement on n'a pas les…
M. Perron (Richard) :
La version de M. Robert, on vous la donne à tous les jours. Je parle avec
M. Robert, j'ai vérifié, contrevérifié, parlé avec ses anciens patrons, un
qui avait été son patron pendant 10 ans, l'autre qui a été son patron
pendant 12 ans, ça fait 22 ans sur 32 ans de service, ça, et ils
sont tous formels : M. Robert n'a rien à se reprocher. Et on dit tout
ce que M. Robert devrait dire dans l'intérêt de la défense de ses
intérêts.
Maintenant, M. Robert, il doit
suivre… Si vous étiez accusée, hein, vous auriez à suivre les conseils de votre
avocat, et M. Robert doit faire la même chose. Je trouve ça triste pour le
débat public, mais, nous, ce à quoi on pense avant les débats publics, les
caméras et le spectacle, ce sont les intérêts de M. Robert, d'abord et
avant tout.
Le Modérateur
: Merci.
M. Bergeron.
M. Bergeron (Patrice) :
Patrice Bergeron, La Presse canadienne. Donc, vous présentez une
pétition qui demande au gouvernement de réintégrer le fonctionnaire, mais j'aimerais
entendre une réponse claire, à savoir : Est-ce qu'un ministre ou est-ce
que le gouvernement peut lui-même, de son propre chef, réembaucher un
fonctionnaire qui a été congédié par un sous-ministre, d'après ce qu'on peut
comprendre, là?
M. Perron (Richard) :
J'ai passé près de 20 ans dans un ministère, et l'adage, c'était :
Dans un ministère, tout se fait à condition d'avoir la signature du
sous-ministre. Et le sous-ministre, normalement, s'il veut garder sa job, en
tout cas, il doit écouter ce que le ministre lui demande de faire. Donc, oui,
c'est fort... c'est réellement possible. Ce qui est du jamais vu, c'est de voir
un ministre s'impliquer lui-même dans le congédiement d'un employé qui est six
paliers de gestion en dessous de lui. Ça, on n'avait jamais vu ça avant et ça
démontre qu'il y a un aspect politique à ce congédiement-là.
M. Bergeron (Patrice) : Et
quels sont les chances que M. Robert soit réintégré, là? Parce qu'il y a
plusieurs procédures en marche, il y a un dépôt de grief et tout, quelles sont
les chances, là? On lui donne quoi, 95 % de chances qu'il soit réintégré?
Vous, vous êtes avocat, vous dites, de formation, est-ce que vous avez une idée
de sa chance de pouvoir être réintégré dans ce cas-là?
M. Perron (Richard) :
Pour l'instant, la seule procédure qui est enclenchée, c'est l'action pour demander
la réintégration de M. Robert. Et on espère qu'en fonction de ça, si le gouvernement
entend finalement raison, entend la pression populaire des milliers de
personnes qui déjà… il y a déjà près de 6 000 personnes, aux dernières
nouvelles, qui s'étaient inscrites dans une pétition mise en ligne ce matin.
Donc, avec la pression populaire, que le gouvernement entende raison, qu'il
fasse marche arrière, qu'il comprenne le cri du coeur de la population québécoise
et qu'il réembauche M. Robert dans ses fonctions jusqu'à ce que la lumière
soit faite par la Protectrice du citoyen, si elle veut bien le faire parce
qu'elle n'est pas obligée d'exposer publiquement ce qu'elle va faire.
M. Bergeron (Patrice) : Il y
a des fortes chances, selon vous, donc, là?
M. Perron (Richard) :
Bien, moi, en tout cas... Vous savez, on ne peut pas se… comment… Je veux dire :
de ne pas accomplir ce qu'on veut, c'est une chose, mais de ne pas essayer de
l'accomplir, ça, c'est immoral. Et c'est ce qu'on essaie de faire présentement.
On essaie très fort. Et on sent un vent de sympathie, une indignation
généralisée, une mobilisation généralisée dans la population, qui devrait faire
entendre raison à un gouvernement qui semble vouloir se défiler présentement.
S'il pensait mourir... s'il pensait qu'avec d'autres débats, cette question-là
mourrait, on a des petites nouvelles : on a encore plusieurs choses à
faire pour rappeler à la population ce qui se passe.
Le Modérateur
: Merci.
Mme Porter.
