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Point de presse de Mme Françoise David, députée de Gouin, et M. Amir Khadir, député de Mercier

Version finale

Monday, February 8, 2016, 14 h 30

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Quatorze heures trente-quatre minutes)

Mme David (Gouin) : Bonjour. Alors, on est aujourd'hui en caucus présessionnel. Chacun et chacune sait que la session commence demain. On veut donc, avec le président du parti, Andrés Fontecilla, et mes collègues députés, vous présenter les priorités de Québec solidaire pour cet hiver et ce printemps 2016.

D'abord, évidemment, vous ne serez pas surpris, on va continuer de dénoncer les coupes libérales. M. Couillard nous avait dit : Les récifs sont derrière nous, le bateau ne tangue plus, on s'en va vers un port accueillant. Mais qu'est-ce que M. Couillard est en train de faire? Il continue de couper dans les services publics. La toute dernière annonce : 40 millions de moins pour l'entretien des bâtiments scolaires qui sont dans un état lamentable, particulièrement à Montréal. Ça s'ajoute aux compressions dans les centres à la petite enfance.

Et je vous rappelle que les parents, eux, n'auront pas de compressions, c'est bien le contraire. 170 millions que le gouvernement s'en va chercher chez les parents au moment de la déclaration d'impôt. Le gouvernement veut aussi couper les chèques d'aide sociale, et, dans la santé, nous savons que beaucoup de coupes font très mal et atteignent des personnes très vulnérables. Alors, pour ce qui est de la compassion, on repassera.

Au prochain budget, évidemment, on jettera un oeil très attentif sur ce qui va se passer, mais on a tout de suite une question à poser au premier ministre. Il nous dit qu'il va réinvestir dans les services publics au prochain budget. Qui va décider de ça? Est-ce que le premier ministre va décider seul ou avec un tout petit groupe de privilégiés de la manière de réinvestir dans les services publics, de l'endroit où il va réinvestir, des baisses d'impôt possibles, c'est une hypothèse, qu'il va vouloir proposer? Nous pensons, nous, que nous devons avoir un véritable débat démocratique sur l'utilisation des surplus budgétaires et nous souhaitons qu'il y ait une consultation large pour y arriver.

Nous aurons aussi un oeil très attentif sur l'économie. Nous savons que nous venons de perdre une entreprise québécoise, elle passe aux mains d'intérêts américains, ça a été abondamment commenté la semaine dernière. Est-ce que le premier ministre, qui semble complètement indifférent à cette situation, entend continuer en ce sens? Est-ce qu'on s'inquiète des emplois au Québec? Est-ce qu'on s'inquiète de la diversification de l'économie? Il semble que non. Est-ce qu'on s'inquiète de nos PME, de nos commerces de proximité, de l'économie sociale? Il semble que non.

Alors, Québec solidaire, les députés et le parti vont continuer de s'intéresser de près au développement de l'économie québécoise. Vous savez qu'on est en tournée régionale, et donc nous pourrons, dans les prochains mois, les prochaines années, avant la prochaine élection générale, avoir un plan détaillé avec une vision économique pour l'ensemble du Québec. La question ici est de se demander : Est-ce que le Québec pourra se donner une véritable souveraineté économique ou si nous allons laisser aller toutes nos décisions entre les mains d'intérêts étrangers? Sur le fond des choses, c'est ça, la question.

Alors, je passe la parole au président du parti, Andrés Fontecilla. C'est important pour nous, au moment d'entreprendre une session, que notre président soit avec nous. Nous sommes un parti peut-être différent des autres. Le parti, les députés travaillent main dans la main, ensemble, se donnent des priorités communes avec des moyens d'action qui peuvent être différents. C'est donc très important pour nous qu'Andrés Fontecilla soit ici, et je lui laisse la parole.

M. Fontecilla (Andrés) : Merci, Françoise. Bonjour, mesdames messieurs. Les nouvelles du côté du parti Québec solidaire, qui dépasse largement l'aile parlementaire composée de Manon Massé, Françoise David et Amir Khadir... et cette année nous avons quand même d'importants projets. Vous avez sans doute entendu parler, la semaine dernière, d'un point de vue du calendrier, c'était notre 10e anniversaire. 10 ans d'un parti de gauche, véritablement de gauche, au Québec, au Canada et en Amérique du Nord, c'est véritablement un exploit, et nous sentons la nécessité de le souligner en grand.

