(Onze heures cinquante-neuf minutes)
Mme
Marois
: Merci
beaucoup. Je suis très fière que notre gouvernement ait déposé notre projet de
charte affirmant les valeurs québécoises de laïcité et de neutralité religieuse
de l’État, ainsi que l’égalité entre les hommes et les femmes et encadrant les
demandes d’accommodement. Avant que Bernard Drainville ne vous présente les
différents aspects du projet de loi, je tenais à m’adresser à vous.
Bernard Drainville a fait un travail
remarquable depuis la présentation de nos orientations le 10 septembre dernier,
et je tiens à le féliciter très chaleureusement. Des milliers de Québécois se
sont exprimés, et nous les avons entendus. Chacun avait droit à la parole,
chaque personne était traitée de manière égale. Tout au long du processus, nous
avons été à l’écoute des citoyennes et des citoyens du Québec et nous
continuerons d’impliquer la population dans les discussions entourant le projet
de loi.
Notre projet de charte permet d’affirmer
les règles communes que nous voulons nous donner pour vivre la diversité, vivre
la diversité dans l’harmonie. Nous affirmons ainsi notre volonté de bâtir un
Québec dans lequel nous pourrons mieux vivre ensemble. Au Québec, l’égalité de
tous les citoyens, l’égalité entre les femmes et les hommes, la séparation de
l’Église et de l’État, ce sont en effet des valeurs fondamentales, et c’est ce
que notre projet vient inscrire… notre projet de charte vient inscrire dans la
loi. Je suis convaincue qu’avant longtemps on citera cette charte comme exemple
de ce qui aura contribué à rapprocher les Québécoises et les Québécois, les
Québécoises et les Québécois de toutes les origines, comme l’a déjà fait, avant
elle, la Charte de la langue française.
La diversité du Québec, c’est une
richesse. Aujourd’hui, nous posons des gestes pour bâtir une diversité qui va
durer longtemps. À partir de maintenant, la population québécoise est invitée à
se prononcer sur le projet de loi. Le débat est ouvert, il sera soumis, en
commission parlementaire, à toutes les consultations utiles et nécessaires.
Nous voulons que ce débat se fasse dans une atmosphère sereine, dans une
atmosphère sereine et respectueuse. Aujourd’hui, c’est un grand moment pour
notre société, c’est une belle journée pour le Québec.
Maintenant, je vais laisser la place à
Bernard Drainville, qui pourra répondre à vos questions et vous présenter de
façon plus précise la charte que nous avons déposée ce matin à l’Assemblée
nationale du Québec. Merci beaucoup.
M. Drainville
: Merci.
Merci, Mme Marois. Alors, j’ai déposé ce matin, donc, en Chambre le projet de
loi n° 60, hein, la Charte affirmant les valeurs de laïcité et de
neutralité religieuse de l’État ainsi que d’égalité entre les femmes et les
hommes et encadrant les demandes d’accommodement, charte plus communément
appelée charte des valeurs québécoises. Cette charte, elle marque un jalon
important de notre histoire, parce qu’avec elle nous affirmons ce que nous
sommes et définissons le Québec dans lequel nous voulons vivre ensemble, peu
importe notre origine ou notre religion.
Il y a 40 ans, nous avons consacré la
primauté du français comme valeur commune des Québécois. Aujourd’hui, nous faisons
un pas de plus dans la définition de notre société en affirmant nos valeurs
communes de laïcité et de neutralité religieuse de l’État et d’égalité entre
les femmes et les hommes. Ces valeurs, comme notre langue, sont notre ciment. C’est
ce qui nous rassemble au-delà de nos différences individuelles.
Nous en avons la conviction, une fois
adoptée, cette charte sera source d’harmonie et de cohésion pour le Québec.
Elle nous permettra de nous rapprocher les uns des autres, de nous connaître
davantage en créant un espace où nous pourrons nous parler sans distinction de
religion ou de croyances. C’est simple, l’objectif que nous visons, c’est la
neutralité religieuse de l’État parce qu’elle est garante d’égalité pour toutes
les Québécoises et les Québécois. Un État neutre, c’est un État qui dit à
chaque citoyen : Je te respecte. Peu importe ta croyance ou ta religion,
je te respecte, et c’est pour ça que je m’impose, comme État, la neutralité
religieuse, y compris dans mon apparence. Le Québec est une démocratie
accueillante, francophone, éprise d’égalité et de laïcité, et, pour la première
fois, nous intégrons cette laïcité dans le contrat social.
Voyons maintenant comment on le fait. Alors,
je vous résume le projet de loi parce que je pense que c’est important de dire
ce qu’il contient. Alors, cinq grands éléments auxquels on a ajouté, je dirais,
un sixième élément. Le premier élément, donc, prévoit deux choses. Enfin, on
amende la charte des droits et libertés du Québec et on la modifie de deux
façons. On s’assure qu’il y a des balises en matière d’accommodement. Donc, les
fameuses balises que les gens nous demandent depuis des années pour encadrer
les demandes d’accommodement, elles sont dans le projet de loi. On prévoit, là,
les quatre grands tests : celui de la discrimination, l’égalité
hommes-femmes qui devient un critère prépondérant quand une demande
d’accommodement est faite, est-ce que l’accommodement est raisonnable et, s’il
est… s’il s’adresse à une institution publique, est-ce que l’accommodement
respecte la neutralité religieuse l’État.
L’autre grande modification que nous
apportons à la Charte des droits et libertés, c’est que nous inscrivons, dans
la charte, les grandes valeurs fondamentales de la nation québécoise. Alors,
ces grandes valeurs fondamentales que nous inscrivons dans le préambule, ce
sont l’égalité entre les femmes et les hommes, la primauté de la langue française
et la laïcité, la neutralité religieuse de l’État et la séparation des
religions et de l’État. Ça, c’est la première… c’est le premier élément du
projet de loi.
Deuxième élément du projet de loi, on crée
un devoir de réserve et de neutralité religieuse pour le personnel de l’État
sur les heures de travail. C’est dans le prolongement du devoir de neutralité politique
qui existe déjà pour le personnel de la fonction publique.
Je vais revenir au troisième élément.
Le quatrième élément que contient le projet
de loi, c’est l’obligation de faire affaire avec l’État à visage découvert et
de recevoir, donc, ces services de l’État à visage découvert également. Donc,
c’est visage découvert pour la personne qui demande un service, mais également
pour celui et celle qui le donnent.
Cinquième élément du projet de loi, politique
de mise en oeuvre à l’intérieur des organismes, des ministères, des établissements
pour s’assurer, dans le fond, que tout ce que l’on propose est appliqué, se
traduit dans le fonctionnement quotidien des institutions, dans le fonctionnement
quotidien, donc, de l’État québécois.
