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Commission permanente de l'éducation,
des affaires culturelles et des communications
Etude du projet de loi no 22
Loi sur la langue officielle
Séance du jeudi 20 juin 1974
(Dix heures huit minutes)
M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre,
messieurs!
Je voudrais d'abord informer les membres de la commission des
changements dont on m'a avisé. M. Springate (Sainte-Anne) remplace M.
Bérard (Saint-Maurice); M. Tardif (Anjou) remplace M. L'Allier
(Deux-Montagnes); M. Séguin (Pointe-Claire) remplace M. Parent
(Prévost); M. Beauregard (Gouin) remplace M. Phaneuf
(Vaudreuil-Soulanges), et les autres membres de la commission sont les
suivants: M. Charron (Saint-Jacques), M. Déom (Laporte), M. Cloutier
(L'Acadie), M. Hardy (Terrebonne), M. Lapointe (Laurentides-Labelle), M. Morin
(Sauvé, M. Roy (Beauce-Sud), M. Veilleux (Saint-Jean).
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais présenter une
motion pour changer le nom de M. Roy par celui de Samson.
M. HARDY: Nette amélioration! UNE VOIX: On ne se plaindra
pas.
M. SAMSON: On en revient à ce qui était
originellement.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Donc, M. Samson (Rouyn-Noranda) remplace
M. Roy (Beauce-Sud) qui, effectivement, remplaçait déjà le
député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Vous avez raison.
M. HARDY: Cela n'a pas été une heureuse initiative.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Pour le bénéfice de
nos...
M. SAMSON: Ne commencez pas.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): ... invités d'aujourd'hui, je
voudrais peut-être rappeler une règle de pratique quant au mode de
convocation des organismes à la commission parlementaire. Il est d'usage
normal et reconnu dans une commission parlementaire que tous les organismes
devant être entendus au cours d'une journée sont convoqués
pour la même heure le matin, soit pour dix heures. Malheureusement, il
est évident que tout le monde ne passe pas à la même heure.
Selon un exemple qu'on m'a soufflé à l'oreille tout à
l'heure, c'est la même situation que lorsque des témoins sont
convoqués à une cour; ils le sont tout à la même
heure, quelle que soit l'heure à laquelle ils vont être entendus.
Ce matin, cependant, on peut vous donner un aperçu de ceux qui vont
être entendus, suivant une entente...
M. CHARRON: Cordiale.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): ... cordiale intervenue entre les partis.
Trois organismes pourraient être entendus ce matin, soit The Montreal
Board of Trade, Provincial Association of Protestant Teachers of Quebec et le
Congrès canadien polonais. Pourquoi le Congrès canadien polonais
apparaît-il en dernier lieu? Déjà cet organisme avait
été convoqué, mais à cause d'une erreur technique,
il n'avait pu être entendu au cours d'une journée. C'est donc la
deuxième fois, aujourd'hui, qu'il apparaît devant notre
commission. Je vous fais donc part de l'entente intervenue entre les membres de
la commission.
J'inviterais le porte-parole du Montreal Board of Trade à
s'identifier ainsi que ceux qui l'accompagnent.
Montreal Board of Trade
M. HUGGETT: M. le Président, membres honorables de ce
comité, mesdames et messieurs, je suis Donald Huggett, président
du Montreal Board of Trade. Il me fait plaisir de présenter les membres
de notre délégation qui sont, à ma gauche, M. Claude
Tétreault, président de notre comité d'étude;
à ma droite, M. Bernard Finestone, trésorier du Board et M. Lorne
Tracy, directeur général du Board et, son adjoint, M. Alex
Harper.
The Montreal Board of Trade is pleased to be able to appear before you
to support and, if deemed necessary, to elaborate upon our brief relating to
the Official Language Act.
With your permission, Mr Chairman, I would like to read our submission
into the record.
The Montreal Board of Trade's prime concern, since its founding in 1822,
has been the commercial and industrial well-being of the City of Montreal, in
particular, and the Province of Quebec and Canada, in general.
The membership of the Board consists of approximately 2,900 firms in
Montreal and its environs, working in both the French and English milieu, with
over 8,000 representatives whose interests range through manufacturing,
distribution, finance, transportation, construction and the professions.
Tel qu'il l'a déjà indiqué à plusieurs
reprises, le Board estime que les principaux éléments de toute
politique linguistique gouvernementale devraient consister à :
I Tendre à réaliser les objectifs du Québec
en ayant recours à des incitations plutôt qu'en imposant des
sanctions et encourager l'usage du
français, sans pour autant limiter l'usage de l'anglais,
là où il est nécessaire.
II Doter le Québec d'un système efficace
d'enseignement des deux langues, afin que les nouveaux diplômés
puissent s'exprimer couramment en anglais et en français.
III Eviter de recourir à toute contrainte découlant
des mesures législatives ou administratives auxquelles pourrait donner
lieu une interprétation arbitraire de la part du personnel administratif
non élu.
Compte tenu de ces objectifs, le Board estime qu'un certain nombre de
dispositions du projet de loi 22 touchant la langue de l'administration
provinciale, de même que la langue du travail et des affaires,
répondent à ces critères et sont acceptables aux yeux de
la collectivité d'affaires.
However, in order to foster an environment of strong economic activity,
to continue to identify Montreal as an appropriate head office locale for
national and multinational companies and to identify the Province of Quebec to
all business as a desirable place in which to grow and prosper, the Board
respectfully submits that the proposed Act should be modified to encompass the
following points:
I.The Board is opposed to the institution of "francization" certificates
as contemplated in the bill because of the strong possibility of discrimination
and abuse. If certificates are to be introduced at all, they should only be
used as a means of qualifying their recipients for subsidies, grants and
guidance in connection with "francization" programmes. In any event,
certificates should certainly not be required to obtain "permits" or to meet
other legal requirements which may be necessary for the carrying on of a
business or a profession and which are in most cases of the nature of "rights"
rather than "privileges".
The Board reaffirms its belief that incentives rather than coercion have
a far greater chance of accelerating the progress already made in obtaining
greater participation of Francophones at all levels of business enterprises in
Quebec.
II.The languages of instruction should be explicitly stated to be both
French and English. in. The right of all parents to decide the language of
instruction of their children should be clearly affirmed.
IV. If, on the other hand, the children of future immigrants who do not
have sufficient knowledge of English are required to receive instruction in
French, the Board has serious reservations about the adverse effects of such a
policy upon immigration and the economy of this Province in future years. It is
understood that the Government may believe this move to be necessary in the
light of the drop in birth rate in Quebec in recent years and the enrollment of
most children of immigrants in the English schools, but the situation should be
watched carefully.
V. Those receiving their education must have an opportunity to acquire a
sufficient knowledge of oral and written English, just as those receiving
education in English must acquire a sufficient knowledge of oral and written
French.
In this Board's view, it is essential, both from a business and a
cultural point of view, that Quebecers be bilingual in French and English.
The bill, as drawn, might have serious consequences for francophones in
that the anglophones would be more likely to become bilingual and thus be in a
more favourable position in the labour market.
VI- As successfully provided elsewhere, for example, the Collective
Agreement Decrees Act, provision should be made for regulations under bill 22
to be published in proposed form in the Quebec Official Gazette, with notice
that any amendments may be proposed by interested parties within 30 days of
such publication. If, by the end of the notice period, any suggestions are
received, the Minister may order an enquiry to determine if the recommendations
are well founded. If no amendments are proposed, the order to establish the
regulations could come into effect from the subsequent date of publication in
the Quebec Official Gazette or from any other date that might be set.
VII- Because the ultimate application of many of the provisions of the
proposed legislation will rest on ministerial discretion and administrative
decision, this Board recommends that, to minimize potential problems stemming
from arbitrary interpretative determinations, a "Languages Ombudsman" for both
languages be constituted in the legislation.
Tout en comprenant les raisons qui ont motivé le gouvernement
à établir une politique linguistique définitive, le Board
est convaincu que si cette politique devait causer une entrave indue à
l'utilisation de l'anglais dans le domaine des affaires, elle causerait un tort
immense à la croissance économique de la région
montréalaise et du Québec en général. Les
sièges sociaux des entreprises nationales et internationales, ainsi que
les bureaux desservant une clientèle anglophone importante, sont d'une
importance vitale pour Montréal et le Québec. Aussi faut-il
veiller à maintenir un climat qui soit favorable à leur
croissance au sein de la province.
That, Mr Chairman, is our submission.
I would say that this Board has been in existence as a viable and
important organization since 1822, some one hundred and fifty two years and our
prime and major concern has been and is today directed towards the economic
advancement of the city of Montreal and its environs.
As such, we are neither Anglophone or Francophone. Our mandate is to
speak for business in Montreal and its vicinity and to see that business per se
is not disadvantaged in our milieu.
Our delegation is now prepared for questions and I am going to ask M.
Claude Tétreault to respond for us, since as chairman of our study
committee, he was involved in the preparation of the brief from the beginning
to end and as well is equally versatile in both languages.
Mr Chariman, the Board delegation is at your disposal.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Merci. Avant de procéder à
la période des questions, je voudrais vous informer que j'avais
oublié de nommer M. Saint-Germain, député de
Jacques-Cartier, comme membre de la commission et je voudrais faire part
à la commission que M. Tremblay, député d'Iberville,
remplace M. La-pointe, député de Laurentides-Labelle.
Le ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: M. le Président, je remercie The Montreal Board of
Trade pour la présentation de son mémoire. J'ai une remarque
à faire et une question à poser. La remarque est la suivante : A
la page 4 de la version française du mémoire, je note les points
6 et 7 qui me paraissent constituer des recommandations intéressantes.
Le gouvernement en tiendra certainement compte. J'ai toujours dit que,
même si le gouvernement n'avait pas l'intention de modifier le principe
de ce projet de loi, qui est un principe basé sur la justice,
l'équité, il était très certainement disposé
à revoir certaines des modalités, si des suggestions valables lui
étaient faites.
C'est dans cet esprit que nous allons étudier ces deux
recommandations comme nous avons d'ailleurs retenu un bon nombre de
recommandations faites par d'autres témoins devant cette commission.
Ma question est la suivante: En me référant toujours
à la page 4 de la version française de votre mémoire, au
numéro 6, je note que The Montreal Board of Trade dit comprendre le
gouvernement qui a établi une politique linguistique. En somme, The
Montreal Board of Trade semble admettre la nécessité d'une
politique linguistique.
Cependant, si on lit le reste du mémoire, on est presque
poussé à la conclusion que le Board of Trade
préférerait qu'il n'y ait pas de politique linguistique, parce
que la plupart des suggestions qui sont faites semblent annuler l'effet de la
politique linguistique telle que comprise dans le projet de loi 22. Ma question
est la suivante: Comment pouvez-vous expliquer ce qui, au premier abord, me
paraît être une certaine contradiction et est-ce qu'au fond vous
n'êtes pas satisfait de la situation actuelle, et que vous ne
préféreriez pas qu'elle continue sans intervention
législative?
M. TETREAULT: M. le ministre, si vous tournez à la page 2, il y a
le paragraphe qui commence ainsi: Compte tenu de ces objectifs, le Board estime
qu'un certain nombre de dispositions du projet touchant la langue sont
acceptables. Nous n'avons pas énuméré toutes ces
dispositions, mais, pour répondre à votre question, si nous
avions énuméré tout ce qui était acceptable, ce
serait peut-être autant que ce qui ne l'est pas.
M. CLOUTIER: Pourriez-vous quand même élaborer un peu
là-dessus? Qu'est-ce qui vous parait acceptable? Vous avez dans votre
mémoire établi des réserves en ce qui concerne surtout les
certificats de refrancisation.
M. TETREAULT: Certainement, M. le ministre. Pour commencer, aux
chapitres I et II, langue de l'administration publique, langue des entreprises
d'utilité publique, d'une façon générale, nous
sommes d'accord sur les dispositions en ce qui concerne la priorité du
français. Maintenant, il y a deux exceptions.
M. CLOUTIER: Dans votre esprit, il s'agit vraiment d'une priorité
donnée au français dans le cadre de ce projet de loi?
M. TETREAULT: Oui.
M. CLOUTIER: Parce qu'un certain nombre de témoins ont
prétendu qu'il n'y avait aucune priorité donnée au
français, qu'il s'agissait au contraire de bilinguisme.
M. TETREAULT: Non, ce n'est pas ce que nous prétendons.
M. CLOUTIER: Bon.
M. TETREAULT: Mais, d'une façon générale, sur les
chapitres I et II, nous sommes d'accord. Il y a deux exceptions: à
l'article 8, on parle d'énumérer des textes officiels, mais, dans
la version anglaise, on ne dit pas quels textes seront
énumérés. Je crois qu'il devrait y avoir un amendement
pour cela. Nous nous référons deuxièmement aux article 12
et 19. A l'article 12, la langue officielle est la langue de communication
interne de l'administration publique. Or, l'administration publique comprend
les universités. Je vois mal comment les professeurs de
l'université McGill, par exemple, peuvent se parler en français.
Alors, je crois qu'il doit y avoir certaines exceptions.
A l'article 19, la même chose; dans les hôpitaux
anglophones, on ne peut pas s'attendre que tout se fasse en
français.
Maintenant, passons au chapitre III: La langue du travail. Les articles
25 à 30. Nous sommes d'accord sur les principes contenus dans ces
articles avec une exception. En cas d'un grief d'un anglophone, par exemple,
qui donnerait lieu à un arbitrage, je vois mal pourquoi l'arbitrage ne
se ferait pas en anglais pour un individu. Vu qu'il a le droit de poser sa
plainte en anglais, pourquoi n'aurait-il pas droit
à un arbitrage en anglais? Je ne parle pas de compagnies. Je
parle d'un individu.
Chapitre IV: La langue des affaires. D'une façon
générale, nous sommes d'accord sur ce chapitre. Il y a une
exception au moins et c'est à l'article 40 où il s'agit de
l'usage du français qui ne peut pas être exclusif, à notre
point de vue. C'est l'étiquetage des produits. Alors, je vous
résume un peu ce que nous approuvons dans le bill.
M. CLOUTIER: C'est-à-dire que vous approuvez l'ensemble du
projet, sauf ce qui concerne le chapitre V. Vous êtes d'accord sur les
chapitres I, II, III, IV, avec des modalités qui sont, somme toute,
davantage des points d'éclaircissement.
M. TETREAULT: Excusez, M. le ministre. Nous sommes contre les
certificats de francisation.
M. CLOUTIER: Vous restez contre les certificats de francisation,
c'est-à-dire l'utilisation du pouvoir économique du gouvernement
pour refranciser les entreprises.
M. TETREAULT: Cela, nous sommes contre. Nettement contre.
M. CLOUTIER: Alors, je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: Messieurs, comme première question, j'aimerais vous
demander si le dossier "N" du rapport Gendron qui porte sur les sièges
sociaux, les centres de décision, à Montréal, a
été porté à votre attention. En particulier,
êtes-vous familiers avec les chiffres qui sont donnés à la
page 8 de ce dossier, où l'on peut lire ce qui suit: En ce qui concerne
la présence des francophones dans les sièges sociaux
montréalais et la répartition entre anglophones et francophones,
on constate grosso modo que, pour chaque catégorie de salaire en
commençant par les salaires les plus bas, on obtient ce qui suit: pour
les salaires de moins de $10,000, on trouve deux anglophones pour un
francophone.
Pour les salaires de $10,000 à $15,000, on trouve trois
anglophones pour un francophone. Pour les salaires de $15,000 à $20,000,
quatre anglophones pour un francophone. Enfin, pour les salaires de plus de
$22,000, on trouve six anglophones pour un francophone. J'aimerais
connaître les explications que le Board of Trade pourrait donner de la
condition des francophones dans les sièges sociaux
montréalais.
M. TETREAULT: C'est une question très générale que
vous me posez. Il n'y a aucun doute qu'il y a des statistiques, vous venez de
les mentionner, je ne les ai pas étudiées dernièrement.
Tout ce que je peux répondre à ça, c'est qu'il y a eu un
progrès assez considérable qui s'est fait dans ce domaine depuis
quelques années. Je ne peux pas vous répondre davantage que
ça. J'espère que ça va continuer.
M. MORIN: Est-ce que vous pouvez nous donner des chiffres tout de
même? Vous faites une affirmation que je trouve intéressante, mais
que j'aimerais pouvoir quantifier.
M. TETREAULT: Malheureusement, je ne peux pas vous... Je le vois
simplement dans mon entourage, si vous voulez. C'est une réponse
personnelle que je vous donne.
M. MORIN: Qu'est-ce que vous entendez par votre entourage? Le Board of
Trade ou...?
M. TETREAULT: Seulement la publicité qu'on voit dans les
journaux, les nominations qui se font aujourd'hui, accordées à
des Canadiens français qui, autrefois, ne l'étaient pas. Il s'est
fait un gros changement de ce côté.
M. MORIN: II y a quelque temps, la Chambre de commerce de
Montréal, avec laquelle, j'imagine, vous entretenez des rapports
cordiaux...
M. TETREAULT: Oui.
M. MORIN: ...avait soutenu que le nombre de postes de décision
dans les grandes entreprises devrait correspondre, devrait être
proportionnel à la part respective des francophones et des anglophones
dans la population du Québec. Cela aurait donné 80 p.c. ou 85
p.c. des postes, disait la Chambre, qui seraient détenus par des
francophones. Est-ce que le Board of Trade est favorable à une telle
distribution des postes de direction?
M. TETREAULT: Nous n'avons jamais discuté de ce problème,
je ne peux pas vous répondre de la part du Board of Trade ce matin, M.
Morin. Vous me posez une question, on n'en a jamais discuté.
M. MORIN: Cela ne vous avait pas frappé à l'époque,
cette déclaration de la chambre de commerce? Pourtant, ça touche
de très près les questions dont vous venez nous entretenir dans
ce mémoire.
M. TETREAULT: Je vous répète ce que je vous ai dit tout
à l'heure, je crois qu'il y a eu un effort considérable qui s'est
fait dans ce domaine. C'est tout ce que je peux vous répondre. Ce ne
sont pas des statistiques acquises.
M. MORIN: Si vous ne pouvez me répon-
dre, peut-être que votre président, M. Huggett, dont j'ai
reçu une lettre fort intéressante d'ailleurs, pourrait nous dire
ce qu'il est enclin à en penser. Est-ce que les entreprises anglophones,
qu'elles soient canadiennes, québécoises ou multinationales,
établies au Québec seraient prêtes, éventuellement
vous avouerez que c'est une question importante à accepter
que les postes de direction, dans ces entreprises, soient accordés en
nombre proportionnel aux francophones du Québec, c'est-à-dire
qu'on leur donne entre 80 p.c. et 85 p.c. des postes de commande
éventuellement?
Est-ce que vous acceptez cela en principe ou si vous le refusez
d'avance?
M. HUGGETT: Mr Morin, let me start by saying this: Most "sièges
sociaux", head offices call them what you will would be quite
prepared to have proper proportional representation of Francophones at their
upper levels. There is no question of discrimination or anything else, but I
would add that business is business and it is not a question of whether an
individual is a Francophone or an Anglophone as to whether he will be promoted;
it is a question as to his ability in the business field.
M. MORIN: Est-ce que nous devons conclure de la situation actuelle
où seulement 15 p.c. des postes de commande sont entre les mains de
francophones, qu'ils n'ont pas autant que les anglophones les aptitudes aux
affaires? Est-ce qu'il n'y aurait pas d'autres obstacles à leur
montée dans le monde des affaires?
M. HUGGETT: I certainly do not know if it is any. Any of the companies
with which I have been associated, I have seen, are quite prepared and quite
happy to have Francophones, they are looking for Francophones. Really in the
business field, I do not see any obstacles. Now, obviously there is going to be
an exception to the rule, but I do not know any. And as I say, the progress of
particular individuals is dependent upon their abilities as business men.
M. MORIN: Dans le dossier "R" de la commission Gendron, je trouve le
passage suivant: "Enfin le dernier argument est le fait que le Canadien
français ne s'intéresse pas au monde des affaires.
L'enquête sur la présence francophone dans les corporations
professionnelles confirmerait cette..." Je m'excuse, c'est un passage qui n'est
pas complet. Un peu plus loin, le dossier "R" nous dit : "II existe une
population francophone compétente en nombre parfois trop
élevé, puisqu'une portion n'arrive pas à se caser". Je
pense que vous avez compris le sens de ce passage. La commission Gendron nous
apprend donc qu'il existe trop de francophones compétents par rapport
aux postes disponibles. Et, d'autre part, je constate avec la Chambre de
commerce de Montréal que seulement 15 p.c. des postes de commande dans
les entreprises québécoises sont aux mains des francophones. Je
me demande comment réconcilier ces deux constatations avec ce que vous
venez de nous dire, messieurs. A moins que vous soyez en mesure de contredire
carrément la commission Gendron.
M. HUGGETT: I do not really believe that we can add to what you said, I
mean I have made my point strongly that it is a question of ability and supply
of the people coming up.
If you want an example, I can tell you that, in our firm, 20 p.c. of my
partners are Francophones when many years ago, it was only 1 p.c. More than 50
p.c. of our staff are Francophones. Yet we are considered to be an English
firm. That is only an example. I am not sure that it is found anywhere else,
but I think it is a trend.
M. MORIN: Si j'ai bien compris, vous reconnaissez, à tout le
moins, que la situation des francophones dans les centres de décision
des entreprises est une situation qui n'est pas satisfaisante et qui est
même injuste pour la population francophone.
M. TETREAULT: Je ne dirais pas que c'est injuste. Ce n'est pas
satisfaisant, c'est vrai. Il y a eu des progrès énormes, et il
continuera d'y en avoir. Je suis très optimiste de ce côté,
M. Morin.
M. MORIN: Oui.
M. TETREAULT: II y en a d'autres qui le sont moins que moi, mais, moi,
je suis optimiste.
M. MORIN: Très bien. Est-ce que vous acceptez
qu'éventuellement il serait normal que 85 p.c. des postes de direction
dans les entreprises québécoises soient détenus par des
francophones québécois?
M. TETREAULT: Je ne suis pas autorisé à répondre
à cette question. Si vous voulez que je vous donne une réponse
personnelle, je suis prêt à vous la donner. Il y a toute une
question de compagnies...
M. MORIN: Votre réponse personnelle m'intéresse, mais
c'est surtout celle du Board of Trade que j'aimerais entendre.
M. TETREAULT: Je ne suis pas autorisé à répondre
pour les 3,000 membres, M. Morin. Je ne suis pas autorisé à
répondre.
M. MORIN: Ceci vient des 3,000 membres aussi, ce mémoire que vous
nous soumettez?
M. TETREAULT: Oui.
M. MORIN: Bien. J'imagine qu'il est fondé
sur une certaine logique. Tout ceci se tient et nous pouvons
certainement vous poser des questions de détail.
M. TETREAULT: Sûrement, mais ce n'est pas une question de
détail que vous venez de poser.
M. MORIN: Bon, je vais essayer d'aller un peu plus loin. De toute
façon, vous êtes libre de répondre ou de ne pas
répondre. Je ne voudrais pas que vous vous sentiez coincé le
moindrement; soyez bien à l'aise. Nous tentons simplement d'explorer le
terrain le mieux possible.
M. TETREAULT: Oui.
M. MORIN: Est-ce que le Board serait prêt à accepter en
principe que, dans les affaires, comme dans tous les aspects de la vie
quotidienne, le Québec devienne aussi français que, par exemple,
l'Ontario est anglophone?
M. TETREAULT: C'est difficile de répondre. Je crois que
déjà le Québec est très français, M. Morin.
Je ne sais de quelle façon vous voudriez qu'il le soit plus que
maintenant.
M. MORIN: Mais vous me retrournez la question.
M. TETREAULT: Certainement que je vous retourne la question.
M. MORIN: Je pourrais là-dessus vous entretenir pendant quelques
heures. Nous n'avons malheureusement pas tout ce temps. Je ne vous parle pas de
vous-même, mais du Board. Est-ce que le Board a une attitude
là-dessus?
M. TETREAULT: Je vais demander à M. Finestone de répondre,
si vous le permettez.
M. MORIN: Oui.
M. FINESTONE: We have a collision here between a pragmatic point of view
which is the concern of the Board of Trade and statistical idealism which is
not relevant. The important point in your first question is that the doors are
opened. The doors are not only opened, but those francophones who are qualified
are being eagerly sought. This is the product of the last ten years and
something, I think, we can all congratulate ourselves upon, rather than taking
a statistical analysis and saying: It is not good enough.
In so far as your second question, vis-à-vis Ontario versus
Québec, if Ontario and Quebec had the same background, my answer would
be: Your point is well taken. Ontario and Quebec do not have the same
background. We are a different province and I think it is something we are
proud of and stress and emphasize.
Therefore, to look at two different provinces and say: Would you do the
same in one as the other? My answer is again : It is not relevant.
We as business men, must live in the world we find. We must live and
adapt ourselves to the present world and to simply state that something which
exists elsewhere should exist here is something which is not relevant to
business. We must do business here.
M. MORIN: Bien, M. Finestone, je suis très heureux de constater
que vous êtes fier de vivre au Québec, mais si tous à la
table ici, dans cette salle, nous en étions aussi fiers que vous, nous
ne serions pas là. Les problèmes que nous affrontons
n'existeraient pas. C'est pourquoi vous admettrez que nos questions sont quand
même importantes. Elles sont pertinentes. Malgré votre
pragmatisme, il s'avère que cette méthode ne semble pas
répondre aux besoins des Québécois, et qu'il y a de plus
en plus de problèmes. Il faut donc voir s'il n'y a pas d'autres
méthodes pour résoudre nos problèmes.
En particulier je n'ai pas le temps d'entrer dans tous les
détails comme je l'aurais voulu je voudrais vous poser une ou
deux courtes questions additionnelles.
Vous vous êtes opposé à tout moyen qui ne soit pas
purement incitatif. Est-ce que je puis vous souligner, ou est-ce que vous savez
que, dans la plupart des pays européens, la loi exige que les
autochtones soient représentés aux conseils d'administration,
à la direction, selon des pourcentages qui sont établis de
façon précise dans la loi? Est-ce que vous savez que des
programmes "d'autochtonisation", si je puis m'exprimer ainsi, existent dans
plusieurs pays? Je songe en particulier à un pays qui, comme le
Québec, fait face à la pression du voisin le plus puissant sur le
plan industriel, sur le plan scientifique et sur le plan commercial, le
Mexique. Le Mexique exige que la majorité des administrateurs dans les
entreprises qui font affaires au Mexique soient Mexicains. Est-ce que vous
connaissez ces dispositions juridiques qu'on trouve dans de nombreux pays
civilisés? Est-ce que vous admettriez que le Québec se
prévaille de solutions comme celles-là?
M. FINESTONE: I would presume that the legislators in the European
countries have drafted rules and regulations applicable to their situation. And
while watching what they have done with their legislation and the results which
have flowed therefrom, I would sincerely hope that we, in Quebec, could learn
from their errors rather than attempt to duplicate them, because they have not
been all that successful. You mentioned Mexico in particular, a country which I
am, in some extent, familiar with. They have paid, in human and economic terms,
a rather impressive price for 50 years for their particular
position, which, I respectfully submit, steins out of their history, and
I would hope that our Legislature would take cognizance of the reality of our
province and our needs and the demands of our population would respond with
corresponding legislation suited to our needs, rather than looking sideways and
saying: They have done it, so we should.
M. MORIN: Peut-être une dernière question, M. le
Président, une toute dernière. Est-ce que le Board of Trade sait
que, dans de nombreux pays, notamment européens, mais également
en Amérique latine, au Japon et ailleurs, la langue des entreprises est
la langue du pays, sauf, naturellement, lorsqu'il faut communiquer avec des
pays étrangers, notamment avec les Etats-Unis, alors qu'il est
parfaitement normal que ce soit l'anglais qui soit utilisé?
Est-ce que le Board of Trade sait cela que, dans la plupart des pays,
"business is conducted in the language of the country"?
M. BLANK: ... les Anglais ont des droits aussi...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, messieurs!
M. MORIN: J'ai posé une question. Est-ce que ces messieurs
pourraient y répondre?
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, messieurs!
M. TETREAULT: J'admets ce que vous dites, mais il ne faut pas oublier
que, dans la ville de Montréal, le tiers de la population est
anglophone. Est-ce que le tiers de la population de la ville de Paris est
anglophone? Est-ce que le tiers de la population de Rome est anglophone? Alors,
pourquoi nous citer de tels exemples?
M. MORIN: Oui.
M. TETREAULT: Le cas de Montréal est un cas tout à fait
particulier.
M. MORIN: Est-ce que vous admettez qu'il faille quand même
corriger la situation ou vous inclinez-vous devant cet état de fait?
Vous isolez le cas de Montréal, parce que cela fait votre affaire. Mais,
autour de Montréal, il y a le Québec et je serais d'avis que vous
lisiez le mémoire de la Chambre de commerce de Montréal qui, lui,
me paraît beaucoup plus soucieux de l'ensemble du Québec. Vous
n'avez pas de responsabilités qu'à l'égard de
Montréal. J'ai terminé, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de Rouyn-Noranda.
Quatre minutes.
M. SAMSON: Dans le mémoire qui nous est présenté,
à la page 4, il m'apparaît, à l'article 5 (VI et VIII),
deux recommandations que vous faites qui peuvent être extrêmement
intéressantes. Cependant, je ne m'attarderai pas tellement sur ces
points. Je voudrais vous demander ceci: Vous semblez inquiets,
particulièrement par la question des certificats de francisation et,
selon ce que vous dites à la page 2, 5 (I), le Board s'oppose à
l'émission prévue de certificats de francisation en raison des
fortes possibilités de discrimination et d'abus auxquelles ils
pourraient donner lieu.
Dans votre esprit, que signifient la discrimination et les abus que vous
pourriez prévoir, advenant qu'il y ait émission de certificats de
francisation?
M. TETREAULT: Ce que nous avions dans l'idée, c'est simplement
que, quand vous avez toutes sortes de gens dans l'administration qui doivent
décider qui aura un certificat et qui ne l'aura pas, il y a toutes
sortes de considérations qui peuvent entrer en jeu. C'est ce que nous
voulons dire. Appelez-le patronage, si vous voulez. Appelez-le comme vous
voudrez. C'est ce que nous avons dans l'idée.
M. SAMSON: Pour vous, patronage, si je comprends bien votre point de
vue, cela veut dire que vous seriez inquiétés par une
possibilité que cela devienne un patronage au niveau du fonctionnarisme
qui aurait à prendre les décisions quant à
l'émission de ces certificats de francisation.
M. TETREAULT: C'est ce qui nous fait un peu peur, oui. A part cela,
l'administration de ce programme de certificats serait très
onéreuse, à notre point de vue.
M. SAMSON: Quelle serait votre réaction si le ministre, par
exemple, en arrivait, après étude, à la conclusion que ces
certificats de fransication soient émis sur une base fixe,
c'est-à-dire avec des normes bien préparées et ne donnant
lieu à aucune espèce d'arbitraire ou de pouvoir de
décision d'une personne en particulier dans un service donné?
M. TETREAULT: Cela pourrait aider, mais il ne faut pas oublier ceci.
Chaque entreprise a une situation toute particulière quant à ses
employés. Une entreprise peut avoir une majorité d'anglophones,
grande majorité, petite minorité. Alors, vous allez essayer
d'appliquer des critères à des situations qui varieront d'une
entreprise à l'autre. Cela va mener à des problèmes
considérables, à notre point de vue.
M. SAMSON: Si je comprends bien, ce qui vous inquiète davantage,
c'est l'évaluation des humains qui pourrait se faire dans ce cas, parce
que cela serait évidemment des humains qui feraient ces
évaluations.
M. TETREAULT: Oui.
M. SAMSON: C'est l'évaluation qui vous inquiète davantage,
n'ayant pas suffisamment de possibilités d'en arriver à des
critères assez rigides.
M. TETREAULT: C'est cela.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Malheureusement, je dois vous
arrêter. Le temps des questions à la disposition de l'Opposition
est terminé, à 22 minutes. Vous vous reprendrez une prochaine
fois.
M. SAMSON: Je suis bien d'accord qu'on me coupe la parole aussi
facilement...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): C'est-à-dire que je n'aime pas
beaucoup couper la parole, mais cela n'est pas ma faute.
M. SAMSON: ... mais je voudrais en profiter pour soulever un point de
règlement, pour peut-être vider cette question.
Nous aurons d'autres mémoires à entendre aujourd'hui et je
pense qu'il serait bon et valable pour la bonne marche de nos travaux que les
20 minutes qui sont accordées à l'Opposition puissent être
déterminées sur une base fixe, de façon que je puisse
aussi savoir combien de temps j'ai à ma disposition. Vous allez
comprendre que c'est assez difficile et je ne veux blâmer en aucune
façon le chef de l'Opposition officielle, ni le député de
Saint-Jacques qui, évidemment, ont toujours des questions à poser
aussi. Ce qui arrive, c'est qu'étant celui qui parle après eux,
s'il reste deux minutes et si j'en ai pour huit ou dix minutes, ou pour cinq
minutes, cela me cause un tort en tant que membre aussi de cette
commission.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Faites-moi part de votre convention...
M. SAMSON: Voici, M. le Président, je pense avoir compris
et on me contredira si je n'ai pas bien compris qu'hier, du
côté de l'Opposition, on envisageait, autant que faire se peut,
que le temps soit partagé dans une proportion de 12/8 ou quelque chose
comme cela. Je vois que le chef de l'Opposition semble dire non. S'il dit non,
on va engager le débat, parce que je n'ai pas l'intention qu'on me prive
de mon droit de parole.
M. MORIN: Nous étions d'accord, M. le Président, pour 15
minutes pour l'Oposition officielle et 5 minutes pour le Parti
créditiste.
M. SAMSON: M. le Président, je regrette, mais je ne me laisserai
pas bâillonner ni par l'Opposition officielle, ni par le gouvernement. Si
on accepte que le gouvernement qui a 102 députés se contente de
20 minutes, je ne vois pas pourquoi l'Opposition officielle, qui n'en a quand
même que six, vienne manger 15 minutes de la période de 20 minutes
de l'Opposition. Je pense que j'ai un droit de réclamer justice. Je
serais d'accord qu'on partage dans la proportion de 12/8, quitte à dire
au chef de l'Opposition, lorsque je prévois ne pas utiliser les 8
minutes, qu'il utilise la différence. Je suis toujours prêt
à m'entendre, mais il faudra que l'on veuille s'entendre. Si l'on ne
veut pas du côté de l'Opposition officielle et si on veut faire
comme d'habitude, empiéter et ne pas permettre à l'opposition
créditiste de manifester et de pouvoir manifester son opposition
à ce projet, je vous dis que j'en ferai appel à vous, M. le
Président, et je n'ai pas l'intention de négocier mon temps de
parole avec l'Opposition officielle à chaque mémoire qui sera
présenté devant nous. Je ne serai pas d'accord sur cela. Je
regrette, mais je ne marcherai pas dans ce genre de "bargain".
M. MORIN: M. le Président, je voudrais bien que le
député de Rouyn-Noranda sache que nous connaissons son
intérêt pour les questions qui sont soumises à cette
commission. Il n'est pas du tout question de l'empêcher de parler, mais
un décompte strict du temps, un partage strict du temps irait à
l'encontre de l'accord, que nous avons conclu avec le gouvernement, selon
lequel pour les mémoires les plus importants on admettra que le
Board of Trade est un organisme important nous ferions preuve de la
souplesse et que nous pourrions faire durer l'entretien avec nos invités
plus longtemps. Si nous tombons dans des 12/8 ou même des 15/5... C'est
une proportion que j'ai indiquée 15/5, c'est-à-dire, trois
minutes pour une, mais cela pourrait être dans le cas où
l'Opposition officielle aurait des questions plus longues à poser, parce
que le mémoire nous paraît plus substantiel. Nous n'entendons pas
du tout nous laisser enfermer dans une période rigide de 15 à 20
minutes. Il peut arriver que nous ayons des questions pour une période
de 30 minutes, et nous n'entendons pas du tout abdiquer ce droit, voire
même, si nous avions des questions pour une heure, nous poserions des
questions pendant une heure.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! Je
comprends le chef de l'Opposition officielle, qui, à un certain moment,
voudrait poser des questions une journée de temps, mais quant à
moi, cela fait une dizaine de fois que je décris mon rôle de
président. Ce n'est pas votre goût personnel que je dois
évaluer, mais bien les règlements. Hier, il y a eu une
espèce d'entente tacite à savoir que les deux partis de
l'Opposition feraient part au président d'une entente intervenue. Je
suggère que les deux leaders de chaque parti se rencontrent et informent
le président de l'entente intervenue. Au cas contraire, dès cet
après-midi, je devrait diviser moi-même la période de
temps.
Je pense qu'il serait plus normal que les deux partis s'entendent sur
une période de temps, mais quant à moi, c'est 20 minutes, ce
n'est pas n'importe qui qui va le décider, ce sont nos
règlements. Pour éviter une procédure inutile à ce
stade-ci, du fait qu'on avait dit qu'une entente serait prise et qu'elle n'est
pas prise, je pense qu'il serait malheureux de priver les membres de la
commission d'entendre nos invités.
M. MORIN: M. le Président, nous sommes sur une pente glissante.
Je voudrais vous le faire remarquer. L'interprétation que vous venez de
donner, en vous fondant sur le règlement, n'est pas conforme au
"gentlemen's agreement" qui est intervenu entre tous les partis quant à
la marche de cette commission. Si vous commencez à chronométrer,
il n'y aura plus de "gentlemen's agreement". Nous avons convenu qu'il y aurait
de la souplesse dans le procédé.
M. HARDY: M. le Président, juste un mot. Je suis bien d'accord et
je vous l'ai signalé tantôt. L'idéal, c'est que les partis
fassent une entente cordiale. Cela, c'est l'idéal. Mais quand un parti
et c'est ce qui est arrivé ce matin ne respecte pas
l'entente cordiale c'est ce que le chef de l'Opposition a fait à
l'endroit du député de Rouyn-Noranda, il n'a pas respecté
l'entente cordiale il vous appartient malheureusement d'arbitrer et
d'appliquer rigoureusement le règlement.
M. CLOUTIER: Permettons donc peut-être une question
supplémentaire.
M. SAMSON: M. le Président, je pense qu'il vaut mieux
régler cela tout de suite parce qu'on en a pour la journée.
M. CLOUTIER: C'est cela. Pas si on y consacre une heure.
M. SAMSON: S'il faut y consacrer une heure, je regrette, mais je ne me
laisserai pas piler sur les pieds comme cela, je vous le jure, M. le
Président.
M. CLOUTIER: Allons, on va vous donner une question de plus.
M. SAMSON : M. le Président, en ma présence hier, on a
mentionné 12/8, même si le chef de l'Opposition vient de faire
signe que non encore ce matin. En ma présence hier, on a
mentionné 12/8.
