Point de presse de M. Raymond Bachand, porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances
Version finale
Monday, May 6, 2013, 13 h 15
Salle Bernard-Lalonde (1.131),
hôtel du Parlement
(Treize heures dix-huit minutes)
M. Bachand: Bonjour, par ce beau lundi à Québec, plaisir de vous voir.
Alors, aujourd'hui, nous interpellons le ministre des Finances du Québec parce que nous sommes inquiets. Le ministre des Finances vient de faire une mise à jour économique il y a cinq semaines, six semaines, et déjà, depuis ce temps, la première ministre l'a contredit trois fois, a mis en doute l'équilibre budgétaire, a mis en doute les revenus. Alors, déjà, dans cette mise à jour, il y avait une baisse de revenus importante entre le budget et la mise à jour. Y en a-t-il d'autres? Y a-t-il des informations qu'ils cachent, qu'ils savent? Mais le ministère des Finances, normalement, c'est sérieux. Donc, inquiétudes sur le cadre des finances publiques, inquiétudes sur le cadre des revenus de l'État.
On sait qu'il y a une baisse d'investissements privés au Québec. Là, je vais vous épargner, là, les chicanes entre la CAQ et puis le PQ sur les statistiques d'investissement à Québec. On va prendre juste StatCan. Statistique Canada, dans son rapport annuel qu'il fait et qu'il a fait au mois de mars - très, très, très récemment - vous donne les investissements privés et publics au Québec, non résidentiels - restons dans tout l'investissement privé - et qui vont baisser de 2,9 % en 2013. On avait des années de hausse, 21 milliards, 23 milliards, 26 235 000 000 $, on baisse à 25 483 000 000 $. On baisse particulièrement dans la fabrication, dans le manufacturier, après, là aussi, trois années de hausses consécutives: 2010, 2011, 2012. 2012, si on veut faire un peu de politique, là, c'est quand même nous autres, là, quand on est dans des années de calendrier. Ça baisse en 2013. Les mines et le pétrole, ça baisse en 2013.
Ajoutez à ça que, dans les crédits, M. Bédard, il lui reste 400 millions à identifier pour l'année en cours, plus 100 millions qu'il n'a pas réussi avec les médecins... Alors, les revenus, en théorie, sont solides. En pratique, ils sont douteux, si on croit la première ministre. Puis, les dépenses, ça crée une double impasse.
Maintenant, ce 400 millions là, peut-être que, cet après-midi, il va respecter son engagement électoral puis il va nous annoncer qu'il va chercher 400 millions de plus dans les redevances minières. C'est possible. À ce moment-là, il n'aura pas parlé des deux côtés de la bouche, il aura respecté ses engagements électoraux et il équilibrera les finances publiques.
Baisse des investissements... Puis je vous rappellerai, vous savez, on a perdu 30 000 emplois au cours des deux derniers mois. Alors, voilà pourquoi il nous paraissait important d'interpeller le ministre des Finances cet après-midi.
Mme Prince (Véronique): Mais vous ne pensez pas que la conjoncture économique y est aussi pour quelque chose? Tu sais, vous avez parlé mines, pétrole en baisse, le cours des métaux est en baisse. Vous avez aussi... C'est sûr que la crise financière remonte à il y a quelques années, mais peut-être qu'on en subit encore les impacts au niveau manufacturier puis la fabrication. Vous ne pensez pas que le contexte y est pour quelque chose?
M. Bachand: Il y a deux conjonctures: il y a une conjoncture économique mondiale puis il y a une conjoncture québécoise péquiste. Puis la conjoncture péquiste est celle qui nous fait mal. Ils ont commencé l'automne dernier. Souvenez-vous - on dirait que c'est dans un autre siècle - l'automne dernier, les incertitudes que M. Marceau faisait... rétroactivité, taxe sur le capital. Tout a arrêté net. Puis, en plus de ça, vous traitez toutes les minières de voleuses puis vous allez doubler le régime de redevances.