L’élément trois, c’est l’interdiction sur
les signes religieux ostentatoires pour le personnel de l’État sur les heures
de travail. Alors, cet élément-là, il est très important, je vais prendre la
peine de bien vous le définir. D’abord, on dit : pour tout le personnel de
l’État. Alors, le personnel de l’État, je vous rappelle, là, c’est les
organismes, les ministères, les réseaux d’éducation publics, de santé, les
cégeps, les universités, les municipalités, les garderies privées subventionnées,
les CPE, donc l’État au sens très large, qu’on avait déjà défini l’automne
dernier, en septembre.
Alors, pour toutes ces personnes, donc,
qui travaillent au sein de l’État, une fois que le projet de loi aura été adopté,
on leur donne un an, on donne une année à toutes les personnes qui travaillent
au sein de l’État pour s’adapter donc à ce nouveau contexte pour, comment
dire, faire la transition vers cette interdiction, cette restriction en
matière de port de signes religieux. Donc, entre le moment où la loi est votée
et le moment où la restriction sur les signes religieux s’applique, on donne un
an à tout le monde pour qu’ils puissent s’habituer au nouveau contexte. Donc,
période d’adaptation de un an.
La question de la clause de retrait,
évidemment, elle a été abondamment soulevée par les Québécois. Alors, on la
remplace, cette clause de retrait de cinq ans, renouvelable, par une clause de
transition de cinq ans maximum. Alors, je spécifie, là, la clause de transition
de cinq ans, elle tient compte de la période d’adaptation de un an. Donc, c’est
un pour quatre pour les cégeps, les universités, les hôpitaux et les
municipalités. Comme c’était prévu à l’origine, la loi dit : Ça va devoir
être demandé. Donc, cette transition maximale de cinq ans va devoir être
demandée par une résolution, résolution du conseil d’administration ou du
conseil municipal ou d’arrondissement. Donc, un an pour tout le monde, plus
quatre ans pour les cégeps, les universités, les hôpitaux et les municipalités
qui vont le demander, en vertu d’une résolution et après consultation,
j’insiste là-dessus. Donc, avant d’arriver avec une demande au gouvernement, de
dire : Nous, on veut se prévaloir de la clause de transition de cinq ans
maximum, il va y avoir une consultation au sein de la communauté.
Élément extrêmement important,
fondamental, tous les nouveaux employés qui seront embauchés après l’adoption
du projet de loi seront embauchés en vertu des nouvelles règles. En d’autres
mots, les personnes qui se trouveront un emploi dans un ministère, dans une
école publique, dans une garderie, dans une municipalité, peu importe, quand la
loi sera votée, elles seront embauchées et elles devront donc accepter de ne
pas porter de signes religieux. La restriction sur les signes religieux va
s’appliquer immédiatement pour tous les nouveaux employés au sein de l’État
québécois.
Une dernière chose que je veux vous
préciser en ce qui a trait à l’élément 3, vous pourriez me le demander : Est-ce
que ce sera possible pour une institution d’aller au-delà du cinq ans? Est-ce
qu’il pourrait y avoir des exceptions? La réponse à cette question, c’est oui.
Il pourrait y avoir des exceptions, mais qui seraient limitées au seul secteur
de la santé et des services sociaux. Un établissement pourrait effectivement
faire une demande au gouvernement d’obtenir un prolongement du cinq ans,
mais les critères sont très exigeants, et ce sera au gouvernement d’accueillir
la demande et de juger de la demande en fonction, donc, des critères qui sont
prévus à la loi.
Dernier élément, le projet de loi propose
d’amender la Loi sur l’Assemblée nationale. En fait, on propose deux
amendements à la Loi sur l’Assemblée nationale. Pourquoi? Parce qu’on voulait
envoyer un signal clair qu’on avant entendu les Québécois sur la question des
symboles religieux, en particulier la question du crucifix, et sur la question
également des signes religieux ostentatoires des députés.
Alors, qu’est-ce que l’on fait? Dans le
cas des signes religieux ostentatoires des députés, on amende la Loi sur
l’Assemblée nationale pour dire que l’Assemblée nationale a le pouvoir de régir
le port des signes religieux pour les députés. Donc, on clarifie cet élément de
la loi et, dans le fond, on dit aux députés de l’Assemblée : C’est à vous
de décider. Et je dois vous préciser d’emblée que, si le gouvernement et les
autres partis d’opposition convenaient qu’il faut s’interdire, comme députés,
le droit de porter un signe religieux ostentatoire au sein du salon bleu, hein,
pendant les travaux législatifs, il faudrait que ce soit fait par un vote
unanime ou, enfin, une décision unanime, parce que la seule façon d’interdire
le port des signes religieux pour les élus, c’est d’apporter un amendement au
règlement de l’Assemblée nationale, et, ce règlement, il est toujours modifié
par unanimité des députés. Mais les députés du Parti québécois ont cheminé sur
cette question-là, et, si vous le souhaitez, dans les questions que vous me poserez
tout à l’heure, je pourrai vous dire un peu où on se situe sur cette question,
donc, du port des signes religieux par les députés.
Sur la question du crucifix, on amende également
la Loi sur l’Assemblée nationale, toujours pour la même raison, toujours pour
dire que, sur la question du crucifix et sur la question des signes, cette
décision-là n’appartient pas au gouvernement, elle appartient au Parlement,
elle appartient aux députés. Alors, on amende la Loi sur l’Assemblée nationale
pour dire qu’il y a un endroit... pour désigner, en fait, l’endroit où la
discussion et la décision sur le crucifix pourrait être prise, et ce lieu-là,
cet endroit-là, c’est le Bureau de l’Assemblée nationale. Imaginez une table où
siègent tous les partis reconnus, que préside le président de l’Assemblée
nationale. C’est ça, le Bureau de l’Assemblée. Les décisions sont prises, de
façon générale, par consensus, et on souhaite, bien évidemment, que cette
décision-là sur le crucifix soit prise également avec le plus large consensus
possible. Et je dois préciser que, sur la question du crucifix, lorsque le
projet de loi sera adopté, présumons-le, la décision, donc, s’en va au
BAN, la discussion a lieu. Le président, on le demandera, consultera Québec
solidaire et les députés indépendants qui ne siègent pas au BAN. On veut
vraiment que, sur la question du crucifix, la décision soit prise d’une façon
qui soit la plus consensuelle possible. Et, une fois que cette décision aura
été prise au BAN, elle pourrait être ratifiée, bien entendu, par une motion en
bonne et due forme à l’Assemblée nationale.
Je conclus en vous disant trois choses.