M. MORIN : Qui vous a mentionné cela?
M.SAMSON: Le député de Saint-Jacques, en ma
présence. M. le Président, je l'affirme de mon siège de
député et je vous dis qu'il y avait des témoins. Je vois
que le député de Laporte fait signe que oui. Il y avait des
témoins. Il est prêt à le redire. Il vient justement de me
dire qu'il est prêt à le redire.
M. le Président, dans ce cas, si le député de
Saint-Jacques me dit qu'il est prêt à le redire, je crois
comprendre qu'il y a peut-être eu malentendu, que peut-être le chef
de l'Opposition n'a pas pris connaissance de cela. S'il y a eu malentendu, je
suis prêt à laisser le député de Saint-Jacques
s'expliquer avant d'aller plus loin.
M. CHARRON: M. le Président, c'est une tempête dans un
verre d'eau qu'est en train de faire le député de Rouyn-Noranda
parce que c'est la première fois... On a travaillé pendant...
M. HARDY: Vous continuez à mettre de l'eau.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Laissez terminer l'honorable
député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: On a travaillé pendant six jours, à peu
près, avec son collègue de Beauce-Sud sans qu'il y ait...
M. HARDY: ...séparatiste.
M. TARDIF: Le député de Saint-Jacques...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): N'allongez pas les débats
inutilement, s'il vous plaît. Ceux qui voudront parler me demanderont la
parole et, comme je le répète à chaque jour, c'est avec
plaisir, si on me la demande. Mais si vous ne me la demandez pas, vous n'avez
pas le droit de parole.
M. HARDY: Bien, M. le Président, vous avez raison.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: On a travaillé pendant six jours avec le
député de Beauce-Sud et, même à l'occasion hier,
avec le député de Rouyn-Noranda, sans qu'il y ait accrochage
quelconque, J'ai mentionné hier qu'à l'occasion cela pouvait
être 12/8; à l'occasion, M. le Président, cela peut
même être 10/10, si vous voulez savoir, comme à d'autres
occasions... Ce matin, c'est arrivé, peut-être à cause du
témoin en particulier, je ne sais pas; il s'est produit que, dans le
temps qui restait au député de Rouyn-Noranda, malheureusement sa
dernière question n'a pas pu se glisser, vous êtes intervenu. Je
n'ai pas l'intention d'aboutir à un partage de temps, ni 12/8, ni 10/10,
ni même 15/5 en faveur du député de Rouyn-Noranda. Il n'y
en aura pas de partage de temps. L'engagement que nous avons pris et
cela c'est produit à chacun des mémoires, c'est le premier
où cela achoppe un peu ce matin c'est qu'il y a toujours eu le
temps pour les deux partis d'aller au bout de leurs questions. Même hier,
le
député de Rouyn-Noranda en conviendra, je lui ai
signalé qu'après le chef de l'Opposition je n'interviendrais pas,
pour qu'il ait le loisir de poser ses questions. Il a même eu, à
certaines occasions, plus que les fameuses huit minutes qu'il revendique ce
matin. Cela peut être 12/8 dans la pratique quotidienne, on peut le
vérifier à la suite. Mais, comme il n'y a jamais eu
mésentente quant au partage du temps, c'est le premier accrochage que
nous ayons à ce jour, je ne veux pas partir de cet accrochage pour faire
des règles fixes et du "chronométrage" d'opinions. Nous avons
pris cet engagement et la preuve est que c'est la première fois
que l'accrochage arrive, c'est donc que l'engagement a été
respecté que nous tiendrions compte dans notre temps de
l'existence à nos côtés, dans l'opposition à ce
projet de loi, des créditis-tes et, jusqu'ici, ils ne se sont plaints
aucunement. Je puis même vous dire, M. le Président, qu'il peut
arriver certaines occasions comme hier, où j'ai posé deux
questions pour immédiatement remettre le temps et on n'avait même
pas complété le temps de l'Opposition, même après la
période de questions de l'opposition créditiste.
Il n'y aura pas de partage fixe et nous ne vous aviserons aucunement
d'un partage mathématique du temps, M. le Président, puisque la
souplesse a prévalu dans 25 mémoires sur 26 et qu'elle a
été efficace. Plutôt que de prendre exemple d'un seul cas
d'accrochage, j'aime mieux prendre exemple des 25 cas précédents
où tout a bien fonctionné.
M. SAMSON: M. le Président, je veux bien croire qu'on nous parle
de souplesse, mais il semble que la souplesse soit exigée de nous
à ce moment-ci, parce que s'il y avait souplesse, on ne m'aurait pas
arrêté. Personne ne serait intervenu s'il y avait cette souplesse
dont tout le monde parle ce matin. C'est parce qu'il n'y a pas eu cette
souplesse qu'on m'a obligé d'arrêter. Je vous le
répète, il faut régler la question avant qu'on continue la
journée. Je n'ai pas l'intention qu'à chaque mémoire on en
revienne au même problème.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): On va rendre une décision... Si
vous permettez, il ne faut pas...
M. SAMSON: Si vous voulez, M. le Président, je voudrais souligner
que je ne tiens pas particulièrement à des règles rigides.
Seulement, il y a quand même un minimum qui pourrait être
donné à notre parti sans que ça entrave le temps de
l'Opposition officielle. Je ne tiens pas à entraver le temps de
l'Opposition officielle. Je vous dis que j'ai l'intention de collaborer pour
autant que faire se peut, et, s'il m'arrive de ne pas avoir besoin de tout le
temps, je suis prêt à le dire à l'Opposition officielle
pour qu'elle utilise ce temps. Mais ce que je veux faire comprendre, c'est que
je ne veux pas me ramasser à la fin de l'interrogatoire de l'Opposition
officielle avec trois minutes qui me restent. C'est ça que je veux faire
comprendre à la présidence.
M. MORIN: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Ecoutez, je pense...
M. MORIN: ... je voudrais ajouter une dernière chose.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Une toute dernière, parce que je ne
veux pas retarder inutilement les débats.
M. MORIN: Je tiens simplement à préciser que nous n'avons
pas l'intention d'empêcher le député de Rouyn-Noranda de
poser ses questions. En ce qui nous concerne, il faut qu'il soit clair que,
s'il en a pour un quart d'heure en raison de l'importance du mémoire et
en raison de l'importance qu'il faut attacher aux comparants, je serais pour
qu'il ait le plein quart d'heure; et même davantage, s'il estime que
c'est nécessaire. Il n'est pas question d'essayer de l'empêcher de
parler. J'espère qu'il a compris cela depuis le début. S'il n'a
pas compris, il se méprend rudement sur nos intentions. Mais, M. le
Président, si...
M. SAMSON: J'invoque le règlement.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Le député de Sauvé n'a pas le droit de
me prêter d'intentions. Il le comprendra et il sera le premier à
le comprendre. Il dit qu'il ne veut pas m'empêcher de parler, je suis
bien d'accord qu'il ne veuille pas m'empêcher de parler, c'est ça
que je réclame, M. le Président. Mais c'est quand même lui
tantôt qui m'a empêché de vous demander de me donner le
temps qu'il fallait.
M. MORIN: M. le Président, le député de
Rouyn-Noranda ne veut pas qu'on lui prête d'intentions, eh bien, qu'il ne
nous en prête pas. Tout à l'heure, il a insinué que nous
voulions le bâillonner, et jamais...
M. SAMSON: C'est ce que vous avez fait. Je ne l'ai pas insinué,
je l'ai constaté.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais simplement ajouter le
point pour lequel je suis intervenu. Si vous vous apprêtez à
rendre une décision qui tend à chronométrer à la
seconde ou à la minute le temps dont dispose l'Opposition pour
interroger les comparants, je tiens à vous dire que cela est de nature
à remettre en question le "gentlemen's agreement" et alors, il n'y a
plus de règle qui tienne. Nous inter-
rogerons les témoins aussi longtemps qu'il nous conviendra. Si
l'accord sur lequel nous nous sommes entendus au cours des jours passés
ne tenait pas, je tiens à vous dire que nous voulons
récupérer toute notre liberté d'action et que nous ferons
des motions, si nécessaire, dans ce sens. On oublie trop facilement le
second paragraphe de l'article 8 dans tout ça.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): D'abord, il n'y a pas de second
paragraphe, c'est la dernière phrase du para,jraphe 8: "Ces
périodes peuvent être prolongées, si la commission le juge
à propos". Je voudrais, pour la dixième fois au moins, demander
la collaboration de tous les membres de la commission pour rappeler une entente
intervenue et qui est d'ailleurs en conformité avec nos règles de
pratique. Je me souviens fort bien que le député de Saint-Jacques
a trouvé que c'était un partage équitable; d'ailleurs, je
dois souligner que ce que vient de dire le député de
Saint-Jacques est rigoureusement exact, j'ai moi-même
présidé la majorité des auditions et, depuis le tout
début, il n'y a pas eu de problème sérieux. C'est
évident qu'on ne peut pas arriver toujours à la seconde
près. Quant à moi, je voudrais respecter l'entente entervenue,
soit vingt minutes pour l'Opposition, vingt minutes pour le parti
ministériel. Je crois que c'est un partage équitable.
Si, après 40 minutes, la commission juge à propos de
continuer la période des questions, il s'agit à nouveau d'un
nouveau partage. Si la commission dit pour 20 minutes additionnelles, ce sera
dix minutes pour l'Opposition et dix minutes pour le parti
ministériel.
Mais vous comprendrez je l'ai souligné à plusieurs
reprises que mon rôle est de faire respecter cette entente et je
crois qu'on le fait le plus généreusement possible. Mais toutes
les fois qu'on se lance dans un débat de procédure,
écoutez, il y a 25 minutes que nous sommes dessus, mais ce n'est pas
drôle, franchement, et, à la fin de la journée, il y a
quelqu'un qui va payer la note.
M. CHARRON: M. le Président, l'Opposition officielle tiendra
compte de l'incident.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Nous en étions rendus à
l'honorable député de Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: M. le Président, dans votre version
française, à la page 3, paragraphe 4, vous parlez des futurs
immigrants. Vous mentionnez que vous avez de sérieuses réserves
quant aux effets néfastes que cette mesure pourrait avoir au cours des
années à venir sur l'immigration et l'économie de la
province. Hors cette réserve, est-ce que vous acceptez cette politique
complètement? Est-ce qu'au point de vue de la justice humaine ou des
droits humains, vous croyez que cette politique est acceptable en ce qui
regarde les futurs immigrants?
M. TETREAULT: Non, nous avons simplement mis ce paragraphe plutôt
pour prévenir le gouvernement que nous avions des réserves
sérieuses quant à l'effet économique d'imposer une loi qui
s'appliquerait aux futurs immigrants. Nous sommes contre en principe.
M. SAINT-GERMAIN: Merci.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Gouin.
M. BEAUREGARD: M. le Président, j'aimerais tout d'abord signaler
à l'attention de la commission l'importance extrême du
mémoire que nous avons devant nous. Je pense que le Board of Trade
représente une partie de l'économie du Québec et, sans
aucun doute, la partie la plus importante. Je pense que nous devrions
être capables d'apprécier, et même les membres de
l'Opposition officielle qui, si je ne m'abuse, ont toujours oeuvré dans
un domaine de fonctionnarisme ou de parafonctionnarisme, que c'est quand
même l'immense majorité des travailleurs du Québec de
toutes catégories qui gagnent leur vie dans l'entreprise privée
et qui, par leur travail, jour après jour, alimentent toute
l'économie du Québec.
Je suis personnellement très sympathique à l'approche
pragmatique que le Board of Trade a prise. Je voudrais cependant poser une ou
deux questions rapides au Board of Trade puisque je ne partage peut-être
pas non plus toutes les conclusions auxquelles il en est arrivé.
J'aimerais d'abord faire remarquer qu'à deux moments dans son
mémoire, à la page 2 et à la page 5, le Board of Trade
mentionne l'importance d'inciter les entreprises nationales et multinationales
à s'implanter au Québec et à y croître, soutenir
leur intérêt à l'égard de Montréal comme lieu
d'établissement de leurs sièges sociaux. Un peu plus loin,
à la fin du mémoire, à la page 5, à l'avant-dernier
paragraphe, on parle de nouveau de l'importance des sièges sociaux qui
sont, dit-on ici, d'une importance vitale pour Montréal et pour le
Québec. Aussi, faut-il veiller à maintenir un climat qui soit
favorable à leur croissance au sein de la province.
Messieurs, est-ce que je pourrais vous poser la question suivante et
peut-être vous demander d'expliquer un peu cela? Est-ce que vous croyez
qu'une législation qui inciterait les entreprises à travailler en
français autant que possible est de nature à éloigner les
sièges sociaux que nous avons à l'heure actuelle dans la province
de Québec ou à ne pas attirer les sièges sociaux que nous
pourrions attirer dans l'avenir?
M. HUGGETT: I will try to speak for that, if I may. First of all, to
answer your second
question, if there are strict laws and regulations governing the
language, I do not believe that head offices, new businesses will be attracted
to this province, naturally if they are Anglophone in nature. It is simply
there are too many other places that they can go to within Canada which are
economically as attractive as Quebec.
Therefore, business does not go looking for trouble and I would doubt
that we would find a great increase in the numbers of head offices or
administrative head-quarters in Montreal. As to businesses that might leave,
that is a difficult question. I cannot say that : Yes, all businesses will
leave or some businessess will leave or the majority will. We cannot quantify
that, but we do feel that there would be a thrust, a pressure if you will...
Perhaps businesses will look to Ontario, Toronto and say: It is just as good
there. We are having trouble here. Why do hot we move? And I think that this
would be wrong for this province and damaging to its economy.
M. BEAUREGARD: M. le Président, est-ce que je pourrais demander
au Board of Trade s'il croit que, lorsque les compagnies comme cela a
été le cas depuis quelques années où on a vu
certains sièges sociaux de compagnies canadiennes ou multinationales
déménager leur siège social, soit graduellement ou soit
d'un seul coup, vers Toronto, en particulier déménagent,
ne continuent-elles pas, à ce moment-là, de faire des affaires au
Québec?
M. TETREAULT: Oui, elles continuent à faire des affaires. Cela
peut peut-être mener à un bureau régional plutôt
qu'au siège social de la compagnie. Elles ne disparaissent pas
complètement de la province.
M. BEAUREGARD: En somme, ce que vous craignez, c'est qu'avez une
législation trop contraignante, le Québec devienne une succursale
de l'Ontario?
M. TETREAULT: C'est une possibilité. On cherche à trouver
des postes plus nombreux pour les francophones aux centres de décision.
Malheureusement, si les centres de décision se déplacent, cela
cause un problème sérieux.
M. BEAUREGARD: On parlait des conséquences économiques, si
je comprends bien, jugées très sérieuses du
déménagement des sièges sociaux vers, par exemple,
l'Ontario. Vous mentionnez ici, si je comprends bien, dans votre
dernière réponse, le fait que cela pourrait également agir
comme une espèce de boomerang et que ce serait même néfaste
à la francisation des entreprises. Est-ce que je vous interprète
bien, si je dis, par exemple, si une compagnie déménage son
siège social à Toronto supposons qu'il s'agisse, pour
prendre un exemple concret, d'une compagnie fabriquant des cigarettes qui
aurait des employés et des marchés aussi bien au Québec
qu'en Ontario l'opéra- tion québécoise devient une
succursale de l'opération entière, laquelle est dirigée de
l'Ontario? Est-ce que j'interpréterais bien votre pensée si je
disais que, dans un cas comme celui-là, le francophone dans
l'entreprise, qui a une saine ambition d'occuper un poste important dans
l'entreprise, devrait nécessairement s'orienter vers le travail en
langue anglaise totalement, puisque, pour avoir un poste décisionnel
important, il devrait aller s'établir à Toronto? Est-ce que c'est
un peu le sens de votre réponse, monsieur?
M. TETREAULT: Non, malheureusement, cela peut arriver de cette
façon. Si le siège social se déplace et que le
francophone, le Canadien français veut continuer au siège social,
il est obligé de partir. D'ailleurs, il y en a plusieurs. Je pense que,
dans la population de Toronto, il y a 80,000 francophones, dans la
région de Toronto, et c'est peut-être 80,000 exemples de ce qui
est arrivé. C'est qu'il y a des gens qui ont décidé qu'ils
avaient une carrière à suivre et qu'ils étaient
prêts à suivre cette carrière en dehors du
Québec.
Maintenant, plus on formera d'entreprises dans la province de
Québec, non seulement de la part des anglophones, mais de la part des
francophones, plus les francophones vont former leurs propres entreprises, plus
vite la francisation se fera.
M. BEAUREGARD: Diriez-vous qu'il est plus facile pour le gouvernement de
la province de Québec d'émettre des directives, soit par voie de
législation ou de réglementation concernant la francisation des
entreprises, à des compagnies qui ont non seulement une exploitation au
Québec, mais aussi leur siège social au Québec?
M. TETREAULT: C'est plus facile, peut-être oui; franchement, je ne
vois pas qu'il y ait beaucoup de distinction à faire. M. Fine-stone a un
commentaire à faire.
M.FINESTONE: I think we are running in the difficulty of creating a
black-white situation, and when you do this, you come up, I am afraid, with the
wrong conclusions.
The reality of the matter is that business, given an opportunity, will
adapt to anything that can do or must do in order to earn profits. We represent
2,900 business and, as I think you have been kind enough to mention, one of the
mainstays of the economy of Quebec. I would not like the questioning to
indicate that a trend towards ameliorating French in the French milieu would
drive 2,900 businesses out of Quebec. That simply will not happen.
The reality of the matter is that business and I think almost the
totality of the firms we represent have accepted, in principle, the fact that
something must be done to assist the
French _fact to grow in Quebec. This is no longer debatable among our
people. We have stayed away very carefully in our brief from all political
aspects,as you may note if you read it. This we do not feel is the mandate of
the Board of Trade. This is your mandate. What we are attempting to do in our
brief is to show you that if you proceed in certain ways and at speeds that are
too rapid, you will create effects which will not only be adverse to the
economy of Quebec, but as you have stated yourself, Mr Deputy, may very well
nullify the thrust towards French which this whole legislation is meant to
implement.
But I would hope that we would not fall into a black-white situation.
Some head offices will leave for reasons totally unrelated to the French fact.
Others may take exception to the French fact and leave on that basis. There is
no one answer. Our position is that given that we accept that this must be and
I think that the statistics, which have been put before you on certain other
briefs which I have read, certainly indicate that industry and business that
was exclusively anglophone is converting itself, as fast as it can, without
impeding the efficiency of the operation. Given those facts, I think it behoves
the legislators to take cognizance of that fact and to realize that you cannot
arrive at Utopia in one day, nor by one piece of legislation. What we are
suggesting is a gradual approach which will allow Quebec to flourish and not to
suffer economically and will, over a reasonable period of time, attain your
objectives without the harm which we feel a flatout, coercive and punitive
approach might create which, I think, we would all regret very quickly.
M. BEAUREGARD: M. le Président, j'aimerais...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): La période des questions est
terminée, à moins que la commission n'en décide
autrement.
M. BEAUREGARD: J'allais dire, M. le Président, tout simplement,
merci.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Ce qui est vrai pour un côté
est vrai pour l'autre côté également. La période des
question est terminée, à moins que...
M. MORIN: Si les députés gouvernementaux ont encore des
questions, nous n'avons pas objection, M. le Président.
M. BEAUREGARD: M. le Président, est-ce que vous me donnez 30
secondes?
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Je n'ai pas de secondes à donner,
malheureusement.
M. BEAUREGARD: Je retire ma dernière question, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Je remercie, au nom des membres de la
commission, le Board of Trade, ainsi que ceux qui sont venus nous rencontrer
ici, ce matin. Merci beaucoup.
M. TETREAULT: Merci, messieurs.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Nous entendrons maintenant M. John C.T.
Johnson, président du Provincial Association of Protestant Teachers of
Quebec.
Est-ce que vous voulez vous présenter ainsi que ceux qui vous
accompagnent, s'il vous plaît?
Provincial Association of Protestant Teachers of
Quebec
M. JOHNSON: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, mesdames et messieurs, je voudrais vous présenter les
membres de notre association qui sont ici aujourd'hui. A ma droite, du
côté gauche, M. Peacock, vice-président du PAPT et aussi
président du Montreal Teachers' Association. A ma gauche, du
côté droit, M. Bernstein, executive assistant of the PAPT.
Pour commencer, je voudrais vous informer que The Provincial Association
of Protestant Teachers of Quebec est une des trois associations des professeurs
de la province de Québec, qui a été créée en
1864. Notre association représente 6,500 professeurs dans les
écoles élémentaires et secondaires de la province de
Québec. En majeure partie, ces membres sont de langue anglaise,
même si l'on retrouve dans l'association plus de 10 p.c. de membres
francophones, en ce moment.
Lors de représentations devant des commissions parlementaires ou
des commissions royales, tant au niveau provincial qu'au niveau
fédéral, la PAPT a, durant les derniers dix ans, constamment
plaidé pour un système d'éducation basé sur la
langue dans lequel les parents auraient le libre exercice du choix de
l'école française ou anglaise pour leurs enfants.
Notre expérience et la perception que nous avons des
événements qui ont lieu au Québec et dans le Canada ne
nous ont aucunement menés à changer notre point de vue, mais au
contraire l'ont appuyé et nous ont conduits à nous y attacher
encore plus fermement.
Le projet de loi 22 nous semble mal approcher le problème de la
protection du français et s'y prend mal pour encourager son utilisation
au Québec. Elle est trop diffuse et vague quand elle traite de la langue
de travail ou des affaires, discriminatoire dans la défense ratée
des droits de la minorité de langue anglaise, et par trop arbitraire
dans la cession de pouvoirs discrétionnaires à outrance au
cabinet des ministres et à la Régie de la langue
française.
Lors de son assemblée générale annuelle tenue en
mai de cette année, la PAPT réaffir-
mait sa position sur la politique linguistique par une proposition qui
en partie déclarait: "Cette assemblée déclare son
engagement ferme envers une société démocratique pour tous
les Canadiens, mais plus spécifiquement envers une société
dans laquelle les deux langues officielles peuvent prospérer. Nous nous
engageons à soutenir toute mesure raisonnable visant à donner
à la langue française un statut de priorité au
Québec". Nous reconnaissons que la langue parlée par plus de 85
p.c. de la population doive posséder un statut prioritaire.
Ce que nous ne pouvons accepter, c'est que les droits dont jouissait
traditionnellement la minorité puissent être diminués ou
éliminés au nom des droits de la majorité. Les droits de
la minorité ne contredisent pas nécessairement, dans une
société démocratique, les droits de la
majorité.
Le projet de loi 22 tente de résoudre le problème en
essayant de plaire un tout petit peu à tout le monde; de fait, par les
réactions initiales qui suivirent son introduction à
l'Assemblée nationale, il est clair que c'est à tout le monde
qu'elle ne plaît pas du tout. Si l'intention est de vraiment accorder
à la langue française un statut prioritaire parce que c'est la
langue de la majorité, il s'ensuit que les dispositions de la loi
doivent être claires et avoir une portée véritable,
spécialement dans les chapitres III et IV. Ce n'est pas satisfaire les
visées de la loi que de laisser à des règlements à
définir ultérieurement le soin de clarifier la lettre de la
loi.
Si l'intention de la loi est aussi de réassurer la population de
langue anglaise sur ses droits aux écoles anglaises et ses
prérogatives dans les communications avec ou à l'intérieur
de groupes publics, cette loi devrait l'établir clairement et sans
équivoque.
Au sujet de la langue officielle au Québec, la disparition du
statut officiel de la langue anglaise au Québec est probablement
l'aspect le plus important de la loi. En une phrase, la loi a réduit le
droit à l'usage de l'anglais dans les communications en public ou en
tant que langue d'instruction à un privilège qui n'est
détenu que de par la bonne grâce de celui qui détient le
pouvoir. Etant donné l'article 1 de ce projet de loi 22, toutes
dispositions ultérieures dans la loi traitant de l'usage de l'anglais,
même si elles procèdent d'intentions louables, ne deviennent que
de simples mots. Le gouvernement doit comprendre que la population de langue
anglaise du Québec se sent dans l'insécurité et
sérieusement menacée par les pressions récentes qui lui
semblent requérir un Québec unilingue. Cela nous semble
être la responsabilité d'un gouvernement élu de pourvoir
à la sécurité de tous les éléments de la
population. Ceci, tel que notre mémoire le démontrera clairement,
n'implique pas nécessairement que la PAPT favorise le maintien
perpétuel du statu quo. Le statut de la minorité de langue
anglaise au Québec peut être cité comme un exemple de bonne
volonté et de tolérance entre deux ethnies partageant le
même Etat. Dans l'esprit des relations traditionnelles entre les groupes
anglais et français au Québec, le gouvernement devrait maintenir
le présent statut légal de la minorité tout en incitant de
façon positive et en encourageant la communauté anglophone
à s'intégrer à la majorité francophone. Il serait
tragique pour le Québec de traiter la minorité anglaise de la
même façon que les minorités francophones sont
traitées dans les autres provinces. Même si ce n'était aps
ignominieux, il serait quand même non pertinent de s'appuyer sur le fait
que les autres provinces aient été intolérantes et aient
agi de façon discriminatoire envers les minorités
françaises pour défendre, comme certains l'ont fait, le retrait
des droits de la minorité au Québec.
Aux questions de la langue de l'administration publique. Pour être
logique dans l'application de notre position que les deux langues officielles
soient reconnues, nous croyons que les articles 6 et 7 doivent prévoir
l'obligation de publier dans les deux langues tout texte officiel ou document
émanant du gouvernement. Comme la population anglophone du Québec
constitue au moins 10 p.c. de la population globale, cette recommandation est
en accord avec l'article 9 de la loi.
Même si la loi prévoit que l'on puisse s'adresser aux
groupes de l'administration publique soit en français soit en anglais,
cette même loi demeure muette sur la langue de réponse. Nous
croyons qu'il ne serait qu'équitable que l'individu puisse choisir le
français ou l'anglais dans ses rapports bilatéraux avec son
gouvernement.
Nous ne pouvons qu'approuver les dispositions des articles 14, 18 et
suivants, requérant une connaissance suffisante du français de
ceux qui travaillent dans les services publics ou qui agissent en
capacité de professionnels.
Cependant, nous espérons que des dispositions obligeront les
corps professionnels à l'utilisation de l'anglais lorsqu'ils traitent
avec les anglophones. Ceci revêt une importance particulière du
point de vue humain lorsqu'il s'agit des services de santé.
Langue de travail. La PAPT appuie le principe que le Québec de
langue française a le droit de conduire sa vie économique dans sa
propre langue. Nous croyons que l'employeur doive communiquer avec son
employé dans sa langue.
Les articles 24 et suivants établissent que le français
est la langue de travail tout en permettant que l'anglais puisse être
utilisé là où une partie des travailleurs sont de langue
anglaise. Malheureusement, la loi n'indique pas de quelle façon cet
article 24 pourra prendre effet. La mise en vigueur de cet article
dépend des pouvoirs discrétionnaires du lieutenant-gouverneur en
conseil et de la Régie de la langue française. Nous
apprécions ce désir qu'a le gouvernement d'éviter la
coercition et d'introduire une certaine flexibilité dans
l'application
de la loi, mais l'absence quasi totale d'entraves permet une application
sélective et peut entraîner des abus administratifs de la part des
groupes responsables.
A la lumière de la méfiance
généralisée envers les gouvernements à travers
l'Amérique du Nord, il serait de bon aloi, de même que rentable
politiquement, pour les parties en cause d'établir dans la loi
même des directives d'application, de même qu'une cédule
d'implantation du programme de francisation.
Si la mise en place du programme nécessite vraiment des
incitations, le système tel que suggéré par la loi est par
trop arbitraire. La possibilité d'attribution, de retenue, de retrait de
permis, subsides, contrats gouvernementaux, etc., ouvre la porte à
l'abus et peut devenir sérieusement discriminatoire.
La loi devrait définir plus particulièrement des
directives d'application des articles 32, 35 et 47.
C'est une ironie que d'établir des dispositions claires dans les
articles 43 et 46 en ce qui a trait à la langue des
panneaux-réclame ou de la publicité, y compris le délai de
cinq ans accordé dans la mise en vigueur de ces dispositions quand la
loi demeure muette sur les communications humaines.
Nous croyons que la langue française sera protégée
de façon sûre quand chaque Québécois francophone
pourra être assuré de pouvoir travailler dans les affaires ou les
services publics ou encore conduire sa vie quotidienne dans sa propre langue.
La loi 22 nous semble être le premier pas véritable vers
l'achèvement de cette fin. Le gouvernement doit en être
félicité.
Question de la langue d'instruction. Le retrait des droits des parents
au libre choix de la langue d'instruction pour les enfants et, en particulier,
l'intégration obligatoire des immigrants dans les écoles
françaises reflète très mal le désir de voir les
immigrants s'intégrer au milieu français du Québec.
Si le français était vraiment la langue de travail de la
province et si les immigrants étaient assurés que leur
intégration au milieu français leur ouvre des horizons
économiques et sociaux alléchants, ils s'intégreraient
volontairement aux écoles françaises. Tant et aussi longtemps
qu'ils verront que leur avenir est dans le milieu anglophone, ils continueront
à s'assimiler à ce niveau quelles que soient les écoles
qu'ils fréquentent obligatoirement.
On doit aussi noter que la population anglophone a promu dans ses
écoles l'éducation de ses enfants en français et ce, d'une
façon positive. L'expansion volontaire des programmes d'immersion en
français, l'amélioration de l'enseignement de la langue seconde,
de même que l'inscription de nombreux adultes anglophones à des
cours de français témoignent du désir et consentement
à accepter la langue de la majorité.
De plus, les récents programmes mis sur pied pour encourager les
immigrants à apprendre le français, tels les centres d'accueil ou
les COFI (Centre d'orientation et de formation des immigrants) ont obtenu un
certain succès.
En remplacement des dispositions du chapitre V de la loi 22, le
gouvernement devrait développer plus énergiquement les programmes
requis et leur affecter les ressources nécessaires pour que les
étudiants de langue anglaise atteignent la maîtrise du
français.
De telle visées exigeraient, entre autres, de meilleurs "ratios"
maître-élèves ou l'enseignement du français, la
formation d'un plus grand nombre d'enseignants du français comme langue
seconde, l'expansion des programmes d'éducation aux adultes, etc.
Par les tests requis pour l'admission à l'instruction
française ou anglaise, il se pourrait que la loi réduise le
nombre d'enfants dont la langue maternelle n'est pas le français dans
les classes d'immersion et ce, particulièrement chez les anglophones. La
loi restreint aussi de fait la possibilité qu'ont les parents de donner
à leurs enfants des connaissances adéquates de l'anglais.
Même les groupements qui ont plaidé pour un système
scolaire unilingue français ont, par la même voie, demandé
que le gouvernement améliore de façon marquée
l'enseignement de l'anglais dans les écoles.
Si le gouvernement accédait à ces demandes
d'amélioration de l'enseignement de l'anglais en tant que langue
seconde, il y a tout lieu de croire que le nombre d'étudiants
francophones inscrits dans les écoles anglaises diminuerait
sensiblement.
En bref, la loi est mal orientée quand elle introduit des mesures
coercitives pour ceux qui n'ont même pas le droit de vote et laisse une
grande marge de manoeuvre par ses omissions et ses portes de sortie aux grosses
corporations.
Nous nous devons de réaffirmer que le droit au libre choix entre
le français et l'anglais en tant que langue d'instruction doit
être maintenu par la loi et que, par des incitations valables, les
non-francophones soient amenés à apprendre le français et
à s'assimiler au milieu francophone.
Selon notre prise de position que la langue française et la
langue anglaise doivent coexister en ayant chacune le statut de langue
officielle, nous croyons que l'article 53 doit être supprimé.
Au sujet de la Régie de la langue française, les pouvoirs
attribués à cette Régie de la langue française
ainsi qu'à ses fonctionnaires sont excessifs. Une agence publique de la
sorte devrait voir à faire respecter les politiques établies par
législation et non les établir elle-même à toutes
fins pratiques.
La fonction de la Régie de la langue française serait pour
nous de surveiller l'implantation des mesures que nous vous avons
suggéré d'introduire dans les chapitres III et IV de la loi.
Nous ne pouvons accepter qu'un corps public soit inattaquable en loi ou
possède des
pouvoirs discrétionnaires tels qu'ils en font quasiment un
appareil législatif en soi.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Merci beaucoup.
M. JOHNSON: Let me add one additional point which was not included in
the brief, but one which concerns us as an association of employees, in
articles 28 and 29, the question of the language of arbitration. It is clear,
in article 29, that there is a choice of language of arbitration and that
choice is left to the association. As president of such an association, it is a
right that I feel I should not possess, that the association should not
possess, but it should be the right of the individual. A grievance, an
arbitration is a court, a system of justice. The law does provide that, in the
regular courts of the province, the individual has the right to his language.
And we maintain that that right should be granted to the individual end not to
the association.
In summary, I would like to say why we agree with the general principles
outlined at the beginning of the law, we feel that the law, as proposed, does
not come to grips, with the reality of the situation which is an economic
problem.
And first and foremost, the attack and, the thrust should be towards the
language of work, until the citizen, the Francophone citizen in the province of
Quebec, feels assured that he is able to carry on his every day life in the
French language. He is going to wish to integrate into the anglophone
educational system. And so we contend that rather than beginning with
education, the law should put the primary thrust towards the language of
work.
The law, while it says the language of work should be French, the
discretionary powers and the methods by which this is to be applied are unclear
and it is certainly clear that arbitrary procedures could be adopted which
would allow large corporations of the hook and leave the situation very much as
it is at present. Thank you.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Merci. Le ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: Je remercie l'Association provinciale des enseignants
protestants du Québec pour la présentation de ce mémoire.
Il s'agit d'un groupe que je connais bien. D'ailleurs, je me réjouis que
nous ayons pu signer hier l'entente sur la classification, ce qui n'a
certainement pas nui à la qualité du dialogue ce matin.
M. le Président...
M. JOHNSON: J'espère que le gouvernement a déjà
signé.
M. CLOUTIER: Oui, cela a été signé hier. J'ai
même obligé, faute de temps, de signer à cette commission,
sur cette table.
M. le Président, je voudrais apporter trois
éclaicissements et poser une seule question. Le premier
éclaircissement concerne le pouvoir réglementaire par rapport
à une remarque du mémoire, à la page 2 au deuxième
paragraphe. Je cite: "Ce n'est pas satisfaire les visées de la loi que
de laisser des règlements définir ultérieurement le soin
de clarifier la lettre de la loi." Tout ce que je veux dire à ce
stade-ci, puisque ce n'est pas le moment d'entreprendre un débat, c'est
que les principes sont clairement indiqués dans le texte de la loi et la
réglementation ne viendra que pour en préciser l'application. Il
était impossible de procéder autrement dans un domaine où
la souplesse est indiquée, où il faut même prévoir
des exceptions.
Je me suis engagé, devant cette commission, à, sinon
déposer le texte final de ces règlements, du moins à faire
état des principes et de leurs modalités de manière qu'il
n'y ait pas d'ambiguité qui risque de subsister.
Le deuxième éclaircissement se rapporte à la page
7, au dernier paragraphe. Je cite: "Par les tests requis pour l'admission
à l'instruction française ou anglaise, il se pourrait que la loi
réduise le nombre d'enfants dont la langue maternelle n'est pas le
français dans les classes d'immersion et ce particulièrement chez
les anglophones."
C'est exact, M. le Président. C'est le but que poursuit la loi,
un des buts que poursuit la loi à savoir d'orienter les immigrants qui
ne parlent ni français ni anglais vers le secteur francophone. Il s'agit
d'une loi qui tente d'insister sur la priorité du français. Ce
mécanisme est en relation logique avec l'objectif.
Quant à la page 9, le dernier paragraphe: "Nous ne pouvons
accepter qu'un corps public je cite soit inattaquable en loi ou
possède des pouvoirs discrétionnaires tels qu'ils en font
quasiment un appareil législatif en soi."
Je pense, M. le Président, que sous-jacent à cette
remarque, il y a un élément dont le gouvernement a l'intention de
tenir compte. En effet, rien n'interdirait sur le plan des modalités que
l'on dissociât les deux fonctions principales de la régie telle
que conçue, c'est-à-dire la fonction proprement administrative
qui voit à l'application des lois, de la fonction de contrôle qui
se rapporte effectivement à un pouvoir quasi judiciaire. Combien de fois
ai-je dit que le gouvernement ne bougerait pas sur le principe de son projet de
loi, mais qu'il était disposé à envisager toutes les
recommandations valables ou peut-être même meilleures de ce qu'il
propose.
Je crois qu'il y a là une suggestion extrêmement
intéressante dont le gouvernement tiendra très certainement
compte. Je m'arrête là et je passe à ma question
unique.
Partout dans le mémoire, on sent une inquiétude, que je
comprends fort bien de la part de ce groupe, qui porte sur la restriction de ce
que le groupe appelle les droits des anglophones. A la page 1, par exemple, on
déplore ce que l'on
appelle l'approche discriminatoire dans la défense des droits de
la minorité anglaise. A la page 2, on parle des droits, je cite: "...
dont jouissait traditionnellement la minorité puissent être
diminués ou éliminés au nom des droits de la
majorité."
A la page 3, on parle de la disparition du statut officiel de la langue
anglaise. Je ne nierai pas, bien au contraire, que la place qu'occupait
l'anglais se trouve réduite par le projet de loi. C'est le but que nous
poursuivons, même si, d'après certains groupes francophones, non
seulement la place de l'anglais ne leur parat pas réduite, mais leur
paraît même augmentée.
En revanche, ce que nous avons toujours maintenu, et nous le
maintiendrons toujours, parce que c'est l'orientation et le souci
d'équité et de justice du gouvernement, c'est que les droits des
individus, en ce qui concerne leur langue, sont maintenus. Or, comme vous
sem-blez en douter, j'aimerais que vous puissiez m'indiquer quels sont les
articles de la loi qui briment les droits individuels, les droits des
personnes, en ce qui concerne l'usage de leur langue, compte tenu du fait que
j'admets volontiers que la place de l'anglais est moindre, comme il se doit,
étant donné l'esprit de la législation, que vous le
souhaiteriez probablement.
M. JOHNSON: To begin perhaps one of my colleagues would like to
answer more precisely to my initial comments I would like to react first
to your observations.
If we go through a number of the articles 31 and following, we question
seriously that public funds should be used for the francization programs of
corporations. We would question what kind of subsidies the government has in
mind, on what basis these subsidies are granted. We would also ask...
M. CLOUTIER: Me permettriez-vous de vous interrompre, parce que cette
question que vous soulevez a été, en un certain sens, je ne dirai
pas réglée, mais éclaircie? J'ai indiqué à
plusieurs reprises que le gouvernement n'avait pas l'intention de subventionner
les entreprises pour les programmes de refrancisation. Il est exact qu'il y a
un article qui est l'article 31, qui en donne le pouvoir. Nous avons
pensé qu'il était utile de conserver, pour des situations
très exceptionnelles, la possibilité d'intervention, mais comme
les interprétations qu'on en donne prêtent à confusion, le
gouvernement n'aura aucune hésitation à mettre cet article de
côté.