Donc, je vous annonce que le 28 mai prochain, à l'occasion de notre congrès d'orientation, nous allons organiser un très important événement pour souligner le 10e anniversaire de Québec solidaire. Ce sera un moment non seulement pour jeter un regard sur les 10 ans de vie de Québec solidaire, sur nos réalisations, des fois nos exploits, aussi sur ce qui a moins bien marché, mais ça va être surtout un moment pour se projeter dans l'avenir et démontrer la pertinence de Québec solidaire au Québec, montrer que Québec solidaire a une relève, et la relève progressiste est importante à Québec solidaire, et qu'elle représente la relève du Québec tout court, et mettre de l'avant surtout le fait que les politiques de gauche, les investissements publics constituent certainement une avancée pour les sociétés telles que le Québec, contrairement aux idées de droite telles que portées par le Parti libéral qui considère que la privatisation est un facteur de progrès social, ce qui est tout à fait faux.

Québec solidaire est un parti d'avenir. Nous faisons partie d'un grand mouvement international qui fait des avancées en ce moment. Vous n'avez qu'à voir ici, chez nos voisins, les plus grands capitalistes au monde entier, Bernie Sanders qui fait une compétition féroce à Mme Hillary Clinton. C'est ça, l'avancée de la gauche chez nos voisins les États-Unis; en Angleterre, M. Corbyn, qui a gagné la direction du Parti travailliste; ou encore les succès électoraux du jeune parti Podemos en Espagne ou ailleurs en Europe. Tout cela démontre que la gauche a un long avenir. La vision de justice sociale portée par la mouvance de gauche et progressiste à travers le monde est importante.

Nous, ce que nous apportons, à Québec solidaire, c'est des aspects originaux. Nous arrivons à faire la synthèse entre une vision écologiste, une vision féministe, une vision de progrès social et altermondialiste de solidarité entre les peuples, avec une vision de justice sociale et nous pensons que nous réussissons fort bien. Donc, voilà, vous êtes tous et toutes invités, le 28 mai prochain, à notre commémoration pour notre 10e anniversaire.

Dans un autre domaine, Québec solidaire va continuer à approfondir, à labourer le terrain de la souveraineté. En ce moment, nous entreprenons un processus qui va commencer à l'hiver, et va continuer au printemps, et va s'achever au congrès du mois de mai, un processus pour, d'une part, approfondir notre idée fondamentale d'accession à la souveraineté, qui est notre stratégie, notre proposition pour les Québécois et Québécoises, c'est-à-dire l'assemblée constituante. Nous allons préciser certains aspects qui nous paraissent importants et surtout et aussi nous allons voir à la meilleure façon de diffuser, de convaincre nos concitoyennes, nos concitoyens du bien-fondé de passer par une assemblée constituante pour arriver à la souveraineté du Québec. Ça va bien aller.

Nous sommes ainsi très, très satisfaits de l'avancée de l'assemblée constituante dans la société québécoise. De plus en plus, différents mouvements sociaux adoptent l'idée de l'assemblée constituante. Vous allez voir, les Organisations unies pour l'indépendance, le OUI Québec, en fait une promotion. Il y a un groupe de citoyens et citoyennes qui s'est formé en regroupement pour pousser l'idée d'une assemblée constituante. Et nous avons vu dernièrement, il y a une ou deux semaines, l'adoption par Option nationale, lors de leur congrès, l'adoption formelle de l'idée de l'assemblée constituante, donc une idée apportée il y a 10 ans par Québec solidaire, une idée éminemment démocratique, qui est en mesure de susciter de larges majorités, est en train de devenir peut-être hégémonique dans la scène politique québécoise.

Donc, tout au long de l'hiver et du printemps, nous allons travailler activement à améliorer cette formule-là pour la proposer à l'électorat du Québec. Merci.

La Modératrice : Merci. Pour la période des questions, on va faire micro de gauche, micro de droite. S'il vous plaît, vous présenter et une question et une sous-question, s'il vous plaît.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Oui, bonjour. Marco Bélair-Cirino du Devoir. Mme David, en tout début d'allocution, vous avez mentionné... en fait, vous dites souhaiter un véritable débat démocratique sur l'utilisation du surplus budgétaire. Qu'est-ce que vous entendez? Qu'est-ce que vous souhaitez? Une commission Robillard 2?