D’abord, je tiens à saluer la contribution exceptionnelle des Québécois à ce
débat. Si le gouvernement a pu traverser la tempête des derniers mois et
arriver aujourd’hui avec un projet de loi solide, non dilué, c’est grâce à
l’appui des Québécois. Nous entamons maintenant une nouvelle étape, celle de
l’action, hein? Le temps est venu d’agir. C’est ce que les Québécois attendent
de nous.
Ça fait des années qu’on discute de la
question des accommodements, ça fait des années qu’on se dit : Ça
prendrait un cadre, il faut faire la laïcité et tout le reste. Alors là, c’est
le temps de prendre nos responsabilités, c’est le temps de faire preuve de
leadership. On s’était engagés à déposer un projet de loi, on l’a fait. La
population, maintenant, nous demande de travailler de bonne foi, tous les
partis politiques réunis, tous les parlementaires qui siègent à l’Assemblée
nationale, pour faire en sorte qu’on ait, en bout de ligne, le meilleur projet
possible.
Donc, c’est avec un esprit de
collaboration que nous entamons cette nouvelle étape, c’est avec une attitude
d’ouverture que nous abordons, avec tout le gouvernement, cette nouvelle étape.
On affirme aujourd’hui les valeurs qui unissent notre peuple maintenant et pour
l’avenir. Je suis fier du chemin qu’on a parcouru jusqu’à maintenant dans tout
ce débat sur la charte des valeurs, mais il nous reste encore beaucoup de
chemin à faire, et il faut le faire, il faut l’accomplir, parce que les
Québécois, j’en ai la conviction profonde, veulent l’adoption d’une charte des
valeurs pour maintenant et pour la suite des choses.
Et je suis maintenant prêt, évidemment, à
prendre vos questions.
Le Modérateur
: Pour la
période de questions, je vous demanderais de vous identifier. Et, comme vous
êtes nombreux, on se limiterait à une question et une sous-question. On va
alterner les micros, je commencerais au micro à ma gauche.
M. Lacroix (Louis)
:
Bonjour, M. Drainville.
M. Drainville
: Oui,
bonjour.
M. Lacroix (Louis)
:
Louis Lacroix, Cogeco Nouvelles. J’espère que vous ne trouvez pas mon nom trop
ostentatoire.
M. Drainville
: Non, ça
va, M. Lacroix, je…
M. Lacroix (Louis)
: M.
Drainville, je me demandais si vous aviez consulté des avocats, notamment sur
la clause qui dit que tout nouvel employé devra être embauché en vertu des
nouvelles règles. Est-ce que vous croyez que ça répond au Code du travail, par
exemple? Est-ce que, légalement, vous avez des assises légales à ce sujet-là? Est-ce
que vous ne vous exposez pas à des poursuites, éventuellement, ou des
contestations?
M. Drainville
: Non.
Et, effectivement, on a fait le travail de préparation de cette charte-là avec énormément
de rigueur. Ça fait un an, dans le fond, qu’on travaille là-dessus et on a évidemment
abondamment consulté. Et nous avons la conviction que, ce projet de loi, il
est… il a des assises juridiques solides. Et donc, non, on ne craint pas de
telles contestations.
M. Lacroix (Louis)
: Et
est-ce que c’est en raison de contestations possibles sur le plan juridique que
vous avez modifié le droit de retrait, entre autres choses, et que vous laissez
au secteur de la santé la possibilité de renouveler cette période de transition?
M. Drainville
: Est-ce
que c’est pour quelle raison, dites-vous?
M. Lacroix (Louis)
:
Pour des raisons juridiques? Est-ce que c’est pour ça que vous l’avez fait?
M. Drainville
: Non, pas
du tout. En fait, la raison pour laquelle on a décidé de privilégier une
période de transition de cinq ans, c’est parce qu’on voulait éviter une laïcité
à deux vitesses et parce que les Québécois nous ont signifié qu’ils ne
trouvaient pas que c’était une bonne idée que de renouveler constamment cette possibilité
de retrait. Alors, c’est la raison pour laquelle on l’a fait.
Pour ce qui est du secteur de la santé, on
est conscients du fait qu’il y a des établissements qui pourraient mettre plus
que cinq ans à s’ajuster au nouveau contexte de neutralité religieuse, y
compris en matière de port des signes religieux. Et donc on veut se donner de
la souplesse et on veut permettre, donc, à certains établissements qui ont une
histoire religieuse des débuts, de la fondation de l’institution jusqu’à aujourd’hui,
pour qu’ils puissent s’ajuster, pour que ces institutions-là puissent
s’ajuster.
M. Lessard (Denis)
:
Denis Lessard, LaPresse. Le régime particulier que vous
établissez pour la santé, est-ce que c’est… pour vous, c’est destiné à exempter
le Jewish ou ça peut être plus large que ça? Est-ce qu’il y a, par exemple, un
CLSC où la… qui dessert une population maghrébine, est-ce qu’il aurait des
possibilités de s’exclure aussi? Est-ce que c’est une exclusion qui serait
renouvelable ad vitam aeternam? Comment vous percevez ça?
M. Drainville
: Bon.
Alors, il y a plusieurs questions dans votre question. L’Hôpital juif pourrait
effectivement appliquer pour obtenir une prolongation en vertu des critères qui
sont prévus dans la loi, mais ce n’est pas nécessairement le seul établissement
qui pourrait s’en prévaloir. Il pourrait y avoir d’autres établissements qui
pourraient demander une prolongation au-delà de cinq ans. Ce sera à ces
institutions de faire la preuve qu’elles rencontrent les critères qui sont dans
la loi. C’est l’article 46 qui parle notamment de l’historique de l’institution
ou de l’établissement et des conditions de sa création ainsi que du caractère
continu au sein de celui-ci, au sein de l’établissement, d’une dimension
confessionnelle. Donc, ce sera aux institutions de faire la demande. Ce sera au
gouvernement de la prendre en considération.
Je dois vous dire que, dans l’article 46,
une des conditions pour évaluer la demande et éventuellement l’accepter, c’est
d’évaluer les mesures qui sont prises par l’établissement pour atteindre les
objectifs poursuivis par la présente loi. Donc, l’établissement qui va nous
faire une demande comme celle-là va quand même devoir nous faire la
démonstration qu’il y a eu un mouvement vers l’atteinte de la neutralité
religieuse. Votre dernière sous-question, c’était…
M. Lessard (Denis)
:
Bien, est-ce que ça peut s’étendre, donc, au-delà du Jewish et puis est-ce que
c’est renouvelable éternellement ou est-ce que vous voyez ça comme un cinq ans
supplémentaire, puis ça se termine là?
M. Drainville
: Il n’y
a pas de… Je vous dirais, il n’y a pas de durée maximale, mais, ce que nous
disons, c’est que, lorsque le gouvernement accorde la prolongation, il
détermine le personnel concerné par celle-ci, la durée de cette prolongation et
toute autre condition. Donc, la...
