Conférence de presse de M. André Boisclair, ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole, à l'Environnement et à l'Eau, M. Maxime Arseneau, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et de M. Roger Bertrand, ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux, à la Protection de la jeunesse et à la Prévention
Règlement sur les exploitations agricoles et mesures qui l'accompagnent
Version finale
Thursday, June 13, 2002, 11 h 44
Salle Evelyn-Dumas (1.30),
édifice Pamphile-Le May
(Onze heures quarante-quatre minutes)
M. Boisclair: Alors, mesdames et messieurs, je voudrais vous souhaiter la bienvenue à cette conférence de presse. Mes premiers mots iront à vous tous et à vous toutes. Je viens d'être informé du décès de M. Jean-Michel Gauthier, un de vos collègues. Je voudrais offrir aux membres de sa famille, à ses amis ainsi qu'à l'ensemble de ses collègues nos sympathies au nom du gouvernement du Québec. Je comprends que Jean-Michel a été un collaborateur apprécié dans la fleur de l'âge. Je voudrais donc, au nom du gouvernement du Québec, offrir toutes nos condoléances à sa famille ainsi qu'à ses amis et ses collègues.
Alors, Mmes et MM. les journalistes, il nous fait plaisir de vous annoncer ce matin une nouvelle série de gestes posés par le gouvernement du Québec afin de mieux protéger l'environnement en milieu agricole. Il y a un an presque jour pour jour, le ministre de l'Agriculture, Maxime Arseneau, et moi annoncions un moratoire dans 165 municipalités présentant des problématiques particulières. Je vous avais alors indiqué mon intention de moderniser la réglementation en matière de pollution d'origine agricole.
Depuis, le débat public qui s'est engagé au sujet des pratiques de l'industrie porcine nous a rappelé la complexité du sujet et surtout l'impérieuse obligation de l'aborder avec une vue d'ensemble et dans une perspective à moyen et long terme. Les signaux importants qui nous ont été envoyés par la santé publique quant aux risques possibles de certaines pratiques justifient également que le principe de précaution soit au centre de nos décisions.
C'est pourquoi je suis heureux que mon collègue et ministre délégué à la Santé, M. Roger Bertrand, soit aussi étroitement associé à la démarche que nous avons amorcée. Les décisions du gouvernement dont nous vous faisons part aujourd'hui ont été prises avec cette vision globale. Elles s'inscrivent en cohérence avec des gestes qui ont déjà été posés, des gestes complémentaires les uns aux autres, qui dessinent progressivement une architecture plus large, une architecture plus responsable en matière de pratiques agricoles. La protection des terres agricoles, de l'eau et de la santé des Québécois et des Québécoises vont de pair. C'est une priorité sur laquelle le gouvernement travaille énergiquement, et ce, avec l'appui du milieu agricole, du monde municipal et des groupes environnementaux.
Nous avons également déclenché une vaste étude épidémiologique dans les sept bassins versants en surplus de fumier. Les meilleurs scientifiques ont été mobilisés. Nous sommes actuellement à conduire cette vaste étude dont nous connaîtrons les conclusions au printemps 2003.
Nous avons aussi, de plus, donné de nouveaux pouvoirs au monde municipal. Au mois de décembre dernier, le gouvernement a adopté des orientations d'aménagement en matière agricole, des orientations par lesquelles les MRC ont la possibilité de faire des zonages de production pour tenir compte des zones touristiques ou de toute autre zone qui pourrait nécessiter une protection, par exemple, dans des milieux plus sensibles. Cette possibilité s'applique aussi pour les périmètres urbains des MRC.
À cela aussi s'ajoute une préoccupation forte sur la qualité de l'eau. Nous investissons encore, comme société, des sommes considérables, des centaines de millions, pour s'assurer que les Québécois et les Québécoises aient accès à une eau potable de qualité. Nous investissons dans des usines de traitement d'eau potable et dans des usines de traitement des eaux usées. Au moment, donc, où nous investissons ces sommes, nous avons collectivement une obligation de cohérence et de régler des problèmes qui se posent en amont. Le problème de la pollution diffuse en est un, nous nous y attaquons.
La table est donc mise pour que nous puissions aller un pas plus loin. Un pas plus loin qui se fait avec quelques idées fortes en tête, d'abord en rappelant de façon non équivoque que le développement de l'industrie agricole doit être balisé par des règles environnementales clairement établies. Nous voulons que ce soit l'ensemble du Québec qui gagne, il n'y a pas, dans les annonces que le gouvernement fait aujourd'hui, ni de gagnant, ni de perdant, c'est tout le Québec qui gagne, c'est tout le Québec qui bouge. C'est un pas vers l'avant pour le développement durable de l'industrie agricole. J'ose même croire que jamais le ministère de l'Environnement n'aura pris des mesures aussi structurantes pour s'assurer de la mise en oeuvre du principe de développement durable. Je suis convaincu que mes collègues partagent mon avis en ce qui concerne leurs responsabilités.
Qu'est-ce que nous annonçons aujourd'hui? Essentiellement, un plan d'action en cinq points. D'abord, une nouvelle approche de gestion du phosphore ferme par ferme qui assurera à terme des sols en équilibre. Deuxièmement, un contrôle réglementaire renforcé du ministère de l'Environnement grâce à une présence accrue et une gestion de l'information qui est efficace. Nous annonçons aussi une simplification des formalités administratives, nous annonçons un temps d'arrêt pour la production porcine et, finalement, nous annonçons la mise en place d'une commission du Bureau d'audiences publiques en environnement sur le développement durable de l'industrie porcine au Québec.
Je commence par la nouvelle approche de gestion du phosphore ferme par ferme. Nous préconisons une approche par laquelle nous allons tenir compte des déjections animales réelles plutôt que des moyennes québécoises, nous allons nous assurer que l'épandage aussi se fasse dans des conditions appropriées. Une approche qui fait que nous allons pouvoir nous attaquer aux problèmes là ils sont, donc aux problèmes qui sont à la source. Avec le nouveau règlement, nous allons tenir compte de la réalité de chacune des exploitations agricoles. Nous allons non seulement nous attaquer à la gestion de la croissance, nous allons nous attaquer aux actuels surplus, parce que le problème est là, en grande partie.