Mme David (Gouin) : On ne dépensera pas des millions de dollars qui, de toute façon, ne servent à rien en bout de ligne, là. Il y a un budget à la mi-mars à peu près. On sait qu'auparavant il y a toujours des consultations prébudgétaires discrètes, quasi secrètes et réservées à quelques initiés et privilégiés. Nous venons d'ailleurs de demander d'être entendus, parce qu'évidemment personne ne nous l'avait proposé, et nous rencontrerons M. Leitão le 24 février. Il faudrait que ce genre de consultation soit large, et moi, j'apprécierais, nous apprécierions qu'elle soit publique. Ça veut dire qu'au terme d'une discussion on peut rendre public ce qui s'est dit, la réaction du ministre des Finances et tout. Il faut qu'il y ait des processus plus ouverts, plus transparents, plus démocratiques, sinon, bien, ça va être le même rituel de secret et d'opacité, là, qui entoure le budget jusqu'au jour J, et là, bien, il faut vivre avec les conséquences de ce budget-là.

Donc, c'est tellement important. Le gouvernement se tue à nous dire que maintenant ça va bien aller. O.K., ça va bien aller, on fait quoi des surplus? Là, ce qu'il est en train de faire, c'est, avec 170 millions qu'il s'en va chercher dans les poches des parents, là, il va y avoir 170 millions d'argent neuf au mois de mai, une taxe famille, le gouvernement coupe 120 millions dans les CPE. Est-ce que c'est ça, les... ce sont les vallées verdoyantes de M. Couillard ou c'est le port de M. Couillard? Alors, c'est non, là. Pour la population québécoise, c'est non, et pour nous, c'est non.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Est-ce que vous lui demandez de défaire ce qu'il a fait au cours des derniers mois pour atteindre l'équilibre budgétaire? Vous faites mention de la taxe famille de 170 millions de dollars. Est-ce qu'il doit abolir la modulation des tarifs de garde? Est-ce qu'il y a d'autres mesures comme ça, qui lui ont permis d'obtenir des revenus importants, qu'il doit abolir?

Mme David (Gouin) : Vous savez, il y a ce qui est souhaitable et ce qui est possible. Ce qui serait souhaitable, ça serait qu'il n'y ait pas d'ère Couillard, qu'il n'y ait pas toutes ces coupes sauvages dans les services publics, qu'il n'y ait pas d'augmentation de taxe. Bon. Il faudrait, oui, défaire tout ça, dans le meilleur des mondes, et ça, ça se fera quand il y aura un gouvernement solidaire.

Entre-temps, il y a des choses à faire ici et maintenant. Pourquoi couper 40 millions dans l'entretien des bâtiments scolaires, entre autres à Montréal, déjà 20 millions à Montréal? C'est lamentable, là. Ce sont nos enfants et leurs enseignants qui vivent dans ces écoles-là. Ça n'a aucun sens. Pourquoi couper 120 millions dans les centres à la petite enfance, alors qu'on sait que les parents vont fournir 170 millions additionnels? C'est insensé et c'est injuste. Alors, minimalement, là, il faut que M. Couillard, il arrête de couper partout. Ça, c'est un strict minimum, puis ensuite, débat démocratique, réinvestissement dans les services publics. C'est ça qu'on attend du gouvernement actuel et puis après on changera de gouvernement.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Véronique Hivon, la députée de Joliette, a été nommée, il y a quelques mois déjà, par son chef Pierre Karl Péladeau, de responsable de la convergence des forces indépendantistes. Comment va le projet de convergence des forces indépendantistes?

M. Fontecilla (Andrés) : En fait, je pense que, tout d'abord, le Parti québécois a besoin de définir un certain nombre d'aspects dans son positionnement, par exemple, par rapport aux paradis fiscaux et avant de même pouvoir envisager un processus de dialogue de convergence. Première approche, c'est-à-dire, si le Parti québécois est d'accord avec les paradis fiscaux, on est loin d'une possibilité de convergence avec un parti de gauche tel que Québec solidaire, qui soutient que les compagnies privées doivent payer tous leurs impôts et davantage d'impôts parce qu'elles ne contribuent pas assez en ce moment, d'une part.

