(Onze heures trois minutes)
M. Khadir
: Bonjour, tout
le monde. Une question, enfin, un sujet retient mon attention ce matin. Évidemment,
chaque semaine apporte son lot de controverse sur la manière dont Gaétan
Barrette et Philippe Couillard ont organisé le système de santé au Québec. Tout
le monde a constaté qu'il ne reste plus qu'une seule personne au Québec qui accorde
un crédit et un appui à M. Barrette à la tête du système de santé et il
s'appelle Philippe Couillard. Malheureusement, les deux sont grandement
responsables des nombreux dérapages qu'on observe et l'extrême, je dirais,
désarroi des employés du réseau de la santé, des administrateurs du réseau de
la santé, mais également des médecins qui, dans tout ça, bon nombre trouvent
déplorable le procès qui leur est fait à cause de la culture mercantile installée
à la tête de la FMSOQ... de la FMSQ et de la FMOQ, grandement, grandement en
raison de la culture toxique de M. Barrette lorsqu'il était président de la
FMSQ.
Bref, tout ça, bien, on en apprend chaque
semaine, puis il y en a une autre. On apprend que le financement par activités,
que le milieu, je dirais, mercantile, qui entoure, qui a ouvert grandes, je
dirais, les griffes pour soutirer des bénéfices du réseau de santé public,
pousse depuis des années, et que M. Barrette a introduit sous forme de projet
pilote, bien, on a déjà des problèmes, tels que déjà mentionnés par des
critiques, comme nous, comme MQRP.
Le financement par activités, là,
rappelez-vous-le bien, et on l'a déjà dit, MQRP l'a déjà dit, c'est exactement
l'équivalent du financement à l'acte pour les médecins, mais appliqué, cette
fois-ci, pour les établissements. Alors, si vous aimez les horreurs qu'on
observe dans les aberrations apportées par le financement à l'acte, qui font
exploser les coûts dans la rémunération des médecins, bien, vous allez adorer
le financement par activités.
Et moi, ce qui me désole, c'est
l'incompétence ou l'insouciance de Philippe Couillard et de Gaétan Barrette,
alors qu'on connaît déjà cette pratique en Europe. La France, après avoir
pratiqué ça pendant 10 ans, en revient. Ils sont obligés d'imposer des quotas
parce que ça a explosé les coûts. Et là aujourd'hui, au Québec, on apprend que
M. Barrette veut introduire ça au Québec. Mais dans l'intérêt de qui? Quelle
est cette incompétence dans la gestion des fonds publics? On sait que le
financement par activité va augmenter les coûts.
En France, ce qui arrive, c'est que des hôpitaux
en manque de financement, des hôpitaux publics comme privés, mais surtout
privés, vont faire quoi, vont multiplier les actes chirurgicaux et autres, qui
sont parfois non nécessaires, exactement comme le financement... c'est-à-dire
le revenu par paiement à l'acte entraîne chez les médecins... entraînant des
services inutiles. Ça a été clairement démontré en France par le ministre de la
Santé en France, qui le dénonce lui-même, et là M. Couillard semble
complètement ignorer ça. Je parle de Couillard parce que je pense qu'il
n'y a plus de crédibilité à accorder à M. Barrette. C'est vraiment des réformes
déjà pensées par l'équipe Couillard, lorsqu'il était ministre de la Santé et,
aujourd'hui, premier ministre.
Donc, je demande, encore une fois :
M. Couillard, il est temps que vous démettiez Gaétan Barrette de ses fonctions.
On n'a pas besoin d'une troisième démonstration par Gaétan Barrette. Sa
troisième réforme serait le financement par activité des hôpitaux et des
activités hospitalières ou chirurgicales. On n'a pas besoin d'une troisième
démonstration de l'incompétence de ce ministre à régler les problèmes du
système de santé, et il est temps que Philippe Couillard assume seul, parce
qu'il est le grand responsable de ce dégât, le constat de la situation puis
apporte des correctifs et des remèdes urgents au système de santé québécois.