Mme Porter (Isabelle) : Oui,
bonjour. C'est une question pour vous. Isabelle Porter, du Devoir. Tout
à l'heure, vous avez dit : Ils ne voulaient pas écrire dans la pétition la
notion de réintégration. Vous parliez de qui? À moins que j'aie mal compris
tout à l'heure…
M. Perron (Richard) :
C'est l'Assemblée nationale qui se réfugiait derrière l'article 35. D'ailleurs,
ça aussi, ça pourrait peut-être être modifié, l'article 35, qui dit que si
une situation est sous enquête ou autre ou devant les tribunaux, elle ne peut
pas faire l'objet d'une pétition déposée à l'Assemblée nationale. Au moment où
on nous disait ça, là, il n'y avait pas d'enquête annoncée de la Protectrice du
citoyen, et moi, je disais, on n'a pas de grief de déposé, il n'y a rien qui
est fait. Si jamais c'est fait, on la retirera, mais pour l'instant, il n'y a
rien qui justifie l'application de l'article 35. Et on nous a fait traîner
pendant une semaine de temps, alors que normalement ça prend 24 heures,
mettre ça en ligne. Une semaine de temps, on a fait traîner ça, jusqu'à ce
qu'ils reçoivent finalement l'avis de la Protectrice du citoyen qui pouvait les
dédouaner juridiquement et leur faire dire : Bien, vous voyez, on ne peut
pas la mettre sur notre site. Donc, nous, on s'est revirés de bord puis on l'a
mis sur un autre site. Mais on n'a pas manqué d'interpeler les partis d'opposition
pour qu'ils viennent souligner l'importance de cette pétition-là, même si elle
n'a pas pu être déposée à l'Assemblée nationale.
Mme Porter (Isabelle) :
J'aurais une petite question pour M. Ouellette. Tout à l'heure, dans votre
intervention, vous avez dit : Je sais de quoi je parle. Est-ce que vous vous
sentez des affinités avec M. Robert?
M. Ouellette : Bien, je vous
dirai que la présomption d'innocence, c'est très important. Et je pense qu'il
est de coutume, au Québec, quand il y a enquête, il est coutume de suspendre
avec traitement la personne qui est visée par l'enquête, et je pense que ce ne
serait que normal, la réintégration de M. Robert, parce qu'en partant du
moment où on a politisé cette cause-là il faut... il y a une apparence de
justice qui doit être là.
Mme Porter (Isabelle) : Mais
quel lien faites-vous avec votre expérience personnelle?
M. Ouellette : Ah! Je vous
dis, il y a des choses que je ne peux pas vous dire aujourd'hui. Je pense que
je vous laisse en tirer les conclusions.
Mme Porter (Isabelle) : Merci.
Le Modérateur
: M.
Dugas-Bourdon.
M. Dugas Bourdon (Pascal) :
Oui, pour M. Perron. Pour vous, c'est clair que le ministre s'écrase
devant le pouvoir des lobbyistes des pesticides? C'est quoi, selon vous? Vous
dites que c'est pour des raisons politiques. Pouvez-vous développer là-dessus?
M. Perron (Richard) :
Bien, regardez, on a quelqu'un qui sort publiquement pour dénoncer l'emprise
d'un secteur particulier, des pesticides d'entrepreneurs privés, et le
résultat, c'est qu'il est congédié. Bon, ça, déjà, ça sème le doute.
Ensuite de ça, on a un ministre qui, même
si on lui a conseillé de garder les choses tranquilles, de se mettre à part un
peu, va devant des producteurs agricoles et se vante de ne pas avoir eu la
langue de bois et en remet une couche en dénigrant les professionnels du
ministère de l'Environnement qui sont chargés de faire respecter les règles
d'environnement à l'encontre des pauvres entrepreneurs privés.
Bon, je veux bien croire, là, qu'on peut
ajuster la bureaucratie pour qu'elle soit plus efficace, mais, ce que je vous
dirais, là, c'est que si les dossiers sont longs à traiter, c'est à cause des
coupures des dernières décennies dans la fonction publique, qui ont fait en
sorte que les gens sont surchargés. Ils sont juste trois en Montérégie pour
gérer l'ensemble d'un territoire agricole très fructueux et important.
Donc, on voit un ministre qui a une
tendance à tirer sur les fonctionnaires et à dire exactement ce que les
représentants du secteur privé disent ouvertement.
M. Dugas Bourdon (Pascal) :
Vous croyez qu'il a un avantage personnel à retirer, un bénéfice personnel à...
