(Onze heures vingt-huit minutes)
M.
Deltell
:
Alors, bonjour, mesdames messieurs. Alors, j'ai été pour le moins surpris
d'entendre le ministre Arcand, tout à l'heure, faire son point de presse, alors
qu'il évoquait que le gouvernement avait adopté un décret pour souligner à la
régie son inquiétude devant la possibilité de l'augmentation des tarifs
d'électricité. Écoutez, c'est de l'incohérence pure et pas à peu près. On sait
que ce gouvernement se distingue en disant une chose et faisant son contraire,
mais là, aujourd'hui, ça dépasse toutes les bornes.
Deux choses. Tout d'abord, on sait que,
depuis des semaines et des semaines, le premier ministre n'a de cesse de nous
dire, particulièrement à nous, le deuxième groupe d'opposition, que le
gouvernement, les élus n'ont rien à voir avec les décisions des régies, que les
régies sont autonomes et qu'il n'est pas question de mettre du pouvoir
politique dans les décisions des régies. Alors, c'est exactement le contraire…
Ce qu'ils ont fait hier, c'est exactement le contraire de ce qu'ils disent. Ce
n'est pas qu'on est contre le fait qu'on doit dire aux régies des choses, mais
c'est les libéraux qui n'arrêtent pas de dire, depuis des semaines et des
semaines, qu'ils ne peuvent rien faire pour les régies, mais hier, ils adoptent
un décret. Première incohérence.
Et surtout, la plus grande incohérence,
c'est qu'ils s'inquiètent de l'augmentation des tarifs d'électricité alors
qu'ils sont les seuls et uniques responsables et artisans de cette
augmentation-là. Et ce n'est pas nous qui le disons, c'est le président
d'Hydro-Québec lui-même, Thierry Vandal. Je vous rappelle que, lors d'une
entrevue le 25 août dernier, il a dit, et je cite : «Au moment même où la
demande baisse, on est tenus, par des décisions gouvernementales, d'acheter
l'énergie éolienne, dont on n'a pas besoin.» C'est Thierry Vandal lui-même,
qui, dois-je rappeler, a été nommé par le gouvernement libéral de Jean Charest
et est un ancien président de la commission politique du Parti libéral… Ça a
son importance dans le cas présent. Il dit : «On est tenus, par des
décisions gouvernementales». Alors, déjà, on sent qu'Hydro-Québec est otage des
mauvaises décisions du gouvernement.
Évidemment, ça amène la question de
l'éolien, et, plus loin dans l'entrevue, M. Vandal dit : «Il n'y a pas de
logique économique à produire de l'éolien au Québec…» Alors, nous, on le sait
qu'à la coalition ça fait des mois et des mois qu'on tape du pied pour dire que
l'éolien, c'est assez, ça coûte trois fois trop cher, donc il faut arrêter ça,
mais voilà que le président d'Hydro-Québec lui-même met ça en lumière. Et c'est
surprenant, d'autant plus que le gouvernement a en main une étude qui avait été
commandée par le gouvernement péquiste précédent, qui conclut de façon non
équivoque que l'éolien, c'est beaucoup trop dispendieux pour le Québec. Et, de
façon très précise, il cible ces pertes là pour le Québec à 140 millions
de dollars par année pendant 20 ans, que chaque emploi de l'éolien, au salaire
moyen de 48 000 $, coûte au trésor public 200 000 $. Alors,
tant qu'à créer des emplois, pourquoi ne pas en créer du quatre pour un? Parce
que c'est exactement ce dont il est question ici, ce qui, évidemment, serait
tout à fait illogique.
Donc, le gouvernement a déjà en main une
étude sérieuse et rigoureuse qui conclut que l'éolien, ça n'a pas de bon sens,
mais, mieux que ça, c'est que l'actuel président du Conseil du trésor, il y a à
peine deux ans, a entériné une étude, signée par l'économiste Michel Lafontaine
de l'Université Laval, qui conclut que l'éolien, c'est coûteux, inefficace,
absurde et ridicule, et cette étude-là a été endossée par l'actuel président du
Conseil du trésor. Alors, c'est dommage que Martin Coiteux… était à l'époque un
économiste chevronné, est devenu un ministre libéral muselé parce
qu'aujourd'hui il défend l'indéfendable.