Le Modérateur
: On va
passer à la période de questions. François Cormier, TVA.
M. Cormier (François) :
Bonjour. François Cormier, TVA. Pouvez-vous dire clairement ce que vous
appréhendez dans un financement comme celui-là dans les hôpitaux du Québec,
s'il vous plaît?
M. Khadir
: Ce qu'on
appréhende, c'est exactement que se reproduise, dans le financement des
activités hospitalières, le même phénomène qui se produit lorsque la
rémunération pour les médecins repose uniquement à l'acte, c'est-à-dire une
explosion des coûts. Partout en Occident, même aux États-Unis, tous les experts
aujourd'hui s'entendent, et, par exemple, les «accountable care organizations»
s'en vont vers là, on dit : le financement... c'est-à-dire le revenu à
l'acte, la rémunération à l'acte comporte des dangers, ça fait exploser des
coûts, il faut moduler ça par la capitation, par le salariat, donc un système
mixte.
Donc, on essaie de régler le problème dans
le paiement des médecins individuels puis là on est en train de reproduire la
même situation pour les établissements, parce que le financement par activité
est aux établissements ce que le paiement à l'acte est aux médecins. Donc, si
le paiement à l'acte, chez les médecins... vous voyez aujourd'hui les
conséquences, c'est-à-dire l'explosion des coûts, vous allez voir exactement la
même chose pour ce qui de financement à l'activité. Et je n'ai même pas besoin
de vous demander d'y croire sur ma parole ou sur la parole des experts.
L'expérience française le démontre. Tout récemment, un ministre français le
dénonçait.
M. Cormier (François) : Je
comprends bien ce que vous nous dites, M. Khadir, mais, même si vous le
reformulez... mais, mettons, en termes clairs, avec...
M. Khadir
: Ça va
coûter plus cher.
M. Cormier (François) : Non,
non, non... J'en conviens. Pouvez-vous dire ce que... les établissements, vous
pensez qu'ils vont agir comment? Ils vont augmenter le nombre de chirurgies
qu'il y a à faire? Donnez-nous un en exemple concret, là, juste pour que ça
soit plus imagé.
M. Khadir
: Ce qui
arrive, par exemple, en France, c'est que les hôpitaux vont multiplier des
actes chirurgicaux qui rapportent beaucoup à l'hôpital par rapport à d'autres
types de soins tout aussi nécessaires ou parfois même plus nécessaires, ce que
le ministre de la Santé de la France... C'est ça qu'il dénonce.
C'est que là on voit de plus en plus
d'actes qui se répandent, qui sont moins nécessaires pour certaines catégories
de patients, que, par exemple, le suivi chronique à l'hôpital de leur maladie,
une remise... par exemple, si un traitement fait intervenir une série d'actes
et de soins qui rapportent moins dans le financement par activité, bien,
l'hôpital va choisir des gestes, par exemple, des gestes chirurgicaux, des
gestes très techniques qui rapportent plus à l'hôpital. Donc, il y a une espèce
de pression qui s'exerce, puis c'est humain. N'importe quel système dans lequel
il y a des contraintes, puis là tu vois deux opportunités où, dans une des
opportunités, tu as plus de revenus, il y a un biais qui pousse vers une
consommation accrue de services moins utiles, mais plus lucratifs. Et c'est la
même chose qui risque d'arriver.
Et au bout du compte, ça veut dire quoi?
Les patients sont moins servis, les fonds publics vont être plus atteints. On
va dépenser plus pour moins de services.
Mme Cloutier (Patricia) :
Bonjour. Patricia Cloutier du journal Le Soleil. Je voulais vous
demander : Qu'est-ce que vous suggérez, vous, pour financer les hôpitaux?
Est-ce qu'on fait le financement historique tel que... Est-ce qu'on garde ça
tel quel, là, comme c'est actuellement?