Pour la première fois, nous visons des sols en équilibre, une fertilisation qui fait en sorte que les plantes ne reçoivent que ce dont elles ont strictement besoin pour croître. Notre objectif fondamental: des sols au Québec en équilibre pour 2010. Pour nous assurer que le chemin qu'on prend est le bon chemin, nous imposons pour tous les établissements existants un objectif intermédiaire de 50 % des sols en équilibre dès 2005. Pour toute nouvelle exploitation agricole ou agrandissement de cheptel, les sols en équilibre devront être atteints dès maintenant. De plus, l'épandage des déjections animales devra être fait en fonction des caractéristiques spécifiques des sols et des cultures, conformément au plan agroenvironnemental de fertilisation que l'agriculteur se doit d'appliquer. Ces dispositions responsabilisent l'ensemble de la classe agricole. Les agronomes du Québec, sur qui reposent la confection de ces plans et leur suivi, seront appelés à jouer un rôle déterminant. Le gouvernement a décidé de miser sur leur professionnalisme.
Ce règlement vise également à ce que, d'ici 2010, les entreprises agricoles disposent de structures d'entreposage étanches ou d'une alternative reconnue par le ministère de l'Environnement. Ce règlement, enfin, interdit l'épandage dans les bandes riveraines ou à l'intérieur d'un périmètre de 3 m pour les cours d'eau et de 1 m pour les fossés. Cela étant dit, une municipalité peut édicter une réglementation plus sévère en concordance avec la politique sur la protection des rives, du littoral et des plaines inondables. Nous allons aussi exiger des rampes basses d'épandage pour diminuer la problématique des odeurs. Les municipalités, là encore, auront à jouer un rôle déterminant.
Le nouveau Règlement sur les exploitations agricoles sera publié dès demain matin dans une gazette spéciale et entrera en vigueur comme prévu dans la loi le 15 juin prochain.
Le deuxième élément du plan d'action concerne le contrôle réglementaire et la gestion de l'information efficace. J'annonce l'ajout de 100 nouveaux postes qui viendront s'ajouter aux effectifs du ministère de l'Environnement. Des inspectrices et des inspecteurs veilleront à appuyer les entreprises agricoles dans leurs efforts pour respecter la nouvelle réglementation. Des ressources additionnelles sont aussi prévues pour gérer les informations qui seront recueillies lors des visites d'inspection. De plus, par un projet de loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement présentement à l'étude en commission parlementaire, je pourrai transmettre à La Financière agricole du Québec tout renseignement permettant de s'assurer du respect de la loi. La Financière agricole pourra aussi me transmettre les renseignements nécessaires à l'application de la loi. C'est donc une indication ferme de la volonté du gouvernement de faire concorder son aide financière au respect des normes environnementales et d'appliquer le principe d'écoconditionnalité. Ce principe consiste essentiellement en un accès conditionnel aux avantages financiers offerts par La Financière en fonction du respect des normes environnementales.
J'en arrive au troisième élément. J'annonce aussi que des efforts notables ont été réalisés dans le but de réduire les formalités administratives auxquelles les exploitations agricoles doivent se soumettre. Aussi, dans certaines situations, le certificat d'autorisation sera remplacé par un avis de projet préalable à la réalisation de travaux, suivi d'une attestation de conformité sous la signature d'un agronome. De plus, la capacité d'entreposage sera déterminée par l'ingénieur consultant et non par règlement, mettant ainsi l'accent sur les résultats et non plus sur les moyens pour atteindre les gains environnementaux. Il s'agit là de procédures beaucoup plus simples qui laissent place à un plus grand partenariat et à une plus grande responsabilisation des agriculteurs, des agronomes et des ingénieurs.
J'en arrive au quatrième élément. J'annonce qu'il y aura, au Québec, un temps d'arrêt sur le développement de tout nouvel établissement dans le secteur porcin. En raison de l'importance et de l'importante croissance de ce type d'élevage, des revendications des citoyens et des citoyennes pour un environnement sain, grâce aussi et du fait du niveau préoccupant de la surfertilisation dans de nombreux bassins versants qui a engendré une dégradation de nos cours d'eau, et surtout en réponse aux avis de santé publique quant aux effets de la production animale, le gouvernement a décidé de retenir une approche plus restrictive pour ce secteur.
Pour les 281 municipalités qui sont en surplus de phosphore, ce temps d'arrêt complet sera de deux ans pour toute nouvelle exploitation porcine. Ainsi, dans ces municipalités, aucune nouvelle entreprise porcine ne sera autorisée. Par ailleurs, dans toute autre municipalité du Québec, et ce pour une période de 18 mois, aucune nouvelle entreprise porcine ne pourra voir le jour à moins que toutes les déjections animales produites subissent un traitement complet autorisé par le ministère de l'Environnement. Pour les productrices et les producteurs exemplaires, au plan du respect des normes environnementales, un accroissement de cheptels d'au plus 250 porcs sera possible conditionnellement à l'atteinte, dès maintenant, des sols en équilibre, c'est-à-dire un devancement de la norme prévue pour 2010. L'augmentation de cheptels ne sera possible qu'une seule fois avant le 15 juin 2004 et que pour un seul des lieux d'élevage appartenant à un même exploitant. Cette augmentation possible vient reconnaître la réalité des entreprises familiales qui produisent à petite échelle.
J'arrive au cinquième élément du plan d'action, le mandat donné
au BAPE. Le temps d'arrêt sur l'industrie porcine, que nous annonçons ce matin, doit s'accompagner d'une vision à moyen terme pour la pérennité de cette industrie. Il est impératif de poursuivre la réflexion, afin d'inclure tous les autres volets du développement durable dans cette stratégie d'assainissement agricole. Pour faire le tour de la question, avec toute la rigueur et la transparence requise, j'annonce que nous allons donner un mandat au Bureau d'audiences publiques en environnement pour étudier le modèle de développement de toute la filière de production porcine. Cette commission aura notamment pour mandat d'établir le cadre du développement durable de la production porcine qui tienne à la fois compte des aspects économiques, sociaux et environnementaux. Elle devra aussi examiner les modèles de production présents au Québec, en dégager les forces, les faiblesses ainsi que les impacts sur les milieux rural, agricole et sur le secteur de la transformation. À cette fin, elle aura le mandat plus spécifique de proposer un ou des modèles favorisant une cohabitation harmonieuse qui tienne compte des conditions propices au développement de la production porcine dans le respect de l'environnement. Ainsi, ce secteur continuera de contribuer au développement économique du Québec et de ses régions.
