(Treize heures trente-deux minutes)
Mme Lamarre : Bonjour. Alors,
ce matin, l'actualité nous révèle des résistances par rapport au rôle des
infirmières praticiennes spécialisées, ce qu'on appelle les IPS ou les
superinfirmières. Depuis plusieurs années maintenant, je demande qu'on
élargisse le rôle des IPS, surtout qu'on leur donne plus d'autonomie, c'est-à-dire
qu'on leur permette de poser des gestes par elles-mêmes. Et le ministre, qui habituellement
ne se gêne pas pour prendre des décisions, pour imposer des réformes, tout à
coup, devient beaucoup plus souple, refuse, en fait, là, de s'impliquer dans ce
dossier-là.
Moi, je pense qu'il doit absolument le
faire. Pourquoi? Parce qu'il y a un éléphant dans la pièce dans ce dossier-là
entre les infirmières et les médecins dans la répartition de l'autonomie, et c'est
une mesure de rémunération qui a été consentie aux médecins, dans les GMF entre
autres, lorsqu'ils supervisent des infirmières.
Alors, quand, sous le gouvernement libéral,
à l'époque du ministre Bolduc, on a consenti à ce qu'un GMF reçoive 60 000 $
pour accueillir une IPS dans ses murs, 30 000 $ pour le local et
30 000 $ pour la supervision d'une infirmière praticienne spécialisée
qui, rappelons-le, a l'équivalent de cinq années d'université, a donc
l'équivalent d'une maîtrise et d'un diplôme d'études supérieures spécialisées,
quand on a consenti ça, on a créé un biais. On a créé une résistance qui
s'explique par ce mode de rémunération là et cette valorisation-là, donc,
d'avoir une supervision sur une IPS. Alors, c'est certain que le dossier peut
difficilement se régler spontanément parce qu'il y a vraiment un enjeu de
rémunération qui est omniprésent dans ce dossier-là.
Moi, je pense qu'on est vraiment rendus au
Québec à permettre aux IPS... le ministre actuel a fait beaucoup de choses
depuis qu'il a été élu, mais pas ce qu'il avait dit qu'il ferait. Alors, il
avait dit deux choses en campagne électorale. Il avait dit qu'il garantissait 2 000
IPS en 10 ans et qu'il y aurait des supercliniques. C'est les deux seuls engagements
publics qu'il avait pris par rapport au système de santé. Or, celui des
2 000 IPS en 10 ans, eh bien, il ne prend pas les moyens pour que ça se
concrétise. Il y a quelques postes à peine, une dizaine de postes qui
s'ajoutent à chaque année. Donc, il faut qu'il finance les universités pour
permettre, donc, qu'il y ait un plus grand nombre, vraiment massif, là. En
Ontario, on en a 2 300; au Québec, on en a à peu près 350. Alors, on doit
faire ce rattrapage-là.
Et quand on dit : On a de la
difficulté avec nos urgences, on a de la difficulté avec nos premières lignes,
on a de la difficulté avec le guichet d'accès où les gens ont tous mis leur nom
et on a des centaines de milliers de personnes qui attendent, bien, une des
solutions concrètes, réalistes, et ce n'est pas compliqué, là, ce sont les IPS,
et ça, le ministre, tout à coup, se voit dans une situation, là, où il ne veut
pas intervenir, il n'est pas sûr. Alors, vraiment, on se demande qu'est-ce qui
l'inquiète, qu'est-ce qui l'effraie tant dans ce dossier-là.
En ce qui concerne l'enjeu de la
compétence, je vous dirais que la compétence, vous savez, ça se définit par
plusieurs choses, mais ça se définit par des connaissances, ça se définit par
de l'expérience, c'est-à-dire qu'il faut poser des gestes. Et ce n'est pas vrai
que parce qu'on est médecin... je vais vous dire, si on a un gynécologue, il
n'est certainement pas très bon pour diagnostiquer des otites, O.K.? Alors, il
y a une partie qui est l'exposition fréquente à une situation clinique avec la
connaissance.
Et le troisième élément, donc
connaissance, expérience et connaissance de ses limites. Et, dans une formation
comme celle que les IPS reçoivent, comme celle d'ailleurs que beaucoup d'autres
professionnels reçoivent, que ça soit les physiothérapeutes, les psychologues,
les pharmaciens, il y a cette connaissance des limites. On l'a vu avec la
clinique SABSA qui a traité 95 % des situations qui se sont présentées à
elle, et, dans 5 % des cas, les infirmières ont dit : Non, ça, ça
dépasse mes limites, je réfère à un médecin.
Alors, il faut élargir l'accès, il faut
permettre un accès beaucoup plus vaste et après faire en sorte que
progressivement, selon la complexité de la situation, eh bien, pour les
patients, on aille finalement voir le médecin au bon moment, mais commençons
par libérer les IPS.
M. Vigneault (Nicolas) :
Qu'est-ce que le ministre aurait dû faire dans le contexte actuel? Vous parlez
de cette lettre, c'est ce que vous qualifiez, j'imagine, de geste peut-être un
peu plus souple de la part du ministre, lui qui est ferme habituellement.
Qu'est-ce que vous auriez fait, par exemple?
Mme Lamarre : Bien, moi, je
pense que le ministre, il doit absolument permettre... il doit s'immiscer dans
cette négociation-là et il doit trancher. Il doit trancher. S'il prend la part
des patients, c'est la part des patients qu'il doit prendre. Il n'a pas à
prendre la part ni des infirmières ni des médecins. Il doit parler au nom des
patients et, s'il prend la part des patients, eh bien, il doit définitivement
trancher en faveur d'une ouverture et d'une plus grande autonomie au niveau des
IPS. Maintenant...