M. Khadir
:
Actuellement, ce qu'on observe surtout, il ne faut pas l'oublier, actuellement,
ce qui cause problème, c'est qu'il y a un sous-financement chronique depuis, en
fait, 20 ans. D'accord? Depuis la fin des années 90, il y a un sous-financement
chronique pour l'ensemble des services publics. C'est 25 % en dollars
constants. Le système de santé, un peu moins, mais c'est énormément d'argent
qui manque dans le réseau. D'abord, il faut le financer adéquatement pour faire
rouler les salles d'opération, pour faire rouler les machines, pas juste
jusqu'à 4 heures l'après-midi, mais jusqu'à minuit. Les patients en
demandent. Ça désengorgerait le système. Ils ont besoin d'un financement
adéquat.
Maintenant, le financement historique
peut, bien sûr, être modulé, exactement comme le financement des CLSC ou le
financement des GMF. Nous pouvons très facilement concevoir qu'en vertu de la
lourdeur de certains types de population qui sont traités dans des hôpitaux
puis en prévision des interventions de prévention, on puisse avoir un
financement plus intelligent que les modèles plus traditionnels. Mais ce n'est
certainement pas le financement à l'acte, parce que le financement par
activité, c'est vraiment l'équivalent du financement à l'acte, le paiement à
l'acte des médecins. Ce n'est pas ça, le modèle intelligent. Et la preuve a été
faite, même si conceptuellement, certains auraient pu penser que, oui, on peut
essayer, mais là il faut absolument se rendre compte, ça a déjà été essayé, ça
coûte plus cher. La preuve, c'est à même l'expérience pilote au Québec. Vous
venez d'avoir la démonstration ici même, au Québec. Ce qui devait coûter 4 millions
coûte maintenant... le chiffre m'échappe, 12 millions ou 18 millions,
presque 20 millions. Donc, il faut faire gaffe.
Mme Cloutier (Patricia) : Mais
vous ne croyez pas, donc, qu'on devrait doper la productivité des hôpitaux,
dans le sens qu'ils devraient être incités, par un certain financement, si on
veut, à être plus productifs et à faire plus?
M. Khadir
:
Excusez-moi, ça, c'est le langage qui nous a amenés dans ce cul-de-sac
absolument détestable. C'est ce genre de langage. Les hôpitaux, ce n'est pas parce
qu'ils ne peuvent pas avoir un rendement... on ne donne pas le budget
nécessaire, dans mon hôpital, pour que la résonnance magnétique puisse fonctionner
jusqu'à 8 heures du soir.
Comment voulez-vous qu'on rentabilise,
entre guillemets... si on ne donne pas l'argent nécessaire pour engager des
techniciennes, pour engager le personnel de soutien qui va avec, comment, après
ça, on peut venir accuser l'hôpital de ne pas être performant? Si toutes les
installations coûteuses qu'on a faites dans mon hôpital... je prends l'exemple
juste de mon hôpital. En physiothérapie, avec des installations de pointe qui
auraient pu être absolument géniales pour remplir les besoins de la population
en postop, pour ne pas être obligé de garder les patients à l'hôpital, bien, il
fallait engager des physiothérapeutes, il fallait engager des «nurses», il
fallait engager des préposés pour que ces installations puissent opérer jusqu'à
8 heures le soir. Aujourd'hui, ça ferme à 3 h 45.
Et là on demande aux hôpitaux d'être plus performants,
mais, écoutez, ça n'a juste pas de bon sens. C'est des mensonges que nous ont
racontés les Philippe Couillard de ce monde et les Gaétan Barrette de ce monde
pour contraindre le système puis ensuite tourner le système vers un modèle qui
pousse à la privatisation.
Le Modérateur
: Mathieu
Dion, Radio-Canada.
M. Dion (Mathieu) : Publicité
nettement en hausse en éducation et en économie, tout ça à quelques mois des
élections, des publicités qui vantent le bilan du gouvernement, est-ce que c'est
acceptable?
