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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 24 septembre 2019 - Vol. 45 N° 37

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 18, Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes


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Table des matières

Auditions (suite)

Réseau FADOQ

L'Étoile de Pacho  Réseau d'entraide pour parent d'enfant handicapé

Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR)

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

Mémoires déposés

Intervenants

Mme MarieChantal Chassé, présidente

M. Mathieu Lacombe

Mme Lucie Lecours

Mme Jennifer Maccarone

Mme Kathleen Weil

M. François Jacques

Mme Stéphanie Lachance

Mme Christine Labrie

Mme Véronique Hivon

M. Christopher Skeete

*          Mme Gisèle Tassé-Goodman, Réseau FADOQ

*          M. Danis Prud'homme, idem

*          Mme Nathalie Richard, L'Étoile de Pacho  Réseau d'entraide pour parent d'enfant handicapé

*          M. Dave Turcotte, idem

*          Mme Anick Lalande, idem

*          Mme Judith Gagnon, AQDR

*          M. Jacques Pouliot, idem

*          M. Félix Parent, idem

*          M. François Bibeau, CNQ

*          Mme Anne-Marie Lachapelle, idem

*          M. Antoine Fafard, idem

*          M. Nicolas Handfield, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures)

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour, tout le monde. Bonjour. Alors, je constate le quorum et je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à tous. Bon début de semaine. Et je vous demande à chacun — je vais faire la même chose avec vous — de vous assurer de bien éteindre la sonnerie de votre téléphone cellulaire — je reviens — ou encore le mode de vibration.

Nous sommes réunis aujourd'hui afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 18, la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé) est remplacée par Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce); Mme Dorion (Taschereau), par Mme Labrie (Sherbrooke); M. LeBel (Rimouski), par Mme Hivon (Joliette).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la secrétaire. Ce matin, nous entendrons les groupes suivants : le Réseau FADOQ puis L'Étoile de Pacho. Et nous avons débuté à l'heure, bravo à tous!

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants du Réseau FADOQ. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou encore un signe verbal pour vous inviter à conclure. Commencez en vous présentant puis poursuivez avec votre exposé.

Réseau FADOQ

Mme Tassé-Goodman (Gisèle) : Mme la Présidente, je vous remercie. M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, mon nom est Gisèle Tassé-Goodman, je suis présidente du Réseau FADOQ.

Je remercie les membres de la commission pour cette invitation à exprimer le point de vue du Réseau FADOQ en lien avec le projet de loi n° 18. J'aimerais d'abord vous présenter les gens qui m'accompagnent : M. Danis Prud'homme, directeur général du Réseau FADOQ, ainsi que M. Philippe Poirier-Monette, conseiller en droits collectifs de notre organisation.

Je débuterais donc avec un exposé dans lequel je présenterais le Réseau FADOQ, pour ensuite exprimer le point de vue de notre organisation sur le projet de loi n° 18. Par la suite, M. Prud'homme et M. Poirier-Monette pourront répondre aux questions des membres de la commission.

Le Réseau FADOQ est un regroupement de personnes de 50 ans et plus qui compte au-delà de 535 000 membres. Notre organisation effectue des représentations politiques auprès de différentes instances dans le but de conserver et d'améliorer la qualité de vie des aînés d'aujourd'hui et de demain. Ainsi, le Réseau FADOQ profite de toutes les tribunes, dont celle-ci, pour susciter une prise de conscience afin que la voix des aînés soit représentée et surtout considérée dans les enjeux politiques.

D'emblée, le Réseau FADOQ souligne que la réforme engendrée par le projet de loi n° 18 est attendue depuis longtemps. Dès 2008, notre organisation a participé aux réflexions entourant la modification du dispositif de protection des personnes inaptes. Ainsi, le Réseau FADOQ espère que ce projet de loi sera adopté par l'Assemblée nationale afin de clore au-delà de 10 ans de discussions autour de la réforme du Curateur public.

De manière générale, le Réseau FADOQ appuie le projet de loi n° 18. De nombreux éléments suggérés par notre organisation au fil des dernières années s'y retrouvent : l'instauration d'une flexibilité des régimes, laquelle, nous estimons, doit être le plus large possible afin de permettre une personnalisation des régimes attitrés; la mise en place d'un assistant au majeur en lien avec notre demande d'inclure un processus de décision assistée. À ce sujet, il importe que l'accès aux ministères, aux organismes publics et parapublics soit facilité et simplifié pour les assistants au majeur en vertu de leur mandat. Le projet de loi favorise le respect de l'autonomie et de la primauté de la personne en assurant que les volontés et préférences des personnes inaptes soient respectées. La réforme prévoit la mise en place d'un processus de reddition de comptes, lequel, nous estimons, doit être obligatoire. Le projet de loi met en place un mécanisme de substitution. Finalement, le projet de loi inclut une protection légale aux personnes assistées, dans la mesure où elles prendraient une décision leur portant préjudice.

Évidemment, notre organisation souhaite également présenter aux membres de la commission ses recommandations de modifications au projet de loi n° 18. Nous suggérons de réduire les délais maximaux de réévaluation à deux ans, concernant l'évaluation psychosociale d'une personne visée par un mandat de protection. Nous souhaitons le maintien du quorum de cinq personnes pour tenir un conseil de famille. Advenant une impossibilité d'obtenir un tel quorum, une dispense pourrait alors être demandée au tribunal. Nous demandons au législateur de préciser les circonstances qui permettent au Directeur de la protection des personnes vulnérables d'autoriser le tuteur à confondre ses biens avec ceux de son conjoint dont il est le tuteur. Nous demandons également au législateur de préciser les circonstances qui permettent au Directeur de la protection des personnes vulnérables d'autoriser le tuteur à rendre compte autrement que par la transmission d'un compte annuel de gestion.

Par ailleurs, les membres de la commission devraient se pencher sur le fait que le projet de loi n° 18 aura comme résultat de redonner le droit de vote à des personnes qui, sous le régime précédent, étaient sous curatelle publique et ne pouvaient pas voter. Le Réseau FADOQ se permet de signifier ses craintes quant à l'instrumentalisation potentielle de ces personnes dans le cadre d'un processus électoral. Nous suggérons de maintenir la radiation de la liste électorale pour les personnes actuellement sous curatelle.

Puisque le projet de loi n° 18 modifie substantiellement le Curateur public et les régimes de protection, le Réseau FADOQ estime que certains éléments absents du projet de loi devraient être inclus. Il est nécessaire qu'un processus de médiation soit intégré au projet de loi. Ce dernier devra être accessible tout au long du processus entourant la mise en place d'un régime de protection, son administration courante ainsi que sa clôture. Ce procédé de médiation serait évidemment à la discrétion des citoyens et non obligatoire. À ce sujet, on nous a indiqué qu'un projet pilote de médiation est actuellement en cours... en place dans la région de Montréal et qu'il fonctionne bien.

La protection des aînés et des personnes vulnérables constitue une grande préoccupation pour le Réseau FADOQ. Lorsque des individus communiquent avec notre organisation relativement à l'administration d'un régime de protection d'une personne, il s'agit bien souvent de cas d'allégations d'abus ou encore de maltraitance financière. Ainsi, il importe que le gouvernement du Québec poursuive et intensifie ses efforts afin de sensibiliser la population au triste phénomène de l'abus et de la maltraitance des aînés et des personnes vulnérables. À notre sens, un volet concernant l'abus et la maltraitance dans le cadre de l'administration d'un régime de protection pourrait être mis en oeuvre par l'équipe du Directeur de la protection des personnes vulnérables.

Enfin, nous nous permettons d'indiquer que le Réseau FADOQ a discuté avec divers acteurs concernés par le projet de loi n° 18. Certaines remarques que nous avons faites dans le cadre de notre mémoire sont devenues caduques. Entre autres, nous recommandions l'usage de moyens technologiques afin de tenir une assemblée de famille. Cette disposition est maintenant disponible, et cela, depuis 2016. Nous suggérions également de rehausser les ressources au Directeur de la protection des personnes vulnérables afin qu'il puisse mettre en branle la réforme projetée. De ce côté, on nous confirme que des ressources supplémentaires sont prévues afin de mettre en place la réforme. Le Réseau FADOQ se permet d'insister sur le fait que suffisamment de ressources doivent être octroyées au directeur afin qu'il assure son rôle de surveillance et de soutien aux administrateurs de régime de protection, et ce, dans un contexte de vieillissement de la population.

J'aimerais remercier les membres de la commission de nous avoir écoutés. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre, la parole est à vous pour un bloc de 16 minutes.

• (10 h 10) •

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous de vous être déplacés ce matin. Merci pour votre mémoire. Merci, en fait, de venir nous donner votre avis et celui de vos plus de 500 000 membres. Donc, soyez assurés qu'on prend vos suggestions au sérieux.

D'ailleurs, j'ai peut-être quelques questions. Vous avez effleuré quelques sujets dont j'aimerais pouvoir parler avec vous, entre autres au sujet de la mesure d'assistance, de l'encadrement de la mesure d'assistance, parce que vous dites que... En fait, notre projet de loi prévoit que «l'assistant [devra] informer le directeur [...] de ses activités, sur demande de celui-ci». Donc, il y a déjà... et il y a déjà toute une liste, là aussi, de filtres de sécurité, disons, qui sont appliqués dans le cadre du travail de l'assistant, pour désigner l'assistant aussi. Je me demandais à quel type de suivi vous vous attendez, considérant que l'assistant ne prendra pas de décision lui-même, qu'il sera là vraiment en assistance et que c'est l'assisté qui continuera d'exercer ses droits. À quoi vous vous attendez comme mesures, là, je dirais, de reddition de comptes, peut-être?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, je pense que, quand on parle de l'assistant, il y a deux choses. Dans un premier temps, au niveau... on veut un peu que ce soit spécifié par rapport à, s'il est l'assistant et il aide, comment on va encadrer, du fait... est-ce qu'il a accès à tous les dossiers, parce qu'on parle de plusieurs dossiers. Est-ce qu'il devra demander un accès à chaque fois, donc, pour dire qu'il est un assistant puis il peut avoir accès à ce dossier? Donc, ça, c'est un point au niveau de l'accès aux différentes informations sensibles dans le cadre de son travail d'assister, justement, la personne. Ça, c'est une première chose.

La deuxième, si on regarde au niveau de... on parle de reddition de comptes, en fait, l'assistant est là pour aider. Donc, en fait, quand il le fait avec la personne, c'est d'un commun accord, puis la personne a toujours un contrôle sur ses choses, là. C'est quelqu'un qui vient l'aider, donc, à la base, il n'a pas le contrôle de l'aidé, il a un pouvoir de suggestion et d'entraide à ce niveau-là.

M. Lacombe : Le projet de loi va exactement en ce sens-là. Mais est-ce que je comprends que vous aimeriez qu'il y ait davantage de mesures d'encadrement, outre ce qu'on a déjà? Parce que, bon, la liste, elle est quand même assez impressionnante, là. Je pourrais la sortir, là, mais on a toute une liste, là, de filtres, là, tu sais : la déclaration de l'assistant relative aux conflits d'intérêts, l'état sommaire du patrimoine de la personne, l'engagement de l'assistant à respecter la vie privée de la personne, notification de la demande à deux proches de la personne. Il y a vraiment toute une liste, là, complète. Est-ce que je comprends que, malgré ça — parce que je veux être certain de bien comprendre, là — et malgré le fait qu'il n'y a pas de décisions qui sont prises par l'assistant, vous voudriez quand même qu'il y ait davantage de mesures?

M. Prud'homme (Danis) : Au niveau de l'assistant, en fait, les mesures qui sont là, on est en accord avec. Je ne pense pas que... On ne parle pas de la personne, là, qui contrôle, donc, qui a eu le pouvoir de décider pour l'autre personne. Ça, c'est très différent, là. Nous, on veut s'assurer que, dans le cas d'une personne qui a vraiment le mandat de contrôler les biens et de prendre les décisions pour une personne, là on demande des redditions de comptes, là on demande que ce soit maintenu, une obligation de rendre compte. Dans le cas de l'assistant, son rôle est très clair, puis il prend connaissance de ce qu'il a droit et pas droit, là.

M. Lacombe : D'accord. Donc, ce n'était pas clair pour moi que c'était votre compréhension, donc là on s'entend, tous les deux. Dans le cas de l'assistant, je pense qu'on est sur la même longueur d'onde. Bonne nouvelle.

La réévaluation psychosociale, c'est un autre sujet que vous abordez. Vous demandez que le délai maximal que peut fixer le tribunal pour la réévaluation psychosociale soit donc de deux ans plutôt que de cinq ans, comme on le propose. Actuellement, les délais : trois ans pour les gens qui sont sous tutelle ou qui ont un conseiller au majeur, cinq ans pour ceux qui sont sous curatelle. Pourquoi vous proposez de réduire ce délai-là à deux ans plutôt qu'à cinq, comme on le propose?

M. Prud'homme (Danis) : En fait, du côté de la personne, on s'entend que ce qu'on veut s'assurer, c'est qu'il y ait une réévaluation du fait que... est-ce que la personne est en mesure de reprendre le contrôle de sa situation ou est-ce qu'elle ne l'est pas. Si on a un délai de cinq ans, on comprend, là, que ça pourrait... on pourrait décider à l'avance. Mais nous, simplement, on se dit : Il ne faudrait pas aller plus loin que deux ans, donc, pour s'assurer que, si la personne peut reprendre le contrôle, on n'attend pas cinq ans.

M. Lacombe : J'ajouterais peut-être deux éléments pour aller un peu plus loin. D'abord, si on prend pour acquis que c'est le tribunal... En fait, c'est le tribunal qui va déterminer le délai et le tribunal va devoir tenir compte de la nature de l'inaptitude, de l'étendue de ses besoins aussi, de ses capacités, des autres circonstances et que cinq ans, c'est vraiment le délai maximal, là. Donc, c'est le tribunal qui joue dans ce délai-là, dans cet espace-là pour statuer, selon lui, la durée devrait être de combien de temps et que, parallèlement à ça, il y a toujours une demande qui peut être déposée pour réévaluer si la condition de la personne change. Considérant ces deux éléments-là, est-ce que ça ne répond pas déjà à votre préoccupation?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, on veut tout simplement être juste un peu précis. On comprend que c'est un délai maximal de cinq ans, donc ça pourrait être fait après deux ans, trois ans. Ça, on comprend ça. Mais c'est tout simplement, si personne ne fait... On comprend que, quand les gens s'impliquent, si on parle de... quand on transfère le contrôle des biens et des décisions, dans le feu de l'action, deux ans passent comme ça. Donc, si personne n'en fait la demande par son... puis la personne elle-même n'en fait pas la demande, là on se dit : Peut-être qu'il devrait y avoir un petit barème qui dit : On fait-u un «checkpoint», comme on dirait en bon anglais, en bon français, de la situation pour s'assurer qu'après deux ans on peut toujours garder le contrôle ou non, la personne a repris ses états, comme on pourrait dire, d'esprit, puis elle peut reprendre le contrôle? C'est comme, pour nous, un marqueur. Deux ans, ça peut passer vite, quand la personne le gère pour quelqu'un d'autre, dans le feu de l'action, mais, pour la personne qui se fait gérer, si jamais elle reprend ses états, ça peut être long. Donc, on comprend que le maximum de cinq ans, ça veut dire que ça peut se faire à l'intérieur d'un à cinq ans; on pourrait même dire zéro, là, mais on oublie ça, là, un à cinq ans. Mais nous, on dit : On aimerait qu'il y ait un petit quelque chose qui dit... comme à deux ans, là, il y a comme une petite lumière, là, qui allume pour dire : On est où, aujourd'hui, là?

M. Lacombe : Donc, qu'il y ait une obligation, là, de se repencher sur le cas.

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, qu'il y ait comme un barème, dans les processus, qui dit : On fait un «checkpoint» à deux ans, donc un point de vérification à savoir que tout est toujours correct puis on continue.

M. Lacombe : Je dirais, un des objectifs du projet de loi, c'est de réduire tout le fardeau administratif, parfois. C'est un des objectifs. Il y en a beaucoup d'autres, là, redonner aux gens la capacité d'exercer leurs droits, et tout ça, mais un des objectifs, c'est de s'assurer, entre autres, avec la mesure d'assistance, qu'on ait moins souvent recours aux tribunaux dans les cas où on n'en pas besoin. Dans le cas où on peut toujours faire appel au... ou revoir la décision si l'état de la personne change, est-ce que ça, ça ne vient pas répondre au besoin que vous exprimez, sans pour autant alourdir le processus, en mettant une obligation pour le tribunal de se repencher sur la question?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, je pense que, nécessairement, peut-être qu'il y a besoin d'une marge de manoeuvre, dire... On parle de reddition de comptes, on parle... quelqu'un qui a le contrôle, là, O.K., des décisions et de la personne parce qu'elle n'est pas en état. Donc, pour nous, à la base, c'est... il y a une reddition de comptes qui se fait. Donc, peut-être que, dans la reddition de comptes de l'année 2, il y a un petit «checkpoint» qui dit : Est-ce que la personne est toujours en état de ne pas prendre ses décisions? La réponse est «oui» dans le compte-rendu, dans la reddition de comptes, donc on vient de faire le «checkpoint», là, mais, s'il n'y a pas quelqu'un qui fait penser, ça va passer dans le beurre. Puis c'est tout simplement... on veut juste s'assurer que les personnes... Puis on n'est pas en désaccord avec ce que la loi dit, là, actuellement, ça dit maximum cinq ans, et, je le répète, on comprend que ça peut être entre un et cinq, mais on veut juste comme une petite lumière après deux ans, parce que... juste s'assurer qu'on porte une attention particulière à ce point-là.

M. Lacombe : Êtes-vous d'accord avec moi, par contre, que, si on allait en ce sens-là, ça alourdirait le processus, en ce sens où le tribunal devrait, que ça aille bien ou pas, que ça ait changé ou pas, se repencher sur la situation alors que c'est déjà prévu? Puis je vais aller avec un autre point d'information, peut-être pour ajouter, c'est déjà prévu que, si la situation change, il peut y avoir réévaluation. Et l'argument, ça pourrait, je suppose, être de dire : Bien, les gens ne seront peut-être pas au courant de ça, mais en même temps, dans le projet de loi, ce qu'on amène aussi, c'est le devoir d'information que le curateur, qui va changer de nom, va devoir jouer. Donc, il s'assure que les gens comprennent bien, vraiment, tout ce qui entoure le régime, par exemple, de protection. Donc, il y aura un rôle à jouer aussi pour les informer de cette possibilité de réévaluation. Est-ce que, quand on additionne tout ça... Parce que ça me préoccupe, là, le... On ne veut pas... On veut que ça reste quand même assez simple, là. C'était l'objectif derrière tout ça.

M. Prud'homme (Danis) : En fait, on comprend, d'alourdir la machine, ce n'est peut-être pas l'idéal. Par contre, il faut penser que les droits de la personne sont plus importants que le fardeau que ça pourrait amener. Par contre, la loi dit déjà un minimum de cinq ans. Donc, peut-être qu'il y a façon d'ajouter de dire qu'on n'est pas obligé de retourner au tribunal, que ça peut être dans une reddition de comptes spécifique à l'année 2, où il y a un «checkpoint» qui est fait et que, là, à ce moment-là, le directeur, lui, peut dire : Bien, compte tenu que la loi dit que c'est possible, maintenant on me dit que la personne pourrait recouvrer ses droits, on lui redonne. Écoutez, le mécanisme... On n'est pas les experts, mais, nous, ce qu'on vous dit, c'est : Le droit de la personne prime, donc on veut juste s'assurer qu'il y ait une petite lumière après deux ans.

• (10 h 20) •

M. Lacombe : Donc, qu'il y ait une attention particulière.

M. Prud'homme (Danis) : Tout à fait.

M. Lacombe : D'accord. Mais je vous souligne quand même... puis au bénéfice de tout le monde, parce que je pense que c'est important, je dirais que ce qu'on souhaite, c'est que ce ne soit pas juste après deux ans, c'est que ce soit continuel. C'est-à-dire que, même si on allait avec le délai maximal de cinq ans, il faudra toujours... et le curateur, qui va changer de nom, aura ce devoir-là, de s'assurer que les gens comprennent bien, que l'entourage comprenne bien, que tous ceux qui sont inclus dans le processus comprennent bien, très bien que, lorsque la situation change, ils peuvent avoir accès à la réévaluation pour que, justement, ils puissent avoir le maximum de droits ou que, bon, si ça empire, évidemment, que...