M. JOHNSON: To come to the question of rights, we have avoided any
reference to the British North America Act, that piece of legislation passed in
Westminster by our colonial masters. We have mentionned that government should
protect the rights of all citizens, and that citizens should feel comfortable
and at home with the legislation that is presented. It is clear, from many of
the reactions, that this law has not accomplished that end, nor, in fact, does
it accomplish the aims and objectives for the Francophone population.
In speaking of the rights, we speak not only of rights traditionnally
held, but what we would consider, in a democratic society, the democratic
rights of a significant minority group within that society. And it is that kind
of a concept that we would like to emphasize rather than what rights have been
built into the BNA Act, the UN charter, etc.
M. CLOUTIER: Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, je remercie également les
membres de la Provincial Association of Protestant Teachers de leur
mémoire. Comme j'en ai pris un peu l'habitude, je ferai partir mes
questions de celles que le ministre vient de poser et de l'échange qu'il
vient d'avoir avec le groupe.
Je vous ferai d'ailleurs remarquer, M. le Président, que les
interventions du ministre se font désormais plus nombreuses, plus
longues. Il ajoute des commentaires.
M. CLOUTIER: Et plus précises. M. CHARRON: Plus précises.
M. CLOUTIER: C'est exact.
M. CHARRON: Et que, contrairement à la première semaine
je vous le signale, parce que vous n'étiez pas ici il vise
à rassurer, en plus grand nombre maintenant, les anglophones qu'il ne le
faisait au début. C'était la tâche que j'avais à
faire que d'expliquer la loi aux anglophones et de leur dire...
M. SPRINGATE: A votre manière.
M. CHARRON: Mais peut-être le député de Sainte-Anne
devrait-il remarquer dans la stratégie du ministre une façon de
lui enlever sa clientèle? Enfin...
M. SEGUIN: L'apôtre des Gentils.
M. CHARRON: ... je ne veux pas m'insérer dans la dissension
à l'intérieur du Parti libéral, M. le Président, et
je veux...
M. SPRINGATE: Attention... du Parti libéral.
M. CHARRON: ... aborder la question, effectivement, à peu
près aux mêmes endroits où le ministre a fait porter ses
questions, mais tout en essayant d'être un peu plus précis.
D'abord, je veux vous remercier, comme
groupe de travailleurs syndiqués, d'avoir apporté à
peu près le même message que les groupes de travailleurs
syndiqués francophones ont apporté sur un point extrêmement
précis et que, jusqu'ici, à peu près uniquement les
travailleurs syndiqués ont fait remarquer à la commission. C'est
ce que vous dites au bas de la page 6 alors que vous affirmez qu'il s'agit
effectivement d'une question de pouvoir économique. Au bas de cette
page, vous affirmez ceci: "Si le français était vraiment la
langue de travail de la province et si les immigrants étaient
assurés que leur intégration au milieu français leur ouvre
des horizons économiques et sociaux alléchants, ils
s'intégreraient volontairement aux écoles françaises."
Là-dessus, je ne peux que vous appuyer, et vous répéter
que vous rejoignez là-dedans les positions des organisations de
travailleurs francophones qui sont venues faire remarquer ce que bien des gens
ont oublié, c'est que l'essentiel du problème est la faiblesse
économique des francophones dans leur propre pays, dans ce propre
territoire qu'ils occupent, où ils seront jusqu'à la fin de leurs
jours chez eux, le seul endroit où ils seront véritablement chez
eux.
Mais, malheureusement, cette affirmation très syndicale,
très sociale et consciente de la place sociale que vous occupez dans
l'échiquier, est malheureusement précédée d'un
paragraphe très anglophone où vous affirmez le retrait des droits
des parents au libre choix de la langue d'instruction pour leurs enfants et
l'intégration obligatoire des immigrants dans les écoles
françaises.
Vous, comme groupe anglophone, à ce sujet, vous n'êtes pas
différents des autres, je vous l'assure, vous avez lu ces deux choses
dans le projet de loi. Je l'ai lu, je l'ai relu, vous êtes le 26e ou le
27e groupe à venir nous donner généreusement votre opinion
sur le projet de loi, je vous prie de m'indiquer à quel endroit, dans le
projet de loi, vous voyez le retrait du libre choix. Le ministre lui-même
a dit que le libre choix n'était pas retiré. Ce point est l'un
des rares sur lesquels nous sommes d'accord. Alors, peut-être pouvez-vous
nous faire mentir tous les deux et nous affirmer qu'effectivement il y a
retrait du libre choix dans le projet de loi? Surtout, dites-moi où vous
voyez l'intégration obligatoire des immigrants dans les écoles
françaises!
M. PEACOCK: Est-ce que vous me permettez de répondre: D'abord,
l'article 118, qui est clair, dit que le bill 63 est retiré.
M. CHARRON: Techniquement, parce qu'il est...
M. PEACOCK: Voulez-vous que je lise le texte, M. Charron?
M. CHARRON: Oui.
M. PEACOCK: II n'y a pas le mot "techniquement" dans le texte.
M. CHARRON: II fallait le faire parce qu'on a changé, dans les
articles 48 à 52...
M. PEACOCK: Si vous voulez défendre l'article, c'est à
vous de le faire. Je dis que je l'ai lu. C'est clair, et cela...
M. CHARRON: Oui.
M. PEACOCK: ... retire le bill 63.
M. CHARRON: Techniquement, je suis d'accord avec vous. En principe, je
suis d'accord.
M. PEACOCK: Vous ajoutez les mots, d'accord. Lisons l'article 49. Les
élèves qui n'ont une connaissance suffisante d'aucune des deux
langues doivent recevoir leur instruction en français. Il est clair que
les immigrants venus ici ne parlent pas suffisamment bien l'anglais, sauf dans
le cas des riches, peut-être. C'est cela qui me préoccupe un peu.
Est-ce qu'ils vont détourner la loi? Les riches vont ouvrir des
écoles privées pour leur donner une espèce de "crash
course". Nous pensons toujours aux pauvres qui ne pourront pas faire cela. A
l'exception des riches et des gens à l'aise, les pauvres qui immigreront
ici n'auront sûrement pas une connaissance suffisante de la langue
anglaise. Il y a une contradiction dans cette affaire. Pédagogiquement,
d'abord, c'est solide de dire: Un enfant doit avoir une connaissance suffisante
de la langue d'instruction pour recevoir cette instruction dans cette langue.
D'accord, mais s'il ne l'a pas, il doit recevoir cette instruction en
français. Cela est logique!
M. CHARRON: M. Peacock, ne mélangeons pas immédiatement la
situation des immigrants, si vous le voulez. Tenons-nous en aux citoyens
québécois ici. On parlera des immigrants par la suite. Les
citoyens québécois déjà ici, francophones comme
anglophones, les 6,000,000 de Québécois actuellement, se
voient-ils, dans le projet de loi actuel, retirer le droit d'inscrire leurs
enfants à l'école française ou à l'école
anglaise?
M. PEACOCK: Cela dépend, s'ils ont une connaissance
suffisante.
Si je comprends bien, il y a beaucoup de Canadiens français qui
envoient leurs enfants dans les écoles anglaises, justement parce qu'ils
n'ont pas une connaissance suffisante de la langue anglaise.
M. CHARRON: M. Peacock, l'affirmation de principe que vous avez
notée à l'article 49 voulant que les élèves doivent
connaître suffisamment la langue d'enseignement pour recevoir
l'enseignement dans cette langue, cette affirmation de principe qui est une
trivialité, en fin de compte tout le monde en conviendrait
qu'il n'était pas nécessaire de mettre dans un projet de loi,
n'est-ce pas la situation actuelle? Les gens qui ont passé avant vous,
vos
employeurs, par exemple je ne veux pas vous amener sur un autre
sujet qui sont responsables... Ce n'est pas vous qui êtes
responsables de l'admission des étudiants. Vous, vous leur donnez des
cours une fois qu'ils sont dans la classe. Ceux qui décident si
l'étudiant entre et recevra vos cours, ce sont véritablement vos
employeurs, les cadres scolaires protestants, etc. Où voyez-vous dans la
loi une restriction pour eux à accepter un enfant francophone dans
l'école anglaise? Il n'y en a aucune. On nous a dit...
M. PEACOCK: Je suis d'accord que la commission protestante va sortir des
tests si faciles qu'un Chinois, qui ne parle pas un mot d'anglais, va se
trouver avec une connaissance adéquate de la langue anglaise. C'est tout
ce qui intéresse la commission
M. CHARRON: Voulez-vous répéter cette phrase pour le
ministre de l'Education qui est malheureusement dérangé à
l'heure actuelle?
M. PEACOCK: Le ministre a toujours ses pouvoirs discrétionnaires
de faire un autre test. Je ne veux pas faire des cauchemars. Il se peut fort
bien qu'un ministère assez rusé puisse créer un test
où je ne réussirais pas, si vous me demandez de conjuguer le
subjonctif imparfait du verbe "must", par exemple, en anglais, ou si vous me
demander tous les gérondifs, des choses très compliquées,
un test plein de grammaire. Quelqu'un qui veut éliminer ce transfert des
francophones ou d'autres personnes aux écoles anglaises pourrait
inventer un autre test. Cela dépend du test. On peut jouer le jeu du
test pendant bien longtemps. Ce n'est pas par le text qu'on fait...
M. CHARRON: Mais vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'avant
que le ministre se prévaille de ce droit qu'il se réserve
à l'article 51, dans les cas où cela tournerait mal, comme vous
dites, où il pourrait arriver avec un test très difficile ou un
test très facile, personne ne le sait. Il y a des francophones qui
viennent nous dire: Le test va être très facile. Vous nous dites:
Le test peut être très difficile. Vous avez peut-être autant
raison que les autres. On ne le sait pas. Le ministre se réserve un
pouvoir discrétionnaire par règlement. Avant cela, avant que le
ministre n'intervienne avec ce pouvoir en vertu de l'article 51, c'est
l'article 49 qui va s'appliquer. Vous m'avez dit qu'avec l'article 49 le
Protestant School Board of Greater Montreal, que vous connaissez bien, va
pouvoir accueillir un Chinois ou un francophone qui n'a aucune connaissance
suffisante de l'anglais.
M. PEACOCK: II peut le faire. Je ne suis pas le représentant ici,
mais je m'imagine bien qu'il va créer des tests assez faciles, disons,
presque trop faciles.
M. CHARRON: Parce que ces gens ont un avantage économique direct
d'avoir des étudiants. Plus ils ont d'étudiants, plus la
subvention qui provient du gouvernement sera proportionnelle, j'imagine. C'est
une des raisons. L'inquiétude qu'on a, c'est qu'il y a une affirmation
de principe dans l'article 49, à laquelle bien des anglophones se sont
achoppés. Ils disent: Voilà, c'est la fin du libre choix. Il faut
maintenant avoir une connaissance suffisante. Mais il n'y a aucune obligation
de tests ou de vérification. C'est laissé à la
discrétion des commissions scolaires. Comme vous me dites, les
commissions scolaires soucieuses d'accueillir la clientèle vont faire
cela au minimum. On n'est pas assuré...
M. PEACOCK: Excusez-moi, vous me parlez de la commission protestante,
mais il y a des commissions catholiques qui contiennent des
élèves anglais et des élèves français, par
exemple la CECM. Je m'imagine les bagarres qui vont se produire après
l'adoption de ce bill. Chaque fois, l'Alliance des professeurs va protester
qu'il y a trop de gens qui vont dans les écoles anglaises. Chaque fois,
la Federation of English-Speaking Catholic Teachers va faire encore un
communiqué de presse contre cela. Finalement, le ministre sera
obligé d'intervenir chaque fois qu'un élève passe d'un
côté à l'autre.
M. CHARRON: Etes-vous d'accord pour dire ce sera ma
dernière question sur ce sujet comme bien des francophones avant
vous nous l'ont dit, que tel que stipulé, le chapitre de la langue
d'enseignement va conduire à la création de Saint-Léonard,
Laval, Brossard, etc.?
M. PEACOCK: Oui.
M. CHARRON: Vous êtes d'accord comme les francophones l'ont dit.
Bien, j'ai une dernière question, avant de céder à mon
collègue de l'Opposition créditiste, dans les 20 minutes qui sont
réparties, sa période des questions. Au dernier paragraphe de
votre mémoire à la page 7, sur lequel le ministre voua a
interrogé, mais où il a abandonné rapidement le terrain,
lorsque vos affirmez que, par les tests requis pour l'admission à
l'instruction française ou anglaise, il se pourrait que la loi
réduise le nombre d'enfants dont la langue maternelle n'est pas le
français dans les classes d'immersion, et ce particulièrement
chez les anglophones, il vous a dit: C'est vrai.
Encore une fois, la première phrase: Par les tests requis pour
l'admission à l'instruction française ou anglaise. Il n'y a aucun
test requis pour l'admission à l'école française ou
anglaise dans la loi 22. Il se peut, à l'occasion de
Saint-Léonard, de Brossard ou de Laval, que le ministre intervienne avec
son test, en vertu de l'article 51, qui peut être très difficile
ou qui peut être très facile, mais il n'y a aucune obligation dans
la loi 22 qu'il y ait des tests d'admission à l'instruction
française ou anglaise.
M. JOHNSON: Qu'est-ce que c'est la signification de l'article 50?
M. CHARRON: C'est le statu quo. C'est actuellement cela. Actuellement
les commissions scolaires possèdent déjà le droit, en
jugeant de la connaissance suffisante, comme nous ont expliqué tous les
cadres scolaires qui sont venus, de voir... Si l'enfant n'a vraiment aucune
connaissance de la langue dans laquelle il va être instruit, on le met
dans la classe qu'on a appelée zéro; s'il a déjà
une connaissance de son milieu familial, etc., on le met dans une classe un peu
plus avancée. Le pouvoir des commissions scolaires de placer l'enfant
dans le groupe, la classe ou le cours où elles jugent bon de le placer,
la commission scolaire l'a déjà. La preuve, c'est qu'à
Brossard, cette année, les commissaires, pour contrer les effets
négatifs de la loi 63, ont décidé que, désormais,
tous les parents francophones qui inscriraient leurs enfants à
l'école anglaise verraient leurs enfants perdre une année. Sur le
plan pédagogique, on voulait leur faire combler ce retard. C'est une
façon pour les commissaires de contourner une loi nocive et que le
gouvernement répète dans la loi 22. Mais ce pouvoir, à
l'article 50, il existe déjà aux commissions scolaires, c'est le
statu quo.
M. PEACOCK: Je dois vous faire remarquer que ce commissaire de Brossard
dont vous parlez a été battu par une majorité francophone,
sur cette question, récemment.
M. CHARRON: Cela est bien possible. Cela fait partie, M. Peacock, de ce
genre de climat que nous allons vivre d'une commission scolaire à
l'autre et de conflits proprement politiques qui vont se transposer jusqu'aux
élections scolaires. Cela est très vrai. Cela confirme,
effectivement, le fait que, désormais, les droits vont varier d'une
commission scolaire à l'autre et d'une majorité de commissaires
à l'autre. Il se peut, effectivement, que, demain matin, la ville de
Saint-Hyacinthe, par exemple, élise une majorité de commissaires
qui, eux, décideront de ne pas faciliter le transfert et que la
commission scolaire suivante, à Saint-Hilaire, par exemple, qui, elle,
aura élu une majorité de commissaires, genre Comité
Canada, genre assimilés nous arrive par la suite en disant: Toutes
portes ouvertes aux écoles anglaises. Les droits des francophones et des
anglophones vont varier d'une commission scolaire à l'autre par la
suite. Est-ce qu'on est d'accord sur cette affirmation? C'est tout, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, dans le mémoire qui nous est
soumis, à la page 6, nous retrouvons une chose qui nous
intéresse. On nous mentionne que la langue française pourrait
davantage être intéressante, au niveau de l'éducation, si
nous en arrivions au français comme langue de travail. Bien sûr,
M. le Président, nous constatons aussi que la langue étant un
moyen de communication, elle est utilisée pour les
nécessités de la vie. Ce qui veut dire que, lorsque nous savons
à l'avance qu'au travail il nous faudra parler telle ou telle langue,
bien entendu, on est intéressé à apprendre la langue qui
sera nécessaire pour chaque citoyen pour occuper un emploi et pour vivre
sa vie économique. Ceci dit, bien entendu, nous considérons, nous
aussi, qu'une meilleure promotion de la langue française se fera
nécessairement lorsque nous aurons atteint le niveau de français
langue de travail. A ce chapitre, vous rejoignez un peu le mémoire que
nous avons entendu hier de la part de la FTQ. Je pense qu'au point de vue de la
promotion de la langue française au Québec, il est absolument
important pour nous que cela soit relié à la vie
économique et, par le fait même, au monde du travail.
M. le Président, je voudrais cependant poser certaines questions
quant au statut de la langue anglaise. Nous retrouvons assez fréquemment
dans le mémoire des endroits où l'on nous parle du statut
officiel de la langue anglaise au Québec, du désir de votre
groupement de voir conserver ce statut. Je voudrais vous faire remarquer que
mon point de vue est le suivant: non seulement il n'y a pas de danger dans le
présent projet de loi pour les droits de la langue anglaise mais, au
contraire, je considère que, par ce projet de loi, on légalise
plutôt une situation qui existe.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Si vous permettez, M. le
député de Rouyn-Noranda, c'est parce qu'on vient de me faire part
d'une contre-entente récente, qui vient d'intervenir à cause de
certaines obligations d'un parti politique pour les prochaines heures. Le
groupe du Congrès canadien polonais que nous devions entendre vers midi
et trente devra être entendu à seize heures cet après-midi.
Je le dis pour éviter qu'il demeure ici: à seize heures, vous
serez le premier groupe à être entendu. Je tiens à le
mentionner, quel que soit le parti en cause: il arrive qu'il y a certaines
obligations qu'il est normal que les autres partis politiques reconnaissent.
Sans nommer aucun parti politique, je pense que c'est une bonne tradition que
de reconnaître les obligations de chaque parti. Le député
de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Merci, M. le Président. J'en étais à
expliciter le fait que je considère que le statut, que je ne crois pas
être un statut légal présentement, le statut de fait qui
est celui de la langue anglaise au Québec, loin d'être mis en
danger ou modifié, est plutôt légalisé par la
présente loi. Je voudrais en profiter pour poser une question à
M. Johnson. Des les dernières quatre ou cinq lignes, à la page 3,
vous dites: "Le gouvernement devrait maintenir le présent
statut légal de la minorité je ne crois pas que ce
sôlt un statut légal, mais en tout cas tout en incitant de
façon "fasitive" et en encourageant la communauté anglophone
à s'intégrer à la majorité francophone." Cette
intégration que vous désirez suivant votre mémoire, vous
la voyez possible de quelle façon?
M. JOHNSON: De façon "positive", c'est une erreur. C'est à
la page 3? De façon "positive".
M. SAMSON: Positive, d'accord. En encourageant la communauté
anglophone à s'intéresser à la majorité
francophone, vous la voyez comment cette façon d'inciter les anglophones
à s'intégrer? Cela prendrait quelle forme, selon vous?
M., JOHNSON: It is important to us that the prime method is the language
of work.
This is the main vehicle to make the French language a priority language
in the province of Quebec and this has been a theme that we emphasize
throughout. I would like to react too to your observations about the status of
the English language, and question the meaning of article 53, which, I do not
know what it means, it says: "Notices required by law to be published in French
and English may nevertheless be published only in French". What does that
mean?
And this has a bearing on the status of the English language. This is
our concern about the vagueness of the law.
M. SAMSON: Si vous me permettez, sur cette question, à travers le
Québec je ne parlerai pas seulement de la région de
Montréal cela ne se fait pas d'une façon bilingue
complète partout, ce qui veut dire que, si je comprends aussi cet
article, le ministre, par cet article, aura la possibilité de faire en
sorte que cela se fasse dans les deux langues, ce qui veut dire que cela
pourrait se faire dans un plus grand nombre de municipalités que cela se
fait présentement, si je le comprends bien. Maintenant, je voudrais en
revenir à la question spécifique que je vous ai posée,
parce que cela m'intéresse énormément de savoir votre
point de vue sur la façon de trouver des méthodes incitatives
d'intégration à la communauté francophone.
Vous avez, dans votre réponse, mentionné que la langue,
étant un véhicule de communication, selon vous, si la langue de
travail devenait le français d'une façon plus globale, cela
serait une méthode d'incitation. Est-ce bien cela que j'ai compris?
M. PEACOCK: Est-ce que je peux ajouter une autre réponse
supplémentaire? Il y a une chose d'anormale au Canada, c'est que les
Canadiens semblent ne pas avoir compris que d'apprendre une langue seconde,
c'est du "fun" comme on dit ici. Cela pourrait être agréable
d'apprendre une autre langue ou peut-être deux ou trois autres langues.
Cela n'existe pas à l'heure actuelle, on ne veut pas apprendre l'autre
langue. Il y a des Canadiens français aussi qui ne veulent et qui ne
peuvent pas parler l'autre langue. Ils ne le veulent pas. Plus on essaie de
forcer les gens à parler une autre langue, moins ils le veulent. Si on
pouvait créer et cela est la responsabilité du
ministère de l'Education un système d'éducation
d'apprentissage de langue seconde qui était supérieur à
n'importe quel système n'importe où en Amérique du Nord,
si on pouvait avoir des cours sur la culture de l'autre langue, si on peut
avoir des échanges promis par le ministère de l'Education, tel
qu'on l'avait déjà proposé il y a trois ans au
ministère de l'Education, si on pouvait faire tout cela, on pourrait
créer une atmosphère, une ambiance détendue dans les
écoles, où les élèves seraient encouragés
à apprendre, pas seulement le français, mais d'autres langues.
C'est tout cela. On sait que les meilleures recherches sur l'apprentissage de
la langue seconde sont faites au Texas ou en Californie plutôt qu'au
Québec et c'est cela qui n'est pas normal dans toute la situation.
C'est parce que la situation est anormale, c'est que ce bill devient
anormal aussi. Toutes les solutions sont anormales. Mais on pourrait inciter
les enfants à apprendre une autre langue par des mesures, en
créant une atmosphère de détente. Chaque fois qu'on essaie
de faire passer un bill, cela crée encore un dérangement entre
les deux communautés. Il y a du ressentiment, il y a des "red necks" des
deux côtés, tout cela, et encore des rancunes derrière nos
attitudes. On ne parle pas de cela. Mais derrière cela, on ne se
comprend pas très bien. Les élèves sont bien capables
d'apprendre n'importe quoi, surtout les langues secondes, à un âge
très jeune, s'ils le veulent. Mais on ne peut pas forcer les enfants
à vouloir apprendre une langue.
M. SAMSON: On peut quand même conclure que...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Je peux conclure... 22 secondes.
M. SAMSON: ... c'est le besoin qui fait qu'on va apprendre une langue
plutôt qu'une autre et que ce besoin n'existe peut-être pas
actuellement en fonction de la langue française. En tout cas, du
côté anglophone, vous ne sentez pas suffisamment qu'il faille
apprendre le français parce que la nécessité de vivre en
français n'apparaît pas pour vous. C'est cela?
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Le député d'Iberville.
M. TREMBLAY: M. le Président, permettez-moi tout d'abord de
féliciter M. Johnson pour avoir présenté son
mémoire dans l'une des deux
langues officielles du Canada et particulièrement pour son usage
de la langue qui deviendra certainement officielle au Québec
après l'adoption de notre bill.
Je retiens, M. le Président, plusieurs points externe ment
intéressants dans le mémoire que M. Johnson vient de nous
présenter au nom de son association. Comme le temps est limité,
je vais mentionner ce qui m'excite le plus dans les allégations que vous
présentez, particulièrement à la page 2 du texte anglais
qui parle du "Official language of Quebec". Je veux attirer l'attention des
porte-parole de l'association sur la suite de ce passage qui dit: "The
government must understand that the English-speaking population of Quebec feels
insecure and deeply threatened by recent pressures, which seem to it, to call
for a unilingual Quebec". Une phrase comme celle-là, messieurs, à
mon humble avis, dans votre mémoire, n'aide précisément
pas au climat psychologique dans la population anglophone de notre
Québec, parce que vous avez comme prémisses... Je vais le relire
en anglais parce que votre mémoire va certainement paraf-tre dans les
journaux anglais de Montréal et attirera davantage l'attention des
anglophones de la région métropolitaine que ceux de Chicoutimi et
de la ville de Québec. "The removal of the status of English as an
official language in Quebec is perhaps the most significant aspect of the
bill". Je considère que c'est une allégation qui va passablement
loin. "In one sentence, the bill has reduced the right to use English in public
communication or as a language of instruction to a privilege which is held at
the grace and favour of whomever is in power at the moment".
Je vous pose une question: Messieurs, à quel endroit
précisément, dans l'étude certainement approfondie que
vous avez faite du projet de loi 22, percevez-vous précisément
que le projet de loi est à l'encontre de l'unilinguisme au
Québec?
M. JOHNSON : First of all, I would say this. Our chief concern has been
the vagueness and inprecise nature of the bill, that by removing the English as
an official language, it leaves the real status of the English language to the
discretion of civil servants and public employees or to regulations promulgated
by order in council, which do not have to come before the Parliament or the
National Assembly of this province, and are, therefore, opened to debate by all
elected representatives of the people.
The regulations do, in fact, determine certain policies about the
application, and if you go through the bill and count the number of references
to regulations that will be formulated and passed by order in council, you come
up with a rather staggering number of such regulations. I think it is the
arbitrary nature of what the real status of the English language will be that
is a concern of the Anglophone population. So, as the minister of Education has
already indicated, his proposal is to make more precise some of the
regulations, but until those regulations are forthcoming, there is the concern
and the fear of what the right, true status of the English language will be in
Quebec.
M. TREMBLAY All right. Do you admit, though, that the general spirit of
the bill goes towards unilinguism in Quebec? Give me a precise answer. We have
advocates of unilinguism in Quebec, I mean French.
M.JOHNSON: I think...
M. TREMBLAY: A few of these... All right.
M. JOHNSON: ... the spirit outlined in the préambule does not
necessarily do that. What our concern is, is that the application couldlead
towards that. So that it is not a question of what the bill says or does not
say, but the thing that concerns us is what is not defined and, therefore, what
in fact could become the reality of the French language, if the regulations are
such.
M. BERNSTEIN: If I may add something. The regulatory powers given to the
Lieutenant-Governor in Council outside of the National Assembly, and
particularly given to "la Régie de la langue française" in the
bill, smack of the kind of executive privilege that we have heard a great deal
about from south of the border, that the guidelines for imposing the
regulations are nowhere specified in the bill.
The French language board's decisions are incontestable. I think this
goes a little beyond the realm of democratic procedure whereby a public
regulatory body can have its decisions incontestable, not appealed, no judicial
review and this is the granting of certificates, the removal of certificates,
the decisions as to whether the francization program is being implemented or
not, on what basis it is to be implemented, how it is to be implemented. These
are all discretionary powers well beyond the jurisdiction of the National
Assembly and the electee representatives of the people of the province.
For example, the powers given to it, without any specific legislative
guidelines, are, to our minds, open to abuse. To be cynical, they are open to
favoratism, "patronage". These are all possibilities and I think the law should
specify what the guidelines shall be; the law should also specify, which it
does not, what the penalties are for non-implementation of the francization
program for corporations. It is sort of ironic that a major bill of linguistic
policy provides for no penalties for non-application by large corporations and
yet, a previous bill, with a slightly lower number, bill 19, provided for very
stringent penalties on the part of individuals for non-implementation of a
particular law.
And it would seem that there is a contradiction, a distorted sense of
perspective value where the onus falls on the individual in legislation and not
on so-called moral persons, "personnes morales" corporations, non individual,
legal entities.
M. PEACOCK: I think we very much regret...
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Il lui reste trois minutes.
M. PEACOCK: ... if anything we said added fuel to the passions of bill
22. We were not trying to add that. I think we were trying to make a
"constatation". The English community is beginning to take French Canadian
seriously. Maybe that it is a good thing, but they listen also to the wild men
and it is the wild men that we are worried about that might get into the power
and administer this bill. You could argue that this bill is a Humpty-Dumpty
bill. If you read Alice's adventures in wonderland, Humpty-Dumpty said: Words
mean whatever you want them to mean. If could be a bill which is nothing. A sop
to French Canadian pride, but a wink to the English corporations. As I have
understood Mr Trudeau rightly, that is what he is saying, that they are not
going to implement the damn thing, it is just that it keeps everybody happy.
Well, that could be. But it also could be a very discriminatory bill. It could
be anything you wanted it to be and this, in the present climate of uptightness
if I may use that word, amongst the English population is a very dangerous
thing. It is like sticking a stick into a lion's cage.
M. TREMBLAY: Your expression of the wild men to become in power some day
who would they be? Of whom are you afraid?
M. PEACOCK: II n'y a personne ici dont nous avons peur.
M. TREMBLAY: Quelle serait l'alternative du gouvernement actuel, par
exemple, advenant une élection prochaine? Qui est l'Opposition
officielle? N'est-ce pas cela que vous aviez à l'esprit?
M. PEACOCK: II y a des gens dans l'Opposition officielle qui veulent un
Québec unilingue. C'est pour moi...
M. MORIN: Est-ce le programme de l'Opposition officielle?
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre!
M. MORIN: M. le Président, les propos du député
"toastmaster" nous inquiètent quelque peu.
M. VEILLEUX: Le député de Beauce-Sud a dit qu'il
était pour l'unilinguisme français. Il a parlé d'un parti
de l'Opposition.
M. MORIN: Je n'avais pas l'intention d'intervenir à ce stade du
débat.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): A l'ordre, s'il vous plaît! Je
voudrais informer les membres de la commission que la période de 40
minutes pour les questions est maintenant terminée.
M. MORIN: M. le Président, elle s'est terminée sur une
note qui me parait fort déplaisante pour la suite des travaux de cete
commission. J'aimerais demander à M. Peacock, s'il connaît le
programme du parti qui constitue, à l'heure actuelle, l'Oppsoition
officielle, dans le domaine dont nous parlons.
M. PEACOCK: J'ai failli voter pour.
M. MORIN: Et vous connaissez ce programme?
M. TREMBLAY: M. le Président...
M. CLOUTIER: Mais pour d'autres raisons. Vous étiez contre la
classification. Avouons-le.
M. PEACOCK: Ma femme a voté pour.
M. CLOUTIER: Oui, parce que vous protestiez contre le gouvernement. Vous
n'auriez pas voté pour si la classification avait été
réglée comme elle l'a été hier.
M. MORIN: Mais, M. Peacock, vous connaissez donc le programme.
M. PEACOCK: Oui. Mais je connais des personnes dans le parti qui ne sont
pas tout à fait d'accord sur le programme actuel.
M. MORIN: Bien sûr. J'imagine que, si votre femme en fait partie,
elle pourrait être en désaccord. Les partis politiques sont
souvent des constellations d'opinions. On le voit bien, surtout à
l'heure actuelle, dans le gouvernement.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Merci beaucoup. La commission suspend ses
travaux jusqu'à seize heures.
(Suspension de la séance à 12 h 32)
Reprise de la séance à 16 h 47
M. GRATTON (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre,
messieurs.
Avant de procéder à l'audition du premier groupe,
j'aimerais aviser la commission des noms des membres qui la composent, soit M.
Springate (Sainte-Anne), M. Charron (Saint-Jacques), M. Déom (Laporte),
M. Cloutier (L'Acadie), M. Hardy (Terrebonne), M. Tremblay (Iberville), M.
Tardif (Anjou), M. Morin (Sauvé), M. Fraser (Huntingdon), M. Beaure-gard
(Gouin), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda), M.
Veilleux (Saint-Jean).
Le premier groupe que nous entendrons est le Congrès canadien
polonais, M. Chelminski. Je vous inviterais, M. Chelminski, à bien
vouloir nous présenter les gens qui vous accompagnent et à nous
faire votre présentation.
Congrès canadien polonais
M. ROMER: M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés. J'ai l'honneur de vous présenter les membres de
la délégation du Congrès canadien polonais ici
présents. Nous sommes quatre. Le deuxième, à ma droite se
trouve le professeur Vincent Adamkiewicz, professeur de microbiologie à
l'Université de Montréal, ancien président du
Congrès canadien polonais, Québec; à ma droite,
immédiatement à côté de moi, M. Thaddée
Solovij, économiste conseil à Montréal, trésorier
de la section canadienne de l'Institut polonais des arts et des sciences en
Amérique; immédiatement à ma gauche,, M. André
Kavczak professeur et directeur du département de philosophie à
Loyola, Montréal, ancien président du Congrès canadien
polonais au Québec. Nous avons aussi l'avantage d'avoir avec nous le
président en charge du Congrès canadien polonais, Québec,
M. l'ingénieur Leszek Chelminski qui est placé deuxième
à gauche de moi.
J'ai l'honneur, M. le Président, tout d'abord d'exprimer ma
profonde satisfaction de me trouver ici dans ce cadre impressionnant et
accueillant à la fois pour pouvoir vous dire en toute franchise et en
toute amitié notre profonde satisfaction de voir examiner et
d'être appelés à collaborer avec vous pour étudier
ce projet de loi no 22. Nous sommes absolument d'accord avec les buts qu'il
poursuit et qui sont fixés dans le préambule du projet de loi qui
nous dit: Attendu que la langue française constitue un patrimoine
national que l'Etat a le devoir de préserver et qu'il incombe au
gouvernement du Québec de tout mettre en oeuvre pour en assurer la
prééminence et pour en favoriser l'épanouissement et la
qualité.
Nous sommes entièrement d'accord sur ce préambule et je
crois que nous n'avons absolu- ment pas à discuter les buts. Ce qui est
à discuter, ce que nous voudrions étudier avec vous, en toute
amitié, ce sont les moyens qu'on doit employer pour atteindre ces
buts.
Nous avons dans ce domaine passablement d'expérience en ce qui
concerne notre mère patrie, notre pays d'origine, la Pologne qui, comme
vous le savez, pendant près de 150 ans, s'est trouvée sous la
domination de trois puissances copartageantes et qui a éprouvé,
soit dans le domaine de l'instruction, de l'éducation publique, soit
dans d'autres domaines, une persécution constante de la part de ces
puissances occupantes. Ceux d'entre nous, et j'appartiens à cette
catégorie, qui se rappellent l'époque d'avant la première
guerre, nous avons constaté et assisté avec tristesse et au grand
scandale de l'Europe toute entière, à des scènes où
l'on fustigeait les enfants polonais qui se trouvaient en Pologne allemande et
qui refusaient de dire à l'école la prière en allemand qui
leur était imposée. A cette époque-là, soit dans la
région qui était occupée par la Prusse, soit dans la
région de la Pologne qui était occupée par la Russie,
l'enseignement et l'usage de la langue polonaise était interdit ou bien
très limité et les souffrances de ce côté
étaient considérables.
Par contre, ça n'a pas empêché le
développement de la langue polonaise et de la culture polonaise car
c'étaient des mesures qui nous étaient imposées et qui
provoquaient de la part de la nation polonaise, une réaction très
forte et très violente. A la même époque de ces
persécutions, nous avons vu paraître le principal romancier de
cette époque, Henryk Sienkiewicz, prix Nobel, qui est l'auteur de Quo
Vadis, le fameux roman connu de tout le monde il a été
traduit dans toutes les langues qui prouvait jusqu'à quel point
la langue, la culture et la civilisation polonaises, malgré ces
persécutions ont continué à se développer et
à exercer une influence sur tous les pays voisins.
Voici nos expériences. D'autre part, je voulais aussi attirer
votre attention sur le fait que nous avons toujours considéré la
connaissance de plusieurs langues étrangères comme une
acquisition extrêmement favorable, extrêmement intéressante,
un enrichissement intellectuel pour ceux qui pouvaient les pratiquer.
Vous voyez, ici, nous sommes quatre et nous avons une vingtaine
d'enfants et de petits-enfants qui sont déjà, dans certains cas,
des personnes adultes et, sur celles-là, il n'y en a pas une seule qui
n'ait pas commencé ses études en français dans une
école française du Canada et qui ne parle pas la langue
française facilement et confortablement.
Nous sommes nous-mêmes d'avis que l'acquisition des langues
étrangères est possible, surtout pour les enfants qui les
acquièrent facilement, et qu'il est très avantageux d'apprendre
les langues. Nous recommandons, et cette recommandation est suivie de plus en
plus sou-
vent -et fréquemment dans notre groupe national polonais ici au
Canada, de commencer par la langue française pour les enfants. Pourquoi,
messieurs? Car la langue française est plus difficile à
apprendre, surtout la grammaire française, que la langue anglaise et, de
ce fait, il est bon de commencer par l'école française et par
l'étude de la langue française.
Et cette mesure a donné de bons résultats chez nous car
nous constatons, d'après nos enfants et nos petits-enfants, qu'ils
parlent facilement la langue française et qu'ils la manient avec
facilité et avec éloquence.
Je voudrais, M. le Président, si vous voulez bien me le
permettre, vous donner lecture de l'introduction très brève au
mémoire du Congrès canadien polonais que nous allons essayer de
défendre devant vous et de discuter avec vous, pour vous montrer
l'atmosphère qui existe dans notre milieu, auprès de nous, de
notre groupe ethnique polono-canadien.
Voici cette introduction: Le groupe ethnique polono-canadien, dans la
province de Québec, prend connaissance du projet de loi no 22 sur la
langue officielle avec une certaine inquiétude.
Notre groupe ethnique est bien conscient des liens traditionnels et
très étroits qui le lient à la langue française et
à la culture francophone de la majorité de cette province,
étant donné les liens historiques entre la Pologne et la France
et les traditions culturelles des deux pays.
Notre groupe ethnique, conséquemment, approuve entièrement
toutes les mesures ayant en vue l'affermissement et le développement de
la langue française de la province et au Canada tout entier.
Cependant, les justes démarches en vue de garantir l'avenir et le
développement de la langue française au Canada, et surtout dans
le Québec, ne peuvent, à notre avis, être
réalisées de façon à empiéter sur les droits
acquis, façon qui pourrait créer des tendances discriminatoires
de différenciation des citoyens en différentes
catégories.
Les mesures en vue de défense et d'affermissement de la langue
française n'exigent pas, à notre avis, l'amoindrissement ou
l'élimination du rôle de la langue anglaise qui est une langue
d'un nombre considérable d'habitants de cette province et dont la
connaissance est indispensable, nous parait-il, sur le continent
nord-américain. Au contraire, nous croyons que la meilleure garantie
pour l'avenir de la langue française est le développement
économique et culturel de la province, est une réalisation
conséquente par étapes d'un vrai bilinguisme dans tout le Canada.
Nous appuyons donc très fortement des modifications du projet de loi 22
qui pourraient nous approcher de cette réalisation et qui pourraient
éliminer un conflit ou un danger d'un conflit de cette loi avec le
principe constitutionnel de deux langues officielles.