Enfin, cette commission du BAPE devra examiner les questions environnementales non couvertes par la réglementation gouvernementale comme, par exemple, la question de la déforestation, en résumé, une architecture de départ, une nouvelle approche ferme par ferme à partir d'un bilan au phosphore précis, les effectifs additionnels, des données fiables pour s'assurer de la crédibilité de l'intervention du ministère de l'Environnement, un temps d'arrêt dans le développement de l'industrie porcine et des audiences publiques conduites par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. C'est, en somme, un plan global d'assainissement, c'est un plan global de protection de l'environnement en milieu rural auquel le gouvernement convie tous les acteurs du monde agricole. Rappelons que nous avons tous un devoir de vigilance car nous sommes tous et toutes fiduciaires de cette terre que nous habitons.
À cet égard, le ministre de l'Agriculture, en collaboration avec l'ensemble des membres du gouvernement, pourra annoncer dans quelques instants des appuis nouveaux à l'industrie agricole. Le ministre de l'Environnement a lui, pour sa part, l'obligation de faire rapport en 2005 afin de nous assurer de la mise en oeuvre efficace de la nouvelle réglementation et aussi des progrès qui sont enregistrés.
En terminant, je voudrais sincèrement remercier tous les représentants des groupes et des instances qui ont contribué à cette réflexion qui nous amène à repenser notre développement au Québec en tenant compte de nos besoins économiques, environnementaux, sociaux et intergénérationnels.
Je voudrais souligner aussi le travail de centaines, voire de milliers de Québécois et de Québécoises qui ont pris le temps de s'arrêter, de penser à cette question, de nous faire des recommandations, de nous écrire et de se mobiliser sur cette importante question. Je tiens à saluer leur contribution au débat public.
Voilà donc, chers amis, le plan d'action. Ce plan d'action implique une bonne coordination gouvernementale et un soutien approprié auprès du milieu agricole. Je laisse le soin à mes collègues d'aborder ces questions avec vous.
M. Arseneau: Alors, merci, cher collègue. Mesdames, messieurs, je veux d'abord souligner que j'ai tout le temps été convaincu, persuadé que le monde agricole et, au premier chef, les producteurs agricoles étaient d'accord pour s'asseoir, pour rechercher des solutions de façon à permettre un développement durable d'activités qu'eux, leur famille et même leurs ancêtres – parfois depuis des décennies et même des siècles – pratiquent sur ces mêmes terres. Et je pense que l'exemple nous a été donné par la Fédération des producteurs de porcs du Québec et par l'Union des producteurs agricoles au cours des derniers jours.
Je vous rappelle qu'après de nombreuses, mais je dirais aussi, de longues discussions, ils ont eux-mêmes demandé un temps d'arrêt dans la production porcine. Ils ont accepté de siéger sur un comité avec d'autres partenaires, malgré un délai très court et une obligation de résultat. Les sceptiques étaient nombreux. L'exercice difficile, astreignant, et ce que nous vous proposons, ce que nous vous présentons aujourd'hui, c'est le résultat, c'est un compromis équilibré. Tout le monde y a travaillé extrêmement fort et je veux aussi souligner le travail de tous les gens qui ont été impliqués dans les discussions intenses au cours des six dernières semaines, que ce soit au niveau du Conseil exécutif, des ministères, les partenaires qui étaient autour de la table. Ça a été extrêmement intense et important.
Alors, la situation est la suivante. Au terme de ces discussions et de ces échanges, nous vous présentons la décision du gouvernement qui se veut aussi une décision équilibrée et intelligente. D'abord, un bon règlement, un nouveau règlement pour l'ensemble des secteurs de production agricole parmi les sévères au monde. Un règlement moderne, souhaité, attendu même par les producteurs, avec des bonnes nouvelles pour le monde agricole comme par exemple le calcul ferme par ferme qui remplacera les municipalités en surplus, ou encore les nouvelles méthodes de calcul de rejets réels, sous la queue, comme on dit. Et je vous dis que toutes les productions que j'ai rencontrées depuis que je suis au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation m'ont parlé de la nécessité d'arriver à ces outils modernes. Des mesures de transition sévères mais nécessaires concernant la production porcine et un soutien à l'industrie afin qu'elle puisse se conformer aux nouvelles mesures.
Rapidement, sur les mesures que mon collègue vient d'annoncer, des mesures de transition. Dans les zones en surplus, le problème, il est environnemental. Il y a des inquiétudes légitimes. Je pense que les nouvelles porcheries, un temps d'arrêt de 24 mois était une chose que la majorité des gens vont comprendre. Hors zone ou dans les zones où il n'y a pas de surplus, la problématique en est une d'acceptabilité sociale liée aux craintes, liée aux inconvénients face à une production, qui est la production porcine. Le temps d'arrêt est plus court. Pourquoi un temps d'arrêt? Parce que, si on avait permis une augmentation dès maintenant, nous aurions déplacé le problème, accentué encore le fait que l'acceptabilité sociale pose des problèmes, nous n'aurions que reporté un problème. Alors, je pense que, avec la Commission et le BAPE, nous allons travailler justement à identifier les modèles de développement de ce que sera le Québec de demain en regard des productions très importantes par ailleurs.
Les moyens. Nous avons la responsabilité comme gouvernement de nous assurer que les productrices et les producteurs agricoles qui devront se conformer aux nouvelles règles plus sévères – puis pas seulement les producteurs de porcs – disposent de moyens financiers et technologiques pour le faire, et je pense particulièrement aux plus petits producteurs. Voilà pourquoi je présente aujourd'hui le plan d'investissement gouvernemental à l'intention des producteurs et des productrices agricoles afin que ces derniers puissent rencontrer les exigences du nouveau règlement. Avec ce plan d'investissement de 257 millions sur trois ans, le MAPAQ entend soutenir et accompagner les entreprises agricoles dans leur obligation de se conformer à la nouvelle réglementation. Ainsi, le gouvernement agit de façon responsable en travaillant avec le milieu agricole à relever le défi environnemental afin d'assurer la vitalité et la pérennité de ce secteur d'activité particulièrement important pour le dynamisme de nos régions. Alors, ce plan s'articule autour de six actions prioritaires.
L'implantation de technologies de traitement. La solution, elle est dans la technologie moderne et dans le traitement afin de permettre, donc, aux producteurs et aux productrices déjà établis d'acquérir des systèmes de traitement des fumiers, de réaliser des systèmes de traitement collectifs. Donc, il y aura des projets à la ferme et des projets collectifs. Cela contribuera aussi à soutenir la réalisation d'études de marché pour les produits issus de ce traitement de fumiers. Mais, déjà, on a une excellente idée: qu'on importe du phosphore chimique au Québec. Alors, il y a donc des marchés potentiels au Québec.