M. Prud'homme (Danis) : Et de là, en fait, j'ajouterais... parce que c'est un cercle, là, qui se tient, là, ce n'est pas des choses en silo, c'est de là aussi l'importance qu'au niveau de la personne qui a charge de l'état et des décisions, en fait, il y ait un conseil de famille, un certain moyen de continuer à informer les gens autour, malgré qu'il y a juste une personne, par exemple, qui a le droit de décider. Donc, ça aussi, ça peut... Quand vous dites que c'est échelonné à n'importe quel moment, bien, tant et aussi longtemps que les gens sont informés... donc, si un conseil de famille doit être tenu aussi, bien là, à ce moment-là, ça vient rassurer davantage.

M. Lacombe : On aura un gros travail d'information. Le curateur me chuchote à l'oreille qu'on aura besoin de vous pour nous donner un coup de main. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir, M. le ministre. J'entends que la députée de Les Plaines désire prendre la parole.

Mme Lecours (Les Plaines) : Bien entendu, Mme la Présidente. Merci. Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste quatre minutes.

Mme Lecours (Les Plaines) : Quatre minutes? On fait ça vite. Madame, messieurs, bienvenue. Votre mémoire était très intéressant, beaucoup de recommandations. Vous avez répondu à certaines de mes questions, mais j'aimerais vous entendre sur le fait que vous voulez vraiment maintenir le quorum de 5 %... — de 5 %! Je suis déjà dans les élections, moi là, là — le quorum de cinq personnes pour le conseil de tutelle. Pourquoi est-ce vraiment important pour vous?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, à la base, dans notre recommandation, c'est de le maintenir mais pas à tout prix. Parce que, quand on a eu des échanges, on comprend que des fois c'est impossible, il n'y a personne qui s'y intéresse, bon, et c'est pour ça qu'on dit : On veut, à la base, que ça soit respecté autant que possible. Et, bien entendu... puis on nous mentionnait que... il y a d'ailleurs la mesure où on dit : Bien, on n'est pas capables de les rejoindre après x nombre de reprises, bien là, on va procéder. Mais on veut simplement s'assurer qu'on le respecte tant et aussi longtemps qu'on peut le respecter. On ne veut pas que ce soit tourné rapidement du revers de la main. C'est tout simplement la précaution qu'on apporte, là.

Mme Lecours (Les Plaines) : Vous ne dites pas, de façon... oui, il faut le maintenir, c'est selon...

M. Prud'homme (Danis) : Bien, il faut le maintenir autant que possible.

Mme Lecours (Les Plaines) : Autant que possible. O.K., d'accord.

M. Prud'homme (Danis) : Donc, il faut faire ce qui est possible pour avoir un quorum, et c'est pour ça qu'on mentionnait «électronique», puis là c'est fait, on nous l'a mentionné, donc, tant mieux, parce que ça, ça vient d'augmenter les chances d'avoir un quorum. Mais donc c'est de procéder... comme on dirait, gérer en bon père de famille, là : J'ai pas mal essayé, puis ce n'est pas possible, donc là on va y aller. Donc, c'est juste ça qu'on veut s'assurer, que ce ne soit pas... puis je ne pense pas que ça le serait, là, mais, genre, sur un coin de table : Bon, bien, on le fait, puis on n'a pas tenté ce qu'on pouvait pour avoir un quorum.

Mme Lecours (Les Plaines) : Vous avez parlé de la reddition de comptes, mais l'obligation aussi pour les mandataires de dresser un inventaire. Est-ce que c'est en toutes circonstances? Est-ce que c'est important aussi?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, je pense que c'est... on a aussi un questionnement par rapport à... dans une autre recommandation, au niveau des couples, de jumeler les biens ou pas. Bien là, il y a des différences... On veut s'assurer, à titre d'exemple... l'exemple qu'on donne, c'est un couple, ça fait 25 ans qu'ils sont ensemble, ça se peut qu'ils ne s'entendent plus — ça, on ne le sait pas — mais, après 25 ans, ça se pourrait qu'ils aient déjà pas mal tout ensemble, alors qu'un couple qui vient de se rencontrer, puis, malheureusement, il y en a un des deux qui tombe inapte, puis l'autre en prend le contrôle, c'est... Donc, on a des préoccupations, parce qu'on en entend de toutes sortes puis on a beaucoup d'appels par rapport à tout ce qui est... puis Mme la présidente l'a mentionné dans son discours, au niveau des abus mais aussi de la maltraitance financière. Donc, nous, on veut juste s'assurer qu'on n'ouvre pas une porte... parce qu'il y en a qui sont ratoureux, quand il y a des craques, ils rentrent dedans. Donc, on veut juste s'assurer, à la base, qu'on a vérifié qu'il n'y en avait pas nécessairement, des craques, puis que, s'il y avait quelque chose, on va le déceler, dans le fond.

Mme Lecours (Les Plaines) : Mais comment, dans un projet de loi, ça pourrait s'insérer, ça? D'ailleurs, vous avez terminé en parlant, justement, de la maltraitance. Comment est-ce que, dans un projet de loi comme celui-là, on pourrait s'assurer de ça? Avez-vous des recommandations additionnelles à nous faire ou des points précis?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, on en a discuté tout à l'heure, l'information, c'est la clé numéro un. Donc, de ne pas contrôler l'information... puis je ne parle pas de votre côté, mais plus du côté des gens, donc s'assurer qu'il y ait un plus grand nombre... donc, quand on parle du conseil de famille, quand on parle d'essayer d'avoir quorum, c'est toutes des choses, pour nous, que... là, il y a plus qu'une personne qui est au courant, donc un contrôle est plus difficile pour essayer, justement, de manipuler. Ça, c'est la première chose.

La deuxième chose, je pense que le gouvernement, à la base, a, dans ses cordes... et doit continuer une prévention, donc, campagne de prévention, sensibilisation à cet effet-là. Du côté du curateur, je pense qu'il doit avoir un certain pouvoir aussi d'y aller là-dedans pour, justement, prévenir toutes ces choses-là.

Donc, pour nous, c'est tout simplement... Ça, c'est... Le projet de loi, je comprends, puis, quand on apporte des considérations, je vais le dire comme ça, ou des suggestions, souvent, c'est par la suite, une fois qu'un projet de loi est accepté... nous on parle... soit dans les règlements, soit dans les procédures, les politiques à mettre en place, c'est là qu'on veut s'assurer que ces choses-là soient regardées attentivement.

Mme Lecours (Les Plaines) : Il me reste encore...

La Présidente (Mme Chassé) : 15 secondes.

Mme Lecours (Les Plaines) : 15 secondes? Le nouveau nom proposé, vous en pensez quoi?

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Prud'homme (Danis) : Honnêtement, pas de commentaire, parce qu'un nom, c'est un nom. Tant que la job est faite, on pourrait bien l'appeler comme on veut.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci, ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, nous passons au parti formant l'opposition officielle. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, vous prenez la parole?

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Bon matin.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous. Vous avez un bloc de 10 min 40 s.

Mme Maccarone : Merci, merci. Je retourne à vos recommandations. Merci pour votre présence aujourd'hui. Et, également, j'ai trouvé votre mémoire très intéressant. Si je regarde la recommandation n° 1, on parle de... on a une inquiétude par rapport à un manque de ressources, puis vous le soulignez. Plusieurs autres intervenants puis les gens qui sont venus témoigner, ils ont souligné la même crainte. Que proposez-vous qui est nécessaire pour bonifier le réseau, le système, selon vous, selon vos expériences des utilisateurs, qu'on peut faire une proposition pour s'assurer qu'on fait une gestion de changement qui est vraiment à propos?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, écoutez, je pense que ce qu'on voit dans le projet de loi actuel met en place quand même beaucoup de choses, beaucoup de points de vérification, si je parle en français, pour revenir du côté des différents... soit des régimes, soit des différentes étapes à travers un processus. Et, veux veux pas, si on veut le faire comme il faut, il faut avoir le nombre de soldats approprié. Ça, pour nous, c'est la première chose.

La deuxième, c'est... on sait qu'il y a quand même, selon les statistiques, des augmentations dans... on le voit dans le rapport annuel lui-même, au niveau des plaintes. Donc, c'est sûr qu'il y a des choses qui se produisent sur le terrain, puis, nonobstant ça, malheureusement, on sait que, chez les 85 ans et plus, dans bien des cas, parce qu'on note... pour nous, on parle pour les 50 ans et plus, mais ça touche toute la société, on comprend le projet. Quand on arrive à 85 ans, c'est là que le corps commence à avoir davantage, malheureusement, de défaillances. Donc, comme les 85 ans et plus vont, entre 2011 et 2041, quadrupler, on pourrait s'attendre à ce qu'il y ait plus de cas. Donc, c'est sûr que ça va prendre plus de ressources pour bien gérer. Donc, pour nous, c'est ça, la principale préoccupation. À savoir combien, combien le budget devrait... ça, ce n'est pas notre... on n'est pas spécialistes là-dedans. Mais ce qu'on sait, c'est que, si on veut le mettre comme il le faut sur le terrain, ça va prendre davantage de ressources humaines et financières.

Mme Maccarone : De bien planifier, O.K. Pour votre point n° 2, la recommandation de «s'assurer que l'accès aux ministères, aux organismes publics et parapublics soit facilité et simplifié pour les assistants au majeur, en vertu de leur mandat», vous citez ceci parce que ce n'est pas le cas actuel?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, dans le nouveau... L'assistant au majeur, à titre d'exemple, c'est ce qu'on... je le mentionnais tout à l'heure dans la première partie d'une question, c'est-à-dire qu'il est là pour aider. Donc, s'il doit aider et conseiller ou suggérer, il doit quand même avoir accès à certains documents. Et c'est ça qu'on dit, nous, c'est : Est-ce que la personne va devoir, à chaque fois qu'elle a affaire à un ministère x, faire une demande spécifique pour avoir accès à ça ou est-ce qu'il y a un processus qui va dire : L'assistant au majeur, lorsque ce sera décidé que cette personne-là devient l'assistant au majeur, voici les différents dossiers auxquels il a droit, donc il n'a pas à passer à travers une procuration pour chacun de ces dossiers-là? Et là, par exemple, s'il y avait un dossier à l'extérieur de ce qu'on lui a donné comme terrain de jeu, bien, possiblement oui. Donc, c'est pour ça qu'on dit : Il faudrait peut-être être spécifiques à savoir comment ça va fonctionner. Est-ce qu'on lui délimite déjà des terrains de jeu qu'il n'a pas besoin d'aller chercher une procuration ou pas du tout, puis là il a besoin, à chaque fois, d'avoir une procuration? Donc, c'est des questions qu'on pose pour s'assurer qu'on y réfléchit, dans le fond.

Mme Maccarone : Vous soulevez le sujet de procuration, c'est un autre sujet qui était abordé ici, dans cette commission, par d'autres gens qui sont venus témoigner. Votre opinion sur la gestion de changement vis-à-vis la procuration et le changement pour un mandat de protection, c'est quoi? Parce qu'on parle des aînés. J'ai déjà soulevé la situation, exemple, de ma mère. Elle m'a déjà donné sa procuration. C'est caché dans une boîte de sécurité au cas où que j'aie un besoin. Mais que pensez-vous qu'on devrait faire pour la gestion de changement de ceci? Parce que c'est peut-être moins nécessaire maintenant, quand le projet de loi... ou si le projet de loi sera adopté.

• (10 h 30) •

M. Prud'homme (Danis) : Bien, en fait, il n'en demeure pas moins, au niveau de... À titre d'exemple, je reprends l'assistant au majeur, parce que c'est plus là où il y a des zones grises, là. Donc, dans l'assistant au majeur, si on veut qu'il vienne aider dans des domaines spécifiques, bien, soit qu'on les spécifie en début, lorsqu'on lui fait son mandat, on va dire, d'assistant au majeur ou sinon on lui met quand même un poids, à dire : Bien, je dois faire affaire avec un ministère, là il faut que j'aille courir pour les papiers pour avoir autorisation. On parlait de fardeau administratif, si on veut minimiser et diminuer ce fardeau-là, bien, pensons à une façon de faire, là, délimitant un terrain de jeu en partant, disons, et là ça lui donne droit à l'accès pour aider.

Mme Maccarone : Ça fait qu'il y a peut-être une place pour ceci, d'abord. Est-ce que c'est...

M. Prud'homme (Danis) : On fait des suggestions, comme on dit.

Mme Maccarone : O.K., O.K., je comprends. Mais ça prend aussi, peut-être, une formation puis une éducation à la population, surtout les gens aînés, de savoir, eux aussi, qu'ils ont des droits, parce qu'on a compris aussi que les gens ne sont pas nécessairement au courant qu'avec la procuration... qu'ils peuvent enlever la procuration. Alors, voici, on est face... avec une possibilité de maltraitance qu'on veut éviter.

J'aimerais vous entendre par rapport à... je suis assez nouvelle autour de la table, mais la loi n° 115... parce que je veux savoir votre avis. Trouvez-vous... La loi n° 115, je vais vous dire c'est quoi, c'est la loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne en situation de vulnérabilité. Je le cite avec vous surtout à cause du réseau, qui vous êtes. Trouvez-vous qu'il y a un arrimage entre ce qu'on essaie de faire vis-à-vis la loi n° 115, pour protéger nos aînés et nos personnes en situation de vulnérabilité, et le projet de loi n° 18?

M. Prud'homme (Danis) : Bien, écoutez, je n'ai pas comparé côte à côte les deux projets de loi. Ce que je pourrais vous dire, c'est : Dans le cas de projets de loi qui touchent abus, et maltraitance, et négligence, même, c'est sûr que nous, on prêche tout le temps par l'exemple, en disant : Il faut aller au maximum pour éviter qu'il y ait des craques, comme je mentionnais tout à l'heure. Donc, c'est sûr que ce qu'il y a déjà dans les projets de loi... ou les lois actuelles, pardon, qui touche, si on veut, la prévention et la prise en charge, la ligne info Abus et tout ce qui a déjà été mis en place, dans le fond, pour nous, il ne faut pas l'ignorer. On ne travaille pas en silo, là. Donc, ce qui est déjà fait à un endroit doit venir s'appliquer, si c'est plus sévère, monter par-dessus, et, si c'est moins sévère, bien, en fait, c'est l'autre qui devrait monter par-dessus pour venir sécuriser davantage. Donc, je pense qu'il y a un arrimage pour s'assurer qu'on se respecte dans les deux cas et qu'un étant plus sévère que l'autre, bien, c'est le plus sévère qui devrait gagner, parce que le but, c'est de mieux protéger, là.

Mme Maccarone : O.K. Vous avez mentionné votre projet pilote. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, parce qu'on parle beaucoup de gestion de changement, parce que c'est quand même un changement majeur qui sera mis en place. J'aimerais vous faire entendre un peu par rapport à votre projet pilote puis comment vous vous situez à l'intérieur. Vous avez mentionné un projet pilote...

M. Prud'homme (Danis) : Oui, c'est le projet pilote du curateur, en tant que tel.

Mme Maccarone : Ah! excusez-moi, O.K. Je pensais qu'on parlait de, comme... bien, d'abord, si on change de propos, puis le... pour la gestion de changement, votre rôle, à l'intérieur de gestion de changement, comme représentants de la communauté, puis comment que vous pouvez aider le gouvernement à mettre en place ce changement, qui est vraiment nécessaire.

M. Prud'homme (Danis) : Bien, je pense que, de notre côté, dans... le point numéro un, on a toujours offert notre collaboration à tous les partis pour essayer de faire avancer la qualité de vie. C'est notre aspect numéro un.

Numéro deux, c'est... je pense qu'on a une certaine expertise terrain. J'oserais dire qu'on est plus grands que Desjardins. En fait de satellites en région, on en a 756, donc je pense qu'on sait ce qui se passe sur le terrain puis on a une expertise certaine qu'on peut apporter par rapport à des choses qui sont mises de l'avant pour s'assurer qu'ils, comme on dit, vont vraiment être appropriés à déployer sur le terrain puis minimiser les problématiques. Donc, ça, c'est notre rôle, vraiment.

Mme Maccarone : Est-ce que ça serait possible que la FADOQ, ce serait un représentant aussi? Bien, on a déjà eu des gens qui ont proposé que les groupes communautaires soient des représentants auprès des personnes vulnérables. Pensez-vous que ce serait quelque chose que la FADOQ, aussi, pourrait faire?

M. Prud'homme (Danis) : Écoutez, honnêtement, ce n'est pas notre mission, dans un premier temps. Est-ce que les personnes dans notre organisation, de façon individuelle, eux, voudraient s'avancer pour faire ça? Ça, c'est leur choix, mais, je pense, comme organisation, ce n'est pas notre mandat. Est-ce qu'on peut siéger sur des comités pour aider à faire avancer des politiques, des règlements, des choses comme ça? Oui, mais s'impliquer directement, ce n'est pas notre mandat, actuellement.

Mme Maccarone : Bien entendu. Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'aimerais passer la parole à ma collègue.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, la députée de Notre-Dame-de-Grâce désire prendre la parole. Allez-y, il vous reste 2 min 20 s.

Mme Weil : Deux minutes, parfait. Bien, je voudrais revenir peut-être sur deux droits très fondamentaux, hein, le droit de vote et le droit de tester. On va peut-être commencer avec le dernier. D'ailleurs, on a le Curateur public, qui devrait avoir une bonne connaissance de ce domaine de droit. Donc, vous parlez de confusion de genres avec le projet de loi, pourriez-vous peut-être l'expliquer? Dans le projet de loi... vous disiez que le projet de loi confond les genres en matière d'homologation, etc. En tout cas, juste... ce n'est pas bien expliqué, la confusion de genres...

M. Prud'homme (Danis) : En fait, dans certains cas, ce qu'on a voulu éclaircir... puis, dans certains cas, on nous a éclaircis là-dessus. À titre d'exemple, quand on parlait de... Bien, premièrement, on change la façon de faire les choses. Donc, pour les gens qui étaient habitués d'une façon... donc, pour nous, c'est sûr que n'importe quel changement dans la société, ça va prendre du temps, ça va prendre beaucoup d'information, et de là qu'on dit : Ça va prendre davantage de ressources si on veut le faire en douceur, disons-le comme ça. Donc, ça, c'est la première chose, où nous, on dit : Ça fait x nombre d'années qu'on a un régime, et là on va passer à un autre régime qui est quand même assez différent et qui a une progression pour préserver l'autonomie autant que possible, donc là on vient de changer beaucoup, et nous, on veut juste s'assurer que les gens n'aient pas de confusion entre un et l'autre puis qu'ils aient toute l'information, même la formation s'il faut, puis s'assurer qu'on peut avoir cette information-là, donc que ce soit disponible et diffusé.

Mme Weil : Donc, des ressources?

M. Prud'homme (Danis) : Oui.

Mme Weil : Ressources additionnelles ou des ressources dédiées, peut-être, on pourrait dire ça, parce que, globalement, les gens ont fait le point que cette... qu'il y ait une gestion de changement à opérer, et donc, ça, c'est un élément, quand on change de régime, que les gens soient bien au courant... bien accompagner les personnes, justement, par rapport à ces changements.

M. Prud'homme (Danis) : Puis, juste pour fermer la parenthèse, on donnait des exemples où on siège sur d'autres comités, où on a demandé, dans des cas... où il y ait des accompagnateurs. Donc, quand quelqu'un appelle, il est pris en charge pour dire : Bien là, ça va être comme ça, voici ce que... on va te référer aux bonnes ressources, la bonne... Donc, avoir quelqu'un qui va un peu orienter dans le dossier. Ça, ça va éviter beaucoup de confusion aussi, là.

Mme Weil : De votre expérience, juste par...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 20 secondes.

Mme Weil : ...est-ce qu'il y a beaucoup d'enjeux par rapport à cette question, comment dire, de pression indue, évidemment, et, dans votre expérience, de membres de la famille ou autres en la matière? C'est un domaine sensible.

M. Prud'homme (Danis) : C'est un domaine sensible, disons-le comme ça. C'est pour ça qu'on parle de conseil de famille, pour que plus de gens soient au courant de ce qui se passe, pour éviter qu'il y ait des petites choses qui pourraient...

Mme Weil : Très bien. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends momentanément les travaux afin de permettre au prochain groupe de prendre la place.

(Suspension de la séance à 10 h 37)

(Reprise à 10 h 40)

La Présidente (Mme Chassé) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de L'Étoile de Pacho. Vous avez 10 minutes pour votre exposé, et, à une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal pour vous inviter à conclure. Par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Commencez tout d'abord en vous présentant puis poursuivez avec votre exposé.

L'Étoile de Pacho — Réseau d'entraide
pour parent d'enfant handicapé

Mme Richard (Nathalie) : Bonjour. Donc, je suis Nathalie Richard, la directrice et la fondatrice de L'Étoile de Pacho — Réseau d'entraide pour parent d'enfant handicapé.