Nous sommes d'avis que la législation en cette matière
dans la plupart des autres provin- ces du Canada, on pourrait même dire
dans toutes les autres provinces du Canada, ne garantit pas effectivement les
droits et les besoins de la population canadienne de langue française et
de progrès vers la réalisation de ce but suprême, à
notre avis, à savoir que le Canada devienne un pays bilingue.
Il ne nous faut pas cependant pour cette raison, croyons-nous, modifier
la législation de cette province dans un sens qui pourrait nous
éloigner de ce but suprême. En effet, il nous semble
évident que le projet de loi, tel qu'il nous est soumis actuellement,
aurait pour conséquence de retenir et même de faire reculer des
possibilités du développement de la langue française dans
d'autres provinces.
Le congrès canadien a nommé un comité, lequel, dans
le cadre du raisonnement dont il est question plus haut, se permet, au nom du
groupe ethnique polono-canadien, de soumettre les propositions dont vous avez
le texte et dont je ne voudrais pas discuter avant que vous puissiez nous poser
des questions.
Je voudrais ajouter que j'ai ici, avec moi, les copies de deux lettres
qui m'ont été remises avant notre départ de
Montréal, hier soir, l'une par le président du grand
Comité des églises et des associations hongroises de
Montréal, l'autre par la Société
prométhéenne, qui groupe quatorze groupements ethniques au
Canada, et, en plus de cela, la Commission de la citoyenneté et qui,
toutes deux dans leurs lettres, s'associent entièrement, après
avoir pris connaissance de notre mémoire, avec les thèses que je
me suis permis de vous exposer et que nous essaierons de défendre ici en
répondant à vos questions.
En plus de cela, je voudrais souligner encore que je proposerais... Je
n'ai pas encore parlé, en présentant mes collègues, de mon
occupation à moi. Je suis un professeur retraité de
l'université McGill en littérature, civilisation et langue
françaises, j'étais, jusqu'à l'année
dernière, en charge de l'organisation de la direction de l'enseignement
du français au personnel enseignant, de recherche et administratif de la
même université. Je suis aussi président et directeur de la
section canadienne de l'Institut polonais des arts et des sciences en
Amérique.
Comme vous voyez, j'ai une certaine expérience de l'enseignement
que j'ai donné personnellement, l'enseignement de la langue
française depuis 27 ans. J'ai eu affaire non seulement avec les
étudiants à l'Université ou bien à des personnes
adultes venant de la ville pour des cours du soir. J'ai également
fondé et dirigé, pendant une bonne dizaine d'années, un
service spécial à l'université McGill pour l'enseignement
du français, à partir de 1963, au personnel enseignant, au
personnel de recherche et aussi au personnel administratif de notre
université. C'était une preuve de bonne volonté de leur
part. Il y a 1,400 environ de ces gens, parmi ce personnel, qui sont venus
chaque année, pendant dix à onze ans, suivre ces cours. C'est une
université qui, au moment où je suis arrivé
d'Angleterre après la deuxième guerre mondiale,
était, je dirais, un bastion de langue anglaise. Elle est devenue
aujourd'hui... elle s'est ouverte à la possibilité de comprendre
et de parler, de s'exprimer en français d'une façon plus ou moins
correcte de la part de tout le personnel qu'elle comporte.
Je crois que c'est une preuve de bonne volonté et une preuve
aussi de la possibilité, même pour les adultes, d'apprendre
à maîtriser la langue française.
Voici ce que je voulais dire, et si vous le permettez, M. le
Président, je voudrais passer encore la parole à mes
collègues pour exposer des points spéciaux très
brièvement et pour pouvoir répondre plus tard aux questions que
vous aurez l'obligeance et la possibilité de nous poser.
Si vous me le permettez, je vais passer la parole à M. Solovij,
qui est à ma droite, pour exposer la question des entreprises
économiques.
LE PRESIDENT (M. Lamontagne): Pardon, monsieur. J'aimerais vous faire
remarquer quand même que le temps alloué pour la
présentation est d'environ 20 minutes et qu'il vous reste environ six
minutes. Je présume que vous pouvez...
M. SOLOVIJ: Je passe sur les petites corrections que nous
suggérons dans notre mémoire, changer un an, deux ans, des trucs
comme cela, et je passe aux choses plus essentielles.
Au chapitre sur la langue de travail, en plus de quelques corrections de
moindre importance, nous proposons de supprimer les articles 32, 33 et 34. J'ai
cru comprendre ce matin, de la bouche du ministre Cloutier, que le gouvernement
ne soutient plus l'article 31.
En tant que contribuables, nous nous opposons aux dispositions qui
donnent une préférence aux entreprises titulaires du certificat
de francisation. En effet, à notre avis, le seul critère
applicable pour l'attribution, par l'administration publique, de contrats, doit
être le critère économique, c'est-à-dire celui
concernant les prix et la qualité des fournitures, services, ou travaux
offerts.
Le projet donne une grande latitude au commissaire-enquêteur en ce
qui concerne l'application de la loi, ce qui présente un sérieux
danger car elle risque d'entraîner maintes décisions arbitraires,
surtout dans le cas des petites entreprises qui ne peuvent pas se permettre
d'engager des spécialistes pour se défendre.
Comment sera établi, par exemple, le degré de francisation
pour une petite épicerie où travaille seulement la famille du
propriétaire? Le permis de la vente de la bière sera-t-il dans ce
cas dépendant du résultat de l'examen de tous les membres de
cette famille?
En ce qui concerne l'enseignement, sur lequel mes collègues
auront beaucoup plus à dire, je me limite seulement à une
question. Nous sommes tout à fait d'accord, solidairement, sur l'article
52 qui prévoit que l'école doit assurer la connaissance de la
langue française parlée et écrite aux élèves
qui reçoivent l'enseignement en langue anglaise. Nous sommes cependant
d'avis qu'une bonne connaissance de la langue anglaise s'impose
également aux élèves fréquentant les écoles
de langue française. Le texte du projet de loi 22 est muet à ce
sujet. Cette lacune ne peut pas encourager les parents à diriger leurs
enfants vers les écoles dont l'enseignement en anglais leur garantira la
bonne connaissance des deux langues en usage au Canada, surtout si la Centrale
de l'enseignement du Québec, comme nous l'avons appris par la presse,
préconise à la commission la suppression totale de l'enseignement
de la langue seconde au niveau primaire.
Il y a lieu d'observer que les écoles d'une autre province ne
peuvent être comparées que peu favorablement avec les
écoles secondaires de plusieurs pays de l'Europe continentale, où
souvent l'enseignement d'une ou même de deux langues autres que la langue
maternelle est obligatoire.
Dans le cas du Québec, dont l'économie repose dans une
très large mesure sur le commerce avec les autres provinces du Canada et
les Etats-Unis, et dont le développement futur dépend en grande
partie de l'afflux des capitaux étrangers, la connaissance de l'anglais,
par excellence une langue financière, commerciale et technologique, est
absolument indispensable pour tous ceux qui aspirent entrer dans les cadres et
d'autant plus pour ceux qui désirent occuper un poste de direction dans
les affaires. La familiarité avec le monde international de la finance
indique que la connaissance de l'anglais se répand de plus en plus dans
les centres mêmes tels que Paris, Genève ou Bruxelles. Pour
résumer, nous ne voyons aucun conflit entre l'objectif du projet de loi
22, c'est-à-dire la connaissance de la langue française par
toutes les personnes vivant au Québec, et l'enseignement de l'anglais
à tous les jeunes de la province. Au contraire, nous sommes convaincus
que la connaissance de cette langue est nécessaire dans
l'intérêt du développement économique du
Québec et ne peut qu'enrichir la culture générale de la
population.
M. KAVCZAK: Si vous me permettez, je suis M. André Kavczak de
Loyola, Montréal. Il nous semble que les craintes et les
appréhensions de la communauté polonaise et des autres
communautés ethniques au Québec sont basées,
premièrement, sur cette question: Quelle est la meilleure méthode
d'assurer un bon avenir à nos enfants, au Québec, au Canada et
dans l'Amérique du Nord? L'avis qui prévaut dans notre
communauté est qu'une bonne connaissance des deux langues, le
français et l'anglais, constitue une fondation favorable et
peut-être nécessaire pour le vrai développement de la
personnalité de l'individu, et, en même temps,
la meilleure préparation pour une vie utile et créatrice
dans la société. Il nous semble qu'il faut commencer
l'enseignement des deux langues le plus tôt possible,
préférablement avant l'âge de neuf ans. Cette opinion
semble être appuyée par des autorités du premier rang,
telles que Jean Piaget, Penfield, McEven ou, Lambert.
Cette question est particulièrement importante du point de vue
des responsabilités des parents et je voudrais citer les
résultats des études longitudinales des professeurs Lambert et
Tucker.
Je cite la revue Psychologie, no 49, de 1974: "Les analyses montraient
que le bilan était bien supérieur sur le plan de l'intelligence
que leur travail scolaire était incontestablement meilleur et qu'il
avait une attitude de plus grande compréhension." C'est de ce point de
vue que nous sommes inquiets que les effets de l'application des normes des
articles 48 à 52 du projet de loi 22 peuvent être négatifs
pour la génération nouvelle de Québécois. Bien
qu'ils soient de familles francophones, anglophones ou polonophones, il nous
semble que le système jusqu'ici et les privilèges de la loi 63 en
particulier, ont offert des chances uniques pour nos enfants, des chances qu'il
faut apprécier et protéger, îl nous semble que les parents
eux-mêmes sont dans la meilleure position d'évaluer quel
régime linguistique à l'école est le plus avantageux pour
un vrai développement de leurs enfants.
Concernant les tests prévus par le projet de loi 22, il nous
semble qu'il y a ici un sérieux danger d'empêcher et même
endommager la structure psychique d'un très jeune enfant surtout s'ils
sont appliqués d'une façon rigide sans tenir compte de la
situation dans la famille de l'enfant et des aspirations naturelles et
justifiées de ces parents. Merci.
M. ROMER: M. le professeur Adamkiewicz de Loyola, si vous voulez.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Monsieur, je dois vous aviser que l'on
dépasse le temps d'environ deux minutes. A moins que la commission
m'autorise à allonger la période de présentation.
M. MORIN: M. le Président, en ce qui concerne l'Opposition nous y
consentons volontiers. L'exposé, jusqu'ici a été fort
intéressant. Nous n'avons pas d'objection à ce qu'il soit
poursuivi.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce qu'on peut compter que dans deux ou
trois minutes on pourrait compléter la présentation?
M. ADAMKIEWICZ: M. le Président, à cause du manque de
temps, je serai bref et nécessairement lapidaire. Je m'adresserai tout
simplement au chapitre du projet de la loi qui traite de la langue
française comme langue d'enseignement. Dans ce chapitre, nous
détectons je m'exprime en termes très
généraux un quiproquo et une contradiction. Le quiproquo
consiste en les faits suivants. Si nous comprenons bien les buts de ce projet
de loi, ce but vise un renforcement de la nation canadienne-française
par le truchement de la langue et de la culture française. Il nous
semble étrange que ce renforcement doive être
exécuté au moyen ou plutôt à coup de Polonais,
d'Italiens, de Juifs ou autres immigrants. Nous croyons donc quoique
nous soyons absolument d'accord sur le but que les moyens conduisent
ailleurs. Quant à la contradiction, elle touche l'idée de la
francophonie en juxtaposition avec l'idée nationale de la province. Il
nous semble que la francophonie est une idée beaucoup plus large. Pour
illustrer mon point, je me permettrai, M. le Président, de citer
l'exemple de l'anglophonie dans ce pays. L'anglophonie se compose de nombreux
groupes ethniques et je suis sûr qu'aucun de ces groupes ne serait
d'accord que seulement les idées d'un seul groupe, notamment
britannique, lui soient imposées dans les questions de langue et
d'éducation. Je crois que la situation est un peu semblable du
côté de la francophonie et beaucoup de groupes ethniques qui
appartiennent à la francophonie canadienne désirent avoir
l'accès libre à l'enseignement de la langue anglaise aussi bien
que la langue française. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Messieurs, nous vous remercions et avant de
demander au ministre de commencer la période des questions, j'aimerais,
si vous voulez bien, vous aviser que M. Brown, député de
Brome-Missisquoi, remplace M. Hardy comme membre de la commission et j'aimerais
également aviser la commission scolaire Lakeshore qu'à cause des
retards à l'Assemblée nationale tantôt, il nous est
apparent et il est sûr qu'il ne sera pas possible pour la commission de
l'entendre ce soir. Alors, la Commission scolaire Lakeshore qui devait
comparaître en dernier lieu aujourd'hui sera convoquée à
nouveau par le secrétariat des commissions.
M. MORIN: M. le Président, puis-je simplement ajouter un mot?
Nous aurions été fortement intéressés à
entendre cette commission scolaire, j'espère qu'elle reviendra. Nous
sommes vraiment navrés de ces retards occasionnés par les
débats interminables de l'Assemblée.
M. SEGUIN: M. le Président, d'autant plus que vous faites ce
commentaire, est-ce qu'on me permettra de demander si le délai que vous
suggérez serait un délai de sept jours ou si ce sera un
délai de 24 heures ou 48 heures?
M. CLOUTIER: M. le Président, d'après...
M. SEGUIN: On a passé la journée, ici, vous savez.
M. CLOUTIER: ... nos règlements, le délai est de sept
jours, mais à la suite d'une motion qui a été
acceptée à l'Assemblée nationale, cette période a
été réduite à 48 heures. Cependant, nous sommes
d'accord avec le secrétariat des commissions pour convoquer
immédiatement même, aujourd'hui ou demain matin, ce groupe pour la
semaine prochaine.
M. SEGUIN: La semaine prochaine, pouvez-vous déterminer la
journée, M. le Président?
M. CLOUTIER: Je ne crois pas que ce soit le lieu en commission
même...
M. SEGUIN: Que ce soit le mardi, le jeudi ou le mercredi.
M. CLOUTIER: ... de faire une convocation. Mais je suggérerais
que le président entre en communication immédiatement avec le
secrétaire des commissions.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Est-ce que le secrétaire
général de la commission scolaire Lakeshore, M. LeBaron, est ici?
Est-ce qu'il y a quelqu'un? Vous pourriez peut-être rencontrer M.
Pouliot, le secrétaire des commissions, pour vous entendre sur votre
date de comparution la semaine prochaine.
M. VEILLEUX: M. le Président, il y aurait peut-être lieu,
lorsque la comparution d'un groupe est remise, compte tenu qu'il manque du
temps, de prévoir que le secrétaire des commissions, lorsqu'on
reconvoque l'organisme en question, lui donne priorité lorsqu'il est
reconvoqué une deuxième fois.
M. CLOUTIER: Dans la mesure du possible, M. le Président, nous
tenons compte du désir...
M. VEILLEUX: Le Congrès canadien polonais avait
déjà été convoqué et on l'a replacé
à la fin de la liste.
M. CLOUTIER: Dans la mesure du possible, nous tenons compte des
désirs des associations. Maintenant, il faut bien comprendre, comme l'a
expliqué le président ce matin, qu'il est normal que tous les
groupes soient convoqués à la même heure le matin. Il
s'agit là d'un organisme parlementaire.
M. VEILLEUX: Oui, mais ce que je veux dire au ministre, c'est que,
nécessairement, le président de la commission est obligé
d'appeller les organismes selon l'ordre qui est inscrit ici, alors on pourrait
inscrire le groupe, lorsqu'il sera reconvoqué, en premier au lieu d'en
dernier.
M. CLOUTIER: Dans la mesure du possible, mais si nous voulons les voir
rapidement, la semaine prochaine, comme ça semble être le souhait,
il y a déjà des gens convoqués. Nous allons tenter de
tenir compte de cela.
M. VEILLEUX: D'accord!
LE PRESIDENT (M. Gratton): J'invite le ministre de l'Education à
commencer la période de questions.
M. CLOUTIER: M. le Président, je voudrais d'abord remercier le
Congrès canadien polonais de sa présentation.
Je sais pertinemment quel a été l'apport du groupe
polonais à la collectivité québécoise et au Canada
dans son ensemble. Je ne ferai que deux brefs commentaires avant de poser une
question d'ordre général. Le premier commentaire se
réfère à ce que j'ai déjà dit ce matin,
à savoir qu'au cours de la discussion en commission élue, article
par article, nous allons apporter toutes les informations pertinentes en ce qui
concerne les réglementations des programmes de francisation. A ce
moment-là, nous serons amenés à définir certaines
expressions qui semblaient créer des difficultés à ce
groupe comme l'expression "permis".
La deuxième remarque concerne certains commentaires en rapport
avec les immigrants, dans le domaine de la langue d'enseignement. Le projet de
loi tel que rédigé ne comporte aucune discrimination envers
quelque groupe que ce soit; tous les citoyens sont traités de la
même façon dans l'optique de l'orientation choisie.
Voici maintenant ma question : Ce mémoire semble se placer
surtout dans une perspective de bilinguisme, de bilinguisme dans l'ensemble du
pays et de bilinguisme pour chacune des provinces. Cependant, est-ce que ce
groupe n'admet pas qu'il est important pour le Québec de se situer dans
une optique différente, à savoir que le français doit
devenir prioritaire sur son territoire? Ceci ne paraît pas
d'emblée incompatible à ce qu'il y ait un bilinguisme dans
l'ensemble du pays. Ceci dit, est-ce que cela n'entraîne pas
inévitablement certaines restrictions du point de vue de l'usage de
l'anglais sur le plan collectif? Ce qui ne modifie pas les droits individuels
des personnes de s'adresser ou d'utiliser cette langue.
M. ROMER: Nous sommes tout à fait d'accord, M. le ministre, et
nous avons proposé de notre côté de remplacer l'adjectif
officiel par l'adjectif prioritaire dans l'article premier. De fait, n'est-ce
pas, nous comprenons que le mot "officiel" se rapporte déjà, dans
la législation fédérale, à la loi sur les langues
et aussi il en est question dans un aspect limité, dans l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique.
M. CLOUTIER: Je ne veux pas entreprendre de débat. Ce n'est pas
le lieu. J'aurai amplement l'occasion de démontrer qu'il n'y a pas de
contradiction à ce qu'une province quelle
qu'elle soit fiasse de la langue de sa majorité une langue
officielle, même s'il y a, en ce qui concerne les institutions
fédérales, deux langues officielles. Parce qu'il faut bien
mesurer la portée de la loi sur les langues officielles. Mais ce que
vous dites me semble entrer en contradiction avec d'autres de vos remarques
où, tout en admettant que le français soit prioritaire, vous
semblez enlever, dans le projet de loi, tout ce qui tend à rendre cette
langue prioritaire, indépendamment des expressions utilisées.
M. ROMER: M. le ministre, il me semble que de notre côté,
nous approuvons entièrement ce qui figure dans l'article premier,
c'est-à-dire dans le préambule, en ce qui concerne le rôle
et l'importance, l'épanouissement de la langue française. Ici, il
s'agit simplement de l'adjectif "officiel" ou de l'adjectif "prioritaire" dans
la première remarque que nous avons faite, par rapport à
l'article 1.
M. CLOUTIER: M. le Président, j'ai l'impression que, si vous
êtes d'accord sur le principe, vous n'êtes pas d'accord sur les
dispositions qui sont dans la loi et qui mènent au principe, dans la
mesure où vous semblez privilégier un bilinguisme.
M. ROMER: Oui. Je ne crois pas que de notre côté il y ait
opposition à cette définition. Je crois qu'il est difficile qu'il
y ait une contradiction entre le terme "officiel" dans la loi
fédérale et le terme "officiel" dans la loi provinciale. Vous
voyez, quand nous parlons d'une langue officielle et que, de l'autre
côté, il est question dans une loi qui existe au point de vue
fédéral de deux langues, il y a une certaine opposition. Il est
bien vrai que la définition de la langue officielle, au point de vue
fédéral, se rapporte à certains domaines seulement. Dans
ces domaines, il y a contradiction entre la loi fédérale et le
projet de loi provincial.
M. CLOUTIER: Je m'arrête là, ne voulant pas engager de
débat et je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Le chef de l'Opposition.
M. MORIN: M. le Président, je me réjouis
profondément que cette commission puisse faire appel à la longue
expérience d'un pays remarquable par son histoire, qui a lutté si
longtemps pour arracher son indépendance à de puissants voisins.
Quel magnifique exemple pour nous que ce pays petit par la géographie,
mais grand dans ses trois âmes pour parler comme Adam Mickiewicz.
Aussi, voudrais-je commencer par évoquer avec nos invités
l'expérience historique de la Pologne. Tout d'abord, messieurs, comme
première question, j'aimerais vous demander quelle a été,
avant et après l'indépendance de votre pays d'origine, l'attitude
du gouvernement polonais à l'égard de la langue russe, par
exemple, ou de toute autre langue minoritaire sur le territoire de la
Pologne.
M. ROMER: Je vous remercie d'abord de vos paroles si touchantes en ce
qui concerne la Pologne et qui nous ont touchés ici. Nous sommes
vraiment profondément touchés de votre attention et des paroles
que vous nous avez adressées.
En ce qui concerne les minorités nationales, la minorité
russe n'existe presque pas et n'existait pas dans la Pologne
indépendante. Il s'agissait de la minorité ukrainienne, ou
ruthène ou blanche-russienne, ou lituanienne. De ce côté,
nous avions des écoles minoritaires, pendant la période où
il y avait indépendance, dans lesquelles on apprenait ces langues et il
y avait la possibilité, puisqu'il y a deux langues en plus du polonais
qu'on apprenait dans toutes les écoles publiques, il y avait le choix
à faire entre ces différentes langues.
Du reste, ces groupes minoritaires en Pologne avaient la faculté
d'avoir aussi leurs propres écoles avec l'enseignement de la langue
nationale. Je crois que de ce côté, notre passé est propre.
Il peut y avoir des erreurs d'application, comme dans tous les pays et dans
toutes les existences, mais en général, je crois qu'on peut
être plus ou moins satisfait du traitement dans le domaine de
l'enseignement qui a été réservé aux
minorités nationales polonaises.
Mais je veux attirer votre attention sur le fait que, dans la Pologne
actuelle, ces minorités n'existent presque plus. Vous savez qu'il y a eu
le changement de frontière et que la Russie a accaparé presque la
moitié de la Pologne orientale où se trouvaient justement ces
minorités ukrainiennes, ruthènes et blanches-russiennes.
Maintenant, la Pologne est un pays qui est infiniment plus unifié
au point de vue de la langue et au point de vue de la nationalité et ses
problèmes sont infiniment moindres. Vous savez que
l'élément juif qui existait en Pologne et qui, surtout au point
de vue économique, jouait un rôle important avant la
deuxième guerre mondiale, a plus ou moins été
exterminé par les Allemands pendant l'occupation allemande. Il y a des
horreurs qui se sont passées, des camps de concentration et des
exterminations qui ont révolté le sentiment de l'Europe et du
monde entier, dont la responsabilité retombe sur l'occupant allemand.
D'autre part, donc, l'élément juif a presque pratiquement disparu
de la Pologne de nos jours, et l'élément des autres
minorités nationales que je viens de citer a disparu plus ou moins avec
le changement des frontières qui a existé à la fin de la
deuxième guerre mondiale.
M. MORIN: Effectivement, M. le président, la Pologne, au moment
de son indépendance, comptait de très nombreuses
minorités, et Lord Curzon avait même pu parler de cette
région de l'Europe comme d'une véritable "peau de
panthère".
Le sens de ma question est le suivant: Le
russe a joué un très grand rôle en Pologne avant
l'indépendance. Quelle a été l'attitude du gouvernement
polonais au moment de l'indépendance à l'égard de la
langue russe?
M. ROMER: La langue russe ne s'appuyait presque pas sur
l'élément, car il n'y avait pas d'élément ethnique
russe en Pologne ou presque pas, très peu, extrêmement peu
nombreux. Il ne faut pas confondre le russe avec l'ukrainien ni avec le
blanc-russien, de sorte que ce problème avait un aspect tout à
fait particulier. Le rôle de la Russie et l'influence culturelle russe
étaient diminués en Pologne du fait que c'était
l'oppresseur et que, par opposition à l'oppresseur, même au point
de vue culturel et même au point de vue des apports qui pourraient
être intéressants pour notre civilisation, il y avait une
opposition tellement forte et tellement violente qu'il y avait toujours une
opposition, par exemple, pour apprendre la langue russe en Pologne. On
comprenait l'avantage que cela représentait, un puissant voisin au point
de vue des relations économiques joue un certain rôle, mais ce
phénomène se reproduit de nos jours, et nous observons en Pologne
le fait qu'on ne désire pas, malgré l'intérêt
économique que cela représenterait, on s'oppose... Cette jeunesse
à laquelle on voudrait imposer, sous la pression de Moscou,
l'apprentissage de la langue russe, s'oppose à cela par le fait de cette
atmosphère créée par l'oppression russe et par la
domination de l'influence russe économique et autres qui pèsent
sur la Pologne de nos jours.
M. MORIN: M. le Président, vous est-il jamais venu à
l'esprit que le Québec pourrait être aux Etats-Unis ce que la
Pologne a été et est toujours à l'Union
Soviétique?
M. ROMER: Je crois, M. le chef de l'Opposition, que ce n'est pas
comparable, car l'oppresseur russe a commis tant d'injustices et d'injustices
sanglantes et violentes pendant la domination des 150 années qu'il a
exercée sur nous, que c'est une chose qui n'est pas comparable avec le
voisinage des Etats-Unis qui, au point de vue économique naturellement,
peut exercer une pression profonde sur le Canada, mais qui n'a jamais
dominé le Canada au point de vue spirituel, ni au point de vue
économique, ni au point de vue militaire.
M. MORIN: Pourriez-vous nous dire si l'Union Soviétique n'a
jamais cherché à exercer son influence économique en
Pologne?
M. ROMER: Au contraire. Elle a toujours trouvé une opposition
extrêmement forte et plus la pression était violente, plus
l'opposition, au lieu de diminuer, augmentait encore. Et vous savez que la
jeunesse...
M. MORIN: C'est tout à fait remarquable. Je crois que nous,
Québécois, pouvons puiser dans votre histoire des enseignements
extrêmement précieux. Je voudrais vous demander combien il y avait
de langues officielles, en Pologne, après l'indépendance.
M. ROMER: Après l'indépendance, il n'y avait qu'une seule
langue officielle, mais dans l'enseignement, nous avions la langue de nos
voisins. On enseignait et on pouvait choisir l'allemand ou le russe, ou le
français qui était toujours une deuxième langue dans la
Pologne d'avant la première guerre mondiale.
M. MORIN: Oui, effectivement. Mais dans les écoles, à
l'intérieur de la Pologne, où il n'y avait qu'une seule langue
officielle, voulez-vous dire que l'on apprenait le blanc-russien, l'ukrainien
ou l'allemand comme langue première ou comme langue seconde?
M. ROMER: Comme langue seconde.
M. MORIN: Comme langue seconde. Donc, dans toutes les écoles
polonaises, on apprenait d'abord et avant tout le polonais.
M. ROMER: Oui.
M. MORIN: C'est bien exact?
M. ROMER: Oui.
M. MORIN: Là encore, M. le Président, vous nous apportez
une expérience pleine d'enseignements. Puis-je vous demander, en
particulier, en ce qui concerne la Silésie, un pays qui fait aujourd'hui
partie intégrante de la Pologne, mais qui longtemps a été
dotée d'un statut particulier au temps de la Société des
Nations, quel était le régime linguistique en vigueur?
Commençons par la période de 1920 à 1939.
M. ROMER: L'enseignement était donné en langue polonaise
avec l'allemand comme langue seconde.
M. MORIN: Mais en Silésie, il y avait des minorités dont
la langue allemande était la langue maternelle, n'est-ce pas?
M. ROMER: Oui, la minorité allemande, mais cette dernière
a été diminuée très considérablement par le
fait du rapatriement des Allemands en Allemagne et par le rapatriement des
groupes polonais de travailleurs ouvriers qui rentraient en Pologne.
M. MORIN: Oui, mais cela s'est passé en 1945.
M. ROMER: Non.
M. MORIN: Je vous parle de la période de 1920 à 1939.
M. ROMER: Même là déjà, après la
première
guerre mondiale, il y avait eu des échanges de population assez
considérables.
M. MORIN: Oui, mais la minorité germanophone est tout de
même restée fort importante à cette époque.
M. ROMER: Oui, et il y avait à cette époque des
écoles de langue allemande en Silésie.
M. MORIN: Un instant; avez-vous dit des écoles polonaises dans
lesquelles l'allemand était enseigné comme langue seconde ou des
écoles où seul l'allemand était enseigné?
M. ROMER: Non. L'enseignement du polonais était toujours maintenu
en Pologne...
M. MORIN: Oui.
M. ROMER: ... et c'étaient des écoles où
l'enseignement des autres sujets pouvait se faire ou bien en polonais ou bien
en allemand.
M. MORIN: Oui, mais c'étaient des écoles polonaises.
M. ROMER: C'étaient des écoles polonaises. M. MORIN: C'est
bien mon impression.
M. ROMER: Au fond, l'enseignement était entre les mains de
l'Etat.
M. MORIN: Et pour nous résumer, dans la Pologne, depuis que cet
Etat est indépendant, il n'y a jamais eu qu'une seule langue
officielle.
M. ROMER: Oui.
M. MORIN: Et cela malgré la présence de l'Union
Soviétique?
M. ROMER: Malgré la présence de l'Union
Soviétique.
M. MORIN: Et cela malgré la présence de la Prusse?
M. ROMER: Parfaitement.
M. MORIN: Et malgré la présence de l'Allemagne?
M. ROMER: Enfin la Prusse représentait l'Allemagne.
C'était une seule...
M. MORIN: Je me réfère à la Prusse d'il y a
quelques années et plus récemment à l'Allemagne.
Puis-je vous poser une dernière question, M. le Président?
Il y a toujours eu en Pologne des échanges de population avec les
voisins. Il y a toujours eu une certaine émigration de la Pologne, mais
aussi une certaine immigration vers la Pologne. Pourriez-vous nous dire
à quelles écoles les immigrants allaient en Pologne?
M. ROMER: Les immigrants?
M. MORIN: Oui, les personnes qui venaient s'établir en
Pologne.
M. ROMER: Les immigrants étaient des Polonais qui rentraient en
Pologne, n'est-ce pas? Les immigrants...
M. MORIN: II n'y a jamais eu d'autres immigrants que les Polonais.
M. ROMER: Ceux qui partaient étaient justement les
minorités nationales d'autres langues, comme les Allemands qui avaient
tendance à quitter la Pologne, de sorte que les immigrants
étaient ceux qui avaient travaillé ou résidaient dans les
pays étrangers comme les pays voisins ou les pays plus lointains comme
la France ou l'Allemagne occidentale. Ils avaient tendance à retourner
en Pologne pour retrouver leur mère patrie.
M. MORIN: M. le Président, vous ne pouvez ignorer que, le long de
la frontière tchèque, il y a toujours eu des travailleurs
tchèques qui venaient habiter en Pologne, attirés par le travail,
que le long de la frontière allemande, il y a des Allemands qui ont
passé la frontière. Cela n'a jamais été un courant
très fort, mais il y a eu une certaine immigration en Pologne.
M. ROMER: Les Allemands étaient très peu nombreux, ceux
qui venaient en Pologne.
M. MORIN: Oui, mais ceux qui y venaient, dans quelles écoles
allaient-ils? Dans des écoles de leur choix?
M. ROMER: Je ne crois pas qu'il y avait des familles allemandes qui
venaient s'installer en Pologne depuis la première guerre mondiale. Il y
avait des travailleurs, des spécialistes qui venaient pour passer
quelque temps et pour gagner leur vie, pour travailler en Pologne...
M. MORIN: Oui.
M. ROMER: ... mais pas pour s'y installer. Il y avait une nette tendance
de l'élément allemand à s'expatrier et à retourner
dans un milieu qui lui était plus sympathique et plus favorable,
n'est-ce pas? De ce fait, les personnes dont vous parlez en ce moment,
c'étaient des unités très peu nombreuses et pas une
immigration stable, mais une immigration saisonnière, de travail.
M. MORIN: Depuis quelques années, M. le Président
ce sera ma dernière question y a-t-il des immigrants en
Pologne?
M. ROMER: Il y a des immigrants, ceux qui rentrent de l'étranger,
des Polonais qui retournent en Pologne pour s'installer là-bas.
M. MORIN: II n'y a aucune immigration en provenance des pays baltes, de
l'Union Soviétique, de l'Ukraine, de la Tchécoslovaquie ou de
l'Allemagne, aucune?
M. ROMER: Je crois que je ne pourrai pas dire aucune, car
évidemment, il peut y avoir des unités et des cas de mariage
mixte et des familles mixtes, etc. Cela peut exister. D'après ce que
nous savons, il n'y a pas d'immigration de groupes, ou d'immigration importante
d'éléments non polonais qui rentrent en Pologne en ce moment.
M. MORIN: Pour ceux qui rentrent et qui ne sont pas d'origine polonaise,
dans quelles écoles vont-ils?
M. ROMER: Les écoles qu'ils ont à leur disposition. Dans
certaines villes où il y a encore un élément allemand, par
exemple, il y a des écoles allemandes. A ce point de vue, cela
existe.
M. MORIN: Oui, c'est-à-dire des écoles polonaises
où l'allemand est enseigné à titre de langue seconde.
M. ROMER: Des écoles polonaises de langue allemande. Oui, comme
langue seconde.
M. MORIN: Comme langue seconde. Bien. J'ai terminé. Merci, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Alors, le député de
Rouyn-Noranda. Il reste environ cinq ou six minutes à l'Opposition.
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais tout d'abord
féliciter les représentants du Congrès canadien polonais
qui ont eu cette délicatesse de nous présenter leur
mémoire en français et de répondre à nos questions
dans un excellent français, d'ailleurs.
Je voudrais demander aux représentants du Congrès canadien
polonais, M. le Président, s'ils ont à leur disposition des
statistiques nous permettant de pouvoir évaluer quelle serait la
proportion des Canadiens-polonais dans la province de Québec qui sont
intégrés à l'une ou l'autre des communautés,
c'est-à-dire soit à la communauté francophone ou à
la communauté anglophone.
M. SOLOVTJ: Je ne pense pas que nous puissions répondre à
cette question. La seule chose que nous savons, d'après le recensement
de 1961, c'est qu'il y avait 30,790 personnes qui se sont
déclarées d'origine polonaise. Mais quel groupe s'est
intégré au Québec? La commission Gendron non plus n'a pas
pu faire des études allant si loin. C'est impossible de répondre
à cette question.
M. SAMSON: D'accord. Même si vous n'avez pas de statistique
exacte, est-ce qu'il vous serait possible de donner, devant cette commission,
une évaluation au meilleur de votre connaissance des proportions?
M. ROMER: II me semble, M. le député, que
l'intégration se fait à la deuxième ou à la
troisième génération. La première a de la
difficulté à s'intégrer car elle tient encore à ses
racines très fortement, ses racines nationales. L'intégration
linguistique, l'intégration spirituelle peuvent se faire seulement avec
les générations qui viennent. Nous avons maintenant au Canada la
troisième ou la quatrième génération. Cela
dépend des régions dans lesquelles ils sont situés pour
voir si l'intégration dans le milieu canadien, qu'il soit
français ou qu'il soit anglais d'origine, se fait plus ou moins
rapidement. Mais cette intégration en général est plus
difficile avec l'élément polonais puisqu'il s'est exercé
depuis longtemps, très fortement, à s'opposer à
l'intégration des puissances avoisinantes qui ont accaparé la
Pologne pendant 150 ans. Alors, vous voyez, l'élément polonais,
dont la langue et la civilisation sont millénaires, qui est riche comme
civilisation, donne une force d'opposition à l'intégration qui
est peut-être plus forte que dans les autres éléments. Nous
nous rendons compte, en comparant notre situation ici au Canada avec celle
d'autres groupes minoritaires nationaux que le Polonais résiste plus
longtemps à l'intégration que le groupe d'autres
nationalités d'origine.
M. SAMSON: Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire si, selon
vous, les membres de votre communauté ont plutôt tendance à
parler les deux langues de façon généralisée, et
à ne pas s'intégrer directement ni à l'une ni à
l'autre des communautés, mais plutôt parler les deux langues?
Est-ce que c'est bien cela que je comprends?
M. ROMER: Oui, il y a une forte tendance de la part des Polonais, qui
viennent en Amérique et qui, évidemment, voyagent passablement et
profitent de la liberté qu'ils n'ont pas en ce moment dans leur propre
pays, à insister sur une parfaite connaissance des deux langues pour
pouvoir se sentir plus libres dans leurs mouvements et dans leurs entreprises
ici dans ce domaine. Mais je dois dire que la culture et la langue
française était peut-être surtout, autrefois, mais
peut-être qu'elle continue toujours à être plus
rapprochée de nous à cause de différentes
affinités, affinité religieuse, avec l'élément
franco-canadien.
Il y a le fait que nous sommes accueillis ici avec beaucoup de
civilité et beaucoup d'amitié par les Canadiens français.
Ce fait nous rapproche de l'élément canadien-français.
Nous som-
mes portés à dominer plus facilement, malgré les
difficultés linguistiques, la langue française que la langue
anglaise. D'autre part, il y a l'élément économique,
l'élément gagne-pain, etc., qui joue un rôle
peut-être plus considérable de la part de ceux qui ne
s'arrêtent pas définitivement au Québec et qui cherchent
des possibilités de vie meilleure et de vie plus facile dans le Canada
tout entier et qui se remuent facilement d'un coin à l'autre.
M. SAMSON: Est-ce que je dois comprendre par là que les membres
de votre communauté ont plus de facilité ou, encore, sont plus
attirés vers un gagne-pain en langue anglaise qu'en langue
française?
M. ROMER: Non, pas nécessairement. M. SAMSON: Pas
nécessairement.
M. ROMER: Je ne crois pas. Mais il y a ici des éléments
culturels et des éléments d'affinité, comme je vous dis,
politiques, religieuses, culturelles, qui ont aussi leur poids et leur
importance. Cela dépend plutôt du niveau d'éducation, du
niveau des occupations professionnelles qu'ils avaient autrefois en Pologne et
qui ont dû changer en s'intégrant à ce pays. C'est
ça qui décide de la chose.
M. SAMSON: Les enfants des membres du Congrès canadien polonais
sont-ils, selon vous, en plus forte majorité attirés vers
l'école française que vers l'école anglaise?
M. ROMER: Comme je vous ai dit, nous croyons que...
M. SAMSON: Je m'excuse, est-ce que je peux reformuler ma question
autrement?
M. ROMER: Le français est plus difficile à apprendre et
nous recommandons à tous nos compatriotes d'origine polonaise de faire
apprendre le français dans une école française au
début, car c'est la langue qui est la plus difficile, et nous tenons
à ce qu'elle soit parfaitement connue du moment qu'on est établi
ici au Québec.
M. SAMSON: Mais en pratique, selon votre évaluation, est-ce que
plus d'enfants polonais sont dans les écoles françaises que dans
les écoles anglaises?
M. ROMER: Cela dépend où ils sont installés.
M. SAMSON: Dans la région de Montréal, par exemple.
M. ROMER: Pour la région de Montréal, je crois que
ça doit être à peu près en proportions plus ou moins
égales.