Alors, moi, je ne comprends pas du tout
pourquoi, hier, le gouvernement a adopté par décret — écoutez, un
décret, ce n'est pas rien, là, c'est important — par décret un avis
pour signifier à la régie que, attention, là, on ne veut pas qu'il y ait des
augmentations trop élevées. Oui, mais, mes amis du Parti libéral, c'est vous
qui êtes les seuls et uniques responsables de ces augmentations-là. Assumez vos
décisions ou, mieux, prenez les meilleures décisions qui soient et arrêtez
l'appel d'offres des éoliens.
Et parlant justement de cet appel
d'offres, je tiens à vous rappeler que l'appel d'offres devait se conclure le 6
septembre dernier. Ils ont demandé une prolongation parce que la grille
d'évaluation n'était pas prête. Cette prolongation-là devait se conclure le 17
septembre, et ça a été suspendu, et, au moment où on se parle, l'appel d'offres
n'a toujours pas été conclu. Alors, écoutez, on peut peut-être rêver en
couleurs, peut-être que le fait que cette suspension-là soit toujours en cours,
qu'il n'y ait toujours pas… la conclusion de l'appel d'offres ne soit pas
faite, on peut peut-être rêver en couleurs et souhaiter que le gouvernement
décide d'arrêter cet appel d'offres — écoutez, Noël, c'est le 25
décembre, mais on ne sait jamais, on peut peut-être rêver en
couleurs — mais moi, je pense que la seule et unique solution,
réaliste et responsable, courageuse — on le reconnaît,
courageuse — serait de mettre un terme à l'aventure éolienne au
Québec.
Je tiens à vous rappeler aussi qu'au
Québec c'est ici qu'on a les plus fortes augmentations de tarifs d'électricité,
deux fois le cours de l'inflation pour deux années consécutives, que l'éolien,
ça coûte trois fois plus cher que l'hydroélectricité, et qu'on n'a plus les
moyens au Québec de se payer l'éolien.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Est-ce qu'Hydro-Québec n'a pas sa part à faire par des gains d'efficience
aussi?
M.
Deltell
:
Bien entendu, mais il faut comprendre qu'Hydro-Québec a fait aussi sa part
d'efficience. Lors du dernier… commission parlementaire où M. Vandal était
venu, il a dévoilé justement tous les efforts qui ont été faits, qui se
chiffraient, si mes souvenirs sont bons, je veux être prudent en citant un
chiffre, mais je crois que c'était autour de 500 millions de dollars au
cours des dernières années, les économies qui ont été effectuées par Hydro-Québec
par une meilleure gestion.
Maintenant, c'est clair qu'Hydro-Québec a
des devoirs à faire, mais, lorsqu'on parle d'augmenter deux fois le taux de
l'inflation, pour nous, c'est parce qu'on maintient le programme d'abord des
minicentrales, mais surtout qu'on maintient… qu'on remet en cause les
minicentrales, qu'on remet en marche les minicentrales, mais surtout qu'on
maintienne le mauvais programme des éoliennes. Écoutez, j'y ai cru, moi aussi,
aux éoliennes, là. C'est une bien belle idée, c'est un bien beau projet, mais
10 ans plus tard, on se rend compte que ça ne tient pas la route au plan
économique. Alors, il faut avoir le courage de dire : Assez, c'est assez.
Ça coûte trois fois trop cher. Ça coûte trois fois trop cher aux Québécois. Ça
suffit.
M. Dutrisac (Robert)
:
Oui. Maintenant, on pourrait mettre fin au programme des éoliennes, mais ça ne
changerait pas la réalité des choses quant aux tarifs, aux augmentations de
tarifs dans les prochaines années, là.
M.
Deltell
: Ce
n'est pas notre point de vue, parce qu'actuellement on sait qu'à Hydro-Québec
il y a des surplus d'électricité de 3 % à 4 %, dépendant des
variantes économiques, là, mais de 3 % à 4 % de surplus. Donc, non
seulement on a des surplus, mais on produit à perte pour créer encore plus de
surplus. Et, quand je dis à perte, c'est parce que ça coûte trois fois plus
cher à produire de l'électricité d'éolien versus l'électricité de
l'hydroélectricité. Et, écoutez, au Québec, on a un avantage extraordinaire
que, oui, on a misé énormément sur l'hydroélectricité. C'est notre force, c'est
notre richesse. On doit le privilégier. Ça amène le corollaire que notre
électricité n'est pas chère.