M. Khadir
: Bien,
écoutez, je pense que vous avez dû observer, exactement comme moi, là... de
temps en temps, je regarde la télé, puis c'est le même constat, mais je pense
que le public est assez intelligent pour comprendre à quel point c'est vraiment
une fraude intellectuelle, une fraude publique, lorsque des gouvernements en
place utilisent des deniers publics à 12 mois, à six mois des élections, pour
faire la promotion de programmes qui vont de soi et qui n'ont certainement pas
besoin d'être...
Pourquoi est-ce qu'on voit la
multiplication de tout ça? C'est parce que le gouvernement actuel sait à quel
point il n'a plus l'appui d'une grande majorité de la population. Même les électeurs
libéraux qui y tiennent en raison de leur loyauté à l'appareil libéral. Moi,
j'en rencontre, là, il y en a à Montréal, je les rencontre tous les jours dans
l'autobus, hein, les gens me reconnaissent, puis on parle politique
constamment. Même chez les électeurs libéraux, il y a une grande
désaffection pour Philippe Couillard et pour tout son programme. Et je pense
qu'ils le sentent, les libéraux, et donc là ils utilisent les fonds publics. Ils
ne se sont jamais gênés, aucun scrupule pour les fonds publics chez les élites
au pouvoir depuis longtemps. Alors, ils font comme d'autres au pouvoir, ils
utilisent les fonds publics pour faire la promotion de leur parti.
M. Dion (Mathieu) : L'élection
à date fixe permet de mieux planifier la chose, dans une certaine mesure. Est-ce
que vous demandez peut-être au Directeur général des élections de revoir ces
règles plutôt que de... Là, présentement, ils disent qu'ils étudient la chose,
là, mais...
M. Khadir
: Il y a
toute une série de choses qui peuvent être faites pour éviter ce genre d'abus,
mais je pense qu'on n'en est pas à une petite réformette près. Ce qu'on a
besoin, c'est de se débarrasser de ces gouvernements dont... parce que, vous
voyez, cette fraude dont je parle, c'est constitutif du Parti libéral depuis au
moins 20 ans. Quand on a fraudé à cette hauteur pour ramasser des fonds publics, hein,
parce que c'étaient des détournements de fonds publics, quand il y avait des
ristournes pour la caisse électorale du Parti libéral, pourquoi est-ce
qu'on s'étonne, moi et vous, que M. Couillard utilise si allègrement, avec
aussi peu de scrupules, les fonds publics pour faire la promotion de son gouvernement?
Comment s'étonner?
Il faut vraiment se débarrasser de ces
gens-là qui contrôlent le pouvoir, parce que, même si on met les meilleures
règles, mais on reconduit les mêmes appareils, le même monde au pouvoir, ils
vont trouver d'autres façons de nous rouler.
M. Dion (Mathieu) : Par
curiosité, l'amendement pour les boissons alcoolisées fortes, là, vendues dans
les dépanneurs, on amène ça à la SAQ, est-ce que c'est la bonne façon de faire?
Un amendement au projet de loi sur la Régie des alcools et des jeux, est-ce que
c'est le bon processus à faire pour en arriver à...
M. Khadir
: Sur le
meilleur moyen législatif de contrôler ça, je ne peux pas me prononcer, je n'ai
pas eu le temps de regarder ça en détail.
Ce que je peux vous dire, c'est que Québec
solidaire embrasse entièrement les recommandations d'Éduc'alcool là-dessus. Il
y a des interventions que doit faire le gouvernement fédéral, mais il y a
surtout des interventions que doit faire aussi le gouvernement provincial, le
gouvernement du Québec, sur ce sujet. Et nous embrassons parfaitement les
recommandations d'Éduc'alcool. La place de ces boissons-là, ce n'est pas dans
les étagères de nos dépanneurs, ça, il faut le rappeler. Les dépanneurs, il ne
peut y avoir de la place que pour l'alcool non transformé, dont le goût est non
maquillé. D'accord? De la bière et du vin. Ça ressemble à de la bière et du
vin. C'est pour ça qu'on n'a pas de liqueurs, on n'a pas de scotch, on n'a pas
de brandy, on n'a pas de porto dans nos dépanneurs. Pourquoi? Parce que
justement le législateur avait prévu qu'il fallait garder ça pour la SAQ, où il
y a un meilleur contrôle.