D'autre part, pour nous, ce qui est certain, c'est que Québec solidaire n'a pas en ce moment le mandat d'entreprendre un quelconque dialogue formel, une convergence formelle et une négociation de n'importe quel type avec un autre parti politique souverainiste. Par contre, nous entretenons toujours un dialogue très fécond avec les organisations civiles et non partisanes du... et souverainistes et progressistes, évidemment : par exemple, les Organisations unies pour l'indépendance, le Nouveau mouvement pour le Québec , Les Intellectuels pour la souveraineté, bref, une panoplie d'organisations sociales qui portent très fortement et de façon non partisane la question de la nécessité d'aboutir à l'indépendance. Et je pense que c'est par là qu'en ce moment il y a de véritables perspectives de dialogue parce que, malheureusement, d'un point de vue des grandes idées, il y a des divergences importantes entre les partis souverainistes, et, d'autre part, plus profondément, notre encadrement légal, notre système électoral défavorise grandement, en fait, impossibilite presque tout rapprochement ou toute négociation entre les partis souverainistes parce que, pour plusieurs, surtout pour les petits partis, n'importe quelle éventualité de négociation, ça implique la disparition d'un certain nombre de partis. Et, dans ce contexte-là, c'est très difficile d'entamer un processus de convergence. Donc, les obstacles sont nombreux. Nous plaçons nos oeufs dans le panier de la société civile pour entamer ce dialogue-là.

M. Robillard (Alexandre) : Mais, M. Fontecilla… Donc, Alexandre Robillard de LaPresse canadienne. Bonjour. Est-ce que les partis souverainistes doivent être d'accord sur tout pour converger?

M. Fontecilla (Andrés) : Non, pas du tout, pas du tout, mais nous devons être d'accord sur un certain nombre de grands sujets, et, pour l'instant, ce n'est pas le cas. Nous, nous avons été… à plusieurs reprises, nous nous sommes assis publiquement avec Mme Véronique Hivon. Amir a été au Saguenay il y a quelques semaines dans le cadre d'une conférence de OUI Québec. Moi-même, j'étais assis avec Mme Hivon dans le cadre d'une conférence des Intellectuels pour la souveraineté. Nous avons échangé abondamment et nous sommes obligés d'arriver au constat qu'il y a quand même des divergences des deux côtés. Oui, madame… nous ne doutons nullement de la volonté de Mme Véronique Hivon d'entamer un dialogue, de mettre des choses sur la table, sauf qu'objectivement les deux partis doivent faire un processus pour définir un certain nombre de thématiques, et nous n'en sommes pas là. On n'est pas obligés de s'entendre sur tout, sinon on serait dans le même parti, et évidemment nous ne sommes pas dans le même parti.

M. Robillard (Alexandre) : Qu'est-ce que vous pensez de l'institut de recherche appliquée sur la souveraineté, le projet du Parti québécois?

M. Fontecilla (Andrés) : En soi, avoir un institut de recherche pour avancer des propositions sur l'indépendance ou les bienfaits de l'indépendance, c'est une bonne idée, mais maintenant on doit, dans le contexte actuel, on doit se poser la question : Tel qu'avancé, ce projet est un projet qui appartient au mouvement souverainiste dans son ensemble, au Parti québécois spécifiquement ou encore à Pierre Karl Péladeau qui est son principal bailleur de fonds? À qui va appartenir ce mouvement… cet institut sur l'indépendance? Nous, ce qu'on dit, c'est qu'un institut pour l'indépendance qui appartient à l'ensemble du mouvement souverainiste, qui fait des recherches non partisanes, c'est le bienvenu…

M. Robillard (Alexandre) : Vous seriez prêts à le financer?

M. Fontecilla (Andrés) : En fait, il y a tout un questionnement sur l'aspect légal, etc. Et moi, je pense qu'au-delà... parce qu'il y a les partis politiques, mais il y a le mouvement souverainiste dans son ensemble, et je préfère a priori que ça appartienne au mouvement souverainiste dans son ensemble et non seulement aux partis politiques, là, qui sont là pour rivaliser en quelque sorte. Donc, le contrôle étant le plus démocratique possible, c'est mieux.

M. Robillard (Alexandre) : On lisait aujourd'hui que près de la moitié des électeurs de Québec solidaire voteraient non au référendum. Comment vous réagissez à ça? Est-ce que ça veut dire que votre message ou pas? Est-ce que ça veut dire que vous avez beaucoup de travail à faire?

M. Fontecilla (Andrés) : Bien, c'est que les électeurs et électrices de Québec solidaire ne sont pas différents du reste des électeurs et électrices du Québec, là. Nous avons un travail en tant que mouvement souverainiste, un travail à faire auprès de l'ensemble de l'électorat parce qu'il y a beaucoup de gens, beaucoup de personnes de l'électorat qui ont perdu confiance dans la possibilité d'arriver un jour à la souveraineté. Et même des gens qui ont déjà été souverainistes, aujourd'hui vous leur posez la question, et ils manquent d'information, ils manquent de bonnes raisons pour voter pour la souveraineté. Et ce n'est pas un problème qui appartient seulement à Québec solidaire, c'est un problème qui appartient à l'ensemble des partis politiques souverainistes et à l'ensemble du mouvement souverainiste, là, qui doit fournir les bonnes raisons...