Mme Prince (Véronique): Vous auriez fait mieux si vous étiez encore au pouvoir?
M. Bachand: Oui. Oui. Il n'y aurait pas de doute sur l'équilibre budgétaire. Les investissements étaient là. Regardez les chiffres d'investissement au Québec. Parce que vous parlez de la crise financière, mais regardez, au Québec, on le sait, on est une des sociétés qui s'est... qui a remonté le plus rapidement. Mais 2011, 2012, les investissements étaient au rendez-vous et continuaient. Ça a été stoppé. Ça a été stoppé assez durement, assez raide. Bien sûr, dans les mines, il y a une conjoncture mondiale, mais il y a une conjoncture québécoise.
Vous êtes dans un siège social, là, vous, quelque part à l'étranger, puis là les prix des métaux bougent, puis vous avez 10 projets. Puis vous avez un nouveau ministre des Finances, une nouvelle ministre des Ressources naturelles, surtout, et une première ministre qui a promis qu'on doublerait les redevances minières. Vous ne savez pas comment vous allez être taxés. Vous dites à votre vice-président: Bien, le projet du Québec, là, tu m'en reparleras. Tu fais un autre projet.
Je vous le rappellerai que, pour les redevances minières, on a touché 30 millions par année pendant 10 ans. Nous avons fait la réforme des redevances minières, et on s'en va à 390 millions. Ça, c'est le chiffre de Nicolas Marceau et le chiffre de Raymond Bachand. 385, 395, je simplifie ça. On passe de 30 millions par année pendant 10 ans - oui, le Québec, il fallait qu'il change les choses - on s'en va à 390 millions. Je vous épargne les fluctuations. On a le même chiffre, dans son budget - Nicolas Marceau, dans son budget - et nous. Et là ils parlent, eux, d'amener ça... de doubler ça, hein? Je vous rappellerai... D'ailleurs, vous leur rappellerez cet après-midi, dans leur programme électoral, leur cadre financier. C'est très clair: 388 millions par année, c'est le double, et puis appuyé par la pub qui traite les minières de voleuses, c'est... à peu près.
M. Chouinard (Tommy): Mais, compte tenu des deux conjonctures dont vous parlez, pensez-vous que, malgré tout, le gouvernement doit atteindre l'équilibre budgétaire coûte que coûte cette année?
M. Bachand: Le gouvernement du Québec, c'est lui qui parle, c'est lui qui est là. Il est responsable de ce qui se passe actuellement. C'était important, au Québec, d'atteindre l'équilibre budgétaire en 2013-2014 parce qu'on a un défi démographique très différent des autres autour de nous. Nous, la main-d'oeuvre va commencer à manquer au Québec. Il va y avoir moins de gens pour payer les taxes demain. Puis deuxièmement on est endettés. On a d'ailleurs, paradoxalement - on en reparlera une autre fois - la même cible de dettes, Nicolas Marceau et moi, pour 2025. Alors, ne faites pas de grande crise de boutons sur la dette. Alors, l'équilibre budgétaire...
Journaliste: ...chute toujours
M. Bachand: Bien, il n'y aurait pas la chute si on avait été là, c'est tout ce que je peux vous... tout ce que je peux vous répondre.
M. Ouellet (Martin): Non, mais la question, précisément: Est-ce que...
M. Bachand: J'ai compris la question.
M. Ouellet (Martin): Bon. Est-ce qu'on pourrait comprendre la réponse?
M. Bachand: Mais la...
M. Ouellet (Martin): Vous ne voulez pas répondre, c'est ça qu'on comprend.
M. Bachand: La réponse, c'est que le ministre des Finances, il y a quatre semaines, vous dit: J'atteins l'équilibre budgétaire, j'équilibre mes comptes, les revenus ont baissé, mais j'ai des provisions, je paie moins d'intérêts et je suis en équilibre budgétaire. Alors, est-ce que moi, je vais aller questionner les chiffres du ministre des Finances avec des questions hypothétiques, vraiment théoriques, parler à la première ministre, là, qui...