M. Dion (Mathieu) : Et
rapidement, comment interprétez-vous le changement de cap de la ministre? La
semaine passée, ils disaient : C'est dans la cour du fédéral de gérer ça.
Là, on...
M. Khadir
: Non, ce n'est
pas vrai.
M. Dion (Mathieu) : Mais
comment le changement de cap...
M. Khadir
: J'insiste
pour que la ministre rencontre M. Sacy d'Éduc'alcool. On a des compétences, on
finance cet organisme-là qui n'a aucun intérêt, aucun conflit d'intérêts sur ce
sujet, sinon de protéger le public. Alors, M. Sacy pourrait expliquer à la
ministre comment trois, au moins, catégories d'actions peuvent être posées par
le gouvernement du Québec pour s'assurer que ces boissons-là se trouvent à la
bonne place et non pas allègrement dans la main des jeunes en bas de 18 ans.
Le Modérateur
: On va
prendre une dernière question. Caroline Plante...
Mme Plante (Caroline) :
Bonjour, M. Khadir. Donc, en ce qui concerne les médecins, avez-vous été
étonné, la semaine dernière, d'entendre M. Couillard, en France, remettre en
cause deux principes, donc le principe d'équité externe, de comparaison avec
les autres au Canada et puis le principe de l'autoadministration des enveloppes
de rémunération?
M. Khadir
: Évidemment,
j'imagine que quand vous utilisez le terme «principe», vous ne voulez pas dire
que c'est des principes universellement reconnus. C'est des techniques de négociation.
D'ailleurs, c'est le genre de règles imposées par la culture mercantile et
cupide de Gaétan Barrette lorsqu'il était à la FMSQ, de convaincre que notre
base de référence devait être les médecins les mieux payés en Ontario.
D'accord?
S'il y a un principe, selon nous, ce
principe, c'est d'éviter les écarts de richesse dans une société, à cause de
tous les problèmes que ça entraîne, en plus des coûts supplémentaires. S'il y a
un principe, par exemple, c'est le genre de principe que proposent même des
grands milliardaires qui ont un peu de souci de justice sociale, qui disent que
pour les plus riches, dans une compagnie, par exemple, les dirigeants ne
devraient pas être payés au-dessus de 20 fois, 30 fois, 40 fois ou 50 fois le
plus bas salarié.
Alors, si c'est ce genre de principe qui
doit nous guider, c'est le temps qu'on fasse une réflexion. Il devrait y avoir
un plafond salarial pour les médecins, plafond de revenus ajusté en fonction
soit de la moyenne, soit des plus bas salariés dans le réseau de la santé. Ça,
ça serait un principe souhaitable et louable et non pas une course à la
surenchère entre des élites, exactement comme on le voit chez les dirigeants de
Bombardier et des compagnies, des chefs d'entreprises qui sont en, disons, surenchère
constante, au détriment des petits actionnaires pour se payer des gros
salaires.
Mme Plante (Caroline) : Mais
que M. Couillard remette en cause ces principes ou ces techniques après, donc,
les négociations avec les médecins, ça vous étonne?
M. Khadir
: Ça
m'étonne à moitié. Je pense que, là, M. Couillard sent la soupe chaude. Il a
réalisé qu'il était, en fait, le dernier responsable au Québec capable de
regarder le monde dans la face, comme il est capable de le faire, et encore
nous mentir sur le fait que d'abord, il y a une entente. Il n'y a pas
d'entente. Il n'y a pas d'entente. J'ai reçu moi-même encore un courriel samedi
dernier, samedi ou vendredi dernier, de la FMSQ, qui disait : Nous ne
parlerons pas — ça, c'est Diane Francoeur, la responsable de la FMSQ —
nous ne parlerons pas en public avant que l'entente soit signée. Qu'est-ce que
ça veut dire? Ça veut dire : il n'y a pas d'entente de signée. Et
qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que Philippe Couillard vous ment
quand il dit qu'il y a une entente, puis on est obligés de respecter notre
signature. Il n'y a pas de signature.
