(Huit heures trente-six minutes)
Mme Ouellet : Oui, donc,
bonjour. Ce matin, vraiment une excellente nouvelle. C'est assez rare qu'on se
lève le matin avec une bonne nouvelle pour l'environnement. TransCanada
Énergie, qui indique qu'elle abandonnera son projet Énergie Est... Je pense
que, vraiment, on peut féliciter... C'est une grande, grande victoire pour le
mouvement citoyen, pour les groupes environnementaux qui, mobilisation après
mobilisation, marche après marche, manifestation après manifestation, colloque
après colloque, ont réussi à faire tomber les différents morceaux. Vous vous rappelez
du port de Cacouna, et ensuite toute la question de l'office de l'énergie
canadien qui avait des gens qui étaient vraiment juges et parties. Ils ont
réussi à faire faire des changements, ils ont réussi à faire en sorte que les gaz
à effet de serre soient analysés, et je crois que c'est vraiment la goutte qui
a fait déborder le vase pour TransCanada, parce qu'une fois qu'on inclut les gaz
à effet de serre dans leur analyse environnementale, on se rend compte à quel
point ce projet-là a des impacts importants, ces gaz à effet de serre là qui
ont été évalués de 32 à 33 millions de tonnes par année. Donc, je pense
que, vraiment, c'est une grande victoire. Et moi, personnellement, et aussi
l'ensemble du Bloc québécois, on est vraiment très heureux de cette victoire-là
du mouvement citoyen et que le projet Énergie Est soit abandonné. On regardera
les détails qui suivront, j'imagine, par la suite, mais vraiment une grande
victoire ce matin.
C'est certain que je veux vous parler un
petit peu de la Catalogne aujourd'hui aussi, parce que j'en arrive tout juste,
je suis arrivée mardi, et donc j'ai eu l'occasion de constater sur place, sur
place, la dignité de ce peuple-là, et aussi, je vous dirais, en contrepartie,
la honte du gouvernement espagnol, qui a envoyé la police espagnole vraiment
contre les citoyens, qui a fait des charges contre les citoyens. On les voyait
frapper des grands-mères, tirer par les cheveux des gens, des gens qui étaient déjà
à terre, leur donner des coups de pied. Même un citoyen m'expliquait comment
une de ses amies, elle s'était fait casser les doigts. Je veux dire, ça n'a pas
de sens. On parle de droits fondamentaux, le droit d'aller voter. Ce qui s'est
passé en Catalogne, ça n'a vraiment pas de sens.
Et ce qui, je vous dirais, m'attriste le
plus dans cette situation-là, c'est de voir le silence, le silence à
l'international et le silence, plus particulièrement, des pays de l'Europe, des
pays qui se disent démocrates et pour un pays comme l'Espagne qui aussi se
disait démocrate — je pense qu'il ne pourra plus se dire démocrate à
partir de ces événements-là — qui n'ont pas réagi, qui n'ont pas
dénoncé, qui n'ont pas condamné, malgré tous les beaux accords internationaux
qui sont signés sous l'ONU et sous l'Union européenne, qui n'ont pas dénoncé,
condamné les actions de Madrid.
Mais moi, je peux vous dire que le peuple
catalan, que j'ai vu devant les lieux de votation, qui sont allés protéger
leurs lieux de vote, ça s'est fait en toute convivialité, calmement,
pacifiquement, et c'était vraiment beau à voir, toute cette énergie qu'ils
avaient.
Et je finalise par... Aujourd'hui, je
déposerai donc une motion. On a vu cette semaine un sondage où 65 % des
Québécois et des Québécoises souhaitent un monopole d'État pour le cannabis.
L'institut de la santé publique du Québec a aussi déposé un mémoire qui dit
qu'une société d'État, c'est beaucoup mieux pour le cannabis. Donc, je dépose
une motion qui demande deux choses. Premièrement, que le Québec rapatrie tout
les pouvoirs en matière de production, parce que c'est une compétence québécoise,
et le Canada n'a d'aucune espèce de façon la légitimité de garder cette
compétence-là, tout comme on a la compétence pour la distribution; mais plus
que ça, d'aussi faire réaliser que le gouvernement du Québec réalise une étude
sur la nationalisation tant de la production que de la distribution ainsi
qu'une évaluation plus précise des retombées financières, qui sont évaluées à
plusieurs milliards de dollars, donc, retombées financières qui pourront servir
en prévention, mais aussi pour l'ensemble des services publics et documenter
les avantages d'une société d'État en ce qui concerne la santé publique. Merci.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Bonjour. TransCanada a annoncé aujourd'hui l'abandon de son projet, mais est-ce
qu'il y a lieu de craindre le dépôt d'un autre projet de pipeline Ouest-Est?
Est-ce qu'un projet de pipeline aurait toujours un certain attrait économique?