Ils devraient se parler, tous les deux ensemble, hein? Parce que la première ministre, elle a beaucoup de plaisir à rencontrer en privé les gens d'affaires. Elle a rencontré Larocque Lapierre, ça, ce n'était pas en privé, elle a rencontré en privé les chefs syndicaux. Est-ce qu'on pourrait suggérer à la première ministre de rencontrer en privé son ministre des Finances puis peut-être de s'entendre sur les chiffres?
M. Chouinard (Tommy): Si vous étiez toujours ministre des Finances et que vous constatiez, donc, une chute des revenus - peu importe la source et l'origine du problème - est-ce que vous, ça aurait été envisageable, pour un gouvernement libéral, de reporter d'un an l'atteinte du déficit zéro?
M. Bachand: Bien, la question ne se pose pas parce que la question... nous avons atteint nos cibles budgétaires...
M. Chouinard (Tommy): Mais pourquoi on sent un malaise quand on aborde la question, ce que, vous, vous feriez s'il y avait une chute de revenus?
M. Bachand: Bien, c'est parce qu'en politique vous m'avez appris, le premier jour, à ne pas répondre aux questions hypothétiques ou Jean Charest m'a appris à ne pas répondre aux questions hypothétiques. La réponse, c'est que les cibles que nous avons fixées, année après année, nous les avons atteintes sans compression budgétaire autre que dans les services administratifs: le 10 %, les frais de publicité et les frais de formation. On atteignait nos cibles budgétaires, même 1 milliard de déficit de moins que prévu, un an, deux ans, trois ans. Et l'année qui s'est terminée, qui est moitié libérale, moitié péquiste, l'année 2012-2013, les cibles sont atteintes aussi. Il n'y avait aucune raison de ne pas atteindre l'équilibre budgétaire. Il n'y a pas de crise économique mondiale, là. Il y a des faiblesses, mais il n'y a pas de crise économique mondiale.
On me fait signe, l'interpellation va commencer.
M. Ouellet (Martin): M. Bachand, selon votre expérience, là, est-ce que ce serait une catastrophe qu'on remette à plus tard le retour de l'équilibre budgétaire?
M. Bachand: Ce qui est une catastrophe, c'est de ne pas avoir de crédibilité. Ce qui est une catastrophe, c'est de ne pas dire ce qu'on va faire. Ce qui est une catastrophe, c'est un gouvernement qui est une girouette, qui, pour satisfaire ses clientèles, promet une chose et fait le contraire le lendemain.
M. Ouellet (Martin): Mais vous ne répondez pas à la question, je m'excuse. Mais est-ce que ce serait une catastrophe...
M. Bachand: La crédibilité des... Moi, comme ministre des Finances, là, ce n'est pas vrai que je vais publier un budget en toute vitesse, improvisé, suivi, quatre mois après, cinq mois après, d'une mise à jour... il y a quatre semaines. Le ministre des Finances nous dit qu'il va atteindre l'équilibre budgétaire, alors je ne vois pas pourquoi, là, on se pose la question. Il n'y a pas de crise économique mondiale à ce moment-ci. Merci. Est-ce que... Are there any questions in English? Parce qu'il y a la...
Le Modérateur: On va prendre une dernière question en français.
M. Dutrisac (Robert): Mais M. Marceau soutient que les prévisions du ministère des Finances du mois de mars dernier tiennent toujours et que les modèles sur lesquels s'appuient ces prévisions-là sont très sophistiqués. Vous les connaissez, vous avez travaillé avec les mêmes fonctionnaires. Est-ce que vous accordez foi aux prévisions du ministère des Finances?
M. Bachand: Moi, j'accorde foi aux prévisions du ministère des Finances. J'ai quelques questions, là, sur les baisses de revenus, étant donné les baisses de PIB, mais, oui, j'accorde foi. C'est un ministère exceptionnel. Je suis sûr qu'on va même voir cet après-midi comment les experts du ministère des Finances se sont contorsionnés pour sauver la face du gouvernement en détruisant le moins possible cette industrie-là. Bien sûr, j'y accorde foi.