Donc, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, Me Denis Marsolais, du Curateur public, nous sommes bien heureux d'être ici aujourd'hui afin de vous présenter notre mémoire sur le projet de loi n° 18, malgré le fait que la clientèle que nous représentons, les parents d'enfants sévèrement handicapés de moins de 18 ans, ont quand même été oubliés dans ce projet de loi là.

Donc, je suis avec mes collègues Me Anick Lalande, qui est notaire, et Dave Turcotte, qui est le conseiller principal aux relations publiques et gouvernementales de L'Étoile de Pacho. Donc, je me suis nommée déjà, je suis Nathalie Richard, la fondatrice et la directrice de L'Étoile de Pacho, et je suis surtout et avant tout maman d'un enfant lourdement handicapé de 12 ans. Je vais revenir à ce volet-là dans quelques instants.

Donc, brièvement, L'Étoile de Pacho, qu'est-ce que c'est? C'est un organisme communautaire de Montréal qui vient en aide aux parents d'enfants sévèrement handicapés de moins de 18 ans. Donc, on a une clientèle bien spécifique avec des besoins bien spécifiques. Et, on va le dire tout de suite, la clientèle de notre organisme, ce sont des enfants qui sont inaptes et qui le seront toujours, malheureusement.

Donc, l'organisme, brièvement, les services qu'on offre. Donc, on a plus de 300 familles membres chez nous, ça veut dire qu'on aide environ 600 parents sur le terrain depuis six ans. On les aide de différentes façons. C'est surtout de l'accompagnement individualisé. On les aide à trouver des services, des subventions, de l'aide financière, à obtenir du répit, parce qu'être parent d'un enfant sévèrement handicapé, c'est très lourd à porter au quotidien. On les aide aussi à tenter de retrouver un équilibre de vie à travers le tsunami qu'est la réalité de devenir un parent d'enfant sévèrement handicapé.

Donc, à travers tout ça, aussi, on offre la possibilité aux parents de faire un retour au travail. Donc, chez nous, on est rendus 19 employés, et, parmi ceux-ci, on a 14 mamans d'enfants sévèrement handicapés qui font un retour au travail. Donc, on est très fiers d'offrir la possibilité à des mamans de retourner sur le marché du travail. On offre un horaire flexible et adapté selon leur réalité, parce qu'on s'entend qu'on ne peut pas travailler à temps plein. Je le fais, je ne sais pas comment, des fois. Mais, bon, la plupart des mamans peuvent travailler seulement quelques jours par semaine. Donc, on leur offre un horaire qui s'adapte à leurs particularités.

Dans la dernière année aussi, on a, bien sûr, travaillé très fort afin de bonifier l'aide financière pour les familles qui vivent avec un enfant sévèrement handicapé. Donc, on tient à remercier, une fois de plus, le ministre de la Famille et tous les gens qui ont participé à faire bonifier le programme SEHNSE de 30 millions de dollars. Donc, on est très contents de ça. D'ailleurs...

Je suis perdue dans mes notes. J'y arrive.

La Présidente (Mme Chassé) : Prenez votre temps.

Mme Richard (Nathalie) : Oui, ça s'en vient. Le projet de loi n° 18, en fait, doit, selon nous, tout comme le programme SEHNSE, être modulé afin de répondre aux différentes réalités des personnes sévèrement handicapées. Donc, vous constaterez, dans notre mémoire, que nos propos sont fortement teintés de par notre mission et notre clientèle, qui est très spécifique. Donc, nos observations et nos recommandations sont ciblées pour la clientèle que nous représentons, les parents d'enfants sévèrement handicapés.

On a vu, dans la dernière semaine, plusieurs groupes, ici, vous présenter leurs mémoires. La grande majorité ont salué le changement proposé par le projet de loi n° 18, qui vient reconnaître le droit des personnes et qui tient compte des capacités de la personne afin de la faire participer à la prise de décisions la concernant. On ne peut qu'être en accord avec cette proposition, qui valorise l'autonomie de la personne, et on salue cette avancée-là.

Par contre, si on se met dans nos souliers un tout petit instant et qu'on réalise pleinement les grandes incapacités qu'ont nos enfants, on se rend compte rapidement que ce n'est pas notre enjeu, malheureusement ou heureusement, je ne sais plus. Le nôtre, en fait, notre enjeu à nous, c'est de s'assurer que le parent d'enfant sévèrement handicapé pourra continuer à prendre les décisions le plus simplement possible lorsque celui-ci deviendra un adulte tout aussi sévèrement handicapé.

Vous savez, c'est l'heure de vous parler de ma réalité de maman d'enfant sévèrement handicapé. Depuis que mon fils est né, depuis 12 ans, toutes les décisions que je prends pour lui, qu'elles soient petites, moyennes ou grosses, c'est tout moi qui les prends, hein? Que ce soit de décider est-ce que je change sa couche là ou je la change dans une demi-heure, est-ce que je lui donne un yogourt à la fraise ou aux pêches, est-ce que je lui fais faire une chirurgie au cerveau ou je laisse faire, est-ce que je l'envoie à l'école ou il reste à la maison parce qu'il est trop malade pour aller à l'école, toutes ces décisions-là, je les prends pour lui parce que mon fils, il est inapte, il n'est pas capable de prendre de décision pour lui. Et cette inaptitude-là, elle a été maintes et maintes fois confirmée par des tests, par des spécialistes, par tellement d'évaluations, qui sont crève-coeur parce qu'à chaque fois on se fait répéter que notre enfant est inapte, et c'est un grand deuil pour le parent. Et c'est aussi confirmé par tous les services qui découlent, hein, bien sûr, du système de santé et services sociaux. Donc, que ce soit le programme SEHNSE, justement, qui vient confirmer que notre enfant est lourdement handicapé, les cotes qu'il a à l'école pour avoir de l'argent pour être accompagné, donc toutes ces choses-là viennent confirmer l'état d'inaptitude ou de handicap très sévère pour l'enfant.

Donc, j'aimerais comprendre, moi, mis à part le chiffre 18, qu'est-ce qui vient réellement changer, dans le fond, la condition de mon fils, le fait que le jour de ses 18 ans, je ne peux plus vraiment prendre de décisions pour lui. Il faut que je recommence à zéro, il faut que je reprouve au système, encore une fois, que mon fils est toujours aussi inapte, que, demain matin, il faut encore que je prenne la décision de : Je change-tu sa couche ou je ne la change pas? Je lui mets un tee-shirt jaune ou un tee-shirt bleu? Donc, on recommence, il faut reprouver, encore une fois, que le patient... pas le patient, mais, bon, mon enfant est aussi inapte. Donc, il y a un creux, là, il y a un dédoublement, vraiment, des procédures qui ne fait pas de sens, selon moi.

Je me suis perdue, encore une fois.

On a fait le constat de quelque chose que je pense que vous avez tous fait aussi, mais on se retrouve, dans le fond, dans les dernières années, je peux dire, peut-être, la dernière décennie, avec un nouveau problème de société qui, selon moi et selon bien des gens aussi, va aller en augmentant. Grâce aux avancées technologiques et médicales, on sauve des enfants de plus en plus jeunes et on les maintient en vie de plus en plus longtemps. On n'est pas ici pour faire ce débat-là. Je suis bien heureuse que toute cette technologie-là existe, parce que j'ai mon fils auprès de moi depuis 12 ans et que je ne veux pas qu'il n'aille à nulle part d'autre, n'est-ce pas? La problématique majeure, c'est que notre système de santé et de services sociaux, d'éducation et judiciaire ne s'est pas mis à jour avec cette clientèle-là, qui est de plus en plus lourde. Si on parle juste du système judiciaire, la dernière réforme des régimes de protection remonte à 1989. Donc, c'est sûr qu'il s'est creusé un trou entre l'offre de services pour répondre à cette clientèle-là et la clientèle. Voilà.

Selon mon calcul rapide, si on se fie seulement aux chiffres du programme SEHSNE, avec le nouveau palier 2 qui a été rajouté dernièrement, il y aura environ plus ou moins 10 000 enfants sévèrement handicapés au Québec dans les prochaines années. Est-ce qu'on est prêts pour accompagner toutes ces familles-là dans la transition vers l'âge adulte? J'en doute un peu. Donc, en terminant, ce qu'on vous propose, c'est quelque chose qui existe déjà sous d'autres formes. Dans d'autres législations, il existe des dispositions particulières, exemple les Premières Nations. Pourquoi on ne pourrait pas faire un projet de loi modulé pour cette clientèle bien spécifique afin de simplifier la démarche du parent et de s'assurer de mettre l'enfant sévèrement handicapé devenu adulte au coeur du projet? Voilà.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Je vous remercie pour votre touchant exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

• (10 h 50) •

M. Lacombe : Merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre présence, Mme Richard. C'est toujours un plaisir de vous entendre, de collaborer avec vous. M. Turcotte, bienvenue chez vous, j'aurais envie de dire, donc c'est un plaisir de vous voir. Mme Lalande, heureux de vous rencontrer. Merci pour votre mémoire, pour les recommandations que vous faites, qui, je pense, nous amènent à voir des angles que vous défendez puis qui vont nous permettre, peut-être, là, de bonifier le projet de loi. Donc, merci, merci pour ça.

Puis j'aurais peut-être quelques questions, d'ailleurs. D'entrée de jeu, vous avez dit, vous avez l'impression d'être oubliés dans ce projet de loi. Et là j'ai compris, avec la nature, bien, de votre mémoire et de ce que vous dites, pourquoi est-ce que c'est le cas. J'ai bien noté ce que vous venez de mentionner. Il y a des trucs que vous n'avez pas mentionnés, par exemple la question d'avoir deux tuteurs. Est-ce que ça fait partie des éléments qui font en sorte que vous vous sentez oubliés?

Mme Richard (Nathalie) : En fait, pour les deux tuteurs, nous, ce qu'on propose, on propose tout simplement que les parents aient le choix. Vous savez, il y a beaucoup de... bien, pas beaucoup, mais en fait on a rencontré des parents, on a consulté des parents, puis il y a des parents qui nous ont dit, justement, que, de l'âge de 0 à 18 ans, c'est les deux parents qui s'occupent et qui décident ensemble, conjointement, des décisions pour leur enfant, que les parents soient séparés ou en couple, puis là, à 18 ans, arrive la décision de lequel des parents va être celui qui va prendre les décisions. Ça fait que, là, arrive une décision très déchirante, où parfois des disputes éclatent aussi, donc on... Et, si quelque chose a bien fonctionné pendant 18 ans, pourquoi vouloir changer cette façon-là? Donc, nous, ce qu'on propose, en fait, c'est de laisser le choix aux familles de choisir si elles veulent un ou deux tuteurs. Parce qu'on s'entend qu'on ne veut pas non plus obliger, parce qu'il y a beaucoup de situations aussi... il y a beaucoup de séparations dans les familles où il y a un enfant sévèrement handicapé, et que, là, ça ne se pas toujours bien pour la collaboration, des prises de décision, donc de laisser le choix aux familles de décider si elles vont avoir un ou deux tuteurs.

M. Lacombe : D'accord. C'est intéressant, comme proposition, intéressant en ce sens où ça suscite aussi d'autres questions, je voudrais peut-être vous entendre là-dessus. Peut-être faire une précision, d'abord. Vous êtes... les deux parents sont tuteurs, par exemple, de l'enfant lorsqu'il est mineur. Lorsqu'il y a la transition à l'âge adulte, cette transition qui vous préoccupe beaucoup, ce que vous proposez, est-ce que c'est qu'on puisse conserver les deux mêmes tuteurs, donc les deux parents, sans avoir recours au tribunal ou... Ma compréhension, c'est que vous souhaiteriez, oui, que le tribunal continue de se prononcer mais qu'il y ait la possibilité, parce qu'actuellement ce n'est pas le cas, d'avoir deux tuteurs. Donc, c'est cette option-là?

Mme Richard (Nathalie) : Exactement. Je pense que, dans le meilleur des cas, ce serait sans avoir recours aux tribunaux, mais ça, c'est vraiment un peu, peut-être, illusoire de penser ça, et, si on a recours aux tribunaux, bien là, que la demande puisse être faite à ce moment-là, dans le cadre de la procédure, là, de l'ouverture, là, du régime de protection qui va maintenant être l'ouverture d'une tutelle au majeur.

M. Lacombe : D'accord. Donc, ça répond à ma question. Dans ce cas-là, je comprends mieux.

Vous dites aussi, dans votre mémoire, que, bien, évidemment, l'ouverture d'un régime de protection, ça peut être insécurisant pour des parents, c'est clair, générer aussi peut-être du... vous disiez du... bien, que ça insécurise aussi la personne qui est au coeur de tout ça, c'est-à-dire, dans votre cas, vos enfants, et que le cheminement des familles pourrait être amélioré si ces familles avaient plus d'information.

Je le répète souvent aux groupes, parce que peut-être que cet élément-là est passé davantage sous le radar, mais, dans le projet de loi, il y a aussi cet aspect où on vient dire au curateur, qui va changer de nom, qu'il a un devoir d'information et qu'il doit accompagner, qu'il doit s'assurer que tout le monde qui est inclus dans ce processus-là a les bonnes informations puis connaît bien ses droits et toute la mécanique qui entoure le processus. D'abord, je dirais, est-ce que ça répond un peu à votre questionnement, à votre préoccupation? Et, si non, qu'est-ce que vous proposez pour mieux accompagner les familles?

M. Turcotte (Dave) : Pour répondre à votre question, M. le ministre, effectivement, ça a été discuté beaucoup lors des différentes auditions avec les autres groupes, cette question-là. Effectivement, c'est rassurant de voir qu'il y a un ajout du devoir d'information pour le nouveau curateur dans le projet de loi tel que déposé par le gouvernement. Cependant, souvent, hein, comme on dit, le diable se cache dans les détails, donc c'est dans l'application du projet de loi... qui peut être un enjeu. Donc, d'avoir l'information, c'est une chose, la rendre disponible, c'est une autre chose, et de la rendre compréhensible pour les gens, c'en est une autre. Et souvent ce qui est présent dans le cas des parents que nous représentons, c'est... il y a tellement une surcharge, une lourdeur qui s'ajoute, administrative, pour ces parents-là. Ne sachant pas l'espérance de vie de leur enfant, tout ce qui est mode de protection, mandat de protection, etc., c'est comme... le 18 ans, c'est plus loin, malheureusement ils ne savent même pas si leur enfant va se rendre à leur 18e anniversaire. Donc, souvent, l'information, on en a besoin maintenant, puis là c'est comme là que ça se passe, donc c'est qu'elle soit facile à comprendre dans un moment, peut-être, de grand stress pour les parents et qu'il y a ait un accompagnement personnalisé pour ces parents-là. Et d'ailleurs on le dit, nous, dans notre mémoire, c'est sûr qu'on veut collaborer avec le curateur, qui aura un nouveau nom, là, mais...

M. Lacombe : Donc, vous êtes prêts à collaborer avec nous là-dessus.

M. Turcotte (Dave) : Exactement, puis s'assurer... comme on l'a fait pour le SEHNSE, faire en sorte que des nouvelles formulations puis des mots qui sont plus sensibles que d'autres pour les parents. Donc, on souhaite que cette collaboration-là se maintienne, puis quitte à ce qu'il y ait des formations du curateur auprès de nos membres lors... de notre organisme ou d'autres solutions du genre, là.

Mme Lalande (Anick) : Excusez-moi, j'aimerais rajouter quelque chose également. C'est que, par rapport à ce que vous disiez, oui, il y a un problème d'information, parce que, souvent, le parent arrive aux 18 ans de la personne, il n'était même pas au courant de toute cette démarche-là qu'il aurait à entreprendre; d'autres sont au courant, sont mieux informés. Et c'est une bonne chose d'être informé et de savoir que, dans l'année qui précède la majorité, les parents peuvent entamer ces démarches-là, encore faut-il que, même s'ils ont l'information, quand ils décident d'entamer les démarches dans l'année précédente, qu'ils ne se rebutent pas à, sur le terrain, la façon que c'est appliqué. Donc, c'est pour ça qu'on a mis un fait vécu qu'une personne, une maman bien avisée, a tenté d'entamer les démarches dans l'année précédant la majorité, mais elle s'est retrouvée face au système, face à une personne qui lui a dit : Non, il faut attendre la majorité. Donc, même les gens... certaines personnes dans le système de santé ne sont pas bien informées. Donc, c'est une chose, l'information, oui, mais aussi de l'application après, de comment ça se passe dans la réalité.

M. Turcotte (Dave) : Et qu'au fond tout le personnel du réseau de la santé et des services sociaux, qui sont souvent les premières lignes dans ces cas-là, ils aient la bonne information suite aux modifications. Puis il y a quand même un changement de culture, dans le réseau, important à opérationnaliser après l'adoption de ce projet de loi là, qui change quand même les choses d'une façon assez importante.

M. Lacombe : Mais c'est des bons points, qu'on prend en note. C'est certain qu'on a cette volonté, là, de mieux diffuser l'information, de bien diffuser l'information, puis qu'on aura du temps, si le projet de loi est adopté, pour, évidemment, mettre tout en oeuvre pour que l'information... Là, je sens... le curateur aimerait que je dise «quand le projet de loi va être adopté», mais...

Une voix : Non, je regarde... De notre côté, il n'y a pas de problème.

M. Lacombe : On est favorables?

Une voix : Oui.

M. Lacombe : Mais, plus sérieusement...

La Présidente (Mme Chassé) : C'est un pléonasme.

M. Lacombe : Oui, effectivement. Mais, plus sérieusement... puis ça, c'est peut-être aussi... on ne l'a peut-être pas assez répété, mais il n'y a pas de précipitation, là. C'est-à-dire que le moment où le projet de loi est adopté, s'il l'est, bien, on se donnera aussi le temps pour faire en sorte que tout soit bien compris, que tout le monde comprenne bien son rôle, parce que la maison n'est pas en feu, là, tu sais, on a le temps de prendre le temps de bien faire les choses. Donc, on prend, évidemment, note de vos commentaires là-dessus. Alliez-vous intervenir?

Mme Lalande (Anick) : Bien, en fait, oui, ce que j'aimerais rajouter, c'est que c'est très bien au niveau de l'information, c'est que, des fois, il faut prendre en considération aussi les limites au niveau du système de santé, où il y a un manque criant de personnel, donc ça peut faire en sorte... C'est pour ça que, dans notre recommandation n° 6, on parlait d'une prolongation un peu des règles de la tutelle au mineur, le temps d'obtenir un jugement pour être sûrs qu'il n'y ait pas une période x où le mineur devenu majeur se retrouve sans représentant légal. C'est vraiment pour pallier à ce côté-là que... bien que le système de santé va recevoir toute l'information nécessaire, je n'en doute pas, mais qu'il soit en mesure... qu'il ait les capacités, là, de répondre dans les délais nécessaires, puis, s'ils ne sont pas capables de répondre parce qu'il y a un manque de personnel ou peu importent les situations, bien, qu'au moins on ait un cadre légal qui vienne pallier à cette situation-là.

• (11 heures) •

M. Lacombe : J'en prends note. Et peut-être une petite dernière, rapidement, c'est à la page 8 de votre mémoire, la possibilité d'ouvrir une tutelle au majeur sans obtenir un jugement du tribunal, peut-être une question un peu plus juridique mais, en même temps, une question, je pense, de principe aussi, donc je voudrais peut-être vous entendre là-dessus. Ce que vous recommandez, c'est qu'un notaire, avec l'autorisation du curateur, qui changera de nom, ait le pouvoir de prononcer l'ouverture d'un régime de protection sans avoir besoin de l'autorisation ou d'un jugement du tribunal. La dernière réforme, ce n'est pas ce qu'elle mettait de l'avant. Ça va donc à l'encontre de la dernière réforme, qui disait que l'ouverture du régime ne devait pas se faire sans audition juste et impartiale. Ça, c'est la partie juridique.

Puis la partie de principe, je dirais, est-ce que vous... parce qu'il y a tout l'enjeu mécanique, et là je comprends que ça facilite peut-être la vie des familles. Ça, je suis sensible à ça. Donc, ça, c'est l'enjeu pratique, c'est l'enjeu technique. Mais l'enjeu de principe, c'est aussi de dire : On retire des droits à quelqu'un, c'est un geste qui est important. Et, si on ne passe pas par le tribunal, est-ce qu'on fait vraiment tout ce qu'on peut pour respecter ses droits fondamentaux? Ça, c'est la partie plus théorique, mais c'est une partie qui est importante.