Donc, malheureusement pour nous, Philippe
Couillard est capable encore de nous mentir, tout le public, sur ces
dossiers-là, mais il sent, en même temps que la soupe est chaude, que
maintenant tout le monde rejette et son ministre et ses décisions dans le
secteur de la santé puis il est obligé de faire quelques concessions du bout
des lèvres.
Mais je dis à Philippe Couillard que,
maintenant, il sait que l'ensemble du public et l'opposition est unanime. Personne
d'entre nous, une fois arrivés au pouvoir au lendemain des élections d'octobre,
nous n'allons accepter cette entente inéquitable, injuste et négociée derrière
des portes closes.
Mme Plante (Caroline) : Sur
un autre sujet, brièvement, le fordisme. Donc, est-ce que vous croyez que c'est
un courant politique de fond, qui pourrait être contagieux? Et dans quelle
mesure ça pourrait avoir un impact au Québec, l'élection de Doug Ford en
Ontario, au poste des conservateurs?
M. Khadir
: J'espère
que Doug Ford n'est pas encore élu au poste de premier ministre de l'Ontario.
Personne ne le souhaite.
Mme Plante (Caroline) : Non,
au poste de chef conservateur.
M. Khadir
: ...comme
une majorité de Canadiens ne le souhaite pas. C'est sûr que c'est inquiétant. Ça
prouve qu'on n'est pas à l'abri, au Canada ni nulle part dans le monde, devant
les conséquences désastreuses, devant les conséquences désastreuses de
l'insécurité économique dans laquelle on a plongé des millions de travailleurs,
des millions de gens partout dans le monde. Donald Trump aux États-Unis, c'est
l'insécurité des travailleurs américains. La droite qui prend force en Europe,
partout, c'est l'insécurité des populations d'Europe, des travailleurs et des travailleuses
d'Europe plongés dans l'insécurité économique à cause de politiques néolibérales.
Et donc c'est sûr que, si Philippe
Couillard continue, si jamais François Legault arrive au pouvoir puis continue
d'appliquer des politiques néolibérales, les mêmes politiques qu'on a
appliquées au Québec depuis 20, 30 ans, on va augmenter, aggraver les risques
qu'ici aussi, au Québec, s'installent des courants de droite, jusqu'au-boutiste
extrême, comme Doug Ford en Ontario.
M. Lachance (Nicolas) :
Bonjour. Qu'est-ce que vous pensez du programme d'octroi de passeport pour
immigrants investisseurs, alors que la majorité de ces personnes-là, la plupart,
ne vivent pas ici?
M. Khadir
: Oui, mais,
en fait, ce n'est pas juste au Québec qu'on s'en plaint, hein? Il y a eu plusieurs
scandales à Vancouver, à Toronto, de gens qui utilisent leurs riches ressources,
les millionnaires, les multimillionnaires chinois, marocains, iraniens,
nommez-les, d'accord, qui souvent ont acquis de l'argent par des voies
frauduleuses dans leur propre pays, qui n'ont pas déclaré leur impôt là-bas,
qui ont des millions à essayer de mettre à l'abri. Et malheureusement c'est
reconnu, vous allez le voir, il y a un article du Sun de Vancouver qui
fait le portrait là-dessus, il y a quelques semaines à peine.
Le Canada est reconnu par les experts
financiers qui, en immigration, qui conseillent ces parvenus, là, ces nouveaux
millionnaires, le Canada, c'est une bonne place où émigrer parce que nos lois
laxistes envers les très riches pardonnent facilement les fraudes et les
malversations ou le non-paiement de taxes et d'impôt dans les pays d'origine.