Ce que je ne comprends pas, c'est la première ministre qui met ça en doute depuis... à trois reprises depuis deux semaines et qui contredit son ministre des Finances. Il est à New York... D'ailleurs, vous mettrez la main sur son PowerPoint, je suis sûr qu'il dit qu'il s'en va à l'équilibre budgétaire. Et puis le même jour elle est à Larocque Lapierre - parce que c'est enregistré le vendredi, vous le savez - puis elle dit... elle pose un doute. C'est sérieux dans une société... Avez-vous déjà vu... M. Harper, il ne contredit pas Flaherty trois semaines après. S'il a quelque chose à lui dire, il va lui dire en privé, mais ils se parlent avant, ils se parlent pendant puis ils se parlent après.
Journaliste: Mr. Bachand, how would you...
Journaliste: M. Bachand, sur le renouvellement...
Le Modérateur: Une dernière en français, s'il vous plaît.
Journaliste: Oui, rapidement, sur le renouvellement du Parti libéral. M. Couillard, semble vouloir prendre ses distances par rapport à M. Charest, donner aussi plus de voix aux sympathisants du parti. Qu'est-ce que vous pensez de cette orientation?
M. Bachand: Bien, je pense que c'est important de renouveler le parti. Nous avions tous la même prise de position. Je suis content que Philippe, lui, ait le temps - il n'est pas en Chambre - donc, d'aller, effectivement, en province rencontrer les gens, rencontrer non seulement les militants, mais rencontrer aussi les groupes communautaires, les gens d'affaires pour reconnecter le parti un peu partout. C'est normal, après un changement de gouvernement, de faire ça et de se souhaiter de redevenir une coalition la plus large possible. Yes.
Mme Montgomery (Angelica): How would you qualify how this mining royalties scheme is being handled so far?
M. Bachand: Amateurs. Amateurs. For two years, they have treated the mining companies as thieves. They made advertising on TV during the election campaign with these big trucks, saying Quebeckers were being chipped out.
And so, what happens? For the first time in many years, mining investments are going down in Québec or are stopped. What you should remember this afternoon, and we'll see what he comes up with, is that we had a system which was an obsolete system, at $30 million per year of revenue. We changed it, going up to $390 million per year, the most expensive system in Canada. And the PQ promised to double that and bring it close to $800 million. That was irresponsible. We'll see what they do today, but the damage is done and it will be very, very long to correct.
Mme Montgomery (Angelica): Just quickly, then. The Minister of Natural Resources, at first, was not supposed to be present at this announcement. Now, we're learning that she's going to be there. How do you interpret the fact that she's... that there has been this change?
M. Bachand: Well, I'm not the Premier, but if my Minister of Natural Resources was not present at the announcement, I would ask her to resign.
Le Modérateur: Une dernière en anglais, Shawn.
M. Lyons (Shawn): I want to ask you: The new Couillard plan to renew the Liberal Party, to turn the page on the past, how do you feel about that, specifically the... there seems to be a lot of movement to sort of move away from «l'ère Charest» as it was with the Québec Liberal Party?
M. Bachand: No, I think that Mr. Couillard is doing is what I would have done. Basically, you're looking at the future, you're looking at the next decade, so you've got to go in the province, meet militants, meet the people in all groups of society, all spheres, and the cultural and economic fields, and build a platform and the militant's support for the next election and for the next decade. You've got to build... You never build your base on the past in our values, but you build for the future.
M. Lyons (Shawn): Does that mean that you are ashamed of what happened in the past with the Québec Liberal Party?
M. Bachand: No, not at all. Not at all. I don't think he's been critical also. And I think Quebeckers can see today how the Government of the past saved their jobs, rebuilt this economy and had the public finances in order, which seems to be doubtful today. Merci beaucoup.
Le Modérateur: Merci.
(Fin à 13 h 31)