M. Robillard (Alexandre) : Et est-ce que vous devez en parler plus, par exemple? Est-ce que c'est la preuve que vous devez en parler plus?

M. Fontecilla (Andrés) : Nous devons en parler plus, c'est une évidence, et nous devons articuler l'ensemble des éléments de notre discours général à la question de la souveraineté parce qu'il y a toutes sortes de... il y a plusieurs aspects où la souveraineté est la solution pour des problèmes politiques vécus actuellement au Québec.

Journaliste : Bonjour à tous. Vous avez dit tout à l'heure, je crois que c'est vous, M. Fontecilla, que vous n'aviez pas de mandat formel, de toute façon vous l'avez tous déjà dit, pour discuter avec les autres partis de la convergence des forces souverainistes. Est-ce que, lors de votre congrès d'orientation, vous avez l'intention de discuter d'un mandat formel et d'ouvrir cette question au plancher?

M. Fontecilla (Andrés) : C'est des questions qui circulent en ce moment dans les partis, et on est en train de... les militants et militantes, les membres sont en train de discuter ces éléments-là. Il est possible qu'il y ait des initiatives dans un sens comme dans l'autre, il n'y a rien de formalisé pour l'instant. Mais ce qu'il est important de savoir, c'est qu'à Québec solidaire c'est un débat, c'est un débat quotidien dans nos instances, là, sur la question de, oui, il est pertinent d'entamer une convergence, non, il n'est pas pertinent pour telle et telle raison qui est... Donc, c'est un débat permanent, et nous ne sommes pas arrivés à des conclusions encore, là, mais c'est un sujet qui est discuté.

Journaliste : Et qui risque donc d'être débattu lors de votre congrès d'orientation.

M. Fontecilla (Andrés) : Ce qui est certain, les thèmes de notre congrès d'orientation sont déjà décidés. Nous allons discuter sur certains aspects de la constituante et comment mieux la faire connaître. Mais la vie ne finit pas au congrès du printemps prochain, et il va y avoir d'autres événements nationaux. Et tous les partis sont un peu dans la même situation, hein? Il n'y a aucun parti qui peut décider très rapidement sur un sujet d'une aussi grande importance. On doit se donner collectivement le temps, là, de prévoir les débats, qu'ils se fassent de façon ordonnée à l'intérieur de nos instances.

Journaliste : J'aimerais vous entendre... Je ne crois pas, à moins que je me trompe, qu'on vous ait entendu sur la question du revenu minimum garanti depuis que M. Couillard a ouvert cette question-là et laissé clairement entendre que c'était un dossier qui l'intéressait et qu'il allait même mandater M. Blais sur la question. Qu'est-ce que vous en pensez? Est-ce que c'est crédible? Est-ce que c'est faisable de la part d'un gouvernement libéral?

Mme David (Gouin) : La vraie réponse, honnête, là, pour un revenu minimum garanti digne de ce nom, la vraie réponse, c'est non. Un gouvernement libéral n'instaurera pas un revenu minimum garanti parce qu'il trouverait... en fait, ce gouvernement, pour réussir à le faire, devrait se résoudre à aller vraiment chercher de l'argent dans les poches des plus riches, des minières, des banques et autres institutions financières, ce qu'il ne veut absolument pas faire. Donc, je doute énormément de la capacité du gouvernement libéral de mettre en oeuvre un véritable revenu minimum garanti qui permette vraiment aux gens pas juste de survivre, mais de vivre.

Ceci étant dit, que le gouvernement veuille ouvrir ce débat est une bonne chose. À Québec solidaire, nous portons cette proposition depuis plusieurs années. Nous en faisons l'une des solutions à la pauvreté grandissante au Québec, particulièrement des personnes les plus pauvres, des personnes à l'aide sociale, des travailleuses et travailleurs à statut précaire, au salaire minimum. Oui, il y a quelque chose à regarder là, mais les obstacles sont nombreux. Il faut soupeser le pour et le contre de l'ensemble des mesures. Ça n'est pas quelque chose qu'on fait, comme on dit, sur un dix cents. Donc, ouvrons le débat, c'est parfait, mais entre-temps, si on veut être sérieux, on renonce aux coupes à l'aide sociale parce que sinon ça n'est pas sérieux du tout.