Mme Lalande (Anick) : Oui, je suis d'accord avec vous. C'est sûr que le but, c'est vraiment... on est dans la protection, l'intérêt de la personne, c'est le but premier. C'est qu'en pratique — Me Marsolais pourra probablement vous le dire — comment ça se passe, c'est que, déjà, il y a une grosse partie de la procédure, bon, ça peut être fait devant notaire. Et puis, bon, le notaire peut réunir l'assemblée de parents, d'alliés et d'amis, ensuite de ça va prendre note s'il y a des contestations. Le Curateur public est déjà avisé. Dès le départ, on lui dépose toute la documentation, donc les évaluations médicales, les évaluations psychosociales, et, suite à ça, il va analyser lui-même, le curateur, la documentation. Et, si lui-même veut contester, dans le cadre de ce dossier-là, c'est certain qu'il va le faire. Et, s'il y a une contestation qui doit être faite par un membre, un proche de la famille qui est au courant d'une situation x, ça peut être fait. Et tout ça va être fait, et à la fin, quand le notaire va déposer son procès-verbal d'opérations, conclusions, et tout ça, bien, c'est juste une question d'attente, d'attendre d'avoir le jugement, parce que le juge, en réalité, va prendre connaissance de l'ensemble de la documentation, du travail qui a été fait, et là, à moins qu'il y ait des contestations ou des remarques particulières, va simplement rendre le jugement tel que tout a été déjà analysé par le notaire puis les différents intervenants. Donc, c'est juste une attente d'obtenir un peu comme... Je ne veux pas déconsidérer, là, le travail exceptionnel que font les tribunaux, bien au contraire, là, mais c'est juste que je me dis qu'il y a peut-être...

M. Lacombe : L'enjeu pratique prime sur l'enjeu de principe, là, c'est ce que je comprends.

M. Turcotte (Dave) : Oui, puis il y a quelque chose d'important à ajouter aussi, ça a un impact financier, hein, dans certains cas, parce qu'avant 18 ans le parent, exemple, qui reçoit le SEHNSE pour son enfant, le jour de ses 18 ans, ne le reçoit plus. Et, s'il n'y a pas eu, là, de compte bancaire ouvert ou s'il n'y a pas eu de démarche entamée puis que ça prend un certain délai... entre autres, pour la solidarité sociale, il y a des délais qui s'ajoutent, ce qui fait en sorte que, dans le fait vécu que nous avons ajouté dans notre mémoire, bien, pour cette famille-là, ça crée une insécurité financière parce qu'il y a des délais supplémentaires pour le temps de trouver le notaire à l'aide juridique, le temps d'avoir les évaluations, etc., à jour, puis tout ça. Donc, ça fait plusieurs mois, pour la famille, sans revenu. Et, pour un parent qui a dû réduire son nombre d'heures de travail pour s'occuper de l'enfant... Ce n'est pas parce que l'enfant a 18 ans qu'il a moins de besoins. Donc, ça crée une pression financière importante pour ces familles-là, donc une raison supplémentaire pour accélérer le processus pour elles.

M. Lacombe : C'est noté. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Est-ce que quelqu'un d'autre du parti formant le gouvernement... Oui, je reconnais le député de Mégantic, et vous avez 1 min 30 s.

M. Jacques : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça fait plaisir.

M. Jacques : Mme Richard, Me Lalande, M. Turcotte, ça fait plaisir de vous voir aujourd'hui, bienvenue.

L'intégration sociale des personnes vivant avec un handicap est quand même très importante pour moi, étant donné que j'ai des amis qui ont des enfants avec des handicaps. J'ai une nièce aussi, là, qui est passée de l'âge mineur à l'âge adulte étant handicapée. Selon vous, là, la réforme, là, qui est proposée dans le p.l. n° 18, qu'est-ce qu'elle va faire pour l'intégration sociale de ces personnes handicapées là?

Mme Richard (Nathalie) : Ce que je vois, c'est qu'ils vont être capables de prendre plus de décisions les concernant. Mais c'est sûr que là, je pense, où c'est important de revenir, c'est que les recommandations que nous, on a faites, c'est vraiment ciblé pour notre clientèle puis, je vais dire les choses comme elles sont, c'est une clientèle qui n'est pas facilement intégrée dans la société.

M. Jacques : C'est une clientèle sévère, comme vous avez dit plus tôt dans votre présentation.

Mme Richard (Nathalie) : C'est ça, c'est ça, oui. Puis, tu sais, vous savez, je suis maman d'un enfant comme ça, je ne veux pas du tout diminuer leurs capacités. C'est des enfants qui sont pleins de potentiel, mais ça reste que, on va appeler un chat un chat, c'est des enfants qui ont besoin qu'on prenne les décisions pour eux pour tout, et ça va toujours rester dans le temps, sinon ça va empirer. Donc, je suis très pour l'intégration sociale, et je trouve... je salue, en fait, justement, les avancées qu'il y a dans le projet de loi qui sont pour faire valoir les droits des personnes. Puis tantôt, justement, mes collègues, tu sais, parlaient de ça un peu avec M. le ministre, mais derrière tout ça, nous, jamais qu'on ne veut retirer un droit à quelqu'un, mais, je pense que Me Lalande l'a bien expliqué, tout le processus qu'on fait avec le notaire pour constater l'inaptitude de l'enfant, on a la chance, parmi ce trajet-là, de se rendre compte, justement, de... est-ce que cet enfant-là est vraiment inapte ou pas. Donc...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

Mme Richard (Nathalie) : C'est court.

La Présidente (Mme Chassé) : On est déjà en train de dépasser, là.

Mme Richard (Nathalie) : Voilà. C'est terminé.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous laissais finir votre phrase.

Mme Richard (Nathalie) : C'est bon.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça va?

Mme Richard (Nathalie) : Oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, avec le parti formant l'opposition officielle, la parole est à la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Merci de votre présence avec nous aujourd'hui. Toujours un plaisir de vous voir, puis tellement contente d'aborder le sujet de transition de l'âge mineur à l'âge majeur. Je sais que vous êtes déjà au courant que j'ai déposé un mandat d'initiative, que je vais probablement régulièrement mentionner, car j'aimerais beaucoup avoir l'opportunité d'avoir un dialogue non partisan, mais vraiment pour discuter qu'est-ce qu'on peut faire ensemble pour aider les familles comme les nôtres quand on transitionne de l'âge mineur à l'âge majeur.

Puis, à ce sujet-là, Nathalie en particulier, quand on s'est vues samedi, tu as parlé un peu de ton parcours. Je pense qu'on mérite ici, en commission, d'entendre un peu le processus, puis à quoi tu attends si, mettons, le projet de loi n'est pas adopté — j'ose espérer que ce serait le cas — du transfert de l'âge mineur à l'âge majeur, et aussi le rôle de, peut-être, un intervenant pivot. Tu as déjà abordé une des raisons qu'on a L'Étoile de Pacho, c'est parce qu'on ne sait pas où aller. Alors, bravo pour toutes les démarches que tu as déjà mises en place, je sais qu'il y a des parents qui en bénéficient régulièrement. Mais, tu l'as déjà souligné, 10 000 enfants, on ne peut pas, avec L'Étoile de Pacho, aider 10 000 enfants. Alors, peut-être juste expliquer un peu ton expérience personnelle, à quoi tu attends, qu'est-ce que tu aimerais, idéalement, pour la transition et intervenants pivots.

Mme Richard (Nathalie) : En fait, je pense, je vais faire un gros survol. Vous connaissez la maison des fous d'Astérix, hein, on a tous vécu ça dans notre vie, hein? Le parent d'enfant sévèrement handicapé vit ça à pratiquement tous les jours de sa vie. C'est ça pendant 18 ans, c'est à virer fou, c'est pour ça que s'appelle la maison des fous d'Astérix. Et c'est dans tout, hein? Le système de santé et services sociaux, l'éducation, tout, tout, tout est à recommencer, est à faire, on monte, on descend, ah! et puis là on arrive à 18 ans, et c'est ça encore. Et ce qu'on voit, dans le fond, c'est une opportunité de se dire : Tous les systèmes, là, système de santé et services sociaux, l'éducation, le judiciaire, est-ce qu'il y a moyen de ramener ça en quelque chose qui va simplifier la vie du parent puis qu'on ne sera plus dans la maison des fous d'Astérix? Est-ce qu'on peut... il me manque le mot, mais... harmoniser, voilà, harmoniser tout ça ensemble pour que le parent et l'enfant handicapé qui est devenu adulte soient au coeur de ça? L'être humain, il est où, là-dedans? On parle beaucoup de procédures, de bureaucratie, d'administration, mais il est où, l'être humain? Il faut qu'il soit au milieu, il faut que le parent, il comprenne de quoi on lui parle. Souvent, le parent, il ne comprend même pas ces choses-là. Donc, pour moi, la transition, c'est une opportunité, en fait, d'offrir aux parents de solidifier, en fait, ce qui est déjà en place et de le bonifier, parce que ce n'est pas vrai que, rendu à 18 ans, c'est plus facile. Au contraire, les parents se retrouvent, on le sait tous, là, avec un vide financier assez important. Donc, c'est la période où il faudrait, justement, que ça soit centré autour de la famille puis qu'on les aide à solidifier tout ça pour que le parent ne soit pas confronté à placer son enfant aussi.

Mme Maccarone : On parle de vide financier, je trouve ça intéressant, parce que je sais que tu travailles encore fort pour faire la reconnaissance des familles naturelles au même niveau que les familles d'accueil. Peut-être, tu pourrais aborder ce sujet-là un peu.

• (11 h 10) •

Mme Richard (Nathalie) : Bien, en fait, c'est un sujet qu'on a longuement discuté, hein, dans plusieurs rencontres avec M. le ministre. Effectivement, les familles naturelles qui ont un enfant sévèrement handicapé, malgré... en fait, vivent le SEHNSE, mais, malgré le SEHNSE, on reçoit environ 14 000 $ par année. Une famille d'accueil qui s'occuperait de mon fils aurait environ 55 000 $ par année. Donc, on voit qu'il y a vraiment un creux financier assez énorme. Nous, ce qu'on demande, c'est qu'il y ait une révision de ces montants-là. Encore une fois, je pense, je l'ai dit tantôt dans mon introduction, dans mes présentations, qu'il y a un problème de société qui ne s'est pas ajustée. Les familles ne demandent que ça, de garder leurs enfants à la maison, il faut qu'elles le fassent sans s'appauvrir. Parce que, présentement, c'est ce qui se passe, les mamans, en général, arrêtent de travailler, et il y a un grand appauvrissement qui se passe. Et c'est certain que, s'il y a des frais à payer, justement, pour faire les procédures par rapport à la tutelle, bien, ça vient alourdir encore plus. Donc, il faut qu'il y ait une cohésion dans tout ça, finalement.

Mme Maccarone : Je comprends. J'aimerais peut-être entendre Me Lalande par rapport à l'idée de patrimoine, l'idée de la transition financière, pour la personne lourdement handicapée, de mineur à majeur. Je sais que c'est un sujet qui vous intéresse. Est-ce qu'il y a quelque chose, ici, que notre commission devrait se saisir, quand on parle de faire un changement auprès de la loi pour protéger ces personnes vulnérables?

Mme Lalande (Anick) : Vous parlez du patrimoine?

Mme Maccarone : Mais on sait qu'on est en train de mettre des mesures en place pour la protection des patrimoines pour les personnes qui sont vulnérables, puis je sais que vous avez mentionné, dans le passé, que c'est un sujet qui vous intéresse, le côté financier, qu'est-ce qu'on va faire pour protéger ces personnes-là. Est-ce qu'il y a quelque chose, à l'intérieur de ce projet de loi, qu'on devrait bonifier, qui est manquant ou peut-être de saluer que c'est une bonne chose aussi?

Mme Lalande (Anick) : Bien, il y a la recommandation par rapport au montant, qui est le 25 000 $. Ça, c'est au niveau du patrimoine. C'est sûr qu'on est conscients que toutes les normes de la loi qui touchent la somme de 25 000 $, elles ont été mises en place dans l'intérêt des mineurs et des majeurs inaptes pour protéger leur patrimoine puis éviter tout type de fraude ou de maltraitance, et tout ça. Par contre, dans le cadre de l'objectif... de la mission de l'organisme, qui est de faciliter la vie d'un parent lourdement handicapé, c'est sûr que, de un, la somme de 25 000 $, ce n'est pas beaucoup, quand on prend en considération les REEI, là, les régimes enregistrés d'épargne-invalidité, où le montant peut augmenter quand même considérablement vite à un jeune âge, ce qui n'était pas le cas lorsqu'on avait déterminé la somme de 25 000 $ il y a quasiment 30 ans de cela. Il y a 30 ans de cela, je pense que la somme de 25 000 $, là, pour qu'un mineur ait cette somme-là, c'était dans des cas plutôt exceptionnels. Donc, c'est normal qu'il y ait des normes puis qu'on veuille protéger le patrimoine des personnes vulnérables, et ça, on est pour ça. Par contre, le 25 000 $, c'est très peu pour notre clientèle, alors c'est pour ça qu'on proposait de l'augmenter à 50 000 $. Si on ne prenait en considération que notre clientèle, on l'augmenterait encore plus que ça, mais on prend quand même en considération que ça vise l'ensemble des personnes vulnérables, donc on ne veut pas abuser non plus.

Mme Maccarone : Puis, pour les redditions de comptes, je sais qu'on nous demande aussi, ici, une simplification, entre autres avec le 50 000 $, mais est-ce qu'il y a autre chose que vous voulez qu'on prenne en considération pour les redditions de comptes, quand on fait le changement pour la transition, entre autres, à l'âge mineur et l'âge majeur?

M. Turcotte (Dave) : Bien, c'est beaucoup le REEI, hein, qui est un enjeu, parce que, dans le cas où le gouvernement fédéral, à chaque année... même si le parent ne met pas un sou dans le REEI, le gouvernement fédéral met au moins 1 000 $, des fois plus. Donc, ça va assez vite quand le placement est pris très tôt, ce qui fait en sorte que ça vient vite, le 25 000 $, il s'ajoute. Donc, nous, c'est vraiment l'enjeu important. C'est sûr qu'il y a toute la question, bon, des héritages, puis tout ça, mais là on n'est pas... c'est quand même... ce n'est pas... il y a déjà peu d'enfants lourdement handicapés au Québec, et là, en plus, qui ont un héritage, tout ça, donc on comprend qu'il faut aller avec quand même un nombre significatif, là. Donc, si ce n'est pas bonifié, le 25 000 $, à plus... Il y a des groupes qui ont dit, exemple, 35 000 $ ou on l'actualise puis on l'indexe par la suite. Si ce n'est pas ça, bien, que le législateur réfléchisse à la possibilité d'exclure le REEI de ce montant-là, et là ça réglerait toute notre question, là. Parce que, même pour le REEI, l'enjeu, c'est que, si on veut faire un changement de placement dans le REEI, bien, il faut aller devant le tribunal. Ça fait que, là, ça ajoute, là, des délais. On s'entend, là, que, si on veut faire des transactions en bourse, là, puis qu'il faut attendre des délais pour avoir une audience au tribunal, là, on peut avoir perdu beaucoup d'argent entre-temps, là.

Mme Maccarone : Question par rapport à tutelle, etc. On parle des enfants lourdement handicapés, et c'est bien abordé. On se comprend que, lors de la 18e année, on reste toujours lourdement handicapé, puis vous demandez des exceptions, disons, des dispositions particulières dans la loi, reconnaissance des parents, etc. Qu'est-ce qu'on fait pour les enfants où les parents ne sont pas présents? Est-ce qu'on devrait avoir des dispositions particulières, peut-être, pour les frères et les soeurs, pour autres membres de la famille? Parce que, encore une fois, c'est toujours la même clientèle, c'est toujours les mêmes personnes qui sont en situation de vulnérabilité. Vos pensées là-dessus?

Mme Richard (Nathalie) : En fait, c'est quelque chose, je vais vous avouer, qu'on ne s'est pas vraiment penchés. On en a parlé un peu hier soir, justement, mais je pense qu'il faut donner tout simplement les mêmes droits à la personne, le tuteur de cet enfant-là. Donc, dans certains cas, moi, je connais quelques familles comme ça, que c'est les grands-parents qui s'occupent du petit-enfant, donc que les grands-parents aient les mêmes droits, et, si c'est les frères et soeurs, que ce soit la même chose. On veut que ça reste simple pour la personne, le tuteur de cet enfant-là, que ce soit un parent ou quelqu'un d'autre. Dans notre document, on utilise «parent» parce que, dans la majorité des cas, c'est le parent, mais on sait aussi que c'est possible que ça soit d'autres personnes qui jouent ce rôle-là, et ce ne sont pas des parents.

Mme Maccarone : Puis on parle de l'allègement dans le système, puis on sait qu'il y a des coûts, souvent, reliés, il y a des frais de notaire, etc. Est-ce que ça, c'est quelque chose qui devrait être pris en considération aussi, des subventions, mettons, que ce soit pour la transition mais surtout pour aider des familles qui en ont un grand besoin? C'était bien mentionné, 12 000 $ par année pour les familles naturelles. Est-ce que ça, c'est quelque chose qui devrait être pris en considération?

Mme Richard (Nathalie) : Oui, on l'avait... Oui, vas-y.

La Présidente (Mme Chassé) : En 15 secondes.

M. Turcotte (Dave) : Bien, c'est un enjeu important. On peut parler, entre autres, des évaluations. S'il faut aller au privé parce que c'est trop long, bien, c'est quand même quelques centaines de dollars. Il y a les frais juridiques. Même si, dans le projet de loi, on inclut l'aide juridique pour certains cas, il y a des frais judiciaires qui ne sont pas couverts par l'aide juridique. Et il y a quand même des familles qui ont un certain revenu, qui ne sont pas éligibles à l'aide juridique...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Turcotte (Dave) : ...mais ça ne fait pas en sorte qu'ils ne sont pas à précarité financière due à toutes les dépenses liées à l'état de leur enfant.

La Présidente (Mme Chassé) : Excellent. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends la commission jusqu'à cet après-midi, après les affaires courantes, vers 15 h 30. Bon lunch à tout le monde.

(Suspension de la séance à 11 h 17)

(Reprise à 15 h 48)

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour, tout le monde. On commence. Très bien. La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes de la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques ou le mode de vibration.

Et nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 18, la Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes.

Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées et la Chambre des notaires du Québec.

Comme la séance a commencé à 15 h 48, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit jusqu'à 17 h 48? C'est ça, Mme la secrétaire?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : 17 h 18. Consentement?

Des voix : Consentement.

 (15 h 50)

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Alors, je souhaite donc la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, il y aura un échange avec les membres de la commission. À une minute de la fin de votre exposé, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal afin de vous inviter à conclure. Commencez tout d'abord en vous présentant, puis poursuivez avec votre exposé.

Association québécoise de défense des droits des
personnes retraitées et préretraitées (AQDR)

Mme Gagnon (Judith) : Bonjour. Je suis Judith Gagnon, la présidente de l'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées. Je suis accompagnée par trois personnes. Vous avez vu, il y a une composition d'âges différents. Ça démontre que la situation des personnes vulnérables, c'est tout le Québec qui doit s'en préoccuper. À ma droite, c'est M. Carl Mullen, qui est agent de recherche en droit, à ma gauche, c'est M. Parent, Félix Parent, qui est en sciences politiques, et, à mon extrême gauche, c'est M. Jacques Pouliot, qui est psychoéducateur.

Alors, je vais débuter la présentation. L'association existe depuis 40 ans. On fait de la défense collective des droits. On exprime aussi, et ça, il faut que vous l'entendiez, la voix des aînés les plus vulnérables. Nous, on regroupe tous les aînés sans lieu d'appartenance. On a 42 sections à travers le Québec, avec des personnes très impliquées qui exercent une vigilance sociale, un accompagnement auprès des personnes vulnérables. On a une sensibilité aiguisée de ce qui se passe avec les aînés parce qu'on est sur le terrain.

Alors, je continue en vous disant qu'on a apprécié le projet de loi. On l'a vraiment apprécié. Ça prend un grand courage politique. Et ce qu'on apprécie aussi beaucoup, c'est que le projet de loi met l'accent sur la personne humaine dans toute sa grandeur et sa dignité. On est très contents de ça, parce qu'on ne veut pas ne voir que l'incapacité d'une personne. La personne est importante, et souvent il peut y avoir des incapacités, mais il faut regarder l'ensemble de la personne.