Mme Ouellet : Bien,
écoutez, je n'ai pas tous les détails, là. On a vu l'annonce de l'abandon du
projet ce matin. J'imagine que, dans les prochaines heures, on va recevoir
l'ensemble des détails, mais c'est certain qu'avec une évaluation obligatoire
des gaz à effet de serre, ce que TransCanada s'est toujours refusé à faire dans
tous ses projets, ça vient beaucoup impacter la rentabilité économique parce
qu'il peut y avoir compensation suite à ces émissions-là, et là, à ce
moment-là, le modèle économique risque de ne plus tenir, donc je pense que
c'est un des éléments extrêmement importants. Et peut-être que le fait que les
projets vers l'Ouest et vers le Sud semblent avancer peuvent aussi avoir de
l'impact, mais mon analyse avant aujourd'hui, c'était que TransCanada
souhaitait quand même de se garder toutes les portes ouvertes, donc je ne crois
pas qu'ils auraient abandonné Énergie Est tant que les autres projets,
vraiment, n'étaient pas plus attachés si ça n'avait été de l'histoire, là, de
l'évaluation des gaz à effet de serre.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Puis c'est une victoire, essentiellement, du mouvement citoyen plutôt que des politiques?
Mme Ouellet : Bien, moi,
je pense que c'est une victoire, premièrement, du mouvement citoyen, des
groupes environnementaux, puis appuyés, oui, par les partis politiques, parce
qu'on se rappellera toutes les mobilisations qui ont été faites tant à
l'intérieur du printemps étudiant, tant ici, à Québec — puis je me
rappelle, j'y participais — quand on est venus faire le thermomètre,
le fameux thermomètre avec la soirée humoristique et la soirée culturelle qui
s'en est suivie, les marches à Cacouna, il y en a eu deux — moi, j'ai
participé à ces marches-là — les différentes marches qui se sont
faites tout le long, et toute la mobilisation qui s'est faite aussi avec les
élus municipaux, parce qu'à un moment donné beaucoup d'élus municipaux ont
embarqué dans le mouvement citoyen, ensuite, clairement, les partis politiques,
donc, et moi-même, comme députée du Parti québécois et comme chef du Bloc
québécois, j'ai vraiment travaillé, puis on a poussé contre ce projet-là,
contre le projet d'Énergie Est. Donc, je pense que c'est une victoire qui est
de tous ces acteurs-là, mais je pense qu'il faut quand même souligner le
mouvement citoyen, qui a tenu cette bataille-là à bout de bras. Et je le dis
souvent : Il y a un pouvoir citoyen énorme quand les gens l'exercent. Le
pouvoir citoyen, il est plus fort que n'importe quelle multinationale, tant
qu'il est exercé.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Vous êtes l'une des figures les plus importantes, les plus visibles du
mouvement indépendantiste. Est-ce qu'une fusion entre Québec solidaire et
Option nationale serait bénéfique pour le mouvement indépendantiste?
Mme Ouellet : Écoutez,
c'est deux partis qui existent déjà, là. Donc, vous connaissez Option nationale,
vous savez qu'ils ont, dans leur programme, des possibilités de fusion avec des
partis qui vont s'engager à réaliser l'indépendance dans le prochain mandat. Ce
que j'en comprends... Parce que ce n'est pas encore tout annoncé, là, il y a
une conférence de presse qui est annoncée, mais, moi, ce que j'en comprends,
c'est que ça pourrait n'être qu'une première étape parce qu'Option nationale,
ce qu'ils ont annoncé très clairement dans leur programme, c'est qu'ils
fusionneraient avec un parti seulement et seulement si ce parti-là prenait
l'engagement de réaliser l'indépendance dans le prochain mandat. Donc, je n'ai
pas encore vu ça, nécessairement, dans le programme de Québec solidaire.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
…assemblée constituante ouverte.
Mme Ouellet : Puis une
assemblée constituante qui va mener à l'indépendance, parce que, là, les
ouvertes, les fermées, là, je trouve que c'est un vocabulaire qui est un peu
pour initiés, je vous dirais, là, mais une constituante qui va mener à une
constitution d'un Québec indépendant. Donc, ça, je pense que c'est assez clair.