Deuxième action prioritaire: le soutien, la consolidation des efforts de recherche et de développement. Cette aide permettra au secteur de la recherche et du développement de perfectionner les systèmes existants en matière de technologies de traitement de fumier, d'en développer de nouveaux pour répondre aux problématiques actuelles.
Troisième action prioritaire: la protection des cours d'eau. Cela permettra, ce soutien, d'effectuer des travaux visant à protéger les cours d'eau, soit les sites d'abreuvement. Ces travaux diminueront l'impact des activités agricoles en matière de pollution diffuse, notamment, et amélioreront la qualité de l'eau.
Quatrièmement, quatrième action prioritaire, la réduction des odeurs, notamment par l'achat de rampes d'épandage. Cette technologie a deux avantages. D'abord, elle permet de protéger la valeur fertilisante des fumiers liquides et, ensuite, elle permet de réduire la propagation des odeurs par le vent permettant ainsi une cogitation plus harmonieuse en milieu agricole.Cinquième action. Bien sûr, on va poursuivre notre soutien pour la construction d'entreposage des fumiers, donc construction de fosses. On va même aller chercher, dans des entreprises de moins de 50 unités animales à la hauteur à peu près, là, de 40 unités animales, mais l'unité animale va disparaître comme mesure aussi, alors.
Sixième action prioritaire. Il s'agit d'un soutien pour les services conseils aux entreprises. L'aide accordée favorisera la mise en place de nouveaux clubs agroenvironnementaux ou permettra de consolider ceux qui sont existants. Ce regroupement... Ces regroupements, qui existent dans tout le Québec, de producteurs agricoles, encadrés par des conseillers, ont pour objectif de favoriser l'adoption de bonnes pratiques respectueuses de l'environnement, favorisent les échanges, favorisent le transfert de connaissances. Donc, c'est beaucoup un soutien collectif et, quand on travaille en groupe et ensemble, c'est plus facile aussi de convaincre les gens d'adopter des bonnes pratiques. Vous savez, près de 5 000 entreprises agricoles québécoises bénéficient de ces services conseils et on pense qu'on doit accélérer et soutenir davantage.
En conclusion, je vous dirais que, comme société appuyée par le gouvernement, on s'est donné, tous ensemble, des objectifs ambitieux de développement. Nous avons aussi encouragé le développement, la valeur ajoutée du secteur agroalimentaire. Nous avons favorisé le virage agroenvironnemental. Depuis 1998, le gouvernement du Québec a mis plus que tous les autres gouvernements du Canada réunis pour le virage agroenvironnemental à la hauteur de plus de 200 millions de dollars. Les agriculteurs ont mis davantage que le gouvernement et il faut, je pense, accélérer encore ce virage agroenvironnemental. Le pari que nous faisons est le suivant. Nous donner la réglementation environnementale la plus sévère possible tout en maintenant la compétitivité du deuxième secteur en importance dans toute l'industrie agroenvironnemental du Québec, à savoir la production porcine. Il y a de nombreux emplois qui en dépendent et tous les emplois sont importants en particulier dans les régions agricoles du Québec.
M. Boisclair: Merci, Maxime.
M. Bertrand (Portneuf): Très bien. Je pense que je ne reprendrai pas l'essentiel des dispositions qui sont prévues dans cette annonce. Juste pour vous dire qu'au terme effectivement de ce travail, qui a été une collaboration très fructueuse, très intense également au cours des dernières semaines, nous nous retrouvons devant un projet de règlement qui permettra un contrôle plus rigoureux sur les activités de production animale existantes et sur leur expansion, afin bien sûr de protéger la santé publique et aussi l'environnement tout en constituant également, en perspective, un support important pour l'industrie.
Ce règlement donc qui interdit l'établissement de toute nouvelle exploitation porcine dans les zones d'activité limitées, il permettra, le cas échéant, un accroissement raisonnable des exploitations porcines existantes dans les zones d'exploitation limitées, mais à des conditions, comme vous l'aurez noté, qui devront être respectées. Ainsi, pour accroître son cheptel, le producteur devra obligatoirement maintenir l'équilibre en phosphore de sols récepteurs, soit, par exemple, par la propriété de terres suffisantes pour l'épandage des fumiers, soit par l'allocation de terres ou par des ententes d'épandage écrites, soit par un traitement complet des déjections animales.
En somme, on convient, en adoptant ce projet de règlement et ce règlement, de gérer rigoureusement les fumiers notamment pour protéger les sources d'eau potable. IL s'agit d'un règlement qui constitue pour nous une application du principe effectivement de précaution et représente un gain significatif dans une perspective de santé publique. Je vous remercie.
M. White (Patrick): Alors, je vais prendre les questions en français suivies des questions en anglais. J'apprécierais que les journalistes me fassent signe et je vais leur accorder les questions. Première question, Robert Dutrisac, du Devoir .
M. Dutrisac (Robert): Oui. Ma question est par rapport aux avis de santé publique que vous avez reçus pour la Montérégie et Chaudière-Appalaches. Là, on nous annonce quelque chose qui devrait régulariser la situation en 2010. Alors, dites-moi: Qu'est-ce qu'il va en être justement des questions de santé publique d'ici là?
M. Boisclair: Alors, l'objectif est de faire en sorte qu'on soit capable d'améliorer notre connaissance. Les avis de santé publique qui ont été déposés, qui ont été rendus publics, l'an dernier, font état de possibles liens entre des problématiques de santé et la réalité de la production agricole. Les spécialistes de santé publique disent bien que la production agricole causerait possiblement des impacts sur la santé. Nous voulons répondre à cette question bien précise posée par les gens de Santé publique. C'est pour cette raison que de concours avec l'Institut national de santé publique, le ministère de l'Environnement et le MAPAQ, appuyés aussi par le comité d'éthique des spécialistes du Centre hospitalier de l'Université Laval que nous conduisons, au moment où nous nous parlons, des études pour véritablement savoir s'il y a des impacts sur la santé.
Nous faisons aussi le nécessaire pour assurer la protection des puits et des cours d'eau. Vous savez qu'un règlement sur le captage des eaux souterraines vient d'être adopté par le gouvernement du Québec; il était en prépublication depuis plus d'un an. Hier, le gouvernement du Québec a donné son approbation finale, il sera publié dans la Gazette officielle dans les prochains jours. Mais, essentiellement, nous voulons établir alentour de chacun des puits qui servent à alimenter la population des périmètres de protection qui nous assureront de l'impossibilité de contaminations qui seraient liées par des activités agricoles. La grande nouveauté de ce règlement, c'est que ces périmètres de protection ne seront plus établis en fonction de paramètres définis de façon subjective, mais bien en fonction de la réalité objective de chacun des sols à l'entour des puits. Il y a donc là pour nous une obligation de résultats.