Pour faire le travail, on a regardé certaines choses. On voulait avoir une vision élargie et on est allés voir les régimes de protection renouvelés lors des dernières années. On est allés voir particulièrement le régime de protection de la France et de la Belgique pour voir un petit peu qu'est-ce qui se passait, parce qu'on a quand même certaines connexités avec le Québec. On a aussi considéré la réforme dans un ensemble, avec les capacités organisationnelles du réseau de la santé, du ministère de la Justice. Parce que c'est important de ne pas regarder une réforme toute seule mais la mettre en contexte, et c'est important. On a considéré l'être humain dans son ensemble, non seulement en fonction de son incapacité partielle et/ou permanente, et on dispose d'une expertise en accompagnement des aînés, parce qu'on le fait avec plusieurs AQDR, et on a développé une approche aussi avec les aînés vulnérables.

Et aussi un autre angle qu'on a prévu dans notre présentation, c'est d'atteindre un juste équilibre entre cette reconnaissance des droits et la protection des aînés vulnérables. Parce que, pour nous, c'est important de reconnaître les droits des personnes mais de les protéger.

Alors, vu qu'on n'a pas beaucoup de temps et qu'on présume que vous avez lu notre mémoire, on va tout de suite passer à nos recommandations, qui sont à la page 12 du mémoire, et on va être capables de vous répondre sur l'ensemble de nos recommandations. Inquiétez-vous pas, on est très bien préparés.

Alors, notre recommandation n° 1 : «Clarifier la modification apportée à l'article 304 du Code civil du Québec, qui ne mentionne aucunement l'assistant dans les interdictions d'agir pour les personnes morales, ce qui laisse croire qu'une personne morale pourrait devenir un assistant.» On l'a regardé, on a constaté ça.

«Permettre à des organismes communautaires, dont l'AQDR — on est un organisme de défense des droits, on est habitués, extrêmement aguerris au niveau de l'accompagnement — de déléguer des personnes aptes à exercer cette fonction dans le cas d'aînés isolés sans personne de référence.» Vous savez qu'au Québec comme partout ailleurs dans le monde, on est des sociétés où il y a des gens isolés, particulièrement les aînés. Il y a beaucoup d'approches qui ont été mises en place pour repérer, aider les aînés isolés, mais les changements apportés dans la famille laissent souvent des gens un petit peu hors des réseaux. Et il se trouve que nous, on est en lien très fort avec plusieurs aînés qui nous arrivent comme ça puis qui ne parlent pas à personne, qui sont véritablement isolés, et c'est fréquent.

«Clarifier le rôle — recommandation 3 — et les compétences requises pour la fonction d'assistant.» Très important pour nous, parce que, pour nous, l'assistant, ce n'est pas juste dire à quelqu'un «fais ça», c'est d'avoir une relation, avec la personne, d'accompagnement et puis lui expliquer pourquoi il faut faire ça, pas juste un acte. Ça, c'est très important pour nous, la manière de faire. «Prévoir un encadrement suffisant et un suivi adéquat» pour l'assistant, très important. On va pouvoir vous décrire plus tard.

Recommandation 4 : «Faire des liens avec le réseau de la santé et des services sociaux afin d'assurer une continuité de services pour l'aîné assisté qui demande un accompagnement.» Important aussi, parce que, quand tu demandes un accompagnement, souvent c'est sur un sujet donné, puis en arrière de ça, il y a un besoin. Ça, mes recommandations concernaient la mesure d'assistant.

L'autre groupe de recommandations, c'est la mesure de représentation temporaire. La recommandation 5 : «Préciser les actes qui peuvent faire l'objet de représentation temporaire, peut-être même d'identifier les sphères d'activité afin d'être en mesure de mesurer [les] impacts sur la vie [des personnes aînées représentées].» Parce que, là, on parle d'actes mais on ne parle pas de sphères d'activité.

Recommandation 6 : «Réviser la mesure afin de permettre une évaluation psychosociale en fonction de la nature de l'acte précis à poser et assurer un certain encadrement.»

Recommandation 7 : «Mettre en place des mécanismes qui vont permettre de prévenir les éventuels abus financiers qui pourraient survenir en lien avec cette représentation temporaire.» Il faut toujours penser qu'on est en lien aussi avec tout ce que le gouvernement du Québec a mis en place pour vaincre... ou aider les gens à ne pas être maltraités et abusés.

Les tutelles, les mesures remaniées. Recommandation 8 : «Prévoir des mécanismes interorganismes qui facilitent l'accès à des évaluations médicales et psychosociales dans le réseau public en priorité afin d'avoir des délais raisonnables et de ne pas engendrer des coûts supplémentaires pour les demandeurs.» Importants, les délais, l'accessibilité.

Recommandation 9 : «Prévoir la possibilité d'une pleine administration des biens du mandataire dans les cas les plus sévères afin d'éviter la prolifération des demandes à la cour.»

Recommandation 10 : «[Revoir] des mécanismes avec le ministère de la Justice pour maintenir un accès raisonnable à la Cour supérieure et éviter des délais indus.»

Les mandats de protection. Recommandation 11 : «Fixer des délais de réponses obligatoires aux professionnels, notamment banques, notaires, services d'impôt, afin de pouvoir rencontrer le délai de deux mois pour l'inventaire des biens.» On a pris ça avec la réforme française. On va vous en parler, d'ailleurs.

Recommandation 12 : «Enlever la modification proposée par le p.l. n° 18 à l'alinéa deux de l'article 29 de la loi sur la direction des personnes vulnérables, qui enlève la présence de témoins lorsque l'inventaire est fait sous seing privé qui n'est pas conforme aux règles de l'administration des biens d'autrui du Code civil.»

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.

Mme Gagnon (Judith) : Oui. Alors, je vais aborder tout de suite le financement de la réforme, je vais passer sous silence les deux autres.

Recommandation 15 : «Maintenir un financement adéquat de cette réforme afin qu'elle puisse être en mesure de rencontrer ses objectifs.»

Et la dernière est très importante : «Mettre en place des mesures d'évaluation de la performance quantitative et qualitative et prévoir un délai d'au plus cinq ans pour évaluer les impacts de cette réforme.»

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange en débutant avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous pour un bloc de 16 minutes.

• (16 heures) •

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous. Merci à vous tous d'être venus ici aujourd'hui pour nous faire part de vos recommandations, que vous venez de nous énumérer, qui sont présentes dans votre mémoire, qu'on a évidemment lu, dont on a pris connaissance. Ça suscite quelques questions chez moi, toujours avec l'objectif d'améliorer le projet de loi. Donc, je me lance tout de suite pour qu'on ait le maximum de temps.

Vous dites, à votre... c'est dans la recommandation n° 2 que vous faites : «Permettre à des organismes communautaires, dont l'AQDR — vous venez de le mentionner, là — de déléguer des personnes aptes à exercer cette fonction — on parle de la fonction d'assistant — dans le cas d'aînés isolés sans personne de référence.» Comment vous voyez ça, exactement? Parce que, vous l'avez aussi effleuré tantôt, il doit y avoir un lien, il doit quand même y avoir un lien entre l'assisté et l'assistant. C'est l'esprit, là, derrière cette mesure-là qu'on présente dans notre projet de loi, il doit y avoir ce lien-là, qui existe déjà. D'ailleurs, c'est une des questions qu'on va poser à l'éventuel assisté : Est-ce que c'est vous qui avez choisi votre assistant? Donc, il ne faut pas que ce soit générique, il ne faudrait pas qu'il y ait des assistants de carrière, là, par exemple, je donne une image. Donc, comment vous voyez ça? Parce que vous formulez quand même la recommandation que vous puissiez agir pour déléguer des gens.

Mme Gagnon (Judith) : Je vais vous expliquer ça avec un grand plaisir. L'ensemble des sections de l'AQDR ont des gens qui y travaillent, qui sont là et qui accueillent souvent des aînés. On rencontre des aînés qui nous font des demandes, qui nous demandent de l'aide. Ces aînés-là, s'ils viennent à nous, c'est parce qu'ils n'ont pas de réseau. Souvent, les gens n'ont pas de famille ou ne voient pas leur famille, et souvent, drôle d'affaire, là, je vais peut-être vous faire une petite révélation, il y a des gens qui ne parlent à personne des semaines de temps, qui sont complètement isolés, alors ils viennent nous voir et ils nous demandent des services, ils viennent en lien. Nous, on a des gens, dans nos sections de l'AQDR, ils viennent en lien et ils nous parlent, ils nous font des demandes. Et, à l'heure actuelle, souvent, on fait des demandes pour eux, on appelle au ministère de la Justice, Revenu Québec. On fait tout ça, mais il n'y aurait personne d'autre qui le ferait. Alors, même, on peut vous dire qu'on vient à avoir une relation personnalisée avec ces personnes-là parce que, souvent, il y en a qui reviennent tout le temps, mais ils n'auraient personne d'autre, là, je vous dis, comme assistant, ils ne parlent pas... ou ils sont tous seuls dans leur bulle. Alors, nous, on se dit qu'on a un processus, aussi, d'accompagnement à ces aînés-là et qu'on serait capables... pas de se déclarer assistants de carrière, mais, s'il y a des gens qui n'ont vraiment personne, on pourrait s'offrir et être capables d'être en mesure vraiment de leur aider.

M. Lacombe : Peut-être deux sous-questions, alors.

Mme Gagnon (Judith) : Allez-y.

M. Lacombe : La première... parce que la nuance est importante, quand même, dans la mécanique, dans comment on va le faire, là, sur l'épreuve du terrain, je vais dire ça. L'épreuve du terrain est importante, et il y a une nuance. Est-ce que, selon vous, ça passe d'abord par offrir un service à cette personne-là pour qu'il se bâtisse un lien de confiance avec une personne, que la personne devienne éventuellement assistant de la personne vulnérable dont vous parlez ou est-ce que, dans votre esprit, c'est : la personne cogne chez vous, du jour au lendemain, là, et vous lui donnez tout de suite un nom, le nom d'une personne qui pourrait agir comme assistant? Parce qu'il reste que, la personne qui va être désignée comme assistant, malgré toute la liste de filtres, il faut qu'il y ait quand même une relation, là, une relation qui est déjà établie. Est-ce que c'est comme ça que vous voyez ça ou pas?

Mme Gagnon (Judith) : Excellente question, M. Lacombe, je voulais vous le dire.

M. Lacombe : Merci.

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Gagnon (Judith) : Nous, on a des gens qui viennent régulièrement à nos bureaux, dans les sections, on en a beaucoup et puis on développe une relation de confiance. On ne voudrait pas faire le match comme ça, on voudrait respecter l'esprit du projet de loi, avec...

M. Lacombe : Bien, c'est parfait, c'est ce que je souhaitais entendre. Je suis content de voir qu'on voit les choses de la même façon, d'accord.

Ensuite... et je vais poursuivre, parce que cette notion, cette idée d'assistant, elle est centrale, hein, dans le projet de loi, puis je voudrais vous poser une autre question là-dessus. C'est à la page 12 de votre mémoire, lorsque vous faites vos recommandations, vous recommandez de «clarifier le rôle et les compétences requises pour la fonction d'assistant». Là, ça suscite peut-être chez moi deux ou trois questions. Je me demande, d'abord... Faisons le contexte. Il y a des gens qui, on pourrait dire, agissent déjà, aujourd'hui même, à l'heure où on se parle, comme assistants, là, informellement, en ce sens où je peux donner un coup de main à mon père, à ma mère, mais je n'ai pas, souvent, la légitimité de le faire. Donc, on amène une certaine légitimité, mais le principe, là, sur le terrain, existe un peu déjà sans cette légitimité-là, puis les gens s'en remettent à des personnes de confiance pour faire ça, donc on ne vient pas tester la compétence.

Et, l'autre chose, bien, je pourrais vous donner l'exemple aussi, là, du tuteur, où il n'y a pas de compétences particulières qui sont recherchées, puis, j'ajouterais peut-être, pour terminer, d'autant plus que l'assistant n'a pas de pouvoirs en tant que tel. On ne lui délègue pas des pouvoirs de décision, l'assisté garde tous ses pouvoirs, continue d'exercer ses droits. Donc, dans cet environnement-là, comment vous positionnez votre recommandation? Qu'est-ce que vous pourriez me dire de plus?

Mme Gagnon (Judith) : Bien, je vais vous dire quelque chose, ça, c'est sûr. Parce que, nous, là, ça fait des années qu'on est auprès des aînés vulnérables, ils nous font des demandes. Ils nous demandent de l'assistance sur une globalité de choses, vous ne pouvez pas savoir comment, allant de perte de permis de conduire, allant jusqu'à Revenu Québec, allant jusqu'à toutes sortes d'affaires. Ils nous demandent de leur aider; pas de prendre la décision, mais de leur aider. Mais c'est difficile, ça demande une capacité et des connaissances, puis pour arriver, des fois, à comprendre très bien ce qu'ils veulent, il faut répéter, les questionner pour être sûrs que c'est bien ça qu'ils veulent. Ça ne se fait pas... ce n'est pas : Clic, où ils nous posent la question. Des fois, c'est une question qui en amène une autre, qui fait que c'est une véritable autre question qui s'exprime qui est leur réel besoin. Ça fait que c'est pour ça qu'on parle de... on ne demande pas un diplôme, mais de compétences, parce que des fois c'est difficile. Ça ne se fait pas aussi facilement que ça, de faire un accompagnement avec les gens. Ça demande quelque chose, puis des fois la première demande n'est pas le réel besoin de la personne. On le définit après, puis ça demande une clarification, et ça, c'est du temps puis c'est une certaine compétence humaine.

M. Lacombe : Je vais pousser un petit peu plus loin, parce que la notion, encore une fois, de proximité, de lien de confiance est importante. Dans le cas d'un père ou d'une mère de famille qui voudrait se faire assister de son fils ou de sa fille, qui a... évidemment, vous l'avez dit, je ne pense pas que c'est ce que vous suggérez, mais qui n'a pas de diplôme universitaire, qui n'est pas comptable ou qui n'a pas nécessairement de grandes qualifications mais avec qui il y a un lien de confiance qui s'est bâti... Le voisin pourrait être plus compétent, mais en même temps le lien de confiance, ce n'est pas avec le voisin que cette personne-là en besoin l'a, c'est avec son fils ou sa fille, par exemple. Est-ce que ça, ça ne devrait pas primer, d'autant plus que, pour tout le reste, par exemple pour les tuteurs, on ne le demande pas non plus? Puis, je dirais, d'autant plus qu'on a plusieurs... tu sais, je parlais des filtres tantôt, tu sais, suivi périodique du Curateur public auprès de la personne et de l'assistant, possibilité pour la personne de mettre fin à l'assistance en tout temps, le pouvoir d'enquête du Curateur public, la possibilité de demander la fin de la reconnaissance s'il y a une crainte sérieuse de préjudice pour le majeur. Donc, si on se trompe, par exemple, et que, là, on s'aperçoit, de toutes parts, que ça ne fonctionne pas, ce n'est pas... on peut revenir en arrière, là. Considérant ça, vous, est-ce que vous jugez quand même qu'on devrait évaluer la compétence?

Mme Gagnon (Judith) : Bien, nous, on a mis ça parce que... en vertu de notre expérience qu'on a vécue, puis c'est ça... Puis ce que vous avez dit est très bien aussi. Le lien de confiance est, avant tout, très important entre les humains, puis ça, le père, les enfants, tout ça, on est parfaitement en accord avec ça. Mais, pour les gens qui n'ont pas personne, qui vont rencontrer d'autres personnes pour se faire accompagner, bien, ça prend... Nous, on considère... «Compétence», ce n'est peut-être pas le bon mot, mais ça prend, oui, une petite compétence, ça prend une façon de faire.

M. Lacombe : Bien, en fait, je vais résumer, puis peut-être qu'on va... peut-être que, finalement, on dit la même chose, là. J'ai un petit doute qu'on dit la même chose. Puis je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais est-ce que votre propos puis votre préoccupation, ce n'est pas davantage qu'on s'assure que ça aille bien entre les deux, qu'on ne met pas n'importe qui là et que la personne qui effectue cette tâche-là d'assistant ne mette pas en péril en donnant, je ne sais pas, moi, des conseils malavisés ou qui n'ont pas de bon sens? Est-ce que c'est plutôt ça?

Mme Gagnon (Judith) : C'est ça, vous l'avez bien défini.

M. Lacombe : O.K. Donc, si on prend les moyens pour s'assurer qu'il y a suffisamment de mesures en place pour qu'on puisse garder une certaine vigilance, entre autres dans le processus de nomination, est-ce que ça, ça vous rassurerait?

Mme Gagnon (Judith) : Ça nous rassurerait. Parce qu'on a vu des gens qui avaient eu de l'accompagnement puis des conseils non avisés, et puis après c'était difficile pour ces personnes-là. C'est pour ça qu'on en a fait la mention précise dans une de nos recommandations.

M. Lacombe : Bien, d'accord. Mais en fait je pense qu'on dit la même chose parce que, quand on regarde tout ça, je pense qu'on arrive à la même conclusion, je pense qu'on arrive au même résultat. Si on tient compte de tout ce qu'on met en place, tout ce qu'on va mettre en place si le projet de loi est adopté, pour ce qui encadre la nomination d'un assistant, je pense humblement, là, que ça pourrait répondre à vos préoccupations. On aura l'occasion, peut-être, d'en reparler.

• (16 h 10) •

Mme Gagnon (Judith) : Veux-tu répondre, Jacques? Veux-tu continuer? Parce que M. Pouliot est psychoéducateur.

M. Pouliot (Jacques) : Ce qui est important pour nous, c'est vraiment que les personnes qui vont agir comme assistants aillent vraiment chercher qu'est-ce que la personne veut avoir. Dans un premier temps... et, lorsqu'on... moi, j'appelle ça «clarification de mandat» dans mon rôle d'intervenant, c'est : avant de se mettre à agir, il faut aller chercher vraiment ce qui est en arrière des choses. Puis, les gens, des fois, dans leurs mots, ce n'est pas si clair que ça, de savoir exactement qu'est-ce qu'ils veulent avoir, c'est après plusieurs questions puis après avoir échangé qu'on voit les choses. C'est pour ça que le rôle d'assistant, au départ, ce n'est pas juste une personne qui vient s'asseoir, puis : C'est quoi que tu as besoin? La personne te dit une première affaire puis... Mais pourquoi tu as besoin de ça?, puis etc. Mais, après ça, tu vas être capable de répondre vraiment à ce qu'elle veut avoir. Mais, si tu restes juste sur la première impression, il y a des personnes qui vont avoir des accompagnements qui vont être à côté de qu'est-ce qu'ils vont avoir comme attentes et ils vont avoir de la misère, après ça, là, à revenir aussi. C'est pour ça qu'on dit : Ça prend une certaine compétence, une certaine façon de comprendre le rôle d'assistant, puis, les gens, il faut leur expliquer, il faut les accompagner un petit peu pour qu'ils comprennent bien le rôle dans lequel ils vont avoir à jouer. C'est juste ce qu'on dit, nous.

M. Lacombe : D'accord, on en prend bonne note. Et, si Mme la Présidente le veut bien, moi, je céderais à mon adjointe parlementaire, la députée de Bellechasse.

La Présidente (Mme Chassé) : Ah! c'est votre adjointe parlementaire...

M. Lacombe : Bien, bien sûr.

La Présidente (Mme Chassé) : ...donc, à qui je donne la parole, la députée de Bellechasse. Vous avez 3 min 30 s.

Mme Lachance : Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Gagnon, merci, messieurs, d'être là. J'ai été contente, tantôt, de vous entendre reconnaître que le projet de loi mettait l'emphase sur la personne dans son entièreté. Ça m'a représenté à quel point c'est un projet de loi encore plus important.

J'aimerais qu'on parle ensemble. Ce que j'aimerais entendre, j'aimerais parler du bilan puis de la reddition de comptes. Ce que j'aimerais savoir, c'est votre opinion. Est-ce que vous auriez des commentaires à formuler sur le bilan et la reddition de comptes?

Mme Gagnon (Judith) : Vous voulez parler de l'inventaire?

Mme Lachance : Oui.

Mme Gagnon (Judith) : L'inventaire qui se situe au niveau des tutelles?

Mme Lachance : Oui.

Mme Gagnon (Judith) : Ah! je vais vous en parler et puis, si, à un moment donné, je suis en manque d'idées, je vais me référer à mes deux... O.K., alors, le bilan... Les deux mois, vous voulez dire, pour l'inventaire?

Mme Lachance : Bien, en fait, ce que je veux savoir, c'est votre opinion en ce qui a trait à l'obligation des mandataires de faire la reddition de comptes.