M. SAMSON: Merci beaucoup.
M. MORIN: M. le Président, une question additionnelle pour
préciser celle du député de Rouyn-Noranda. Avez-vous des
chiffres à nous donner là-dessus? Des chiffres sur les
inscriptions des enfants d'origine polonaise dans les écoles de la
région de Montréal.
M. ROMER: Nous n'avons pas de statistiques, ces statistiques n'existent
pas au point de vue canadien et nous pourrions seulement citer des cas que nous
connaissons, des cas assez nombreux, mais qui ne permettent pas
d'établir des statistiques car ils ne comprennent pas tout le monde.
M. MORIN: Vous voulez dire que le Congrès polonais ne sait pas
combien il y a d'enfants d'origine polonaise inscrits dans les écoles
françaises ou dans les écoles anglaises de Montréal? J'ai
peine à le croire, M. le Président.
M. ROMER: Oui.
M. SOLOVIJ: C'est un fait. Le Congrès polonais tient à
coeur à faire apprendre et à continuer d'élever les
enfants selon les traditions de son propre pays, organise les écoles,
c'est-à-dire les leçons en polonais le samedi, par exemple.
Mais il n'y a pas eu d'enquête parmi les Canadiens d'origine
polonaise pour savoir dans quelles écoles ils envoient les enfants,
non.
M. MORIN: Vous avouerez qu'il y a là de quoi étonner.
M. SOLOVIJ: Et aucun groupe ethnique n'a fait ces enquêtes.
M. MORIN: Vous avouerez également que ces chiffres seraient
très pertinents aujourd'hui, messieurs.
LE PRESIDENT (M. Gratton): The honorable member for Huntingdon.
M. FRASER: Merci, M. le Président. Nous sommes honorés de
votre présence, messieurs. J'ai entendu votre mémoire et je sais
que vous tenez à vos traditions et je vous en félicite. N'importe
quel peuple, grand ou minime, s'il n'est pas fier de ses traditions, n'est pas
digne d'être représenté par des hommes comme vous.
J'ai une couple de questions à vous poser. Comme vous êtes
des immigrants, vous avez déjà déménagé de
pays en pays apparemment. Est-ce que vous vous sentez à l'aise ici au
Canada? Est-ce que vous vous sentez libres?
M. ROMER: Parfaitement. J'ai choisi le Canada quand j'ai terminé
mon service diplomatique. J'ai passé bien des années dans le
service diplomatique polonais. Quand j'ai quitté la
diplomatie polonaise, j'ai choisi le Canada parce que j'estimais que
c'était un pays libre et accueillant où l'on pouvait travailler
dans des conditions de liberté et dans un entourage qui nous
était favorable et agréable. Nous nous félicitons de ce
choix. Il y a beaucoup de Polonais qui ont choisi d'autres pays pour
émigrer, car ils ne voulaient pas entrer dans un pays sous la domination
et l'oppression communiste. Ils auraient peut-être
préféré venir au Canada, mais ils ont été
empêchés par des conditions économiques, familiales et
autres de faire le même choix que nous avons fait nous-mêmes.
M. FRASER: Par le dernier recensement du Canada, on a 9,680 personnes
supposées être d'origine polonaise; il y en a 45,000 en Ontario.
Ceci veut dire qu'il y en a beaucoup plus en Ontario qu'il y en a au
Québec. Mais je crois que vous êtes venus au Canada plutôt
qu'en Ontario ou au Québec, n'est-ce pas?
M. ROMER: Oui.
M. FRASER: Est-ce que vous êtes en faveur de la liberté de
choix pour les parents, vis-à-vis de l'éducation ou de la
langue?
M. ROMER: Oui.
M. KAVCZAK: M. le député, si je peux répondre
à cette question, nous sommes certainement à l'aise du point de
vue des degrés de liberté qu'il y a ici. Le contraste avec la
situation de la Pologne d'aujourd'hui est vraiment sérieux.
Néanmoins, je regrette de dire qu'il y a beaucoup d'inquiétude
dans notre groupe et dans les autres groupes ethniques au
Québec. Je pense que notre mémoire présenté
aujourd'hui exprime cela assez bien. Je regrette de dire que dans les
dernières années, il y a eu une diminution de la population
polonophone dans cette province.
Premièrement, beaucoup de polonophones quittent Québec. En
fait, ils quittent Québec pour les autres provinces du Canada ou pour
les Etats-Unis. Deuxièmement, il y a une décroissance
d'entrée d'immigrants d'origine polonaise au Québec. C'est un
problème sérieux pour le Congrès canadien polonais, parce
que... Qu'est-ce qu'on peut répondre à la question de savoir ce
qui est le mieux pour le polonophone qui veut trouver une place au Canada
où il est vraiment bienvenu et respecté.
A ce point de vue, je pense qu'une révision de certains points du
projet de loi 22 est vraiment nécessaire. Nous présentons cela
avec l'idée que l'épanouissement de la langue française
puisse continuer. Il y a certainement du progrès, mais il faut continuer
dans une atmosphère de confiance et d'amitié avec les groupes
ethniques. Ici, je ne parle pas seulement pour mon groupe, je parle pour les
Canadiens ethniques ici. Il y a beaucoup d'inquiétudes à
s'exprimer parce qu'il y a une décroissance d'immigration.
LE PRESIDENT (M. Gratton): Merci, messieurs. S'il n'y a pas d'autres
questions... Messieurs du Congrès canadien-polonais, nous vous
remercions et je pense qu'il serait peut-être dans l'ordre de suspendre
les travaux de la commission jusqu'à ce soir, vingt heures.
La commission suspend ses travaux jusqu'à ce soir, vingt
heures.
(Suspension de la séance à 17 h 51)
Reprise de la séance à 20 h 9
M. PILOTE (président de la commission permanente de
l'éducation, des affaires culturelles et des communications): A l'ordre,
messieurs!
Messieurs, je voudrais mentionner, avant que ne débute la
séance, les membres de la commission: M. Pagé (Portneuf) remplace
M. Bérard (Saint-Maurice); M. Charron (Saint-Jacques); M. Déom
(Laporte); M. Cloutier (L'Acadie); M. Brown (Brome-Missisquoi) remplace M.
Hardy (Terrebonne); M. Lapointe (Laurentides-Labelle) est membre de la
commission; M. Tardif (D'Anjou) remplace M. L'Allier (Deux-Montagnes); M. Morin
(Sauvé) remplace M. Léger (Lafontaine); M. Fraser (Huntingdon)
remplace M. Parent (Prévost); M. Beauregard (Gouin) remplace M. Phaneuf
(Vaudreuil-Soulanges); M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) est membre de la
commission; M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Veilleux (Saint-Jean).
J'inviterais à présent les Jeunes chambres du Canada
français et M. Réjean Simard, président, de bien vouloir
présenter son mémoire.
Pour votre information, vous avez 20 minutes pour présenter votre
mémoire ou un résumé de votre mémoire. Les membres
du parti ministériel ont 20 minutes pour vous poser des questions et
l'Opposition a 20 minutes également.
La parole est à M. Simard et si vous voulez bien présenter
ceux qui vous accompagnent.
Fédération des jeunes chambres du Canada
français
M. BRODEUR: M. le Président, M. le ministre, distingués
membres de la commission, d'abord je vous prierais d'excuser M. Réjean
Simard qui est retenu, pour des raisons de travail, à Chicoutimi,
précisément à la Baie aujourd'hui, et je le
représente pour exposer ce mémoire. Mon nom est Jean-Roger
Brodeur. Je suis vice-président et conseiller juridique de la
Fédération des jeunes chambres du Canada français. A ma
gauche, nous avons M. Benoît Côté, qui est directeur de
l'exécutif de notre fédération; et à ma droite, M.
Yves Ménard, qui est directeur général de la
fédération. Nous devions également avoir trois autres
représentants de notre conseil d'administration, mais étant
donné que nous n'avons pu passer qu'en soirée, il est
arrivé que ces personnes avaient déjà des engagements pour
ce soir et ils ont dû s'absenter.
Alors, lors de notre dernière assemblée
générale, qui s'est tenue les 1er et 2 juin à Ottawa, la
Fédération des jeunes chambres du Canada français a
manifesté le désir de présenter, à
l'Assemblée nationale du Québec, certains amendements au projet
de loi no 22 intitulé Loi sur la langue officielle.
Désirant être constante dans ses prises de position sur la
langue officielle au Québec, la
Fédération des jeunes chambres propose, dans le document
ci-joint, des changements au projet de ladite loi tel que soumis en
première lecture.
Ces amendements veulent surtout que le français soit non
seulement la langue officielle au Québec, mais aussi qu'elle soit la
langue prédominante.
Conséquemment, les amendements que nous soumettons
respectueusement à l'Assemblée nationale du Québec visent
à éviter que la langue anglaise ne jouisse en aucun cas d'un
statut égal au français sur quelque partie du territoire du
Québec et que la langue anglaise ne soit pas considérée
comme langue seconde dans d'autres parties du territoire.
Seule la langue française devrait être
considérée comme langue officielle sans égard à une
autre langue et l'enseignement se doit d'être dispensé en
français, sauf pour les enfants dont les parents sont d'origine anglaise
seulement, et s'ils le désirent.
Nous espérons, M. le Président et M. le ministre, que vous
prendrez en considération, avec vos confrères membres de
l'Assemblée nationale du Québec, les amendements proposés
ci-après.
Titre 1: Nous sommes évidemment d'accord sur le principe
émis dans l'article 1, soit: "... que le français est la langue
officielle du Québec...". En partant de ce principe, nous allons tenter
de proposer des amendements pour en améliorer son application.
Titre 2: Nous sommes d'accord sur les dispositions d'ordre
général.
Titre 3: Le chapitre 1, traite de la langue d'administration publique.
Nous avons des commentaires à faire relativement aux articles qui vont
suivre. D'abord, nous suggérons de biffer complètement l'article
9 étant donné qu'il va à l'encontre du principe de base,
soit le français, langue officielle du Québec. Il serait en effet
étonnant, d'après nous, qu'uniquement 10 p.c. des
administrés d'un organisme municipal ou scolaire, puissent authentifier
des textes et documents officiels alors que le principe veut que seul le texte
français soit authentique.
A l'article 11, nous suggérons que toute personne ne puisse
s'adresser à l'administration publique qu'en français,
étant donné que ladite administration publique reflète,
dans les deux cas, la culture d'une province ou d'un pays.
A l'article 14, nous ne pouvons qu'être d'accord sur le premier
paragraphe qui veut qu'une personne ne puisse être admise ou promue
à une fonction administrative si elle n'a de la langue officielle une
connaissance appropriée à l'emploi qu'elle postule.
Nous sommes en désaccord, toutefois, sur le deuxième
paragraphe, ce deuxième paragraphe qui accorde un pouvoir
discrétionnaire trop grand, ne permettant pas de connaître, avant
l'adoption desdits règlements qui sont, dans bien des cas, plus
importants que la loi elle-même, les normes fixées. Nous ne sommes
pas d'accord sur la troisième partie dudit article,
étant donné qu'il va en contradiction avec le principe
émis à l'article 12 sur la communication interne de
l'administration publique.
Article 11 : Toujours pour observer l'application du principe
émis à l'article 1, nous suggérons que, lors des
assemblées délibérantes dans l'administration publique,
les interventions soient faites dans la langue française avec traduction
simultanée si nécessaire.
L'article 15 pourrait se lire comme suit: A l'assemblée
délibérante, dans l'administration publique, les interventions
dans les débats officiels doivent être faites dans la langue
française et une traduction simultanée sera fournie si
nécessaire.
Article 16: A notre avis, tous les jugements devraient être
prononcés en français par les tribunaux et une traduction devrait
être fournie aux justiciables si nécessaire. L'article 16 pourrait
donc se lire comme suit : Le ministre de la Justice doit faire en sorte que les
jugements soient prononcés en français par les tribunaux
québécois et soient traduits dans la langue anglaise si
nécessaire.
Au chapitre II qui traite de la langue des entreprises d'utilité
publique et des professions, concernant l'article 18, nous sommes d'accord sur
la plupart des principes émis au chapitre II et plus
particulièrement sur l'article 18 qui veut que les services des
entreprises d'utilité publique et les corps professionnels soient
offerts dans la langue officielle.
A l'article 22: Toutefois, nous sommes en désaccord sur l'article
22 qui permet à un membre d'une corporation professionnelle de pratiquer
au Québec, sans avoir une connaissance suffisante de la langue
officielle, ceci pour une période d'un an ou plus. Une personne qui est
acceptée par un corps professionnel devrait déjà
connaître la langue officielle du Québec. Il en est de même
pour les immigrés qui savent ou doivent savoir que la langue officielle
au Québec est le français.
Article 23: Nous sommes également en désaccord sur cet
article qui laisse la liberté à une certaine catégorie de
gens de ne pas parler le français et qui va à l'encontre du
principe établi à l'article 7.
Quant au chapitre III, qui parle de la langue de travail, article 26 :
Nous sommes en désaccord sur cet article qui fait prédominer la
langue anglaise sur la langue française dans un cas où uniquement
les membres présents à une assemblée
générale et non la majorité des membres d'un syndicat
peuvent décider que toutes les négociations, conciliations,
peuvent être faites en anglais. C'est une entaille sérieuse au
principe de l'article 1. Nous comprenons toutefois que, dans certains cas, pour
faciliter la communication, il y aurait lieu de tolérer. C'est ainsi que
nous proposons que l'article 26 se lise dorénavant comme suit: Si au
cours d'une assemblée régulièrement convoquée, les
salariés d'une association accréditée en décident
ainsi à la majorité des voix de ceux qui sont présents,
les conventions et écrits visés à l'article 25 sont
rédigés dans la langue officielle et en anglais. Ces deux langues
sont utilisées pour les négociations et les séances de
conciliation. Toutefois, les conventions collectives ne peuvent être
déposées en vertu de l'article 60 du code du travail que si elles
sont accompagnées d'une version française. Ici, il y a une erreur
dans le rapport, nous avions écrit "anglaise", mais il faut lire
"française".
A l'article 29. L'article 29, à notre avis, a une portée
supérieure dans l'application des principes émis à
l'article 26. En effet, en vertu de cet article, tous les griefs, les
arbitrages, les actes de procédure, les séances et les
décisions pourront se faire en anglais. En résumé, toute
l'application de la convention collective pourra être faite en anglais.
Nous vous suggérons purement et simplement de biffer cet article.
Article 30. Pour être logique dans notre pensée, il
faudrait biffer à l'avant-dernière ligne de l'article 30 les
mots: "l'article 29".
Article 31. Nous avons des réserves sérieuses sur le
principe de récompenser une entreprise parce que celle-ci respecte une
loi québécoise. Toutefois, nous comprenons qu'il y a lieu, dans
certains cas, d'inciter les entreprises financièrement à
franciser leurs opérations, mais nous soumettons que les subventions
devraient être divulguées de façon à éviter
les abus.
Article 33: Nous soumettons que le pouvoir discrétionnaire
accordé au lieutenant-gouverneur en conseil de faire des
règlements pour avoir droit de recevoir de l'administration publique des
permis, primes, subventions, concessions ou avantages devrait être
transformé en obligation et que les deux premières lignes de
l'article devraient se lire comme suit: Le lieutenant-gouverneur en conseil
doit exiger que...
Article 34: Le pouvoir discrétionnaire, dans ce cas-ci, devrait
également être transformé par une obligation de
façon à s'assurer que l'attribution des contrats par
l'administration publique ne puisse être faite qu'à des compagnies
déjà francisées ou en voie de francisation ou si vous
préférez, à des compagnies qui possèdent
déjà leur certificat, soit permanent, soit provisoire.
Au chapitre IV, qui traite de la langue des affaires.
Article 38: Nous soumettons que toutes les raisons sociales
françaises devront ressortir d'une manière plus avantageuse que
les versions anglaises. L'article 38 devrait se lire comme suit: Les raisons
sociales françaises doivent ressortir dans les textes et documents d'une
manière plus avantageuse que les versions anglaises.
Article 39: L'article 39 devrait se lire comme suit : Doivent être
rédigés dans la langue officielle, les contrats
d'adhésion, les contrats où figurent des clauses types
imprimées ainsi que les bons de commande, les factures et les
reçus imprimés auxquels sera jointe une version anglaise si
nécessaire.
Article 40: L'étiquetage des produits doit se
faire en français. Il en est de même pour les certificats
de garantie et les "notices" qui accompagnent les produits, ainsi que les menus
et cartes de vins.
Article 43: Nous soumettons que l'article 43 est parfaitement clair et
qu'il n'y a pas lieu de prévoir des règlements si ce ne sont des
sanctions, dans la mesure où l'affichage public ne respecte pas ledit
article. Ainsi, cet article devrait se lire comme suit: L'affichage public doit
se faire en français ou à la fois en français et dans une
autre langue. Le présent article s'applique également aux
annonces publicitaires écrites, notamment aux panneaux-réclame et
aux enseignes lumineuses.
Article 45. Nous soumettons qu'une période de cinq ans est une
période trop longue et c'est ainsi que nous suggérons fortement
une période d'un an.
Au chapitre V, la langue de l'enseignement. Article 48. Nous soumettons
qu'au premier paragraphe de cet article, nous devrions changer l'expression "en
langue française" par "dans la langue officielle".
Article 49. Au sujet de cet article, nous pourrions facilement
récrire tout ce qui a été dit concernant l'importance de
la langue de l'éducation sur la culture linguistique dans un pays ou une
province. Nous soumettons toutefois qu'il n'est pas nécessaire de
reprendre toutes les opinions données à ce sujet. Vous
comprendrez sans doute l'utilité de l'amendement que nous proposons.
Nous suggérons de biffer complètement l'article 49 et que cet
article se lise maintenant comme suit: Tous les élèves doivent
recevoir l'enseignement de la langue officielle, sauf s'ils le désirent,
les élèves dont les parents sont d'origine
canadienne-anglaise.
Article 50. Pour être conforme à l'article 49 et 48,
l'article 50 devrait se lire comme suit: II appartient à chaque
commission scolaire, commission scolaire régionale et corporation de
syndics de déterminer la classe, le groupe ou le cours auquel un
élève peut être intégré, eu égard aux
articles 48 et 49.
Article 51. Nous vous suggérons de biffer complètement cet
article. Il n'a plus d'utilité, étant donné l'amendement
proposé à l'article 49.
Au chapitre VI, les dispositions diverses. Article 53. Pour être
conforme aux amendements déjà proposés, nous
suggérons de biffer le troisième et le quatrième
paragraphe de cet article, étant donné que nous avons
déjà suggéré de biffer l'article 9.
Article 54. Cet article devrait se lire comme suit: La version
française des textes et documents visés par la présente
loi doit ressortir d'une manière plus avantageuse que toute version dans
une autre langue.
Au titre IV, chapitre I traitant de la recherche en matière
linguistique et les commissions de terminologie. Nous n'avons aucun commentaire
spécial sur ces articles, soit les articles 56 à 60.
Au chapitre II, qui traite de la régie de la langue
française, section I, article 62, pour être conforme à nos
amendements, nous suggérons de biffer au paragraphe c de l'article 62
les articles 9 et 53.
Article 63: Nous suggérons d'ajouter un paragraphe qui se lirait
comme suit: Veiller à l'application des articles 48, 49 et 50.
Article 67 : Biffer à la dernière ligne les mots "9" et
"53".
A la section II, composition et activités de la régie,
nous n'avons aucun commentaire spécial à formuler sur cette
section.
Au chapitre III, qui traite des enquêtes, nous n'avons aucun
commentaire spécial à formuler.
Néanmoins, nous constatons que la loi ne prévoit aucun
système d'infractions ou de sanctions pour les compagnies ne respectant
pas le projet de loi 22. Il nous paraît inconcevable de créer des
obligations ou de faire une loi sans en surveiller l'application par le biais
d'infractions et de sanctions. Les rapports de la régie au ministre et
à l'Assemblée nationale ne sont qu'une forme minime de pression
sur les activités de la compagnie. Les compagnies pourraient être
affectées par une telle recommandation à l'Assemblée
nationale, mais la population a tendance à oublier vite, selon nous,
certaines recommandations. Il nous paraît impératif d'inclure dans
le projet de loi un système normal d'infractions et de sanctions
exigeant davantage la francisation de la province.
Titre V: Dispositions finales.
Article 119: Nous soumettons que l'amendement proposé à la
Loi de la protection du consommateur devrait se lire comme suit: Dans le cas de
contradiction entre le texte français et le texte anglais d'un contrat,
le texte français prévaut.
Article 124: Nous soumettons que, pour être conforme aux
amendements que nous avons déjà proposés, il faudrait lire
les articles 6, 7, 8, 10 et 13 en enlevant l'article 9, que nous
suggérons de biffer.
Article 125: Nous soumettons que cet article devrait se lire comme suit:
L'article 19 s'applique à compter du 1er juillet 1975.
En guise de conclusion, nous espérons, M. le Président, M.
le ministre et messieurs de la commission parlementaire, que vous tiendrez
compte de nos recommandations que nous avons faites en toute bonne foi et dans
le but de rendre au Québec le français la langue officielle et
langue prédominante.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: M. le Président, je désire remercier la
Fédération des jeunes chambres du Canada français pour la
présentation de son mémoire. Je désire également
féliciter ce groupe, parce que, contrairement à ce que certains
ont fait, il a bien voulu prendre le projet de loi tel qu'il était et 0
a cherché à l'améliorer. Il n'a pas tenté de
défendre des politiques quelles
qu'elles soient, il n'est pas parti de prises de position
antérieures, il a vraiment voulu faire un effort de réflexion
honnête. Je crois que c'est d'ailleurs l'attitude générale
des citoyens du Québec lorsqu'ils sont confrontés avec une
législation.
Je n'aurai pas beaucoup de questions. Je n'aurai pas beaucoup de
commentaires non plus. Ce n'est pas le lieu pour avoir un débat. Il y a
un bon nombre de ces amendements qui viennent du fait que les
éclaircissements n'ont peut-être pas été
suffisamment apportés concernant certains éléments de
cette loi. Je suis à peu près sûr que le groupe renoncerait
à ces amendements s'il connaissait toujours la portée exacte des
articles. Je donnerai quelques exemples. Il y en a d'autres que le gouvernement
va certainement retenir et qu'il va étudier lorsqu'il aura à
faire le bilan des travaux de cette commission.
Je constate, par exemple, que lorsqu'on propose un amendement à
l'article 22 qui viserait à faire disparaître cette réserve
que nous avons amenée concernant la possibilité d'émettre
des permis à la période d'un an, on n'est peut-être pas au
courant que c'est déjà la législation qui apparaît
dans le code des professions, et, que cette disposition a été
mise parce qu'il faut absolument tenir compte des ingénieurs ou des
techniciens qui viennent de l'extérieur, parfois des Etats-Unis, pour
des contrats spécifiques, des contrats limités dans le temps. Il
s'agit là tout simplement d'une souplesse presque indispensable dans une
loi. Je n'ai retenu que ce point, mais c'est pour illustrer qu'il y a plusieurs
autres amendements qui entrent un peu dans cette catégorie.
J'ai déjà eu l'occasion d'expliquer que le gouvernement
n'avait pas l'intention de subventionner les entreprises pour se refranciser.
Même s'il prêtait ambiguïté.
En ce qui concerne d'autres remarques touchant le pouvoir dit
discrétionnaire du lieutenant-gouverneur en conseil, il s'agit en fait
du pouvoir réglementaire. Et là encore, je me suis
expliqué en montrant qu'il était à peu près
impossible, dans le cadre d'une loi comme celle-ci, qui est une loi-cadre, qui
est une loi qui cherche à enfermer des situations très variables,
très fluctuantes, de ne pas procéder de cette façon, et
que lors du débat en commission élue article par article, le
gouvernement apporterait toutes les précisions nécessaires sur
ces réglementations.
Ceci m'amène aux remarques que vous faites concernant l'affichage
et l'étiquetage. Là encore, il est absolument essentiel d'avoir
un pouvoir de réglementation pour prévoir des situations
particulières qui ne peuvent pas être enfermées dans un
texte législatif. Je pense, par exemple, à des produits
étrangers, des produits polonais qui entreraient ici. Il n'est pas
essentiel d'imposer le bilinguisme.
Or, il n'est pas possible de prévoir ces situations dans un texte
de loi. Il reste que l'exercice, auquel vous avez bien voulu vous prêter,
est un exercice qui me paraît extrêmement valable, et vous avez
parfaitement compris que l'esprit de ce projet de loi est de donner la
priorité au français partout, d'aller le plus loin possible, dans
la mesure du raisonnable, tout en protégeant et en ménageant les
droits individuels.
Je n'ai pas d'autre question et je voulais simplement vous faire part de
ces commentaires.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: Au nom de l'Opposition officielle, je tiens à
remercier la Fédération des jeunes chambres du Canada
français. Votre mémoire était attendu, je dois le dire, et
à une occasion, il n'y a pas tellement longtemps, la Jeune chambre de
Montréal est venue rencontrer les différents partis de
l'Assemblée nationale. A cette occasion, j'ai eu le plaisir de la
rencontrer et de lui formuler le désir que j'avais de voir ou la Jeune
chambre de Montréal ou encore mieux la Fédération des
jeunes chambres apporter un mémoire sur le projet de loi linguistique
qui venait à ce moment d'être déposé. Ce soir, non
seulement par le fait que vous êtes venus déposer ce
mémoire, mais je dois dire également, par le contenu de ce
mémoire, que j'ai doublement raison d'être satisfait de vous
l'avoir demandé..
J'ai raison d'être satisfait parce que je retrouve dans votre
mémoire une cohérence que n'a pas le gouvernement et que n'a pas
le projet de loi 22 et que vous essayez de lui donner, en quelque sorte, en
apportant des amendements, dont certains sont particulièrement bien
fondés.
En fait, je pense que j'aurais le droit de résumer votre
mémoire par cette phrase que vous-même avez mise dans le
troisième paragraphe, lorsque vous dites que vos amendements veulent
surtout que le français soit non seulement la langue officielle, mais
qu'elle soit aussi la langue prédominante.
Mettez-vous à la place d'étrangers je ne vous en
fais aucunement le reproche, remarquez bien, mais c'est seulement pour
qu'ensemble on se situe dans le contexte absurde dans lequel nous travaillons
qui demain prendraient connaissance de ce texte que vous avez fait en
toute bonne foi et sur lequel je suis parfaitement d'accord à peu
près dans toutes ces lignes et qui découvriraient qu'au
Québec on est en train de travailler pour faire qu'une langue officielle
soit vraiment une langue prédominante.
Existe-t-il une société au monde où la langue
officielle d'une collectivité, si le mot "officielle" veut dire quelque
chose, n'est pas la langue prédominante? Mais vous avez eu parfaitement
raison d'apporter ces amendements parce que, effectivement, dans le projet de
loi 22, le seul endroit où le français devient langue
officielle,
c'est à l'article 1. Il n'est pas, comme vous le notez, dans
chacun des autres articles par la suite, la langue prédominante.
Nous serons donc le seul Etat au monde à avoir une langue
officielle qui n'est pas prédominante et qui, dans plusieurs endroits,
donne un statut égal à une langue qui, elle, n'est pas reconnue
comme officielle.
Vos amendements sont donc allés dans ce sens et c'est pour
préciser certains... Je comprends l'effort que cela a dû vous
demander que d'essayer de faire dire à une loi ce qu'elle se refuse
à dire et de donner une volonté politique à un
gouvernement qui se refuse à l'avoir, de lui donner des portées
un peu plus réelles quant au sens de l'officialité de la loi.
Je veux revenir avec vous, par contre, surtout en ce sens que la
fédération a mis le point là-dessus, comme peu de groupes
l'ont fait. Les amendements aux articles 33 et 34 que vous nous suggérez
sont, dans le projet de loi, les domaines où l'utilisation du pouvoir
économique de l'Etat, quant à la francisation du monde du
travail, est, dit-on, utilisé. Je ne vous rappellerai pas les
insignifiances de la commission Gendron dans ses recommandations dans ce
domaine. En ce sens, le gouvernement a parfaitement suivi la nullité qui
lui était proposée. Lorsque vous suggérez une utilisation
obligatoire du pouvoir économique du gouvernement, plutôt qu'une
utilisation que vous qualifiez de discrétionnaire et qui est
effectivement discrétionnaire, aux articles 33 et 34, est-ce que vous
pouvez expliquer aux membres de la commission les motifs, en fait, qui vous
font militer pour que cette utilisation devienne obligatoire au
Québec?
M. BRODEUR: Justement, le sujet a été débattu assez
longuement ce matin quand le premier rapport a été discuté
ici, à savoir le fait que, dans les compagnies, par exemple, les bureaux
de direction soient dominés en très forte proportion par des
Anglais, des personnes d'origine anglaise. Là-dessus, nous croyons
évidemment qu'au Québec il va falloir en venir à un point
où nous serons capables de contrôler notre économie, quand
on sait si bien que les décisions qui se prennent pour dépenser
des millions de dollars se prennent à des conseils d'administration
où actuellement siègent des majorités de personnes
anglaises. Il est évident que, si vous avez un conseil d'administration
qui a à prendre une décision concernant un sujet précis,
un développement précis, et que ces gens, au départ,
soient d'origine anglaise, ils vont certainement favoriser leur ethnie
c'est normal avant de favoriser l'ethnie française.
Là-dessus, je crois que nos amendements visent simplement
à ce que le gouvernement intervienne, dans la mesure où il peut
intervenir, pour faire en sorte ce qui a justement été dit
ce matin que si, proportionnellement, nous avons dans un milieu un
certain pourcentage de francophones, les conseils d'adminis- tration des
compagnies qui ont de l'argent à dépenser dans ces milieux soient
justement contrôlés par des personnes francophones. Je crois que
c'est un peu dans ce sens que nous avons soumis les amendements que nous avons
proposés. Nous ne pensons pas qu'il y ait ici matière à
discrétion, mais bien matière à obligation et qu'il ne
faut pas craindre de même que cela a été
soulevé concernant d'autres pays que ces gens, qui font affaires
chez nous, partent parce que nous voulons simplement contrôler nos
affaires. Les gens qui font affaires chez nous font affaires chez nous parce
qu'ils ont intérêt à faire affaires chez nous. Il est
évident qu'ils continueront à le faire, même si nous sommes
en mesure, et même si nous prenons les moyens pour contrôler les
décisions qui se prennent à ces niveaux.
M. CHARRON: Quand votre amendement, à l'article 39 suggère
de faire disparaître la formule bâtarde, que propose le projet de
loi 22 de rédaction bilingue des contrats d'adhésion, des
contrats où figurent des clauses types imprimées, des bons de
commande, c'est qu'au fond vous voulez que le caractère officiel du
français se transpose jusque dans ces actes de la vie quotidienne des
Québécois, si j'ai bien compris?
M. BRODEUR: Oui. Il est certain que, si la langue officielle au
Québec est le français, tous les actes qui se font à
caractère légal, à caractère juridique, si vous
voulez, tous les actes qui sont posés en matière de contrat et
autres doivent se poser en français. Ceci n'empêche pas,
évidemment, que des versions anglaises soient préparées
pour la bonne compréhension de ceux qui négocient, mais il est
évident qu'au départ le principe de base, le principe émis
à l'article 1, doit être respecté en tout temps et en tout
lieu et principalement en ces matières qui sont extrêmement
importantes pour la vie économique du pays.
M. CHARRON: A partir de cet énoncé de principe, M.
Brodeur, sur lequel je suis d'accord, je vous demanderais de m'expliquer
pourquoi, si vous exigez à l'article 39 la disparition, encore une fois,
de cette formule bâtarde de bilinguisme dans les contrats
d'adhésion, vous l'admettez à l'article 43, lorsque vous
concédez que l'affichage public puisse se faire à la fois en
français et dans une autre langue. Si vous refusez la présence du
bilinguisme et l'insulte du bilinguisme dans des contrats d'adhésion,
dans des bons de commande, dans des factures, est-ce qu'on n'est pas encore
plus motivé, à partir de ce même principe, de refuser le
bilinguisme sur les panneaux-réclame et les tableaux avec lesquels, vous
l'admettrez avec moi, nous sommes encore beaucoup plus en mesure d'entrer en
contact quotidiennement qu'avec des factures ou des bons de commande?
M. BRODEUR: Même si la langue officielle est bien reconnue,
même si, dans son application, la loi fait en sorte que, dans le milieu
même, toute l'activité se fasse dans la langue officielle, il ne
faut quand même pas, à un moment donné, mettre des
barrières quelconques vis-à-vis des gens qui nous entourent. Il
est évident qu'au point de vue de l'affichage, au point de vue de
l'information au public qui vient dans le pays, il n'est pas inconcevable, il
n'est pas inadmissible que les Américains qui viendront chez nous, que
les Ontariens qui viendront chez nous et que d'autres gens d'autres pays qui
connaissent la langue anglaise et qui viendront chez nous, soient capables de
lire et de comprendre des affichages en anglais. Mais il est extrêmement
important que tout affichage, quel qu'il soit, soit en français, sauf
qu'en guise d'information, en guise d'ouverture au monde qui nous entoure, en
guise d'ouverture à nos concitoyens parce qu'il y en a aussi chez nous
qui parlent anglais, il ne faut pas fermer complètement la porte et
dire: Si vous voulez venir au Québec, apprenez le français avant
de partir.
M. CHARRON: Je suis d'accord sur cette affirmation, mais malheureusement
il y a des organismes très sérieux qui ne sont pas d'accord sur
cette affirmation et qui peut-être vous inviteraient à la
reprendre en considération. Si votre concession au bilinguisme pour les
panneaux-réclame et l'affichage public tient au fait de l'industrie
touristique, je vous dirai que ce gouvernement a en main depuis
déjà un bon bout de temps il n'en a pas tenu compte dans
la loi 22, bien sûr, comme il n'a pas tenu compte d'un certain nombre de
documents qu'il a en main mais il a en main, depuis un certain temps un
rapport de l'Office de planification et de développement du
Québec.
Ce rapport dit que l'industrie touristique québécoise est
proportionnellement liée à la francisation du Québec, en
quelque sorte et que, ce qui attire les touristes étrangers et ce qui
fera l'attrait touristique du Québec sera de plus en plus son
caractère français. Au fond, ce qui attire un touriste, c'est la
sensation de se sentir ailleurs; autrement, on ne se déplacerait pas. Si
vous arriviez en Espagne et que vous retrouviez des panneaux-réclame qui
s'adressent à vous exactement dans votre langue, qui vous annoncent
exactement les mêmes produits que vous connaîtriez chez vous, vous
vous demanderiez pourquoi, vous n'auriez pas la sensation d'avoir changé
de milieu. C'est ce que cherchent des touristes. L'Office de planification et
de développement du Québec a particulièrement
recommandé et insisté sur le visage français du
Québec comme étant exactement une garantie d'apport de capital
étranger par les touristes chez nous. Ce gouvernement a en main ce
document. S'il est un endroit où le visage français du
Québec va vivre et va s'affirmer, c'est non seulement sur les factures
ou sur les bons de commande à l'égard du touriste, mais aussi sur
les panneaux-réclame ou les affichages. Si la ville, cette ville de
Québec où nous travaillons ce soir, qui déjà,
à cette époque assez tôt de l'été est envahie
de touristes, c'est certainement le caractère français de la
capitale nationale des Québécois qui les a attirés.
Autrement, je ne crois pas que nous ayons à ce point ce sentiment
d'appel. Est-ce que vous ne croyez pas que l'affichage unilingue
français qui serait conforme à la langue, à la culture de
plus des quatre cinquièmes de la population du Québec est loin
d'être un désavantage économique au fond, quand on le
regarde comme il le faut?
M. BRODEUR: Ce que vous me citez, disons qu'en ce qui me concerne, je
n'ai pas le mandat d'en discuter; personnellement, je n'en ai pas pris
connaissance. Mais je crois que ça n'est pas incompatible que nous
donnions une information à des touristes. Peut-être que le
directeur général peut ajouter quelque chose.
M. MENARD: M. le Président, si vous le permettez. En fait, nous
avons mentionné dans cet article une autre langue. Il faut quand
même prendre en considération, si on regarde le mémoire
d'un bout à l'autre, qu'on demande une langue officielle et dominante
francophone. Maintenant, nous demandons aussi une certaine protection pour les
droits acquis de ceux qui sont là. Lorsqu'on arrive à l'article
39, il faut quand même penser que dans Montréal, entre autres, il
y a des minorités qui' sont chinoises, grecques et qui donnent un cachet
aussi touristique à Montréal par leurs milieux. Lorsqu'on dit une
autre langue, on demande quand même que le français soit
là, on l'exige. Mais que ce soit en grec, à un moment
donné, sous le français, que ce soit en italien, ça peut
apporter aussi un cachet et on ne veut pas fermer les portes
complètement dans ce sens. On demande vraiment que le français
soit langue officielle, langue dominante et on y tient.
Il est évident que, dans notre milieu, il y a des jeunes en
formation, qui, demain, seront à votre place, nous l'espérons en
tout cas. Nous ne possédons certainement pas la science infuse dans ce
domaine. Aujourd'hui, vous avez le pouvoir de légiférer et de
nous écouter.
Demain nous espérons que nous aurons le même pouvoir que
vous avez de légiférer et d'écouter. Maintenant, il faut
protéger au Canada et c'est essentiel parce qu'on est quand
même la Jeune chambre du Canada français ce qu'on appelle
le bilinguisme. Et le bilinguisme appartient à la province de
Québec, la francophonie vient de la province de Québec à
travers le Canada. Je comprends qu'il y a des minorités francophones
ailleurs que dans la province de Québec, mais la francophonie est
d'abord au Canada et, par le rapport Caston-guay-Marion, il a été
prouvé qu'il y avait une assimilation.
Alors nous, Fédération des jeunes chambres
du Canada français, on demande une protection à la
francophonie afin que le Canada reste bilingue. Si vous enlevez la francophonie
au Québec où vous permettez l'assimilation, à ce moment on
ne peut plus parler de bilinguisme au niveau du Canada, mais plutôt
d'unilinguisme. Et la pensée et le principe, depuis quatre ans, de la
Fédération des jeunes chambres du Canada français, c'est
de protéger la francophonie dans son milieu, à son maximum et
c'est pour cela qu'on va peut-être un peu plus loin que ce que le
gouvernement demande par le bill 22. On veut que ce soit fait au Québec.
Après, on pourra parler d'un Canada bilingue. Sans cela, si on permet
l'assimilation, à ce moment-là, il faut parler d'un Canada
unilingue. C'est le principe de base d'où vient tout le
mémoire.
LE PRESIDENT (M. Pilote): II reste trois minutes à l'Opposition.