M. Lessard (Denis)
:
...des gens de confession musulmane qui peuvent porter le foulard et d’autres
employés de confession chrétienne qui ne pourraient pas porter le crucifix? Ça
devient un peu...
M. Drainville
: Non,
non, non. À partir du moment où... C’est l’institution qui est visée à ce
moment-là. Alors, à partir du moment où l’institution demande la prolongation
de la période de transition, pendant cette période-là, les personnes qui
travaillent au sein de cette institution, peu importe la confession, peuvent
continuer à porter des signes religieux ostentatoires, peu importe la
confession.
M. Lessard (Denis)
:
...
M. Drainville
: M.
Lessard, on a dit deux questions.
M. Lessard (Denis)
: Je
termine avec ça, là. Mais les médecins ne sont pas des employés de l’État.
M. Drainville
: Au
sens de la loi, ils sont considérés comme des employés d’un organisme public.
Mme Lajoie (Geneviève)
:
Bonjour. Geneviève Lajoie, Journal de Québec. M. Drainville, tout à
l’heure, quand le projet de loi a été déposé en Chambre, le gouvernement a
engagé la confiance de la Chambre pour le dépôt du projet de loi. Ce n’est pas
banal. C’est dire que le Parti québécois était prêt à partir en élection sur la
charte?
M. Drainville
: Bien, c’est
dire surtout qu’on souhaitait que les Québécois puissent prendre connaissance
de l’existence du projet de loi, parce que, dans le fond, dans le fond...
Mme Lajoie (Geneviève)
:
...
M. Drainville
: Bien
oui, mais la raison pour laquelle on a fait ça, ce n’était pas pour partir en
élection, c’était pour nous assurer que les oppositions allaient nous permettre
de déposer le projet de loi. Parce que, tant et aussi longtemps que je n’ai pas
déposé le projet de loi, vous ne pouvez pas l’avoir, puis je ne peux pas en
parler dans le détail aux citoyens du Québec. C’est ça qui était en cause. Ce
qui était en cause tout à l’heure, c’était la possibilité, parce qu’il y avait
une rumeur qui circulait, la possibilité que le Parti libéral s’oppose au dépôt
du projet de loi. Alors, voyant cela, le leader a fait ce qu’il avait à faire.
Il a dit : Écoutez, si vous ne voulez pas permettre aux Québécois de voir
le projet de loi, bien, on vous le dit tout de suite, les conséquences seront
lourdes. Alors, c’est ce qu’il a fait, Stéphane, et heureusement qu’il l’a
fait. Moi, je pense que ça se justifie tout à fait.
C’est un projet de loi tellement
important. Qu’on soit pour ou qu’on soit contre, on conviendra que c’est un
projet de loi, je pense, qui soulève un certain nombre d’enjeux qui sont
fondamentaux pour la suite des choses, pour notre suite des choses, comme
société. Je pense que c’était normal que le gouvernement signifie aux
parlementaires, et en particulier à l’opposition officielle, qu’il n’allait
permettre et qu’il n’allait pas accepter qu’on ne puisse pas déposer le projet
de loi pour que les citoyens québécois puissent en prendre connaissance.
Mme Lajoie (Geneviève)
:
Vous avez inscrit une disposition concernant le crucifix, finalement, dans le
projet de loi. Quelle est la position du Parti québécois sur le sort du
crucifix qui est installé au salon bleu?
M. Drainville
: Alors,
sur la question du crucifix, la position que nous défendons d’abord, c’est de
dire : Cette décision-là ne nous appartient pas, elle n’appartient pas au
gouvernement, elle appartient à l’ensemble des députés. Et, dans la mesure où
les députés d’opposition sont majoritaires, on s’entend que les députés
d’opposition vont avoir un mot important, une part importante dans la décision
qui sera prise éventuellement au Bureau de l’Assemblée nationale. Parce que c’est
ça que le projet de loi dit, le projet de loi dit : Le Bureau de
l’Assemblée nationale peut se saisir de cette question du crucifix et prendre
une décision.
Le jour où cette discussion aura lieu au
Bureau de l’Assemblée nationale, le Parti québécois sera favorable au
déplacement du crucifix du salon bleu vers un autre endroit, ici, au Parlement,
un endroit public, accessible, qui rendra justice à la valeur patrimoniale de
ce symbole religieux.
Mme Lajoie (Geneviève)
:
Votre position a beaucoup évolué donc, parce que ce n’était pas ce que vous
disiez il y a quelques mois.
M. Drainville
: Vous
savez, madame, quand je… quand on dit qu’on va consulter les gens puis qu’on va
les écouter, ça veut dire qu’on va les écouter, puis effectivement on les a
écoutés. Et, oui, notre position a évolué, et c’est très bien ainsi.
Le Modérateur
: Micro à
ma droite.
Mme Biron (Martine)
:
Bonjour M. Drainville.
M. Drainville
:
Bonjour, madame.
Mme Biron (Martine)
:
Je me fie un peu à votre…
Une voix
: …
Mme Biron (Martine)
:
Est-ce que ça va?
M. Drainville : Allez-y, Mme
Biron.
Mme Biron (Martine)
:
Vous avez dit, dans votre préambule : On a fait ça avec rigueur, on a
étudié, on a consulté, etc. Alors, aujourd’hui, est-ce que vous êtes en mesure
de nous dire combien de personnes seront touchées par votre projet de loi?
M. Drainville
: Bien,
c’est l’ensemble du personnel de l’État qui est touché par le projet de loi.
Mme Biron (Martine)
:
…ne portent pas de signes ostentatoires. Alors, combien de personnes seraient
touchées?
M. Drainville
: Combien
de personnes qui portent un signe ostentatoire?
Mme Biron (Martine)
:
Oui.
M. Drainville
: Ça, on
ne le sait pas, et j’ai toujours donné la même réponse là-dessus et je
continuerai à la donner jusqu’à la fin. On ne le sait pas, et c’est une très
bonne chose qu’on ne le sache pas, parce que, si on le savait, ça voudrait dire
qu’on aurait fait du profilage de nos employés de l’État, et ça, je pense que c’est
inacceptable. Alors, on ne commencera pas à faire de profilage avec nos
employés. On a une idée, dans certains réseaux par exemple, on a une idée, par
exemple, si vous contactez l’association des CPE ou l’association des garderies
privées subventionnées, elles vont vous donner une approximation, mais c’est
une approximation que je n’endosse pas nécessairement. Je…
Vous savez, le point de départ de notre
mesure, c’est de traiter tout le monde également et c’est d’assujettir tous les
employés de l’État aux mêmes règles. Alors, lorsque le projet de loi aura été adopté,
à ce moment-là, la loi va s’appliquer, et les gestionnaires vont faire leur
travail, et les restrictions, notamment en matière de port de signes religieux,
vont s’appliquer à tout le monde.