Mme Gagnon (Judith) : Très important, de faire l'inventaire, très important. Pour nous, là, c'est majeur. Puis on est allés voir en France qu'est-ce qui se passait aussi, parce qu'on a regardé la réforme française. On s'est vraiment penché sur la réforme française, où eux autres, ils demandaient de faire ça à l'intérieur de trois mois. Et on a regardé aussi l'évaluation de la réforme qui a été faite dix ans après la réforme, et puis on s'est aperçu que ça n'avait pas vraiment marché en France, parce que les réponses des professionnels étaient en retard. C'est pour ça qu'on fait une recommandation, la recommandation 11, de fixer des délais de réponse obligatoires à certains professionnels, parce qu'en France c'est trois mois, mais ils n'avaient pas fixé des délais, puis l'inventaire, dans le délai de trois mois, ça n'allait pas, je veux dire, parce qu'il n'y avait pas eu de délais assez clairs là-dessus. C'est pour ça qu'on le mentionne et puis, vous allez le voir dans notre mémoire, on mentionne pourquoi.

Puis il y a l'autre élément qui est quand même important, à notre recommandation 12, c'est : «Enlever la modification proposée [...] à l'alinéa deux de l'article 29 [...] qui enlève la présence de témoins lorsque l'inventaire est fait sous seing privé qui n'est pas conforme aux règles de l'administration des biens d'autrui du Code civil.» On a trouvé ça puis on jugeait bon de le mentionner.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste moins d'une minute à l'échange.

Mme Lachance : Et, de ce fait, si je comprends bien, vous êtes favorables à l'inventaire des biens.

Mme Gagnon (Judith) : Oui, on est favorables, et c'est nécessaire, d'avoir un inventaire.

Mme Lachance : Merci. J'aimerais aussi vous entendre sur la curatelle. Actuellement, bien, il y a des enjeux particuliers qui sont liés aux personnes qui vivent sous le régime de curatelle. Selon vous, ce sera quoi, l'impact de l'implantation du régime universel de tutelle dans la vie de ces personnes-là?

Mme Gagnon (Judith) : À l'heure actuelle?

Mme Lachance : Oui, qui vivent actuellement sur la curatelle.

Mme Gagnon (Judith) : Bien là, tout simplement, c'est les nouvelles règles qui vont s'appliquer à eux, et puis aussi peut-être qu'ils ne s'en rendront pas totalement compte. Mais, c'est drôle, il ne faut pas présumer de ça non plus.

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

Mme Gagnon (Judith) : Ils vont se voir appliquer les nouvelles règles, et puis je considère que c'est une bonne chose aussi, parce que c'était gros, la curatelle, pour des gens, ils perdaient totalement leurs droits.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. Je vous remercie. Merci à la députée de Bellechasse. Je cède maintenant la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Je veux juste continuer un peu les échanges que vous avez eus avec le ministre, quand on parle de définir le rôle, alors, votre recommandation, je crois, numéro 3. Dès que ça sera défini, dès que ça sera plus clarifié, j'ose croire qu'on va pouvoir trouver une solution pour ceci. Que pensez-vous qu'on aurait besoin, comme formation, d'abord? Maintenant que ça va être défini, est-ce que ces gens-là auront besoin d'un accompagnement? Maintenant que le rôle est défini, on parle de gestion de changement qui est quand même majeur pour le réseau, alors j'aimerais vous faire entendre là-dessus, qu'est-ce qu'on a besoin pour gérer ce changement puis qu'est-ce qu'on a besoin comme formation non seulement pour le public, mais aussi pour... Que ça soit santé et services sociaux, que ça soit en milieu de l'éducation, je pense qu'on a beaucoup de choses à faire. On parle d'une gestion de changement de peut-être 18 à 24 mois. Peut-être, ça peut être plus long que ça, parce que c'est quelque chose de majeur qui nous attend.

Mme Gagnon (Judith) : C'est une très bonne question aussi. On change de paradigme totalement et puis on change aussi... Si on change de paradigme, on change nos façons de faire puis on change nos lunettes. Au lieu d'avoir des lunettes noires, on en a des bleues, je donne un exemple, puis ça veut dire qu'on rentre en relation avec la personne d'une façon différente. Et puis ça, c'est majeur, ça fait appel à des changements de culture puis des façons de faire dans les opérations des différents ministères et organismes. Et ça, ce changement-là, il faut qu'il soit accompagné. Parce que, souvent, on répond machinalement aux gens avec qu'est-ce qu'on avait comme lois, comme réglementation, mais là on veut devenir plus humains, on veut être capables de donner toute la place, la grandeur à un être humain, puis il ne faut pas que les gens répondent de la même manière ou fassent la même façon. Il faut les accompagner dans le changement puis être capables de leur montrer comment interagir avec les personnes, parce qu'il va falloir que le contact se fasse, là, le changement se fasse, et ça, c'est majeur. Parce qu'on aura beau faire la plus belle réforme, si, dans les opérations, la mise en place, les gens ne changent pas d'attitude et qu'ils ne comprennent pas qu'on est tous des êtres humains, avec... tu sais, on part de la même place et on doit être solidaires et collectifs, ça ne marchera pas. Et il faut mettre beaucoup de temps pour ça, et c'est vraiment majeur pour nous.

Mme Maccarone : Vous avez mentionné, dans votre présentation, recommandation n° 11 : «Fixer des délais de réponses obligatoires aux professionnels, notamment banques, notaires, services d'impôt, afin de pouvoir rencontrer le délai de deux mois pour l'inventaire des biens.» Vous avez mentionné que vous allez aller plus en détail. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus. C'est quelque chose que, pour moi, j'aimerais avoir une clarification.

Mme Gagnon (Judith) : Je vais passer la parole à M. Félix Parent, qui a fait l'étude, là, des autres réformes.

• (16 h 20) •

M. Parent (Félix) : Bien, je pense que, en fait, la clarification, là, c'était... elle voulait parler de qu'est-ce qu'on avait eu dans la réforme en France puis sur l'évaluation qu'il y avait eu. Cette réforme-là n'est pas encore comme acceptée de... toutes les recommandations qui ont été faites dans les rapports, évidemment. C'est un rapport interministériel qui a été publié en 2017, donc il y a encore beaucoup d'études.

Quand ils parlaient de ça, c'est... en France, il y a comme plus de... comment je dirais ça, il y a plus d'importance, sur l'inventaire, qui est mise. Il y a les meubles, il y a les propriétés immobilières qui sont plus nombreuses qu'au Québec parce qu'il y a plus de domaines, etc. Donc, ce qu'ils proposaient comme réforme, c'est de rajouter un passage, un inventaire provisoire par les officiers de la cour des tutelles pour vérifier rapidement... faire un inventaire provisoire, donner une idée puis, après ça, rallonger les délais pour les personnes qui feraient l'inventaire, les mandataires, sur un six mois. Ils parlaient, dans le fond, de donner délai parce qu'il y a beaucoup plus de monde, aussi, en France, la population est vastement supérieure à celle au Québec. Donc, ce qu'ils proposaient, c'était vraiment ça, dans la réforme, c'était vraiment superficiel, en disant : On devrait mettre des délais pour les banques, parce que c'est le traitement de l'information qui prend du temps, le traitement des demandes en cour prend du temps.

Donc, c'est toute une question d'huiler le système pour qu'il fonctionne mieux. Puis je pense que ce qu'on faisait comme référence, c'était par rapport au nombre de ressources qu'on donne au Directeur de la protection des personnes vulnérables puis au ministère d'évaluer puis de faire avancer le système avec, mettons, le 14,8 millions qu'ils ont parlé de donner pour l'implantation de cette réforme-là, qu'elle parlait. Donc, c'est vraiment... c'est juste une affaire d'huiler le système pour ne pas que ça bloque, parce que, si ça bloque, c'est là que ça va prendre du temps, puis là on va dépasser les délais de deux mois, qui ne sont pas si élevés que ça si on parle de faire un inventaire qui demande à passer par beaucoup de chemins. Donc, pour ne pas dépasser ça puis ne pas mettre les gens dans l'embarras, comme, d'avoir dépassé les délais puis d'avoir à traiter ça, il faut juste s'assurer que le système soit bien huilé. Je pense que c'est ça, ultimement, qu'on voulait dire, à l'AQDR.

Mme Maccarone : Merci. Je reviens à votre recommandation n° 7 : «Mettre en place des mécanismes qui vont permettre de prévenir les éventuels abus financiers qui pourraient survenir en lien avec cette représentation temporaire.» Pouvez-vous nous donner un exemple de ce mécanisme? Et j'aimerais aussi vous faire entendre par rapport au secret professionnel, parce qu'on a entendu l'Ordre des comptables, qui nous a dit que, peut-être, ça serait une recommandation de prendre en compte ici, en cette commission.

Mme Gagnon (Judith) : Écoutez, vous savez, les mesures de représentation temporaire, là, ce n'est pas juste l'assistance, là, c'est d'agir et intervenir. Puis, vous savez, le Québec est rendu loin au niveau des politiques pour contrer l'abus et la maltraitance. Et puis il y a même des... l'AMF, l'Autorité des marchés financiers, a sorti quelque chose aussi. Il y a beaucoup d'abus, il y a beaucoup de choses, et puis il ne faudrait pas... Il faudrait qu'on mette en place... je ne sais pas comment, là, on n'a pas pu tout inventorier ça parce qu'on n'avait peut-être pas tous les moyens et tout le temps requis, mais quelque chose qui fasse qu'on n'ait pas... on évite, on prévienne les cas d'abus et maltraitance. Parce que, là, c'est un acte posé pour la personne. Ça, c'est important, là. La levée du secret professionnel, ça peut être d'intérêt, si on vous l'a dit, mais il peut y avoir d'autres choses aussi. Mais nous, on n'est pas allés dans le fin détail de tous les mécanismes. Mais c'est important, parce qu'il faut être cohérents dans toutes les choses qu'on met en place au Québec. Et puis nous, on a dit non à l'abus et la maltraitance, alors il ne faudrait pas qu'à un moment donné il y ait un autre endroit où ça peut survenir. Vous comprenez notre façon de penser? La cohérence avant toute chose.

Mme Maccarone : O.K. Je présume que j'ai le temps juste pour une dernière...

La Présidente (Mme Chassé) : 2 min 30 s.

Mme Maccarone : 2 min 30 s. Je demande souvent des questions par rapport à la procuration, parce que c'est quelque chose de prendre en compte aujourd'hui, c'est un outil qu'on utilise actuellement, mais, avec l'éventuelle — je vais être optimiste, là — adoption de ce projet de loi, c'est sûr, on a beaucoup d'autres mesures qui vont être disponibles pour les personnes en situation de vulnérabilité ou les personnes vulnérables. Est-ce que ça, c'est quelque chose, aussi, qu'il faudrait donner une éducation envers notre population? Parce que la procuration, c'est quand même quelque chose qui n'est souvent pas clair et qu'on parle... on peut avoir un abus des droits civils des personnes qui sont prises en charge.

Mme Gagnon (Judith) : Je vais tenter de répondre à votre question le mieux possible. Nous, mon organisme, l'AQDR, on a toujours pensé — et je ne vous lance pas une vérité comme ça en l'air — qu'on était mûr, parce qu'on est novateur, le Québec, pour une mobilisation sociale en faveur des personnes vulnérables pour ne pas faire de différence puis amener une société plus juste, plus consciente, de comprendre que, dans la vie... j'ai toujours dit que, la vulnérabilité, on ne l'a pas maintenant mais on peut l'avoir demain, comprendre que, dans la vie, tout peut arriver à un certain moment donné. Mais il faut rendre conscient, le monde, de ça, parce que la vulnérabilité nous guette à tout moment. Qu'on soit jeune, qu'on soit vieux, tout peut arriver, mais il faut être capables, tu sais, de regarder tout ça et puis... pour éviter des gestes d'abus et de maltraitance. On est capables de le faire, je demeure positive, et je trouve encore que cette réforme-là est très excellente. Mais il faut mettre en place tout ça parce que c'est important. Et le rôle du Directeur de la protection des personnes vulnérables va être d'autant plus majeur qu'il va falloir qu'il nous donne ce visage-là et le rende proche des humains, parce qu'il faut que ça se fasse aussi.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 20 secondes.

Mme Maccarone : Incluant la protection des droits de... et le rôle des proches aidants, je présume?

Mme Gagnon (Judith) : Exactement, madame.

Mme Maccarone : Oui, cela est très important. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous. Je cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Merci. J'ai un peu moins de temps, ça fait que je vais y aller avec juste une question. Vous avez parlé d'un changement de paradigme pour décrire le projet de loi. C'est comme ça que je le vois aussi. Puis j'entends bien quand vous dites que ça va demander tout un changement de culture, notamment dans le réseau de la santé. C'est quoi, vos attentes, par rapport au soutien du gouvernement, pour faciliter ce changement de culture là?

Mme Gagnon (Judith) : Bien, nous, on s'est dit que c'est une politique horizontale, quasiment, le changement de la curatelle, la vision de la curatelle, puis c'est quelque chose qui demande une vision globale. Alors, il faudrait qu'il y ait une mise en place, avec les ministères concernés ou les réseaux concernés, de quelque chose pour qu'on se parle de ça et puis qu'on soit à même de supporter cette réforme-là comme de supporter les autres réformes. Parce que nous, on regarde tout ça, on trouve ça excellent, mais on regarde l'ampleur de la tâche et on regarde les autres réformes, on regarde la société, mais il faut qu'il y ait de la concertation pour qu'on puisse aller de l'avant puis que les choses soient bénéfiques.

Mme Labrie : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : O.K.? Alors, je vous remercie. Je cède maintenant la parole à la députée de Joliette pour un bloc de 2 min 40 s.

Mme Hivon : Bien, justement, je voulais vous demander ce qui vous fait craindre que ce ne soit pas le cas. Parce que vous en faites une recommandation spécifique, s'assurer que les moyens vont être en place pour maximiser le succès de la réforme, donc qu'est-ce qui vous fait craindre que ce ne sera pas le cas?

Mme Gagnon (Judith) : Ce n'est pas vraiment une crainte. Je vous dirais qu'on fait confiance aux gens, mais on leur répète pareil, parce qu'on a un rôle de défense des droits puis on serait vraiment malvenus de ne rien dire.

Mme Hivon : O.K., c'est beau, c'est beau.

Mme Gagnon (Judith) : Mais c'est que j'ai remarqué, avec l'âge, avec le temps — parce que je travaillais au gouvernement du Québec, moi, avant d'être à l'AQDR — qu'on a mis en place des excellentes réformes, mais souvent une réforme n'en attendait pas l'autre, puis qu'à un moment donné on n'avait pas fini une réforme, il en venait une autre, il en venait une autre, puis qu'on ne se comprenait plus, et qu'à un moment donné on n'avait pas le produit désiré. Alors, on s'est posé vraiment... on a décidé de le dire, parce que c'est important.

Mme Hivon : C'est bon, je vous suis parfaitement. Donc, trop fort ne casse pas, ça fait que vous vous êtes dit : On va le redire.

Mme Gagnon (Judith) : Oui.

Mme Hivon : Donc, je veux vous ramener à votre recommandation 3, qui est de clarifier le rôle, les compétences requises, prévoir un encadrement suffisant et un suivi adéquat, vous en avez discuté rapidement tantôt. Qu'est-ce qui manque, selon vous, en ce moment, dans le projet de loi pour vous rassurer par rapport à cet encadrement-là, s'assurer que c'est suffisant, que le suivi va se faire correctement? Est-ce que, encore une fois, c'est parce que vous voulez juste nous prévenir ou il y a des éléments qui vous semblent concrètement manquants par rapport à ça?

Mme Gagnon (Judith) : Bien, écoutez, c'est une nouvelle fonction, hein, ça n'existait pas. Ce qui est neuf, on ne sait pas qu'est-ce que c'est. On part de quelque chose puis on s'est dit... Par notre expérience, on s'est aperçu — M. Pouliot vous en parlé — que, même assister quelqu'un, c'est difficile parce que la première demande de la personne n'est pas nécessairement la bonne, parce qu'il n'a pas saisi qu'est-ce qu'il avait vraiment besoin. Puis on ne voudrait pas que... on voudrait que la fonction d'assistance soit une fonction d'accompagnement véritable, qu'autrement dit, si moi, je vais voir quelqu'un, je demande une assistance pour quelque chose, puis je lui dis juste une petite affaire, qu'il me sort une bulle de ma tête, puis ça, c'est mon besoin, mais ce n'est pas vraiment quelque chose qui est correct...

Mme Hivon : Il me reste sept secondes. Vous voudriez que ce soit comme plus clair, les modalités plus précises dans la loi, tout ça, plus encadré.

Mme Gagnon (Judith) : Oui.

Mme Hivon : O.K. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends momentanément les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Bon retour à vous.

(Suspension de la séance à 16 h 30)

(Reprise à 16 h 33)

La Présidente (Mme Chassé) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Chambre des notaires du Québec. Vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et, à une minute de la fin, je vais vous faire un signe de la main ou un signe vocal pour vous inviter à conclure, puis ensuite on va procéder à une période d'échange avec les membres de la commission. Commencez tout d'abord en vous présentant puis poursuivez avec votre exposé.

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

M. Bibeau (François) : Merci beaucoup, Mme la Présidente de la commission, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission. Alors, tout d'abord, oui, permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Alors, Me Anne-Marie Lachapelle, notaire pratiquant à Joliette, est spécialisée dans le domaine du droit des personnes et particulièrement en matière d'ouverture de régimes de protection depuis plus de 15 ans maintenant. Me Lachapelle est régulièrement invitée à donner des conférences et des formations auprès de notaires, de travailleurs sociaux et de divers organismes à travers le Québec relativement à la protection des personnes en situation de vulnérabilité. Comme je lui disais, c'est elle qui fait toute la crédibilité de cette table. Me Nicolas Handfield, notaire, chef des services juridiques et des relations institutionnelles à la Chambre des notaires du Québec, Me Antoine Fafard, notaire à la recherche, qui est le juriste responsable du dossier à la Chambre des notaires. Et enfin je me présente, votre humble serviteur, François Bibeau. Naturellement, je suis notaire et président de la Chambre des notaires du Québec.

Tout d'abord, je vous remercie d'avoir convié la Chambre des notaires du Québec à venir exposer ses recommandations sur le projet de loi n° 18. Les notaires sont reconnus par la population à titre de juristes de proximité. Oeuvrant dans le but de prévenir les conflits et les situations... les situations d'abus, dis-je, ils ont développé une véritable expertise en matière de protection des personnes en situation de vulnérabilité et bénéficient de la confiance du public lorsque vient le temps de conseiller ces mêmes personnes et mettre en place des mesures afin qu'elles soient mieux protégées. Donc, la chambre est plus qu'enthousiaste à l'idée de participer à la présente consultation particulière, le projet de loi n° 18 venant changer considérablement la pratique notariale en opérant une véritable réforme du droit des personnes au Québec.

D'entrée de jeu, j'affirme devant vous que la chambre appuie le projet de loi dans son objectif qui vise à trouver un équilibre entre une meilleure protection des personnes en situation de vulnérabilité et le respect de leur autonomie. Le projet de loi est donc conforme en ce sens à la Convention relative aux droits de personnes handicapées, ce que la chambre ne peut que saluer.

La mission de l'ordre étant de veiller à la protection du public, le mémoire qu'elle a déposé émet des recommandations dans le but de bonifier, en toute collaboration avec les autorités concernées, les dispositions prévues au projet de loi. Pour ce faire, la chambre a analysé le p.l. n° 18 selon quatre grands axes qui, selon elle, doivent impérativement transparaître dans la réforme envisagée. Ces axes sont l'accès à la justice, la lutte contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité, le respect de l'autonomie, de la volonté et l'importance de mener une réforme humaine mettant la personne au centre des préoccupations. La chambre émet donc 25 recommandations afin d'assurer que les mesures proposées sont accessibles... seront accessibles, dis-je, pour les citoyens et viendront régler des problématiques actuellement vécues par ces derniers.

Toutefois, je souhaite aujourd'hui attirer l'attention des membres de la commission sur deux éléments au coeur du p.l. n° 18, soit l'assistant au majeur et le mandat de protection. Le projet de loi introduit un élément de droit nouveau, l'assistant au majeur. Cette mesure permettra d'officialiser le statut d'un membre de la famille ou d'un proche qui accompagne une personne encore apte juridiquement mais qui nécessite de l'aide afin de prendre ses propres décisions. La chambre salue cette nouvelle mesure, car elle permettra de maintenir l'autonomie du majeur, c'est ce qui est important, en évitant que ce dernier délègue l'exercice de ses droits civils à une personne nommée pour le représenter, ce qui arrive trop fréquemment. Nous faisons donc le souhait que les citoyens ayant besoin d'accompagnement puissent véritablement avoir accès à la mesure d'assistance. La chambre rappelle que le régime de conseiller au majeur, abrogé par le projet de loi, était peu utilisé en raison de sa mise en place complexe, qui devait se faire, je vous le rappelle, par voie judiciaire. Or, avec l'assistant au majeur, le législateur fait le pari que la voie administrative proposée permettra à un plus grand nombre de citoyens de se prévaloir de cette mesure. Il est impératif que ce pari soit relevé. Autrement, la chambre craint que les personnes désirant être assistées continuent de se tourner vers la procuration, un instrument juridique simple et à la portée de tous mais qui, malheureusement, est trop souvent utilisé en cas d'abus et de maltraitance financière.