M. Vigneault (Nicolas) : Mais
trancher de quelle façon, là? Parce que quand même, il y a des leviers, il y a
des mécanismes qui existent, il y a des diagnostics qui sont établis, qui sont
réservés aux médecins au Québec. De quelle façon il peut trancher dans le
contexte actuel?
Mme Lamarre : Bien, il peut
baliser, là. Il y a les impressions diagnostiques qui ont été confirmées.
Alors, il y a des diagnostics : hypertension, diabète, cholestérol et
suivi de maladies respiratoires. Je pense qu'il y a vraiment des contextes
cliniques où les infirmières praticiennes spécialisées de première ligne, là,
elles sont formées. Elles ont vraiment des connaissances, des compétences, de
l'expérience et elles connaissent leurs limites.
Alors, moi, je crois que clairement, il
doit offrir des ouvertures à ce niveau-là. Maintenant, les conditions mineures,
les... on parlait d'otites, on parle de zona, on parle de plein de conditions
qui sont des conditions assez urgentes, mais mineures, et là pourquoi on ne
permettrait pas aux IPS de vraiment agir de façon autonome?
Et moi, je les placerais... Et moi,
j'ouvrirais des places dans les CLSC et dans les CHSLD. Actuellement, les CSLC,
le ministre, on le voit bien, il tend à vouloir les fermer, là. Il les vide
littéralement de toutes les ressources professionnelles, il transfère des
travailleurs sociaux, transfère des psychologues. Alors, ces CLSC, ils viennent
offrir une répartition, donc, des points de service qui élargissent ceux qui
sont prévus par les GMF et qui couvrent beaucoup mieux l'ensemble du territoire
du Québec.
Alors, il y a des besoins, et les
infirmières praticiennes spécialisées peuvent très bien se retrouver en CLSC.
Elles peuvent aussi se retrouver en CHSLD. Le projet de loi n° 20 a fait
en sorte que les médecins qui travaillaient dans les CHSLD, souvent, étaient à
vacation, étaient dans des contextes de rémunération particuliers et là ils ne
se reconnaissent pas du tout dans le modèle du projet de loi n° 20 du ministre.
Ils ne savent pas où est-ce qu'ils se retrouvent.
Alors, il y a un exode actuellement des
médecins en CHSLD, déjà qu'il en manquait, déjà qu'on en a beaucoup qui étaient
des médecins en fin de carrière qui prenaient leur retraite. Les IPS incarnent vraiment
des professionnels qui peuvent agir très, très bien. Alors, s'il lui faut faire
un projet de loi, qu'il fasse un projet de loi. S'il faut qu'il règle ça...
Mais il y a des moyens... Donc, certainement, qu'il impose, qu'il impose
l'autonomie aux... qu'il reconnaisse l'autonomie des infirmières praticiennes
spécialisées dans certains diagnostics. On ne parle pas de tous les
diagnostics, mais dans certaines conditions qui sont très fréquentes, soit des
conditions urgentes mineures ou des conditions chroniques où les infirmières peuvent
intervenir, qu'il augmente le financement des facultés d'éducation supérieure
et qu'il fasse en sorte de garantir des postes à ces femmes et à ces hommes qui
font cette formation, que ce soit dans les CLSC, dans les CHSLD.
Actuellement, dans Lanaudière, il y avait
une clinique où on attendait une IPS, et finalement ça a été tellement coupé
partout sur le territoire que l'IPS n'a pas été reconnue à cet endroit-là. C'est
un désert actuellement en termes d'offre de services de santé. Et ce qui se
produit, c'est que des cliniques privées vont engager ces infirmières
patriciennes spécialisées et les patients vont être obligés de payer 60 $
pour avoir une consultation.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
que vous êtes... Bonjour.
Mme Lamarre : Bonjour.
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
que vous êtes prête à ce qu'on reconnaisse légalement le recours aux mères
porteuses?
Mme Lamarre : Le recours...
M. Chouinard (Tommy) : Aux
mères porteuses. Les mères porteuses.
Mme Lamarre : Ce n'est pas le
sujet de...
M. Chouinard (Tommy) : Non,
non, non. Je comprends bien, mais ça fait partie des sujets qui quand même
concernent le monde de la santé en particulier.
Mme Lamarre : À ce moment-ci,
je n'ai pas de position. En fait, je ne comprends pas bien votre question
précise.
M. Chouinard (Tommy) : La ministre
Stéphanie Vallée a dit qu'elle était prête à reconnaître légalement le recours
aux mères porteuses. Bon, on est au début d'une définition de grandes
orientations pour en arriver à un projet de loi sur le sujet. Évidemment, il y
aurait balises et etc.
Mme Lamarre : Il faut des
balises. C'est ça. Moi, je pense que jusqu'à maintenant, ce qu'on a dit au Parti
québécois, c'est que c'est un dossier qui méritait d'être balisé parce qu'il y
a vraiment... on arrive dans de nouvelles façons de faire. On sait que ça
existe, par contre. Alors, je pense qu'il faut vraiment les baliser, et on
contribuera certainement à l'étude d'un projet de loi dans ce dossier-là.
M. Chouinard (Tommy) : O.K. Aviez-vous
consulté le rapport du comité Roy sur le sujet ou l'avis du Conseil du statut
de la femme, peut-être?
Mme Lamarre : Pas récemment,
non.
La Modératrice
: Merci.
(Fin à 13 h 42)