M. Perron (Richard) :
Non, non. Bien, je n'irai pas jusque-là. Je n'espère... J'espère que non. Mais
ce qu'on sait, c'est que la tour, elle penche d'un côté.
Le Modérateur
: Merci.
M. Croteau.
M. Croteau (Martin) :
Bonjour, tout le monde. Je m'excuse d'avance, là, je vais faire en sorte que
certains d'entre vous se succèdent au micro. Ma question s'adresse aux
politiciens de chaque parti. J'aimerais savoir ce que vous pensez. Ce matin,
les ministres du gouvernement de la CAQ ont presque tous évité la presse
parlementaire et choisi d'entrer par une porte arrière à la réunion de leur
caucus. Que pensez-vous de cette stratégie d'évitement? Et y voyez-vous un
parallèle avec le traitement qui a été réservé à M. Robert?
M. Barrette : Absolument.
Je n'y avais pas pensé moi-même, et j'apprécie beaucoup la question et la
formulation de celle-ci. Alors, certainement. Vous savez, moi, dans les médias,
récemment, on m'a proposé… on m'a reproché de trop en faire. Mais je pense qu'on
doit en faire plus toujours pour informer la population. Vous avez tout à fait
raison. La CAQ non seulement ne se présente pas pour débattre devant vous à
l'extérieur du salon bleu, c'est clair, mais, au salon bleu, on n'a jamais de
réponse à nos questions. Et aujourd'hui, si vous avez porté attention aux
débats que nous avons eus, on a eu un débat sur la procédure parlementaire. Et
je peux vous dire que les gens qui m'accompagnent, particulièrement les
deuxième et troisième groupes d'opposition, ils ont critiqué beaucoup la façon
d'approcher le débat parlementaire de la CAQ qui vient, à toutes fins utiles,
limiter leur droit de parole en limitant le temps. Vous avez vu, là, si vous n'avez
pas peut-être assisté à ça… Écoutez, quand, en commission parlementaire, on
passe d'une heure à 45 minutes et on a fait la division du temps, bien, on
se retrouve avec des temps tellement courts que c'est tout juste si on peut
poser une question.
Alors, là, on est dans une dynamique à la
CAQ pour laquelle il y a un parallèle à faire qui est flagrant avec la situation
de M. Robert. Alors, M. Robert, actuellement, il a quelque chose à
dire. M. Perron vous a dit qu'il ne pouvait pas s'exprimer aujourd'hui. Je
comprends très bien cet argument-là. Je ne prends pas parti ni pour l'un ni
pour l'autre. Je constate la situation. Quelle est la situation? Il y a un
enjeu de deux ordres, un enjeu qui est celui du sonneur d'alerte et il y a un
enjeu du sujet qui est la sécurité publique, la santé publique. Qu'est-ce qu'on
voit aujourd'hui? Alors, on voit un autre exercice qui permet de faire
diversion. L'exercice qui permet de faire diversion, c'est, entre autres, le
mandat, dont on n'a pas l'écriture, qui est donné à la Protectrice du citoyen.
Nous, on a été informé qu'elle allait intervenir. C'est une intervention qui a
été demandée. Et on a été informés par écrit qu'il allait y avoir une intervention.
En français, les mots ont un poids et un sens. Est-ce qu'une intervention, c'est
une enquête? Est-ce qu'on saura le bout de ça? Alors, moi, je peux vous
prédire... Je pense que c'est comme ça que ça va arriver parce que, quand on
est un employeur, on s'assure, quand on congédie quelqu'un, d'avoir suivi la — et
permettez-moi l'anglicisme — check-list du congédiement : check,
check, check. Alors, moi, je pense qu'on va effectivement voir une procédure
qui a été remplie.
Et le fond, lui, est-ce qu'on s'y adresse?
Quelle est la démarche actuellement pour s'adresser au fond? Il n'y en a pas.
Alors, pour s'adresser au fond, il faut une commission parlementaire. Il faut
autre chose de plus approfondi, de plus légalement incisif. Est-ce qu'on a ça actuellement?
Non. Alors, aujourd'hui, on n'a pas de réponse de la part du ministre. Il fait
bien de ne pas trop répondre parce que, quand il répond, il se mélange lui-même
dans ses bottines et ses babines. Quand arrivent les démarches, les démarches
sont tout à fait correctes. Loin de moi, au contraire, de critiquer Mme la Protectrice
du citoyen, elle va faire son travail impeccablement cette dame-là, j'en suis
absolument convaincu. Maintenant, le fond, lui, là, le fond, qu'est-ce qui se
passe avec le fond? Il n'est pas là.