M. Khadir : En fait, un gouvernement de Québec solidaire instaurerait un véritable revenu minimum garanti qui ne se fasse pas sur le dos de services publics universels. Ce ne doit pas être un exercice, comme l'envisagent plusieurs personnes qui, à droite de l'échiquier politique, le proposent, pour, dans le fond, se débarrasser de tout le reste des services publics, des services universels auxquels une société moderne, démocratiquement avancée et économiquement avancée, a droit.

Journaliste : Vos craintes étant?

M. Khadir : Nos craintes étant que le revenu minimum garanti de M. Blais et du gouvernement Couillard soit cette deuxième version où on le fait, dans le fond, sur le dos des services publics.

M. Croteau (Martin) : Bonjour. Martin Croteau de LaPresse. J'ai une dernière question à vous... une dernière précision à vous demander sur le rapprochement avec le PQ, là. Qu'est-ce qui fait davantage obstacle à la convergence? Est-ce que ce sont des divergences de points de vue entre les partis ou si c'est la présence de M. Péladeau lui-même?

M. Khadir : C'est sûr que, si le Parti québécois devait prendre des décisions pour favoriser la convergence des différents partis politiques... Quand on dit convergence, ça peut être différentes choses, là. Ça peut être des pactes électoraux, ça peut être juste de la collaboration sur le plan politique pour certains grands sujets comme il s'en fait ailleurs sur certains grands enjeux de société. C'est sûr que le meilleur choix dans un congrès à la chefferie, ce n'était pas M. Péladeau, hein? On s'entend là-dessus.

Ceci étant dit, les choix de direction du PQ appartiennent aux membres du PQ. Au fond, ce qui nous intéresse, c'est les grandes orientations, les grandes décisions que prend ce parti-là, dans lesquelles les partisans et les membres de Québec solidaire ne voient pas, au cours des dernières années, une volonté réelle de remettre en question un certain nombre de dogmes comme le déficit zéro. On voit encore, vous allez voir encore, là, répéter... d'une part, le Parti québécois critique les choix budgétaires du gouvernement libéral, puis de l'autre côté, dès qu'il y a la perspective d'un déséquilibre budgétaire, c'est le premier à sauter dans l'arène pour le critiquer de ne pas assurer l'équilibre budgétaire, comme une religion qui s'est imposée au PQ depuis 1998 avec M. Bouchard. Donc, une remise en question de ça, une remise en question sincère et sans ambages, là, sans gêne de l'échec et de l'erreur qu'a constituée la charte des valeurs de M. Drainville.

Malheureusement, avec l'équipe qui dirige actuellement le PQ, c'est autant d'éléments qui représentent des difficultés majeures. Et j'en ai discuté avec Mme Hivon à l'occasion de cette rencontre qu'il y a eu au Saguenay puis je pense que ce n'est un secret pour personne, c'est sûr donc que, dans le contexte actuel, les derniers choix du PQ, que ce soit lorsqu'ils ont assuré le gouvernement, ils ont instauré une politique d'austérité qui a été continuée par les libéraux de M. Couillard, où ils ont fléchi devant le lobby des milieux d'affaires en ayant plus de compassion pour l'anxiété des riches que pour les assistés sociaux, hein, avec toutes les promesses qui ont été brisées. Et ensuite le choix de leur leadership, le choix du leader même au Parlement, pas seulement du chef, mais de monsieur... tout ça entraîne des complications non seulement pour nous, mais pour l'ensemble du mouvement souverainiste.

M. Croteau (Martin) : Donc, ce n'est pas seulement M. Péladeau, là. On s'entend qu'il y a beaucoup plus que ça.

M. Khadir : C'est le PQ. C'est des choix, c'est des orientations.

M. Croteau (Martin) : O.K. Je posais la question parce que la première chose que M. Fontecilla a dit lorsqu'il a été questionné là-dessus, c'étaient les paradis fiscaux. Donc, c'était une allusion claire à la situation de M. Péladeau.

M. Khadir : Oui. Bien, c'est sur le fond. Bien oui. Ce n'est pas M. Péladeau en personne, c'est les paradis fiscaux. M. Péladeau a eu des pratiques fort questionnables; ça, c'est clair. Je veux dire, ça, on pourra en discuter, je n'achète aucune de ses explications. Ses compagnies, lors de sa direction, ont voulu éviter de payer de l'impôt au Québec, ont créé des sociétés-écran au Delaware et ailleurs pour échapper à l'impôt, à l'impôt que moi et vous, nous nous faisons un devoir et un honneur de payer. D'accord? Donc, comme loyauté à la nation du Québec, il y a un grand problème là. C'est un grand problème de déloyauté aux intérêts de la nation du Québec.