M. Dutrisac (Robert)
:
Donc, on doit cesser de respecter des contrats qui ont déjà été signés…
M.
Deltell
:
Bon. Alors, notre position, c'est de dire que d'abord on met un terme à
l'aventure éolienne en ne poursuivant pas ce mauvais modèle d'affaires. Il
n'est pas question pour nous de déboulonner, là, toutes les éoliennes. Il faut
respecter les contrats, mais voir, de gré à gré, si on est capable de fermer
les contrats. Mais ça, on est tout à fait conscients que c'est extrêmement difficile.
On en est conscients, mais la pire chose à faire, c'est de continuer ce mauvais
modèle d'affaires là. Et là on a une occasion en or de dire : Assez, c'est
assez. Et, écoutez, je le dis encore, je rêve peut-être en couleurs, là, mais,
encore ce matin… on vérifie à tous les jours, l'appel d'offres n'est pas
conclu, l'appel d'offres n'est pas terminé. Plutôt que d'adopter hier un décret
pour dire à la régie : Aïe! On n'est pas content, les tarifs vont
augmenter, ils auraient dû adopter un décret pour dire : On ferme cet
appel d'offres là. Ça, c'eut été responsable et courageux.
M. Dutrisac (Robert)
:
À moins que je ne me trompe, là, le gouvernement, quand même, a dit à la Régie
de l'énergie : Il y a une partie des gains d'efficience qui vont aller au
gouvernement, là, et qui n'iront pas aux consommateurs.
M.
Deltell
: Il
faudrait vérifier ce point-là, mais nous, ce qu'on pense, nous, ce qu'on
affirme par rapport à ça, c'est que ça doit aller directement dans les poches
des contribuables, c'est-à-dire de ne pas augmenter plus que le taux de
l'inflation les tarifs d'électricité. Puis je veux être bien clair là-dessus,
hein, nous, on n'est pas pour le gel puis ces trucs-là, parce que le gel, ça
conduit à une irresponsabilité qui nous amène à un mur plus tard. On l'a vu, il
y a deux ans, avec l'histoire des frais universitaires. C'est que, si on gèle tout
le temps, veux veux pas, l'inflation va nous rattraper, puis là on va faire un
choc tarifaire. Donc, nous, on est pour les augmentations, mais au maximum de
l'inflation, et on a d'ailleurs déposé un projet de loi récemment à cet
effet-là. Pour nous, c'est une logique économique qui respecte le porte-monnaie
des contribuables.
Mme Lajoie (Geneviève)
:
Que pensez-vous de l'idée que le gouvernement participe financièrement au
retour des Nordiques?
M.
Deltell
:
Oui, il faut être prudents là-dessus. Écoutez, on ne peut pas empêcher une
entreprise privée de faire des demandes au gouvernement, là. Si les programmes
existent, ils peuvent faire les demandes, puis c'est du cas par cas, ça doit
être évalué. Mais il faut quand même garder en tête que les Québécois font un
effort très élevé avec le 200 millions de dollars du gouvernement
provincial pour la construction d'un nouvel amphithéâtre. Mais, comme je vous
dis, on ne peut pas empêcher une entreprise de faire des demandes dans des
programmes déjà existants.
M. Robillard (Alexandre)
:
Est-ce que c'est responsable d'ouvrir la porte à ce genre de demande là dans le
contexte budgétaire actuel?
M.
Deltell
:
Bien, quelle demande? C'est ça, le point. C'est que, là, c'est une hypothèse. On
comprend que c'est une hypothèse. C'est à la suite d'une question, hier, en
entrevue : Est-ce qu'on serait contre le fait qu'une entreprise privée
puisse demander des subsides, ou un prêt garanti, ou des choses semblables?
Alors, laissons venir la chose. Mais nous, on ne peut pas dire, du jour au
lendemain : Non, non, telle entreprise n'a pas le droit de postuler ou n'a
pas le droit de demander dans des programmes déjà existants. Comprenons-nous
bien.
M. Robillard (Alexandre)
:
Trouvez-vous que le gouvernement a donné assez d'argent à ce projet-là
jusqu'ici?
M.
Deltell
:
Comme je vous dis… D'ailleurs, je l'ai dit dès notre mot d'introduction
là-dessus, écoutez, c'est 200 millions de dollars que les contribuables
ont versés pour la construction du nouvel amphithéâtre. L'effort est déjà
important. Maintenant, on ne peut pas empêcher une entreprise privée de faire
des demandes dans les programmes déjà existants.