L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, à mon tour, je voudrais
évidemment féliciter les représentants de la
Fédération des jeunes chambres du Canada français qui se
sont donné la peine de venir nous visiter et nous présenter un
mémoire de façon très objective. M. le Président,
je voudrais mentionner aux représentants de la Fédération
des jeunes chambres du Canada français que je suis très
sympathique à plusieurs des idées qui sont
préconisées dans ce mémoire et, notamment, il me fait
plaisir de trouver qu'au moins sur un point on se rencontre très bien,
soit celui de considérer que le projet de loi 22 est parfait au moins
jusqu'à l'article 1 inclusivement.
M. le Président, je voudrais souligner que dans le mémoire
qui nous est présenté d'une façon cohérente, la
Fédération des jeunes chambres du Canada français tente de
suggérer des choses. Cela ne veut pas dire que vous avez touché
au bon endroit partout. Je pense qu'il y a quand même des nuances
à apporter, mais je crois déceler cette tentative que vous avez
faite d'apporter des suggestions qui font en sorte que tout le projet de loi
atteigne la perfection que nous retrouvons jusqu'à l'article 1
inclusivement. Cela est important.
M. le Président, j'ai remarqué à la page 1, au
titre 3, article 9, que vous êtes un peu inquiétés par
cette question des 10 p.c. Est-ce qu'on pourrait savoir si vous avez, dans vos
études, considéré un autre pourcentage possible pour
l'application des provisions de l'article 9 par exemple?
M. BRODEUR: Non, M. le Président, nous avons pris l'article tel
qu'il était et nous ne voyons pas qu'il soit possible de jouer sur les
pourcentages. Nous voyons simplement qu'il y a à adopter une position
claire et précise et que si le principe dit que la langue officielle au
Québec est le français, pour le reste, c'est la même
chose.
M. SAMSON: A l'article 14 où vous nous parlez de la
réglementation, est-ce que vous avez considéré, par
exemple ce qui nous a été suggéré ce matin dans un
autre mémoire, que la réglementation devrait être connue
publiquement par l'entremise de la Gazette officielle et qu'un certain
délai puisse être donné pour que les groupes
intéressés puissent faire connaître leurs points de vue sur
la réglementation proposée? Est-ce que vous avez
considéré, en étudiant le projet de loi 22, cette
possibilité aussi de faire une demande ou de ne pas en faire? Est-ce que
vous avez considéré cette possibilité d'un délai
après la production de la réglementation et avant que cette
réglementation n'entre en vigueur, pour que les groupes concernés
et intéressés puissent se faire entendre?
M. BRODEUR: Dans notre esprit, nous croyons que le pouvoir
discrétionnaire devrait tout simplement être restreint.
Je ne crois pas qu'il soit coutume, dans l'adoption des
règlements, de consulter pour adopter des règlements. Nous ne
croyons pas qu'il soit avantageux pour quiconque, même pour la
population, de devoir venir expliquer, chaque fois que des règlements
devraient être adoptés, sa position vis-à-vis de tel ou tel
règlement, parce qu'en fin de compte, les lois sont là et les
règlements viennent les appliquer. Evidemment, s'il faut subir des
délais trop grands, au moment où le règlement entre en
vigueur, il n'y a plus aucun effet.
Dans notre esprit, ce qui est important, c'est de réduire au
maximum le pouvoir discrétionnaire du lieutenant-gouverneur qui a le
pouvoir d'adopter ces règlements. C'est de le limiter, de lui faire des
barrières bien précises pour lui dire: Vous allez adopter des
règlements dans telle et telle situation et, à partir du moment
où nous accordons ces pouvoirs, évidemment, il exerce son pouvoir
exécutif conformément à ce que la constitution
prévoit, sauf qu'il faut que la législation soit quand même
assez précise pour que le pouvoir d'adopter des règlements ne
soit pas discrétionnaire, de manière à ne pas devenir un
abus de la part de l'Exécutif.
M. SAMSON: Si je comprends bien...
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de... C'est
terminé. Cela fait exactement 23 minutes qu'on a données à
l'Opposition. Je permettrais une toute petite question au député,
toute petite.
M. SAMSON: Oui, M. le Président, parce que je pense quand
même...
M. CLOUTIER: Un bon député. UNE VOIX: Cela nous fait
plaisir.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Cela vous fait plaisir. On va le prendre sur
le temps du parti ministériel à ce moment-là.
M. CLOUTIER: Oui...
M. SAMSON: A une prochaine occasion, M. le Président, je leur
remettrai leur temps.
M. CLOUTIER: Certainement. Il ne demande pas le retrait de la loi comme
Fabien...
M. SAMSON: Si je comprends bien, quant à cet article, vous
rejoignez les positions de la Chambre de commerce provinciale ou de la
Fédération des chambres de commerce provinciale lorsqu'elles nous
ont présenté un mémoire sur ce qu'elles ont appelé
l'érosion du pouvoir. Elles recommandaient, dans ce mémoire,
qu'il n'y ait plus de législation accompagnée de pouvoirs
excessifs de réglementation. Est-ce que c'est bien cela que j'ai
compris?
M. BRODEUR: Personnellement, je ne l'ai pas lu. Nous n'avons pas
préparé notre mémoire en ayant étudié le
mémoire de la chambre de commerce. D'abord, nous ne l'avions pas, mais
si ce que vous me dites est conforme à ce fameux mémoire, c'est
exactement notre pensée.
M. SAMSON: Vous préférez, si je comprends bien, que la loi
soit plus claire et qu'il n'y ait pas de réglementation qui suive.
M. BRODEUR: Non.
M. SAMSON: Vous ne préférez pas cela?
M. BRODEUR: Non. Il est nécessaire qu'il y ait une
réglementation. Ceci va exactement dans notre mode de fonctionnement
législatif et administratif, sauf que les lois doivent être assez
précises pour que la réglementation qui s'y rattache ne puisse en
aucun temps faire dévier les objectifs de ces lois.
M. SAMSON: Est-ce que vous êtes d'accord quand même que ce
n'est pas le volume, si vous voulez, de la réglementation qui peut
peut-être changer l'esprit de la loi comme telle, mais plutôt ce
qui sera inséré dans la réglementation? Il peut y avoir
une courte réglementation qui peut tout changer comme cela peut prendre
beaucoup de pages pour changer un peu l'esprit de la loi.
Si je vous comprends bien vous me direz si j'ai tort vous
préférez une réglementation moins élaborée
qui respecte strictement l'esprit de la loi? Est-ce que c'est cela que je dois
comprendre?
M. BRODEUR: La réglementation doit respecter l'esprit de la loi.
Quant à son contenu, cela dépend évidemment des situations
qui se présentent au fur et à mesure que le pays
évolue.
M. SAMSON: Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de
Laurentides-Labelle.
M. LAPOINTE: Oui, M. le Président, ma première
question...
LE PRESIDENT (M. Pilote): II reste douze minutes.
M. LAPOINTE: ... aura pour but d'établir la
représentativité de la Fédération des jeunes
chambres. Est-ce qu'on pourrait savoir combien de membres regroupe la
Fédération des jeunes chambres?
M. BRODEUR: Oui, actuellement, la Fédération des jeunes
chambres compte 5,000 membres. C'est un mouvement qui a déjà eu
10,000 membres. Nous escomptons bien, cette année, pouvoir atteindre
à nouveau ce chiffre de 10,000 membres.
M. LAPOINTE: Quelles sont les conditions pour être membre?
M. BRODEUR: C'est un mouvement qui regroupe les personnes de 18 à
40 ans, c'est l'une des conditions principales. Je vais demander au directeur
général pour...
M. MENARD: M. le Président, apparemment, le directeur
général est au courant des règlements. Ceci dit, le
mouvement a évolué énormément cette année;
à l'heure actuelle, il est devenu de plus en plus discipliné et
sévère, grâce à la transformation que nous avons
subie cette année. Ce que nous exigeons maintenant pour que quelqu'un
fasse partie de la Fédération des jeunes chambres du Canada
français, c'est qu'il veuille, à prime abord, avoir une formation
et pratiquer ce qu'il a appris en théorie afin de devenir un chef, de se
former, de se perfectionner au leadership. De plus, on s'annonce officiellement
comme palier politique par excellence, et on espère que ce sera pris en
considération éventuellement. Aussi, on demande à nos
chambre, comme moyen d'action ou moyen de formation, d'être des corps
intermédiaires au sein de leur localité, au sein de leur
régionale, et aussi au sein de la fédération quand les
moyens nous le permettent. Est-ce que cela répond à votre
question?
M. LAPOINTE: Oui.
M. BRODEUR: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, la
Fédération des jeunes chambres du Canada français est une
compagnie, à laquelle sont affiliées 118 compagnies. D y a
actuellement 118 localités dans lesquelles il y a une jeune chambre
dûment affiliée à la fédération.
Là-dessus, nous avons deux jeunes chambres dans la province de
l'Ontario.
M. LAPOINTE: Le mémoire que vous nous avez
présenté, de quelle façon a-t-il été
préparé et par qui a-t-il été accepté?
M. BRODEUR: A l'assemblée générale d'Ottawa, le
projet de loi 22 a été étudié d'abord par un
comité spécialement affecté à cette étude,
et ensuite, ces gens sont revenus à l'assemblée
générale, ont produit leur rapport sur l'étude faite du
projet de loi 22, puis des discussions ont été faites en
assemblée générale, discussions qui ont duré, je
crois, près de trois heures. Par la suite, mandat a été
donné de préparer un mémoire qui devait être soumis
ici à cette commission, et qui devait être approuvé par le
conseil d'administration. Relativement à cette approbation, nous devons
vous dire que nous avons soumis le mémoire à chacun des membres
du conseil d'administration, suivant nos règlements
généraux, et que ce mémoire a été
adopté à 29 voix contre deux.
M. LAPOINTE: Sur le plan de la langue de l'enseignement, à
l'avant-dernier paragraphe de la première page, vous dites: Sauf pour
les enfants dont les parents sont d'origine anglaise seulement. Est-ce que cela
signifie que, les nouveaux immigrants de langue anglaise ou d'origine anglaise
auraient le choix d'aller à l'école française ou à
l'école anglaise?
M. BRODEUR: Non. Pour nous, les immigrants qui veulent venir au
Québec savent au départ, ou doivent savoir qu'ils viennent dans
un pays où la langue officielle est la langue française, et
qu'ils doivent s'attendre, s'ils vont à l'école publique,
à être instruits en français, sauf évidemment
à apprendre l'anglais comme il est normal d'apprendre d'autres langues
pour sa culture et également pour son utilité. Mais au
départ, le libre choix, quant à nous, n'existe pas.
M. LAPOINTE: Je m'excuse, mais je crois qu'il manque un mot dans cette
phrase. On a oublié le mot "canadienne", dans d'origine
canadienne-française.
M. BRODEUR: C'est possible, oui.
M. LAPOINTE: A l'article 49, vous proposez des modifications et vous
spécifiez l'origine canadienne-anglaise. Est-ce que cela signifie
les modifications que vous proposez à l'article 49 que les
francophones et les immigrants actuellement engagés dans le
système anglophone devraient réintégrer l'école
francophone?
M. BRODEUR: Non, je ne crois pas. Nous avons bien parlé de
respecter quand même des droits acquis, et spécialement en ce qui
concerne la question de l'éducation, il n'est question de brimer qui que
ce soit. C'est seulement pour l'avenir.
M. LAPOINTE: Dans votre mémoire, vous semblez d'accord sur
l'article 8 où on demande une version anglaise des textes dans
l'administration publique, ainsi que sur l'article 13 et l'article 20 en ce qui
concerne les entreprises d'utilité publique.
Vous demandez des modifications à l'article 11 qui dit que "...
toute personne a le droit de s'adresser à l'administration publique en
français ou en anglais...". Vous demandez que cela se fasse seulement en
français. Il en est de même à l'article 15. Sur quel
principe vous appuyez-vous pour limiter le droit à la communication en
anglais sur le plan des communications orales quand vous semblez accepter
l'anglais et le français pour les communications écrites?
M. BRODEUR: Le principe sur lequel nous nous basons est simplement que
la langue officielle est la langue française. A présent,
là-dessus, je vous ai mentionné tout à l'heure que nous
avions eu deux votes contre et je crois que cela concerne directement ces deux
articles où il est certain qu'il ne faut pas être intransigeant
avec les personnes qui, actuellement, ne connaissent pas la langue
française. Mais il faut voir, je crois, notre suggestion et je
dis bien notre suggestion avec une vue d'avenir, une vue prochaine,
à savoir qu'à un certain moment, toutes les personnes qui vivent
au Québec connaîtront, devront connaître le français,
parce que même les enfants d'origine anglaise qui seront instruits en
anglais, devront apprendre le français à l'école et il est
certain que lorsqu'ils viendront à maturité, ils
connaîtront notre langue.
M. LAPOINTE: Une dernière question. J'ai remarqué que vous
n'avez signalé aucun amendement à l'article 36 qui traite des
raisons sociales, contrairement au Parti québécois dans son
projet de loi sur la langue de l'an I qui exige que la seule langue des raisons
sociales soit le français et qui ajoute: Après
l'indépendance, toutes les compagnies faisant affaires au Québec
devront y être incorporées. Est-ce que vous liez la question
linguistique à l'indépendance du Québec?
M. CLOUTIER: Je dois interrompre mon collègue;
l'indépendance n'a pas l'air d'être si certaine que cela, parce
que, dans la même conférence de presse, un journaliste a
posé une question à M. Morin et il a dit: "Est-ce que votre
projet changerait si demain le Québec était indépendant?
Il s'agit du contreprojet linguistique du PQ. M. Morin a répondu: "C'est
une question bien hypothétique".
M. MORIN: Entendons-nous. Vous sortez du contexte. Le journaliste a dit:
Demain.
M. CLOUTIER: Je m'excuse, mais je n'ai pu résister.
Pardonnez-moi.
M. MORIN: Oui, bien sûr. On peut nous faire dire n'importe quoi
quand on sort les choses de leur contexte.
M. CLOUTIER: II conteste le contexte! M. MORIN: Le contexte actuel.
M. CLOUTIER: D'accord. Je m'excuse. L'occasion était trop
belle.
M. BRODEUR: Je crois que j'ai deux choses à dire
là-dessus, et je vais' commencer par la deuxième.
M. CLOUTIER: On est ici pour la soirée.
LE PRESIDENT (M. Pilote): A l'ordre, messieurs!
M. CLOUTIER: Je n'ai pas cité le président du PQ, parce
que là, c'est marrant.
M. CHARRON: Si vous pensez que vous en avez besoin.
M. LAPOINTE: J'ai une dernière question.
M. BRODEUR: J'ai deux remarques à faire sur ce qui vient
d'être dit. Je vais commencer par le deuxième. Comme vous l'avez
si bien dit, nous ne proposons pas d'amendement à l'article 36. Alors,
je crois qu'il faut inférer que nous sommes d'accord et, à ma
connaissance, cet article a été soumis par le gouvernement.
D'autre part, je tiens à vous préciser que notre mouvement est
entièrement apolitique et qu'au moment de préparer notre
mémoire, nous n'avons ni étudié, ni lu, ni
révisé, ni essayé de comprendre aucun programme d'aucun
parti que ce soit et ce que vous trouvez ici, ce sont nos idées.
M. LAPOINTE: Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Verchères
m'avait demandé la parole.
M. OSTIGUY: Une petite question, oui?
LE PRESIDENT (M. Pilote): Une petite question parce que le temps est
terminé.
M. OSTIGUY: J'aimerais poser quelques questions au directeur
général. Vous dites au tout début de votre mémoire:
"Ces amendements veulent surtout que le français soit non seulement la
langue officielle, mais qu'il soit la langue prédominante". Je pense
bien que les amendements que vous voudriez apporter ne sont pas
nécessaires pour que le français soit une langue
prédominante puisque dans les articles je vais vous en
énumérer quelques-uns: 6, 12, 18, 24, 43
déjà le français est la langue prédominante.
Pourriez-vous expliciter davantage ce que vous voulez dire par ce
troisième paragraphe de votre mémoire?
M. MENARD: Je reconnais le député de Verchères,
mais je dois dire qu'en tant que mouvement bien discipliné tel qu'on
l'est, d'abord, celui qui doit avoir la première réponse est le
porte-parole officiel de la fédération et c'est M. Jean-Roger
Brodeur. Je m'excuse, mais avant d'avoir sa permission, je ne peux
répondre à la question.
M. BRODEUR: Je ne lui donne pas la permission de répondre. Je
vais répondre moi-même.
M. CHARRON: Le ministre aimerait bien que le ministre de la Justice lui
demande son opinion également avant d'émettre un avis contraire
au sien.
M. OSTIGUY: M. le Président, il le lui a demandé.
LE PRESIDENT (M. Pilote): La parole est à M. Brodeur.
M. CLOUTIER: II a raison. Il me remet la monnaie de ma pièce.
M. BRODEUR: Jamais nous n'avons dit ou même inféré
dans notre mémoire que, dans le projet de loi, il n'y avait pas des
visées pour faire du français la langue prédominante. Nous
n'avons pas soutenu cela. Dans notre mémoire, nous avons soutenu et nous
avons proposé des amendements pour aider et faire en sorte que le
français devienne encore mieux et encore plus la langue
prédominante au Québec.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le temps qu'on peut permettre est
écoulé. Pour être juste envers tout le monde, je ne peux
permettre d'autres questions. Je remercie M. Brodeur ainsi que ceux qui
l'accompagnent de la façon dont ils ont présenté leur
mémoire. Soyez assurés que la commission va en prendre bonne
note.
M. SEGUIN: M. le Président, je vous ferai remarquer que demain je
réclamerai au moins cinq minutes au député de
Rouyn-Noranda pour avoir l'occasion d'utiliser notre temps et non pas le passer
au député de Rouyn-Noranda, puisqu'on a déjà
consenti de prendre sur le temps ministériel. Demain, je prendrai cinq
minutes et je l'exigerai.
M. SAMSON: M. le Président, je le lui remettrai avec plaisir.
M. SEGUIN: C'est cela.
M. VEILLEUX: La collaboration.
M. SAMSON: Les bons comptes font les bons amis!
M. SEGUIN: Absolument.
LE PRESIDENT (M. Pilote): On vous remercie, messieurs. J'inviterais
à présent M. Richard Décarie, président du conseil
de la commission scolaire Chomedey de Laval, à bien vouloir venir
présenter son mémoire. Pourriez-vous identifier les personnes qui
vous accompagnent?
Commission scolaire Chomedey de Laval
M. DECARIE: M. le Président, M. le ministre, messieurs les
membres de la commission, mon nom est Richard Décarie, je suis
président du conseil des commissaires de la commission scolaire Chomedey
de Laval. Avant de commencer mon exposé, permettez-moi de vous
présenter ceux qui m'accompagnent. A ma gauche, M. Bernard Lafortune,
commissaire, responsable du comité sur la question linguistique à
la commission scolaire Chomedey de Laval; à ma droite, M. Edmond Leroux,
directeur général adjoint de la même commission.
M. le Président, j'aimerais informer les membres de la commission
parlementaire que le mémoire présenté aujourd'hui est
appuyé par la majorité des commissaires, soit 16 sur 19, et fait
suite à deux résolutions, l'une et l'autre majoritairement
adoptées. La première, CC 544, adoptée le 11 mars 1974, se
lit comme suit: Considérant que le fait de favoriser le français
comme langue de travail contribue à résoudre un problème
fondamental du Québec; considérant que la très grande
majorité de nos diplômés sont formés en
français; considérant qu'il est important que nos
diplômés puissent travailler dans leur langue dans le but
d'accroître leur efficacité et leur créativité;
considérant qu'il est important que les immigrants s'intègrent
à la majorité francophone, il est proposé et résolu
que la commission scolaire Chomedey de Laval demande au gouvernement de la
province de Québec :
A) de décréter, par une loi, la langue française,
la langue de travail dans la province de Québec, B) de favoriser, par
tous les moyens, y compris la modification de la loi 63, l'éducation de
tous les immigrants dans la langue française, de façon à
faciliter leur intégration à la communauté
québécoise francophone.
La deuxième résolution, M. le Président, CC 560,
adoptée le 25 mars 1974, se lit comme suit: Considérant que,
selon le message inaugural de la présente session, on sait maintenant
que le gouvernement doit déterminer les questions relatives à la
langue d'enseignement; considérant que, selon les informations, la
commission parlementaire de l'éducation entendra les mémoires que
la population soumettra à la suite de la déposition du projet de
loi gouvernemental; considérant qu'à ce temps le comité
pédagogique aura soumis son rapport sur l'enseigne- ment des langues et
que la commission scolaire sera mieux renseignée sur le problème;
considérant aussi que, déjà, nonobstant ce rapport du
comité pédagogique, la commission scolaire, par sa
résolution CC 544, a demandé au gouvernement de favoriser
l'éducation de tous les immigrants dans la langue française, il
est proposé que la commission scolaire Chomedey de Laval attende de
connaître le projet de loi gouvernemental, lequel doit déterminer
les questions relatives Ta langue d'enseignement avant de statuer, que la
commission scolaire, après le dépôt du projet de loi, fasse
connaître sa position sur ledit projet de loi au gouvernement, soit par
une résolution, soit par un mémoire présenté
à la commission parlementaire de l'éducation.
M. le Président, c'est pourquoi nous voulons, par ce
mémoire, vous exposer nos vues sur le chapitre V du projet de loi 22 sur
la langue d'enseignement.
Le court délai à notre disposition ne nous a pas permis de
faire des recommandations sur les autres chapitres de ce projet de loi, mais
nous sommes d'accord sur les objectifs que cette loi vise à atteindre.
M. le Président, Chomedey de Laval couvre un territoire de 45 milles
carrés avec une population globale de 120,000 habitants dont une
population de 80 p.c. de francophones. Nous recevons dans nos écoles
30,000 étudiants d'un niveau élémentaire et
secondaire.
M. le Président, dans le résumé de notre
mémoire, nous soulignons les points suivants:
Nous nous demandons pourquoi les collèges reconnus
d'intérêt public ne sont pas inclus dans les organismes sujets
à cette loi.
Nous reconnaissons aux parents le libre choix de la langue
d'enseignement de leur enfant, à certaines conditions bien
précises.
Nous demandons que les immigrants reçoivent leur enseignement
dans la langue française pour des raisons d'ordre historique, social et
culturel.
Nous demandons de connaître une définition de connaissance
suffisante, car cette connaissance suffisante devient une question sine qua non
pour demander ce changement de langue d'enseignement.
Nous croyons que les tests sont aussi insuffisants pour s'assurer de
cette connaissance suffisante; nous croyons qu'il devrait y avoir autre chose
de plus que les tests.
Nous croyons que le comité pédagogique devrait être
indépendant, exempt de contrôle politique.
Nous demandons que des recherches sur la qualité de la langue
soient accentuées tel que prévu à l'article 63 dudit
projet. M. le Président, nous sommes maintenant disposés à
recevoir vos questions.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: M. le Président, je désire
d'abord remercier la Commission scolaire Chomedey de Laval pour la
présentation de son mémoire. Là encore, nous sommes en
présence d'un organisme qui s'est donné la peine d'attendre le
dépôt du projet de loi avant de le critiquer, qui en a fait une
étude exhaustive et qui propose un certain nombre de recommandations.
C'est tout à fait l'esprit avec lequel il faut se présenter, je
crois, devant une commission parlementaire et c'est un esprit éminemment
positif. Il y a des points dont le gouvernement tiendra certainement compte
lors de la révision et du débat article par article. Je note que
votre groupe est d'accord pour maintenir la liberté de choix, mais veut
l'assortir de certaines conditions. C'est ma première question. Dans
votre esprit, quelles seraient ces conditions?
M. LAFORTUNE: Alors, M. le Président, si vous me le
permettez...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui.
M. LAFORTUNE: ... dans l'examen de la Loi de l'instruction publique,
nous, commissaires, n'avons rien trouvé qui oblige l'enfant francophone
à fréquenter l'école francophone. Nous n'avons
également rien trouvé dans la loi qui oblige l'enfant anglophone
à fréquenter l'école anglophone. Le bill 27 établit
des commissions scolaires selon la foi et non selon la langue, mais celui qui
doit payer ses taxes à une commission scolaire de sa juridiction
où il y a des écoles où on donne l'enseignement en anglais
et des écoles où on donne l'enseignement en français,
devrait-il avoir la possibilité ou le choix de diriger son enfant
à l'une ou à l'autre? Dans les conditions, M. le
Président, nous demandons qu'il existe une batterie de tests. On sait
qu'il existe, dans des pays, une batterie de tests qui, lors de l'inscription
ou la demande de l'individu de venir dans un pays quelconque... Nous demandons,
en plus de la batterie de tests, qu'il y ait une étude du bulletin
scolaire de l'élève dont le père demande le changement de
langue d'enseignement.
Nous demandons également, si possible, qu'il y ait une rencontre
avec les parents et nous demandons que l'on décide un jour ou l'autre
à quel niveau on peut permettre un changement d'enseignement de langue.
A la sixième année élémentaire, je pense qu'il est
assez facile de permettre un changement de langue, mais par contre, si on va au
secondaire II ou III avec les options professionnelles, il se pose un
problème qui peut peut-être dévaluer les chances de
succès de l'élève. En somme, d'après nous, quant
aux conditions, étant donné que nous sommes à la
commission scolaire pour aider des enfants à apprendre, nous ne voulons
pas leur apprendre de l'insuccès, nous voulons quand même qu'ils
aient toutes les chances de succès de leur côté. Nous
voulons évaluer dans la mesure du possible, la chance de succès
de l'enfant dont le père ou la mère demande un changement de
langue d'enseignement.
M. CLOUTIER: En somme, M. le Président, ce que vous voulez faire
en tant que commissaires, c'est d'assumer vos responsabilités en
matière pédagogique. C'est peut-être d'ailleurs ce que vous
avez dans l'esprit lorsque vous dites à la page 3 de votre
mémoire: Le gouvernement a trouvé une formule habile pour ne pas
créer de classe spéciale entre les personnes demeurant au
Québec.
Je conclus d'ailleurs de vos explications que vous n'êtes pas
contre les tests sans doute, parce que vous savez ce dont vous parlez. Vous
avez vous-mêmes invoqué l'utilité des batteries de tests et
il m'apparaît intéressant que vous songiez à ce que l'on
tienne compte d'autres facteurs également.
J'ai une deuxième question. Vous demandez une définition
de la connaissance suffisante et vous admettez que les tests sont
nécessaires pour que l'on puisse déterminer la connaissance
suffisante. Aucun individu ou aucun organisme au monde n'a pu trouver d'autres
méthodes de mesures objectives. Cependant, vous dites qu'il devrait y
avoir autre chose, est-ce qu'il s'agit des conditions que vous venez
d'énumérer?
M. LAFORTUNE: Je pense que oui, M. le Président. Un jour ou
l'autre, d'après les règlements, peut-être qu'on aura une
définition de la connaissance suffisante et nous demandons qu'il y ait
autre chose.
M. CLOUTIER: Les règlements seront d'ailleurs, sinon
déposés dans leur forme finale, présentés lors du
débat article par article, de manière que l'on puisse
évaluer toute la portée de la loi. Ceci est vrai non seulement
pour le chapitre 5 qui porte sur la langue de l'enseignement, mais
également sur les autres chapitres. Le ton général de
votre mémoire donne à penser que vous êtes d'accord sur les
objectifs du projet de loi, vous êtes d'accord sur ses orientations
fondamentales et vous apportez un certain nombre de suggestions que nous allons
très certainement verser au dossier. Merci.
M. LAFORTUNE: M. le Président, nous sommes d'accord sur les
objectifs du projet de loi 22. Nous avons, dans notre localité,
différents groupes d'enfants et nous voulons, en tant que
commissaires... je pense que nous n'avons pas été élus
commissaires pour une catégorie d'enfants, nous avons été
élus commissaires pour toutes les catégories d'enfants. Le
serment que l'on prête lorsqu'on devient commissaire est d'agir au
meilleur de sa connaissance, mais toujours selon son intelligence.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le chef de l'Opposition officielle.
M. MORIN: M. le Président, si j'ai bien compris le
mémoire, nos invités sont venus nous parler avant tout de la
langue de l'enseignement. Je ne pense pas qu'ils entendent, ce soir, se
prêter à des questions portant sur d'autres
chapitres du projet de loi. Est-ce que j'ai bien compris?
M. DECARIE: Oui, vous avez bien compris, nous nous limitons à la
langue d'enseignement.
M. MORIN: Je vous demande cela parce qu'à l'instant, le ministre
essayait de vous "embarquer" comme approuvant l'ensemble du projet de loi.
J'avais cru comprendre que ce n'était pas votre intention en venant ici,
ce soir.
M. DECARIE: Je pense que M. Lafortune a quand même répondu
assez clairement et nous sommes pleinement d'accord sur les objectifs du bill
et nous avons bien dit...
M. MORIN: Et le préambule?
M. DECARIE: ... que nous n'avons pas eu le temps à notre
disposition pour étudier les différents articles.
M. MORIN: Bien.
M. CLOUTIER: Ma question ne portait pas sur autre chose, j'ai bel et
bien demandé les objectifs, on m'a répondu clairement, il ne
faudrait pas tenter de laisser croire que je cherchais autre chose.
M. MORIN: C'est ambigu et je voulais qu'il soit clair que ces messieurs
sont venus nous parler avant tout de la langue d'enseignement. C'est ce qui les
intéresse au premier chef étant donné les fonctions qu'ils
occupent.
M. LAFORTUNE: Nous pensions qu'il y avait d'autres organismes,
peut-être mieux qualifiés que nous, pour parler et de la langue de
travail et de la langue des affaires publiques, etc., etc.
M. MORIN: Très bien. Je ne vous interrogerai pas sur autre chose
que sur la langue d'enseignement. Ma première question porte sur le voeu
que vous formulez dans votre mémoire selon lequel les immigrants
devraient recevoir l'enseignement en langue française. A la page 2,
comme d'ailleurs à la page 8 du mémoire où vous revenez
sur cette question, vous semblez indiquer qu'il s'agit de tous les immigrants.
Est-ce que vous entendez par là aussi bien les non-anglophones que les
anglophones?
M. LAFORTUNE: M. le Président, si vous me permettez de
répondre à M. Morin, je pense que, pour une fois, cela
reflète le voeu du milieu de la population de Laval. Je pense que la
population de Laval a demandé que la commission scolaire s'occupe de
tous les immigrants. Actuellement, nous avons des projets, selon le plan de
développement des langues; nous accueillons actuellement des immigrants,
peut-être pas de langue anglaise, mais d'autres nationalités. On
va revenir, M.. Morin, à la question des anglophones. Nous demandons que
les immigrants viennent s'intégrer à la communauté
francophone. Nous ne leur demandons pas de faire des concessions. Nous leur
demandons tout simplement de venir enrichir notre peuple
québécois. Je pense qu'ils ont quand même une culture, ils
ont quand même autre chose à nous apporter. Qu'on leur demande de
venir connaître la culture française, je pense que c'est une
demande qui est légitime, normale et nous pensons également
qu'ils viendront, un jour ou l'autre, à rendre service à la
communauté qu'ils ont adoptée et acceptée.
M. MORIN: J'ai rarement entendu dire les choses aussi clairement et
aussi magnifiquement, M. le Président. J'espère que le ministre
écoutait d'une oreille attentive.
M. CLOUTIER: Bien sûr. Le ministre est entièrement d'accord
sur ce principe. Evidemment...
M. MORIN: Pourquoi ne le met-il pas dans sa loi?
M. CLOUTIER: ... il s'agit de savoir... Le principe est dans la loi;
c'est une question de modalité.
M. MORIN: Ah, vraiment?
M. CLOUTIER: Nous ferons le débat en temps et lieu et, à
ce moment-là, nous aurons l'occasion de montrer ce que signifie le
contre-projet linguistique du PQ ...
M. MORIN: Ah! la la!
M. CLOUTIER: ...et d'en mesurer toutes les implications. Ne me provoquez
pas, parce que je vais en parler tout de suite.
M. MORIN: Eh bien, allez-y!
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je ne suis pas d'accord. L'honorable chef de
l'Opposition officielle.
M. CLOUTIER: C'est bien. M. MORIN: M. le Président...
M. LAFORTUNE: Vous me permettrez, pas d'élaborer, mais
peut-être de dire que, quand même, il y a eu une période
dans l'histoire où l'immigration a été favorable à
la province de Québec. Il y a une période où nous avons
reçu des Belges, nous avons reçu des gens de l'Afrique
francophone, nous avons reçu d'autres personnes. Par contre, ce soir,
nous ne pouvons pas vous donner des statistiques que vous tous vous connaissez
concernant l'immigration, mais
c'est le voeu de la commission scolaire et je pense qu'on peut dire
également que c'est le voeu du milieu.
M. CHARRON: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. MORIN: Je n'ai pas terminé, M. le Président. Je
céderai la parole au député de Saint-Jacques dans quelques
instants. Si j'ai bien compris alors votre attitude à l'endroit des
immigrants, lorsque vous parlez des tests ou de la batterie de tests comme vous
avez dit, vous n'entendez pas appliquer ces tests aux immigrants? Ce sont des
tests que vous feriez passer aux citoyens qui voudraient passer d'un
système à l'autre; c'est bien cela?
M. LAFORTUNE: M. le Président, si je peux répondre
à cette question. Je vais quand même référer M.
Morin à l'article 49. Si les immigrants, une fois qu'ils ont
adopté l'Etat québécois comme patrie, peuvent
peut-être après un certain temps, selon certains
règlements, avoir un certain libre choix comme tout autre
Québécois, quand même nous tenons et nous demandons, avant
que cette chose soit permise, qu'ils s'intègrent réellement,
culturellement, sociolo-giquement et juriquement à la communauté
francophone.
M. MORIN: Puis-je vous demander un ou deux détails
là-dessus?
M. LAFORTUNE: On ne crée pas une classe spéciale,
d'après nous, pour les immigrants parce qu'il nous fait plaisir de les
recevoir chez nous.
M. MORIN: Oui.
M. LAFORTUNE: II nous fait plaisir de les aider dans leur famille, il
nous fait plaisir de les aider culturellement, il nous fait plaisir de les
aider à être des Québécois.
M. MORIN: D'accord. C'est bien dit. Maintenant, je voudrais quand
même vous demander un ou deux détails qui m'intéressent,
pour vous faire préciser votre pensée.
Si je vous ai bien compris, lorsqu'un enfant deviendrait citoyen, ou
lorsque ses parents deviendraient citoyens, il retrouverait, ce que vous
appelez, la liberté de choix.
M. LAFORTUNE: Je pense, M. le Président, qu'il faudrait
peut-être aller jusque-là, parce que si nous sommes des
confrères québécois, il faut quand même être
confrères jusqu'au bout du sang.
M. MORIN D'accord, mais je vous donne maintenant un ou deux cas qui
peuvent se poser assez fréquemment. Supposons deux immigrants qui
arrivent au pays en mars de cette année; en avril, ils ont un enfant. En
vertu des lois de ce pays, cet enfant né sur le sol canadien devient
automatiquement citoyen canadien. Donc, il n'est pas un immigrant. Est-ce que
cet enfant, d'après vous, ira à l'école anglaise, s'il le
désire, ou s'il doit être orienté vers l'école
française?
M. LAFORTUNE: On n'a pas encore de
"pré-pré-prématernelle", parce que vous n'avez pas mis
tellement vieux votre enfant, vous l'avez mis...
M. MORIN: Je l'ai pris très, très jeune à
dessein.
M. LAFORTUNE: Après un certain temps, il faudrait étudier
le problème. Vous êtes des législateurs, vous êtes
quand même des personnes qui connaissez beaucoup... Nous pouvons quand
même avoir une opinion, M. Morin, sur le problème...
M. MORIN: C'est cela que je vous demande.
M. LAFORTUNE: Notre opinion est la suivante. Il faudra qu'un jour ou
l'autre il aille à l'école française.
M. CLOUTIER: Vous n'en sortirez pas des tests.
M. MORIN: M. le Président, je pourrais continuer mes questions
comme cela et, par exemple, supposer que les parents arrivent ici, deviennent
citoyens et aient des enfants dans les années suivantes. Etant citoyens,
d'après ce que vous nous avez dit, ils auraient cette "liberté de
choix" pour leurs enfants, bien que les enfants soient des enfants
d'immigrants, en réalité.
M. LAFORTUNE: Je pense bien, M. Morin, que je n'irai pas discuter avec
vous du problème constitutionnel. Mais si l'enfant est arrivé
l'an passé, je pense bien que vous savez qu'il lui faut quand même
cinq ans avant qu'il ne devienne citoyen canadien.
M. MORIN: Oui, si l'enfant lui-même arrive au pays, d'accord; mais
dans les cas que je vous ai mentionnés, la situation est un peu plus
compliquée. Toutefois je n'insiste pas; c'est pour vous montrer qu'il
faut pousser la réflexion assez loin pour trouver des règles qui
soient d'application générale.
Je voudrais vous signaler en passant au sujet de la page 3, que nous
sommes tout à fait d'accord sur l'insistance que vous mettez sur le fait
que dans les écoles françaises, il doit y avoir un bon
enseignement de l'anglais. C'est un point sur lequel vous appuyez et nous vous
donnons entièrement raison là-dessus. Je n'ai
pas de question à poser; je voulais vous signaler cela en
passant.
A la page 4, une dernière question, avant de passer...
M. LAFORTUNE: M. le Président, M. Leroux, le directeur,
responsable de l'enseignement, aurait peut-être une question ou un fait
à rapporter.
M. MORIN Oui.
M. LEROUX Sur la question de la qualité de l'enseignement, ce
n'est pas, je pense, au bill de préciser ces conditions. Mais il y a
tout de même des dispositions qui sont en dehors du bill et qui sont
l'application de la future loi auxquelles il faudrait apporter des
améliorations, entre autres, le "ratio" professeur. Actuellement,
lorsqu'on veut donner un bon enseignement dans la langue seconde, on se doit de
nommer des spécialistes pour donner un enseignement dans la langue
seconde. Je pense qu'il y a des programmes de perfectionnement qui sont
prévus. Nous essayons de nous lancer de ce côté et
d'organiser notre corps professoral pour donner un enseignement valable, mais,
malheureusement, lorsqu'on commence à nommer des spécialistes
pour l'enseignement de la langue seconde, cela a un ricochet sur le nombre
d'élèves qu'on met dans les classes. Par le fait même, on
en vient à une chose qui pourrait devenir ridicule, c'est-à-dire
que, pour améliorer l'enseignement d'une langue seconde, on pourrait se
mettre dans des conditions où l'enseignement de la langue maternelle
serait diminué, parce qu'on aurait trop d'élèves dans une
même classe.
Je ne veux pas insister sur des détails semblables. Je ne pense
pas que ce soit dans la loi qu'on doit les trouver. Mais je crois qu'il faut
tout de même y penser maintenant, de façon que ces
retombées ne produisent pas des effets néfastes,
particulièrement sur l'enseignement de la langue maternelle.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, puisque nous sommes à parler
de problèmes d'administration, j'aimerais tout de suite vous rassurer
quant à votre interprétation de l'article 50. Vous vous demandez
: Nous espérons que notre interprétation soit la bonne. C'est
celle que personnellement j'ai défendue à cette table depuis les
débuts des séances de la commission devant chacun des groupes qui
sont venus, quant au fait que 50 est le statu quo, les pouvoirs des commissions
scolaires de placer les étudiants dans le groupe et le cours auxquels
ils se sont inscrits.