Alors, c'est sûr que ces gens-là cherchent à venir se, comment on dit ça, se
terrer ici, trouver un refuge fiscal et un refuge de la justice. Nos lois
fiscales, nos lois judiciaires sont trop permissives pour ces gens-là, et c'est
sûr que, là, ils utilisent tous les moyens à leur piston, et malheureusement
c'est arrivé au Québec, c'est arrivé à Toronto, c'est arrivé en
Colombie-Britannique également.
Le Modérateur
:
Dernière question. Marco Bélair-Cirino, Le Devoir.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui, deux questions brèves. Tout d'abord, sur la...
M. Khadir
: Les
réponses seront longues malgré tout.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Oui. Sur l'entente toujours pas signée avec les médecins spécialistes du
Québec, il y a plusieurs médecins qui ont pris la parole, notamment des jeunes
médecins, au cours des derniers jours, pour se plaindre avec une grande
inquiétude de la détérioration de la relation patient-médecin. Plusieurs
médecins se font parfois même invectiver par des patients. Est-ce que vous
craignez une détérioration du climat social au Québec?
M. Khadir
: Il y a
deux semaines ou trois semaines, lorsque ces informations sont sorties en
premier, on a fait... je pense que vous étiez là, la première inquiétude que
j'ai exprimée, j'ai dit que les premiers à qui tout ça va faire mal et très
mal, c'est les médecins. C'est notre réputation qui est entachée. On passe pour
de parfaits profiteurs, juste à cause de l'action et de la culture. Moi, je
pense même, Diane Francoeur, la présidente de la FMSQ, n'est pas heureuse avec
tout ça, n'est pas heureuse avec ce genre de logique qui la pousse sans cesse,
frénétiquement, de manière obsessive, dans son approche de son rôle, uniquement
à parler de rémunération et améliorer la rémunération des médecins
spécialistes. Je pense qu'elle n'est pas heureuse avec ça. On la sent, lorsqu'elle
écrit des commentaires.
Pourquoi? Parce que malheureusement nos
fédérations, il y a une culture qui s'est installée et qui a été lourdement
aggravée par Gaétan Barrette et quelques-uns, encouragée par Philippe Couillard
lorsqu'il était ministre de la Santé, qui leur a accordé toutes ces
augmentations, qui fait qu'on est dans cette spirale qui nuit à la réputation
des médecins et donc qui nuit à notre prestige, à notre honneur, à notre
crédibilité aux yeux de nos patients.
Et c'est pour ça que vous entendez, et je
pense que ça reflète... je ne sais pas si une majorité, et quelle majorité, ou
quelle minorité importante, mais je l'entends beaucoup chez mes collègues,
omnipraticiens comme spécialistes, ils sont inquiets, ils ne méritent pas ça.
La plupart sont dévoués à la tâche, la plupart ne veulent pas des revenus plus
élevés. Ce qu'ils veulent, c'est des conditions de travail, pour tout le monde,
plus appropriées dans les hôpitaux, qu'ils ne soient pas obligés de faire du
travail de secrétaire, qu'ils ne soient pas obligés de... à la place de la «nurse»,
prendre les... faire un pansement comme je suis obligé de le faire, parce qu'il
n'y a plus de «nurses». Elles sont toutes occupées à administrer les choses,
puis on est en... Il n'y a pas assez d'infirmières pour les soins qu'on doit
prodiguer.
Donc, des gens comme moi aimeraient mieux
que les hôpitaux fonctionnent mieux, que tout le monde travaille dans des
conditions plus dignes, puis ils seraient bien satisfaits avec ça.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Mais est-ce que les partis d'opposition ont une certaine responsabilité dans
cette détérioration-là, bon, du climat social, appelons ça comme ça, en ciblant
les attaques et en multipliant les sorties médiatiques sur la rémunération des
médecins?
M. Khadir
: Si moi,
j'ai fait ça, c'est une erreur. Si moi, j'ai fait ça, je le dis, c'est une
erreur, et je m'en excuse profondément. Mais je crois avoir toujours pris soin
de dire que c'est une clique, c'est un establishment qui contrôle le pouvoir.