Nous allons aussi, cet été, poursuivre le programme d'échantillonnage des puits qui a été lancé... l'appel que nous avons lancé à la population de faire tester leur eau, nous allons maintenir le programme que nous avions lancé l'an dernier. Des milliers de Québécois et Québécoises ont fait le choix de faire tester leur puits, donc ces puits qui servent à abreuver une unité familiale; donc, on ne parle pas ici des puits qui servent à alimenter une municipalité. Nous invitons et nous inviterons la population à poursuivre leur effort pour toujours s'assurer de la qualité de l'eau qu'ils boivent.
Nous allons aussi faire en sorte de nous attaquer – et c'était là notre défi – non pas uniquement à la croissance, mais de nous attaquer aux actuels surplus qui sont concentrés dans les trois régions du Québec qui sont plus problématiques. Une des façons, pour nous, réaliste d'y arriver, c'est de faire en sorte que nous puissions atteindre un équilibre en 2010. Il serait irréaliste de penser que cet équilibre peut demain être atteint, c'est le genre d'efforts qui doivent être faits sur une période de temps suffisamment longue. Nous nous donnons cependant un test de mi-mandat: en 2005, je devrai, dans la réglementation, faire rapport sur l'application du règlement, et il y aura une norme phosphore intermédiaire qui sera établie. Mais je rappelle qu'en toutes circonstances nous nous retrouvons encore avec des sols où, depuis des décennies, nous accumulons du phosphore. Ce que je vais tout simplement faire par la réglementation, c'est de m'assurer qu'on n'ajoute pas aux actuels contaminants qui sont présents dans les sols. Je discipline donc la croissance, je discipline aussi les pratiques actuelles.
Mais nous nous retrouvons au Québec, dans trois régions en particulier, avec des surplus importants de phosphore qui sont présentement dans les sols. Et c'est pour cette raison que la façon correcte de répondre aux impératifs de santé publique, c'est de régler le problème à moyen terme mais s'assurer aussi qu'à court terme, qu'alentour des puits, nous ayons les paramètres de protection nécessaires pour éviter des problèmes de contamination, comme ceux d'ailleurs qui se sont produits à Walkerton. Vous savez qu'à Walkerton, c'est une contamination qui venait de la proximité d'un puits. Et en établissant ces paramètres de protection, je pense donner l'assurance nécessaire aux Québécois et aux Québécoises, aux spécialistes de santé publique que nous faisons le nécessaire.
M. Roy (Patrice): Une deuxième question.
M. Dutrisac (Robert): Maintenant, en ce qui a trait à l'équilibre à atteindre, il est évident, si je comprends bien, que là où les terres sont saturées de phosphore, il n'y aura plus d'épandage sur ces terres-là, et c'est dans les régions où il y a une culture intensive...
M. Boisclair: Il n'y aura pas d'épandage? Il y aura encore de l'épandage.
M. Dutrisac (Robert): Mais si vous ne voulez pas en rajouter?
M. Boisclair: Mais il y en a en ce moment.
M. Dutrisac (Robert): Je parle dans les terres saturées.
M. Boisclair: Ce que nous faisons par la réglementation. Le nouveau règlement sur les exploitations agricoles prescrit que tout nouvel établissement devra se retrouver – et là, de toutes productions confondues – devra se retrouver dans une situation d'équilibre, pour tout nouvel établissement. Pour ceux qui existent, nous nous donnons un horizon de 2010 pour atteindre l'équilibre et, dans le cas des municipalités qui sont en surplus, là où les problèmes se posent avec davantage d'acuité, nous imposons un temps d'arrêt d'une période de deux ans pour la production porcine. Donc, du général au spécifique.
M. Dutrisac (Robert): Mais ça, c'est pour les nouveaux établissements ou pour les agrandissements. Moi, je parle de l'exploitation actuelle qui a conduit aux surplus qu'on connaît à l'heure actuelle et la saturation de certaines terres. Je crois comprendre que l'effet direct de la réglementation va faire en sorte que l'épandage qui se fait à l'heure actuelle sur ces terres déjà saturées va cesser, puisqu'on recherche l'équilibre.
M. Boisclair: Pour atteindre l'objectif de sols en équilibre en 2010 et du test de mi-mandat en 2005, il y a d'abord un pari, celui que Maxime – et Maxime, sans doute, tu souhaiteras compléter – mais celui de l'investissement dans les technologies. Parce qu'un agriculteur qui, aujourd'hui, dans une municipalité, qu'elle soit en surplus ou pas, qui épand en fonction des règles actuelles, devra d'ici 2005 et d'ici 2010, se conformer à de nouvelles règles. Quels sont ses choix à cet agriculteur? La question des technologies, des ententes de location pour épandre sur davantage de surfaces qu'il ne le fait en ce moment, la possibilité aussi de diminution de cheptels mais qui n'est pas une solution qui est celle que nous souhaitons. Nous pensons que le pari fait par le gouvernement du Québec dans l'investissement des technologies va donner des résultats; ou aussi, la quatrième possibilité, c'est que l'exploitant agricole achète de nouvelles terres, mais on connaît aussi le coût des terres dans ces régions en surplus.
Donc, pour se conformer à la nouvelle réglementation, il y a une série de possibilités, et nous privilégions – par les investissements qui sont annoncés par le ministère de l'Agriculture – nous privilégions bien sûr un investissement dans les technologies qui permettent à l'agriculteur de continuer sa production mais de le faire dans le respect des normes environnementales. Mais il y a une obligation de résultat. Quel que soit le chemin que prend le producteur agricole, il devra se conformer au test de mi-mandat et à l'équilibre en 2002.
M. Arseneau: Bien, peut-être que je peux ajouter. De toute évidence, votre question porte sur les zones qui sont en surplus actuellement. Alors, il y a un nouveau règlement qui arrive et il y a une période de transition. Alors, ce que le nouveau règlement prévoit, entre autres, c'est qu'il y aura un bilan ferme par ferme. Donc, on va aller visiter chacune des entreprises existantes pour faire le bilan, et là, il y a une analyse qui va être faite. Est-ce que ça respecte l'équilibre, enfin tout le règlement, la suite évidemment en dépend.