En tout cas, moi, des discussions qu'il y a eu, d'ailleurs, autour de l'entente
avec le OUI Québec, là, du côté d'Option nationale. Donc, on verra comment les
choses vont se dérouler. De toute façon, ça leur appartient, hein? Ça
appartient aux instances de ces deux partis-là, la suite des choses. Moi, je
vous dirais : L'indépendance, plus on va en parler, que ce soit par les
différents partis politiques, que ce soit par le mouvement citoyen, plus on en
parlera, c'est ça qui va faire la différence, parce qu'on n'en a pas assez
parlé, on n'en a pas suffisamment parlé dans les différentes années, dans les
dernières années. Il ne suffit pas juste de dire : On veut un pays ou de
mentionner le mot «souveraineté» ou le mot «indépendance», il faut que ça
devienne une illustration à tous les jours d'à quel point le Québec recule dans
le cadre canadien. Le Québec ne peut plus avancer dans le cadre canadien, on
recule, décision après décision, et donc tout l'avantage qu'on aura à récupérer
notre 50 milliards et à négocier nos propres traités internationaux, nos
relations internationales. On l'a vu dans le dossier des demandeurs d'asile, on
l'a vu dans la renégociation de l'ALENA, on l'a vu même dans l'entente
Canada-Europe, où on avait promis des compensations pour nos agriculteurs, qui
n'ont pas été livrées, la forêt, je pourrais vous en nommer, là, dossier après
dossier, on le voit, à quel point le Québec ne peut plus se développer à
l'intérieur du cadre canadien. Ça fait que c'est le temps de défaire ces
barrières-là, et de pouvoir s'émanciper, et de faire nos propres relations
internationales, et de récupérer notre 50 milliards.
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Une dernière question en ce qui me concerne. Donc, vous dites qu'on n'en a pas
suffisamment parlé, du projet de pays du Québec. À un an des prochaines
élections générales québécoises, est-ce que vous estimez toujours qu'il serait
possible de réaliser l'indépendance dans un prochain mandat, entre 2018 et
2022?
Mme Ouellet : Écoutez,
cette décision-là ne m'appartient plus. Cette décision-là...
M. Bélair-Cirino (Marco) :
Est-ce que c'est toujours possible, selon vous, là?
Mme Ouellet : Cette
décision-là appartient... Ce n'est pas une question si c'est possible ou pas.
Cette décision-là appartenait, en grande partie... bien, il y a différents
partis politiques, mais aux membres du Parti québécois. Ils ont choisi une
option et, de ce choix-là, ce qui en découle, c'est qu'il y aura une préparation
de l'indépendance de 2018 à 2022 pour la réalisation de l'indépendance en 2022.
Et, moi, très clairement maintenant, tant comme députée à l'Assemblée nationale
que comme chef du Bloc québécois, nous, on va travailler, d'ici 2022, à la réalisation
de l'indépendance du Québec, à la préparation de l'indépendance du Québec. Parce
que, oui, très clairement l'indépendance du Québec va se décider au sein du
gouvernement du Québec, mais la préparation, je crois qu'elle peut se faire et
maintenant avoir... Ayant vécu, là, sept ans ici, à l'Assemblée nationale, je
pense que, même, à Ottawa, les députés sont encore mieux placés pour préparer
l'indépendance du Québec. Pourquoi? Parce qu'ils travaillent tous les jours
avec les pouvoirs fédéraux, ce qui n'est pas le cas ici lorsqu'on est à
l'Assemblée nationale et qu'on travaille sur des projets de loi en commission parlementaire,
au salon bleu; ce sont, de par la Constitution canadienne, toujours des projets
de loi provinciaux. Donc, si on veut travailler à rapatrier l'ensemble de nos
pouvoirs et comment on va les exercer, bien, il faut travailler les pouvoirs
fédéraux parce que tous les pouvoirs qui nous manquent pour être indépendants,
ils ne sont pas à Québec — ceux-là, on les a déjà — ils
sont tous à Ottawa.
Mme Johnson (Maya) :
Good morning, Mme Ouellet.
Mme Ouellet : Good morning.
Mme Johnson
(Maya) : You mentioned that, of course, it's
unusual to wake up to good news, as you put it. What kind of a message do you
think the decision to cancel this project sends specifically as it relates to
Québec's territory?
Mme Ouellet : I think that the first message is : it's a really great, great
victory for all the citizen groups, for all the environmental
groups that worked really a lot to have that decision. We'll see the details,
because I don't have the details for now, but it's a really great, great victory.
And I think that… ils la méritent, cette victoire-là.
Mme Johnson
(Maya) : They deserve that victory.
Mme Ouellet : They deserve this victory because they worked so hard, and they
worked so good, with openness with all the groups and all the municipalities.
They really made a great job. So, I think it's really a… message d'espoir…
Mme Johnson
(Maya) : Message of hope.
Mme Ouellet : ...message of hope for all the citizens that want to be implicated
in the decisions of their State, that they can make a difference. People can
make a difference when they get implicated. So, I think that's the principal
message of that victory.
Mme Johnson
(Maya) : So, you've put a lot of emphasis on
the citizens groups and the environmental groups, but what about political
pressure? How big of a role do you think that played in this?
Mme Ouellet : Of course, all of this adds, with the time… So, the political
parties… I was with the Parti québécois and now with the Bloc québécois, we did
a lot against that project, and of course it made a difference. It made a
difference during the election and made a difference during all the works here,
at the National Assembly, and even at the Parliament. I think that all of these
add… But at the roots, it was really the citizens that really support all that
movement. Thanks.
Mme
Johnson (Maya) : Merci.
(Fin à 8 h 50)