Si M. Couillard représente l'ensemble du peuple québécois, bien, la Fédération
des médecins spécialistes représente l'ensemble des médecins. Mais ce n'est pas
le cas. C'est des gens qui ont le pouvoir et qui agissent en fonction de leurs
intérêts.
Je ne pense pas que la plupart des
médecins sont heureux de voir ce qui arrive. La plupart des médecins aimeraient
mieux que ces montants-là soient consacrés à améliorer le sort de nos hôpitaux,
le sort de nos CLSC.
M. Bélair-Cirino (Marco) : Ma
deuxième question maintenant, ma dernière. Alors, il y a eu une nouvelle
mesure, là, du Directeur général des élections qui, plutôt que d'interdire le
voile pour des personnes qui souhaitent se porter candidats aux élections,
interdit un couvre-chef, là. On peut penser, bon... Pour certains...
M. Khadir
: Bien là,
on donnerait la fâcheuse impression qu'il y a deux poids, deux mesures. Écoutez,
on a des représentants, sur la scène municipale, qui portent la kippa, puis ça
ne représente pas un problème. On a des gens, au niveau fédéral, qui sont
d'origine sikhe et qui portent... Bon, puis ça, ça ne les empêche pas d'être...
Ils ont à l'oeuvre... en vertu des mêmes principes que leurs collègues qui n'en
portent pas. Là, ce n'est pas la question.
Si on est soucieux de la laïcité de nos institutions,
on devrait être plutôt soucieux... puis les entendre sur la croix qu'on
continue d'afficher ici comme symbole fort, hein? On sait, historiquement, d'où
ça vient. Si on est soucieux, on devrait être soucieux du financement des
écoles privées religieuses par l'État québécois. Si on est soucieux de la
laïcité, on devrait peut-être s'intéresser à savoir pourquoi l'Église, et pas uniquement
l'Église, mais aussi d'autres congrégations religieuses d'autres religions,
bénéficient de congés d'impôt importants. Pourquoi est-ce qu'aussi facilement
les groupes communautaires ne jouissent pas des mêmes largesses fiscales?
D'accord? Moi, je pense que c'est là que réside le noeud du problème. Ou si on
veut aller plus loin, pourquoi est-ce que l'argent de l'Arabie saoudite rentre
aussi facilement ici, au Québec, pour financer toutes sortes d'écoles religieuses?
Juste parce que c'est des amis puis c'est une monarchie pétrolière amie des
Américains et de M. Trudeau? C'est là qu'on devrait poser des questions.
Mme Johnson (Maya) : Merci.
Ah! en anglais. Rapidement.
Mme Johnson (Maya) : Je suis
la seule. Oui, oui, oui. Just quickly, Mr. Khadir, you said
that you welcome all of the recommendations of Éduc'alcool. Tell us a little
bit more about that. I mean, you described these drinks as basically being in
disguise.
M. Khadir
: Yes. First, in Québec, the alcohol per gram price is the
lowest in Canada. That's
something on which the Québec
Government can do something, because the fact that young teenagers or young
people have access to that type of alcohol is because the price is so low. So
we also consume much more of alcohol, including these...
Second, they shouldn't be
on the shelves of small shops and «dépanneurs». They should be in SAQ, because
in «dépanneurs» only should be allowed alcohols which are not disguised, and
these beverages that created the tragedy 10 days ago are disguised alcohol. So,
on that matter, the Government of Québec can act, and there is a series of other measures that the Government of Québec can do. Of course, the federal has also some
responsibilities, but the Minister in Québec can act.
Mme Johnson (Maya) : Which he is apparently going to be doing... announcing this
afternoon.
M. Khadir
: We hope. We hope, but, remind you, Éduc'alcool has already
said that months before. More than a year more before, Mr. Sacy, d'Éduc'alcool,
warned : Are you waiting for a dead person, for dead young people before announcing something? Unfortunately, that happened. The
Government of Québec waited that some tragedy happens before acting.
Des voix : Merci.
(Fin à 11 h 32)