Alors, la CAQ ne se présente pas devant
vous en dehors du salon bleu, ne répond pas aux questions, sait très bien que
ce sont des sujets brûlants d'actualité, et, au bout de la ligne, elle va tout
faire pour éviter d'en débattre et espérer que quelque chose d'autre va prendre
le dessus de l'espace public. On compte sur vous.
M. Roy
: Juste rajouter
un élément d'information. J'ai demandé, via un mandat d'initiative, une
commission parlementaire sur l'utilisation des pesticides et des insecticides
dans l'agriculture au Québec. Ça fait que c'est comme ça qu'on va être capables
de faire la lumière sur ce dossier-là, et peut-être d'interroger les
chercheurs, les centres de recherche, les gestionnaires, les conseils
d'administration, bref, et j'ai posé la question au ministre ce matin, et il
m'a parlé du sexe des anges et du poids de l'âme. Donc, il a contourné
complètement la question. Et nous, on espère qu'ils vont acquiescer. Donc,
voilà.
M. Barrette : Merci bien. M.
Croteau, en conclusion, là, vous avez la ligne, là. Vous avez la bonne lecture
de la situation. Je vous invite à exprimer massivement votre professionnalisme
et de continuer d'en parler.
Mme Montpetit : Bien, pour
répondre brièvement à la question, je pense que le parallèle est excellent. Ce
qu'on voit depuis deux semaines, c'est un début de session catastrophique pour
la CAQ. Je disais la semaine dernière que l'environnement était une roche dans
le soulier de la CAQ. Là, je pense que c'est le ministre de l'Agriculture qui
est devenu, pas une roche, un menhir dans le soulier du gouvernement caquiste,
et on voit clairement, on n'est pas très surpris qu'il ne veuille plus vous
répondre. Ça fait deux semaines que le ministre accumule les controverses. Ça a
commencé effectivement avec le renvoi de M. Robert, mais je pense que ça
devient beaucoup plus large que ça, on l'a mentionné, donc : un
congédiement d'un lanceur d'alerte, il a discrédité son sous-ministre, il a
dénigré les fonctionnaires du ministère de l'Environnement, son collègue le
ministre de l'Environnement a réitéré dans le même sens au lieu de défendre ces
personnes.
Donc, c'est des journées qui s'accumulent
avec des controverses. On n'a aucune réponse. Comme je le disais, près d'une
quarantaine de questions qui ont été posées et au ministre de l'Agriculture et
au premier ministre. Aucune réponse au salon bleu. Le ministre de
l'Agriculture, lundi, n'était pas présent pour vous répondre sur le dénigrement
qu'il a fait auprès des fonctionnaires également. Donc, est-ce qu'on est
surpris aujourd'hui qu'il se cache, qu'il passe par la porte en arrière pour ne
pas vous répondre? Non.
Ce n'est pas ce que j'appelle de la démocratie,
par contre, et je vous invite, comme journalistes, à continuer de dénoncer ça
pour qu'il vienne répondre. Je pense que c'est la base de notre démocratie.
M. Marissal : Bonjour, Martin.
Considérant le début de mandat de ce gouvernement-là, je pourrais comprendre
M. Legault de ne pas vouloir envoyer ses ministres se mettre le pied dans
la bouche tous les jours devant tous les kodaks du Québec.
Cela dit, c'est une tradition ici, dans
cette enceinte, ça fait partie de la vie démocratique que de répondre aux
questions en Chambre, mais aussi aux questions des journalistes. Mais parfois
ne pas répondre ou fuir, ça laisse des traces aussi, et je vous sais, vous de
la tribune, assez tenaces pour continuer de les pourchasser pour aller chercher
les réponses éventuellement.
Cela dit, sur la façon de fonctionner, ça
me rappelle un gouvernement que j'ai déjà couvert à Ottawa, c'est-à-dire le
gouvernement Harper. Il y a visiblement une communauté d'esprit de plus en plus
évidente dans la façon de gouverner et dans la façon de se comporter entre
M. Harper et M. Legault.
M. Barrette : Alors, peut-être
une dernière chose. À quand allez-vous avoir des points de presse à trois
questions? Ça s'en vient, je vous le prédis.
(Fin à 15 h 8)