En ce qui concerne ces zones qui sont actuellement en surplus, pour leur part, nous disons: aucune nouvelle porcherie. Pour les entreprises existantes, au fur et à mesure que le bilan se fera, ils devront se conformer aux nouvelles normes. Alors là, il y a traitement; il y a aussi d'autres possibilités pour permettre à ces gens-là de respirer, parce que ce sont des entreprises qui existent. Notre objectif n'est pas d'étouffer ces entreprises-là; et pour les autres productions, alors là, à chaque fois, vous allez voir dans les possibilités soit la propriété des sols ou soit encore le traitement. Le traitement c'est bien sûr la clé.
Le traitement, il existe. Théoriquement, nous avons des vitrines au Québec que nous avons financées. Nous allons mettre l'emphase sur la recherche et le développement pour permettre à ces traitements d'être économiquement rentables aussi. Il faut rentabiliser ces investissements que représente le traitement. Alors, nous allons donc accélérer et nous allons faire en sorte de permettre le traitement des surplus dans les zones dont vous parlez.
M. Boisclair: J'ajoute un petit élément qui est important pour vous: les charges phosphore en ce moment calculées par le ministère de l'Environnement et utilisées par la santé publique sont des charges qui sont surestimées. On parle, dans certains cas, d'une surestimation d'au moins 20 %. Pourquoi? Parce que le calcul des charges phosphore se fait en fonction d'une règle de trois et non pas en fonction des déjections réelles, d'où l'intérêt de tenir compte de ce qu'on a appelé dans notre jargon, là, des déjections sous la queue, des rejets réels, Et on aura donc, avec le plan de fertilisation ferme par ferme, un bien meilleur portrait de la situation. Mais il est clair en ce moment que les charges phosphore dans les sols sont surestimées par rapport à ce qui est réellement émis. Pourquoi? Parce que des techniques alimentaires modernes font en sorte que les animaux produisent moins de phosphore que la règle de trois qui était utilisée par le ministère nous le laissait entendre.
Une voix: Même la génétique?
M. Arseneau: Non, puis les Holstein d'aujourd'hui ne mangent pas de la même façon.
M. Dutrisac (Robert): ...les régions dont on parle, il y a une accumulation de phosphore qui dépasse largement le 20 % dont on parle là.
M. Arseneau: Alors, on va retrouver un équilibre.
M. White (Patrick): Deuxième question, Claude Brunet de Radio-Canada.
M. Brunet (Claude): Un tempe d'arrêt de 24 mois ou 18 mois, c'est selon. Pourquoi un temps d'arrêt de cette période si court alors que l'objectif ne sera atteint que dans huit ans?
M. Boisclair: Le temps d'arrêt pour moi est nécessaire pour que l'intervention du ministère de l'Environnement soit une intervention qui soit crédible. J'ai besoin de temps d'abord pour monter les banques de données et avoir accès à l'ensemble des données sur les cheptels qui sont détenus par La Financière agricole.
Nous venons de régler un débat qui est vieux de plus de 10 ans entre différentes organisations publiques. Cette question est derrière nous; je dois monter des banques de données.
Il faut que je procède à la dotation. J'ai près d'une centaine de personnes qui sont autorisées, 100 postes, qui sont autorisés. Il faut que je procède à la dotation.
Le message très clair que je veux donner à la population québécoise est à l'effet que nous prenons les moyens nécessaires, avec les bonnes informations et les effectifs nécessaires, nous prenons les moyens et le chemin qu'il faut pour que notre intervention soit crédible. Et, pour qu'il y ait une intervention crédible du ministère de l'Environnement, il faut un certain temps; ce temps sera aussi utile pour que nous puissions établir le bilan phosphore de chacun des établissements agricoles au Québec. Voilà pourquoi ce temps d'arrêt nous apparaît nécessaire. Par la suite, les nouvelles règles s'appliqueront et les Québécois et Québécoises pourront en avoir confiance, pour avoir confiance dans ses règles puisqu'elles seront appliquées avec rigueur, mais appliquées aussi avec des informations qui correspondent à la réalité.
Vous savez, en ce moment, qu'une des difficultés déjà dénoncées par le Vérificateur général dans un de ses rapports, c'est toute la question des données qui ne sont pas toujours les mêmes, puisque les agriculteurs ne déclarent pas nécessairement les mêmes chiffres à l'Environnement qu'ils déclarent à La Financière agricole. Je règle cette question.
Et je pense que les Québécois et Québécoises pourront avoir confiance, grâce au temps d'arrêt, grâce aux nouveaux moyens, grâce aux effectifs, ils pourront avoir confiance dans l'intervention du ministère de l'Environnement.
M. Bertrand (Portneuf): En complément, juste mentionner que, dans une perspective effectivement de santé publique, on a besoin de données dures là, pas de travailler sur des approximations. Alors, il nous semble effectivement nécessaire, dans un cas comme dans l'autre, c'est-à-dire le 24 mois et le 18 mois, d'avoir cette période-là pour nous permettre d'avoir un bilan solide, firme par firme, sur la base duquel bilan on peut aviser pour la suite des choses.
M. Boisclair: Le rapport du BAPE, c'est au moins 18 mois aussi. Les dates concordent, là. Le rapport du BAPE va... le BAPE va faire son travail. C'est un des éléments-clés, là. Nous ne prétendons pas, ici, aujourd'hui, répondre à toutes les questions qui sont posées par les Québécois et Québécoises. Nous prenons une grosse bouchée, un nouveau règlement, un temps d'arrêt, des effectifs, mais nous savons que d'autres questions doivent être débattues, et c'est pour cette raison que j'accorde énormément d'importance au travail qui sera fait par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Nous aurons une bonne discussion de famille au Québec qui va se poursuivre, mais qui va se poursuivre, non pas avec la menace de nouveaux établissements qui susciteraient des problèmes d'acceptabilité sociale. Le temps d'arrêt va permettre qu'au Québec, nous pourrons avoir une discussion sereine avec un processus de consultation qui est éprouvé avec des gens qui sont compétents qui dirigeront cette consultation et nous pourrons lucidement sans pression regarder l'ensemble des questions et nous attendre aux recommandations qui seront faites par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.
En somme, il y a un processus, aujourd'hui, on prend une bonne bouchée, on assume du leadership, on dit qu'on s'inspire et on s'inspire du principe de précaution, on met avec les moyens qui sont les nôtres puis avec beaucoup d'intentions et d'enthousiasme le principe de développement durable en oeuvre, on règle plusieurs problématiques environnementales, on donne de nouveaux appuis aussi au monde agricole dans un contexte où il importe de faire en sorte que notre réglementation assure le développement durable et, à terme, ce que nous recherchons toujours, c'est une solution qui soit gagnante.