Mais, ceci étant dit, c'est une question personnelle. On jugera M. Péladeau là-dessus individuellement, mais le PQ a bien d'autres choses à se reprocher. Sa religion de l'austérité, c'est le PQ. C'est l'opposition sociale-démocrate, lorsqu'il a appliqué avec autant de rigueur les politiques d'austérité, qui fait en sorte que les libéraux maintenant peuvent aller aussi loin, parce qu'ils ont banalisé les coupures budgétaires, ils ont banalisé le saccage de nos services publics, ce qui autorise maintenant aux libéraux d'aller aussi loin qu'ils le font.

M. Croteau (Martin) : J'ai une question sur un autre sujet, si vous permettez. M. Fontecilla, vous y avez fait allusion dans votre introduction, c'est la primaire au New Hampshire cette semaine. Qu'est-ce que vous retenez du succès de Bernie Sanders dans la campagne des primaires américaines et quelle leçon ça apporte pour votre parti?

M. Fontecilla (Andrés) : Ce que je retiens, ce que nous retenons, l'ensemble des gauchistes de Québec solidaire et ailleurs, là, c'est que l'électorat américain, le peuple américain a soif d'une alternative progressiste, d'une véritable alternative progressiste, d'un discours qui vient désigner les vraies responsabilités des difficultés socioéconomiques des millions d'États-Uniens, et ça vient nous informer de la nécessité d'avoir ce discours-là dans un échiquier politique, que ce soit au Québec, que ce soit aux États-Unis ou un peu partout à travers le monde, et ça vient, en quelque sorte, nous dire que maintenant le paradis du capitalisme, dans le ventre de la bête, il y a de la place pour ce discours-là et ce discours porte. Il y a des millions de personnes qui tendent l'oreille, qui sont attentives et qui veulent entendre parler de justice sociale et qui veulent voir les profiteurs du système dénoncés.

M. Croteau (Martin) : Et est-ce qu'il y a, dans la manière dont il a fait campagne, des leçons pour vous ici, au Québec? Est-ce que c'est quelque chose que vous souhaitez transposer ici? De quelle manière est-ce que la...

M. Khadir : On n'a pas les mêmes moyens, hein? On parle d'un parti démocrate qui a des millions de dollars, puis c'est sûr que les succès actuels de M. Sanders sont du fait qu'à partir du moment où il s'est présenté comme candidat du Parti démocrate il a, par définition, dû jouir d'une couverture médiatique adéquate, et là les gens en ont entendu parler. Plus ils en ont entendu parler, plus ils ont aimé et plus ils se sont sentis interpellés par ce bonhomme sincère qui n'a pas peur de prononcer le mot «socialisme», qui n'a pas peur de prononcer le mot... qu'il faut mettre fin aux privilèges des plus riches, que les lobbys n'ont pas leur place dans les prises de décisions politiques, que ça suffit, en démocratie, ça doit être les gens qui doivent être... les hommes et les femmes de la rue qui doivent être représentés, et c'est ça qui porte. Puis, à partir de ce moment-là, c'est sûr que l'argent, le soutien financier et surtout la couverture publique, hein, le principe Hygrade — je suis désolé de recourir à une entreprise capitaliste pour illustrer le principe — plus les gens en entendent parler, plus les gens en redemandent.

Alors, imaginez si, au Québec un jour, par la force des choses, parce qu'on représenterait finalement l'alternative au pouvoir en place, les gens entendraient adéquatement parler de nos propositions à un niveau qui fasse en sorte qu'on soit présents à leur esprit. D'ailleurs, à chaque sujet, lorsqu'il y a eu des débats de société dans lesquels Québec solidaire a pris sa place, on a vu à quel point les gens appuyaient nos propositions. C'est sûr que, pour le moment, dans le système électoral actuel, c'est difficile de faire notre place en raison du système électoral, de la polarisation que ça implique, puis c'est sûr qu'il serait naïf de penser que les médias et surtout les sondages d'opinion, qui sont souvent orientés, n'ont pas une influence dans la manière dont les choses se passent.

La Modératrice : Merci. Dernière question en français.