Mme Biron (Martine)
:
J’aurais une deuxième question concernant les mesures disciplinaires… en fait,
vous dites, là, au bout d’un an, après un dialogue, les mesures disciplinaires
vont s’engager, là. Est-ce qu’on comprend que ça peut aller jusqu’au
congédiement?
M. Drainville
: Moi,
je vais vous dire, les gens qui travaillent pour le service public, de façon
générale, là, ils sont compétents, ils sont appréciés, puis on souhaite tous et
toutes les garder. On ne veut aucun départ, et c’est pour ça qu’on met en place
le cadre de neutralité religieuse et les restrictions en matière de port de
signes religieux d’une façon qui est très graduelle, et qui est très humaine,
et qui est très respectueuse.
L’une des raisons pour lesquelles on
prévoit cette période d’adaptation d’un an, c’est justement pour faire en sorte
qu’on puisse s’asseoir avec les personnes qui sont concernées, leur expliquer
les attentes que nous avons, les nouvelles obligations qui sont les leurs, leur
expliquer le contexte dans lequel on l’a fait, leur redire que ce n’est pas
contre elles qu’on a pris cette décision-là. C’est une décision collective, une
décision de société que nous prenons. Dans certains établissements des réseaux
de santé, cégeps, universités, municipalités, elles pourraient avoir jusqu’à
cinq ans pour faire la transition. On prévoit également, dans le projet de loi,
une période de dialogue.
Donc, au terme de la période d’adaptation
de un an, si la personne n’a toujours pas retiré son signe religieux, on
prévoit une période de dialogue — c’est écrit comme ça dans le projet
de loi — qui s’inspire un petit peu de ce qui s’est fait en France vis-à-vis
les élèves qui portaient des signes religieux ostentatoires, et, en France, ça
a très bien fonctionné. 90 % des élèves qui portaient un signe religieux
ont accepté d’y renoncer. Alors, on pense qu’avec une période de dialogue comme
celle-là, on va amener la vaste majorité des employés de l’État à accepter la
nouvelle loi.
Mme Biron (Martine)
:
Mais, ma question, c’est ultimement…
M. Drainville
: On ne
veut pas en arriver là. Évidemment, tout le monde va devoir respecter la loi
par contre. O.K.
Le Modérateur
: Micro à
ma gauche.
M. Ouellet (Martin)
: M.
le ministre, Martin Ouellet de LaPresse canadienne.
M. Drainville
: Oui,
M. Ouellet.
M. Ouellet (Martin)
:
Vous allez faire quoi avec l’employée qui ne veut pas enlever son voile, qui
s’appuie sur les chartes pour dire qu’elle a le droit d’afficher ses croyances
religieuses? Vous allez faire quoi, ultimement? Je veux reprendre un peu la question
de ma collègue. Vous allez faire quoi, la mettre dehors?
M. Drainville
: On ne
souhaite pas qu’il y ait des départs, on souhaite garder tout le monde, et
c’est pour ça qu’on met en place la restriction sur le port des signes
religieux d’une façon qui est très graduelle, qui est très respectueuse et qui
est très humaine. Oui, voilà.
M. Ouellet (Martin)
: Ultimement,
il arrive quoi?
M. Drainville
: La
réponse ne changera pas, M. Ouellet. On prévoit une période d’adaptation d’un
an, par la suite, ça pourrait aller jusqu’à cinq ans dans certains établissements.
Par la suite, il y aura cette période de dialogue, et, par la suite, c’est le
processus graduel de sanction qui s’applique. Est-ce que nous allons… bien,
c’est celui qui est habituel, c’est le processus de sanction très gradualiste
qui s’applique, comme dans toutes les conventions collectives, par exemple,
dans les contrats de travail.
Mais je tiens à dire et à redire que ce
que nous souhaitons, nous, c’est garder tout le monde, et ce que nous
souhaitons, c’est qu’il n’y ait aucun départ ou, en tout cas qu’il y en ait le
moins possible. Mais, encore une fois, la décision que nous prenons, c’est un
choix de société que nous proposons aux Québécois. Si on décide de le faire, il
faut, à ce moment-là, vivre avec la loi et accepter l’application de la loi.
Et, nous, nous avons confiance que la vaste majorité de nos employés vont collaborer
et vont accepter l’application de la loi.
M. Ouellet (Martin)
:
Vous êtes à l’aise avec le fait qu’une minorité d’employés va perdre son
travail parce qu’elles ont décidé, là, d’afficher leurs croyances religieuses?
Vous êtes à l’aise avec ça?
M. Drainville
: Nous,
nous croyons que la vaste majorité des employés vont respecter la loi, et donc
on ne croit pas… on ne croit pas qu’il y aura beaucoup, beaucoup de départs.
Et, comme je vous dis, nous, on souhaite qu’il n’y en ait aucun, parce que, justement,
les gens qui travaillent pour le service public, de façon générale, sont des
gens appréciés, compétents, et on veut tous les garder.
Le Modérateur
: Micro à
ma droite.
M. Lafille (Julien)
:
Julien Lafille de Radio-Canada. M. Drainville, vous répétez tout le temps que
vous voulez des règles claires. Pourtant, sur cette question des sanctions,
vous ne savez pas trop expliquer qu’est-ce qui arrivera à l’employé de l’État
qui refusera de se soumettre à l’application de la charte. Ce sera quoi,
concrètement, les conséquences, au-delà de la période de transition, au-delà de
la période de dialogue?
M. Drainville
: Bien
là, c’est parce que ça commence à faire partie du processus, justement.
Première étape, une année d’adaptation qui pourrait aller jusqu’à cinq ans pour
la transition; deuxième étape, la période du dialogue; troisième étape, le
processus graduel de sanction, que vous connaissez bien. Et donc il va se
passer pas mal de temps entre le moment où la loi sera votée et le moment où
les sanctions vont commencer à s’appliquer, et, nous, nous avons confiance
qu’on réussira à convaincre la vaste majorité de nos employés de respecter la
loi. Ce n’est pas plus compliqué que ça. S’il y a une loi, à un moment donné,
il faut la respecter. C’est vrai pour toutes les lois. Alors, on va le… Il faut
s’assurer que la loi soit respectée, mais il faut traiter les gens humainement,
et c’est ça qu’on s’engage à faire et c’est ça qu’on va faire.
M. Lafille (Julien)
:
Vous aviez dit que vous vouliez aborder cette nouvelle étape avec ouverture.