Et je veux insister sur le fait que si certains voient dans notre réglementation un geste dur posé par le gouvernement du Québec, je voudrais leur rappeler que le signal que le marché pourrait leur envoyer pourrait être un signal encore plus dur. Nos producteurs sont fiers de la qualité de leurs productions, ils sont fiers de cette qualité, ils s'en servent même comme argument pour vendre sur des marchés étrangers. Leur donner aujourd'hui une réglementation de qualité, une des plus progressiste au monde, c'est faire en sorte que les Québécois et Québécoises soient encore plus fiers de leur travail et c'est de faire en sorte aussi que lorsque nos producteurs se présenteront à l'étranger pour vendre leurs productions, ils pourront avec toute fierté dire: Nous avons les autorisations requises du ministère de l'Environnement, nous avons une étiquette Québec, une étiquette verte donnée par le gouvernement du Québec qui assurera la pérennité de l'accès à ces marchés, puisque, vous le savez, plusieurs personnes de l'étranger, lorsqu'ils achètent de nos produits, exigent des normes de certification et si des gens pensent que la discipline qu'impose le ministère de l'Environnement et le gouvernement du Québec est une discipline qui est dure, je les mets en garde, la discipline du marché pourrait être encore plus dure que la réglementation environnementale. Et, si tel était le cas d'un message fort envoyé par les marchés, c'est le ministre de l'Environnement qui se ferait accuser de laxisme.
Et on l'a vu ce que ça a donné dans les pêches. On a vu ce que ça a donné dans la forêt. Il fallait poser ces gestes, et nous le faisons non seulement au nom de principes environnementaux, mais nous le faisons aussi parce que nous sommes soucieux d'assurer le développement durable de cette industrie. Nous le faisons parce que nous voulons assurer la qualité et la protection du capital investi dans ces entreprises.
M. Arseneau: J'aurais voulu ajouter, puisqu'il s'agit d'une solution équilibrée, je pense, alors je voulais équilibrer les réponses que nous donnons aussi.
En regard de la durée du temps d'arrêt, je pense qu'il faut comprendre que, dans les zones qui ne sont pas en surplus, certains trouveront que la durée du temps d'arrêt est longue. Et la problématique à ce niveau, c'est une problématique d'acceptabilité sociale. C'est ça dont j'ai parlé tantôt. Nous ne voulons pas déplacer non plus le problème dans ces zones qui ne sont pas en surplus. Mais nous pensons qu'avec le débat qui se fera au Québec, toute la question de la commission et du BAPE où nous allons penser un développement de cette production ou des autres productions québécoises, mais en particulier la production porcine, nous pensons que nous allons permettre justement à cette industrie de retrouver un rythme de croissance normale et nécessaire pour que les Québécois et les producteurs québécois, qui sont en effet des gens qui sont très fiers de leur métier mais aussi qui produisent un produit de qualité, recherché, pourront continuer justement à démontrer leur capacité et leur fierté.
Et, moi, je pense que c'est en travaillant ensemble, collectivement... Vous savez, ce n'est pas simple le problème de l'acceptabilité sociale, ça repose sur toutes sortes de considérations. Mais, une chose est certaine, les producteurs agricoles du Québec, et les producteurs de porcs en particulier, sont parmi ceux qui sont les plus préoccupés par ces questions environnementales – ils viennent tout juste de remporter un Phénix de l'environnement quant à la... ce n'est pas moi qui les remets là...
M. Boisclair: C'est moi qui les remets.
M. Arseneau: ...et, par rapport à la sensibilisation qu'ils font de leurs membres en regard de l'importance de bonnes pratiques environnementales. Et ce sont les premiers à signifier au gouvernement qu'ils sont intéressés à aller du côté de concept comme l'écoconditionnalité, qui est un concept très important, dont André a souligné le fait que nous allons dans cette direction. C'est déjà inscrit dans la loi n° 184. Les producteurs de porcs ont mis en place un comité avec nous pour voir comment on peut aller le plus rapidement possible dans l'application réelle de ce concept. Alors, je pense que c'est vraiment une solution équilibrée que nous proposons.
M. White (Patrick): Gilbert Lavoie, Le Soleil .
M. Lavoie (Gilbert): M. Arseneau, on me disait tantôt que le prix du porc actuellement est à la baisse sur les marchés internationaux et, en même temps, le plus fort taux de croissance de nouvelles productions porcines se fait dans les provinces de l'ouest et au Nouveau-Brunswick. Ce qu'on annonce aujourd'hui inévitablement va avoir un impact sur les coûts de production des producteurs québécois. Est-ce que vous prévoyez que les producteurs québécois vont pouvoir demeurer compétitifs ou que certains d'entre eux devront peut-être vendre leurs fermes? Est-ce qu'ils vont être compétitifs par rapport à d'autres producteurs qui ont des contraintes environnementales moins fortes?
M. Arseneau: C'est une question complexe que vous posez. Mais d'abord, sur la question du marché, alors, ça, il faut comprendre que justement le prix du porc, c'est le marché international qui le fixe. Actuellement, à cause de problématiques européennes et autres, le prix des viandes rouges et du porc s'est maintenu et a augmenté. Il y a des périodes de variation. Maintenant, il y a des risques aussi pour les producteurs de porcs à investir alors que le prix est fixé par le marché. Ils n'ont aucune protection en regard de l'avenir de cette production et, surtout, ils se souviennent d'années qui ont été très difficiles pour les producteurs de porcs.
Quelle est la situation maintenant en regard de la compétitivité et de l'impact de ce que nous annonçons sur l'industrie porcine au Québec qui génère des retombées de 1,3 milliard? Il y a 30 000 emplois de liés à cette industrie-là, c'est très important dans plusieurs régions du Québec. Alors, je pense qu'il faut réaliser – et les Québécois, c'est ça qu'ils disent – il y a actuellement, avec cette production qui a connu une expansion importante, dans certaines régions du Québec, des problématiques environnementales importantes qui risquent d'être liées à cette production. Donc, les décisions gouvernementales à ce moment-là s'expliquent, se comprennent.