Afin de permettre un accès élargi à la nouvelle mesure d'assistance au majeur et ainsi freiner le recours à la procuration, la chambre estime que des options, en plus de celles envisagées par le projet de loi, doivent être proposées au public. En effet, nous croyons que les notaires pourraient contribuer au succès de cette mesure si le législateur leur permettait de procéder, eux aussi, à la nomination de l'assistant au majeur. Présent sur l'ensemble du territoire québécois et bénéficiant de la confiance du public, particulièrement lorsqu'il est question de la protection des personnes en situation de vulnérabilité, le notaire est aussi, de par ses fonctions, officier public. Il doit ainsi agir en toute impartialité et veiller à ce que l'intérêt des parties soit respecté. Cet élément représente un atout de taille lorsque vient le temps d'assurer des protections des personnes. Le notaire pourrait ainsi guider le majeur qui se présente devant lui pour nommer un assistant et déterminer si cette mesure est bel et bien la plus adéquate à ses besoins. Cet accompagnement permettrait au majeur de bénéficier de protection en fonction de son état et de sa situation, ce qui correspond à l'esprit même du projet de loi n° 18 et de la convention. Les notaires jouent déjà un rôle majeur dans les dossiers de procédures non contentieuses visant les personnes en situation de vulnérabilité, et près de la moitié des 3 945 notaires inscrits actuellement au tableau de l'ordre, présents dans toutes les régions du Québec, détiennent l'accréditation nécessaire afin de pouvoir effectuer ce type de procédure. La chambre croit donc qu'en donnant une option supplémentaire au justiciable désirant se prévaloir de la mesure d'assistance, le législateur viendrait nécessairement la rendre plus accessible, ce qui irait dans l'intérêt de tous, autant des autorités gouvernementales qui souhaitent que la mesure d'assistance soit utilisée que des citoyens qui éprouvent le besoin d'être assistés.

• (16 h 40) •

Le projet de loi vient aussi toucher au mandat de protection, document juridique qui cadre parfaitement avec la notion de respect de l'autonomie et le respect de la volonté du majeur, car il permet à une personne de consigner sa volonté dans un écrit, lequel devra être appliqué une fois l'inaptitude constatée par le tribunal. En ce sens, la chambre estime que les mesures venant mieux encadrer le mandat de protection qui sont prévues dans le p.l. n° 18 sont bienvenues. Elle applaudit donc l'obligation pour le mandataire de produire une reddition de comptes afin de démontrer sa bonne gestion des biens du mandant ainsi que l'obligation, toujours pour le mandataire, de produire un inventaire des biens du mandant dans les 60 jours de l'homologation du mandat de protection.

Nous croyons toutefois que le projet de loi, dans sa mouture actuelle, comporte une certaine incohérence. En effet, le projet de loi n° 18 prévoit qu'il sera désormais possible pour le tuteur d'avoir la pleine administration... c'est-à-dire impossible pour le tuteur d'avoir la pleine administration des biens du mandant protégé. Toutefois, il sera toujours possible de donner le pouvoir de pleine administration au mandataire dans un mandat de protection. À titre d'exemple, pour illustrer, là, efficacement la différence entre la pleine administration et la simple administration, disons qu'une personne aurait la simple administration des biens de son pupille sur un immeuble à logements, par exemple, il pourrait donc agir pour percevoir les loyers, ce qui fait partie de la simple administration. Il pourrait aussi effectuer des réparations mineures à cet immeuble-là, mais il ne pourrait vendre ou hypothéquer cet immeuble-là sans autorisation de la cour, qui requiert nécessairement la pleine administration du bien d'autrui. Or, le projet de loi ne vient pas toucher à la forme du mandat de protection, qui peut être fait de deux façons, soit en forme notariée, soit devant témoin. La chambre voit dans la réalisation d'un mandat de protection devant témoin, et donc sans l'accompagnement d'un conseiller juridique, un risque pour la sécurité juridique du mandant qui donnerait des pouvoirs de pleine administration à son mandataire sans connaître les conséquences et les différences que cela amène. Donc, il découle de cette situation une grande problématique. Elle croit donc, à l'exemple d'autres pays, que les pouvoirs de pleine administration devraient seulement être donnés au terme d'un mandat de protection notarié ou devant témoin mais assisté par un notaire ou un avocat, auquel cas les conseils juridiques pertinents et nécessaires à la protection du mandant auraient été donnés. Autrement, on permet aux citoyens de renoncer à la modulation de leurs droits et, par le fait même, à leur autonomie résiduelle, ce qui contrevient à l'esprit même du projet de loi et de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Je m'arrête là, en espérant que j'ai su illustrer clairement la position de la Chambre des notaires du Québec sur ces deux éléments du projet de loi, et je vous invite, mesdames et messieurs, à échanger sur le sujet. Merci de votre écoute.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci pour votre exposé. Et c'est exactement ce que nous allons faire avec vous, en débutant avec le parti formant le gouvernement pour un bloc d'échange de 16 minutes. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous tous, merci d'être là. Je saute tout de suite dans la matière, parce qu'évidemment vous avez un mémoire qui est bien complet, avec beaucoup de recommandations, donc j'ai quelques questions pour vous.

D'abord, à la page 15 de votre mémoire, au sujet du rôle des travailleurs sociaux, vous mentionnez, dans votre mémoire, que l'évaluation psychosociale ne doit pas mener, par le travailleur social, à une évaluation, par contre. Vous dites que l'évaluation psychosociale ne doit pas mener, par le travailleur social, à guider quel scénario juridique devrait être emprunté. Pourtant, c'est à la base de cet acte-là, qui est un acte réservé aux travailleurs sociaux, d'évaluer l'environnement — bon, je ne vous apprends rien, là — et de faire sa recommandation par la suite. Donc, vous conseillez plutôt qu'il y ait un conseiller juridique, c'est votre recommandation, qui puisse intervenir pour lui d'un point de vue juridique, donc guider cette voie-là, une fois que le travailleur social aurait établi l'environnement, les capacités, etc. Est-ce qu'on ne vient pas alourdir le processus en agissant de cette façon-là?

M. Bibeau (François) : Dans les recommandations que la chambre vous fait, nécessairement, on prend en considération que le genre de dossier dont on est en train de parler requiert la complicité de plusieurs intervenants pour guider le justiciable. Je ne voudrais pas aller plus loin que ça dans la réponse, parce que je ne suis pas l'expert, et ce n'est pas pour rien que je suis accompagné ici, c'est un travail d'équipe. Alors, effectivement, je vous ai annoncé que nous avions une praticienne, avec nous, qui saura peut-être mieux vous expliquer comment ça peut se passer sur le terrain. Alors, je vais demander à Me Lachapelle de prendre le relais, s'il vous plaît.

Mme Lachapelle (Anne-Marie) : Bien, en fait, je dis souvent que, dans un dossier d'inaptitude, la personne qui est au centre, c'est le majeur inapte, et on est trois professionnels qui gravitons au centre de ce majeur-là. En fait, les travailleurs sociaux sont les spécialistes du besoin de protection, mais il ne faut pas oublier que les majeurs ont aussi des besoins juridiques de protection. Et je vais vous donner un exemple : madame est mariée en communauté de biens avec monsieur; madame n'a rien à son nom, hein, parce que, vous savez, anciennement, la communauté de biens, le chef de la communauté, c'était monsieur, et tout était à son nom. Donc, souvent, j'ai vu des rapports psychosociaux où on ne recommandait pas l'homologation du mandat, on ne recommandait pas l'ouverture du régime de protection parce que madame n'a rien. Attention, madame, elle a un besoin juridique, c'est-à-dire qu'étant donné qu'elle est mariée en communauté de biens elle est copropriétaire de la communauté avec son mari.

Donc, la recommandation n'est pas que nous soyons en amont avec le travailleur social, c'est que nous puissions discuter avec le travailleur social et arriver à arrimer chacun notre domaine spécifique dans un objectif de coller aux besoins du majeur inapte, tout simplement. Je ne sais pas si vous voulez compléter, là, mais...

M. Fafard (Antoine) : Oui, bien, dans le fond, vraiment, la recommandation... On a pris cet exemple-là un peu en pratique, là, mais la recommandation de la chambre, c'est de former un groupe de travail pour effectivement harmoniser les normes de pratique en fonction de l'entrée en vigueur du projet de loi qui va arriver. C'est certain que je pense que c'est quelque chose qui est important pour assurer qu'il y ait une bonne mise en oeuvre. Puis les autres professionnels impactés, principalement, justement, les travailleurs sociaux, les avocats, les notaires et les médecins, on croit que ce groupe de travail là pourrait vraiment permettre d'harmoniser les pratiques, et tout ça, de régler les problèmes sur le terrain aussi, mais le tout dans l'intérêt de la personne majeure qui doit être protégée.

M. Lacombe : Mais peut-être juste une précision, parce que ce n'est quand même pas banal, là, ce que vous dites, parce que l'évaluation psychosociale, c'est un acte réservé aux travailleurs sociaux. Et d'ailleurs Mme Ouimette, Mme Guylaine Ouimette, qui est présidente de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, a réagi à une lettre, là, dont vous avez... une chronique, en fait, dont vous avez peut-être pris connaissance, dans La Presse. D'ailleurs, je ne sais pas si vous aurez l'occasion de nous dire si vous êtes en accord ou pas. Mais, à la suite de ça, elle a dit très clairement : «Le travailleur social indique si la personne a besoin de protection et, si oui, quelle mesure est la plus appropriée, privilégiant la moins contraignante.» Donc, à mon sens et au sens de l'ordre, ça fait partie, de façon très, très claire, de leurs fonctions, de cet acte réservé là. Donc, vous, vous n'êtes pas du tout du même avis, là.

Mme Lachapelle (Anne-Marie) : Ah non, mais je pense qu'on est d'accord. En fait, c'est que le juriste, ultimement... il faut que le juriste et le travailleur social se parlent, on doit ouvrir les portes des silos. Et actuellement la pratique veut qu'on est beaucoup en silo. Mais, à partir du moment où on a une collaboration, moi, je ne fais que ça. Donc, c'est sûr qu'à partir du moment où moi, comme juriste, je peux parler au travailleur social, je vais compléter son rapport, ultimement, avec de l'information plutôt juridique et je vais être capable de l'aider à mettre le doigt sur quel est le besoin de protection, quels sont les besoins juridiques que peut-être la travailleuse sociale n'a pas ou le travailleur social n'a pas entre les mains. Puis là je vous fais... tu sais, je vous donnais l'exemple de la communauté de biens, c'est un exemple banal, là, mais c'est un exemple qu'on voit souvent.

M. Lacombe : D'accord. Merci.

M. Bibeau (François) : M. le ministre, juste parce qu'il y a peut-être un éléphant dans la pièce ici, mais je voulais quand même vous mentionner, et je l'ai mentionné dans mon allocution dès le début, la chambre est en appui à ce projet de loi là. Nécessairement, comme plusieurs d'entre vous, j'ai eu... en lisant mon journal et en sirotant mon café dimanche matin, j'ai failli m'étouffer en lisant un article qui exprime les opinions d'une chronique dans un journal. Je suis en accord avec mon homologue des travailleurs sociaux qu'il y aura besoin de ressources additionnelles à ce niveau-là, en amont dans le processus. Et je veux vous mentionner que, même avant l'idée du dépôt de ce projet de loi là, en tout début de mon mandat il y a deux ans et demi, j'avais une rencontre avec Mme Ouimette, des travailleurs sociaux, pour lui dire qu'il état de mon intention de faire en sorte que les notaires et travailleurs sociaux apprennent à travailler un peu mieux ensemble pour comprendre ce que l'autre fait, surtout dans ces dossiers-là, et arrêter de se voir comme celui qui devrait tout contrôler. On pense que ce n'est pas comme ça qu'on va y arriver. Parce que la personne qui est au centre de ces dossiers-là, ce n'est pas le travailleur social, ce n'est pas le notaire, c'est la personne en situation de vulnérabilité, et on devrait tous travailler pour cette personne-là.

• (16 h 50) •

M. Lacombe : D'accord. Bien, merci de la précision, ce n'était pas l'interprétation que je faisais de votre recommandation. Donc, je pense que je comprends mieux votre recommandation. Merci pour ça.

Et je terminerais peut-être, pour ma part, avec une question au sujet du pouvoir des notaires en ce qui a trait à l'assistant, à cette mesure qu'on veut introduire. Donc, vous suggérez que le curateur, le Directeur de la protection des personnes vulnérables, ou peu importe le nom, puisse déléguer, vous l'avez dit tantôt, à vous, les notaires, le traitement des demandes de reconnaissance d'un assistant. Donc, vous pensez que ça pourrait faciliter la nomination d'un assistant et ça pourrait éviter peut-être, selon vous, le recours à la procuration. Il y a quand même une question qui se pose, parce qu'on partirait de ce qu'on propose, c'est-à-dire un processus qui est gratuit — parce qu'il faut en parler, quand même — vous, vous avez des honoraires. Est-ce qu'on ne vient pas mettre une barrière à des gens qui n'ont peut-être pas les moyens?

M. Bibeau (François) : À notre sens, c'est vrai que c'est une question qui s'adresse. À notre sens, c'est toujours une question de choix. Par exemple, les gens ont déjà le choix de faire un mandat de protection sur un formulaire que, d'ailleurs, le Curateur public met en ligne ou fournit en version papier aussi, ou sur d'autres sites, ou il peut choisir d'aller voir son notaire pour être en mesure d'avoir un conseil juridique pour lui permettre de faire ce document-là. Dans le même ordre d'idées, la personne qui est habituée depuis des décennies de faire affaire avec le même bureau de notaire ou avec son notaire et qui a besoin de conseils, qui se sent rassurée avec cette personne-là pourrait aller le voir dans cette situation-là plutôt que d'aller au bureau du Curateur public rencontrer des gens, et ceci dit sans offense, M. le Curateur public, mais d'aller voir des gens qu'il ne connaît pas, qui seront de nature à faire monter l'effet anxieux chez lui. Alors, à ce moment-là, il serait peut-être plus en mesure de pouvoir aller chercher les conseils justifiés avec son notaire.

M. Lacombe : Vous souhaitez qu'il y ait un choix.

M. Bibeau (François) : C'est ça, dans le fond. On l'a dit dans notre présentation, c'est un choix additionnel qu'on souhaite qui lui soit donné.

M. Lacombe : D'accord. Et là je vois qu'il me reste quand même un peu plus de temps que je pensais, donc...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, sept minutes.

M. Lacombe : Pardon?

La Présidente (Mme Chassé) : Sept minutes.

M. Lacombe : Sept minutes. Je m'en permets peut-être une dernière. Deux parents comme tuteurs, qu'est-ce que... c'est une idée, là, qui est revenue, c'est une idée qui se défend, là...

Une voix : ...

M. Lacombe : ...oui, à la personne, non pas aux biens, parce que ça existe déjà. Mais qu'est-ce que vous pourriez nous dire de plus là-dessus?

M. Fafard (Antoine) : Bien, je pense qu'on profite un peu du projet de loi actuel pour ouvrir la porte, là, afin d'aider, justement, les parents d'enfants qui sont lourdement handicapés. Donc là, présentement, lorsque l'enfant atteint la majorité, il doit être nommé, justement, un seul tuteur. La situation qu'on a vue, là, qu'on a apprise aussi, là, au niveau du terrain, puis peut-être qu'Anne-Marie peut compléter par la suite, là, mais c'est que, bien, dans plusieurs cas, justement, les deux parents ont agi comme tuteurs légaux, à ce moment-là, puis ils ont vraiment géré les biens et pris en charge la personne, pris en charge l'enfant vraiment en complémentarité. Puis ça crée quand même une situation un peu difficile, problématique, de devoir nommer un seul tuteur, à ce moment-là, alors que les parents, vraiment, ont toujours agi conjointement. Donc, on se demande si ça ne pourrait pas être une opportunité, justement, à la majorité, que deux tuteurs soient nommés pour l'enfant majeur mais qui a toujours besoin, justement, d'être accompagné puis qui a toujours besoin de ses parents, étant donné qu'il est lourdement handicapé, il est lourdement inapte, à ce moment-là.

M. Lacombe : Puis, très rapidement, là, êtes-vous capables de me dire, en cas de mésentente, parce que c'est la question qui arrive tout de suite, là, est-ce que vous diriez, bien, c'est la même chose que pour un mineur ou...

M. Fafard (Antoine) : Bien, c'est sûr qu'on s'est fait aussi soulever le cas, là, s'il y avait une situation difficile entre les deux parents. À ce moment-là, c'est toujours l'intérêt de l'enfant, je crois, qui doit primer. Ça, ça pourra être déterminé lorsque la tutelle serait mise en place. Mais il ne faut pas oublier l'intérêt de l'enfant, parce qu'on s'est fait mentionner comme quoi, bien, si jamais il y a un... oui, l'enfant a deux parents, mais il y en a un qu'il n'a jamais vu ou il y en a un qui est problématique au niveau de son développement, à ce moment-là, bien, ce ne serait pas obligatoire, automatiquement, deux tuteurs, à ce moment-là, donc ça pourrait être un seul tuteur qui pourrait agir. Mais l'important, c'est que l'intérêt de l'enfant soit respecté.

M. Lacombe : D'accord. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, je cède la parole au député de Sainte-Rose. Il vous reste 4 min 30 s.

M. Skeete : 4 min 30 s?

La Présidente (Mme Chassé) : Oui.

M. Skeete : Merci, Mme la Présidente. Bien, merci pour votre exposé puis merci pour le détail avec lequel vous tentez d'éclaircir un petit peu nos travaux. En fait, sur la page 55, je veux vous ramener à vos seuils, vous parlez d'indexer les seuils. C'est vrai que ça n'a pas bougé depuis 1991. Vous avez fait le calcul pour nous, vous êtes gentils, on est rendus à 37 650 $ si on avait indexé au coût de la vie, j'imagine. Mais, à prime abord, j'aimerais ça vous entendre sur les critères pour arriver. C'est beau d'indexer, mais est-ce que, premièrement, le 25 000 $ était à la bonne place au point de départ? C'est-u suffisant? Puis je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Handfield (Nicolas) : Oui. En fait, par rapport à l'indexation, c'est sûr que c'est un calcul qui est facile, mais il y a déjà des processus qui sont en place pour ne pas utiliser ce 25 000 $ là, d'ailleurs, qui sont mis en place par le Curateur public lui-même avec Placements Québec. C'est une autre de nos recommandations. Donc, c'est déjà un besoin des parents, qui dit : 25 000 $, ça peut arriver vite, ce n'est pas le 25 000 $ d'il y a 20 ou 30 ans. Et, dans le cas d'une succession ou dans le cas d'une maison, c'est sûr que, si ça dépasse 25 000 $, là ça doit aller devant le tribunal, un conseil de tutelle, et tout ça. Qu'est-ce qu'on dit, c'est que les parents sont les mieux placés pour pouvoir décider de l'intérêt de l'enfant. La mesure est pour mettre un holà pour s'assurer que le patrimoine de l'enfant soit conservé. Toutefois, le 25 000 $ peut, dans de nombreuses situations, être dépassé, donc c'est pourquoi qu'on fait cette recommandation-là.

M. Skeete : J'y suis. Ce n'était pas tout à fait ma question. Je suis d'accord qu'après 20 ans il faut regarder... 25 ans, c'est ça, 30 ans, il faudrait peut-être voir à indexer, j'y suis. Par contre, ce n'est pas les critères. Quand on regarde pour voir... si, mettons, on va bouger, on va toucher ce montant-là, c'est quoi, les critères qu'on devrait étudier dans le but, justement, d'arriver à un montant qui non seulement répond à un besoin d'aujourd'hui puis qui va être pérenne dans le temps?

M. Handfield (Nicolas) : On ne suggère pas de critères précis dans notre mémoire. Ce qu'on pourrait suggérer, c'est d'y aller par les montants des patrimoines dans les demandes qui sont faites au tribunal puis de s'établir un montant, un pourcentage x qui serait acceptable. Mais on n'a pas déterminé de critères. Il faudrait faire une évaluation économique un peu plus exhaustive.

M. Skeete : Donc, votre réflexion se limite à dire : Ça fait longtemps que ça n'a pas bougé, il faudrait bien que ça bouge parce qu'on voit maintenant que c'est inadéquat.