Alors, dans le contexte où vous êtes dans un gouvernement minoritaire, jusqu’où
est-ce que vous êtes prêts à aller, sur la question des signes religieux, pour
trouver un compromis, avec la CAQ notamment?
M. Drainville
: Bien,
nous, on est en… Moi, je vous dirais, notre… s’il y avait un mot pour résumer
notre attitude, c’est le mot «ouverture». On est des gens ouverts, on est
parlables. Maintenant, nos principes sont clairs, les valeurs que nous
défendons sont fortes, notre attitude, c’est une, comment dire, c’est une
attitude, je dirais, de collaboration, et j’espère qu’elle sera partagée par
les autres députés, par les autres formations politiques.
Maintenant, il va falloir suivre le
processus, hein? On ne brûlera pas les étapes, là. Une loi doit suivre les
étapes. Alors, on l’a déposée aujourd’hui. Il y aura consultation, on va
entendre les groupes venir nous dire ce qu’ils pensent du projet de loi. Il y a
beaucoup de groupes, vous savez, qui attendaient le dépôt du projet de loi pour
se prononcer. Une fois qu’ils se seront fait entendre, on procédera à
l’adoption du principe de la loi, j’espère bien, et, par la suite, on prend le
chemin… on retourne en commission parlementaire pour l’étude article par article,
et c’est là, c’est rendu à cette étape-là qu’il va falloir avoir l’appui d’au
moins un autre parti présent en Chambre, si on veut procéder avec l’adoption des
articles.
Alors, la discussion avec la CAQ et
l’ouverture que nous allons manifester pendant cette discussion, c’est à ce
moment-là qu’elles vont s’exprimer. C’est là que les discussions avec la CAQ
vont avoir lieu. C’est à ce moment-là.
Le Modérateur
: Micro à
ma gauche.
M. Dutrisac (Robert)
:
Robert Dutrisac, du Devoir. Bonjour, M. Drainville. Concernant la clause
dérogatoire… le projet de loi ne contient pas de clause dérogatoire. En tout
cas, je n’en ai pas vue.
M. Drainville
: Vous
avez raison.
M. Dutrisac (Robert)
:
Et je me demandais si c’était quelque chose que le gouvernement prévoyait
ultérieurement, là. Si la loi faisait l’objet de plusieurs contestations,
est-ce que vous prévoyez qu’un jour ce soit peut-être nécessaire?
M. Drainville
: Pour
le moment, on ne prévoit rien en ce sens.
M. Dutrisac (Robert)
:
Maintenant, vous avez parlé de l’importance du projet de loi, de l’importance
pour le gouvernement, pour la société, etc., ce qui a valu le fait que vous
avez fait une question de confiance, son dépôt à l’Assemblée nationale. Est-ce
qu’il en sera de même pour l’adoption de son principe?
M. Drainville
: Je ne
suis pas sûr de comprendre le sens de votre question.
M. Dutrisac (Robert)
:
Est-ce que vous allez faire l’adoption du principe de la loi une question de
confiance?
M. Drainville
: C’est
beaucoup trop tôt pour répondre à cette question-là. Je suis désolé, je ne peux
pas vous répondre à ça. On aura le temps, vous savez, parce que l’opposition a
demandé des consultations générales. Vous qui connaissez bien la procédure
parlementaire, vous savez que, si l’entente entre les différents partis de la
Chambre, c’est d’avoir des consultations générales, à ce moment-là, il faut
donner un préavis d’un mois pour demander aux groupes de soumettre leurs
mémoires. Alors, disons qu’il y a une entente entre les différents partis
quelque part la semaine prochaine, ajoutez un mois, là, puis je ne suis pas sûr
qu’on est encore en session ou qu’on peut vraiment envisager un début de
consultation avant les fêtes. Je ne suis pas certain, là, je n’ai pas fait le
calcul exact. Il y a un peu d’incertitude autour de ça.
Mais, une chose est certaine, les
consultations, si elles ont commencé avant Noël, elles vont très certainement
se poursuivre après Noël. Et, par la suite, au terme de ces consultations qui,
si elles sont générales, risquent d’être assez longues, vont nous amener au
vote sur le principe. Alors, le vote sur le principe, il aura lieu quand? Je ne
le sais pas. Je pense qu’on va avoir l’occasion, M. Dutrisac, de s’en reparler
du sens politique qu’aura ce vote sur le principe du projet de loi à ce
moment-là.
M. Dutrisac (Robert)
:
Maintenant, la règle pour les nouveaux employés, est-ce qu’elle s’applique
aussi aux réseaux de la santé, des universités, des cégeps?
M. Drainville
: Oui. Elle
s’applique à tout le monde.
M. Dutrisac (Robert)
:
Donc, c’est une laïcité par attrition, éventuellement, qu’on pourrait voir…
M. Drainville
: Non.
Non, parce que tous ceux et celles qui bénéficient d’une période d’adaptation
d’un an, au terme de cette année-là, vont devoir renoncer à leurs signes
religieux. Et tous ceux et celles qui auront bénéficié d’un cinq ans, disons,
qui travailleront dans un établissement de santé ou un cégep, université,
municipalité, au terme du cinq ans, vont également devoir renoncer à leurs
signes religieux. Donc, dans le fond, la période d’adaptation, la période
transition puis l’éventuelle prolongation, ça ne concerne seulement que les
employés en poste présentement. Mais tous les nouveaux employés, peu importe
l’institution, seront embauchés en fonction des nouvelles règles.
Oui, M. Bergeron.
M. Bergeron (Patrice)
:
Bonjour, M. Drainville. Vous avez affirmé que… ou Mme Marois a affirmé que c’était
un geste fondamental de son gouvernement que de déposer ce projet de loi là. Votre
gouvernement est souverainiste. Est-ce que vous considérez que c’est un jalon
important pour votre gouvernement, par exemple, dans le sens de la démarche
d’accession à la souveraineté?
M. Drainville
: Bien,
écoutez, moi, ce que je dis sur cette question-là, moi, je dis qu’une société
ou une nation qui a des valeurs fortes, qui a les idées claires sur son
identité peut relever n’importe lequel défi politique, économique, écologique,
social, culturel, peu importe. Moi, je pense que ce qu’on est en train de faire
avec ce projet-là, on est en train de décider du Québec dans lequel on veut
vivre maintenant et pour demain. Et, peu importe les choix que les Québécois
feront à l’avenir, sur cette question-là comme sur d’autres, le fait qu’on ait
des fondations solides va nous permettre d’avancer avec beaucoup plus de
confiance et de fierté pour l’avenir.
M. Bergeron (Patrice)
:
Alors, c’est bon pour la souveraineté.