M. Robillard (Alexandre)
:
Mais trouvez-vous que 200 millions, c'est déjà suffisant?
M.
Deltell
: Je
pense que c'est pas mal ce que j'ai dit, à l'effet que les contribuables ont
déjà fait un effort substantiel pour l'érection du nouvel amphithéâtre, qui
était de mise, soit dit en passant, parce que le colisée avait atteint sa vie…
Comment on dit ça, donc?
Une voix
: Sa vie
utile.
M.
Deltell
: Sa
vie utile, voilà, merci. Donc, il fallait faire quelque chose. Puis on comprend
aussi que ce n'est pas exclusivement pour l'arrivée éventuelle d'un club de la
Ligue nationale de hockey, mais c'est un effort substantiel. Et, d'un autre
côté, on ne peut pas empêcher une entreprise privée d'aller frapper à la porte
dans les programmes déjà existants, et j'insiste là-dessus.
M. Salvet (Jean-Marc)
:
Pardon, je pense… je crois comprendre que vous avez répondu à cette question, mais
est-ce que le gouvernement… ce serait une bonne chose qu'il devienne partenaire
ou qu'il le supporte?
M.
Deltell
:
Bien, il n'est pas question de devenir partenaires, là. Ça, c'est clair que je
vois mal le gouvernement acheter des actions pour dire : Tiens, c'est
beau, on va être propriétaires. Ce serait malvenu également de donner une
subvention directe.
Soit dit en passant, pour la petite
histoire, dans les années 75-76, le gouvernement du Québec avait subventionné
les Nordiques, du temps de l'AMH, là. Juste pour vous dire, mais c'est une
petite anecdote, comme ça. Et c'est pourquoi les joueurs de hockey avaient la
fleur de lis marquée «Québec» dessus. Et, si je me souviens bien, c'était par
l'entremise du ministère du Tourisme que cela avait été fait parce qu'ils
disaient que c'était un vecteur touristique et tout ça, donc…
Alors, je vous répète que, là-dessus, on
est conscients qu'avec les 200 millions de dollars pour l'érection du
nouvel édifice, les contribuables ont déjà donné substantiellement pour la
venue potentielle d'une équipe. Maintenant, on ne peut pas empêcher une
entreprise privée de frapper à la porte du gouvernement pour des programmes déjà
existants.
M. Robillard (Alexandre)
:
C'est quels programmes?
M.
Deltell
:
Bien, écoutez, il y a 600 programmes actuellement au gouvernement du
Québec. D'ailleurs, nous autres, on voudrait passer le peigne là-dedans. Mais, écoutez,
cette... On est dans...
M. Robillard (Alexandre)
:
J'essaie juste de voir, là, c'est quoi la nuance que vous faites entre un
programme existant puis un programme qui n'existerait pas.
M.
Deltell
: La
nuance, c'est qu'il ne faut pas créer... En fait, ce qu'on ne veut pas, c'est
qu'on ne veut pas créer un programme qui serait ciselé exactement pour une entreprise
x, et ça s'applique pour cette éventualité-là. Puis, comprenons-nous bien, là,
on est vraiment dans l'hypothèse au moment où on se parle, là, hein? On se
comprend, là, aux dernières nouvelles, là, il n'y avait pas de club de la Ligue
nationale à Québec, là. J'ai peut-être manqué quelque chose à matin, là, mais
je ne l'ai pas vu, là. Alors...
M. Robillard (Alexandre)
:
C'est seulement que c'est un type d'hypothèse qui génère beaucoup d'attention.
M.
Deltell
:
C'est un type d'hypothèse... J'ai remarqué, oui. Mais ce que je veux vous dire là-dedans,
c'est qu'on ne peut pas créer sur mesure un programme précis pour une entreprise
précise. Ça, ce n'est pas bien puis, à notre point de vue, ce n'est pas la
façon de faire. On crée un programme global pour dire : Bon, bien, d'accord,
on peut aider les entreprises dans certains cas. Et si, par bonheur, ça
s'adresse à telle entreprise, tant mieux, mais on ne peut pas non plus empêcher
une entreprise privée de dire : Bien là, vous, là, on... jamais vous
n'allez participer aux programmes gouvernementaux. Ça ne tient pas la route.
Merci.
(Fin à 11 h 40)