Si mon interprétation avait été mauvaise, vous
pouvez être certain que le ministre de l'Education m'aurait confondu.
Mais je l'ai tellement répété de fois...
M. CLOUTIER: II le faut parfois.
M. CHARRON: ... et il a eu tellement l'occasion de le faire que je crois
que vous et moi avons la bonne compréhension de l'article 50.
M. CLOUTIER: Pas seulement vous et eux...
M. CHARRON: Maintenant, je voudrais revenir à l'article 49. Vous
y insistez sur la définition d'une connaissance suffisante; nous avons
soutenu également cette demande avec plusieurs groupes qui vous ont
précédés et qui oeuvrent dans le monde scolaire comme
vous, aussi bien du côté anglophone que francophone.
Peut-être que la question pour les groupes anglophones était plus
vive, parce que c'est ce transfert au secteur anglophone qui nous
inquiète beaucoup plus qu'au contraire le transfert anglophone de notre
côté, ce qui est parfaitement normal dans un rapport de
minorité à majorité.
Mais je voudrais vous demander, à vous, comme administrateurs
scolaires, MM. Décarie et Lafortune, actuellement, quand, selon le
système de la loi 63, un étudiant anglophone décide de
s'inscrire chez vous, vous avez quand même comme responsabilité
déjà, sans que même le principe soit dans la loi, de
vérifier s'il a une connaissance suffisante puisqu'en vertu de l'article
50, ou en vertu de la réglementation 06, 04, 02 et 10, vous avez le
devoir de le placer à un cadre quelconque. Comment, actuellement,
procédez-vous à la vérification de cette connaissance
suffisante?
M. LAFORTUNE: M. le Président, si vous me le permettez,
après avoir suivi l'étude des crédits du ministère
de l'Education, après avoir lu et pris connaissance des documents du
ministre et également de M. Charron, je pense qu'en tant que commissaire
d'écoles... Avant de répondre à votre question, si vous me
permettez, M. le Président, j'aimerais remercier M. le ministre et
j'aimerais également remercier M. Charron. Le seul endroit où des
commissaires d'écoles peuvent apprendre et connaître les objectifs
du ministère à long terme, c'est à la lecture des
crédits et c'est une richesse inouie pour les commissaires, pour ceux
qui prennent la peine de les lire. Je voudrais donc remercier et
féliciter M. le ministre et également M. Charron. Je pense qu'en
tant que commissaire, je devais le faire.
M. CHARRON: Merci, M. Lafortune.
M. CLOUTIER: Merci de m'avoir remercié...
M. LAFORTUNE: Pour répondre à votre question, j'imagine
que la question va venir un jour ou l'autre, une minute ou l'autre, nous avons
des problèmes de demande de transfert de parents qui veulent que leurs
enfants suivent des cours dans une autre langue d'enseigne-
ment. A Laval, il semble qu'il y a eu des manifestations. Il semble
qu'il y a eu quelques problèmes.
Nous aimerions quand même donner ici, pour le
bénéfice de cette assemblée, les statistiques concernant
la ville de Laval. En 1970/71, nous avons eu 50 demandes de transfert au
secteur anglophone; en 1971/72, 90 élèves; en 1972/73,
l'année où on appliquait peut-être intégralement ce
qu'on appelait la loi 63, nous avons eu 193 élèves; en 1973/74,
150; et en 1974-75, nous avons 140 élèves. Nous avons plus
d'enfants qui vont au secteur privé que d'enfants qui vont au secteur
anglophone.
Maintenant, voici ce qui s'est fait à la commission scolaire
Chomedey de Laval. D'abord, nous avons des tests à la commission
scolaire. Nous avons pris sur nous d'établir des tests pour
établir une connaissance suffisante. Nous avons également
étudié le bulletin scolaire de l'élève, son
aptitude à apprendre, son aptitude à apprendre peut-être
dans une autre langue, son aptitude à apprendre peut-être selon
des manières audio-visuelles. Nous avons également demandé
des rencontres avec les parents, et nous avons, en dernier lieu, demandé
des rencontres avec les professeurs anglophones qui enseigneront l'année
suivante aux enfants.
C'est ce que nous avons fait à Chomedey de Laval pour aider les
enfants à réussir, pour les aider à apprendre à
être et pour apprendre à apprendre.
M. CHARRON: M. Lafortune, si je comprends bien, si, demain,
l'Assemblée allait adopter...
M. LAFORTUNE: Voulez-vous parler un peu plus fort, M. Charron?
M. CHARRON: Je vais respirer.
M. LAFORTUNE: J'ai des difficultés, je suis handicapé.
M. CHARRON: Si, demain, l'Assemblée allait adopter la loi 22
telle qu'elle est rédigée actuellement, pour la commission
scolaire Chomedey de Laval, le fait que l'article 49 affirme le principe de
l'obligation d'une connaissance suffisante pour être inscrit dans un
régime d'enseignement ne constituerait pas pour vous une modification
énorme puisque déjà vous avez, comme vous dites, tout un
système d'évaluation avant de procéder à la
classification de l'étudiant. Est-ce exact?
M. LEROUX C'est exact. Cependant, je pense qu'aucune commission scolaire
du Québec négligerait d'avoir de l'aide par des tests qui
seraient réellement bien standardisés. Je crois que c'est avec
plaisir qu'on recevrait des tests qui pourraient nous assurer un excellent
choix. J'ajouterais, particulièrement, au secondaire, où cela
fait trois ans qu'on applique des tests et lorsque des élèves se
révèlent trop faibles, on conseille aux parents de ne pas faire
le changement.
M. CHARRON: D'accord!
M. LAFORTUNE: Sur 350 demandes, nous en avons accepté 140.
M. CHARRON: J'ai une toute petite dernière question. Je ne veux
pas priver mon collègue de Rouyn-Noranda... Mais est-ce que le ministre
accepterait de considérer que le temps des félicitations que nous
avons reçues ne soit pas pris sur le temps de l'Opposition?
M. CLOUTIER: Ecoutez.
M. MORIN: Nous vous les ferions partager, puisque le ministre en
réclamait sa part.
M. DEOM: 50-50.
M. CHARRON: J'ai une dernière question à poser. A la page
4, dans vos commentaires de l'article 48, vous dites que vous comprenez
difficilement l'attitude de certains Québécois qui, pourtant bien
adeptes de la liberté, veulent priver d'autres Québécois
d'un droit qu'ils possèdent.
Est-ce que vous partagez l'opinion du ministre de l'Education qui dit
que le libre choix est un droit ou partagez-vous l'avis du ministre de la
Justice qui dit que ce n'est qu'une mesure pratique?
M. LAFORTUNE: M. le Président, si vous me permettez de
répondre à M. Charron, je pense que, si le contribuable a
l'obligation de payer des taxes à une commission scolaire où on
offre deux langues d'enseignement, il doit avoir la possibilité,
également, de choisir la langue d'enseignement ou de diriger son fils
là où il voudrait bien, parce que c'est lui qui paie. Si on
étudie les statistiques que nous avons mentionnées tantôt
celles des élèves qui demandent un transfert de langue
d'enseignement, au niveau provincial, c'est 1.7 p.c. selon l'étude des
crédits et c'est monté à 1.9 p.c. alors que chez nous
à Laval, actuellement, la situation est sous contrôle puisqu'au
niveau secondaire nous recevons des élèves des trois commissions
scolaires de l'île, la régionale de Mille-Iles, la
régionale Duvernay et la régionale de la commission scolaire
Chomedey. Cette année, nous avons 140 demandes acceptables, pour le bien
de l'enfant, d'un changement...
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: J'aurai quelques brèves questions parce que
déjà les représentants de la commission scolaire Chomedey
de Laval ont répondu à plusieurs questions que je me posais.
A la page 5 de votre mémoire... Evidemment, l'article 128
mentionne une date d'application, soit septembre 1974 et il vous parait
impossible, à cause des inscriptions déjà faites... Si je
comprends bien, cela veut dire que vous souhaiteriez qu'en ce qui concerne
l'article 128, que la date...
M. LAFORTUNE: Je pense que, dans notre cas à nous,
peut-être ceci ne s'applique pas parce que toutes les inscriptions sont
faites. Il y a peut-être des commissions scolaires où il y a un
retard et où cela peut s'appliquer.
M. SAMSON: Cela voudrait dire que vous réclamez, en quelque
sorte, une souplesse quant à la date d'application, c'est-à-dire
pas nécessairement...
M. LAFORTUNE: Je pense que cela nous donne une chance de répondre
à la question du député de Rouyn-Noranda. Nous, des
instances décentralisées, sommes habitués à vivre
avec un code scolaire où il y a peut-être au minimum 55 articles
qui relèvent du ministre et il y en a peut-être également
autant qui nous régissent d'après le lieutenant-gouverneur. Nous
avons appris à vivre avec l'autorité et nous pensons que nous
agissons pour le bien des contribuables.
M.SAMSON: D'accord! Vous vous dites inquiets au sujet des
règlements en ce qui concerne l'application du projet de loi 22
j'ai posé la même question à d'autres groupements et je
vous pose cette même question est-ce que vous verriez d'un bon oeil
le fait que les règlements soient publiés, que vous puissiez en
prendre connaissance avec un délai avant l'application de ces
règlements afin que, comme groupement, vous puissiez émettre
votre opinion quitte à ce que le ministre l'accepte évidemment,
ou la refuse, mais que votre opinion puisse être émise avant la
date d'application de ces règlements.
M. LEROUX: Du point de vue des fonctionnaires de la commission scolaire,
un changement qui arrive après janvier pour une application en septembre
suivant, c'est toujours trop tard pour le moins. Je pense que, depuis quelques
années, le ministère de l'Education fait attention à cela.
Pour application, il faut prévoir un délai si on veut être
réellement efficace.
M. SAMSON: D'accord. En ce qui concerne les tests, vous avez
mentionné une expérience un peu particulière à
votre commission scolaire. C'est l'avant-dernier paragraphe de la page 5; en
disant que les tests sont insuffisants, vous suggérez qu'en plus des
tests, le comité pédagogique ou même la commission scolaire
prenne connaissance du bulletin de l'élève, de
l'évaluation du professeur et des rencontres avec les parents. Est-ce
que vous souhaiteriez également qu'avant que ces fameux tests soient
préparés il y ait rencontre entre les autorités du
ministère et les autorités de toutes les commissions scolaires du
Québec aux fins d'échanger vos différentes
expériences?
M. LAFORTUNE: M. le Président, pour répondre à la
question de M. Samson, même si nous avons ce qu'on appelle une certaine
autonomie, je pense que nous prenons nos responsabilités dans le sens et
dans la limite de notre autonomie. Je pense que nous faisons passer les tests
lors de la demande premièrement; ensuite, le programme se poursuit,
selon le résultat de ces tests.
M. SAMSON: En vertu du projet de loi 22, il se pourrait que les tests
soient préparés autrement?
M. LAFORTUNE: Actuellement, nous vivons avec une autre loi que le projet
de loi 22.
M. SAMSON: Je m'excuse, mais je vous parle, évidemment, toujours
en fonction du projet de loi 22. Si le projet de loi 22 est adopté, s'il
est adopté avec des tests, cela voudra dire, si je comprends bien
peut-être que le ministre pourra m'éclairer là-dessus
qu'il y aurait une forme de test imposée ou
suggérée.
M. CLOUTIER: Ecoutez. Nous fournissons constamment des tests aux
commissions scolaires dans tous les domaines. Je pense aux
mathématiques. Alors, nous allons procéder exactement de la
même façon. Les tests sont aujourd'hui des techniques de mesure
parfaitement objectives. Il suffit de déterminer des seuils et nous
allons proposer ces tests de manière qu'il y ait une certaine
uniformité au niveau du Québec. Cette idée des tests n'est
pas née, vous savez, d'un cerveau ou d'une galaxie éducative.
Depuis qu'on y a mis fin...
M. SAMSON: Alors, cela va me rassurer.
M. CLOUTIER: Cette idée est née des expériences
pratiques des commissions scolaires. Je crois que les commissaires, qui sont
des gens éminemment responsables, ont clairement indiqué qu'ils
procèdent comme cela depuis des années dans
l'intérêt des enfants, et que ceci sert de frein aux transferts
que j'ai qualifiés de transferts sauvages. Je voulais dire par là
des transferts qui n'étaient pas contrôlés, qui ne tenaient
pas compte des impératifs pédagogiques. Le commissaire nous a dit
qu'il y avait eu 350 demandes l'année dernière et que, par le
système de tests, on avait réduit ces demandes à 150. Ceci
s'est fait sans drame. La dramatisation a eu lieu dans les journaux, mais elle
n'a pas eu lieu au niveau des élèves, et elle n'a pas eu lieu au
niveau des commissaires. Le moment
viendra pour expliquer les choses clairement, mais à l'occasion
d'un témoignage comme celui-là, il est utile de le souligner. Il
est certain que toutes les consultations qui devront avoir lieu, auront
lieu.
M. SAMSON: Ah bon! Dans ce cas, M. le Président, vous permettrez
que je pose peut-être une petite question au ministre pour
éclairer ma lanterne. Dans la recherche de cette standardisation des
tests et dans la préparation des tests, si j'ai bien compris, le
ministre n'a pas objection à ce qu'il y ait consultation
générale de toutes les commissions scolaires?
M. CLOUTIER: C'est-à-dire que nous consulterons la
fédération, c'est ce qu'il y a de plus simple.
M. SAMSON: Oui, mais...
M. CLOUTIER: Constamment. D'ailleurs, toute la validation des tests se
fait dans les commissions scolaires, en collaboration très
étroite avec les enseignants, avec les cadres. Ce que je veux dire,
c'est qu'on a dramatisé toute cette question. On l'a souvent mal
comprise. Je pense que voilà un témoignage qui nous
éclaire beaucoup sur le plan technique et qui manifeste bien quelle est
la véritable portée de cette façon de procéder. On
a essayé d'éviter de créer des classes. Le chef de
l'Opposition a essayé de faire dire aux commissaires que les immigrants
seraient, par des méthodes coercitives, inclus dans le système
francophone.
Ce n'est pas ce que nous cherchons à faire. Nous voulons traiter
tous les citoyens de la même façon, mais il est bien
évident que notre but est d'essayer d'orienter le plus possible
d'immigrants dans notre secteur.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Douze minutes au parti au pouvoir.
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais tout simplement remercier
les membres de la commission scolaire de Chomedey de Laval.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Mille-Iles.
M. LACHANCE: M. le Président, le mémoire
préparé par la Commission scolaire de Chomedey pose beaucoup de
questions. Je pense que le ministre de l'Education y répondra lors de
l'étude du principe du bill en deuxième lecture, lors de son
examen article par article. Par contre, je voudrais revenir, à l'instar
du chef de l'Opposition, sur ce qui concerne les immigrants. Est-ce que votre
commission scolaire, au moment où nous nous parlons, est vraiment
prête à recevoir les immigrants? Je voudrais faire le point
là-dessus. Les immigrants, au niveau des maternelles, au primaire et au
secondaire, est-ce que vous êtes prêts en ce moment à les
recevoir?
M. LEROUX: Nous sommes prêts au niveau pédagogique, nous
sommes prêts au niveau des locaux. Je pense que nous avons des
disponibilités de locaux chez nous à ce point de vue.
Déjà, pour l'année en cours, nous avons deux classes qui
ont très bien fonctionné, qui ont donné des
résultats très satisfaisants. C'était une première
expérience. Nous avions 21 élèves et, l'année
prochaine, nous espérons en avoir 49 en trois classes. A ce point de
vue, après consultation des responsables et avant de venir à la
commission, je me suis informé comment fonctionnaient les classes
d'immigrants afin de donner la meilleure explication. On serait même
prêt à tenter des expériences du côté du
regroupement des immigrants dans le milieu, dans l'école la plus
près de chez eux dans certains cas. Actuellement il y a des
inconvénients parce qu'on est obligé de regrouper les
élèves. Il y a des problèmes secondaires de transport:
l'élève part très tôt le matin de chez lui et dans
certains cas il revient très tard. Alors, il y a des
inconvénients qui font que c'est moins intéressant à ce
moment-là de s'intégrer à une classe maternelle
éloignée mais, par ailleurs, du côté des
différentes ethnies qui se retrouvent en classe, cela devient
très intéressant parce qu'on débloque sur une obligation
d'avoir un moyen de communication, d'avoir une langue de communication, qui est
le français nécessairement, puisque vous avez des Espagnols, des
Grecs, qui ne sont pas capables de se comprendre dans une autre langue que le
français. Ils débloquent là-dessus par obligation, par
moyen de communication et par besoin de moyens de communication. Cela a
été un succès de ce côté, mais par ailleurs
on se demande si cela ne serait pas plus facile de regrouper les
élèves dans leur milieu, mais encore faut-il avoir le nombre.
Actuellement, nous en avons 21, et nous en aurons 49 l'année
prochaine.
M. LACHANCE: En somme, si on peut préciser...
M. LAFORTUNE: Je pourrais peut-être continuer sur le sujet un
instant. Nous recevons actuellement 18 immigrants en classe maternelle et l'an
prochain nous en avons quinze qui continuent à l'école
française et trois qui vont à l'école anglaise.
M. CLOUTIER: Grâce aux dispositions du plan de
développement des langues, qui a permis la création d'une de ces
écoles comme on en a créées un peu partout à
Montréal. Vous en aurez donc quinze sur 18, ce qui correspond à
peu près aux proportions ailleurs. Il y aura 90 p.c. des enfants des
écoles maternelles qui vont s'inscrire dans le secteur francophone et
notre cadre législatif viendra asseoir tout cela solidement.
M. LACHANCE: En somme, votre commission scolaire est prête
à recevoir, à assimiler
tous les groupes ethniques d'immigrants aux francophones.
M. LEROUX: La grosse difficulté est de les trouver, actuellement,
c'est cela. On fait affaires avec le bureau régional afin de savoir
où se trouvent les immigrants de façon à aller les
chercher puis les intégrer à une classe maternelle ou
prématernelle dans certains cas, selon qu'ils ont quatre ou cinq
ans.
M. LACHANCE: Une autre question à la suite de votre
mémoire. A la page 5, article 51, vous dites: Nous demandons que le
comité pédagogique ne relève pas du ministre mais qu'il
soit indépendant. En somme, vous l'avez vraiment étudié
pour dire ces choses. Quelles raisons vous amènent à dire que le
comité pédagogique devrait être indépendant? Est-ce
que vous pouvez préciser votre pensée?
M. LAFORTUNE: Nous avons, à l'intérieur de la commission
scolaire, des personnes qui, si on les empêchait d'aller dans un autre
secteur d'une langue différente, peuvent faire des pressions à
différents niveaux. Nous demandons que le comité
pédagogique relève, soit de la régie, ou peut-être
d'un autre organisme, et qu'il soit absent du contrôle politique.
C'était une demande minimale dans notre mémoire; après la
lecture des articles, nous en sommes arrivés à cette conclusion.
Cela n'est pas quand même une demande sine qua non.
M. LACHANCE: Ce n'est pas parce que vous ne croyez pas au contrôle
politique ou ces choses-là?
M. LAFORTUNE: J'espère que, lorsqu'il s'agit d'un enfant, M. le
Président, lorsqu'il s'agit de son avenir, ce n'est pas que je n'ai pas
confiance en M. le ministre. Mais peut-être que si c'était la
régie, ou un autre organisme, qui décide ou qui demande un avis
à un comité pédagogique, dont on ne connaît pas les
instruments de mesure, dont on ne sait pas ce sur quoi il va se baser pour
donner son avis... Nous demandons, ce sera probablement connu dans les
règlements, nous l'espérons, que ce soit tout simplement comme
ça.
M. CLOUTIER: Ici, il serait utile que j'apporte un
éclaircissement. La réglementation qui sera connue au moment du
débat, parce que nous ne sommes pas en débat en ce moment
nous écoutons les représentations contiendra des
dispositions de cet ordre. Nous avons exactement les mêmes
préoccupations.
M. LAFORTUNE: Nous sommes suspendus à vos lèvres, M. le
ministre, pour connaître les règlements de façon à
pouvoir les appliquer le plus tôt possible chez nous.
Maintenant, M. le Président, si vous me permettez, une commission
scolaire n'est quand même pas un organisme qui s'occupe d'administrer des
sous et des choses comme ça. Nous sommes tellement soucieux au niveau de
la recherche et des recherches pédagogiques, à l'article 63 c),
même si ça ne relève pas du secteur de l'enseignement, nous
aimerions que soit inscrit dans notre dossier que nous avons
suggéré différentes recherches sur la langue.
La première sera celle-ci: La recherche sur les facteurs autres
que l'enseignement influençant l'apprentissage de la langue.
Deuxièmement, une recherche opérationnelle sur les
techniques d'immersion pour l'apprentissage d'une langue seconde.
Troisièmement, une recherche opérationnelle sur les
troubles d'apprentissage au niveau secondaire; cette recherche toucherait
particulièrement les troubles d'apprentissage en lecture, des troubles
d'apprentissage en orthographe et leur fréquence dans les classes de
voie régulière et allégée. Une recherche sur la
rentabilité des méthodes utilisées pour l'apprentissage de
la lecture à l'élémentaire.
Enfin, une recherche sur une méthode de
récupération à l'intérieur de l'école.
Je voulais que ce soit inscrit dans le journal des Débats.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Saint-Jean.
M.VEILLEUX: M. le Président, lorsque M. Lafortune a
répondu tout à l'heure à une des questions du chef de
l'Opposition, le député de Sauvé, relativement à
l'immigrant qui obtient sa citoyenneté après cinq ans,
j'étais porté à me demander si M. Lévesque avait
rencontré M. Lafortune avant de donner sa conférence de presse ou
vice versa, parce que M. Lévesque a donné exactement la
même réponse que M. Lafortune tout à l'heure. Ce n'est pas
le point sur lequel je voudrais vous interroger. Depuis que cette commission
parlementaire siège...
M. MORIN: Ce sont deux hommes de bon sens, voilà tout.
M.VEILLEUX: ... il y a un député qui relève assez
souvent le cas de Saint-Léonard, de Laval, de Brossard. Ici, on a les
commissaires d'écoles qui ont eu le cas, qu'on a appelé de Laval.
Est-ce que vous pourriez nous dire exactement dans quelle circonstance il s'est
produit, de quelle façon et comment il s'est réglé, ou
s'il n'est pas réglé?
M. LAFORTUNE: Je pense que je ne trancherai pas le débat qui a
été mentionné dans le journal des Débats entre M.
Cloutier et M. Charron.
Nous allons quand même expliquer notre position, du moins, ce sur
quoi nous nous sommes basés pour en arriver à une
décision. Je voudrais bien rassurer les membres de cette digne
commission que notre décision n'est pas
finale, puisque nous sommes encore en discussion avec le
ministère de l'Education.
Dans le secteur de l'école Présentation de Marie,
puisqu'il faut l'appeler par son nom, il y a 1800 places/élèves
et nous avons, dans le secteur, dans la juridiction, 812 élèves
à placer. Alors, il nous faut, si nous voulons administrer... le
problème de la vocation de l'école Présentation...
M. MORIN: Pour préciser les chiffres, 812 élèves en
plus des 1800?
M. LAFORTUNE: Non, non. Il y a 1800 places/élèves dans le
secteur.
M. MORIN: Bon.
M. LAFORTUNE: ... et nous avons 812 élèves dans le
secteur.
M. MORIN: Bon, j'ai compris.
M. DECARIE: 812 élèves francophones.
M. LAFORTUNE: Nous avons pris la décision de faire de
l'école Présentation de Marie une école francophone. Dans
d'autres secteurs... à Mille-Iles, il y a eu une rencontre entre M.
Pierre Martin, sous-ministre et différents fonctionnaires du
ministère de l'Education. Nous avons rencontré la commission
scolaire de Mille-Iles et actuellement il semble qu'après les
élections, même après les nouvelles élections qui
viennent d'avoir lieu, que la question des doubles horaires demeuraient
à Mille-Iles et que la vocation de l'école Présentation de
Marie devrait être réétudiée en fonction de cette
décision qui appartient à une autre commission scolaire.
LE PRESIDENT (M. Pilote): J'inviterais...
M. LAFORTUNE: A Laval actuellement, il ne semble pas y avoir de
problème.
LE PRESIDENT (M. Pilote): M. Lafortune, je vous inviterais à vous
en tenir au bill 22 et non pas à une question de
places/élèves.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai posé la question pour
une raison bien simple. C'est que, depuis que cette commission siège, on
nous flanque à pleine face de même qu'à ceux qui viennent
témoigner, des gens qui ne vivent pas à Laval, donnant comme cas
type de la ville de Laval, Présentation de Marie, je pense qu'il est
temps qu'on éclaircisse ou du moins qu'on tente d'éclaircir ici
exactement la situation de Présentation de Marie. Vous dites qu'il y
avait 812 francophones à placer dans une école qui pouvait en
contenir 1800. Mais le problème exactement vient de la différence
entre 1800 et 812, les 1000 qui faisaient la différence?
M. DECARIE: On parle de 1800 places/élè- ves dans deux
écoles. Vous parlez de Présentation de Marie qui a une
possibilité de 950 et vous parlez de Saint-Jean qui a à peu
près le même nombre. A ce moment-ci, face à la diminution
des élèves, nous nous sommes vus dans l'obligation d'essayer de
trouver une autre vocation à Présentation de Marie. C'est de
là que sont venus les problèmes et je ne voudrais pas, M. le
Président, que la commission pense que ce qu'on veut dire actuellement
veut nous éclipser de la situation, mais je pense que cela a
été quand même monté en épingle, c'est
tout.
M. VEILLEUX: Mais lorsque vous dites que vous aviez un problème
dû à une diminution d'élèves, cette diminution
d'élèves était due à quoi?
M. DECARIE: Due à plusieurs faits, dont par exemple, le premier,
la construction de certains centres commerciaux dans Laval, due aussi
peut-être à l'inflation. Je vais vous donner un exemple. Dans un
secteur où il y a eu vente de douze maisons où nous avions trente
élèves, les nouveaux propriétaires qui ont acheté
ces maisons avaient seulement deux enfants. Ce sont des raisons qui font
que...
M. VEILLEUX: C'est là que vous êtes allé chercher
les enfants qui voulaient fréquenter les classes anglophones pour les
faire entrer dans Présentation de Marie, si je comprends bien, pour
répondre aux normes d'administration d'une commission scolaire.
M. DECARIE: Nous avons essayé d'utiliser au maximum les locaux
que nous avions.
M. VEILLEUX: D'accord, merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie M. Décarie ainsi que ceux
qui l'accompagnent pour leur mémoire et soyez assurés que la
commission va en prendre bonne note. J'inviterais à présent M.
Stafford du Quebec Association of School Administrators à venir
présenter son mémoire et à identifier ceux qui
l'accompagnent.
Quebec Association of School Administrators
M. MACDONALD: Je m'appelle Hugh Macdonald. Je suis président de
la Quebec Association of School Administrators. Vous permettez que je dise
quelques mots avant que Mlle Marksfield fasse sa présentation.
M. le ministre, messieurs les députés, je suis
accompagné de M. Peter Krause, vice-président de notre
association et directeur des services du personnel de la Southshore Protestant
Regional School Board et de Mlle Sylvia Marksfield, porte-parole de notre
association et principale d'une école d'immersion de la Protestant
School Board of Greater Montreal.
Mlle Marksfield et M. Krause seront prêts à répondre
à vos questions après la présentation. Merci, M. le
Président. Mlle Marksfield.
MLLE MARKSFIELD: Merci, monsieur.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, la Quebec Association of School Administrators a la
responsabilité et le devoir d'informer le gouvernement de ses points de
vue sur le projet de loi 22, la loi sur la langue officielle.
La Quebec Association of School Administrators compte plus de 575
éducateurs professionnels sur qui repose en grande partie la
responsabilité de diriger l'éducation dans le secteur protestant
et, en tant que corps corporatif, la QASA représente une organisation
dont les membres possèdent une formation professionnelle, des
qualifications et une expérience indiscutable.
Ce mémoire traite principalement des implications du projet de
loi sur l'éducation de milliers d'enfants d'âge scolaire, tant
francophones qu'anglophones, résidant actuellement au Québec ou
qui y viendraient dans l'avenir. Il ne devrait pas être nécessaire
d'appuyer sur le fait que ce projet de loi comporte un sens profond pour les
destinées de ces enfants, quelle que soit leur langue ou leur
culture.
Afin d'être bref et précis, les différents points
que notre association désire souligner sont
énumérés ci-dessous: 1.Nous appuyons de tout coeur une
législation visant à maintenir et renforcer la culture et la
langue française. 2.Nous appuyons l'effort fait afin de conserver la
langue française comme langue prédominante au Québec.
3.Nous appuyons cette section du projet de loi qui rend l'enseignement de la
langue française obligatoire dans les écoles anglophones. Ceci
sert à confirmer une pratique déjà existante. Il n'y a pas
de doute qu'une disposition similaire devrait exiger que la langue anglaise
soit enseignée dans les écoles francophones. 4. La
législation,' sous sa forme actuelle, d'après nous, est
discriminatoire, non pas contre les enfants anglophones, mais contre les
enfants francophones, à un tel point qu'elle n'offre aucune garantie
qu'ils auront la possibilité d'apprendre l'anglais à
l'école. Bien plus, de telles mesures tendent à rabaisser la
langue et à décourager le bilinguisme. Plus
précisément, à moins que la section 48 ne soit
amendée convenablement, la même stratification, si longtemps
source d'irritation au Québec, pourrait être renforcée.
5.Nous recommandons instamment des mesures économiques pour
l'enseignement du français et de l'anglais, langue seconde au
Québec. Un enseignement efficace de la langue seconde est la meilleure
façon de s'assurer que les parents cesseront d'envoyer leurs enfants
à des écoles autres que celles auxquelles ils iraient normalement
pour apprendre une langue seconde. 6.Nous croyons fermement que la
diversité culturelle et le bilinguisme fortifient grandement la
société du Québec. Nous nous permettons de suggérer
au gouvernement de légiférer de façon à encourager
l'usage des deux langues, avec des précautions particulières afin
de sauvegarder la langue française. 7. Nous appuyons le droit
démocratique des parents de choisir la langue principale d'enseignement
pour leurs enfants et toute contrainte dans ce domaine nous paraît
inacceptable. En fait, nous ne connaissons aucun endroit où il existe un
double système scolaire où le choix de la langue d'enseignement
est dénié. D'ailleurs, nous pouvons remarquer que les commissions
Parent, Gendron et BB ont recommandé que les droits des parents soient
maintenus. 8. Nous demandons instamment que de fortes garanties légales
soient introduites afin d'assurer l'existence continue des écoles
anglophones. Nous sommes inquiets par la manière plutôt
cavalière dont l'éducation anglaise est traitée dans ce
projet de loi. Nous suggérons que le projet de loi soit amendé
afin que les droits de la minorité anglophone, qui existent depuis plus
d'un siècle et demi, s'appuient sur quelque chose de plus substantiel
que le bon vouloir ministériel. 9. Il nous paraît, après
mûre réflexion, que les dispositions du projet de loi
forçant les enfants qui n'ont pas une connaissance suffisante de la
langue anglaise à fréquenter les écoles françaises
n'atteindront pas les résultats attendus. De plus, nous
prétendons qu'un tel déni des droits démocratiques
représente une exagération du sentiment nationaliste, qui risque
de conduire à la méfiance et à la controverse. 10.
L'Association considère que toute législation qui oblige les
membres d'un groupe culturel à apprendre une langue
étrangère ne peut qu'échouer. Peut-être n'y a-t-il
pas de meilleure preuve pour appuyer notre point de vue que les Canadiens
d'origine française. Certainement, il y a 150 ans, la tentative de
forcer les francophones à fréquenter les écoles anglaises
a été éminemment infructueuse. 11. Nous croyons que
l'apprentissage de la langue seconde, de fait, même l'intégration
d'un groupe social dans une culture majoritaire, peut seulement s'accomplir par
la persuasion, le précepte et l'exemple. Les parents anglophones ont
fait des efforts considérables en particulier au cours des
dernières années, pour s'assurer que leurs enfants parlent le
français couramment et possèdent une solide connaissance de la
langue. Cet intérêt et cette détermination des parents
anglophones se reflètent dans le fait que plusieurs milliers d'enfants
suivent des cours d'immersion française dans les écoies anglaises
à Montréal et les environs. Il nous semble que parmi les
élèves sortant des écoles anglaises, le nombre de ceux qui
s'expriment couramment en français est plus élevé qu'on ne
le pense généralement. Nous soutenons également que le
nombre augmente considérablement et ira en
augmentant, grâce aux programmes actuellement en cours dans les
écoles anglaises. Nous prétendons aussi que plusieurs des
premières générations d'immigrants, quoique ayant
fréquenté des écoles anglaises, parlent français et
sont partie intégrante de la communauté francophone, bien plus
que ne l'allèguent certaines affirmations. 12. Nous suggérons que
le gouvernement institue des recherches plus substantielles afin de s'assurer
de l'étendue totale des problèmes dans le domaine de
l'éducation, sujet dont le projet de loi doit traiter. Il nous semble
qu'on ne dispose pas actuellement d'arguments objectifs de poids concernant ces
problèmes. 13. Finalement, nous sommes d'avis que les difficultés
d'opération inhérentes à l'application de ce projet de loi
et, en particulier, l'obligation de diriger des élèves vers des
écoles d'une langue ou de l'autre sont plus vastes et plus complexes
qu'on ne le croit. Quelle que soit la souplesse de l'administration, les
règlements pourraient donner lieu à de sérieux abus.
Même les examens proposés, qui, en apparence du moins, semblent
avoir des caractéristiques de précision et d'objectivité
risquent, comme tous les examens, même les examens standardisés,
de devenir de grossiers instruments de sélection, presque
entièrement inutiles pour de jeunes enfants qui entrent à
l'école pour la première fois.
L'association est reconnaissante d'avoir ainsi l'occasion de
présenter son point de vue sur le projet de loi 22. Elle réalise
que la culture est l'héritage qu'une génération
reçoit de ses prédécesseurs et que les décisions
prises à ce sujet affectent profondément les recherches d'une
société pour son identité. Et ce, à son tour,
affecte sa croissance.
En tant que Québécois anglophones ou francophones, nous
devrions bien savoir que, quelle que soit la contribution que fait chaque
génération pour la continuation de la vie de
société, sa propre croissance demande qu'elle utilise
l'expérience du passé.
Avec la disparition d'une langue ou de l'autre, les
générations à venir auraient très peu à
apprendre de leurs prédécesseurs. Notre devoir est de maintenir
et de développer nos deux cultures, si richement modelées par les
générations passées. Toutes nos forces devraient tendre
vers ce but. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: Je remercie the Quebec Association of School Administrators
pour la présentation de son mémoire. C'est un autre groupe que je
connais. Je suis très heureux de voir qu'il y a autant de groupes qui
s'intéressent au secteur de l'éducation et qui se
présentent devant cette commission parlementaire. Cela n'est pas
étonnant, étant donné la présence dans ce projet de
loi d'un chapitre qui porte précisément sur la langue
d'enseignement.
Etant donné que votre groupe a choisi de ne traiter que ce
chapitre, ce qui est tout à fait naturel, je limiterai mes deux
questions à ce secteur. Je dis que c'est tout à fait naturel
parce que ce ne sont pas tous les groupes qui se sont limités au secteur
qu'ils connaissaient le mieux.
Ma première question est la suivante: Vous dites qu'en
forçant les enfants à fréquenter un secteur scolaire,
lorsqu'ils connaissent suffisamment la langue d'enseignement, ceci
représente un déni des droits démocratiques. J'aimerais
que vous m'expliquiez en quoi il y a déni des droits
démocratiques parce qu'on demande aux enfants d'avoir la capacité
pédagogique de suivre l'enseignement dans la langue du secteur.
MLLE MARKSFIELD: II s'agit, n'est-ce pas, des examens de rendement que
vous allez demander aux enfants. Quelle sorte d'examens allez-vous proposer
pour un enfant de cinq ans qui ne sait pas lire?
M. CLOUTIER: Alors, donc, votre réserve ne porte pas sur le fait
qu'il y a une condition attachée à la liberté de choix,
mais sur le fait que cette condition consiste en tests.
MLLE MARKSFIELD: C'est cela. Oui.
M. CLOUTIER: II y a quand même une nuance sérieuse. Alors,
vous n'êtes pas, en principe, opposée à ce que la
liberté de choix soit conditionnelle. Je ne cherche pas à vous
mettre en difficulté, mais je cherche véritablement à
préciser si votre prise de position vient du fait que vous êtes
intransigeants sur la liberté de choix d'un secteur à l'autre
secteur ou si elle vient du fait que la modalité qui n'est qu'une
modalité qu'a choisie le gouvernement, à savoir l'utilisation de
tests, pour être le moins discriminatoire possible...
MLLE MARKSFIELD: M. le ministre... Pardon, M. le ministre.
M. CLOUTIER: Je vous en prie, madame.
MLLE MARKSFIELD: Ce dont j'ai peur, c'est ceci: Supposons que vous ayez
un enfant de cinq ans, qu'il soit anglais, ou italien ou de n'importe quelle
langue, quel rendement allez-vous lui proposer? Quel examen allez-vous lui
proposer? Et s'il ne répond pas à votre examen les enfants
de cinq ans ne répondent pas toujours aux adultes qu'est-ce que
vous allez faire? L'enfant échoue. Il a ses voisins qui vont à
une telle école. Sa maman lui dit: Toi, tu vas aller là-bas et il
ne sait pas pourquoi. Alors, vous aurez une école pleine d'enfants qui
sont des échecs. Qu'est-ce qu'on va faire de ces jeunes enfants?
M. CLOUTIER: Chose certaine, madame, vous n'auriez pas besoin de test
parce que vous, vous vous exprimez admirablement bien en français. Je
vous en félicite.
MLLE MARKSFIELD: C'est mon métier. C'est mon langage de
travail.
M. CLOUTIER: Je le sais parce que je vous connais également. Il
semble donc qu'on a établi que ce qui vous gêne dans cela, c'est
la modalité qui a été choisie, à savoir
l'utilisation de tests. Je crois que vous étiez présente lorsque
les commissaires d'école qui ont témoigné avant
vous...
MLLE MARKSFIELD: Oui.
M. CLOUTIER : ... ont expliqué de quelle façon ils
procédaient et ils vous ont dit qu'ils utilisaient des tests depuis
toujours, qu'il était essentiel que les tests viennent à la
rescousse lorsqu'il était nécessaire de classer un enfant dans un
secteur plutôt qu'un autre secteur.
MLLE MARKSFIELD: Ce ne sont pas les commissions scolaires qui
présideront les examens. Selon l'article 51, c'est le ministre de
l'Education qui peut, cependant, conformément au règlement,
imposer des tests.