Journaliste : Oui. Bonjour. Vous avez relativisé ce matin les résultats du coup de sonde de Léger qui vous place à 10 %, 12 % puis, bon, disons, qu'il y a peut-être une marge d'erreur, mais que vous êtes autour de ça. Est-ce qu'avec les compressions, avec le mécontentement populaire provoqué par l'austérité, on aurait pu penser qu'un parti comme le vôtre aurait eu matière à gagner plus de points, à aller chercher un nouvel électorat? Est-ce qu'il y a quelque chose que vous auriez pu faire différemment, d'après vous, pour tirer davantage profit de tout ce mécontentement-là auquel vous faites régulièrement allusion?

Mme David (Gouin) : Sincèrement, là, je pense qu'on fait globalement... Tout le monde fait des erreurs, mais je pense qu'on fait globalement très bien notre travail. Je pense qu'avec votre collaboration nous réussissons tout de même, à certains moments, à passer dans les médias puis à être entendus de la population.

J'accorde une crédibilité relative au sondage de ce matin. Je vous rappellerai qu'il y a 15 jours un autre sondage nous donnait 16 % partout, y compris en région, et 19 % chez les francophones, et, compte tenu de ce que nous vivons sur le terrain, de ce que nous entendons, de ce que nos associations nous disent, je pense qu'on est plus près de la réalité. Alors, on verra pour la suite des choses.

Moi, ce que je pense et c'est ce que pense Québec solidaire, c'est que nous progressons. Aussi vite qu'on aurait voulu il y a 10 ans? Non, mais assez vite pour que quand même partout, dans tous les milieux, nous soyons quand même reconnus maintenant comme un acteur politique important, et je n'ai aucun doute sur le fait qu'en 2018 ça se traduira par des votes dans les urnes.

Journaliste : Et peut-être justement une dernière question. En reléguant un peu aux calendes grecques les pourparlers sur la convergence ou les pourparlers sérieux vers une union éventuelle des forces souverainistes, est-ce que vous ne faites pas le jeu du Parti libéral qui, on le voit ce matin, là, mathématiquement on peine à s'imaginer comment il pourrait être défait dans une élection prochaine, même en 2018, avec...

M. Khadir : Il y a une possibilité.

Mme David (Gouin) : Il y en a une façon simple pour les gens, dans le fond, de se défaire… simple, peut-être pas simple, mais concrète, vivante pour les gens de se débarrasser du Parti libéral, c'est de voter solidaire. Moi, j'aimerais ça qu'à un moment donné on arrête juste de penser que, pour battre les libéraux, il faut absolument les péquistes. On est là. On est là, on existe, on a des bonnes idées, des bonnes propositions. On fait une tournée sur l'économie, les gens vont nous connaître de plus en plus. Moi, je suis certaine qu'en 2018 nous serons une alternative viable et très, très prometteuse pour beaucoup de gens.

M. Khadir : Mathématiquement, c'est possible. Il va y avoir 125 candidats et candidates, donc mathématiquement, si les gens décident de se débarrasser des libéraux, avec Québec solidaire, c'est possible.

Mme Fletcher (Raquel) : Bonjour, Mme David, en anglais. Je suis Raquel Fletcher de Global News. In terms of the poll that came out, the Léger poll this morning, it shows that your party has stayed consistent in popularity, but you personally have actually gone up 3% and PKP has gone down 5%. Do you believe that you've gained the popularity that he has lost in the last several months?

M. Khadir : Since the question is towards Mme David, I think… If you'll try in English…

Mme David (Gouin) : No, you…

M. Khadir : O.K. So I'll speak on her behalf. Of course, you know, it's not new. Even before each of us were in Parliament, people based on their general orientation because in Québec a vast majority of people are for better social services, for more equality, distribution of wealth. That doesn't translate in immediate support for Québec solidaire for many important reasons, due to the polarisation of politics here around some other issues, sometimes, as we have seen in the last election.

So it's true that Françoise David is on and on, since years, among the most appreciated political figures in Québec and sometimes the most appreciated, the most popular one. So it's not a surprise for us that people representing Québec solidaire have their place in the hearts of so many Quebeckers. What we would invite them is to have confidence on what we bring to them. After 10 years of work, we have a team, we have a program which is sufficiently clear on our short-term and long-term objectives for more social justice, for more respect for environment, for redistribution of wealth in a manner that is consistent with an advanced democracy, with an advanced economy as ours, and we need to believe in that to get out in the political stalemate in which the Québec has been drawn by Parti québécois and the Liberals.

They have a choice. They're not condemned to vote for the Liberals, they're not comdemned to vote for Parti québécois. There is Québec solidaire.

Mme David (Gouin) : Merci.

(Fin à 15 h 9)

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