M. Drainville
: C’est
bon pour tout. C’est bon pour tout, peu importe le choix que les Québécois
feront. C’est bon pour tout. C’est bon si on veut se donner une stratégie de
développement durable avant-gardiste comme celle que le gouvernement propose
avec l’électrification des transports. C’est bon si on veut continuer à faire
de la solidarité puis de l’égalité des chances un principe important pour que
le Québec continue à être une des sociétés les moins inégalitaires dans le
monde occidental. C’est bon si on veut que le Québec continue à être une
société où il n’y a pas beaucoup de… où il y a moins de criminalité
qu’ailleurs, où il y a plus de sécurité qu’ailleurs. Je vous dirais, c’est bon
pour tout.
Parce que ce qu’on est en train de faire,
on est en train de se donner des règles qui, à terme, on en a la conviction,
vont nous permettre d’avoir plus de cohésion et plus d’harmonie comme société.
Et, dans une société où tu as plus d’harmonie, plus de cohésion, tu peux faire
les choix collectifs que tu veux. Peu importe le choix collectif que tu décides
de faire, en te donnant cette espèce de fondation commune puis en affirmant un
certain nombre de choses sur les valeurs fortes qui composent cette fondation
commune, tu vas pouvoir relever n’importe quel défi.
M. Bergeron (Patrice)
:
Vous, dans votre vie de citoyen québécois, contribuable, etc., est-ce que vous
avez eu souvent affaire, dans la fonction publique, à des gens qui vous
donnaient un service avec un voile ou une croix qui étaient trop visibles, à la
SAAQ, à la SAQ, à l’hôpital?
M. Drainville
: Je
n’ai pas eu beaucoup d’occasions, non. Très peu, en fait.
M. Bergeron (Patrice)
:
Ce n’est pas arrivé souvent, non?
M. Drainville
: En
fait, je ne me rappelle pas d’avoir été servi par un employé de l’État qui
portait un signe religieux ostentatoire. O.K.?
Mme Plante (Caroline) :
Mr. Drainville, hello. Caroline Plante, from
Global. So the opting-out clause is gone, you’re now talking about a transition
period. What brought about these changes?
M. Drainville
: Because we were concerned that we were headed for a
two-speed secularism. We were concerned that part of Québec society was going
to go ahead with the new framework of secularism, and other institutions were
going to opt-out, and opt-out, and opt-out, in such a way that there was a risk
that part of Québec society was going to be secular, was going to move ahead
with the process of secularism, and another part was going to stay stuck in the
current situation. So that, I would say, that’s the first thing.
The second thing, a lot
of citizens told us about it, they said : This isn’t a good idea, you
should rethink it.
The third reason has to
do with the fact that five years seems to be enough, in our view, five years to
adjust to the new context of religious neutrality is plenty enough.
Mme Plante (Caroline)
:
What are the chances of this actually being applied in Québec society? Because
it might not pass in the House, or, if it does pass, I mean, it’s going to be
contested before the courts. So are we doing this for nothing or are we setting
the table for an election?
M. Drainville
: As I said numerous times, I’m not in an electoral
mindset. I’m very much in a mindset to try to get this bill adopted. This is
very much the mindset I’m in. I want to get this bill, I want to get this
charter adopted. I hope it will be. We realize that we are in a minority
context, we obviously realize that, so we are going to need support from at
least another party to move ahead. But I am confident that we can move ahead,
because I feel that the support from the population is pretty strong. And we
think that, with this kind of support, we think that there will be an incentive
for other political parties to cooperate.
M. Dougherty (Kevin)
:
Yes, M. Drainville, Kevin Dougherty, Montreal
Gazette. On that point, you’re talking about… you
need the support of the CAQ to get this adopted. Mr. Legault
has been very clear, he doesn’t want a generalized ban on religious signs. I’m
just thinking, you know, with the language bill, Bill 14, the amendments that
the CAQ proposed were unacceptable, so that bill is not proceeding.
Do you see the same thing
happening with this bill, the CAQ imposing conditions… they are not imposing,
but proposing conditions that would be unacceptable and then sort of side-tracking
the whole process?
M. Drainville
: I hope this will not be the
case, obviously. We think that the process of consultations is going to show
the support, the substantive support we enjoy from Quebeckers within Québec
society. And I think… we think, this is going to give us the, how should I put it, the arguments, the way of arguments
which should allow us to convince the CAQ to cooperate and get this process
ahead and get this bill adopted.
M. Dougherty (Kevin)
:
You spoke just a while ago about confidence, how, you know, with a charter like
this, Quebeckers would be more confident. Why would a few women wearing hidjabs
undermine the confidence of Quebeckers? I don’t understand the process.
M. Drainville
: You’re talking about women wearing hidjabs in public
services…
M. Dougherty (Kevin)
: Yes, you talked about confidence… Well, we need to have this
charter, so Quebeckers would be
confident…
M. Drainville
: Oh! I see, yes, you’re
talking about my earlier response.
M. Dougherty (Kevin)
: …people wearing religious signs? Why does it undermine confidence?
M. Drainville
: You know what I was talking
about, I was talking about a society which gives itself a clear foundation, and
I do believe that determining fundamental values for one’s nation is something
very, very crucial for the future. Now…
M. Dougherty (Kevin)
: …you know, that’s
the problem.
M. Drainville
: It’s very inclusive, cannot
be more inclusive, as far as I’m concerned. I mean, we are saying that anyone
who works for the State, anyone who works for his or her fellow citizens will
have to respect the same rules in the name of religious neutrality, in the name
of a secular State, in the name of equality between men and women. We think,
Mr. Dougherty, we think this proposal, this bill is fair, and reasonable, and
well-balanced, and it is the right equilibrium between respecting individual
rights and affirming collective values, common values.
And we are proposing our
own version, our own conception of «laïcité»… I think secularism is the best
translation although there’s a debate around that. It’s a perfectly legitimate
proposition. I understand that there are perfectly legitimate propositions
around, that are not the same, and the dialogue, and the conversation, and the
debate we’ve been having within Québec with these different visions will be continuing in the next few
weeks and few months, but we maintain the fact that this is a good proposal and
it is a fair and reasonable proposal.
Le Modérateur
: À droite.
Journaliste : M. Drainville, why won’t you be clear about what these disciplinary
actions are going to be. You talk about being humane, you talk about
transitions. Why do you not want to say straight out what the disciplinary
measures will be?
M. Drainville
: Because I don’t want you to
insist upon conditions of departure. I want to insist upon the fact that we’re
going to do everything to keep everyone and we have outlined a process which we
think will allow us to keep everyone or almost everyone because it is a very… step
by step approach, with different transitions, different possibilities to engage
the person, to talk with her, to convince her. And we think, in the end, we
will convince the vast majority of our employees to respect the law and stay
within the service.