M. CLOUTIER: Vous seriez d'accord si c'étaient les commissions
scolaires?
MLLE MARKSFIELD: Je le crois oui.
M. CLOUTIER: Mais la façon, le député de
Saint-Jacques qui est devenu un expert en ce qui concerne le chapitre de la
langue de l'enseignement, va vous l'expliquer, n'est-ce pas? C'est bien votre
intention?
M. CHARRON: Si vous pouvez l'expliquer pour une fois, cela
m'éviterait de l'expliquer chaque fois.
M. CLOUTIER: Je ne suis pas sûr de l'expliquer aussi clairement,
parce que le député de Saint-Jacques défend notre projet
de loi sans trop s'en rendre compte.
M. CHARRON: Ah oui!
M. CLOUTIER: Certains de ses aspects, tout au moins. J'ai
l'honnêteté de le dire. Dans la rédaction actuelle du
projet de loi, les commissions scolaires peuvent effectivement faire ce qu'un
bon nombre d'entre elles ont toujours fait, à savoir utiliser des tests
pour classer leurs étudiants, qu'il s'agisse de première
inscription ou qu'il s'agisse de transfert d'un secteur à l'autre. C'est
ce que la commission scolaire qui vous a précédés fait,
d'une façon, semble-t-il, tout à fait valable. Ce que le projet
de loi apporte, c'est que, d'une part, il institutionalise ce qui
n'était qu'un règlement, en en faisant une procédure
générale au Québec, et d'autre part, il fait en sorte que
le ministre imposera ou proposera aux commissions scolaires des tests
standardisés pour l'ensemble du territoire. Mais l'application
continuera de se faire au niveau des commissions scolaires, ce qui n'exclurait
pas l'utilisation des comités comme l'a suggéré d'ailleurs
l'organisme précédent. Il y aura une réglementation qui
sera clairement proposée en même temps que la discussion, article
par article, du projet de loi pour qu'on en mesure toute la portée. Il
n'a pas été possible de le faire parce que nous avons choisi
d'aller en commission parlementaire avant que le débat n'ait lieu. C'est
pour cela que nous écoutons avec infiniment d'attention et de respect
les recommandations qui nous sont faites. Dans la perspective que je viens de
vous décrire, est-ce que le test vous paraît aussi odieux?
MLLE MARKSFIELD: M. Krause aimerait bien ajouter quelques...
M. KRAUSE: M. le Président, justement pour clarifier ce que vient
de dire le ministre de l'Education, il nous semble qu'il y a peut-être
une petite contradiction dans le projet de loi comme il est actuellement
présenté. Il me semble qu'on parle de deux groupes
d'élèves actuellement: premièrement, ceux qui entrent dans
le système d'éducation pour la première fois, soit au
niveau élémentaire, au niveau maternel ou à un autre
niveau plus élevé. Ces élèves c'est un peu
clair quand on lit la présentation vous aller dans des
écoles francophones. Maintenant, pour ceux-là, on n'exige pas un
test pour déterminer s'ils ont oui ou non l'habileté ou
l'aptitude, si vous voulez, d'apprendre la langue française. Ils s'en
vont à l'école française.
M. CLOUTIER: Lorsqu'ils ne parlent ni français, ni l'anglais.
M. KRAUSE: Pardon?
M. CLOUTIER: Lorsqu'ils ne parlent ni français, ni anglais.
M. KRAUSE: Oui, alors...
M. CLOUTIER: Cela vous ennuie?
M. KRAUSE: Oui.
M. CLOUTIER: Je comprends très bien que cela vous ennuie. Je le
conçois très bien, parce que s'ils vont dans le secteur
francophone, ils ne vont pas dans le secteur anglophone.
M. KRAUSE: C'est votre opinion.
M. CLOUTIER: II faut être réaliste et l'avouer. C'est
précisément ce que vous voulons faire.
M. CHARRON: La panique...
M. KRAUSE: Maintenant, la deuxième cho-
se, ce sont les élèves qui vont changer d'un niveau
à un autre, soit le niveau anglais au français ou français
à l'anglais. Dans ce cas, vous exigez que ces personnes
démontrent une certaine aptitude dans la langue de l'enseignement
qu'elles vont prendre. Alors, c'est dans ce sens, pour nous en tout cas, que
cela représente une certaine dichotomie.
M. CLOUTIER: Contradiction. Je ne le crois pas, parce que tout le monde
est soumis exactement à la même condition pédagogique. Il
n'y aurait pas de condition pédagogique ou elle existe ou elle
n'existe pas si un groupe en était exclu. La seule chose, c'est
que les enfants qui ne parlent aucune des deux langues des secteurs
d'éducation ici au Québec, parce qu'il y a deux secteurs,
l'anglophone et le francophone, vont vers le secteur francophone parce que nous
avons choisi de mettre dans ce secteur des classes d'accueil. On vous en a
décrit tout à l'heure lors de la comparution du groupe
précédent. Evidemment, il y a une restriction au point de vue du
secteur anglophone en ce sens que le secteur anglophone recevait un nombre
considérable d'enfants qui ne parlaient ni français, ni anglais
et que ces enfants iront désormais dans le secteur francophone.
C'est précisément ce qui constitue un des
éléments positifs de ce projet de loi. Je crois que vous
démontrez de façon très claire que tel est le cas, puisque
vous admettez que cela change quand même un comportement dans le
choix.
M. KRAUSE: Dans notre situation actuelle, ce qu'on dit, c'est qu'on peut
établir ces classes d'accueil dans les deux systèmes.
M. CLOUTIER: Parfaitement, vous pouvez le faire. Vous comprenez bien ce
que nous faisons, nous sommes conscients de vous gêner. La preuve
d'ailleurs qu'on les gêne, c'est qu'ils protestent. Cela ne me
paraît pas anormal, précisément parce que nous
considérons qu'il y a un phénomène qui n'est pas
acceptable au Québec, à savoir que le secteur anglophone draine
pour tout un ensemble de raisons sur lesquelles j'aurai l'occasion de
revenir lors du débat la majorité des immigrants qui ne
parlent ni français ni anglais et nous voulons renverser cette tendance
en les dirigeant vers le secteur francophone. Cependant, nous n'avons pas voulu
choisir de méthodes discriminatoires. Nous avons envisagé un tas
d'hypothèses. Le chef de l'Opposition posait des questions tout à
l'heure sur la nationalité, c'est une des 200 ou 300 hypothèses
qu'on a étudiées et nous avons retenu l'idée des tests,
parce que c'était pratiqué déjà dans un bon nombre
de commissions scolaires et cela nous paraissait une méthode non
discriminatoire d'effectuer cette orientation.
MLLE MARKSFIELD: Est-ce que je peux vous poser une autre question?
M. CLOUTIER: Oui, bien sûr.
MLLE MARKSFIELD: Quel est le pourcentage d'immigrants qui entrent dans
le Québec?
M. CLOUTIER: Je vais vous répondre, mais je pense que je vais
m'arrêter là justement pour ne pas faire le débat.
MLLE MARKSFIELD: Non, je ne veux pas être osée, M. le
ministre.
M. CLOUTIER: Non. J'en suis parfaitement conscient. Il y a environ
20,000 immigrants qui entrent au Québec chaque année. Mais si
vous voulez souligner le fait que quoi que l'on fasse on ne touchera qu'un
nombre limité d'enfants d'immigrants, c'est bien évident. Mais,
ce qui compte ce n'est pas cela, c'est de changer une tendance sur une assez
longue période.
MLLE MARKSFIELD: C'est cela, oui.
M. CLOUTIER: Alors, je voudrais que vous vous demandiez bien et
je termine là si vous vous opposez à cette condition qui
vient modifier la liberté de choix, laquelle est maintenue, parce que
pour vous c'est un droit sacré inaliénable, ou bien si c'est
parce que permettez-moi de vous le demander très gentiment
cela vient quand même diminuer ou toucher la clientèle dans le
secteur scolaire anglophone.
MLLE MARKSFIELD: Absolument pas, monsieur, c'est un principe...
M. CLOUTIER: Alors, ce n'est pas à cause...
MLLE MARKSFIELD: ... je crois, un droit partout dans le monde.
M. CLOUTIER: Bon, très bien. Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de
Saint-Jacques.
M. CHARRON: M. le Président, je veux remercier également
le Quebec Association of School Administrators de nous avoir apporté ce
témoignage, surtout de nous avoir attendu toute la journée, parce
que vous êtes là depuis ce matin.
Voici ma première question : Est-ce que vous me pardonnez de ne
pas avoir rempli la promesse que je vous avais faite, je crois, en
décembre 1972?
MLLE MARKSFIELD: Absolument, mais il faut venir au mois de septembre
prochain.
M. CHARRON: J'essaierai, je vous le promets.
MLLE MARKSFIELD: Voilà.
M. CHARRON: J'ai tellement de travail à
corriger le ministre, vous savez que j'ai à peine le temps...
MLLE MARKSFIELD: Mais j'ai invité le ministre aussi et il n'est
pas venu non plus.
M. CHARRON: Ah bon!
M. CLOUTIER : C'est exactement pour la même raison.
MLLE MARKSFIELD: Alors, deux visites au moins...
M. CLOUTIER: Sauf que moi, cela me prend plus de temps.
M. CHARRON : Je voudrais vous poser simplement quelques questions. Au
bas de la page 2, dans le paragraphe 6 de votre mémoire, vous affirmez
croire fermement que la diversité culturelle et le bilinguisme
fortifient grandement la société du Québec.
Il y a des groupes qui sont venus avant vous, à cette table,
très documentés et certains avec statistiques en main, pour nous
prouver que la situation de bilinguisme dans une société n'est
toujours qu'une étape transitoire dans cette société, mais
qu'au fond, lorsqu'on regarde plus loin que la façade de bilinguisme
d'une société et qu'on regarde les effets réels de cette
situation à long terme, on tend toujours vers l'unilinguisme. Le
bilinguisme dans une collectivité n'est toujours qu'une étape
transitoire. Elle peut être transitoire sur plusieurs années,
comme les événements peuvent accélérer ou ralentir
la marche vers l'unilinguisme, mais on est toujours en marche vers
l'unilinguisme. Les francophones nombreux, à l'exception de quelques-uns
qui sont venus dénoncer le projet de loi, s'appuyaient sur le fait
qu'ils détenaient des statistiques, certaines émises par la
commission Gendron, d'autres puisées dans d'autres sources de
renseignement qui disaient qu'effectivement le bilinguisme ne fortifiait pas la
société du Québec et surtout ne fortifiait pas la
société francophone, que cette situation de bilinguisme se
faisait à son détriment, que certaines zones du Québec
vivaient dans une étape la zone de l'Outaouais, la zone de
Montréal et d'autres dans la situation qui tendait
progressivement vers l'unilinguisme, autrement dit, que le rapport de force
n'est pas égal.
MLLE MARKSFIEELD: C'est une opinion. Pour moi, il me semble que le
cachet du Québec, c'est la diversité de sa société.
Il me semble qu'il y a un savant qui a dit: Connaissance de deux langues nous
donne deux âmes.
M. CHARRON: Je ne nie pas cela. Je ne voudrais pas voir
disparaître la culture anglaise de Montréal et du Québec,
je suis pour le maintien de ces cultures. Mais croyez-vous que, lorsqu'on se
fixe comme objectif de maintenir ces cultures aussi vivantes l'une que l'autre
sans reconnaître qu'il existe une majorité et qu'il y en ait une
qui est prédominante, on prenne une position réaliste à ce
moment-là?
MLLE MARKSFIELD D'après moi, oui, d'après moi. Si M.
Krause veut ajouter...
M. KRAUSE: Tout ce que je voudrais ajouter à ça, c'est que
je pense que le Québec est peut-être un exemple où, dans
les cinq dernières années au moins, le français, comme
langue prioritaire, s'est développé. La situation à
laquelle je me réfère, c'est la situation du gouvernement
lui-même, de la fonction publique et de tous les bureaux avec lesquels
nous, comme commission scolaire anglophone, prenons contact. C'est toujours en
français. Même ici, devant la commission parlementaire, on parle
français. Je pense que c'est déjà une preuve qu'il y a une
certaine évolution vers le français comme langue
prédominante au Québec, évolution, qui, peut-être,
n'existait pas il y a quinze ou vingt ans.
M. CHARRON Vous ne devez pas prendre l'exemple de la commission
parlementaire. Autant je peux me joindre au ministre et vous féliciter
de la qualité de votre français, autant on a enduré
parfois un unilinguisme assez sévère de certains organismes,
desquels, au moins, on aurait pu attendre un minimum de français. Non,
je ne crois pas que nous puissions prendre une commission parlementaire comme
un baromètre d'une situation linguistique du Québec, d'autant
plus que nous sommes encore d'accord pour reconnaître que, même
dans un cadre de Québec souverain et officiellement français,
cette fois pour le vrai, il serait toujours permis à des citoyens de
s'exprimer en anglais à la commission parlementaire. Je ne veux pas non
plus engager un débat qui, de toute façon, pourrait avoir lieu,
mais je pense que les arguments qui affirment le contraire de vos thèses
ont été à ce point forts, à un moment ou l'autre,
pour obliger le gouvernement à présenter un projet de loi. Ce
n'est pas celui que les groupes qui revendiquent une action attendaient. C'est
une autre question, ça. Mais le simple fait que le gouvernement du
Québec, quel qu'il soit et ce n'est pas un gouvernement que
j'approuve, vous le savez en vienne un jour à se sentir dans
l'obligation morale de légiférer pour la protection de la langue
de la majorité, ce simple fait, à mon avis, est unique au monde.
Je ne connais pas un gouvernement au monde qui légifère
aujourd'hui pour la protection de la langue de la majorité. Croyez-vous
qu'au Danemark, ce soir, ils sont en train de se poser la question, à
savoir si le danois va devenir la langue officielle, la langue d'enseignement,
ou en quelle langue on va afficher au Danemark? Le simple fait...
MLLE MARKSFIELD: Vous donnez trop
d'importance à l'influence des écoles. Pensez-vous
qu'envoyer un enfant à l'école va franciser l'enfant? (Je
déteste le verbe franciser). Moi, après tout, je suis fille
d'immigrant, j'ai fait des études, je suis finissante des écoles
de la PSBGM, j'avais la volonté de vouloir perfectionner mon
français, toute ma vie professionnelle est consacrée à
l'apprentissage de la langue seconde. Suis-je francophone? Vraiment?
M. CHARRON: Non.
MLLE MARKSFIELD: Mais j'ai l'appréciation, la
reconnaissance...
M. CHARRON: Vous avez une merveilleuse connaissance d'une langue
seconde, mais votre culture ou, pour reprendre votre expression de
tantôt, vous citer, votre âme appartient à une autre
culture. Il n'y a personne qui veut vous l'arracher, il n'y a personne qui veut
vous l'enlever.
MLLE MARKSFIELD: Je l'ai fait moi-même avec mes rencontres, j'ai
eu une formation grammaticale à l'école, mais pour pouvoir
vraiment accomplir le niveau de facilité, il fallait le faire dans les
milieux sociaux. Je voulais apprendre à jouer au bridge. J'ai fait
partie d'un club français. Comme ça, j'ai appris le bridge et
j'ai eu un milieu social dans la langue française. C'est ce qu'il faut
faire. L'école va donner un moyen, un véhicule à la
langue.
M. CHARRON: Est-ce que vous jouez mieux au bridge en français ou
en anglais?
MLLE MARKSFIELD: Mal dans les deux.
M. MORIN: Ne vous laissez pas entraîner dans une partie de bridge
avec le député de Saint-Jacques, mademoiselle.
M. CHARRON: Je vais vous poser une question que votre réponse
vient de me suggérer. Vous êtes vous-même fils d'immigrants,
je crois?
MLLE MARKSFIELD: Fille.
M. CHARRON: Fille d'immigrants, pardon. A 10 h 45, parfois...
MLLE MARKSFIELD: D'accord, ça va. Oui, mes parents ne savaient
parler ni anglais ni français quand ils sont venus. Il y avait huit
enfants dans la famille. Tous ont appris le français, ont
travaillé dans la langue française.
M. KRAUSE Mais c'est exactement le point qu'on est en train d'essayer de
soulever à un certain moment, c'est que ce n'est pas le système
d'éducation qui va faire d'un anglophone ou d'un nouveau Canadien un
canadien-français. C'est bien plus que cela.
M. CHARRON: Je suis parfaitement d'accord avec vous.
M. KRAUSE: C'est bien plus que cela et il nous semble que, dans le
projet de loi, il y a une très importante priorité mise sur
l'éducation, qui, pour nous, est un peu trop exprimée.
M. CHARRON: Je suis parfaitement d'accord avec vous. Même si, dans
le chapitre de l'enseignement et de l'éducation au Québec, on en
venait à prendre une position que les groupes ont réclamée
à la table d'unilinguisme français complet pour tous, y compris
la disparition du secteur public anglophone comme certains groupes l'on
réclamé, mais que cette action unilatérale dans le domaine
de l'éducation n'était accompagnée aucunement d'efforts
dans les autres domaines et que l'anglais continuait à occuper la place
de force qu'il occupe dans le monde du travail, dans le monde des affaires,
etc., et que respecte, à mon avis, le projet de loi actuel, on n'aurait
rendu service à personne en fin de compte.
Vous auriez alors parfaitement raison de dire qu'un immigrant qu'on
enverrait de force à cette école française, mais qui,
socialement, se verrait attirer par d'autres forces, ne s'assimilerait jamais
à cette culture. C'est pourquoi un effort dans le domaine de
l'éducation doit être accompagné de tout en effort et en
particulier pour que l'effort dans le domaine de l'éducation ait sa
portée réelle, et c'est peut-être le seul enseignement
clair qui soit sorti de la commission Gendron, cela doit d'abord partir d'un
effort et d'une action dans le monde économique, dans le monde du
travail. Par la suite, les autres secteurs peuvent s'agencer.
MLLE MARKSFIELD: Mais il me semble que cela se fait dans le monde du
travail, entièrement. C'est remarquable vraiment d'entrer n'importe
où à Montréal et entendre le français partout.
M. CHARRON Oh oui!
MLLE MARKSFIELD: Ah oui! il faut admettre qu'il y a eu des
démarches extraordinaires.
M. CHARRON: Qu'il y ait eu progression au cours des dernières
années, je vous dirai bien... il y a des bombes à un moment
donné qui ont obligé certaines entreprises à
découvrir le fait français. Il a fallu à un certain moment
que les Québécois se...
MLLE MARKSFIELD: II y a eu certes toujours des abus. J'ai
déjà vu, moi, comme minorité dans une minorité,
moi, j'ai aussi connu des abus. Mais cela est le passé. Il faut aller en
avant.
M. CHARRON: Je ne dirais pas...
MLLE MARKSFIELD Ah oui, monsieur!
M. CHARRON: Je ne dirais pas que c'est le passé.
MLLE MARKSFIELD: Oui, c'est le passé, il y a eu des abus
partout.
M. CHARRON Parce que les statistiques, encore une fois, que la
commission Gendron nous a rapportées dans ses études, dans ses
recherches, et que d'autres organismes nous ont présentées
montrent que la situation n'est pas si reluisante que cela...
MLLE MARKSFIELD: Admettons-le, je ne le nie pas.
M. CHARRON: ... et qu'elle aurait nécessité une action
beaucoup plus vigoureuse que ne le fait la loi 22 à cet effet.
MLLE MARKSFIELD: Ils sont là, je les admets. Mais écoutez,
il faut aller en avant, il faut persévérer et changer l'attitude
de beaucoup de personnes, séparatistes anglais, séparatistes
francophones. Je suis d'accord. Mais pourquoi renouer tellement, s'il y a tant
de personnes qui sont contre ce bill? Pourquoi alors continuer cette attitude?
Ajustez quelque chose. C'est tout ce qu'on demande. Pourquoi enlever aux
parents un choix? S'il s'agit de deux langues, cela implique un choix, n'est-ce
pas? C'est l'unilinguisme. "I cannot pronounce it, sorry".
M. CHARRON Vous vous demandez pourquoi...
MLLE MARKSFIELD Onze heures du soir, c'est...
M. CHARRON: Vous vous demandez pourquoi tant de gens sont contre ce bill
et à partir d'oppositions tellement contradictoires, à l'origine
en tout cas...
MLLE MARKSFIELD: Dans les journaux...
M. CHARRON: Je vais vous le dire en tout cas, parce qu'au bout de sept
jours et de quelque trente mémoires, et en connaissant d'avance certains
autres mémoires, je peux vous dire que ce projet de loi qui devait
être une solution...
MLLE MARKSFIELD: Mais cela ne l'est pas.
M. CHARRON: ... n'est rien de plus qu'une manoeuvre politique. Il a
essayé de couvrir ce qui était "incouvrable". En ce sens,
l'échec... Alors qu'on aurait voulu, par son flou, par son vague
séduire les deux parties, on les a man-quées toutes les deux. La
solution aurait exigé qu'on se campe dans un camp ou qu'on se campe dans
l'autre avec, par la suite, des positions...
MLLE MARKSFIELD: Pourquoi pas ensemble?
M. CHARRON: ... à l'égard de l'autre groupe. Mais dans ce
domaine et surtout dans une société comme la nôtre, on peut
se faufiler à travers des grèves, des crises politiques mais
quelque habile politicien qui gouverne le Québec à un moment ou
à un autre, il ne se faufile pas à travers cette question
fondamentale de l'identité québécoise. Sa marque de
commerce vient de se fracasser.
MLLE MARKSFIELD: II faut persévérer. Vous savez, dans
l'enseignement, il faut toujours être très naif. Moi, je le suis,
je crois. Après 33 ans d'enseignement, je crois toujours à
beaucoup de choses et il me semble qu'on peut continuer, anglophones,
francophones, Italiens, Chinois qui que ce soit ensemble, en avant.
M. CHARRON: Moi, je voudrais bien être encore naif, mais je ne
peux plus.
MLLE MARKSFIELD: Nous sommes tous des gens de bonne volonté. Il
ne faut jamais oublier ceci. Il me semble qu'avec une compréhension et
un vouloir on pourrait accomplir quoi que ce soit dans le Québec et
faire épanouir plus que jamais notre province.
M. CHARRON: Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, dans les réponses que j'ai
entendues, si j'ai bien compris, il m'a semblé que fondamentalement
votre groupe ne trouve pas que le bill 22, en fin de compte, est
nécessaire à quoi que ce soit. C'est cela.
Est-ce que cela veut dire que vous allez jusqu'à réclamer
le retrait du bill?
MLLE MARKSFIELD: Réclamer, je n'ai pas...
M. SAMSON: Le retrait...
MLLE MARKSFIELD: Le retrait.
M. SAMSON: ... du bill.
MLLE MARKSFIELD: J'espère que oui.
M. SAMSON: Merci.
D'autres questions. Je m'excuse si j'y vais à bâtons
rompus. A l'heure qu'il est, vous comprendrez pourquoi.
MLLE MARKSFIELD: On a attendu toute la journée.
M. SAMSON: Vous avez semblé tantôt nous dire que, selon
vous, dans le domaine du travail la langue française avait
progressé énormément. Est-ce que le fait que l'on fait
cette constatation je m'en rapporte toujours à vos paroles
ne vous inciterait pas à penser que, si finalement cela devient de plus
en plus nécessaire, parce que cela progresse dans le domaine de la
langue du travail, selon vous, cela n'amènerait pas une
nécessité qu'il y ait aussi le même genre de progrès
dans le domaine de l'enseignement, en fin de compte, pour pouvoir suivre la
langue de travail qui est une nécessité? Si la langue de travail
est le français, cela devient une nécessité
économique pour un citoyen que de posséder le
français.
A ce moment-là, cela crée l'obligation d'avoir un
système d'enseignement...
MLLE MARKSFIELD: Cela se fait, monsieur, dans les écoles. Les
efforts, les progrès que font les anglophones dans le domaine de
l'apprentissage de la langue seconde sont remarquables.
M. SAMSON: Oui. Je m'excuse si je vous interromps.
Je rattache peut-être cela un peu plus aux nouveaux immigrants
qu'à ceux qui sont déjà ici et qui ont déjà
l'habitude de fréquenter des écoles anglophones, où ils
font cet effort que vous dites je m'en reporte toujours à ce que
vous dites d'apprendre, comme langue seconde, la langue
française. Mais ne croyez-vous pas que, pour les nouveaux immigrants,
ceux qui arriveront, compte tenu de ce que vous dites toujours, du fait qu'on
ait une progression dans la langue du travail, il est préférable
que ces nouveaux venus se rattachent immédiatement à la
communauté francophone en fréquentant les écoles
francophones, tout en n'enlevant aucun droit existant à ceux qui sont
là.
MLLE MARKSFIELD: Mais pourquoi ne pas apprendre les deux langues? Dans
une école francophone, s'ils veulent fréquenter une école
francophone. Très bien! Mais pourquoi enlever...
M. SAMSON: Remarquez que...
MLLE MARKSFIELD: ... l'occasion d'apprendre deux langues, et non pas
seulement une langue?
M. SAMSON: ... lorsque je vous parle de l'école francophone, je
ne veux pas dire enlever comme langue d'enseignement, comme langue seconde,
l'anglais. Je vous demande si vous ne croyez pas que les nouveaux venus, ceux
qui doivent venir chez nous, qui viendront chez nous, ne seraient pas mieux de
fréquenter les écoles francophones...
MLLE MARKSFIELD: S'ils veulent... M. SAMSON: ... parce qu'ils
devront...
MLLE MARKSFIELD: Pas parce qu'ils devront, s'il veulent ou
voulaient...
M. SAMSON: ... parce qu'ils devront, écoutez...
MLLE MARKSFIELD: S'ils voulaient, monsieur.
M. SAMSON: Je pense que vous m'avez mal compris. Si vous me permettez
d'expliciter davantage.
MLLE MARKSFIELD: Non, je vous ai parfaitement compris.
M. SAMSON: Si vous me permettez d'expliciter davantage, je disais, parce
qu'ils devront, si c'est vrai que la langue française est en progression
dans le domaine du travail, nécessairement posséder cette
langue.
MLLE MARKSFIELD: Un petit enfant de cinq ans, monsieur, voyons!
M. SAMSON: Ecoutez. Je ne parle pas du petit enfant de cinq ans, parce
que vous savez comme moi que les immigrants peuvent arriver au pays avec des
enfants qui ont plus de cinq ans. Mais si est vraie, et c'est là que je
me pose la question, l'affirmation que vous faites, soit que dans le domaine de
la langue du travail, il y a beaucoup de progrès qui se fait, cela veut
dire que cela amène une nécessité davantage, en tout
cas...
MLLE MARKSFIELD: D'accord!
M. SAMSON: ... que celle que nous avions peut-être
précédemment. Si cela amène cette nécessité,
et c'est là toujours la question que je pose, ne croyez-vous pas que
cela devrait normalement inciter les autorités à faire en sorte
que les nouveaux venus devraient plutôt fréquenter les
écoles francophones que les écoles anglophones, étant
donné qu'ils auront besoin de cette langue pour des raisons d'ordre
économique?
MLLE MARKSFIELD: S'ils voulaient. Je réponds toujours de la
même façon, monsieur.
M. SAMSON: Mais... Je vais vous poser la question d'une autre
façon.
MLLE MARKSFIELD: Allez-y!
M. SAMSON: Ne croyez-vous pas que ce serait leur rendre un mauvais
service que de les laisser aller n'importe où, si on sait que lorsque
ces enfants atteindront le marché du travail, seront en quelque sorte,
obligés par la force des
choses, par la force économique de travailler dans la langue
française? Ne croyez-vous pas que c'est un mauvais service à leur
rendre que de dire: Allez là où vous voulez, à ce
moment?
MLLE MARKSFIELD: Oui. M. SAMSON: Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Portneuf. Il reste
sept minutes.
M. PAGE: Je vous remercie, M. le Président, je vais quand
même être bref. J'ai remarqué qu'à l'article 8 vous
demandez que de fortes garanties légales soient introduites afin
d'assurer l'existence continue des écoles anglophones. Si on se
réfère à ce que l'Opposition a déclaré
depuis le début du débat, le projet de loi ne changerait pas
beaucoup de choses dans la condition de l'enseignement auprès des
anglophones.
MLLE MARKSFIELD: D'après le... Pardon.
M. PAGE: D'après vous, quels sont les motifs qui vous incitent
à présenter une telle requête?
MLLE MARKSFIELD: L'article 8, deuxième paragraphe : Ces
organismes peuvent donner l'enseignement en langue anglaise. Alors, pour moi,
"peuvent donner", cela veut dire que si jamais il y a un changement de
gouvernement, on pourrait simplement dire: Non, pas cette année, merci
bien.
M. PAGE: Alors, comment verriez-vous que de telles garanties puissent se
concrétiser? Par la suppression de l'article 48?
MLLE MARKSFIELD: Pourquoi ne pas continuer avec la loi 63 alors?
M. PAGE: Vous alléguez à l'article 1 de votre
mémoire que vous appuyez de tout coeur une législation visant
à maintenir et renforcer la culture et la langue française?
MLLE MARKSFIELD: Oui, absolument.
M. PAGE: Vous ne croyez pas qu'en demandant le libre choix à
l'article 7, c'est une contradiction?
MLLE MARKSFIELD: Non. Pas du tout.
M. PAGE: Bien sincèrement, comment promouvoir la langue
française...
MLLE MARKSFIELD: Je suis sincère, monsieur.
M. PAGE: ... si les immigrants qui n'ont pas une connaissance suffisante
de l'anglais peu- vent, choisir une école anglaise, alors qu'il semble
qu'ils fréquentent...
MLLE MARKSFIELD: Je ne dis pas qu'ils vont... S'ils veulent. Je
n'insiste pas pour qu'ils fréquentent les écoles anglaises ou les
écoles françaises ou une école privée. Simplement
qu'ils aillent où ils veulent. Avez-vous quelque chose à ajouter,
M. Krause?
M. PAGE: Vous croyez qu'en laissant le libre choix total, on va
promouvoir la langue française au Québec?
MLLE MARKSFIELD: Absolument. Cela se fait aujourd'hui plus que jamais.
Dans la PSBGM, dont je fais partie, il y a 3,000 enfants immergés dans
la langue seconde et le programme régulier se continue toujours et le
plan Cloutier avec toutes les occasions de perfectionner l'enseignement de la
langue seconde. C'est remarquable ce que font les enseignants dans le domaine
de l'amélioration de leur méthode, leur technique, leur
compétence, et cela se fait à l'intérieur des
écoles. Hier, j'avais dans mon école à peu près 300
parents qui sont venus à une cérémonie de finissants de
mon école. J'ai une septième année d'immersion et les
parents étaient ravis des progrès de leurs enfants. C'est
remarquable, monsieur.
M. PAGE: Je suis d'accord que les programmes tels que le programme
d'enseignement des langues, les structures d'accueil, tout cela, peuvent
favoriser et promouvoir l'existence de la langue française et la
renforcer chez nous. Mais ne croyez-vous pas qu'il devient nécessaire de
donner à ces différents programmes un cadre législatif tel
que celui présenté dans le projet de loi 22?
M. KRAUSE: Je pense que la position est assez claire dans notre
mémoire. On ne trouve pas qu'il y a une contradiction dans le fait qu'on
voudrait voir une protection établie dans la langue française,
mais, d'un autre côté on veut aussi avoir un peu plus de
protection pour le système d'éducation anglophone qui est
actuellement en existence dans la province de Québec, un peu plus que ce
que le projet de loi dit actuellement.
M. PAGE: Et comment votre protection pourrait-elle se
concrétiser?
M. KRAUSE: Pardon?
M. PAGE: Cette protection que vous recherchez, comment pourrait-elle se
concrétiser?
M. KRAUSE: Se concrétiser? Au lieu de dire "... peuvent donner",
par "doivent donner" où c'est déjà établi. Il y a
toutes sortes de possibilités. C'est une question de terminologie.
Est-ce que le président me permet de poser une question?
LE PRESIDENT (M. Pilote): Allez-y!
M. KRAUSE: Je suis immigrant aussi. J'ai demeuré cinq ans en
France et, quand je suis venu au Québec, je parlais seulement le
français et l'allemand. Je ne connaissais pas un mot anglais. Ce qui est
arrivé, c'est que, comme on était trois enfants dans ma famille,
on est venu à Montréal et on voulait aller à
l'école française. Cela ne marchait pas, parce que mon
père était protestant. Cela lui coûterait $75 par mois pour
les trois enfants dans les écoles françaises. Alors, il a dit: Je
ne peux pas payer cela, alors on va vous envoyer aux écoles
anglaises.
M. CLOUTIER: C'est cela.
M. KRAUSE: Actuellement, le projet de loi que vous présentez, est
un projet qui ne change pas la base du système d'éducation au
Québec.
M. CLOUTIER: M. le Président, je peux peut-être
répondre à cette question.
M. KRAUSE: La question que je veux poser: Comment va se rédiger
ce problème de religion sur un côté, et de langue sur
l'autre, si un anglo-protestant, par exemple, arrive à Québec
comme immigrant?
M. CLOUTIER: Je pense que ce que vous venez de dire constitue un
témoignage extrêmement important. Il est exact et je le
déplore que la communauté francophone a
littéralement repoussé des milliers et des milliers d'enfants
d'immigrants vers le secteur anglophone, parce qu'elle avait
érigé des barrières religieuses, entre autres. Ce
n'étaient pas les seules d'ailleurs. En fait, j'ajoute qu'il n'y a pas
eu des enfants d'immigrants de langue autre que la langue française. Il
y a eu également des dizaines de milliers d'enfants d'immigrants
francophones qui ont été envoyés
délibéremment dans le secteur anglophone. C'est un examen de
conscience. Je reviendrai là-dessus lorsque nous aurons un débat.
Justement, c'est que le gouvernement, depuis qu'il est là, a entrepris
de faire disparaître ces barrières. Il a réussi à le
faire, il n'a pas réussi à changer encore les mentalités,
parce qu'il y a là également des barrières et elles sont
souvent beaucoup plus importantes. Mais la loi 71, le fonctionnement scolaire
de l'île de Montréal, a été justement une loi qui a
permis des ententes entre commissions scolaires, de sorte qu'aujourd'hui on
peut passer d'un secteur à l'autre sans frais de scolarité. La
dernière commission scolaire à accepter ces ententes a
été le Protestant School Board of Montreal tout récemment,
parce que cette commission scolaire maintenait encore des frais de
scolarité pour les enfants qui venaient d'autres commissions
scolaires.
La barrière confessionnelle est disparue dans les écoles
aussi, alors que l'enseignement de la religion n'est plus obligatoire. Il est
soumis à la décision des parents, au choix des parents. Il y a
également d'autres types d'obstacles qui sont disparus. La structure la
plus importante de ce point de vue, c'est le plan d'enseignement des langues
dont j'ai parlé à quelques reprises, qui comporte toute une
série de mesures pour l'intégration des immigrants, des enfants
d'immigrants au secteur francophone, dont des mesures qui consistent à
sensibiliser davantage les francophones et même à permettre des
cours de religion dans la religion des immigrants dans le secteur francophone.
C'est un élément extrêmement important qu'on passe trop
souvent sous silence, souvent parce qu'on préfère ne pas le voir
à des fins politiques, mais c'est la base de notre
législation.
Nous avons, avant de commencer, d'arriver avec cette loi, mis en place
de vastes structures, et je ne parle que de celles-là, dans le secteur
de l'enseignement. Alors, cela répond à votre question.
Actuellement, je ne dis pas qu'il n'y a pas encore des commissions scolaires
où on rejette les enfants d'immigrants, il y en a encore. J'ai des
exemples ici même dans la bonne ville de Québec. Il s'agissait de
Pakistanais. Mais je vous dis que les obstacles juridiques n'existent plus et
c'est cela qui est important.
M. KRAUSE: Cela répond en partie à ma question, M. le
Président; si je pouvais seulement demander une autre clarification. La
partie qui n'est pas encore très claire c'est : un immigrant protestant
qui vient au Québec, qui parle anglais ou autre chose, ne peut-il pas,
actuellement, sous les lois du pays, insister pour que son enfant aille
à une école protestante anglophone?
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je voudrais rappeler aux membres de la
commission que le temps est écoulé. Je vais permettre une courte
réplique du ministre et une courte question du chef de l'Opposition
officielle pour ensuite conclure.
M. CLOUTIER: C'est un problème assez complexe, mais à
cause de ces ententes entre commissions scolaires, si cet enfant ne parle ni
français ni anglais, à ce moment-là nous avons toute
latitude, après avoir rempli les conditions du projet de loi dans le
cadre de ses modalités, c'est-à-dire des tests, de le diriger
vers le secteur francophone.
LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais simplement demander
quelques précisions à nos invités au sujet du
septième paragraphe de leur mémoire. Dans cet alinéa, vous
plaidez en faveur du droit des parents de choisir la langue d'enseignement pour
leurs enfants. A l'appui de votre proposition, vous dites ce qui suit: "En
fait, nous ne connaissons aucun endroit où il existe un double
système scolaire où le choix de la langue d'enseignement est
dénié." Ma première question serait la suivante et c'est
croyez-le bien, simplement pour me renseigner: Est-ce que vous pourriez
nous indiquer quelques pays où il existe un double système public
d'enseignement?
MLLE MARKSFIELD: Est-ce que la Belgique en a un?
M. MORIN: Oui. la Belgique, mais est-ce qu'on peut y passer librement
d'un système d'enseignement dans l'autre?
MLLE MARKSFIELD: Non.
M. MORIN: Je pense que votre exemple est trop bien choisi.
Méfiez-vous! Méfiez-vous! Ce sont des systèmes
parfaitement étanches.
MLLE MARKSFIELD: On constate qu'on n'en connaît pas, mais
peut-être que vous en connaissez, monsieur.
M. MORIN: Non. Votre phrase est extraordinaire parce que vous nous
dites: Nous ne connaissons aucun endroit où il existe un double
système scolaire. Si vous vous étiez arrêtés
là, cela aurait été parfait, mais vous ajoutez: "Et
où le choix de la langue d'enseignement est dénié".
C'était facile de faire une affirmation comme celle-là dans la
seconde partie de votre phrase parce qu'il n'existe pas de pays où il y
ait un double système d'enseignement public fondé sur la langue,
en tout cas; peut-être dans certains pays pour l'enseignement religieux,
mais c'est autre chose.
M. KRAUSE: Je voudrais dire que les idées qu'on présente
ne sont pas complètement parfaites.
M. MORIN: Non, je vous ai demandé cette précision en toute
amitié.
M. CLOUTIER : En tout cas, elles sont bien présentées.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie les membres qui se sont
présentés, Mie Marksfield et ceux qui l'accompagnent.
M. MORIN: Merci.
LE PRESIDENT (M. Pilote): Demain, nous entendrons, dans l'ordre, le
Centre des dirigeants d'entreprise, l'Association des mines et métaux du
Québec incorporée, l'Association des manufacturiers canadiens,
division du Québec. La commission suspend ses travaux jusqu'à
demain, après la période des questions, vers dix heures
trente.
(Fin de la séance à 22 h 59)