En ce qui concerne le développement de cette production, dans les zones qui ne sont pas encore en surplus, je pense qu'on doit trouver une façon qui permettra une croissance de la production, acceptable pour les citoyens, normale et nécessaire pour l'industrie porcine. Maintenant, je pense qu'on doit tabler, premièrement, sur l'avance technologique que nous avons au Québec en regard de cette industrie. Pourquoi les autres sont en train d'essayer de nous rattraper? Parce que nous avons développé non seulement une expertise mais aussi un produit de qualité que nous transformons, en grande partie, au Québec. C'est la valeur ajoutée que nous donnons à cette production qui est importante. Je pense que c'est là-dessus aussi qu'il faut tabler. Mais il faut comprendre une chose: la production agricole québécoise est une production équilibrée dans l'ensemble alors que, ailleurs au Canada, ils sont aux prises avec des problématiques importantes en regard, entre autres des productions: des monocultures et des grandes cultures de céréales, et ils sont sous le coup aussi des marchés de ces céréales en regard du Farm Bill et d'autres considérations.
Alors, je pense qu'au Québec, nous avons donc une agriculture équilibrée, nous avons des moyens adéquats que nous mettons à la disposition des agriculteurs, et pour répondre, faire la boucle à votre question, je pense que les moyens, le programme d'investissement que nous annonçons pour soutenir nos agriculteurs dans ces mesures d'adaptation qui sont nécessaires leur permettront de demeurer en business et compétitifs.
M. White (Patrick): Dernière question en français, Gilles Morin, Radio-Canada.
M. Morin (Gilles): Oui, M. Boisclair, j'ai de la misère, vous avez un règlement qui est plus sévère dans l'ensemble, mais pour la protection des cours d'eau, vous rapprochez la zone d'épandage de cinq mètres à 3 mètres, c'est encore plus problématique. Comment vous pouvez expliquer que vous protégez mieux les cours d'eau si vous rapprochez la zone d'épandage?
M. Boisclair: Il y a un gain environnemental net, nous ajoutons 400 000 kilomètres de protection supplémentaire pour l'ensemble des fossés au Québec qui n'étaient pas couverts par la réglementation. En plus de cela, la bande riveraine maintenant établie dans le règlement, qui peut être bonifié par une intervention municipale, couvre non seulement les engrais organiques, elle couvre aussi les engrais chimiques. Et le fait qu'on diminue de trois à un n'a aucune impact sur l'environnement. Les dispositions sur les bandes riveraines constituent un gain net pour l'environnement, nous ajoutons 400 000 kilomètres de protection supplémentaire pour l'ensemble des fossés, et là, il y avait un vrai problème...
M. Morin (Gilles): Oui, mais les ruisseaux, les rivières, les étangs...
M. Boisclair: Mais, de diminuer de trois à un, et là, je peux demander à M. Baril qui est un agronome de vous expliquer ces choses encore mieux que moi, le fait de diminuer de trois à un ne change rien, ne donne aucun impact sur les cours d'eau. Et il faut rappeler qu'il y a un gain parce que, auparavant, la règle de trois ne s'appliquait pas sur l'organique et le chimique; maintenant, la règle de un s'applique pour l'organique et pour le chimique. Au net, c'est un gain clair pour l'environnement.
M. White (Patrick): En anglais, John Grant, CTV.
M. Grant (John): M. Boisclair, when will Quebeckers see measurable improvement in the environment?
M. Boisclair: They will see the first results in 2005, the time by which I'll make the report, a very public report on the impact of the reglementation. But let me tell you that this reglementation will have an impact on the development of the industry not in five years, starting tomorrow the reglementation will have an impact on the productors and starting tomorrow the new rules will apply, so we are starting the process tomorrow. And I'll have to make a report in 2005 and I'll make sure that the steps that have been taken, the new staff that I do have in my department, the quality of information that I will have to manage the industry, the new practices also imposed in the reglementation, the support given by the Government to agricultors will have an impact tomorrow. And we're starting the process and I'll make report to the public in 2005.
M. Grant (John): Right now, when we talk about hog production, more and more you have to talk about highly integrated industrial production and we're not talking agriculture very much anymore.
M. Boisclair: As any industrial sector.
M. Grant (John): And I'm wondering if, given that and given the delays that are built in here, you're insisting you're not more tolerant of agricultural pollution than you'd be of something that had a smokestack for example.
You are not more tolerant of agricultural, industrial-agricultural pollution than you would be of some other industry like smokestack industries.
M. Boisclair: What can we do more that what we're doing right now? We are imposing a freeze for the next 24 months in all regions that are in surfaces. Elsewhere in Québec, 18 months.
We are also proposing to Quebeckers a public debate conducted by the Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. I think that we have a fair solution. It's a win-win solution for the environment and for the productors, and I feel that, by the quality of the debate that will be presided by the Bureau d'audiences publiques for l'environnement, we will be able to present also new measures to Quebeckers.
I'm not here answering all the questions that I've been asked by Quebeckers. I'm taking a giant step thought and the new reglementation, the financial support given to productors, the new staff that will be in my department, all of these I think is a plus for Quebeckers, is a plus for the environment. And I'm sure that with time, with the public debate, we will be able, in a context where will be able to have a sereine debate in Québec, I think that we will be able to tell to Quebeckers that when we are talking about the protection of the quality of water, we are serious.When we say that Québec is not only... and the development of Québec is not only determined by the force of the market where offers and demands set the quality of the development, we are serious. We are here saying that we, Quebeckers, we also have values and we feel that the protection of the environment is a strong value of all Quebeckers. We've seen it very publicly.
And we are saying publicly today that not only with words, but with action, with financial support, we want to make sure that the development of the agricultural industry is made with respect, with all the principles of sustainable development.
M. White (Patrick): Une dernière question en anglais. Rosemary Barton de Global News.
Mme Barton (Rosemary): Mr Boisclair, about something you said in French about levels of phosphore being overestimated by 90 % because of the way you evaluate that right now, kind of on an average basis. I'm wondering, because of this overestimation, do you really need a moratorium that lasts so long? Could these measures be regarded as too strict because you're saying that the problems aren't really as bad as we think.
M. Boisclair: No, the time needed for the moratorium is to make sure that the public debate is conducted. The time is also necessary for us to make sure that we have all the administrative tools to make sure that we are credible when we talk about the intervention of the Québec Government. These delays are necessary to make sure that the new reglementation that I'm implementing will be able to give all the credibility necessary to such reglementation to all Quebeckers.
Mme Barton (Rosemary): Would it be fair to say that the problem isn't as bad as we think it is if you're saying that it's 20 % overestimated?
M. Boisclair: No. The problem is bad. Not only are we stuck with «agriculteurs» that do put more phosphore in the soil that plants need to grow. We have a stock of phosphore in the soil and it will take a certain time to get rid of these surpluses, so I think that the intervention is justified.
M. White (Patrick): Merci, tout le monde.
(Fin à 12 h 40)