M. Handfield (Nicolas) : Exactement.

M. Skeete : Mais, rendus là, vous êtes ouverts à différents scénarios.

M. Handfield (Nicolas) : Oui.

M. Skeete : Parfait. Dans votre mémoire également, vous parlez de l'assistant et vous parlez du secret professionnel. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce qu'à moins que je me trompe, si jamais je me présente voir mon avocat ou mon notaire, il est de mon droit de demander un accompagnement, ne serait-ce que c'est une personne plus aînée qui a toutes ses capacités, par contre, veut être accompagnée par son fils ou sa fille pour mieux comprendre ce qui se passe, parce que des fois ça parle vite. J'aimerais vous entendre sur le secret professionnel, à ce moment-là, versus l'inquiétude que vous avez pour le secret professionnel avec l'assistant du majeur.

M. Bibeau (François) : En tant que notaire — ça fait 31 ans, là, que je pratique le métier de notaire, et j'ai oeuvré surtout en droits de la personne et de la famille — je peux vous assurer qu'il arrive assez fréquemment, pour ne pas dire la plupart du temps, quand les personnes un peu plus vulnérables ou âgées — mais je ne veux pas faire de l'âgisme ici, là, ça peut être à plusieurs niveaux — viennent nous voir en cabinet pour une consultation sur la préparation d'un testament, un mandat ou autrement... qui sont accompagnés. Là, c'est une question de communication, ce qu'on pourrait appeler le langage neurolinguistique ou le langage non verbal, dans le sens commun où, à un moment donné, le notaire va avoir des signaux qui vont lui être envoyés sur, peut-être, un élément de captation, sur, peut-être, un élément qui lui fait penser que la personne qui est devant lui est un peu sous l'influence d'une autre personne, par exemple on pose des questions, c'est toujours l'accompagnant qui répond. Alors, l'assistant n'aura rien de... il n'y aura rien qui va changer dans ça, il va accompagner son parent puis il va répondre à la place de son parent tout le temps parce que... ça peut être juste parce que le parent est un peu anxieux parce qu'il va chez le notaire, mais ça peut être aussi parce que le parent, il a peur de se faire chicaner en sortant de là.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste très peu de temps.

M. Bibeau (François) : Alors, il peut arriver, dans certaines situations, qu'on pourrait demander, à ce moment-là, à l'assistant de nous laisser quelques moments seuls avec la personne en question.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie. Ça conclut le bloc avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, nous passons au parti formant l'opposition officielle. La députée de Westmount—Saint-Louis désire prendre la parole.

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Bien, ça fait une belle ouverture à une première question que j'ai pour vous par rapport à captation, parce que je ne savais pas qu'est-ce que ça voulait dire. Ce que je ne comprends pas... ou ça me prend une clarification pour la recommandation n° 13 : «Que soit modifié le deuxième alinéa de l'article 297.12 afin d'ajouter "Il ne peut en aucun cas agir comme témoin pour le testament de l'assisté".» Puisque la personne n'assiste pas ou n'est pas nommée dans le testament, et la personne n'est peut-être pas sous l'influence, puis, la personne, on parle de... c'est un mandat temporaire, ça fait que la personne a ses facultés. J'ai du mal à comprendre le propos.

• (17 heures) •

M. Bibeau (François) : Le fait qu'elle ne puisse être témoin à son testament?

Mme Maccarone : Bien, il n'est pas témoin. Ça fait que, pour moi, je ne comprends pas pourquoi la personne ne peut pas assister si elle n'est pas nommée parce qu'on a peur de captation, mais la personne, elle a peut-être ses facultés puis elle demande juste d'avoir de l'assistance. Alors, j'ai de la misère à comprendre pourquoi que nous aurons besoin de ceci. Puis, peut-être, c'est moi qui comprends mal parce que je ne suis pas avocate.

M. Bibeau (François) : Me Handfield va vous répondre, pour être plus précis.

M. Handfield (Nicolas) : En fait, tant qu'il n'y a pas de litige dans la famille ou de règlement... tout va bien, il n'y en a pas, de problème. C'est quand il vient des litiges en matière successorale que, là, tous les moyens sont utilisés pour faire que le testament tombe. Et un des moyens qui peut être utilisé, c'est de dire qu'il y avait captation. Donc, le moyen de faire de la captation, c'est de dire... ce n'est pas que la personne se nomme dans le testament puis que c'est un témoin, mais, par exemple, nomme son fils ou sa fille ou nomme son conjoint, donc, qui n'est pas le bénéficiaire direct, mais, dans les faits, il va en être bénéficiaire indirect. Et qu'est-ce qu'on veut éviter? C'est éviter tout type de litige qui pourrait être soulevé par la suite sur le fait que l'assistant est intervenu puis qu'il a pu peut-être se favoriser directement ou indirectement de par son rôle de proximité avec la personne.

Mme Maccarone : O.K. Une autre question, recommandation n° 10 : «Qu'il soit ajouté, à la fin du deuxième alinéa : "notamment quant aux antécédents judiciaires de la personne qui pourrait être nommée comme assistant"», est-ce que ça veut dire que cette personne serait éliminée?

M. Fafard (Antoine) : Bien, je pense que c'est certain que, si la personne a été condamnée pour divers méfaits qui sont en lien avec l'exploitation financière, l'exploitation des personnes en situation de vulnérabilité, ce serait logique que cette personne-là ne puisse agir comme assistant. Le problème avec... pas le problème, mais la préoccupation, je crois, par rapport à l'assistant, c'est que la personne... bien, l'assistant a... non, ne représente pas l'assisté, mais, quand même, a un pouvoir d'influence dans la prise de décision. M. le ministre, là, l'a confirmé, c'est une personne proche, là, il faut quand même qu'il y ait un lien, donc, puis on sait que les situations d'abus sont souvent causées par des personnes qui sont, justement... où il y a un lien de confiance au départ. Donc, je pense qu'on veut s'assurer qu'en nommant l'assistant, qui maintenant a un statut officiel par rapport à différents organismes, bien, on est certains que cette personne-là n'a pas d'antécédents judiciaires, n'aura pas, peut-être, tendance à profiter de son statut particulier pour abuser ou influencer d'une façon qui est négative, là, qui n'est pas correcte l'assisté.

Mme Maccarone : Je questionne ceci parce qu'on a déjà demandé cette question-là en commission auprès des autres personnes qui ont témoigné. Si, mettons, c'est ma nièce, puis je lui pardonne, puis moi, j'ai toutes mes facultés, puis je connais... c'est un membre de ma famille, mais là c'est la seule personne dans ma vie qui peut m'aider parce que je n'ai pas d'enfants, je ne suis pas mariée, je n'ai pas un autre proche aidant, bien, ça veut dire que la seule personne qui pourrait m'aider, ma nièce, que... écoute, c'est quelque chose qu'elle a fait quand elle avait 21 ans, c'était quelque chose de vraiment niaiseux, puis je lui pardonne, bien, elle serait éliminée avec cette clause-là.

M. Bibeau (François) : C'est ce qu'on pense qui serait prudent, là. On comprend que, dans certaines situations, au niveau émotif, ça peut être difficile à concevoir. Ceci dit... puis là je ne veux pas donner d'exemple, mais il arrive assez fréquemment qu'on soit très mauvais juge, dans ces situations, par rapport aux gens qui nous sont très proches. On a quand même regardé les statistiques au niveau de la maltraitance financière envers les personnes vulnérables, personnes âgées, handicapées, issues des données du directeur de la protection des droits de la personne et de la jeunesse, et c'est très élevé. Vous savez que la forme de maltraitance la plus répandue au niveau des personnes âgées, c'est la maltraitance financière? Juste à titre d'exemple, j'en prends une au passage parce que je ne veux pas vous assommer avec mes chiffres, là, mais, en 2016‑2017, les abus financiers représentaient 86,1 % des abus envers les personnes âgées, toutes sortes d'abus confondus. Et puis là c'est un exemple, là, puis je pourrais défiler le tableau, puis vous verriez, là, qu'il y a des années, c'est encore pire que ça. Alors, on pense qu'on n'a pas à lésiner. Je sais que ça peut être dur parfois, ça peut être difficile. Puis, comme le groupe qui nous a précédés l'a mentionné, il arrive assez fréquemment que les personnes sont assez seules, mal entourées. Alors, je sais que, dans certains cas, les rechanges ne seront pas faciles à trouver, mais on pense que c'est quand même suffisamment important, ici, pour qu'on prenne toutes les mesures pour protéger les gens qui sont au coeur de ce projet de loi là.

Mme Maccarone : Merci. L'Étoile de Pacho, un groupe que peut-être vous connaissez, ils sont passés nous voir ce matin, puis une de leur recommandation, et je les cite : «Au surplus, lorsque la demande d'ouverture d'une tutelle au majeur n'est pas contestée et que le degré de handicap est total et permanent, qu'un professionnel compétent, tel un notaire, avec l'autorisation du [Curateur public], ait le pouvoir de prononcer l'ouverture du régime avec toutes les modalités y afférentes, sans besoin d'obtenir le jugement d'un tribunal.»

M. Bibeau (François) : Bien, vous voyez, ça ne me surprend pas. C'est conforme à ce que je vous mentionnais en ouverture, comme quoi les notaires ont, depuis très longtemps, même à l'époque où le Curateur public était assis sur mon siège, à la présidence de la Chambre, alors ça fait très longtemps...

Mme Maccarone : Très, très longtemps.

M. Bibeau (François) : ...les notaires ont toujours eu...

Une voix : ...

M. Bibeau (François) : ...oui, ont, depuis longtemps, la confiance des citoyens, alors ça ne me surprend pas que ce genre de proposition là ait été faite.

Cela dit, nous croyons, comme on l'a affirmé tout à l'heure, que, dans un processus visant l'homologation, par exemple, d'un mandat ou le processus menant à la tutelle, tous les intervenants au dossier sont importants. Et, quand on entend ce genre d'intervention là, souvent, la raison pour laquelle c'est avancé, c'est pour améliorer le processus au niveau du temps. Règle générale, c'est la raison qui est avancée. Je ne veux pas, en tout respect, mentionner que ça part de fausses prémisses, mais, selon nous, là où le bât blesse, ce n'est pas à la fin du processus, c'est-à-dire au moment de l'homologation où on a le plus de temps à gagner. Mon homologue des travailleurs sociaux est venu vous le mentionner ici même, dans cette salle, ils ont besoin de ressources additionnelles... et ça, ça sera un autre débat, je sais que ce n'est pas le débat qui fait l'oeuvre présentement, mais auront besoin de ressources additionnelles pour améliorer les délais en amont du processus. Nous, on pense que, quand on est à retirer des pouvoirs à une personne sur l'administration de ses biens et les décisions concernant sa personne, et c'est notre prétention, le processus, le contrôle judiciaire est important, en bout de contrôle.

Mme Maccarone : J'ai une dernière question pour vous, et je vais passer la parole à ma collègue. Le Barreau du Québec, quand ils sont passés nous voir, ils ont fait une proposition de remplacer le terme «inaptitude» par le terme «facultés». Si cela est adopté, pensez-vous que ce serait important d'intégrer une définition de ce terme?

M. Fafard (Antoine) : Oui. Dans le fond, c'est sûr que de ce qu'on voit, présentement, dans... le nouvel article 270 parle de facultés. Le terme «facultés», effectivement, il y a le Barreau du Québec et l'Ordre des travailleurs sociaux, je crois aussi, qui ont soumis un peu la situation à l'effet que ça devrait être précisé. Je crois que nous aussi, on serait pour que ce soit précisé, parce que c'est quelque chose qui doit être pris dans l'évaluation qui va être faite par le professionnel. Donc, c'est de droit nouveau, l'ancien article ne parlait pas de facultés, à ce moment-là. Donc, on croit que ce serait important, justement, de définir ce qu'implique «facultés». Je ne me prononcerai pas par rapport... est-ce que c'est un terme qui est plus médical que d'autres, mais je crois que ce serait pertinent, effectivement, que la loi vienne le définir.

Mme Maccarone : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 1 min 15 s à la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Bien, oui. Alors, merci de votre présence. Il reste une minute, mais je vois... dans votre tout dernier paragraphe, vous nous invitez, les membres de la commission, de vous contacter si on a des questions, et je pense qu'on va s'en prévaloir.

Je trouve votre section, pages 26-27, intéressante, vous avez certainement fait la présentation, mais que la loi puisse permettre un recours à la Chambre des notaires par le rôle que vous jouez déjà et la relation de confiance, Chambre des notaires, un peu partout sur le territoire du Québec, etc., «permettre aux notaires d'effectuer la procédure de nomination de l'assistant au majeur». En 30 secondes, essayez de peut-être revenir là-dessus. Vous en avez sûrement parlé, mais...

• (17 h 10) •

M. Bibeau (François) : Bien, notre prétention, c'est que, dans la plupart des cas, ce qui va se passer, c'est que les gens vont aller voir leur notaire parce qu'ils sont habitués d'aller voir ce professionnel-là, parce qu'ils ont fait leur testament avec lui, puis là, bien, ils commencent à avoir de la difficulté, ils veulent faire une procuration. Et là le notaire va leur expliquer, de vrai, en bon conseiller juridique, qu'il y a maintenant un nouveau processus qui s'appelle l'assistance au majeur puis que voici les moyens de vous en prévaloir et voici les démarches que vous aurez à faire. Et, comme nous faisait remarquer Me Lachapelle, dans son coin, le bureau du Curateur public est à peu près à une heure de route, alors il va falloir expliquer qu'il faut que tu ailles au bureau du Curateur public... Et donc, voyez-vous?

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. Je cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke, un bloc de 2 min 40 s.

Mme Labrie : Oui, merci. Je vais rester sur le même sujet, parce que j'ai bien compris que, pour vous, c'est important que la personne puisse avoir le choix de passer par le notaire. Dans le fond, là, en ce moment, votre interprétation, c'est que, comme il n'y a pas de mention de ça dans la loi, la personne n'aurait pas nécessairement le choix, en ce moment. Donc, vous voulez que ce soit écrit explicitement?

M. Bibeau (François) : Bien, il y a un seul moyen, à l'heure actuelle, prévu dans la loi pour avoir recours au processus d'assistance, ou on appelle ça... à la mesure d'assistance, et de le faire par acte notarié, qui est un acte reconnu dans le Code civil, ce n'est pas prévu. Alors, à moins qu'on ait mal saisi, ce n'est qu'une mesure administrative. Ce n'est qu'une... excusez-moi, M. le curateur, c'est une mesure administrative qui est prévue dans le projet de loi.

Mme Labrie : O.K. Parce que je comprends que c'est vrai qu'au niveau du délai ce n'est pas nécessairement là où ça rallonge le plus. On a compris, avec d'autres intervenants, que c'est au niveau des évaluations dans le réseau de la santé que ça retarde, le processus. Mais il y a aussi la question des coûts, quand même, qui a été nommée à plusieurs reprises. Le coût des procédures judiciaires était problématique, là, dans le passé, puis ça faisait en sorte que les personnes, finalement, lorsqu'elles faisaient la démarche, elles prenaient le régime le plus... celui qui brimait le plus ses droits, finalement, là, pour éviter d'avoir à y retourner et de payer encore des frais.

M. Bibeau (François) : Là, vous parlez d'homologation du mandat de protection plutôt que de l'assistance comme telle. Alors, la question c'est rapport à...

Mme Labrie : Bien, en fait, moi, je veux juste m'assurer, tu sais, que les personnes vont avoir un accès qui va être gratuit à ces mesures-là. Donc, si on inscrit dans la loi la possibilité que c'est par le notaire... Dans les situations où le notaire... où il y a un notaire de proximité puis le Curateur public — peu importe comment qu'il s'appelle — est très loin, la personne, elle va se retrouver devant un choix où elle fait quelques heures de route ou bien elle paie pour le service, donc moi, je trouve ça problématique.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes.

M. Bibeau (François) : Effectivement, c'est... Oui, peut-être, Anne-Marie, si tu veux ajouter par rapport à la question.

Mme Lachapelle (Anne-Marie) : Bien, dans l'objectif, c'est de donner une option, au même titre qu'il y a beaucoup de gens qui viennent et qui ont déjà fait un mandat de protection avec le formulaire du Curateur public, puis c'est correct, c'est de les accompagner et donner un choix aux gens. Il y a beaucoup de gens qui font une évaluation psychosociale au privé, hein, on vous l'a sûrement dit, là, dans les trois jours, mais il y a des gens qui attendent, et qui passent dans le processus de la santé, et qui attendent neuf mois, 12 mois, et c'est gratuit. Moi, en fait, l'objectif de la chambre, c'est de donner une option aux gens, tout simplement. Mais je suis d'accord avec vous, si la personne choisit l'option plutôt administrative, le notaire va l'accompagner quand même.

La Présidente (Mme Chassé) : Je cède maintenant la parole à la députée de Joliette pour un bloc de 2 min 40 s.

Mme Hivon : Merci beaucoup. Dans mon 2 min 40 s, j'aurais trois questions, ça fait que je prends ma technique «je vous les pose les trois, puis vous vous arrangez avec ça».

Donc, la première question, c'est : Vous parlez, à vos recommandations 8 et 9, que «lorsque l'inaptitude d'une personne devient notoire, tout mandat donné par celle-ci devrait prendre fin». Ma question c'est : Qui juge que l'inaptitude est notoire? Donc, comment ça devient effectif et qu'on met fin au mandat?

La deuxième, c'est votre recommandation 7, où vous dites qu'advenant l'inaptitude du tuteur à l'enfant majeur ou le décès du tuteur légal, il devrait y avoir, donc, un mécanisme qui pourrait être fait devant notaire ou devant témoin pour prévoir un remplaçant. J'étais curieuse de savoir, en ce moment, comment ça fonctionne quand ça arrive.

Puis finalement, pour ce qui est de la transition de régime, probablement que vous ne vous rendrez pas là, mais avez-vous des craintes sur la réforme, son application puis la transition entre la situation actuelle puis la nouvelle situation?

M. Bibeau (François) : C'est drôle, parce que, pour cette dernière question là, je posais justement la question à Me Lachapelle avant de venir s'asseoir ici, puis elle me donnait déjà des éléments de réponse. Je ne sais pas, Anne-Marie, si tu veux répondre à ce petit bout-là, à tout le moins, parce que je ne sais pas qui sera le mieux entre vous deux pour répondre au reste, là.

Mme Lachapelle (Anne-Marie) : Bien, transition de régime, juste le fait que, tu sais... Vous savez, quelqu'un qui est sous curatelle ne peut pas faire de testament. Par contre, quelqu'un qui est sous tutelle, actuellement, peut faire un testament si les circonstances qui encourent la confection du testament le permettent, O.K.? Avec les articles de transition, on mentionne que tout testament qui aurait pu être fait par un majeur sous curatelle pourrait être reconnu valable. Donc là, c'est sûr qu'il y a une inquiétude à ce niveau-là, bon. Autre chose... J'ai-tu d'autres exemples?

Mme Hivon : ...notoire.

Mme Lachapelle (Anne-Marie) : Ah! l'inaptitude notoire.

M. Fafard (Antoine) : Bien, je pense que, pour l'inaptitude notoire, ce qu'on a essayé de faire... Dans le fond, on sait que la problématique par rapport à la procuration, ce n'est pas nécessairement l'instrument juridique en tant que tel. La procuration, elle est pratique, elle est simple, elle est accessible, c'est un document qui est connu. La problématique, c'est lorsqu'il y a inaptitude de fait, donc la personne n'est plus... elle est inapte dans les faits, elle n'est pas inapte juridiquement, elle n'a pas été déclarée inapte par le tribunal, donc elle n'est plus capable de surveiller, de révoquer, d'exercer un certain contrôle sur ce qui est fait. Donc, nous, à la Chambre des notaires, on est conscientisés de cette problématique-là. On sait que la notion d'inaptitude notoire existe déjà dans le Code civil du Québec. On croit qu'à ce moment-là... quelqu'un qui serait dans le coma, à ce moment-là, pourrait être inapte de façon notoire.

La Présidente (Mme Chassé) : En concluant.

M. Fafard (Antoine) : Mais on voulait vraiment lancer le débat de parler de l'inaptitude de fait dans le projet de loi, à ce moment-là.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. Deux sur trois, c'est bon?

Mme Hivon : Bien oui.

La Présidente (Mme Chassé) : J'aime l'ambition.

Mémoires déposés

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Et je vous remercie pour votre contribution aux travaux.

Nous avons accompli notre mandat et nous suspendons les travaux jusqu'à 19 h 30, où nous nous réunirons en séance de travail. Bon souper à tout le monde.

(Fin de la séance à 17 h 16)

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