Journaliste
:Now, besides the media spin, there are human beings
listening to you right now, turning to you right now, wondering what the future
of their lives are going be. So, to be humane, and fair, and honest to those
people, could you please not tell them what kind of future they will face if
they don’t take off their religious gear?
M. Drainville
: I’m telling them : the
choice we’re going to be making if we do manage to adopt this bill is a choice
by the whole of society. It’s a choice we are proposing to the whole of Québec, for Québec, and for all Quebeckers. It’s a choice which is anchored into a
particular evolution we’ve known for the past 50 years. It began in the 1960s
with a certain number of choices. It led to the «déconfessionalisation» of our
school boards.
Une voix
:
…
M. Drainville
: Of course, I am. I’m saying
that what we are proposing is not aimed that a particular person, it is a
choice we are making for the whole of Québec, and they are part of Québec.
To get back to what
Kevin Dougherty was asking about the inclusiveness, my conception of the Québec Nation is that it includes everyone
who lives in Québec, period.
Everyone who lives in Québec is
a Quebecker, and this charter is for everyone who lives
in Québec.
M. Lyons (Shawn) : Mr. Drainville, Shawn Lyons, CBC. As I read article... section
46.1, this would appear...
M. Drainville
: I’m sorry, which one?
M. Lyons (Shawn) : 46.1. It’s about the healthcare institutions and the extra
transition period that the Government can approve. So, do I read correctly? With the... Theoretically,
this could see institutions like the Jewish General Hospital in Montreal
essentially being awarded almost a permanent transition period, if you will,
opting out of the provisions of this charter?
M. Drainville
: Well, no. These conditions
are not… How should I put it? This hasn’t been written with the sole idea of
allowing the Jewish Hospital to get a prolongation over the... over or after
the five year normal transition period. This clause or this article 46
could be used by the Jewish... Montreal Jewish Hospital to ask for a
continuation over the five years period, but it could also be used by other
institutions to ask for the same thing.
The general principle
underlying this particular cause is the fact that we recognized that, in
certain institutions that were founded on the basis of a religious reason or
religious... for religious reasons, may want to take or may have to take longer
than the five years we are giving to everyone. So we respect the fact that
certain institutions may have
to take longer to reach the goal we’ve given ourselves, and therefore, the
Jewish, yes, could apply... avec cette clause-là. But there could also be other
institutions who could apply as
well.
M. Lyons (Shawn) : I guess, what I was looking for was a clarification that it seems
that the Government could, if
they wanted, because it seems the length of that transition would be determined
by the Government based on
these criteria. So, I mean, it could be indefinite, no?
M. Drainville
: No. We don’t want that to be
indefinite, and that’s why we say the duration of this particular extension and
the conditions presiding over that decision will be negotiated between the Government and the institution.
M. Lyons (Shawn) : OK. And then the last question is : Why is prayer before city councils not included in this
Bill?
M. Drainville
: Because it’s before the
Supreme Court. Basically, it’s still before the courts. We still haven’t heard
from the Supreme Court. As you know, there’s a request for... to appeal the decision by the Québec Court of Appeal. A request has been
made to the Supreme Court by the Mouvement laïque québécois, and we are still
waiting for that answer. So, as long as this issue is before the courts, we
think that it should be left alone.
M. Lyons (Shawn) : Are you interested, though, at some point, down their line, to add
this to the bill, once the other case is settled?
M. Drainville
: I’ll tell you, I’ve got
plenty to take care of, for now, OK? C’est bon?
Le Modérateur
:
...une dernière.
M. Harrold (Max) :
Hello, Sir, how are you doing?
M. Drainville
: Pretty good.
M. Harrold (Max) :
You said before that one of the main reasons you wanted to pursue this,
despite all of the frenzy that is created, is because you promised it, your
party promised it in the platform, right?
M. Drainville
: Correct.
M. Harrold (Max) :
But can you name other specific reasons? What are the episodes that led to,
you know, that being in a platform and you persevering despite your minority
status and, here we are today, proposing a bill? What is it exactly? Name three
specific examples, if you could.
M. Drainville
: Three specifics examples?
M. Harrold (Max) :
Of episodes or events that have cause this bill to be necessary.
M. Drainville
: The YMCA episode, the episode of the woman wearing
the niqab at cégep Saint-Laurent, the numerous, numerous anecdotes we are
getting from the health care system of people wanting to be treated by someone
of their own sex, the case at la SAAQ. I mean, there is been lot of cases. But,
overall, above and beyond these specific cases, it’s the fact that people who
are working within the institutions, whether they are public schools,
hospitals, municipalities, they are telling us : Give us a framework, give
us a set of rules, we need it.
There was a woman, in a
pretty big school board in the Montréal area, who told us : Rush! Give us
these rules because we are in a constant state of tensions. She was referring,
in this particular case, she was referring about the holidays, the religious
holidays, which are creating a lot of tensions because there is an impression
of a double status between employees. Some are getting more holidays than
others, that is creating also difficulties and this is addressed in our bill.
We are creating a new
framework with the bill to bring back some equity, some equality in the
treatment of people with regard to religious holidays. There’s been like cases
and cases. And, if you talk to people within the institutions, within the
establishments, they will tell you that this is necessary.
M. Harrold (Max) :
OK. And, for businesses that comply, now, I want to get into this a little bit
with you, so it’s only a public institution that could insist
on, we would say, it hires a private company for a construction or whatever, it
could insist that that company complies or it could say : We’re not going
to do business with you because you’re not meeting the measures of…
M. Drainville
: No.
M. Harrold (Max) : No?
M. Drainville
: No, no. That’s not part of
the law.
M. Harrold (Max) : How does it work? What kind of penalties could a
public company…
M. Drainville
: Public company? What do you
mean by public company?
M. Harrold (Max) : I believe, in a law, there’s…
M. Drainville
: Do you mean Hydro-Québec? You mean a public listed
company on the stock market?
M. Harrold (Max) : A company covered by the law could insist on
compliance when it does business with other bodies or agencies or…
M. Drainville
: No, no, no. That’s not part
of the law at all. There’s noting, there’s no provision that go in that
direction. The only rules that apply to the private sector in this Bill are the
rules with regards to how to manage accommodations. Rules 1, 2 and 3 apply to
all accommodations that could be made in the future to whoever, whether it’s a
private organization, a public organization, «une
organisation communautaire», they will all be covered by these rules, by these
frameworks of rules. Rule number 4 applies only to religious
accommodations made to a public institution, so that’s separate. But the other
rules, they do not apply to the private sector.
Journaliste
:
…public agencies in their dealings with…
M. Drainville
: Non, il n’y a rien là-dedans sur la… Ce n’est pas…
Journaliste
:
Thank you.
M. Drainville
: O.K.? Merci beaucoup, tout le monde.
(Fin à 12 h 56)